Fiche 4 Comité de bassin d`emploi de Lille - I-Ville
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Fiche 4 Comité de bassin d`emploi de Lille - I-Ville
Fiche 4 Comité de bassin d’emploi de Lille Soutien aux activités économiques des personnes issues de l’immigration Résumé : Le CBE de Lille a créé en son sein une mission de “Soutien aux activités économiques des personnes issues de l’immigration”. Celle-ci emploie un permanent à temps partiel. Objectif : mobiliser les personnes issues de l’immigration et engendrer des projets de création d’activité, en amont des structures classiques d’accompagnement à la création. En effet, le public visé profitait peu des dispositifs traditionnels. Encore en phase d’expérimentation, la mission cherche à ancrer l’appui à la création d’activité comme un véritable système sur le territoire. I. ANALYSE DE L’ACTION Le Comité de bassin d’emploi couvre un territoire comportant 101 communes situées autour de Lille et regroupant 750000 habitants. Le CBE existe depuis 1982; son action s’articule autour de 4 missions principales : - hébergement des relais techniques territoriaux du conseil régional (mise en œuvre d’une politique de formation professionnelle centrée sur les jeunes et les adultes demandeurs d’emplois) ; - mission d’appui aux PME-PMI dans leurs projets complexes impliquant les ressources humaines (dans le cadre d’un PIC-ADAPT) ; - développement d'activités pour l’emploi des jeunes (notamment programme “Nouveaux Services, Emplois Jeunes”) ; - mission “Soutien aux activités économiques des personnes issues de l’immigration”. Un comité de pilotage de cette dernière mission regroupe le FAS, l’équipe locale d’animation du dispositif NSEJ, le conseil régional et la Caisse des dépôts au sein du CBE. Origine de l’action Désigné par le préfet de région, le CBE “pilote” le programme “Nouveaux Services” sur son territoire depuis 1998. Une équipe technique déploie un programme d’actions qui permet de développer, professionnaliser et pérenniser les nouvelles activités. Au début du programme, les premiers projets émergeaient rapidement. Mais les responsables du CBE se sont aperçus que certains territoires - les quartiers défavorisés - et certaines populations - les jeunes issus de l’immigration - en étaient peu bénéficiaires. Au cours de la réflexion sur le projet, le Comité de bassin d’emploi est amené à faire les constats suivants : - les structures existantes d’accompagnement aux créateurs bénéficient très peu aux jeunes issus de l’immigration, parce qu'elles sont peu lisibles pour ce public ; - ayant connu beaucoup d’échecs, le public en question peine à se projeter sur ce genre de perspectives. Face à ces constats, une mission spécifique est mise en place pour appuyer la création d'activités par des jeunes des quartiers euxmêmes 1. Une action de mobilisation du public sur la création d’activité est lancée. La mise en place d’un processus d’accompagnement lié aux structures d’aide à la création apparaît comme une solution à explorer. La mission “Soutien aux activités économiques des personnes issues de l’immigration” naît de ces réflexions. Elle résulte de l’interaction entre une volonté politique forte des élus du CBE et l’expérience (associative et militante) du chargé de mission qui devait par la suite être recruté. Ce dernier a en effet largement contribué à l’élaboration du projet de la mission. Objectifs et publics visés À l’origine, le public visé est celui des personnes résidant dans les quartiers relevant de la politique de la Ville, dont une grande partie est issue de l’immigration. Les jeunes font l’objet d'une attention particulière (cf. origine de l’action), mais non exclusive. Quatre objectifs sont définis dès le départ : - créer et assurer un contact permanent avec La parution de la circulaire conjointe Ministère de la Ville/Ministère de l’Emploi et de la Solidarité la même année, insistant sur la nécessité de créer des emplois jeunes dans les quartiers sensibles a contribué à cette mobilisation. 1 VOLUME 1 - 2000 - 37 les jeunes issus de l’immigration dans les quartiers sensibles ; - mieux accompagner les candidats créateurs ; - faire émerger de nouveaux créateurs potentiels ; - favoriser l’accès des jeunes issus de l’immigration aux emplois jeunes. La mission se situe sur l’émergence de projets. Elle ne porte pas sur l’accompagnement à la création. Celui-ci relève des structures spécialisées. Le financement annuel se situe aux alentours de 300000 F. Il est prévu sur une durée de trois ans (jusqu’à mars 2002). Démarche et méthodologie L’action portée de la mission découle d’une démarche pragmatique et empirique. - La première intervention a consisté à entrer en contact avec les jeunes visés et à les mobiliser. Le CBE a privilégié un premier contact à partir des candidatures refusées à la mairie de Lille pour des emplois jeunes. En effet, 6 000 candidatures avaient été reçues par la Ville pour 400 postes effectifs. Le CBE a estimé que, si ces jeunes s’étaient positionnés sur des nouveaux services, certains seraient sans doute intéressés par la création d’une activité. Un courrier a été adressé par la mission locale de Lille à tous les jeunes issus des quartiers en difficulté ayant déposé une candidature refusée par la mairie (3860 jeunes). On leur proposait de reprendre contact avec le chargé de mission du CBE à l’occasion de permanences organisées dans chaque quartier. 461 avaient quitté la région ou n’habitaient pas à l’adresse indiquée. 780 ont répondu positivement au courrier et 161 se sont déplacés, ce qui correspond à résultat de 5 % sur les 3860 jeunes concernés. Le chargé de mission a conduit un entretien avec chacun d’eux. Cela a permis : - de vérifier s’ils étaient toujours disponibles (la relance ayant eu lieu plusieurs mois après le dépôt de leur candidature) ; - de mettre à jour et valoriser une base de données de candidats au sein de la mission locale ; - de les positionner sur de nouvelles offres de la mairie dans le cadre du programme “Nouveaux Services, Emplois Jeunes” ; - d’aborder avec eux la création d’activité. 38 Ce repérage a été complété grâce aux relations tissées par le chargé de mission dans sa vie professionnelle antérieure. Actuellement, le chargé de mission travaille avec certains jeunes sur la base de rendezvous; avec d’autres, il travaille comme un animateur de rue, sur le lieu de vie des jeunes, sans relations formelles. Il aide les jeunes potentiellement porteurs de projet à réfléchir à leurs compétences, à faire émerger et à formaliser des idées et les accompagne dans leurs réflexions. Les jeunes en recherche d’emploi sont orientés vers la Mission Locale. - Le travail de mobilisation nécessaire présentait une ampleur impressionnante. Et il convenait d'élargir les efforts d’émergence en développant la présence de la mission auprès du public ciblé. Du coup, le CBE a suggéré à la Ville de Lille de créer trois postes supplémentaires. Trois “agents d’émergence et de développement de micro-activités” sont en cours de recrutement au sein de la mission locale de Lille sous contrats emplois jeunes. L’action des agents d’émergence, comme celle du chargé de mission, se situe dans les premières phases du parcours du créateur : la phase de mobilisation et l’accompagnement dans le passage de “l’idée” au “projet plus formalisé”. Leur mission consistera à la fois à susciter chez ce public l’envie de créer et à engager une démarche de développement d’activités sur les quartiers. Les phases suivantes nécessitent un véritable accompagnement dans la structuration du projet. Une articulation avec les structures d’appui existantes au niveau local est donc en voie d'élaboration. - Un comité d’accès est en cours de constitution. Il réunit les principaux partenaires : mission locale, CBE et structures d’accompagnement et de financement à la création d’entreprises. Il devra valider l’intérêt des projets qu’auront suscités les trois agents d’émergence et orienter les porteurs de projets vers les structures d’appui appropriées. - La mise en œuvre des projets de création fait l'objet d'une réflexion. En effet, les porteurs de projets actuellement suivis sont prêts à monter leur activité. Mais la plupart ne souhaitent pas devenir chefs d’entreprise ou responsables de leur association. Il est délicat d’inciter des jeunes sans expérience et parfois en difficulté à se lancer seuls dans une création. Le CBE étudie des systèmes LUTTER CONTRE LES DISCRIMINATIONS RACIALES SUR LE MARCHÉ DU TRAVAIL d’accompagnement et de portage collectif de l’activité : couveuse d’entreprise à l’essai, portage par le biais du programme emplois jeunes dans une association existante. La mission s’est construite dans le cadre d’un partenariat étroit avec la mission locale. Celle-ci a été associée à la réflexion. Elle fait partie des partenaires opérationnels. Le travail de ces deux partenaires devra compléter les efforts des acteurs de quartiers. Notamment, les commissions économiques, pour lesquelles la création d’entreprise n’est pas une piste de travail et de réflexion habituelle. cours, potentiel de 58 emplois. • Préfiguration d’un dispositif cordonné d’émergence et d’accompagnement des projets des personnes issues de l’immigration • Mise en place des trois agents d’émergence (en cours). • Lancement de l’appel d’offres pour les 40 RMistes, candidats à l’auto-emploi. Le CBE désire ancrer la création d’activités sur les territoires prioritaires de la politique de la Ville. Une modélisation devra permettre un transfert dans des quartiers d’autres communes du bassin d’emploi de Lille. II. ENSEIGNEMENTS DE L’ACTION En outre, un projet d’accompagnement spécifique pour les RMistes souhaitant créer leur activité est en phase de mise en place par le PLIE de Lille en partenariat avec le CCAS de la Ville de Lille et le Comité de bassin d’emploi. Un appel d’offres a été lancé pour accompagner en entrées et sorties permanentes 40 RMistes ayant des projets de création, repérés par le CCAS. Lien avec la politique de la ville Les chefs de projets “contrat de ville” et les animateurs des lieux ressources (antennes de quartier de la mission locale) sont impliqués dans le déroulement de la mission “Soutien aux activités économiques des jeunes issus de l’immigration”. Ils interviennent aussi dans la mise en place des trois agents d’émergence. Dès le départ, le chargé de mission les a associés à sa démarche. Il s'est intéressé à leur territoire d’intervention et aux projets de création de services qu’ils avaient pu relever. Pour le CBE, la mission doit pouvoir démultiplier son action. Et les dynamiques qu’elle génère doivent être saisies par les acteurs du territoire. Le travail en lien avec les opérateurs de la politique de la Ville vise aussi à pérenniser la mission. Dans certaines communes, le chargé de mission participe aux commissions économiques de la politique de la Ville (Loos, Ostricourt) afin de promouvoir la création d’activité. Le chargé de mission siège aussi au comité de pilotage des “Jeudis de la Ville”, aux côtés des opérateurs des contrats de ville à un niveau régional. Résultats et perspectives • Rencontre de 160 jeunes sur les quartiers de Lille, constitution d’une candidathèque et premier repérage de projets : 33 dossiers en La démarche est en phase d’expérimentation. Elle se caractérise par la reconnaissance d’un potentiel de créativité dans les quartiers et par la volonté du CBE d’apporter aux personnes issues de l’immigration résidant dans ces zones un accompagnement spécifique. Nombre de facteurs ont contribué au bon développement de l’action : une volonté politique forte, conjuguée à l’expérience de terrain, la connaissance du public, des associations d'aide à l'intégration des populations issues de l'immigration et des réseaux d’insertion… Aujourd’hui, la création d’activité ne constitue pas encore un moyen reconnu pour agir contre le chômage. Le développement d’initiatives issues des quartiers est une piste de travail et de réflexion encore difficile à faire prendre en compte par les acteurs. La mission du CBE cherche à inverser cette tendance. Elle parie sur la capacité de création des jeunes tout en reconnaissant que ce public exige un travail d’accompagnement dans la proximité et la durée avec des outils et des méthodes adaptés. Si le temps nécessaire pour convaincre et mettre en place un préprojet est souvent important, il reste que les jeunes sont reconnus comme étant des créateurs potentiels. Ils sont appelés à s’inscrire dans une démarche de porteur de projet, ce qui modifie totalement leur image. Le risque d’échec est réduit par le développement d’un accompagnement adapté et une approche collective mettant en jeu diverses catégories d’acteurs sur le territoire. À terme, ce dispositif pourra bénéficier à d’autres publics. En outre, on notera l'aspect novateur de la démarche initiale : récrire à des jeunes qui ont fait acte de candidature auprès d’une collectivité. Une action positive de la part VOLUME 1 - 2000 - 39 d’un jeune (faire acte de candidature) ouvre ainsi une porte, même en cas d’échec de la demande originale. Enfin, le fait d’aller à la rencontre des jeunes sur leurs lieux de vie permet d’éviter une éventuelle “sélection” du public et de travailler avec des personnes qui ont réellement besoin d’un accompagnement. Contacts Bouziane Delgrange, chargé de mission CBE de Lille Tél. : 0328380410 Annick Dubois, déléguée du CBE de Lille Tél. : 0328380410 Corinne Tignon et Nathalie Desmaret Mission locale de Lille Tél. : 03201485 50 Voir aussi : Contrat de ville de l’agglomération de Lille Métropole Le document commun d’orientation propose la mise en œuvre d’un plan concerté de lutte contre les pratiques de discriminations à l’embauche. L’intégration et les discriminations constituent un thème transversal, que le contrat de ville inscrira dans ses priorités et ses plans d’action. La réduction des facteurs de discrimination (en particulier liés à l’origine) sera recherchée dans la mise en œuvre du contrat de ville. 40 LUTTER CONTRE LES DISCRIMINATIONS RACIALES SUR LE MARCHÉ DU TRAVAIL