des Maya - SUD Santé Sociaux 37

Transcription

des Maya - SUD Santé Sociaux 37
Numéro 16
Juin 2016
des Maya
Supplément féministe de l’Echo des fourmis
M
aya Surduts est décédée le 13 avril à l’âge de 79 ans. C’est une figure incontournable du féminisme français, une militante et une camarade qui s’en est allée. Maya en née en 1937 en
Lettonie dans une famille Juive Communiste. Elle fuit le nazisme avec ses parents en 1938 et
s’installe dans le sud de la France. Arrêtés par la Gestapo en 1942, ils parviennent à fuir en Italie
jusqu’à la fin de la guerre. Puis à 11 ans elle s’installe avec sa mère en Afrique du Sud où celle-ci
milite contre l’apartheid.
Jeune adulte elle parcourt le monde. Elle vit successivement en Suisse, aux Etats-Unis en 1963 où
elle participe aux mouvements pour les droits civiques des noir-es, puis à Cuba où elle va vivre pendant 8 ans l’espoir de
la révolution cubaine avant d’être expulsée pour avoir critiqué le régime de Fidel Castro.
Au début des années 70 elle revient en France et s’engage pleinement dans le combat féministe. Après mai 68, c’est le
droit à l’avortement qui constitue le cœur de la lutte. Elle participe à partir de 73 au mouvement du MLAC (Mouvement
pour la liberté de l'avortement et de la contraception). Cette association fut créée pour obtenir la légalisation de l’IVG, et
aider les femmes qui le souhaitaient à avorter, en pratiquant des IVG, en organisant des voyages collectifs à Londres ou
Amsterdam pour des femmes enceintes de plus de 12 semaines notamment.
En 1990, pour lutter contre les « commandos » menés par des réactionnaires intégristes envers les centres-IVG, Maya
participe en 1990 à la CADAC (Coordination des Associations pour le Droit à l'Avortement et à la Contraception) et en
devient la présidente. Son combat débouche en 1993 sur l’instauration du délit d’entrave à l’avortement.
Son combat féministe la conduit en 1995 à participer à la création du CNDF (Collectif national pour les droits des femmes) avec de nombreuses associations, syndicats, partis politiques. Elle y milite pour l’égalité réelle entre les femmes et
les hommes jusqu’au bout.
«Les violences sexuelles et sexistes sont
inscrites dans le socle de notre société.»
Ainsi parle Marie Pesé, psychanalyste et experte de la
souffrance au travail. « 80% des femmes en situation de
souffrance au travail que je reçois ont subi un ou plusieurs
des cinq facteurs suivants : une discrimination de système,
du harcèlement sexiste ordinaire, du harcèlement sexuel,
des agressions sexuelles et certaines des viols. »
La médiatisation d’une enquête sur les violences sexistes
et sexuelles en politique a permis de remettre sur le devant
de la scène ce fléau qui touche tous les pans de notre
société: en politique mais aussi au travail, à la maison,
dans la rue.
Elle montre aussi combien il est difficile pour les femmes
de parler et surtout d’être entendues et accompagnées
quand elles parlent et dénoncent les violences qu’ elles
subissent. Difficile, car révéler, pour les femmes, c’est se
mettre en danger, notamment parce qu’elles sont en
majorité en position de subordination au travail ou en
situation de monoparentalité et
qu’elles risquent de perdre leur
travail. Nous ne pouvons alors que
souligner le courage de ces
femmes qui prennent la parole et
leur apporter tout notre soutien.
Les luttes féministes sont bien
toujours d’actualité et nécessaires
pour combattre cette société
patriarcale porteuse de nombreuses inégalités et de
violences envers les femmes.
Tant qu’il le faudra, féministes!
Voici deux outils pour se renseigner et agir face aux violences
sexistes et sexuelles au travail:
Le site internet Souffrance et travail, qui propose des infos
pratiques et législatives ainsi que des dossiers autour de la
souffrance au travail, dont un guide des violences sexuelles et
sexistes au travail: http://www.souffrance-et-travail.com/
Le site internet de l’AVFT, l’Association contre les Violences
Faites aux Femmes au Travail, qui accompagne les femmes dans
leurs recours contre les agressions au travail: www.avft.org
SUD SANTÉ SOCIAUX INDRE ET LOIRE
18 rue de l’Oiselet, La Camusière 37550 St Avertin
permanence le lundi de 9h à17h tel 02 47 71 00 65 Tous les jours :Portable : 06 15 08 62 22
mail: [email protected] site internet: http://www.sudsantesociaux37.org
Santé au travail : encore des inégalités femmes/hommes
L
e fait de ne pas prendre en compte la question
du genre dans la santé au travail* est un frein à
l’égalité femmes/hommes au travail.
* (statistiques sexuées des accidents du travail, des
maladies professionnelles, étude des postes et
conditions de travail…)
Près de la moitié des femmes travaillent dans
une dizaine de métiers sur 86 répertoriés. A
contrario, les 10 métiers les plus occupés par les
hommes ne concentrent que 30% d’entre eux.
Il y a 80% de femmes dans les métiers du soin, du
nettoyage, des employé-es de bureau, 67% de femmes dans l’éducation, 85% d’hommes dans la construction, les métiers manuels de l’artisanat (chiffres
DARES 2013).
Historiquement la médecine préventive du travail
s’est développée pour mettre un terme aux accidents gravissimes, souvent mortels, créés par la
révolution industrielle. Les femmes, présentes dans
les usines, étaient reléguées à des emplois en bas
de l’échelle hiérarchique, à des postes moins autonomes, plus répétitifs considérés comme moins
dangereux. Pour autant leurs emplois étaient
usants, toxiques (fabrique d’allumettes utilisant le
phosphore blanc pouvant nécroser la mâchoire,
blanchisseries, conserveries, filatures puis industrie
textile). Les hommes entretenaient les machines,
donnaient les ordres, les femmes étaient cantonnées au travail sur les chaines. Leur salaire était
considéré comme salaire d’appoint.
Quand elles
se révoltaient
contre leurs
conditions de
travail pourries,
elles
n’étaient soutenues ni par
les syndicats
menés par les
hommes « si c’est trop dur, restez chez vous… », ni
par les médecins, des hommes aussi « ces femmes
sont hystériques » .
Les risques sous évalués
Il existe une sous-évaluation de l’exposition aux
risques et pénibilités des femmes. Elle est liée à
une invisibilité des risques pour certains emplois
ou secteurs à prédominance féminine (service, soin,
commerce, administratif…) compte tenu du fait
qu’ils ont été longtemps considérés comme « légers
» au contraire des emplois ou secteurs « lourds » à
prédominance masculine (BTP, industrie, énergie…).
Par exemple, depuis combien de temps sait-on qu’une
caissière soulève 800 kg par heure, soit plus de 5
tonnes en une journée de 7 heures. Elle cumule
cette charge physique, cause de troubles musculo
squelettiques avec des horaires flexibles difficiles à
concilier avec vie familiale, un temps partiel imposé,
salaire réduit ...
Elle est liée aussi à un manque de prise en compte
dans l’évaluation des risques et de leurs impacts
des différences d’expositions dues à certaines différences biologiques (morphologie, taille, fonctions
reproductives...) ou à des rapports ou rôles sociaux
distincts (sexisme, contraintes de la vie personnelle
et familiale…).
Aujourd’hui, les pouvoirs publics commencent à
entendre ce que disent depuis de nombreuses années des chercheurs et chercheuses au sujet de la
santé des femmes au travail.
A savoir qu’une étude des statistiques sexuées sur
la santé au travail démontre des différences notables.
Des atteintes à la santé différentes
Plus d’hommes sont exposés à des agents chimiques toxiques (substances cancérogènes), au bruit,
aux vibrations. Les femmes sont plus nombreuses à
être exposées à des risques biologiques (santé,
soins aux personnes). En ce qui concerne le port de
charges lourdes, les hommes sont plus affectés par
le port d’objets et les femmes par le port de personnes. Pourtant, la perception des risques immédiats
pour la santé est plus forte chez les hommes que
chez les femmes.
Les femmes travaillent dans un nombre limité
de branches professionnelles
Les femmes, en majorité, ne travaillent pas dans le
même secteur que les hommes, et quand elles le
font, elles ne font pas le même travail.
L’écho
des Maya
2
Quand on y ajoute les différences dans les
parcours professionnels (temps partiel, formation, précarité) et les contraintes liées au non
partage des taches ménagères, les femmes
payent cher. Après 50 ans, l’abandon du marché du travail est plus fréquent chez les femmes .
80% des maladies professionnelles des femmes sont dues à des TMS Troubles musculo
squelettiques.
Entre 2011 et 2014, on constate une augmentation hallucinante des maladies professionnelles de plus de 158% chez les femmes et
de 82% chez les hommes. On observe aussi
une baisse globale des accidents de travail
mais celle-ci cache une augmentation chez
les femmes de plus de 24% compensée par
une baisse chez les hommes de moins 28%...
Charge maximum
dans le Code du Travail
Article R231-72 : « Un travailleur ne peut être
admis à porter d’une façon habituelle des
charges supérieures à 55kg qu’à condition d’y
avoir été reconnu apte par le médecin du travail sans que ces charges puissent être supérieures à 105 Kgs. »
Article R234-6 : Pour les travailleuses, le
poids maximum de charge pouvant être porté
a été fixé à 25kgs.
Un patient pesant en moyenne 65 kgs, on
constate alors que lors du levage des personnes, ces limites sont largement dépassées
quotidiennement pour les soignantes.
Pas surprenant qu’ 1/3 des aides soignantes
par exemple, terminent leur carrière en invalidité, épaules et rachis usés!
Références à la rédaction de cet article: http://
travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2013-079.pdf, Magasine HesaMag N° 12 l’ETUI, rapport de l’ANACT sur sinistralité au travail du 8 mars 2016.
Lectures pour aller plus loin: « Les femmes ont
toujours travaillé » de Sylvie Schweitzer, « Le quai
de Ouistreham » de Florence Aubenas.
A
ide à la personne : En 2012, plus d’1 million
de salarié-es dont 92% de femmes travaillent dans
le secteur d’aide à la personne. 60 % d’entre elles sont
employées directement par le particulier. Elles travaillent seules, manipulent des produits toxiques (ménage),
des charges lourdes (soulèvement de personnes dépendantes), peuvent subir des pressions psychologiques et sont peu ou pas suivies par la médecine du travail. Ce sont les « invisibles ». En région parisienne
elles sont en grande majorité étrangères ce qui rajoute
à leur précarité.
L
e cancer du sein:
La littérature scientifique sur ce cancer quasi
exclusivement féminin est
plus récente et moins
abondante que celle sur le
cancer du poumon, principale cause de mortalité
par cancer des hommes.
Manque d’intérêt scientifique, donc carence dans la
politique de prévention et
bénéfices supplémentaires pour l’industrie pharmaceutique…
Le risque est augmenté
de 50% chez les infirmières, serait multiplié par 4
dans certaines professions qualifiées. Une hypothèse serait le rôle joué
par le stress au travail.
D’autres liens apparaissent dans les recherches :
risque de cancer du sein
multiplié par 5 chez les
coiffeuses, les esthéticiennes et les travailleuses du
secteur alimentaire. Il est
multiplié par 4,5 chez les
travailleuses du nettoyage
à sec et de la blanchisserie, par 4 chez les ouvrières de l’industrie papetière…
Les risques professionnels expliquant ces chiffres : des substances chimiques comme le benzène et d’autres solvants,
les hydrocarbures aromatiques polycycliques, les
pesticides et de nombreux
autres perturbateurs endocriniens. Le travail de
nuit et les rayonnements
ionisants sont également
épinglés.
Chiffres issus d’une étude
d’aoùt 2015 du Fonds du cancer du sein aux états unis.
L’écho
3
des Maya
Les chiffres des inégalités femmes/hommes
dans la fonction publique hospitalière
L
e ministère de la Fonction Publique vient de
publier l’édition 2015 du rapport annuel sur
l’égalité professionnelle entre les femmes et les
hommes dans la fonction publique. Nous reproduisons quelques chiffres ci-dessous, chiffres qui
confirment de nouveau les inégalités entre les
femmes et les hommes dans la Fonction Publique Hospitalière (FPH). Ce n’est pas nous qui le
disons mais le ministère!
24,8% de femmes titulaires de la FPH sont à
temps partiel contre 6% des hommes. C’est la
réduction du temps de travail (passage au temps
partiel, réduction des heures supplémentaires)
des femmes suite à une naissance qui est la principale cause de la diminution de leur salaire et la
raison majeure pour laquelle la maternité peut
contribuer à accentuer les écarts de rémunération entre femmes et hommes (cf tableau ci-joint).
En préambule, les résultats de ces travaux montrent :
Qu’un écart de salaire moyen de 12 % entre
les femmes et les hommes persiste dans la
fonction publique, contre 19 % dans le secteur
privé
Que la concentration des femmes ou des hommes dans des types et niveaux d’activité et
d’emploi différents a des conséquences sur les
écarts de rémunération
Que la maternité est une source d‘inégalités
salariales les écarts de rémunération entre les
femmes et les hommes s’accroissent tout au
long des carrières.
Effet de la naissance d’un enfant sur le salaire journalier
3 années après cette naissance
les femmes
les hommes
1ère naissance
- 2,7%
+ 1,4%
2ème naissance
- 7,5%
+ 1,6%
3ème naissance
- 15,2%
+ 34,3%
Alors que faire? Le ministère se contente de ce
rapport de situation comparée 2015 sans proposer d’action concrète ni de financement de ces
actions. Et en parallèle, le gouvernement supprime les ABCD de l’égalité dans l’enseignement,
l’obligation de réaliser ces rapports de situation
comparée et de mettre en place des actions pour
corriger ces inégalités.
L
a FPH compte 73 % de femmes en catégorie
A (en forte progression depuis le passage en
A du corps des infirmiers), 83 % en catégorie B et
78 % en catégorie C. Les filières administrative et
soignante comptent 9 femmes pour 10 agents,
alors que la filière « technique ouvrier » ne compte que 35 % de femmes.
Alors que pour SUD, combattre ces inégalités
criantes et obtenir des résultats, c’est, notamment:
Toutes catégories confondues, la FPH reste le
versant le plus féminisé des 3 fonctions publiques
avec 77 % de femmes, proportion qui atteint 87
% dans les Etablissements d’Hébergement pour
Personnes Agées Dépendantes (EHPAD).
Lutter contre les stéréotypes qui cantonnent les
femmes dans certains métiers et leur fait subir
la double journée de travail.
Diminuer le temps de travail pour toutes et tous
et mettre en place des modes de garde individuel et collectif en nombre suffisant et gratuit.
La pension de retraite
mensuelle brute est
en moyenne de 1466
euros pour les femmes et 1567 euros
pour les hommes. Le
salaire moyen brut est
de 2104 euros pour
les femmes et 2707
euros pour les hommes.
Augmenter les salaires en général et ceux des
métiers exercés plus particulièrement par les
femmes.
A travail égal, salaire égal!
L’écho
4
des Maya