donovans restaurant saint kilda melbourne
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Canadian AIDS Society CANADIAN R É S E A U H 1 V-A I D S JURIDIQUE L E G A L . CANADIEN NETWORK V I H » S I D A Société canadienne du stda Test de sérodiagnostic du VXH et confidentialité : un document de travail préparé par RALF JURGENS et MICHAEL PATT ES pour le RÉSEAU JURIDIQUE CANADIEN VIH/SIDA et la SOCIÉTÉ CANADIENNE DU SIDA wc 503.1 J95 i-97 MARS 1997 INSPQ 3 5 5 Of - Montréal II 4007 DE MENTANA, MONTRÉAL, QUÉBEC, CANADA H2L 3R9 http://www.odyssee.net/-lulube T E L : (514) 526-1796 FAX: (514) 526-5543 e-mail: [email protected] Publié par le Réseau juridique canadien VIH/sida et la Société canadienne du sida. Pour information sur ce document, veuillez contacter : Réseau juridique canadien VIH/sida 4007, rue de Mentana Montréal (Québec) H2L 3R9 Téléphone : (514) 526-1796 Télécopieur : (514) 526-5543 Courrier électronique : [email protected] Site Web: http://www.odyssee.net/--jujube © Réseau juridique canadien VIH/sida et Société canadienne du sida ISBN 1-896735-07-X Mars 1997 Institut national de santé publique du Québec 4835, avenue Christophe-Colomb, bureau 200 Préparé parMontréal (Québec) H2J 3G8 Tél.: (514) 597 0606 j ^ f j û r g c n s et Michael Pâlies pour le Projet conjoint sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida Réseau juridique canadien VIH/sida 4007, rue de Mentana Montréal (Québec) H2L 3R9 téléphone (514) 526-1796 • télécopieur (514) 526-5543 courrier électronique: [email protected] • site Web: http://www.odyssee.net/~jujube Société canadienne du sida (Bureau de projet à Montréal) Téléphone (514) 987-3000 - poste 6937# • télécopieur (514) 987-3422 Remerciements Les auteurs remercient Louise Shap pour son aide à la recherche et dans la révision; Anne Stone pour la compilation bibliographique, des entrées de texte,et son aide quotidienne; William Flanagan, Anne Vassal et Tasha Yovetich pour leurs commentaires sur des versions précédentes; Sharon Baxter et Russell Armstrong pour leur appui au projet; Garry Bowers pour la révision du texte anglais; Jean Dussault pour la traduction française et pour son appui; les membres du comité aviseur national du projet, ainsi que Tracey Donaldson, Reeta Bathia, Barbara Jones, Betsy MacKenzie, Anne Malo et Robert Shearer, de Santé Canada, pour leur appui; et toutes les personnes nommées dans les notes de référence, pour avoir pris le temps de nous faire parvenir de précieux renseignements. Ce projet a été financé par ITJnité des soins, du traitement et du soutien pour le VIH/sida et par les Programmes de prévention et d'action communautaires sur le VIH/sida, de Santé Canada, dans le cadre de la Stratégie nationale sur le sida, Phase IL Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs et ne représentent pas nécessairement celles de Santé Canada, du Réseau juridique canadien VIH/sida ou de la Société canadienne du sida. Les opinions exprimées par les personnes interrogées sont personnelles et ne représentent pas nécessairement celles des organismes ou groupes auxquels elles peuvent être affiliées. Le genre masculin est utilisé sans discrimination et dans le seul but d'alléger le texte. This document is also available in English. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Table des matières Sommaire I Glossaire VI A. B. INTRODUCTION 1 Historique 1 2. Activités entreprises 2 3. Prochaines étapes 3 4. Portée et objectifs du Document de travail 3 5. Limites (1) Modifications au cours du temps (2) Degré de détail (3) Autres pays (4) Réponses 5 5 6 6 6 _ QUESTIONS ET PRÉOCCUPATIONS 7 1. Historique (1) Points de vue (2) Émergence d'un consensus (3) Questions controversées (4) Aspects problématiques 7 8 8 9 9 2. Le présent et l'avenir (1) Introduction 10 10 (2) Réexamen des questions 11 (i) (ii) (iii) Nouveaux traitements Trousses de test à domicile Couibe démographique changeante de l'infection à VIH 10 10 11 3. Avantages et préjudices du test (1) Les premières années — 1985-88 12 14 (2) De 1989 à 1992 16 (3) De 1992 à nos jours 18 (i) Avantages et préjudices pour les personnes (ii) Avantages pour la communauté (i) Avantages et préjudices pour les personnes (ii) Avantages pour la communauté (i) Avantages et préjudices pour les personnes (ii) Avantages pour la communauté C TEST VOLONTAIRE La question du consentement 1. 14 15 16 16 18 20 22 Historique (1) Association du Barreau canadien — Ontario (2) Comité consultatif national sur le sida (3) Société royale du Canada 23 23 23 24 (5) (6)* (7) (8) (9) 25 25 26 26 26 (4) Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le sida Comité parlementaire sur le sida Commission de réforme du droit de l'Ontario Comité sida d'Ottawa Association canadienne de santé publique Association médicale canadienne 25 2. Situation actuelle 27 3. Évaluation 29 4. Conclusions 33 5. Exceptions (1) Test des donneurs de sang, d'organes, de sperme ou de produits corporels similaires (2) Test à des fins de recherche — dépistage anonyme non relié 33 (i) Historique Développements internationaux Développements au Canada Lignes directrices fédérales A utres approches Situation actuelle - îi 33 34 35 36 37 37 39 40 (ii) (iii) (iv) D. Le débat Consentement éclairé Connaissance de l'état sérologique à l'égard du VIH Préjudice pour les participants s Évaluation Consentement éclairé Connaissance de l'état sérologique à l'égard du VIH Préjudice pour les participants Conclusion 40 41 42 44 46 46 47 47 4g COMMENT PROCÉDER AU TEST VOLONTAIRE? TEST ANONYME VS AUTRES FORMES DE TEST 49 1. Terminologie 50 2. Historique 50 Situation actuelle 52 3. 4. (1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) Association du Barreau canadien - Ontario Comité consultatif national sur le sida Société royale du Canada Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le sida Comité parlementaire sur le sida Commission de réforme du droit de l'Ontario Comité sida d'Ottawa Association canadienne de santé publique (1) Accès au test (2) Test anonyme 50 51 5i 51 52 52 52 52 53 54 r Evaluation 55 (i) 56 57 5g 58 59 60 60 61 61 62 (1) Accès au test (2) Test anonyme (ii) Avantages à rendre disponible le test anonyme Incitation au test Incitation des personnes vulnérables Effet néfaste de l'abolition du test anonyme Counselling Préoccupations quant à l'implantation du test anonyme Cueillette de données épidémiologiques Relance des contacts Coût des programmes de test anonyme Taux d'assiduité au rendez-vous pour obtenir le résultat • M- 56 56 (iii) (iv) 5. E Évaluation Réévaluation Disponibilité de nouveaux traitements Trousses de test du VIH à domicile Préoccupations dépassées Conclusions 55 COMMENT PROCÉDER AU TEST VOLONTAIRE? COUNSELLING $7 1. Historique (1) Comité consultatif national sur le sida (2) Société royale du Canada (3) Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le sida (4) Association canadienne de santé publique (5) Ministère de la Santé de l'Ontario (6) Association médicale canadienne 57 68 68 68 68 69 69 2. Situation actuelle 70 3. Évaluation 70 (1) (2) (3) Counselling pré-test Counselling post-test Importance maintenue du counselling (i) Counselling pré-test (iï) Counselling post-test 4. F. 62 53 63 63 64 71 73 74 74 74 Conclusions 75 TEST DE VIH À DOMICILE 77 1. Terminologie (1) Test par autoprélèvement à domicile (2) Test d'auto-analyse à domicile 77 7g 7g 2. Évolution du domaine des tests du VIH 79 3. Historique 79 • iv- (1) États-Unis 79 (2) Développements internationaux (3) Développements canadiens 81 81 4. Situation actuelle 83 5. Évaluation (1) Avantages présumés du test à domicile 84 85 (2) Craintes soulevées par le test à domicile 89 (3) Leçons à tirer des tests de grossesse à domicile (4) Réactions possibles au test à domicile 95 95 (i) Première trousse de testé domicile approuvée par la FDA (ii) Le Confide Testing Service (iii) Concurrence (iv) Tests de salive (i) Atelier de 1993 (ii) Association canadienne de santé publique (iii) Association médicale canadienne (iv) Promotion d'un test à domicile au Canada (v) Société canadienne du sida (i) Test plus répandu (ii) Accès accru au test anonyme (iii) Tests moins invasifs que les tests traditionnels (iv) Impact positif en santé publique Traitement précoce Diminution des coûts Diminution de la transmission par voie sexuelle (i) Effet discutable en santé publique (ii) Exactitude (iii) Manque de counselling (iv) Risques d'abus (v) Impact sur les mécanismes actuels de test (i) La réglementation et ses limites (ii) Établir des conditions préalables à l'approbation: approche de Bayer et coll. (iii) L'approche de Schopper et Vercauteren 6. Conclusions 79 79 80 80 81 82 82 83 82 85 86 87 87 87 88 88 89 90 91 94 94 96 96 96 98 • V- G. TEST REQUIS ET TEST OBLIGATOIRE 102 1. Survol global (1) Propositions de test forcé (2) Test de la population entière (3) Test de «groupes à risque élevé» (4) Test de populations données (5) Opinions (6) Principes généraux 103 103 104 105 105 106 108 2. Historique — Canada (1) Association du Barreau canadien -Ontario (2) Comité consultatif national sur le sida (3) Société royale du Canada (4) Comité parlementaire sur le sida (5) Commission de réforme du droit de l'Ontario (6) Comité sida d'Ottawa (7) Association canadienne de santé publique 109 110 110 111 112 112 113 113 3. Test des femmes enceintes 114 (1) Historique (2) Situation actuelle 116 Québec 117 Ontario Manitoba Saskatchewan Alberta Colombie-Britannique Yukon Territoires du Nord-Ouest 118 11 g 11g 119 119 119 119 Évaluation 120 (ii) (iii) 120 121 122 (3) (4) (i) Avant 1994 (ii) Depuis 1994 114 115 Terre-Neuve île-du-Prmce-Édouard Nouvelle-Écosse Nouveau-Brunswick ® 114 116 116 117 117 Counselling en présence de facteurs derisque(option 1) versus counselling de routine et test volontaire (option 2) Test de routine (option 3) Test requis (option 4) Conclusion -vi- 125 4. Test des nouveau-nés 128 (i) U s débuts (ii) Histoire récente 128 129 (1) Historique 128 (2) Situation actuelle 129 (3) Évaluation (4) Conclusion 131 132 Test des détenus 133 (i) Canada (ii) États-Unis 5. 130 130 (1) Historique 133 (i) Développements canadiens Association du Barreau canadien - Ontario Comité consultatif national sur le sida Société royale du Canada, Commission de réforme du droit de l'Ontario Comité du caucus progressiste conservateur sur la famille Comité d'experts sur le sida et les prisons Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique (ii) Développements internationaux (2) Situation actuelle (3) Évaluation 138 139 (4) Conclusions 142 Test des personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle 143 (i) Nombre de détenus vivant avec le VIH et le sida (ii) Soins, soutien et traitement des détenus vivant avec le VIH ou le sida (iii) Protection du personnel et des détenus Ségrégation de détenus (iv) Protection de tiers 6. 133 13 3 134 134 13 5 13 5 13 6 137 138 (1) Historique (i) Développements au Canada Comité consultatif national sur le sida 139 140 140 141 141 143 143 143 Rc. Beau lieu 144 Le rapport du coroner 14 5 R c. J.P.B. 14 6 Assemblée générale du parti Libéral du Québec Comité interministériel sur les droits de la personne et le sida L'affaire Bernardo 146 147 149 (ii) Développements aux États-Unis Groupe de travail sur le test du VIH, le counselling et la prophylaxie Niveau de risque d'avoir contracté le VIH 150 150 150 - VII- . Fardeaux physique et psychologique de l'agression Counselling des victimes Test des victimes Chimioprophylaxie pour l'infection à VIH Test de l'accusé (2) Situation actuelle 155 (3) Évaluation 155 (4) Conclusion 160 Test des travailleurs du sexe (1) Historique 164 165 (i) Canada (ii) États-Unis 155 155 (i) Objectifs possibles du test obligatoire des agresseurs sexuels Tests des personnes accusées d'agression sexuelle Test des personnes reconnues coupables d'agression sexuelle (ii) Justification du test obligatoire Test des personnes accusées d'agression sexuelle Test des personnes reconnues coupables d'agression sexuelle 7. (1) Développements au Canada Comité consultatif national sur le sida Commission de réforme du droit de l'Ontario 15 6 156 156 156 15 6 15 9 165 165 165 R v Cornier 166 (ii) Développements internationaux (2) Situation actuelle (i) Canada (ii) États-Unis 166 167 167 168 (3) Évaluation 169 (4) Conclusion 171 Test des travailleurs de la santé (1) Historique 173 174 (i) Test requis ou obligatoire (ii) Autres options (iii) Impact des lois sur la prostitution 8. 1S1 151 151 152 152 (i) (ii) (iii) (iv) (v) (vi) (vii) (viii) Comité consultatif national sur le sida Association dentaire canadienne Laboratoire de lutte contre la maladie Société canadienne du sida Commission de réforme du droit de l'Ontario Association canadienne de santé publique Association médicale canadienne Commission canadienne des droits de la personne - viii - 169 179 170 174 174 174 176 178 178 178 179 (2) Situation actuelle (3) Évaluation 179 180 (4) Conclusion 183 Test des immigrants 184 (i) Fonctions «hôtelières» en milieu de soins de santé (ii) Interventions effractives Arguments contre le test requis Arguments en faveur du test requis Compromis 9. (1) Historique 180 181 181 181 182 184 (i) Développements au Canada Association du Barreau canadien - Ontario Comité consultatif national sur le sida Société royale du Canada Arguments contre le test du VIH Analyse de rentabilité (ii) Développements internationaux 184 184 184 185 186 187 188 (2) Situation actuelle 189 (3) Évaluation 197 (4) Conclusion 200 (i) Canada Politique du Canada à l'endroit des voyageurs Politique canadienne en matière d'immigration Test «Fardeau trop lourd» Politique canadienne à l'endroit des réfugiés (ii) Hors du Canada Australie Test du VIH Exigences en matière de santé Mise en oeuvre de la politique (i) Politique canadienne en matière de voyages (ii) Politique canadienne en matière d'immigration Test «Fardeau trop lourd» • IX- 189 189 191 191 193 194 194 194 195 195 ï 96 197 198 198 199 CONFTOENTIALITÉ 201 1. 204 Historique (1) Association du Barreau canadien — Ontario (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires (iii) Confidentialité et besoin de savoir 204 204 204 205 (2) Comité consultatif national sur le VIH/SIDA 206 (3) Société royale du Canada 207 (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires (iii) Confidentialité et besoin de savoir (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires (iii) Confidentialité et besoin de savoir 206 206 207 207 207 208 (4) Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le SIDA 209 (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires (iii) Confidentialité et besoin de savoir Communication pour protéger les contacts sexuels et autres Communication pour protéger la santé publique Communication pour protéger les patients Communication à un employeur 209 210 210 210 211 211 211 (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires (iii) Confidentialité et besoin de savoir 213 213 213 (5) Commissaire a la protection de la vie privée du Canada 212 (6) Droits à l'égalité, déclaration obligatoire et relancé des contacts 212 (7) Document de travail sur l'infection à VIH, le sida et la vie privée 212 (S) Comité parlementaire sur le sida (9) Commissaire à l'information et à la protection de la vie privée/Ontario 214 214 (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires (iii) Confidentialité et besoin de savoir (10) Roy: l'infection à VIH, le sida et les questions éthiques et juridiques (11) Hamblin et Somerville: l'éthique et le droit (12) Commission de réforme du droit de l'Ontario (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires (iii) Confidentialité et besoin de savoir (13) Comité sida d'Ottawa (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires " 215 215 215 215 216 217 217 217 218 218 218 218 (iii) Confidentialité et besoin de savoir , (14) Association canadienne de santé publique 219 (15) Association médicale canadienne 221 Situation actuelle 221 (i) Déclaration (ii) Notification des partenaires 2. (1) Déclaration (i) Déclaration du sida Déclaration nominative ou non nominative (ii) Déclaration de la séropositivité au VIH Déclaration nominative et non nominative (iii) Obligation de déclaration (iv) Tableau récapitulatif (2) Notification des partenaires (i) Lois requérant la notification des partenaires (i) Lois autorisant la notification des partenaires (iii) Absence.de législation autorisant ou requérant explicitement la notification des partenaires (3) Confidentialité des renseignements relatifs au VIH/sida (i) Dispositions des lois ou règlements sur la santé publique (ii) Obligation de confidentialité du médecin Le droit Les obligations éthiques (iii) Exceptions à l'obligation de confidentialité Le droit Les obligations éthiques 3. 218 Évaluation (1) (2) (3) (4) (5) Importance de la confidentialité Limites et problèmes sous-jacents Déclaration Notification des partenaires Confidentialité et «besoin de savoir» (i) Objectif de la communication (ii) Communication avant une exposition au VIH La communication avant l'exposition est-elle nécessaire? (iii) Communication après une exposition au VIH La communication après l'exposition est-elle nécessaire? (4) Conclusions 219 220 221 221 221 222 223 223 224 224 224 225 227 228 228 229 229 231 231 231 233 234 234 235 238 239 242 243 243 243 244 244 244 -miv- SOMMAIRE DES CONCLUSIONS BIBLIOGRAPHIE ANNEXE Projet conjoint SCS/Réseau sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sidà - xii - SOMMAIRE Pourquoi ce Document de travail ? Durant la phase I du Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida, plus de 60 personnes et organisations consultées ont mentionné le test de sérodiagnostic et la confidentialité comme étant l'une des huit questions prioritaires d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida. La plupart des particuliers et groupes consultés ont affirmé que, bien que de nombreux documents aient été produits sur les questions liées au test de sérodiagnostic du VIH et à la confidentialité au Canada, à la fin des années 80 et au début des années 90, certains des problèmes persistent et les questions doivent être examinées de nouveau. Quelles sont les questions ? Au Canada, on a vu se former un vaste consensus à l'effet que, hormis quelques circonstances bien définies, une personne ne devrait subir un test du VIH que: • si elle y donne son consentement éclairé, volontaire et spécifique; • si le counselling et l'éducation avant et après le test sont disponibles et offerts; et • si la confidentialité du résultat ou son anonymat peut être garanti. En dépit du consensus sur ces points, les opinions demeurent partagées sur d'autres questions soulevées par le test. Plus particulièrement, on n'observe pas de consensus quant aux questions suivantes: • devrait-il être requis de rapporter les sérodiagnostics positifs aux autorités de santé publique? • devrait-on (et, le cas échéant, comment) procéder à une relance des contacts afin de prévenir les partenaires de personnes séropositives qu'ils risquent d'avoir contracté le VIH? De plus, un certain nombre de questions restent encore à résoudre dans la pratique, malgré l'atteinte d'un consensus théorique. Par exemple, plusieurs des individus et organismes consultés dans la Phase I du Projet conjoint Réseau/SCS ont fait remarquer que: • malgré l'accord sur le fait que le test de sérodiagnostic du VIH devrait être facile d'accès pour tous les Canadiens, son accessibilité demeure un problème, en particulier pour les femmes; • le test semble être pratiqué de plus en plus fréquemment sans le consentement spécifique et éclairé de l'intéressé; • plusieurs personnes, lors d'un sérodiagnostic positif ou négatif, ne reçoivent pas un counselling approprié; et • on note encore des propositions de test requis ou obligatoire de certains groupes de la population, comme les agresseurs sexuels, les détenus, les travailleurs de la santé, les immigrants et les femmes enceintes. En outre, de nouvelles controverses sont survenues, principalement à cause de: • la disponibilité de nouveaux traitements prometteurs; . • l'approbation et la mise en marché, aux États-Unis, des trousses de test à domicile; et, dans une moindre mesure, • la courbe démographique changeante de l'épidémie. Quel est le contenu du Document de travail ? Le document réexamine les questions liées au test de sérodiagnostic du VIH et à la confidentialité, au Canada. Lfélément central consiste à déterminer si les nouveaux développements justifient que l'on s'écarte du «principe général régissant la recherche de l'anticorps anti-VIH au Canada». Le document aborde en particulier les points qui suivent VIII • Le consentement éclairé spécifique au test de sérodiagnostic du VIH est-il encore nécessaire, ou un consentement général serait-il suffisant? • Les centres de test anonyme sont-ils encore nécessaires? • Le counselling pré-test et le counselling post-test sont-ils encore nécessaires? • Les trousses de test à domicile devraient-elles être rendues disponibles au Canada? • Devrait-il y avoir des exceptions au principe selon lequel le test doit toujours être volontaire? Le test requis ou obligatoire et le test de tous les individus de groupes spécifiques de la population (ou dans certaines circonstances) sont-ils justifiés? • Y a-t-il de nouvelles exceptions au principe selon lequel le test de sérodiagnostic ne devrait être effectué que si la confidentialité des résultats ou l'anonymat du test peut être garanti? Devrait-on adopter une approche qui mette l'accent sur la notification des partenaires? Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Que! est l'objectif du Document de travail ? ' Le document n'offre pas de réponses définitives — le Rapport final tentera de le faire, après que des individus et organismes du Canada et d'ailleurs auront eu l'occasion de nous faire part de leurs points de vue, dans le cadre de ce projet. On vise à présenter des renseignements et des pistes possibles de solutions, afin de favoriser et d'enrichir un processus éclairé et raisonné de décisions pour l'avenir du test de sérodiagnostic du VIH au Canada: ces décisions auront un impact considérable sur les personnes vivant avec le VIH/sida ou autrement affectées, ainsi que sur les efforts de prévention de la propagation ultérieure de l'épidémie. Quelles sont les conclusions du Document de travail ? Le document présente 15 conclusions. D conclut entre autres que: • En dépit des nouveaux développements, les arguments en faveur du consentement spécifique et éclairé demeurent aussi pertinents qu'ils l'ont toujours été. . • La disponibilité de nouveaux traitements contre l'infection à VIH vient souligner l'importance d'offrir à tous les Canadiens un accès facile à des services de test de sérodiagnostic du VIH. • Des centres de test anonyme devraient être disponibles dans divers endroits de chaque province et territoire. • Le counselling pré-test et post-test augmentent les avantages du test pour les personnes qui le reçoivent et pour la société, et en réduisent les préjudices potentiels. Par conséquent, en règle générale, le test ne devrait pas être effectué sans un counselling pré- et post-test de qualité et fidèle aux directives en vigueur sur le counselling. • Les trousses de test à domicile sont des instruments comportant des avantages potentiels pour les individus, des bénéfices non démontrés pour la société et des intérêts commerciaux énormes. Leur introduction implique un certain nombre de risques qui doivent être mieux évalués avant qu'elles ne soient répandues au Canada. Les décisions relatives à leur commercialisation ne devraient pas reposer sur l'existence de la technologie, mais bien sur des données scientifiques fiables et sur la consultation des consommateurs, y compris des personnes vivant avec le VIH/sida. • La vente au Canada ne devrait être autorisée que pour les trousses de test à domicile qui satisfont à un ensemble de critères établis pour réduire leurs effets préjudiciables possibles. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • Le Canada devrait s'abstenir d'élaborer des politiques qui prévoiraient l'introduction du test requis ou obligatoire pour les femmes enceintes, les nouveau-nés, les détenus, les personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle, les travailleurs du sexe, les travailleurs de la santé et les immigrants. • La déclaration des cas de VIH et de sida devrait toujours être non nominative. • Des programmes limités de notification reposant sur les médecins pourraient contribuer à l'avancement d'objectifs de santé publique vitaux, pourvu que de tels programmes visent exclusivement la notification de partenaires qui, autrement, pourraient n'avoir aucune idée du fait qu'ils ont peut-être été exposés au VIH. Toutefois, on ne devrait pas exagérer l'importance de ces programmes. Pour les populations les plus vulnérables au VIH, l'éducation ciblée et le soutien par des programmes communautaires demeurent essentiels. Il serait dangereux d'allouer des ressources supplémentaires à des programmes de notification des partenaires sans au moins maintenir le niveau actuel du financement consacré aux programmes d'éducation et de soutien. • La communication de renseignements médicaux personnels relatifs au VIH/sida à des individus qui prétendent avoir un besoin ou un droit de connaître l'état sérologique de personnes séropositives est rarement justifiée. • Vu les limites de la confidentialité et les difficultés de la protéger dans la pratique, il est nécessaire de renforcer les efforts pour protéger contre la discrimination les personnes qui vivent avec le VIH/sida ou qui sont autrement affectées. En général, le document reconnaît que les nouvelles technologies de test (notamment la disponibilité de trousses de test à domicile), les nouveaux traitements et l'épidémiologie changeante du VIH nous forcent à reconsidérer nos approches à l'égard du test du VIH et de la confidentialité. Cependant, on insiste sur l'importance de ne pas oublier les leçons des 15 dernières années et de ne pas oublier que le VIH/sida demeure différent des autres maladies. En particulier, les nouveaux traitements constituent un énorme progrès, mais ils ne sont pas la solution à tous les problèmes auxquels sont confrontées les personnes vivant avec le VIH ou le sida — des problèmes reliés à des problématiques sous-jacentes de pauvreté et de discrimination qui sont à la fois un,résultat et une cause de l'infection à VIH. Par conséquent, même si la détection précoce de l'infection à VIH est en effet devenue une priorité urgente, la tendance à faire du test.sérodiagnostic du VIH un test de routine* voire requis, nécessite que Ton soit extrêmement prudent. Ce serait une grave erreur que d'oublier l'importance du respect des droits des personnes et de sous-estimer lerisquede discrimination. Il serait imprudent de précipiter la mise en oeuvre de mesures coercitives alors que plusieurs personnes séropositives n'ont pas accès aux traitements, que les effets à long terme de ces traitements demeurent incertains et que l'efficacité des stratégies de coercition est, pour le moins, douteuse. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Les politiques en matière de test continuent de nécessiter une constante réévaluation à mesure qu'évoluent les traitements et ïa technologie, mais la considération attentive des risques et des avantages, appuyée par des études scientifiques judicieuses qui pèsent l'importance des droits de la personne et le besoin pour la société de préserver la santé publique, doit demeurer à la base de toute approche juridique et éthique face à la menace duVIH. Prochaines étapes Le Document de travail est mis à la disposition d'individus et d'organismes impliqués dans les questions relatives au Vïïï/sida, pour commentaires et contributions. Au cours de l'été, un rapport final sera préparé, qui offrira une analyse détaillée des questions et qui rendra compte de la diversité des points de vue exprimés dans les commentaires sur le Document de travail. Renseignements supplémentaires Contactez Ralf Jurgens, coordonnâtes de projet, au (514) 987-3000 (poste 8773#), télécopieur: (514) 987-3422, courrier électronique: [email protected] Exemplaires du Document de travail téléchargeables du site Web du Réseau juridique canadien VIH/sida: <http ://www. ody ssee. net/~j uj ube> ou disponibles auprès du Centre national de documentation sur le sida: 1565, ave. Carling (bur. 400), Ottawa ON K1Z 8R1 téléphone (613) 725-3434 télécopieur (613) 725-9826 courrier électronique: aids/[email protected] VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Glossaire Le présent document utilise les termes définis ci-dessous. En citant d'autres auteurs, on a toutefois respecté les diverses appellations utilisées dans l'original. Test de sérodiagnostic du VIH: Les tests les plus accessibles à l'heure actuelle, pour le sérodiagnostic de l'infection à VIH, détectent la présence d'anticorps anti-VIH plutôt que celle du VIH lui-même (le test de réaction en chaîne à la polymérase, qui détecte la présence du virus, est moins répandu); il serait par conséquent plus précis de les appeler «tests de détection des anticorps anti-VIH» mais, pour des raisons pratiques, nous aurons recours dans le présent document au terme «test de sérodiagnostic du VIH» (qui inclut le test de détection — habituellement ÉLISA — et, en présence d'un résultat positif, le test de confirmation — habituellement Western Blot ou îmmunobloi). Autres expressions rencontrées: dépistage du VIH, test anti-VIH, test de dépistage des anticorps anti-VIH [ou du VIH], recherche de l'anticorps anti-VIH, test de recherche des anticorps anti-VIH, recherche de l'anticorps contre le virus de l'immunodéficience humaine, test pour la détection du virus d'immunodéfïciénce humaine, dépistage de l'infection à VIH, recherche du VIH, épreuve relative au VIH, sérologie anti-VIH, etc. Dépistage: Dans le présent document, l'utilisation du terme dépistage est réservée à la pratique qui consiste à effectuer le test de manière systématique sur un ensemble d'échantillons à des fins de recherche ou épidémiologiques. Nous n'avons toutefois pas modifié les citations où le terme «dépistage» est employé dans un autre sens (habituellement pour désigner le «test de sérodiagnostic» lui-même). Test volontaire:1 Test pratiqué uniquement avec le consentement éclairé de la personne visée (ou, si cette personne est jugée inapte, avec le consentement de son père ou de sa mère, de son tuteur légal ou de son plus proche parent, comme l'exige la loi), et qui ne correspond pas à la définition du test requis ou obligatoire. Autre expression rencontrée: test pratiqué à l'initiative du client Consentement signifie, dans le présent contexte, que le client a accepté de subir le test de son plein gré, sans faire l'objet d'aucune pression, en se sentant libre de donner ou non son assentiment.2 » Eclairé signifie, dans le présent contexte, que lors d'une discussion (counselling prétest) dans un langage qu'il comprend, le client a été informé de tout ce qui entoure le test et son résultat, y compris les risques et les avantages, ainsi que des solutions autres que le test. 1 Les définitions des tests «volontaire», «requis» et «obligatoire» s'inspirent de celles présentées [sous l'appellation «recherche»] dans «Recherche de l'anticorps contre le virus de l'immunodéficience humaine au Canada - Recommandations du Comité consultatif national sur le SIDA», Rapport hebdomadaire des maladies au Canada, 1989, 15(8): 37-43, à la p. 37. 2 La définition de consentement éclairé provient de OMS, Déclaration de la consultation sur le dépistage de l'infection à VIH et le conseil, Genève, OMS, Programme mondial de lutte contre le sida, 1992, à la p. 11. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Test requis: Test qui constitue soit une condition préalable que doit remplir une personne pour obtenir un statut, un avantage ou un service précis, ou pour avoir accès à une fonction donnée, soit une conséquence qui découle nécessairement de la réalisation d'au moins une de ces éventualités. C'est toutefois à la personne intéressée à obtenir le «service, l'avantage ou le statut précis» de choisir. Autres expressions rencontrées: dépistage mandatoire, détection obligatoire. Test obligatoire: Test qui est exigé par une loi ou une politique, auquel la personne visée ne peut refuser de se soumettre, et qui ne peut pas être évité légalement. Autres expressions rencontrées: dépistage obligatoire, test exigé, détection forcée. Test non relié:3 Test dont le résultat ne peut être relié ou associé à la personne qui l'a subi (ce qui est possible en connaissant ou non l'identité de cette personne). Autre expression rencontrée: test non corrélé. Test relié [ou corrélé], il en existe trois types: Anonyme: Test dont le résultat peut être relié à la personne qui a subi le test, mais par un code (qui n'inclut aucun élément d'identification personnelle) que seule cette personne connaît; le médecin (ou quiconque) ne peut pas connaître l'identité de la personne qui subit le test. Autre expression rencontrée: test anonyme corrélé. Non nominatif: Test dont le résultat peut être relié à la personne qui a subi le test, encore ici par un code (qui n'inclut aucun élément d'identification personnelle) que seule cette personne connaît. Cependant, le médecin connaît l'identité de la personne en question. Autre expression rencontrée: test non nominal. Nominatif: Test dont le résultat est relié à la personne qui a subi l'épreuve, au moyen d'un élément d'identification personnelle. Autre expressionrencontrée:test nominal. Sensibilité:4 Capacité d'un test de détecter l'infection lorsqu'elle èst présente (c'est-à-dire de donner un résultat positif lorsque le spécimen est positif). Spécificité: Capacité d'un test de détecter l'absence d'infection lorsque le spécimen n'est pas infecté (c'est-à-dire de donner un résultat négatif lorsque le spécimen est négatif). Les définitions des tests «relié» et «non relié» s'inspirent de celles présentées [sous l'appellation «épreuve»] dans «La confidentialité concernant la séropositivité à l'égard du VIH - Rapport du Comité consultatif fédéral/provincial/tenitorial sur le SIDA», Rapport hebdomadaire des maladies au Canada, 1989, 15(8): 4347, à la p. 43. 4 Les définitions de «sensibilité» et de «spécificité» sont traduites de M.Â. Field, «Testing for AIDS: Uses and Abuses», American Journal of Law & Medicine, 1990, 16: 33-106, à la p. 39. 3 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Test de la charge virale: Test qui permet de mesurer le nombre de particules du VÏH dans le sang. H contribue à prévoir la progression du VIH en mesurant entre autres la concentration d'AKN viral dans le sang. Test par autoprélèvement à domicile: Test en vue duquel l'utilisateur fait lui-même son prélèvement à la maison, en utilisant une trousse prévue à cet effet et précodifiée, qu'il poste à un laboratoire d'analyse. Le résultat de l'analyse est annoncé au client par téléphone. Autres expressions rencontrées: test par auto-échantillonnage, "home-access testing", "homecollection testing". Test d'autoanalyse à domicile: Test préliminaire qui peut être effectué à la maison par l'utilisateur, sans intervention d'une personne de l'extérieur. Plutôt que d'établir un sérodiagnostic du VIH, ce type de test indique le besoin de recourir à des tests supplémentaires.5 Autres expressions rencontrées: test maison, "home-validated kit", "home-self testing". NOTE CONCERNANT LES OUVRAGES CITÉS Dans le présent document, les citations proviennent des versions françaises d'origine lorsque nous référons aux documents par des titres en français dans l'information bibliographique. Lorsqu'un titre est indiqué en anglais en référence, la traduction est non officielle. 5 Commentaire formulé par R. Frerichs lors de l'atelier sur les tests du VIH à domicile, dans le cadre de la Xle Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 8 juillet 1996. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail A. INTRODUCTION Les conséquences du test de détection des anticorps anti-VIH diffèrent considérablement de celles de bien d'autres examens couramment utilisés en médecine. Ce test peut en effet être dévastateur pour ceux qui en sont l'objet, pour les communautés auxquelles ils appartiennent et pour la société en général. En même temps, les avantages à en retirer sont considérables. Dans les multiples dilemmes et enjeux qu'il soulève, ce test est symbolique de la multitude de problèmes soulevés par la pandémie de cette infection. De ce fait, l'optique adoptée par la société canadienne devant l'usage du test de détection des anticorps anti-VIH créera des précédents d'une portée considérable. Par conséquent, nous devons faire preuve d'une grande prudence en décidant comment nous entendons régir son usage, en tant que société.^ Dans le cadre de leur Projet conjoint sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida (voir annexe), le Réseau juridique canadien VIH/sida (le Réseau) et la Société canadienne du sida (la SCS) mènent un projet sur le test de sérodiagnostic du VIH et la confidentialité: Le projet est financé par l'Unité des soins, du traitement et du soutien pour le VIH/sida et par les Programmes de prévention et d'action communautaires sur le VIH/sida, de Santé Canada, dans le cadre de la Stratégie nationale sur le sida, Phase n. 1. Historique Dans la phase I du Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida, le test de sérodiagnostic et la confidentialité ont été identifiés comme l'une des huit questions prioritaires d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida. Plusieurs des particuliers et groupes consultés ont affirmé que, bien que de nombreux documents aient été produits sur les questions liées au test de sérodiagnostic du VIH et à la confidentialité au Canada, à la fin des années 80 et au début des années 90, certains des problèmes persistent et les questions doivent être examinées de nouveau. En particulier, les gens ont exprimé des préoccupations à l'égard des sujets suivants: ^ M.A. Somerville, N. Gilmore, La détection des anticorps contre le virus de l'immunodéftcience humaine au Canada, un rapport présenté au et approuvé par le Comité consultatif national sur le SIDA, Montréal, Centre de médecine, d'éthique et de droit de l'Université McGill, 1988. Voir aussi Comité consultatif sur le SIDA, «Recherche de l'anticorps contre le virus de l'immunodéficience humaine au Canada - Recommandations du Comité consultatif national sur le SIDA», Rapport hebdomadaire des maladies au Canada, 1989, 15(8): 37-43, aux p. 37-43. Ce comité a élaboré ce «Principe général régissant la recherche de l'anticorps anti-VIH au Canada»: la recherche de l'anticorps anti-VIH ne doit être pratiquée que sur base volontaire, c'est-à-dire uniquement si l'intéressé donne son consentement éclairé, si des services de counselling et d'information sont disponibles et offerts avant et après l'épreuve, et si la confidentialité des résultats ou l'anonymat de l'intéressé peuvent être garantis. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • le test de sérodiagnostic du VIH sans le consentement éclairé de l'intéressé, une pratique qui serait de plus en plus fréquente; • le manque de counselling adéquat, que ce soit en présence d'un sérodiagnostic positif ou négatif; • l'accès limité au test anonyme et, surtout pour les femmes, au test en général; • des propositions pour obliger certains groupes de la population à subir des tests, par exemple les auteurs de délits sexuels, les détenus, lés travailleurs de la santé et les femmes enceintes. En ce qui concerne la confidentialité, plusieurs des organisations et individus consultés considèrent que les gens n'en comprennent pas l'importance. Ils ont aussi exprimé le besoin de conseils concernant les situations où des gens soutiennent qu'ils «doivent savoir» le sérodiagnostic d'une personne. On se préoccupe de la discrimination qui découle de la divulgation d'un sérodiagnostic positif Par exemple, des gens ont peur de demander de l'aide sociale parce qu'ils craignent que leur séropositivité ne soit portée à la connaissance de tout un chacun, particulièrement dans les petites communautés; certains sont réticents à porter plainte auprès des commissions de droits de la personne parce que «les gens ne veulent pas dire à tout le monde qu'ils sont séropositifs». Depuis peu, la préoccupation augmente face à la possibilité imminentè de tests à domicile, qui soulèvent des questions uniques au VIH, ainsi que des questions plus larges. Par exemple, dans quelle mesure des instances gouvernementales devraient-elles protéger le public d'un moyen techniquement précis lorsque celui-ci peut avoir un impact psychologique négatif sur son utilisateur?7 2. Activités entreprises Le Projet a amorcé en juin 1996 son travail sur le test de sérodiagnostic et la confidentialité. On a: • mené une recherche approfondie sur les questions d'ordre juridique et éthique qu'ils soulèvent; • publié plusieurs articles dans le Bulletin canadien VIH/sida et droit, 3(1), octobre 1996; 7 Voir par exemple B . M Branson, H.D. Gayle, «Home Testing for HIV — It's Coming. Are You Ready?», International AIDS Society Newsletter, mars 1994, no 4; R Bayer et coll., «Testing for HIV Infection at Home», New England Journal of Medicine, 1995, 332: 1296-99; K A . Phillips et coll., «Potential Use of Home Testing», Ibid., aux p. 1308-10. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • livré une présentation sur «L'avenir du dépistage du VIH au Canada: problèmes et recommandations» lors de la 8e Conférence annuelle de la Société canadienne de bioéthique, à Montréal, le 19 octobre 1996; • sélectionné deux «commentateurs clés»: William Flanagan, de l'Université Queen's; et leDr MichelChâteauvert, Montréal; • . amorcé l'organisation d'un atelier national qui aura lieu en mars 1997; et • produit le présent Document de travail 3. Prochaines étapes Le Document de travail sera distribué à plusieurs personnes et organismes impliqués dans des questions relatives au VIH/sida, pour commentaires. Au cours de l'été 1997, un rapport final sera élaboré, qui offrira une analyse approfondie des questions en jeu, représentera la diversité des points de vue exprimés dans les réactions à l'égard du Document de travail et présentera une évaluation des problèmes, ainsi que des recommandations concrètes. 4. Portée et objectifs du Document de travail Le Document de travail aborde les questions suivantes: • Comment le test de sérodiagnostic du VIH a-t-il été abordé au Canada jusqu'à présent? • L'approche canadienne à l'égard du test devrait-elle être modifiée à la lumière de nouveaux développements, y compris la disponibilité de nouveaux traitements, l'approbation et la mise en marché des premières trousses de test à domicile aux ÉtatsUnis, et la courbe démographique changeante de l'épidémie? Plus particulièrement: VIII • Le consentement éclairé spécifique au test de sérodiagnostic du VIH est-il encore nécessaire, ou un consentement général devrait-il être suffisant? (Chapitre C) • Les centres de test anonyme sont-ils encore nécessaires? (Chapitre D) • Le counselling pré-test et le counselling post-test sont-ils encore nécessaires? (Chapitre E) • Les trousses de test à domicile devraient-elles être rendues disponibles au Canada? (Chapitre F) Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • Les nouveaux développements justifient-ils des exceptions au principe selon lequel le test de sérodiagnostic doit toujours être volontaire? Le test requis ou obligatoire ou les tests de groupes spécifiques de la population (ou dans certaines circonstances) sont-ils justifiés? (Chapitre G) • Y a-t-il de nouvelles exceptions au principe selon lequel le test de sérodiagnostic ne devrait être effectué que si la confidentialité des résultats ou l'anonymat du test peut être garanti? Devrait-on adopter une approche qui mette l'accent sur la notification des partenaires? (Chapitre H) Pour chacune de ces questions, le document examine brièvement les recommandations contenues dans certains des principaux rapports et énoncés de politiques publiés par des organisations canadiennes entre 1986 et 1996 («Historique»), selon l'ordre chronologique, notamment: • le rapport de 1986 sur les implications légales du VIH/sida, publié par l'Association du Barreau canadien - Ontario (ABC-Ontario);8 • les recommandations de 1988 sur le test au Canada, publiées par le Comité consultatif national sur le SIDA (CCN-SIDA),9 basées sur un rapport de Somerville et Gilmore;10 • le rapport de 1988 sur les aspects médicaux, sociaux, éthiques, juridiques, économiques et relatifs à la recherche en matière de VIH/sida au Canada, publié par la Société royale du Canada;11 • le rapport de novembre 1988 sur la confidentialité à l'égard de la séropositivité au VIH, publié par le Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le sida (Comité consultatif f/p/t);12 • le rapport publié en 1990 parle Comité parlementaire sur le sida, sur les divers aspects liés au VIH/sida au Canada;13 Association du Barreau canadien - Ontario, Report of the AIDS Committee, Toronto, l'Association, 1986. CCN-SIDA, supra, note 1. ^ Somerville et Gilmore, supra, note 6. 11 Société royale du Canada, Le SIDA: L'état de la question au pays - Rapport de synthèse et recommandations; Ottawa, la Société, 1988; Société royale du Canada, Le SIDA: L'état de la question au pays - Documents de travail, Ottawa, la Société, 1988 [ces documents sont énumérés par des titres français à la p. vi du Rapport de synthèse, mais n'existent en réalité qu'en anglais]. 12 Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le SIDA, La confidentialité concernant la séropositivité à l'égard du VIH - Rapport, Ottawa, le Comité, 1988; pour un sommaire, voir Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le SIDA, supra, note 3. 1 3 Comité parlementaire sur le SIDA, Le sida: un défi, rapport du Comité parlementaire sur le SIDA, Ottawa, le Comité, 1990. 8 9 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • le Rapport sur les tests de dépistage du sida publié en 1992 par la Commission de réforme du droit de l'Ontario (CRDÔ);14 • le mémoire non daté du Comité sida d'Ottawa (CSO) soumis à la CRDO pour ses recommandai ons concernant le test;15 • le rapport de 1993 sur la réaction de santé publique au VIH/sida, publié par l'Association canadienne de santé publique (ACSP).16 Ensuite, pour chaque sujet, le Document de travail observe les politiques et la pratique en la matière au Canada («Situation actuelle»), examine si des modifications aux politiques ou à la pratique seraient justifiées («Évaluation») et tire des conclusions de ce qui pourrait être fait en réaction aux nouveaux développements et aux préoccupations qui persistent («Conclusions»). 5. (1 ) Limites Modifications au cours du temps Ce document reconnaît la nature fluctuante des connaissances sur l'infection par le VIH et les maladies qu'il peut provoquer, sur le test de détection des anticorps anti-VIH, sur les limites et sur l'incertitude qui en résulte et enfin sur la limitation desrisquesde transmission du VIH au Canada. Les conclusions et recommandations de ce document ont pour fondement le niveau actuel des connaissances en la matière. Quiconque le lit doit savoir que ses conclusions et recommandations pourront ne plus avoir cours ou nécessiter des modifications à l'avenir à mesure que s'élargira la base de connaissances sur cette pandémie.17 Aucune recommandation concernant les politiques sur le test ... ne peut être coulée dans le béton. Il est peu probable que les principes directeurs fondamentaux se modifient, mais les considérations particulières qui soustendent certaines politiques peuvent nécessiter d'être revues à mesure qu'évolueront notre compréhension du sida et la technologie du test.1* Ces deux mises au point, formulées il y a plusieurs années, sont encore pertinentes. De la même façon que se manifeste aujourd'hui le besoin de réexaminer les questions liées au test de sérodiagnostic du VIH, vu les préoccupations relatives aux pratiques, actuelles au Canada et les développements survenus au cours des récentes années, l'avenir pourra 1 4 Commission de. réforme du droit de l'Ontario, Report on Testing for AIDS, Toronto, la Commission, 1992. [Un sommaire bilingue existe, intitulé en français Rapport sur les tests de dépistage du sida - Sommaire.} 1 ^ Comité sida d'Ottawa, Submission to the Ontario Law Reform Commission Project on HIV/AIDS Testing, Ottawa, le Comité, non daté. Association canadienne de santé publique, VIH et sida - Une perspective de santé publique, Ottawa, l'Association, 1993. 1 7 Somerville et Gilmore, supra, note 6, à la p. xii. ^ Field, supra, note 4, à la p. 37. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail apporter le besoin de réviser les positions adoptées Asm* le présent document. Les questions sont examinées ici sur la base des connaissances actuelles; la tâche est complexifiée par un environnement qui est en constante évolution à cause du développement et de l'amélioration des interventions thérapeutiques et des instruments de diagnostic, ainsi que de l'évolution de l'épidémie elle-même. À mesure qu'évolueront les connaissances, les réactions au VIH/sida par les élaborateurs de politiques et l'ensemble de la société subiront presque assurément de nouvelles modifications. H est toutefois important de souligner que, malgré les progrès de la technologie scientifique, «les valeurs qui gouvernent l'élaboration des politiques relatives à l'infection à VIH — comme le principe d'autonomie et du respect des individus — demeureront constantes».19 (2) Degré de détail Par ailleurs, pour plusieurs raisons, le Document de travail n'est pas exhaustif. Chacune des questions qu'il aborde aurait pu être traitée de manière beaucoup plus détaillée, mais ceci a été limité par les contraintes temporelles et budgétaires de l'étape préliminaire que constitue ce document Certaines questions ont dû être laissées de côté et d'autres ne sont abordées qu'au passage. Plus particulièrement, les aspects relatifs à des populations spécifiques — communautés ethnoculturelles, communautés autochtones, adolescents, personnes psychiatrisées et handicapées mentalement, détenus, personnes de la rue, personnes s'adonnant à la prostitution, etc. —ne sont pas tous abordés ou ne l'ont pas été avec le degré de détail souhaité. Le Rapport final remédiera à ce problème, du moins en partie, et présentera une analyse plus approfondie. (3) Autres pays Le document traite des questions liées au test de sérodiagnostic du VTH et à la confidentialité au Canada Un survol de la situation dans d'autres pays est en cours, mais n'a pas été inclus au présent document — il sera intégré au Rapport final. On fait cependant référence à bon nombre de documents internationaux sur le sujet, produits par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), de même qu'à des approches en vigueur dans certains pays autres que le Canada. (4) Réponses Le présent document n'offre pas de réponses définitives — le Rapport final tentera de le faire, après que des individus et organismes du Canada et d'ailleurs auront eu l'occasion de nousfairepart de leurs points de vue, dans le cadre de ce projet On vise à présenter des renseignements et des pistes possibles de solutions, afin de favoriser et d'enrichir un processus éclairé et raisonné de décisions pour l'avenir du test de sérodiagnostic du VIH au Canada: ces décisions auront un impact considérable sur les personnes qui vivent avec le VIH/sida ou qui sont autrement affectées, ainsi que sur les efforts de prévention de la propagation ultérieure de l'épidémie. 1 9 CRDO, supra, VIII note 14, à la p. x. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail B. QUESTIONS ET PRÉOCCUPATIONS Les questions relatives au test de sérodiagnostic du VIH sont parmi les plus débattues de la litigieuse arène politique du sida.20 1. Historique Depuis qu'il a été rendu largement disponible en 1985, le test de sérodiagnostic du VIH est le sujet d'une controvèrse considérable; énormément d'écrits ont été publiés quant à son utilisation appropriée des points de vue juridique et éthique. Tel que l'exprime Bayer: l'incertitude quant à la signification des résultats du test, de même que quant à sa qualité et à sa précision, a fourni la matière technique à des disputes qui ont inévitablement pris une tournure politique et éthique, puisque des questions de vie privée, de santé communautaire, de discrimination socio-économique, de coercition et de liberté ont toujours été en jeu. Comment le test serait-il utilisé hors du contexte de l'approvisionnement en sang? Les groupes à risque accru de VIH/sida seraient-ils incités à subir le test? Comment informerait-on les personnes qui se prêtent au test, au sujet de ses implications pour eux et pour autrui? Les résultats devraient-ils, et pourraient-ils, être confidentiels? Le test volontaire serait-il un prélude au dépistage obligatoire? Quelle conséquence le test aurait-il sur le droit de travailler? D'aller à l'école? D'obtenir de l'assurance? De porter un enfant? De demeurer libre? Chacune de ces questions allait entraîner une confrontation sur le sujet fondamental du lien entre la protection de la vie privée et la protection de la santé publique; sur les fonctions du consentement et de la coercition dans la réaction sociale à la menace du sida.21 -, De la même façon, la Commission de réforme du droit de l'Ontario (CRDO), dans son Rapport sur les tests de dépistage du sida}2 en 1992, soulignait que l'apparition du test s'accompagnait de diverses questions, dont plusieurs ne sont toujours pas résolues: Comment le test, indéniablement utile pour prévenir la transmission du VIH par les dons de sang, serait-il employé dans d'autres contextes? Les groupes vulnérables à l'infection seraient-ils encouragés, voire peut-être forcés, à subir le test? Quelles conséquences le test aurait-il sur le respect du droit de travailler, de porter des enfants, d'aller à l'école, d'obtenir une assurance, ou de demeurer libre?^ 2 0 A. Sears, «The Politics of HIV-Related Testing: A Review Essay on the Ontario Law Reform Commission Report on Testing for AIDS», The Windsor Review of Legal and Social Issues, 1993, 4: 157-163. 2 1 R. Bayer, «Editorial Review - Ethical and Social Policy Issues Raised by HIV Screening: The Epidemic Evolves and So Do Challenges», AIDS, 1989, 3: 119-124. 2 2 CRDO, supra, note 14. Ibid., à la p. x. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (1) Points de vue Les débats entourant le test présentent un conflit de valeurs entre trois points de vue:24 • Le premier, largement rattaché à la droite religieuse et politique, préconise le test obligatoire de toute la population ou de groupes ciblés. Il s'agit d'une approche extrêmement coercitive à l'égard du sida, axée sur l'objectif d'identifier et d'isoler les personnes séropositives afin de protéger «la population en général». • Le deuxième point de vue découle des traditions de la santé publique. D met l'accent sur un test volontaire et confidentiel dont le résultat doit être rapporté (de manière nominative ou non nominative) aux autorités. Ces données visent à fournir aux autorités des renseignements sur les personnes séropositives, comme base pour la recherche, le traitement et la prévention. • La troisième approche préconise le test volontaire et anonyme, dans le cadre duquel aucun nom n'est relié au résultat et ne peut être rapporté aux autorités. Le sérodiagnostic y est considéré comme un renseignement crucial pour les personnes vivant avec le VIH, dans une approche leur permettant de prendre en contrôle leur propre santé. En vertu de cette approche, aucun individu ne devrait avoir accès à ce renseignement, outre la personne séropositive et les gens à qui elle choisit d'en parler. (2) Émergence d'un consensus Au Canada, on, a vu se former un vaste consensus à l'effet que, hormis quelques circonstances bien définies, une personne ne devrait subir un test du VIH que: • si elle y donne son consentement informé, volontaire et spécifique; • si le counselling et l'éducation avant et après le test sont disponibles et offerts; et • si la confidentialité du résultat ou son anonymat peut être garanti. Le consensus sur ces questions a reçu l'appui de «leaders de la communauté gaie, défenseurs des libertés civiles, bioéthiciens, responsables de la santé publique et organisations professionnelles représentant les cliniciens».25 Il est bien exprimé dans les rapports complets et détaillés qu'ont publiés le CCN-sida26 et la CRDO.27 24 25 26 27 Sears, supra, note 20, à la p. 157. Bayer 1989, supra, note 21, à la p. 119, avec maintes références. Supra, note 1. CRDO, supra, note 14. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (3) Questions controversées En dépit du consensus sur les points qui précèdent, les opinions demeurent partagées sur d'autres questions soulevées par le test. Plus particulièrement, on n'observe pas de consensus quant aux questions suivantes: • devrait-il être requis de rapporter les sérodiagnostics positifs aux autorités de santé publique? • devrait-on (et, le cas échéant, comment) procéder à une relance des contacts afin de prévenir les partenaires de personnes séropositives qu'ils risquent d'avoir contracté le VIH? L'option de test anonyme est disponible dans certaines provinces du Canada. Dans d'autres provinces, les responsables de la santé publique ont insisté sur l'importance de rapporter les résultats de tests positifs aux autorités de santé publique et d'effectuer la notification des parternaires, et ils ont refusé de rendre disponible le test anonyme. (4) Aspects problématiques De plus, un certain nombre de questions restent encore à résoudre dans la pratique, malgré l'atteinte d'un consensus théorique. Par exemple, plusieurs des individus et organismes consultés dans la Phase I du Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VÏH/sida ont fait remarquer que: • malgré l'accord sur le fait que le test de sérodiagnostic du VIH devrait être faciles d'accès à tous les Canadiens, son accessibilité demeure un problème, en particulier pour les femmes; • le test semble être pratiqué de plus en plus fréquemment sans le consentement spécifique et éclairé de l'intéressé; • • VIII plusieurs personnes, lors d'un sérodiagnostic positif ou négatif, ne reçoivent pas approprié; et un counselling on note encore des propositions de test requis ou obligatoire de certains groupes de la population, comme les agresseurs sexuels, les détenus, les travailleurs de la santé, les immigrants et les femmes enceintes. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 2. Le présent et l'avenir Durant la récente décennie, le débat entourant le test du VIH a évolué, sous la pression de préoccupations sociales changeantes, de peurs liées à la transmission du VIH dans l'air, de diverses conceptions du rôle du test dans la modification des comportements, et de progrès en matière de thérapies, qui sont venu modifier la justification pour identifier les personnes vivant avec une infection asymptomatique.28 (1) Introduction Neuf ans après l'adoption par le CCN-SIDA du «principe général régissant la recherche de l'anticorps anti-VIH au Canada» (voir infra, note 60) et plus de quatre ans après la publication du rapport de la CRDO — la plus récente tentative d'étude approfondie des questions liées au test de sérodiagnostic du VIH au Canada — de nouvelles controverses sont survenues, principalement à cause de: • la disponibilité de nouveaux traitements prometteurs; • l'approbation et la mise en marché, aux États-Unis, des trousses de test à domicile; et, dans une moindre mesure, • la courbe démographique changeante de l'épidémie. (i) Nouveaux traitements De nouveaux traitements ont été mis au point, qui laissent espérer que la progression de l'infection à VIH puisse être ralentie ou même arrêtée chez certaines personnes séropositives, et que leur infectivité puisse être considérablement réduite, réduisant par le fait même lerisquede transmission à d'autres personnes. On a également démontré que ces nouveaux traitements peuvent réduire considérablement le risque de transmission périnatale et, s'ils sont administrés très peu de temps après l'exposition initiale au VIH, peuvent réduire le risque de séroconversion.29 Tandis que l'accès à ces traitements nouveaux demeure un problème sérieux pour de nombreuses personnes au Canada, leur disponibilité même a soulevé la question de savoir si, dans certains cas, un programme de test et de traitement plus vigoureux, voire requis, pourrait prévenir efficacement la propagation ultérieure du VIH. (ii) Trousses de test à domicile Le développement et l'approbation, aux États-Unis, de trousses de test à domicile soulèvent l'éventualité qu'au Canada, le test du VIH devienne bientôt facilement et largement accessible en dehors des établissements de soins de santé. En vertu du modèle 2 8 R Bayer, «HIV Testing and Reporting», AIDS Ethics and Policy Updates, sur le site web du Journal of the American Medical Association. 2 9 «Update: Provisional Public Health Service Recommendations for ChemoprophyIaxis after Occupational Exposure to HIV», Morbidity and Mortality Weekly Report, 1996, 45(212): 468-472. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail actuel, le test de sérodiagnostic du VIH est rigoureusement régi par un professionnel de la santé et il comporte (ou devrait comporter) des mesures intensives de counselling et de soutien. La vente et la distribution de trousses de test à domicile devraient-elles être autorisées au Canada et, le cas échéant, comment ceci affectera-t-il le modèle régissant actuellement le test? (iii) Courbe démographique changeante de l'infection à VIH Le troisième facteur de changement est l'évolution des données démographiques sur l'infection à VIH. Aux premiers stades de l'épidémie, les personnes affectées étaient en grande majorité celles qui s'adonnaient à certaines activités àrisqueélevé qui étaient facilement identifiables, comme les relations sexuelles non protégées entre hommes et le partage de seringues pour la consommation de drogue. Parmi ceux et celles «àrisque»,il était généralement reconnu que la méthode de prévention la plus efficace était l'éducation axée sur la réduction des comportements àrisqueélevé, et non quelque programme de test obligatoire. Cependant, l'épidémie s'est progressivement déplacée vers des personnes autres que celles s'adonnant à des activités à risque facilement identifiables. En particulier, le nombre de femmes vivant avec le VIH/sida continue d'augmenter et plusieurs femmes ont contracté le VIH lors de relations sexuelles avec des hommes qui avaient eu un comportement àrisqueélevé sans les en informer. Ces femmes peuvent n'avoir eu aucune raison particulière de croire qu'elles couraient le risque d'y être exposées et, par conséquent, n'avoir pas pris de précautions. Il y a donc lieu de se demander si des mesures de santé publique plus vigoureuses pourraient être appropriées, incluant la déclaration obligatoire et la notification de partenaire(s). Jusqu'à présent, on a généralement conclu que la confidentialité du sérodiagnostic du VIH devrait être maintenue dans la majorité des cas, et que la divulgation au partenaire ne pourrait que rarement être utile. Toutefois, à mesure que les traitements s'améliorent et permettent d'espérer, entre autres choses, que le risque de transmission verticale puisse être réduit, l'élaboration d'une politique plus énergique en matière de test et de déclaration pourrait parfois sembler appropriée, particulièrement en ce qui a trait aux personnes qui pourraient ne pas soupçonner autrement qu'elles sont exposées à unrisqued'infection par le VIH. (2) Réexamen des questions Ces nouveaux développements, juxtaposés aux problèmes qui persistent dans les domaines mentionnés ci-dessus, nécessitent que l'on réexamine les questions liées au test de sérodiagnostic du VIH et à la confidentialité, au Canada. L'élément central consiste à déterminer si les nouveaux développements justifient que l'on s'écarte du «principe général régissant la recherche de l'anticorps anti-VIH au Canada».30 En particulier: • 3 0 Le consentement éclairé spécifique au test de sérodiagnostic du VIH est-il encore nécessaire, ou un consentement général devrait-il être suffisant? (Chapitre C) Voir infra, note 60. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • Les centres de test anonyme sont-ils encore nécessaires? (Chapitre D) Le counselling pré-test et le counselling post-test sont-ils encore nécessaires? (Chapitre E) • Les trousses de test à domicile devraient-elles être rendues disponibles au Canada? (Chapitre F) • Devrait-il y avoir des exceptions au principe selon lequel le test doit toujours être volontaire? Le test requis ou obligatoire, ou les tests de tous les individus de groupes spécifiques de la population (ou dans certaines circonstances), sont-ils justifiés? (Chapitre G) • Y a-t-il de nouvelles exceptions au principe selon lequel le test de sérodiagnostic ne devrait être pratiqué que si la confidentialité des résultats ou l'anonymat.du test peut être garanti? Devrait-on adopter une approche qui mette l'accent sur la notification des partenaires? (Chapitre H) Pour aborder ces questions, il est nécessaire d'analyser de plus près les avantages et les préjudices du test. Lz Document de travail scrute l'hypothèse qui sous-tend une grande partie des changements dans l'attitude à l'égard du test de sérodiagnostic du VIH — à savoir que le test comporte de nos jours d'énormes avantages et peu de préjudices, et qu'en conséquence on pourrait y procéder de manière routinière, sans consentement spécifique, sans counselling et sans assurer la confidentialité du résultat. 3. Avantages et préjudices du test Le test est une étape transitoire et non uni but en soi et de soi.31 Un test du VIH n'est pas une fin en soi, mais une étape importante pour aider les personnes à prévenir la transmission du VIH et pour préserver la santé. La principale préoccupation du CDC, en relation avec tout test du VIH, est d'assurer que son utilisation offre une piste vers la prévention, le traitement et les soins.^2 Dans tous les cas où l'on envisage un test de sérodiagnostic du VIH, il est essentiel que les avantages et les préjudices du test soient examinés en profondeur, • pour la personne qui le subit; et Field, supra, note 4, à la p. 37. Centers for Disease Control and Prevention Statement on Consumer-Controlled HIV Testing, sur le site web de la Home Access Health Corporation, a http://www.homeaccess.com/hahc/Ievel3/cdc.html VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • pour la communauté, Tel que l'ont déclaré Somerville et Gilmore: Le test de détection des anticoips ne doit être pratiqué que lorsqu'il peut avoir des effets bénéfiques pour le sujet testé, c'est-à-dire que ses avantages potentiels et réels ont toutes les chances de l'emporter sur ses préjudices potentiels et réels. Dans certains cas, cette exigence [de la comparaison] des risques - effets bénéfiques n'est pas remplie. Dès lors, le test peut être justifié pour éviter de faire subir un préjudice à un [autre] individu ou à la communauté, [emphase ajoutée]33 Dans leur rapport de 1988, Somerville et Gilmore ont répertorié les situations où l'information procurée par le test est, et continue d'être, utile:. 1. Pour prévenir les dons de sang, d'organes ou de sperme infectés; 2. Pour aider à diagnostiquer lès maladies qui seraient dues au VIH ou confirmer leur association avec une infection par le VIH; 3. Pour aider les gens à se protéger et à protéger autrui contre une infection par le VIH, notamment en préconisant des pratiques sexuelles non contaminantes; 4. Pour aider à orienter les programmes de santé publique par la surveillance; 5 . Pour mieux comprendre l'infection par le VIH, les maladies qui peuvent en résulter ainsi que les moyens de détecter èt de traiter l'infection par le VIH et les maladies qui en résultent.34 Somerville et Gilmore concluaient que «le test de détection des anticorps anti-VIH ne doit être pratiqué que lorsqu'il constitue le moyen le moins envahissant, le moins restrictif et le plus efficace qui soit pour atteindre un objectif valable.»35 Supra, note 6, à la p. ix. Ibid., à la p. viii. 35 Ibid., à la p. ix. Dans la même optique, le rapport de la CRDO souligne que puisque «l'identification [des personnes qui vivent avec le VIH] comporte des coûts et des risques sociaux [...] l'objectif de tout programme [de test et] d'identification se doit, au moins, d'être d'une importance suffisante pour justifier les conséquences sociales possiblement négatives qui s'y rattachent». Selon le rapport, «parmi les principaux [objectifs de tout programme d'identification] réside la protection de la santé publique, objectif particulièrement important face à une maladie transmissible et mortelle»; un certain nombre d'autres objectifs sont identifiés: 33 34 L'identification ne peut être utilisée qu'aux seules fins de diagnostic et de traitement pour un individu, un facteur d'importance croissante dans le contrôle de l'infection à VIH: Des objectifs d'ordre économique sont possibles, par exemple dans le cas de compagnies d'assurance ou d'employeurs qui désirent éviter les coûts associés à la maladie prolongée ou au décès. Enfin, compte tenu de la dimension qu'a prise cette maladie dans la société, on peut rencontrer également des objectifs discriminatoires vaguement camouflés, comme le désir de certains employeurs d'exclure de leurs rangs des personnes qui pourraient être séropositives (CRDO, supra, note 14, aux p. 18-19). VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (1) Les premières années —1985-88 Lorsque le test sanguin pour le VIH est enfin devenu disponible en 1985, j'étais réticent à ouvrir la boîte de Pandore. À l'époque, il n'y avaitrienà faire contre le VIH, de toutefeçon.Ce n'est qu'en 1989 que les chercheurs ont rapporté que chez des personnes séropositives — non seulement des patients avec le sida — l'AZT pouvait comporter des avantages. C'était là une bonne raison de subir le test;36 Lorsque le premier test de sérodiagnostic du VIH est apparu, en 1985, son utilité pour le traitement médical d'une personne ou pour la prévention de la propagation ultérieure était très limitée: Son usage principal, et le plus largement accepté, consistait au dépistage des donneurs de sang et de tissus. (i) Avantages et préjudices pour les personnes Les personnes vulnérables avaient peu d'intérêt à demander un test de sérodiagnostic du VIH; elles avaient plutôt des raisons de craindre que le résultat puisse être utilisé contre elles de manière discriminatoire. Peu après son apparition, on a utilisé le test dans diverses circonstances à des fins de discrimination à l'égard des personnes vivant avec le VIH. De plus, on ne disposait pas de traitement; la signification même d'un sérodiagnostic positif a été souvent mal comprise. On espérait que le sida n'allait pas se développer pas chez toutes les personnes séropositives. Par ailleurs, le VIH et le sida étaient rattachés à un degré élevé de crainte et d'incompréhension de la part du public; les personnes vivant avec le VIH étaient fortement stigmatisées. Pour ces motifs, le test était expressément déconseillé au sein des communautés vulnérables. Ceci correspond aux cinq objectifs généraux du test identifiés par la Société royale du Canada (voir R. Fraser et coll., L'infection par le VIH et le SIDA au Canada: les impératifs en matière de santé publique, dans Le sida: l'état de la question au pays - Documents de travail, supra, note 11, p. 127-149, à 140; M.T. Schechter, S Marion, P Riben, HIV Antibody Testing Programs, ibid., p. 115-121, à la p. 117): le test peut être effectué pour établir un diagnostic chez un individu qui présente des signes ou des symptômes qui laissent présager une infection à VIH; * le test a été proposé pour établir un prognostic, c'est-à-dire pour permettre aux compagnies d'assurances, employeurs, officiels d'immigration, etc., d'identifier.les personnes vivant avec le VIH parce qu'elles sont très susceptibles de développer une maladie mortelle et coûteuse; le test peut être effectué sur les dons de sang, d'organes, de tissus et de sperme à des fins de biosécurité, c'està-dire afin d'optimiser la sécurité des matériaux utilisés dans les programmes de transfusion, de transplantation et d'insémination; le test peut être effectué au sein de populations à des fins,de surveillance épidëmiologiquè, c'est-à-dire afin d'obtenir de l'information sur la propagation du virus parmi elles; et le test peut être effectué à des fins de contrôle de la transmission, c'est-à-dire afin d'offrir une base à des interventions visant.à limiter la propagation ultérieure du virus. D. Sanford, «AIDS Hasn't Left, but a Future is Back. One Man's Account), The Globe and Mail, 23 novembre 1996, à Dl. 36 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail En 1988, les effets possibles, pervers et bénéfiques, du test de sérodiagnostic du VIH pour les personnes étaient répertoriés par Somervillë<et Gilmore. Ils soutenaient que les préjudices du test comprenaient: 1. Le fait de découvrir qu'on est séropositif peut engendrer un stress psychologique important chez les sujets testés; 2. Les sujets diagnostiqués séropositifs encourent lerisquede perdre leurs amis, leur emploi, leur assurance, leur logement, leurs droits à l'éducation et aux voyages. 3. Certains sujete testés peuvent être déclarés séropositifs alors qu'ils ne sont pas contaminés (faux positifs) et certains peuvent être déclarés séronégatifs alors qu'ils sont contaminés [sic] parle VIH (faux négatifs); Les effets bénéfiques possibles répertoriés par Somerville et.Gilmore résidaient dans les possibilités de: 1. Poser ou confirmer un diagnostic d'infection' par le VIH ou de maladies liées à ce virus, permettant au sujet qui en sont l'objet de recevoir les soins appropriés; 2. Minimiser lesrisquesde traitements par des médicaments potentiellement immunosuppresseurs pour les personnes contaminées [sic] par le VIH; 3. Rassurer les sujets séronégatifs qu'ils encourent peu de risques d'être contaminés; 4. Motiver ou convaincre les sujets non contaminés d'éviter lesrisquesde contracter le VIH ou motiver ou convaincre les sujets contaminés par le VIH d'éviter d'être exposés de nouveau au VIH et à d'autres agents potentiellement dangereux; 5. Autoriser certains individus à procréer ou à s'adonner à des pratiques sexuelles sans préservatifs sans mettre en péril la vie de leurs partenaires qui ne sont pas contaminés lorsque le test révèle que ces sujets ne sont pas contaminés même s'ils se sont livrés à des activités susceptibles de transmettre le VIH; 6. Permettre aux personnes de travailler ou de s'adonner à des activités spécifiques présentant un risque pour leur état de santé s'ils sont immunodéficients ourisquantde transmettre le VIH à autrui. 7. Permettre aux sujets séronégatifs de voyager, de travailler, de s'instruire ou de vivre dans des pays où toutes ces activités sont interdites aux sujets contaminés par le VIH.37 (ii) Avantages pour la communauté Les gens s'entendaient généralement,pour dire que le test de sérodiagnostic du VIH n'était pas une mesure particulièrementefficace dans la réduction du taux d'infection.. L'éducation 3 7 Somerville et Gilmore, supra, note 6, aux p.x-xi. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail sur la réduction des comportements àrisqueélevé était généralement reconnue comme la mesure la plus efficace pour prévenir la propagation ultérieure du VIH; on considérait aussi que cette éducation n'était nullement reliée au sérodiagnostic et qu'elle n'en dépendait en rien. (2) De 1989 à 1992 L'attitude consistant à déconseiller l'utilisation du test s'est modifiée vers 1989, lorsque sont apparus les premiers traitements contre certaines infections opportunistes associées à l'infection à VIH, notamment la prophylaxie contre la pneumonie à Pneumocystis carinii [PCP en anglais]. Le test de sérodiagnostic comportait désormais des avantages clairs, en particulier pour les individus. (i) Avantages et préjudices pour lés personnes Il est devenu clair que le test pouvait dès lors servir d'instrument de diagnostic et mener à des interventions médicales bénéfiques pour les personnes vivant avec le VIH. En conséquence, beaucoup plus de personnes vulnérables ont désiré obtenir un test et les traitements pertinents. Le contexte du débat a alors subi une première modification: Les organismes gais ont commencé à inciter les hommes homosexuels et bisexuels à faire établir leur statut sérologique aux anticorps, dans des conditions confident elles ou anonymes. Les médecins [aux É.-U.] ont insisté pour que le sida soit réintégré à la pratique médicale générale et que le test des anticorps au VIH soit abordé de la même manière que les autres tests sanguins — c'est-à-dire avec le consentement présumé du patient.38 Cependant, les traitements disponibles n'étaient pas particulièrement efficaces pour ralentir la progression de l'infection à VIH, et plusieurs personnes ont continué de préférer ne pas connaître leur statut sérologique, pour plusieurs raisons — par exemple en considérant que cette connaissance n'aurait que peu d'impact sur leurs décisions en matière de comportement, qu'elle pourrait leur causer un surplus considérable d'anxiété et/ou pourrait entraîner de la discrimination à loir égard et une stigmatisation . (ii) Avantages pour la communauté Les avantages pour la communauté demeuraient discutables: on ne savait pas si les traitements disponibles pouvaient réduire l'infectivité des personnes vivant avec le VIH. Par ailleurs, les premières données montraient que les traitements n'étaient pas très efficaces contre lerisquede transmission périnatale. On avait donc peu de raisons de croire que le test de sérodiagnostic et les traitements puissent améliorer les efforts de prévention contre la propagation du VIH. Ainsi, les efforts de prévention ont continué de se concentrer sur l'éducation et, en particulier, sur la réduction des comportements à 3 8 R. Bayer, «Public Health Policy and the AIDS Epidemic. An End to HIV Exceptionalism?», The New England Journal of Medicine, 1991, 324(21 ): 1500-1504, à la p. 1501. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail risqué. Le test et le traitement étaient considérés comme des aspects liés aux soins de santé des personnes vivant avec le VIH et non à la prévention de la propagation du VIH. Tel que l'ont déclaré Somerville et Gilmore: La prévention est le seul moyen efficace d'enrayer l'épidémie, ce qui nécessite des changements de comportement. Pour prévenir la propagation de cette, maladie, il faut que tous, contaminés [sic] ou pas, adoptent un comportement non contaminant et évitent d'avoir des pratiques contaminantes. En soi, ce type de comportement n'impose pas de test de détection des anticorps antiVIH, alors que les données provenant de ces tests devraient motiver ou convaincre certains individus d'éviter les pratiques qui favorisent la transmission du VIH.39 De manière semblable, l'Organisation mondiale de la santé a conclu: Il n'est pas vraiment prouvé que le test VIH volontaire joue un rôle dans la prévention de la transmission, sauf dans le cas des couples discordants (quand l'un des membres du couple est infecté et l'autre non); des études ont montré qu'une telle situation pourrait conduire à l'adoption d'un comportement moins risqué. Le test en soi n'est pas une mesure de prévention, mais il pourrait en principe contribuer à la prévention en d'autres circonstances s'il parvenait à inciter les individus à adopter un comportement plus sûr et à s'y tenir. Ce sera très probablement le cas si les individus prennent conscience que le test leur apportera de grands avantages, par exemple si ce test est pratiqué dans le cadre d'un programme'de conseil complet, avec possibilité de. soins et de soutien, dans un environnement social favorable, ou encore lorsque c'est le client qui demande le test.40 Cônséquemment, le modèle prédominant basé sur le consentement spécifique et informé ainsi que sur la confidentialité du résultat, pour tout test de sérodiagnostic du VIH — est demeuré en grande partie intact. 39 40 Somerville et Gilmore, supra, note 6, à la p. vii. OMS, 1992, supra,, note 2, à la p. 7. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (3) De 1992 à nos jours En ce qui concerne la maladie du VIH, la connaissance constitue une prise pouvoir. La maladie du VIH comporte fréquemment une longue période— jusqu'à une décennie — entre l'infection et l'apparition de symptômes. Les personnes qui savent qu'elles vivent avec le VIH peuvent faire surveiller les modifications de leur état et possiblement recevoir un traitement, avant même l'apparition de symptômes. Les personnes qui savent qu'elles vivent avec le VIH peuvent aussi contribuer aux efforts de prévention en adoptant les précautions nécessaires pour éviter de propager le VIH par des relations sexuelles non protégées ou le partage de seringues.4 * Les récentes années ont vu de grands développements accroître l'importance d'un diagnostic précoce de l'infection à VIH, particulièrement pour les individus, mais aussi de plus en plus pour la communauté. (i) Avantages et préjudices pour les personnes Maintenant, plus que jamais, les traitements fonctionnent. C'est le temps de vous occuper de votre VIH.42 Des traitements ont été développés, qui retardent l'apparition de maladie grave chez les personnes vivant avec le VIH et qui préviennent les complications. En particulier, on a appris l'importance d'une intervention précoce: aussi longtemps que les médecins croyaient que le virus n'était pas très actif durant les premières années et la période intermédiaire de l'infection, il était logique de chercher à «économiser les forces et retarder les traitements afin qu'ils soient prêts lorsque le virus émeigerait de sa phase dormante».43 Mais les résultats de recherches publiés en 1995 ont d'abord montré que «à chaque jour de chaque année, chez toute personne séropositive au VIH, le virus produit non pas des milliers, non pas des millions, mais des milliards de copies de lui-même».44 Les chercheurs s'entendent maintenant sur le fait qu'un traitement énergique devrait être amorcé aussi tôt que possible après l'infection. Les thérapies combinées comprenant des inhibiteurs de la protéase peuvent ralentir considérablement, voire arrêter, la progression de l'infection à VIH chez les personnes séropositives. S'il est amorcé tôt après l'infection, un traitement agressif peut même parvenir à éliminér toute trace du VIH dans le sang des individus. Les tests de la charge virale, conçus pour mesurer le nombre de particules du virus présentes K. Phillips et J. Stryker, «What Is Testing's Role in HIV Prevention?», site Web du Center for AIDS Prevention Studies, University of Califormia in San Francisco, section des Prevention Fact Sheets, à http://www.epibiostat.ucsf.edu/capsweb/FSindex.html 4 2 De Montaner, British Columbia Centre for Excellence in HIV/AIDS, cité dans J. Gadd, «Drug Mixtures Work in AIDS Battle», The Globe and Mail, 8 juillet 1996, à la p. A6. 4 3 C. Gorman, «The Disease Detective», Time, 30 décembre 1996 - 6 janvier 1997, p. 24-31, à la p. 30. 44 Ibid 41 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail dans le sang,45 de plus en plus accessibles au Canada,46 sont utiles pour mesurer l'effet des nouvelles thérapies sur l'infection,;à VIH.47 Ils peuvent aussi servir à prévoir le moment où l'état d'un patient séropositif pourrait progresser vers les stades plus avancés du sida 4 8 Ces tests pourraient également aider à prédire lerisquede transmission du VIH d'une mère à son bébé.49 Compte tenu de ces développements nouveaux et prometteurs, l'année 1996 a été considérée comme une année d'espoir pour les personnes vivant avec le VIH. Plusieurs des personnes qui ont pu avoir accès aux nouveaux médicaments et aux tests de la charge virale ont commencé à être plus optimistes, parfois au point de cesser de considérer le sida comme une maladie nécessairement mortelle. Fait important, les résultats préliminaires d'une étude en cours en Colombie-Britannique montrent que le taux de décès parmi 2 000 personnes qui reçoivent un traitement a constamment diminué entre janvier 4 5 Un sommaire de l'utilisation des tests de la charge virale dans la pratique clinique, publié dans Nature Medicine (M.S. Saag et coll., «HIV Viral Load Markers in Clinical Practice», Nature Medicine, 1996, 2(6): 625), recommande d'effectuer cette mesure à tous les trois ou quatre mois chez les patients séropositifs. 4 6 À Terre-Neuve, le test de la charge virale est offert de manière routinière depuis octobre 1996 et son coût est défrayé par le gouvernement provincial. On offrira trois ou quatre tests par année aux personnes vivant avec le VIH, selon leur état (communication avec S. Ratnam, direct., Newfoundland Public Health Laboratory, le 10 janvier 1997). L'ile-durPrince-Édouard n'offre pas ce test (communication avec le Dr Sweet, le 10 janvier 1997). En Nouvelle-Écosse, le test de la charge virale n'est pas encore disponible, malgré de fortes pressions en sa faveur (communication avec le Dr Lynn Johnston, le 10 janvier 1997). Au Nouveau-Brunswick, ce test n'est pas encore disponible mais plusieurs laboratoires ont exprimé leur intérêt de commencer à l'effectuer (communication avec le Dr Mary Scott, responsable de projet au Service de direction de la santé publique, ministère de la Santé et des Services communautaires du Nouveau-Brunswick, le 10 janvier 1997). Au Québec, le test de la charge virale est disponible depuis le 20 septembre 1996. Le gouvernement défraiera les coûts de quatre tests par personne par année (communication avec Irina Tsarewsky, le 10 janvier 1997). En Ontario, ce test est disponible depuis novembre 1996. On l'offre sur une base limitée: le Central Public Health Laboratory procède à une étude rigoureuse des trois possibilités actuellement disponibles pour effectuer cette mesure. Le test est présentement disponible au Central Public Health Laboratory, au Toronto General Hospital et au Hospital for Sick Children, mais l'on s'attend à ce qu'il soit bientôt offert dans cinq ou six sites. Le test doit être requis par un médecin et la personne qui le subit doit donner des renseignements personnels. Les résultats n'ont toutefois pas à être rapportés. La province s'attend à effectuer environ 24 000 tests par année — jusqu'à quatre tests par personne par année (communication avec Carol Major, Central Public Health Laboratory, le 10 janvier 1997). Le Manitoba n'offre pas ce test, mais le gouvernement prépare une demande au Conseil du Trésor pour le rendre disponible (communication avec Pat Matusko, AIDS Coordinator, le 10 janvier 1997). En Saskatchewan, le test n'est pas encore disponible. La province prévoit de modifier cette situation, mais n'a pas encore déterminé de date (communication avec le Dr Greg Horsman, Medical Director, Provincial Laboratories, le 10 janvier 1997). En Alberta, le test est offert par le Provincial Laboratory of Public Health Systems et son coût est défrayé par Alberta Health (communication avec le Dr Larke, Provincial AIDS Programs, Alberta Health, le 10 janvier 1997). La Colombie-Britannique offre ce test depuis juin 1996 et en couvre les frais dans son programmé d'assurance médicale. Le test n'est pas limité par les comptes de CD4 et, en dépit d'une limite nominative établie à trois tests par personne par année, des exceptions sont permises. Le test doit être demandé par un médecin et le résultat doit être transmis au laboratoire de virologie du St. Paul's Hospital (communication avec le Dr Patrick, ministère de la Santé, le 10 janvier 1997). Le Yukon a recours aux laboratoires de la C.-B. pour l'analyse de ses tests du VIH et peut donc offrir des tests de la charge virale aux personnes qui y vivent avec le sida (communication avec P. Mandel le 29 août 1996). Les Territoires du Nord-ouest «défraieraient le coût d'un test de la charge Virale si un médecin le prescrivait» (communication avec A. Corveau le 27 août 1996). T. Quinn, FDA Review of RNA Testing, juillet 1996, à la p. 8. R. Voelker, «New Studies Say Viral Burden Tops CD4 as a Marker of Disease Progression», Journal of the American Medical Association, 1996, 275(6): 421. 4 9 P.A. Volberding, «HIV Quantification: Clinical Applications», The Lancet, 1996, 347(8994): 71. 47 48 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 1994 et novembre 1996.50 Mais plusieurs problèmes subsistent et nous avons encore bien du chemin à parcourir dans la quête d'un traitement efficace. Des médecins rapportent qu'une importante proportion de leurs patients vivant avec le sida ne supportent pas bien les nouveaux médicaments,51 ne peuvent respecter le difficile régime de la médication, ou ne montrent pas de signe d'amélioration. Tandis qu'il semble vrai qu'ils aient procuré des résultats tenant presque du miracle chez certaines personnes vivant avec le VTH/sida — une amélioration de la santé et une charge virale faible au point d'être pratiquement indécelable — les nouveaux médicaments ne sont pas une cure universelle et l'on continue de craindre que le virus puisse évoluer et s'adapter à ces médicaments, comme il l'a fait face à d'autres par le passé. On continue d'espérer que les inhibiteurs de la protéase s'avèrent plus efficaces à long terme que l'AZT et les autres nucléosides, mais «à l'heure actuelle, la situation en est une d'attente et d'observation».52 En outre, l'accès aux nouveaux traitements est un problème important au Canada et apparemment insurmontable dans plusieurs pays plus pauvres, ce qui entraîne un renouvellement d'appels à l'accroissement des efforts de prévention et au développement d'un vaccin prophylactique. Enfin, la discrimination contre les personnes vivant avec le VIH ou le sida se maintient à un niveau endémique, au Canada comme ailleurs. (ii) Avantages pour la communauté Quoique l'on ne s'entende toujours pas sur la question de savoir si le fait qu'un individu connaisse son sérodiagnostic à l'égard du VIH modifie son comportement,53 on est venu à Gadd, supra, note 42. Les chercheurs n'ont toutefois pas terminé leur étude sur la qualité de vie des patients qui survivent plus longtemps. Le Dr Hogg, du British Columbia Centre for Excellence in HIV/AIDS déclare que «les questions plus importantes [que la simple survie] touchent les aspects de qualité de vie — état de santé, bien-être émotionnel et chances d'emploi»! Les nouveaux médicaments pourraient ne pas être efficaces chez jusqu'à un tiers des personnes qui en ont fait l'essai. Voir Gorman, supra, note 43. 52 Lesbian/Gay Law Notes, janvier 1997, avec référence à un article de L. Keen dans le Washington Blade du 13 décembre. 5 3 Phillips et Stryker, supra, note 44 (avec référence a D. Higgins et coll., «Evidence for the Effects of HIV Antibody Counseling and Testing on Risk Behaviors», Journal of the American Medical Association, 1991, 226: 2419), répondent ainsi à cette question: Parfois. Certains individus peuvent considérer que le fait de connaître le résultat de leur test peut contribuer à raffermir leurs résolutions d'avoir des relations sexuelles protégées, afin de préserver leur condition s'ils sont séronégatifs ou de protéger les personnes qu'ils, aiment s'ils sont séropositifs. Dans l'ensemble, les preuves de l'impact du test sur le comportement sont mitigées. Un examen approfondi mené par les chercheurs du CDC est arrivé à la conclusion que malgré des modifications drastiques du comportement sexuel chez les hommes gais, le rôle du counselling et du test dans ces changements est beaucoup plus difficile à cerner. Des résultats contradictoires émanent par ailleurs d'un survol des études quant aux utilisateurs de drogue par injection et aux femmes qui prennent des décisions relatives à la reproduction. Certaines études montrent que des modifiaations du comportement ont lieu après le test et le counselling, particulièrement lorsque les deux membres d'un couple y ont recours. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail .rj r » /.-«v'v^-. « j y » ! * » ! « f\ ii/. considérer que le test, s'il est suivi d'un traitement, présente des avantages pour la communauté et contribue à la prévention de la propagation ultérieure du VTH. La prévention continuera de nécessiter que tous et toutes, séropositifs ou non, agissent de manière sécuritaire et s'abstiennent de s'engager dans des activités qui engendrent un risque. Toutefois, la connaissance du statut sérologique d'une personne peut, dans certains cas, contribuer à la prévention: des études scientifiques ont montré que la possibilité de transmission d'une mère au bébé peut être réduite des deux tiers si, lorsqu'une femme est séropositive, elle en est informée tôt dans le cours de sa grossesse et si elle entreprend un traitement antiviral. Par ailleurs, on trouve de plus en plus de données montrant que le fait de maintenir bas le taux de VIH chez une personne séropositive peut réduire lerisquede transmission. En outre, il existe un espoir que les nouveaux traitements, s'ils sont administrés très tôt après l'exposition au VIH, puissent réduire le risque de séroconversi on.54 Par conséquent, le modèle prédominant fondé sur un consentement spécifique et informé dans tous les cas de test de sérodiagnostic du VIH, de même que la confidentialité du résultat, est remis en question de plus en plus souvent. Étant donné que les objectifs du counselling et du test sont multiples (réduire les comportements à risque, réduire les réactions psychologiques négatives du test, référence à des services pour le sida, etc.), l'évaluation de son eflïcacité est complexe et la capacité des études de mesurer leur effet de manière objective est mise en doute (voir D. Miller, A.J. Pinching, «HIV Tests and Counselling: Current Issues», AIDS, 1989, 3(suppl. 1): S187-S192). 54 Voir supra, note 29. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail C. TEST VOLONTAIRE: LA QUESTION DU CONSENTEMENT Compte tenu des nouveaux développements en matière de traitement et de prévention qui sont décrits ci-dessus, le présent chapitre réexamine les conditions minimales requises pour rencontrer les préalables juridiques et éthiques du test volontaire de sérodiagnostic du VIH. Une préoccupation particulière concerne la question de savoir si un médecin est tenu d'obtenir un consentement spécifique et éclairé de son patient avant d'être en mesure d'effectuer un test pour le VIH en toute légalité, ou s'il peut se fier sur un consentement implicite ou tacite à l'égard du test de sérodiagnostic du VIH, du fait qu'un patient consente de manière générale à ce qu'on prélève un échantillon de son sang à des fins de diagnostic. Ce chapitre examine d'abord les recommandations formulées par des organisations canadiennes entre 1986 et 1995 (Historique), puis il examine brièvement la situation actuelle en notant que le test sans consentement spécifique et éclairé n'est pas chose rare au Canada (Situation actuelle). On examine ensuite la question de savoir si, vu la nature changeante du VIH/sida, il ne serait plus nécessaire que les médecins obtiennent du patient un consentement spécifique et éclairé afin que le test de sérodiagnostic du VIH puisse être pratiqué légalement (Évaluation). On conclut que, en dépit des nouveaux développements, les arguments en faveur du consentement spécifique et éclairé demeurent aussi pertinents qu'ils l'ont toujours été. En règle générale, le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être pratiqué, au Canada, qu'après avoir obtenu le consentement spécifique et éclairé du patient concerné (Conclusion). Enfin, le chapitre pose la question de la nécessité de prévoir des exceptions à la règle générale. Il conclut qu'il existe deux exceptions: (1) le test des donneurs de sang, d'organes, de sperme ou de substances corporelles similaires; et (2) le test effectué dans le cadre de programmes de dépistage anonyme (non relié) à des fins épidémiologiques ou de recherche, pourvu que soient respectées les Lignes directrices sur les considérations éthiques et juridiques en matière de recherche sur la séroprévalence du VIH (Exceptions). anonyme et non reliée N'est pas abordée dans ce chapitre, la question de savoir si le test requis ou obligatoire de groupes précis de la population (femmes enceintes, nouveau-nés, travailleurs de la santé, détenus, etc.) est justifié comme exception supplémentaire à la règle générale qui requiert le consentement éclairé de la personne concernée: prière de consulter le chapitre G. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 1. Historique Les organisations canadiennes qui ont étudié les questions soulevées par le test de sérodiagnostic du VIH, entre 1986 et 1995, sont toutes arrivées à la conclusion que le test ne devrait généralement être pratiqué qu'avec le consentement spécifique et éclairé de la personne sur laquelle il porte. (1) Association du Barreau canadien — Ontario En octobre 1985, l'ABC-Ontario a créé un comité spécial pour analyser les implications juridiques du VIH/sida et en faire rapport. En avril 1986, elle publiait le premier rapport canadien sur les multiples aspects juridiques soulevés par le VIH/sida.55 Le rapport énonce une règle générale selon laquelle le test ne devrait être effectue qu'avec le consentement spécifique et éclairé de la personne à laquelle on l'administre. On ajoute toutefois qu'il pourrait exister une exception à cette règle: «Dans les cas où cela est raisonnablement nécessaire afin de ralentir ou d'empêcher la propagation du virus, un test peut être requis — et devrait l'être.»56 (2) Comité consultatif national sur le sida En 1988, le CCN-SIDA formulait des recommandations sur le sujet,57 basées sur un rapport de Somerville et Gilmore58 présenté au Comité et approuvé par lui en décembre 1987. Le rapport souligne que, avant de pouvoir déterminer comment et quand des personnes ou des communautés devraient subir un test d'anticorps anti-VIH, on se doit d'examiner en détail les implications éthiques d'un tel test. On y énonce ensuite les concepts généraux qui en guident l'analyse éthique — «respect de la personne, non-malveillance, bienveillance, et justice» — à partir desquels sont établis sept principes à respecter avant que le test d'un quelconque individu, groupe, population ou communauté ne puisse être proposé, recommandé, ou pratiqué:59 1. Dans une société où l'on envisage la mise en oeuvre de la recherche de l'anticorps anti-VIH, les droits de chacun doivent être respectés; toute exception portant atteinte à l'un ou à l'autre de ces droits doit être pleinement justifiée; 2. Les épreuves, ainsi que les interventions qu'elles entraînent, doivent être les mesures susceptibles d'être efficaces, les moins effectives et 55 56 57 58 59 Association du Barreau canadien - Ontario, supra, note 8. Ibid., p. 24. CCN-SIDA, supra, note 1. Somerville et Gilmore, supra, note 6. CCN-SIDA, supra, note 1, p. 37. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail les moins restrictives, raisonnablement disponibles pour atteindre les objectifs valables de la recherche de l'anticorps anti-VIH; 3. Les avantages que l'on attend de la recherche de l'anticorps antiVIH doivent l'emporter sur le tort éventuel que peut entraîner cette recherche, et les conséquences préjudiciables [...] doivent être minimisées; 4. L'épreuve de détection doit être appliquée équitablement et ne doit pas établir une discrimination indue contre une personne ou un groupe de la population visée par cette recherche; 5. Il doit y avoir unrisqueraisonnable d'infection à VIH dans la population sur laquelle porte la recherche; 6. Les méthodes appliquées dans cette recherche doivent être du plus haut niveau technique raisonnablement disponible; 7. La recherche doit être susceptible soit d'entraîner des mesures efficaces de lutte, soit de briser la chaîne de transmission du VIH ou de mettre un terme aux conséquences de l'infection à VIH. Le comité a établi le «Principe général régissant la recherche de l'anticorps anti-VIH au Canada», en vertu duquel, afin de favoriser le test, d'en tirer les plus grands avantages tout en évitant ses torts éventuels et réels, et de minimiser le risque de coercition, on devrait privilégier l'approche volontaire: la recherche de l'anticorps anti-VIH ne doit être pratiquée que sur la base volontaire, c'est-à-dire uniquement si l'intéressé donne son consentement éclairé, si des services de counselling et d'information sont disponibles avant et après l'épreuve, et si la confidentialité des résultats ou l'anonymat de l'intéressé peuvent être garantis.60 (3) Société royale du Canada En avril 1988, la Société royale du Canada publiait un rapport détaillé sur les aspects médicaux, sociaux, éthiques, juridiques, économiques et de recherche relatifs au VIH/sida au Canada.61 Le texte de ce rapport décrit le test volontaire [qu'il nomme «facultatif»] comme étant: le plus acceptable tant du point de vue moral que du point de vue social [...] Les tests facultatifs devraient être offerts à tous les Canadiens [...] Les personnes désirant subir un test devraient être bien informées des conséquences de cette demande et devraient donner leur consentement éclairé avant de le passer.62 60 62 Ibid., p. 38. Société royale du Canada, supra, note 11. Société royale du Canada, supra, note 11, p. 15. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (4) Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le sida En novembre 1988, le Comité consultatif f/p/t a déposé un rapport sur la confidentialité concernant la confidentialité à l'égard de la séropositivité au VÏH. Le rapport était accepté par la Conférence des sous-ministres de la Santé (juin 1988) et approuvé lors de la Réunion interprovinciale des ministres de la Santé en septembre 1988.63 Eri reconnaissant de prime abord que «Q]es questions qui entourent la recherche du VIH et la déclaration des cas soulignent combien il est nécessaire d'en arriver à un juste milieu entre deux objectifs opposés, à savoir: protéger le public d'une maladie incurable et protéger les droits du sujet qui subit l'épreuve de détection», le comité y expose «les principes directeurs de base qui permettraient l'adoption de mesures judicieuses de santé publique tout en garantissant la protection des droits du sujet subissant le test».64 Entre autres principes, le rapport établit que «[l]a personne qui subit l'épreuve doit donner son consentement éclairé». (5) Comité parlementaire sur le sida En juin 1990, le Comité parlementaire sur le sida publiait son rapport sur les divers aspects du VIH/sida au Canada,65 recommandant quetout test de détection anti-YIH soit volontaire sauf dans les cas de dons de sang, de produits du sang, d'organes et de tissus, et qu'il s'accompagne de garanties appropriées quant à la confidentialité.66 (6) Commission de réforme du droit de l'Ontario En 1992, la CRDO publiait son Report on Testing for AIDS,67 où l'on souligne que l'introduction du test de sérodiagnostic du VIH entraîne une série de questions: Comment le test, indéniablement utile pour prévenir la transmission du VIH par les dons de sang, serait-il employé dans d'autres contextes? Les groupes exposés à un risque d'infection seraient-ils encouragés, voire peut-être forcés, à subir un test? Quelles conséquences le test aurait-il sur le respect du droit de travailler, de porter des enfants, d'aller à l'école, d'obtenir une assurance, ou de demeurer libre? 6 8 La Commission a recommandé qu'aucun test relatif au VIH ne soit effectué sans d'abord obtenir du patient son consentement volontaire, spécifique et informé, sauf si le test est pratiqué relativement à l'utilisation de dons de sang, organes, tissus ou parties du corps, dans le cadre de recherche, traitement ou transplantation; ou encore dans le cadre d'un programme de test anonyme du VIH à des fins épidémiologiques ou de recherche. 63 64 65 66 67 Supra, note 12, p. 43. Ibid., p. 43. Comité parlementaire sur le sida, supra, note 13. Ibid., p. 46 (recommandation 34). CRDO. supra, note 14. Ibid., à ta p. x. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (7) Comité sida d'Ottawa La CRDO a invité des particuliers et des organismes à collaborer à l'étude susmentionnée. Dans un mémoire non daté, le CSO a répondu un «oui sans équivoque» à la question de la Commission concernant la nécessité que le test, selon un principe général, soit volontaire.69 (8) Association canadienne de santé publique En mars 1993, au terme d'une longue consultation, l'Association canadienne de santé publique publiait un rapport sur la réaction de santé publique au VIH et au sida, offrant un «cadre de politique et de pratique de la santé publique pour l'avenir».70 Le test, la déclaration, le counselling et la notification des partenaires font partie des sujets abordés: pour chacune des questions, le-rapport dégage des principes généraux, en examine les retombées dans la pratique en santé publique et dresse une liste de recommandations d'action à l'intention des divers intervenants du domaine du VIH/sida. En ce qui concerne le test, le rapport établit le principe selon lequel «[t]ous les Canadiens devraient connaître et disposer d'une variété de tests volontaires, de grande qualité et exempts de préjugés, y compris des tests confidentiels nominaux et non nominaux ainsi que des tests anonymes».71 On poursuit en affirmant que, de façon générale, les tests devraient être volontaires, sauf en cas de dons de sang, d'organes, de tissus, d'os ou de sperme, et que «[i]l peut y avoir de rares exceptions à ce principe qui doivent être examinées cas par cas». (9) Association médicale canadienne En 1995, l'Association médicale canadienne (AMG) publiait la troisième édition de ses Lignes directrices pour le counselling pour le sérodiagnostic du VIH.72 On y souligne que «Les tests de sérodiagnostic du VIH devraient toujours être volontaires et n'être effectués qu'après que le patient a accordé son consentement éclairé». De plus, on indique que: • «il ne faut pas croire implicitement ou supposer qu'il y a consentement éclairé»; CSO, suprà, noie 15. ACSP, supra, note 16, à la p. vii. 7 1 /i/rf..à lap. 18. 7 2 Association médicale canadienne, Sérodiag/iosric du VIH - Lignes directrices pour le counselling, Ottawa, l'Association, 1995. Ces lignes directrices ont été examinées par un groupe consultatif national constitué de représentants de l'Association canadienne de santé publique, de l'Association canadienne des infirmières et infirmiers en sidologie, du Collège des médecins de famille du Canada, de la Société canadienne de pédiatrie, de la Société canadienne d'hémophilie, de la Société canadienne du sida et de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada. Elles sont basées sur M. Châteauvert, N. Gilmore, Sérodiagnostic du virus de l'immunodéficience humaine - Lignes directrices aux consultants, Ottawa, Association médicale canadienne, 1993; et sur Association médicale canadienne, Tests pour la Détection du virus d'immunodéftcience humaine, Ottawa, l'Association, 1990. 69 70 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • «pour obtenir le consentement éclairé du patient, il faut l'informer, lui révéler les avantages et les inconvénients des tests de sérodiagnostic du VIH, l'écouter, répondre à ses questions et lui demander la permission de procéder à chaque étape du counselling et du test»; • «pour que la personne consente de façon éclairée à subir un test de sérodiagnostic du VIH, elle doit être jugée apte; comprendre l'objet, les risques, les préjudices et les . avantages de subir ou non le test; donner son consentement volontairement».73 2. Situation actuelle En dépit du consensus qui émane des recommandations susmentionnées, à l'effet que le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être pratiqué qu'avec le consentement éclairé et spécifique de la personne qui le subit, il est de plus en plus manifeste que des personnes ayant recours à des services médicaux subissent parfois le test sans en être informées ou y avoir consenti: Il existe des rapports selon lesquels des médecins et hôpitaux ontariens ont pratiqué des tests des anticorps anti-VIH sans obtenir, de consentement spécifique et éclairé, en se fiant plutôt sur un consentement implicite aux traitements et tests sanguins habituellement pratiqués à l'hôpital. On appelle souvent cette pratique «test de routine des anticorps anti-VIH» — c'est-à-dire un test sans le consentement spécifique et éclairé du patient [référence omise].74 Deux incidents survenus dans un hôpital montréalais, en 1995, font foi des problèmes soulevés par le test «de routine».75 Dans le premier cas, on administrait le test à un homme peu après son admission à l'Hôpital Notre-Dame pour une crise d'épilepsie, sans lui demander son consentement ni l'en informer. Une semaine plus tard, un neurologue lui annonçait qu'il était séropositif et qu'il souffrait d'un problème neurologique lié au sida. Le neurologue a alors quitté la pièce abruptement sans offrir d'information supplémentaire ou de counselling au patient. L'homme n'a reçu de counselling et de soutien psychologique que le jour suivant. Un mois plus tard, l'homme a eu accès à son dossier médical et a découvert qu'on lui avait effectivement administré un test de'sérodiagnostic du VIH, mais que le résultat était revenu 5 jours après l'annonce de sa séropositivité par ce médecin, et qu'il était en réalité négatif Seulement quelques semaines après ce cas, un autre patient du même hôpital subissait le test de sérodiagnostic du VIH sans y avoir donné son consentement. II n'a été informé du test et de son résultat positif que plusieurs semaines plus tard. Comme dans lé premier 73 74 75 Ibid., aux p. 5-6. CRDO, supra, note 14, à la p. 21. Voir J. Borra, «Faith Test», Hour [Montréal], 30 mars 1996. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail cas, le docteur n'a offert ni counselling, ni information. Elle l'a simplement référé à une clinique, en lui souhaitant bonne chance. Malheureusement, on ne peut pas considérer que de telles violations des droits des patients sont des cas isolés ou limités à un hôpital en particulier: • plusieurs des 60 personnes et organismes consultés en 1995, au cours de la Phase I du Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida, se disaient préoccupés par le fait que le test de sérodiagnostic du VIH était fréquemment pratiqué sans le consentement spécifique et éclairé du patient; • selon Me David Thompson, avocat montréalais représentant les deux patients des cas de Notre-Dame, des personnes admises dans des hôpitaux subissent fréquemment un test de routine du VIH sans leur consentement.76 Un rapport préparé par le Centre de bioéthique de l'Institut de recherches cliniques de Montréal présente des témoignages qui tendent à confirmer ceci;77 • une étude menée auprès de femmes vivant avec le VIH à Montréal a révélé que: • une femme sur huit, blanche et n'utilisant pas de drogue par injection, et • une femme sur quatre, haïtienne ou d'origine africaine participant à l'étude avait subi le test sans en être informée;78 • dans son mémoire à la CRDO, le Comité sida d'Ottawa rapportait être au courant que des médecins négligeaient fréquemment de demander le consentement des patients avant de leur administrer le test;79 • en outre, dans un sondage effectué parmi des médecins québécois, un tiers des répondants approuvaient l'administration du test sans l'autorisation du patient.80 Qu'est-ce qui pousse des médecins à administrer un test à des patients sans leur consentement? Plusieurs hôpitaux américains ont affirmé que des préoccupations relatives à la transmission du patient aux prestataires de soins médicaux constituent un facteur.81 Certains médecins sont d'avis que, pour pouvoir se protéger, ils doivent connaître le statut sérologique du patient, contrairement au principe selon lequel les précautions doivent être 76 Ibid. D. Roy (éd.), VIH et sida: plan d'action triennal - aspects éthiques et juridiques, Montréal, Institut de recherches cliniques de Montréal, 1991, à la p. 9. 7 8 C. Hankins et coll., «HIV Testing Experience of Women Living with HIV, abrégé présenté à la Ile International Conference on the Biopsychosocial Aspects of HIV Infection», Brighton (Royaume-Uni), juillet 1994. 7 9 CSO, supra, note 15, à la p. 15. 8 0 R.A. Paiement, «La perception du SIDA par les médecins québécois», BULLETIN, 1990, 30(4): 19. C.E. Lewis, K. Montgomery, «The HIV-Testing Policies of US Hospitals», Journal of the American Medical Association, 1990, 264(21): 2764 à la p. 2765. 7 7 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail appliquées de manière universelle.. En outre, certains médecins semblent ne pas comprendre pourquoi le test de sérodiagnostic du VIH devrait être abordé différemment d'autres tests médicaux. 3. Évaluation Le consentement éclairé est un aspect de la profession médicale depuis suffisamment longtemps: sa nécessité devrait être claire. À la lumière des conséquences importantes qui se rattachent au fait, pour un patient, d'apprendre qu'il est séropositif, il n'y a aucune raison pour ne pas insister sur le consentement éclairé avant de prélever du sang ou quelque fluide corporel en vue d'un test d'anticorps anti-VIH.82 Avant d'ordonner un test de détection des anticorps du VIH, les médecins ont le devoir de se renseigner sur sa signification, sur l'usage qu'il convient d'en faire et sur les répercussions néfastes qu'il risque d'avoir. En effet, si les résultats du test devaient à être connus par des tiers, il s'ensuivrait des conséquences désastreuses pour le patient et pour sa vie privée. Cela reste encore vrai au début de la présente décennie. C'est pourquoi on commèt une grave erreur en considérant que les tests de dépistage du VIH sont comme n'importe quel autre test et qu'ils ne nécessitent plus la triple sauvegarde de la confidentialité, du counselling et du consentement [emphase dans l'original]83 L'ostracisme qui peut découler du résultat du test requiert que l'on adopte un certain nombre de mesures de précaution dans toute situation où une personne subira un test pour la présence d'anticorps au VIH. Le consentement éclairé donne à une personne la possibilité de déterminer si le test peut correspondre à ses motifs de le subir.84 Bien que l'on constate que certains cliniciens sont d'avis qu'il est temps de réintégrer le sida à la pratique médicale générale85 et d'autoriser le test sans consentement spécifique, il est important qu'au point tournant actuel on résiste aux pressions en faveur du test de routine:. Il est clair que les avantages possibles du test ont considérablement augmenté pour l'individu, mais les préjudices possibles demeurent importants: Le test de sérodiagnostic du VIH se distingue facilement de la plupart des tests sanguins ordinaires pour plusieurs raisons. D'importance primordiale est le fait que les conséquences personnelles, sociales et financières peuvent être graves lorsque l'on est identifié comme séropositif.86 M. Mackinnon, K. Cottrelle, H. Krever, Legal and Social Aspects of AIDS in Canada, dans Le SIDA: L'état de la question au pays - Documents de travail, supra, note 11, 347-373, à la p. 372. 8 3 Roy, supra, note 77, à la p. 43. 8 4 Field, supra, note 4, aux p. 46-47. 8 5 Bayer, 1989, supra, note 21, à la p. 121. 8 6 CRDO, supra, note 14, à la p. 23. 82 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Tel que l'exprime Field: De la même façon que le sida est différent de toutes les maladies connues, les conséquences possibles du test pour détecter les anticoips anti-VIH ne peuvent être comparées à rien d'autre, dans notre société. Le test peut entraîner des conséquences qui affectent tous les aspects de la vie. La connaissance par d'autres du fait qu'une personne est séropositive, ou même simplement qu'elle a, subi le test, [...] peut causer de sérieux préjudices. 87 La discrimination reliée au VIH demeure insidieuse, au Canada. En 1989, la seule étude au pays menée sur la discrimination liée au VIH/sida a conclu que c'est un problème grave.88 Pareillement, en 1992, le Comité consultatif national sur" le sida a affirmé que la discrimination envers les personnes vivant avec le VIH est une réalité au Canada. Le Comité a également affirmé que d'après le nombre de demandes intentées en vertu des divers codes de droits de la personne et l'expérience des gens, ce phénomène est répandu. Il a lieu dans le domaine du logement, de l'emploi, de l'accès aux soins médicaux et la manière dont ces soins sont dispensés, de la garde d'enfants et l'accès à ceuxci, de l'assurance, de la toxicomanie, des prisons; il se produit en raison, d'une déficience, de l'orientation sexuelle, du sexe et de la race. Il y a eu des cas flagrants, mais la plupart des cas sont plus subtils. Même la pauvreté devient une réalité en rapport avec l'infection à VIH: certaines personnes s'appauvrissent parce qu'elles ont le sida et les pauvres peuvent courir un plus grand risque.89 Aujourd'hui, 15 ans après le début de l'épidémie, la discrimination contre les personnes vivant avec le VIH/sida demeure une préoccupation fondamentale au Canada. Plus de 60 particuliers et organismes consultés, pendant la Phase I du Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions juridiques et éthiques soulevées par le VIH/sida, se sont dit préoccupés par les nombreux cas de discrimination injustifiée à l'endroit de personnes vivant avec le VIH/sida et de gens autrement touchés par la maladié, dans plusieurs sphères de leur vie, y compris l'emploi, le logement, l'accès aux services, etc. Tous étaient d'accord pour dire que les efforts pour réduire la discrimination doivent constituer une priorité, parce que «les gens perdent encore leur emploi, se voient refuser des soins médicaux, une garderie pour leurs enfants, etc.». Le VIH/sida demeure différent des autres maladies: tandis que la majorité des maladies suscitent la sympathie et le soutien de la famille et de l'entourage, les personnes vivant avec le VIH ou le sida sont encore craintes et fuies. Encore récemment (en novembre 1996), le Réseau recevait un appel d'une école québécoise: un élève venait de révéler à des Field, supra, note 4, à la p. 45. British Columbia Civil Liberties Association, La discrimination liée au sida au Canada. Une étude sur la nature et la portée de la discrimination indue au Canada à l'égard des personnes atteintes du sida et de celles qui sont infectées par le VIH ou soupçonnées de l'être, Vancouver, Civil Liberties Association, 1989. 8 9 Comité consultatif national sur le sida. Le VIH ét les.droits de la personne au Canada; Ottawa, le Comité, 1992. 87 8 8 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail professeurs et à des copains qu'il vivait avec le VIH. La réaction était caractérisée par la peur et le rejet, et non la compassion: . .v Q u i n z e ans après le début de l'épidémie et en l ' a b s e n c e complète de risque p o u r les autres é l è v e s et les p r o f e s s e u r s , certains p r o f e s s e u r s souhaitaient pourtant que l ' é l è v e soit renvoyé. Ceci n'était p a s q u ' u n c a s isolé: c h a q u e semaine, le R é s e a u et d'autres organismes communautaires partout au C a n a d a reçoivent d'autres appels du g e n r e . 9 0 On considère généralement que la discrimination est plus répandue que ne l'estiment les statistiques officielles; en outre, bien que l'on ait identifié clairement dès le début de la pandémie les conséquences éventuelles de la discrimination liée au VIH et que les autorités nationales et internationales aient identifié à plusieurs reprises des stratégies pour y réagir, certains faits indiquent que la discrimination liée au VIH/sida est en train de devenir plus généralisée, plus subtile et plus ancrée.91 Compte tenu du fait que la possibilité dè stigmatisation et de discrimination sont encore une menace imminente pour le bien-être dés personnes vivant avec le VIH, les aiguments en faveur du consentement spécifique et éclairé conservent toute leur pertinence. Ceci a été reconnu récemment dans les Directives de VONU sur le VIH/sida et les droits de l'Homme, adoptees lors de la deuxième Consultation internationale sur le VIH/sida et les droits de l'Homme (Genève, septembre 1996), en vertu desquelles «le test du VIH ne devrait être autorisé qu'en présence du consentement spécifique et éclairé de la personne concernée, sauf dans le cas de tests de dons de sang/tissus/organes», [trad.]92 En outre, tel que souligné par Bayer, même si la situation s'est considérablement améliorée sur le plan clinique, les arguments moraux pour insister sur le consentement éclairé avant le test demeurent intacts. L'éthique médicale comprend le principe éthique reconnu que des adultes compétents ont • le droit de déterminer les traitements qu'ils entreprennent; et • le droit de mettre fin à ces traitements. R . Jûrgens, Le VIH/sida dans les prisons - Notes de présentation au Sous-comité parlementaire sur le VIH/sida, Montréal, Réseau juridique canadien VIH/sida, 26 novembre 1996. 9 1 B. Tindall, G. Tillen, «HIV-related Discrimination», AIDS, 1990,4 (supplément 1), p. S251-S256.'/ 92 Directives concernant le VIH/sida et les droits de l 'homme, adoptées lors de la deuxième Consultation internationale sur le VIH/sida et les droits de l'Homme, 23-25 septembre 1996, Genève, Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida et Centre pour les droits de l'Homme, 1996 (ébauche). Une première version française des Directives a été publiée en janvier 1997, en annexe à: Nations Unies, Conseil économique et social, Deuxième Consultation internationale sur le VIH/sida et les droits de l'homme (Genève. 23-25 septembre 1996) - Rapport du secrétaire général, Genève, le Conseil, 1997 (E/CN.4/1997/37), qui est disponible sur l'Internet à l'adresse <http://www.hiv.unaids.org/unaids/document/humright/3797fr.html>. 90L VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Par extension, ce principe — qui pose des limites à l'autorité paternaliste du médecin dans l'intérêt du patient — accorde aux adultes compétents le droit de décider s'ils désirent subir un test qui servirait de base pour amorcer un traitement.93 Pour assurer que le test ne soit entrepris qu'en présence du consentement spécifique et éclairé du patient, la CRDO a recommandé l'adoption d'une loi détaillée et spécifique au VIH, régissant le test et la protection des renseignements qui s'y rattachent, où il serait stipulé qu'aucun test relatif au VIH ne doit être administré à un patient sans son consentement volontaire, éclairé et spécifique.94 Certaines lois stipulant que le test ne soit effectué qu'en présence du consentement éclairé du patient, et prévoyant des amendes ou d'autres pénalités en cas d'infraction, existent déjà dans certains Etats. L'État de New York, par exemple, requiert une preuve écrite du consentement éclairé d'un,patient avant que le laboratoire ne réponde à une demande de test.95 L'adoption de politiques au niveau hospitalier peut aussi contribuer à assurer que l'on comprenne l'importance d'obtenir le consentement éclairé du patient avant de pratiquer le test. Toutefois, ceci peut entraîner des désaccords profonds parmi les médecins, relativement aux options d'autoriser le test de sérodiagnostic du VIH sur un consentement général aux tests sanguins de routine ou encore de n'y procéder qu'en présence d'un consentement spécifique et éclairé et de counselling. Au Vancouver Hospital and Health Sciences Centre, où une politique a été adoptée, on a trouvé un compromis: le test de sérodiagnostic du VIH a été inclus au consentement général aux tests médicaux, mais une mention de la possibilité que soit pratiqué le test du VIH a été ajoutée aux formulaires généraux de consentement, tout en offrant aux patients l'option de le refuser.96 Une meilleure solution consisterait à adopter des politiques qui excluent explicitement le test de sérodiagnostic du VIH du consentement général aux tests médicaux et qui précisent que ce test ne devrait être administré qu'avec un consentement spécifique et éclairé du patient, mais tout en exigeant que les médecins offrent le test et le counselling aux patients de façon systématique. 9 3 Miller et Pinching, supra, note 53, à la p. S189. Toutefois, si le respect de l'autonomie du patient nécessite que les médecins fassent preuve de retenue, la responsabilité éthique du médecin dè prodiguer des soins appropriés, le principe de la bienfaisance, requiert maintenant qu'ils offrent de façon systématique le test de l'anti-VIH aux patients dont l'historique social laisse entrevoir une possibilité accrue d'infection. Ce n'est que par l'offre de routine de tels tests, que les patients peuvent avoir l'occasion de savoir s'ils sont ou non séropositifs. Alors, seulement, peuvent-ils exercer leur droit de décider d'entreprendre ou non une thérapie ou de participer à des essais cliniques [ibid.]. 94 95 CRDO, supra, note 14, à la p. 27. New York HIV and AIDS Related Information Law, NY Code, §§ 2780-2787, au § 2781. A. Browne, University of British Columbia Centre for Ethics (Vancouver), entrevue le 23 août 1996. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 4. Conclusions 1.1 En dépit des récents développements, les arguments en faveur d'un consentement spécifique et éclairé conservent toute leur pertinence. Règle générale, au Canada, le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être pratiqué qu'en présence d'un consentement spécifique et éclairé par la personne qui le subit 1.2 Les hôpitaux devraient être incités à adopter, relativement au test de sérodiagnostic du VIH, des politiques qui précisent que ce test ne devrait être pratiqué qu 'en présence d'un consentement spécifique et éclairé par la personne qui le subit 1.3 Les médecins devraient offrir le test de sérodiagnostic du VIH de façon systématique aux patients dont l'historique montre une possibilité d'infection à VIH, mais s'abstenir d'administrer le test sans le consentement spécifique et éclairé, pour deux motifs: les préjudices possibles du test et le respect de l'autonomie des patients. 5. Exceptions Nonobstant ces conclusions, on peut se trouver en face de situations où il pourrait être justifié de faire exception au principe de ne pas pratiquer le test de sérodiagnostic du VIH sans le consentement volontaire, spécifique et éclairé du patient. La présente section identifie deux situations telles. (1 ) Test des donneurs de sang, d'organes, de sperme ou de produits corporels similaires Le test obligatoire des donneurs de sang, organes, tissus, ovules, sperme, ou d'autres parties du corps ou liquides corporels est endossé de manière universelle comme une méthode essentielle et efficace pour prévenir la propagation du VIH. Bien que le test courant ne détecte pas tous les donneurs séropositifs, son apparition a néanmoins accru considérablement la sécurité des banques de produits humains. 1.4 VIII La règle générale, au Canada, selon laquelle le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être pratiqué qu'en présence du consentement spécifique et éclairé de la personne qui le subit, ne s'applique pas dans le cas du test de donneurs de sang, organes, sperme et produits corporels similaires. Dans tous ces cas de dons, les donneurs éventuels devraient être informés, avant que ne soit pratiqué le test, du fait qu'on procédera à un test relatif au VIH, et recevoir des renseignements appropriés sur sa nature et son but Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (2) Test à des fins de recherche — dépistage anonyme non relié La question de savoir si Ton devrait permettre que le dépistage épidémiologique soit effectué sans le consentement éclairé constitue une question plus controversée que le test des donneurs de sang, organes, sperme ou autres produits humains. Avec l'apparition du test, en 1985, il devenait possible d'effectuer des recherches sur l'ampleur de l'épidémie et d'observer l'évolution de ses voies de propagation. Ce type d'information est un atout important dans l'élaboration, l'application et le suivi de programmes de prévention et de contrôle du VIH. Le test volontaire et le test obligatoire ne permettent pas d'obtenir cette information, car ils offrent une perspective biaisée de la prévalence du VIH dans la population: • dans le cadre du test volontaire, les personnes les plus exposées aurisqued'infection à VIH et celles qui sont autrement marginalisées par la société peuvent être surreprésentées ou sous-représentées dans le groupe d'individus qui subit le test; • de la même manière, le test requis ou le dépistage requis ne permettent pas d'accéder à une information qui soit suffisamment précise ou complète pour être utile à la surveillance dans le cadre de la santé publique, puisque les personnes vulnérables au VIH peuvent éviter le contact avec des services de santé ou liés au test, créant ainsi un biais statistique d'autosélection dont le degré est inconnu.97 Par conséquent, comme alternative aux programmes de test volontaire ou requis de personnes à desfinsde recherche épidémiologique, on a créé des programmes de dépistage anonyme non relié (DANR). Le DANR, aussi appelé «test à insu», consiste à pratiquer le test d'une manière systématique sur les échantillons de sang non utilisés qui avaient été prélevés pour des raisons médicales autres que le test de sérodiagnostic du VIH lui-même. 97 OMS 1992, supra, note 2, aux p. 2-3. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (i) Historique Développements internationaux Les recherches ayant recours au DANR ont vu le jour aux É.-U. en 1986.98 En 1988, le Royaume-Uni a amorcé une série d'études utilisant le DANR.99 En 1989, l'OMS endossait le recours au DANR pour permettre la cueillette de données épidémiologiques sur le VIH, tout en précisant que les critères suivants doivent être respectés lorsque l'on entend effectuer un DANR:100 1. Avant d'entreprendre un programme de dépistage anonyme non corrélé dans le cadre de la santé publique, il est indispensable d'étudier en détail ce type de dépistage sur le plan éthique dans le contexte socio-culturel du pays où il doit être exécuté. Si le dépistage va à rencontre de la politique nationale de santé publique en vigueur, il ne devra pas être entrepris. On peut considérer qu'il obéit aux directives internationales en vigueur concernant le respect des droits de l'homme dans la recherche biomédicale.[101] S'il est proposé par un pays mais réalisé dans un autre, la proposition doit être soumise à un comité d'éthique du pays qui l'a émise de même qu'à un oigane analogue du pays hôte. 2. Les échantillons destinés aux examens de dépistage anonyme doivent avoir été prélevés à d'autresfins,avec le consentement du sujet. Prélever le sang essentiellement ou uniquement pour procéder au dépistage de l'infection à VIH poserait de graves problèmes d'éthique. La quantité de sang prélevée doit représenter le minimum indispensable et être, au plus, très légèrement supérieure à celle qui est nécessaire pour réaliser les autres tests auxquels l'échantillon était destiné. 3. Il ne sera demandé aucun autrerenseignementque ceux qui sont recueillis auxfinspremières pour lesquelles l'échantillon a été prélevé. 4. Toutes les indications susceptibles de permettre l'identification de l'individu testé doivent être éliminées des échantillons réservés au dépistage anonyme non corrélé avant leur examen en laboratoire. 9 8 «Federal Centre on AIDS Working Group on Anonymous Unlinked HIV Seroprevalence - Guidelines on ethical and legal considerations in anonymous unlinked HIV seroprevalence research», Journal de l'Association médicale canadienne, 1990, 143(7): 625-627, a la p. 626. 9 9 S. Gook, «Go-Ahead for Mass AIDS Test», The Guardian, 24 novembre 1988. À l'origine, des objections au DANR ont été soulevées dans les communautés médicale, éthique et juridique. Un compromis a été atteint pour permettre d'aller de l'avant, assorti d'une provision permettant de s'y soustraire et convenablement annoncée. Pour plus de détails, voir R. Bayer et coll., «The American, British and Dutch Responses to Unlinked Anonymous HIV Prevalence Studies: An International Comparison», AIDS, 1990, 4: 286. 100 Organisation mondiale de la santé, Dépistage anonyme non corrélé pour la surveillance des infections à VIH dans le cadre de la santé publique - Propositions de directives internationales, Genève, OMS, Programme mondial de lutte contre le sida, 1989 (GPA/SFI/89.3). 1 0 1 Association médicale mondiale, Declaration of Helsinki: Recommendations Guiding Medical Doctors in Biomedical Research Involving Human Subjects, document adopté lors de la 18e Assemblée médicale mondiale, Helsinki, Finlande (1964), amendé à la 29e Assemblée médicale mondiale, Tokyo, Japon (1975) et à la 35e Assemblée médicale mondiale, Venise, Italie (1983). VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 5. Les protocoles de dépistage anonyme non corrélé doivent être soigneusement examinés afin: a) qu'il n'existe aucun moyen de déterminer à qui correspondent les résultats des tests; b) que les études puissent être réalisées en vue d'obtenir le maximum de données utiles à la surveillance, compte tenu des estimations de la prévalence du vims dans la population sous surveillance; c) que le personnel chargé du dépistage soit préparé à respecter le protocole de dépistage anonyme non corrélé et puisse être soumis à des contrôles, en vue d'éviter toute atteinte à l'anonymat. 6. Chaque fois que cela sera possible, les populations faisant l'objet d'un dépistage anonyme non corrélé devraient avoir la possibilité de se soumettre volontairement aux examens (avec garantie de confidentialité et d'anonymat) afin que les personnes qui veulent savoir si elles sont infectées par le VIH puissent en être informées. Cette recommandation est particulièrement importante quand, d'après les estimations, la prévalence de l'infection à VIH de la population est de modérée àforte.D devrait toutefois être possible de subir ces examens dans le cadre d'un programme distinct. 7. Les ressources consacrées au dépistage anonyme non corrélé devraient être proportionnelles à son rôle dans la surveillance, dans le cadre d'un programme complet de prévention et de lutte contre le VIH/sida. Ce dépistage ne devrait pas faire obstacle à laréalisationd'autres importants objectifs de santé publique, notamment celui pour lequel les échantillons ont été recueillis. 8. L'attention des dispensateurs de soins de santé primaires devrait être appelée sur le fait que les échantillons qu'ils prélèvent sur les patients peuvent être utilisés pour le dépistage anonyme non corrélé du VIH. 9. Dans lesrégionsoù la prévalence du VIH est faible, on pourrait envisager de grouper les échantillons de sérum prélevés en vue du dépistage anonyme non corrélé du virus. De plus, l'OMS a avancé les «problèmes à résoudre» qui suivent, pour assurer que les critères et les normes des programmes de surveillance soient respectés: 1. De quelle manière annonce ra-t-on un programme de dépistage anonyme non corrélé afin que les gens n'hésitent pas à s'adresser à des services dispensateurs de soins de santé desquels des échantillons en vue de ce dépistage pourraient être obtenus? 2. Comment convaincre les dispensateurs de soins de santé et le public que le dépistage anonyme non coirélé est effectué dans le respect des normes et dans l'anonymat? VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 3. De quelle manière axer les services sur les groupes de population dont on sait qu'ils comprennent des personnes infectées par le VIH? 4. Quelles informations (l'âge, le sexe, par exemple) seront-elles notées sur l'échantillon de sang, vu la nécessité de conserver l'anonymat tout en recueillant les données les plus utiles à l'exercice d'une surveillance? D'une manière générale, il faudrait conserver le maximum d'informations utiles tout en respectant l'anonymat. On aurait intérêt à joindre ces informations à l'échantillon (sur l'âge, par exemple, en indiquant seulement le groupe d'âge). 5. De quelle manière faudrait-il présenter lesrésultatsdu dépistage pour qu'ils puissent être utilisés dans le cadre d'autres activités de prévention et de lutte contre le VIH et le sida? Développements au Canada En octobre 1987, le CCN-SIDA a recommandé que les autorités fédérales de santé entreprennent ou soutiennent la cueillette de données sur la séroprévalence par le biais de DANR.102 En 1988, la Société royale du Canada, le Programme national de recherche et développement en matière de santé et le Centre fédéral sur le SIDA ont proposé que soient effectuées des études de DANR. En particulier, la Société royale a identifié le DANR comme la méthode de prédilection pour atteindre les objectifs de surveillance épidémiologique du VIH.103 Lignes directrices fédérales En octobre 1987, le Centre fédéral sur le SIDA a créé un groupe de travail afin d'élaborer des lignes directrices pour le recours au DANR en recherche. Le groupe a identifié les avantages suivants de l'utilisation du modèle de recherche non reliée: • elle permet des évaluations précises de la prévalence de l'infection à VIH parce qu'elle évite le biais de l'autosélection inhérent à toutes les études volontaires; • elle n'est pas importune; • elle assure le respect de la vie privée puisque les résultats des tests de détection des anticorps du VIH ne peuvent être reliés aux personnes; • elle est rentable.104 Le groupe de travail a considéré que les préoccupations d'ordre éthique et juridique soulevées par le DANR n'écartaient pas son utilisation, pourvu que certaines exigences 102 104 Centre fédéral sur le SIDA, supra, note 98, à la p. 625. Société royale du Canada, supra, note 11. Centre fédéral sur le SIDA, supra, note 98, à la p. 626. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail soient satisfaites. En 1991, le groupe de travail s'est réuni de nouveau et a révisé ses lignes directrices, pour établir que: VIII • Accès universel au moyen du système de soins de santé au dépistage volontaire et individuel en vertu des conditions prescrites du consentement éclairé, du counselling avant et après le dépistage et de la confidentialité serait un préalable. Les personnes dont le sérum non utilisé peut faire l'objet d'études démographiques non reliées doivent avoir accès à des services de diagnostic appropriés pour obtenir des renseignements au sujet de leur état relativement aux anticorps du VIH. • Seul serait utilisé le sérum surnuméraire obtenu régulièrement à d'autres fins. • Le lien serait rompu de façon permanente entre les dossiers avant le dépistage afin qu'il soit impossible en tout temps d'identifier les résultats aux tests individuels. • Aucunrenseignementpouvant mener à l'identification des personnes ne serait utilisé. Aucun échantillon assez restreint pour identifier les personnes ne ferait l'objet d'un rapport. Il faudrait justifier chaque prélèvement d'information démographique et l'analyse des données. L'équilibre entre le besoin de savoir pour la santé publique et les risques et avantages pour un sous-groupe quelconque pouvant être identifié par l'analyse des données doit faire l'objet d'un examen sérieux. • Les populations étudiées devraient être informées de la recherche, au moyen d'une communication claire et équilibrée avec le public. Le consentement éclairé individuel ne serait pas Utile, puisque la recherche ferait appel au sérum non utilisé. H serait impossible de relier les résultats des tests à une personne quelconque. Les données seraient produites pour une population et non pour les personnes qui composent cette population. • Les refus menacent la valeur de la recherche non reliée en créant un biais statistique inconnu. Sur le plan éthique, il n'est pas nécessaire d'inclure une disposition pour l'abandon par une personne de la recherche non reliée sur la séroprévalence du VIH. Les refus spontanés devraient toutefois être respectés dans l'intérêt du soutien à long terme par le public de la recherche non reliée, même si les échantillons surnuméraires de ceux qui refusent de participer devraient être identifiés personnellement. • Le personnel soignant serait informé de la recherche non reliée sur la séroprévalence du VIH. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Autres • Le numéro de téléphone d'une personne-ressource appropriée mandatée par l'autorité dé recherche ou de santé publique serait facilement accessible pour que les patients et le personnel soignant puisse[nt] discuter de la recherche et de tout refus spontané. • La recherche devrait être approuvée par le Comité d'éthique de l'établissement concerné. • Une justification sérieuse serait exigée pour mener une recherche non reliée sur la séroprévalence du VIH sur des populations vulnérables à la discrimination. Les avantages pour le groupe devraient clairement l'emporter sur le préjudice potentiel. La communication des résultats doit faire l'objet d'un examen sérieux. Des représentants des populations cibles devraient participer à ce processus décisionnel. • Toutes ces exigences, y compris l'information de la population étudiée, l'assurance d'un accès à des tests diagnostiques volontaires et appropriés et le respect des refus spontanés, seraient applicables à l'utilisation des banques d'échantillons de sérum dans la recherche non reliée sur la prévalence du VIH.l05 approches En 1991, Sharpe et le ministère de la Santé de l'Ontario proposaient d'autres approches au DANR: • Sharpe recommandait qu'un consentement éclairé de la personne constitue un prérequis du test du VIH, même dans le cas de DANR. De manière exceptionnelle, devant un comité provincial de surveillance éthique, cette exigence pourrait être enfreinte si l'on parvenait à démontrer un intérêt public valable à outrepasser la nécessité du consentement éclairé. Les membres du comité devraient provenir à la fois du grand public et du groupe particulier ciblé par le DANR.106 • Le ministère dé la Santé de l'Ontario a pour sa part recommandé que, même si l'on n'est pas obligé d'obtenir le consentement éclairé des sujets d'études de DANR, on devrait s'assurer que (1) les sujets reçoivent une «information spécifique» sur l'étude de séroprévalence; et (2) si un sujet décide de se soustraire à l'étude, son choix soit respecté. Le Ministère a déterminé que, même si la demande d'un consentement éclairé risque de mettre en jeu la précision des données épidémiologiques de l'étude, les personnes conservent leur droit de «savoir ce qu'il adviendra des liquides corporels ou 5 «Lignes directrices révisées sur les considérations éthiques et juridiques en matière de recherche anonyme et non reliée sur la séroprévalence du VIH», Journal de l'Association médicale canadienne 1992 146(10Y 17451746, à la p. 1746. ' 106 G. Sharpe, «The Ethics of Seroprevalence Studies»,Health Law in Canada, 1991,11(4): 102, à lap. 111. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail organes qu'on prélève sur eux si Ton prévoit effectuer des choses que les gens B n imaginent pas normalement».107 Situation actuelle Jusqu'à juin 1996, 82 études de séroprévalence du VIH avaient été effectuées au Canada, dont 30 avaient eu recours au DANR.108 En Ontario, les études de DANR sont toutefois pratiquement interrompues, vu les déclarations publiques de la ministre provinciale de la Santé. exprimant son desaccord face au test du VIH où l'on n'informe pas les sujets d'un sérodiagnostic p o s i t i f . 109 A u Québec, les études de DANR ont été interrompues pour une aufre raison: 1 article 22 du nouveau Code civil de la province, entré en vigueur le 1 janvier 1995, stipule que: «[u]ne partie du corps, qu'il s'agisse d'organes, de tissus ou d'autres substances, prelevée sur une personne dans le cadre de soins qui lui sont prodigués peut être uthsee aux fins de recherche, avec le consentement de la personne concernée ou de celle habilitée a consentir pour elle» [emphase ajoutée]. (ii) Le débat Par sa conception, la méthodologie de la surveillance du VIH doit offrir le maximum de chances d'obtenir des informations épidémiologiques utiles et precises sur la distribution de l'infection à VIH dans la communauté. Elle doit aussi, parallèlement, réduire au minimum les risques de conséquences indésirables pour les individus et pour la communauté.110 Les programmes de DANR soulèvent encore la controverse, pour trois raisons: • l'absence de consentement éclairé au test: certaines personnes considèrent que le consentement éclairé demeure nécessaire même si les résultats des tests sont non reliés; • les donneurs séropositifs ne sont pas informés du résultat de leur test: certaines personnes considèrent que, particulièrement depuis la découverte de nouveaux traitements prometteurs, ceci est contraire à l'éthique; • le préjudice qui pourrait se produire si une étude indiquait un taux élevé de séropositivité au VIH dans un groupe en particulier, si ce groupe était assez restreint S a n t é d e ^Ontario, HIV Seroprevalence Report, Toronto, le Ministère.1991, à la p 53 cité î°7 ^ F' dans CRDO, supra, note 14, à la p. 73. ' Wfriî?S I?8 2-Spirited People of the 1st Nations, A Community-based Discussion Paper onThe Social, Moral Ethical and Legal Implication of Conducting Blind Seroprevalence Studies in Aboriginal Communities, Toronto, 2-Spirited People, 1996, à la p. 1, avec référence à Inventory of Incidence&revalence Studies in Canada, juin 1996. Communication avec Ann Bowlby, AIDS Bureau (Ontario), le 23 août 1996. 1 1 0 OMS, 1989, supra, note 100, à la p. I. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail pour que les individus qui en font partie risquent d'être identifiées comme séropositives.111 Consentement éclairé Effectuer un DANR semblerait enfreindre le principe de n'administrer de test à qui que ce soit sans obtenir son consentement éclairé. Les échantillons sanguins testés dans le cadre de DANR sont prélevés à d'autres fins; la possibilité du test de L'ànti-VIH n'est pas mentionnée aux patients. Par conséquent, le consentement du patient ne s'applique qu'aux tests dont on les a informés et auxquels ils ont consenti. Par contre, on pourrait soutenir qu'étant donné le caractère anonyme du DANR (la rupture du lien entre la personne et le résultat), le consentement n'est pas requis puisque le test ne cause pas de tort à la personne dont le sang est testé — personne n'a à apprendre sa séropositivité sans sa volonté. On peut par ailleurs formuler l'argument selon lequel les DANR ne devraient pas soulever d'objections morales puisque les droits des individus sur les spécimens de leur corps ne vont pas aussi loin — les échantillons surnuméraires de sang devraient être considérés comme une forme de déchet On a écrit que personne ne serait justifié de se soustraire à un DANR organisé adéquatement, «pas plus qu'un pacifiste ne peut avoir la garantie que les canettes d'aluminium qu'il met à 1 1 1 Dans un document de travail sur les implications sociales, éthiques, morales et juridiques des études de DANR dans les communautés autochtones (2-Spirited People, supra, note 108), on soulève les objections suivantes à ces études: • elles «impliquent une brèche sans précédent dans les principes de la recherche médicale»; • dans certains pays, elles contreviennent à la législation relative à la vie privée, è l'intégrité physique ou aux recherches médicales; elles sont abusives à l'égard des populations vulnérables; • elles produisent pas des données précises, significatives et pertinentes (c.àd. des renseignements démographiques ou sur le facteur de risque); elles «impliquent une conscription d'individus pour les études médicales»; • elle peuvent mener à la discrimination à l'endroit des sous-populations observées. De plus, selon le document de discussion, certains considèrent que: • les populations «doivent savoir que les tests sont effectués et avoir la possibilité de s'v 3 soustraire»; il est «contraire à l'éthique que de ne pas informer et soutenir les personnes séropositives»; • il est trompeur d'utiliser le sang d'un patient pour le bien d'autrui sans qu'il ait donné son consentement éclairé, spécialement lorsque l'information pourrait revêtir une importance pour le r patient En outre, on s'y demande si les Lignes directrices du Groupe de travail fédéral (supra note 105) sont suffisamment à jour, en soulignant que les «balises éthiques et juridiques se, transformeront à chaque nouvelle découverte clinique ou médicale dans le traitement du VIH/sida». VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail recycler ne devront pas être utilisées pour produire dés armés».112 La rupture efficace du lien dans la procédure du test signifie qu'aucun individu, en tant qu'individu, n'est obligé de participer au test et que, par conséquent, il n'y a pas matière à opposition. L'objet du test est un échantillon et non une personne. Plusieurs ne sont toutefois pas satisfaits par de tels arguments: ils considèrent que le consentement est un droit «fort» qui a toujours sa pertinence113 et que, par conséquent, toute dérogation à ce principe devrait se fonder sur une justification très convaincante. Dans certains pays, comme les Pays-Bas, les études de DANR ont été interrompues parce que l'on considère les droits individuels comme trop importants pour qu'ils puissent être mis en jeu de cette façon.114 En Australie, les études à insu sur des nouveau-nés par ponction au talon ont été fustigées et le directeur du New South Wales AntiDiscrimination Board a déclaré que «par principe le comité est opposé, de manière fondamentale, à sa pratique sur quiconque à son insu ... et sans son consentement».115 Les critiques du DANR soulignent plusieurs faits curieusement ironiques dans les justifications offertes par ses tenants. D'abord, ils trouvent étrange que l'on prétende que les gens n'ont pas de droits sur leurs liquides corporels «surnuméraires» mais que, pour un motif ou un autre, la communauté puisse s'approprier le droit de décider de ce qu'il advient de ces surplus. Ils soulignent aussi que certains tenants du DANR, craintifs de biaiser leur échantillonnage, ne voient pas le besoin — ni même la possibilité — d'offrir aux gens l'option de se soustraire aux études à insu. Les critiques considèrent important d'informer le public de l'utilisation des échantillons. Tel que l'a affirmé David Coburn, de la Patients' Rights Association of Ontario, «c'est un malheureux dilemme éthique que de prétendre vouloir informer mais de ne pas réellement informer, ni d'offrir de choix».116 Connaissance de l'état sérologique à l'égard du VIH En présence de meilleurs médicaments [...] la pression s'accroît pour que cesse le dépistage à insu. L'argument est que, du point de vue moral, il est difficile pour l'État, de connaître indirectement l'état sérologique d'une personne alors qu'il existe un traitement. Comme l'affirme Levine: «Maintenant qu'il existe des raisons de conseiller aux personnes possiblement séropositives de se prévaloir du test et d'une intervention thérapeutique précoce, la pression augmente afin que, pour cela, les études de séroprévalence ne soient plus à insu».117 1 1 2 H.E. Emson, «The Ethics and Legality of HIV Prevalence Studies: A Contrary View», Health Law in Canada, 1992, 12(4): 95. 1 1 3 D. Coburn, «Individual and Communinty Rights in Anonymous Unlinked HIV Seroprevalence Research: A Response to Dr Emson», Health Law in Canada, 1992,12(4): 97. 1 1 4 R. Bayer, «(Ethical and Social Policy Issues Raised by HIV Screening: Hie Epidemic Evolves and so Do the Challenges», AIDS, 1989, 3: 119, à la p. 123. Voir aussi 2 Spirited People, supra, note 108, à la p. 19. 1 1 5 Cité dans 2-Spirited People, supra, note 108; à la p. 21. 1 1 6 Emson, supra, note 112, à la p. 99. 11 7 2-Spirited People, supra, note 108, à la p. 22, avec référence à C. Levine, AIDS and the Ethics of Human Subjects Research, dans F. Reamer (éd.), AIDS and Ethics, New York, Columbia University Press, 1991, 77-105. à la p. 84. VIII VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Selon certains, c'est précisément l'anonymat du DANR —: l'aspect même qui, selon d'autres, justifie qu'il soit exempté du pré-requis du consentement éclairé — qui le rend contraire à l'éthique. La rupture du lien entre les résultats des tests et leurs sujets implique que ceux qui sont séropositifs ne seront pas informés de leur état, «les laissant froidement dans le noir» et les privant de l'occasion d'avoir recours à des conseils médicaux et de modifier leur comportement pour éviter de transmettre le virus à autrui.118 On compare parfois cette situation à la tristement célèbre expérience menée à Tuskgee (Alabama), où des hommes afro-américains pauvres ont subi un test de la syphilis sans être informés du résultat, de manière à ce que l'on puisse étudier la progression de la maladie.dans les cas non traités.119 Les tenants du DANR considèrent que, tant qu'on offre l'accès universel au test volontaire du VIH, les individus qui désirent connaître leur état sérologique peuvent le faire. Mais ses opposants rétorquent que certaines personnes peuvent ne pas soupçonner qu'elles ont été exposées au VIH. En conséquence, elles n'ont pas recours au test: ces personnes peuvent n'avoir aucun autre moyen de savoir qu'elles vivent avec le VIH. Cet argument a conduit à des plaidoyers en faveur du rétablissement du lien entre les données d'identification et les résultats des tests afin que personne n'ait le «privilège» que son état sérologique lui soit caché. Le gouverneur Pataki, de l'État de New York, à la suite d'une poursuite judiciaire, annonçait en octobre 1995 un plan pour modifier le programme de cet État en matière de DANR du VIH chez les nouveau-nés de cet État, afin de permettre que l'on puisse relier le résultat à l'individu.120 Une situation semblable s'est présentée au niveau fédéral [américain]: un projet de loi déposé au Congrès proposait de modifier la surveillance par DANR pour en faire un programme de test requis. Les représentants qui ont présenté ce projet de loi considéraient moralement discutable le fait que le CDC effectuait des dépistages qui ne permettaient pas que les nouveau-nés séropositifs soient identifiés et traités. Bien que le projet de loi fut modifié par la suite, le CDC mettait un terme à ses études de séroprévalence sur les nouveau-nés à lafinde 1995.121 -«Don*t keep AIDS victims in the dark», USA Today, 21 janvier 1987. Bayer refuse cette analogie. Voir HIV/AIDS: International Perspectives on Legal Issues and Human Rights. Washington, National Council for International Health, 1995, aux p. 29-33. 1,8 119 1 2 0 R- Jûrgens, «État de New York: dépistage du VIH chez les nouveau-nés». Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1996, 2(2): 17. 1 2 1 S. Reese, «CDC Ends AIDS Tracking of Newborns, Mothers», Star Tribune, 31 décembre 1995, 3E. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Préjudice pour les participants Des préjudices pourraient se présenter, • si le groupe observé dans une étude était assez petit pour permettre d'identifier comme séropositifs des participants précis;122 • si une étude révélait une incidence élevée de séropositivité, au sein d'un groupe en particulier, qui pourrait mener à de la discrimination contre tous ses membres.123 Relativement au second point, le rapport de la CRDO soutient que les données recueillies par des études épidémiologiques adéquatement effectuées sont d'une importance extrême Au Canada, les demandes pour que soit rétablie la corrélation entre les données d'identification et les résultats de tests du VIH, afin que personne n'ait le «bénéfice» de se voir «cacher» son état sérologique, ne sont pas chose nouvelle non plus. Plusieurs mois après l'ouverture de la Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang (Commission Krever), on a découvert que la Société canadienne de la Croix-Rouge avait conservé des échantillons de sang provenant de donneurs de la région de Toronto — de l'époque où il n'existait pas de test de sérodiagnostic du VIH — afin d'étudier la prévalence du virus de l'hépatite B dans l'approvisionnement en sang. En prévision que soit un jour possible une telle étude pour le VIH, la Croix-Rouge avait conservé 175 000 échantillons. Toutefois, rien n'avait été fait avant que la Commission Krever n'en révèle l'existence. Malgré les conseils d'experts, on a pris la décision de non seulement effectuer un dépistage du VIH sur ces échantillons, mais de conéler les résultats et d'en informer les donneurs. La SCS a porté l'affaire devant les tribunaux pour empêcher cette action, en faisant valoir que cela équivaudrait à administrer un test obligatoire à des gens « " g leur consentement Le juge n'a pas accepté cet argument, déclarant que «[l]e fait que certains des donneurs dont le sang a été trouvé séropositif pourraient s'opposer à ce qu'on les en avertisse, à cause de l'effet que ceci pourrait entraîner pour eux, ne peut pas avoir préséance sur le besoin de faire ce qui est nécessaire pour prévenir ce que l'on décrit comme étant une épidémie» (Société canadienne du sida c. Ontario (1996), 25 OR 3e 388). La SCS a porté la décision en appel, mais sa requête a été rejetée dans une décision rendue le 29 novembre 1996. Toutefois, la Cour d'appel de l'Ontario ne s'est pas prononcée sur la question du consentement, déclarant que: «En ce qui concerne les arguments de la demanderesse, fondés sur la Charte des droits et libertés, nous considérons, la décision sur cet appel, que le juge Wilson avait raison de conclure qu'il n'y avait pas de consentement au test des échantillons en question. Notre hésitation à nous prononcer sur la question du consentement, outre que cela semble superflu dans la décision ultime, vient de la difficulté à faire la différence entre les obligations légales en 1984 et 1985, lorsqu'ont été faits les dons de sang, et la notion croissante d'obligation morale à obtenir un consentement éclairé, tel que l'a révélé le débat ultérieur sur la question du sida. Il est préférable que la question de savoir si cette notion d'obligation morale en est aussi une d'ordre légal soit tranchée une affaire dont le résultat repose sur cette décision» (Cour d'appel de l'Ontario, 29 nov. 1996, dossier no C22614). La SCS a porté l'affaire devant la Cour suprême du Canada. 1 2 2 Dans son mémoire à la CRDO, le CSO a soutenu qu'une telle situation s'est produite en Ontario lorsqu'une étude de DANR avait été menée dans plusieurs hôpitaux universitaires. L'étude permettait de relier les résultats à l'hôpital précis où le sang des femmes avait été prélevé; selon le CSO, lorsque les résultats ont été rendus publics, les femmes qui avaient accouché dans l'un de ces hôpitaux universitaires étaient soudainement devenues des «suspectes» parce qu'elles faisaient partie de ce «groupe â risque» artificiellement créé à des fins scientifiques (CSO, supra, note 15, à la p. 4). 1 2 3 Ainsi, on a soutenu que les DANR peuvent soulever la peur, la panique et l'hystérie dans les communautés autochtones; accroître le racisme et la stigmatisation à l'égard des peuples autochtones; donner lieu à des «chasses aux sorcières» et à des méfaits (discrimination, marginalisation, violence) contre les hommes autochtones gais et bisexuels et les femmes autochtones ayant plusieurs partenaires sexuels; et «infliger une perte de confort et affecter la confiance des autochtones dans les services de santé et réduire leur recours à ces services» — «[plusieurs autochtones craignaient que les études à insu ne créent des problèmes dans leurs communautés, vu leur population peu élevée, leur méfiance à l'égard des centres gouvernementaux de soins de santé, l'incompréhension au sein de la communauté en général et l'appréhension vis-à-vis du mot "sida"» (2-Spirited People, supra, note 108, aux p. 4, 31). VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail pour cibler les efforts de prévention et pour planifier les services médicaux, et qu'elles «justifient tout préjudice causé indirectement à des populations ou régions démographiques».124 En opposition à cette opinion, bien qu'elles reconnaissent l'importance du DANR, les lignes directrices du Centre fédéral sur le sida mettaient l'accent — tel que mentionné précédemment — sur le fait qu'une justification méticuleuse est nécessaire si l'on entend mener des recherches dans des communautés vulnérables à la discrimination: Les avantages pour le groupe devraient clairement l'emporter sur le préjudice potentiel. La communication des résultats doit flaire l'objet d'un examen sérieux. Des représentants dès populations cibles devraient participer à ce processus décisionnel.125 La question du préjudice potentiel des DANR pour les populations vulnérables a été analysée récemment dans un document de travail sur les implications de telles études dans des communautés autochtones au Canada. Entre autres problèmes, le document résume les résultats d'un sondage mené sur les points de vue et perspectives d'autochtones à l'égard des implications morales, sociales, éthiques et juridiques des études à insu sur la prévalence du VIH dans les communautés autochtones. Selon les 83 répondants: • Santé Canada ne devrait pas recueillir de données épidémiologiques sans le consentement des individus concernés; • les chefs ou les conseils de bande et les organisations provinciales/territoriales ne peuvent pas autoriser Santé Canada à effectuer un dépistage à insu au sein d'une région à population autochtone; • «les individus et la communauté sont les mieux placés pour autoriser cette forme de surveillance du VIH» et, de manière générale, • les avantages du dépistage à insu au sein des communautés autochtones pourraient ne pas l'emporter sur ses aspects négatifs, «qui comprennent le racisme, la discrimination, le tort à divers groupes, de même que la méfiance et l'obstruction de l'accès des autochtones aux services de santé en général».126 124 125 126 CRDO, supra, note 14, aux p. 74-75. Lignes directrices révisées, supra, note 105. 2-Spirited People, supra, note 108, à la p. 4. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (iii) Évaluation Des données sur la prévalence, l'incidence et la distribution de l'infection à VIH au sein d'une population peuvent être utilisées pour surveiller la propagation de l'infection, accroître la connaissance des mécanismes de transmission, élaborer des mesures de santé publique pour prévenir la propagation ultérieure, évaluer l'efficacité des interventions déjà en place et planifier la prestation de services. La cueillette de données à de tellesfinsest presque universellement reconnue comme essentielle à l'amélioration dé la capacité de la société de réagir à cette épidémie:127 Le dépistage anonyme non coriélé de l'infection à VIH ne s'adresse pas à l'individu mais a comme objectif la surveillance de l'infection à VIH dans le cadre de la santé publique. Il s'agit d'une méthode épidémiologique qui permet d'évaluer la prévalence du virus dans une certaine population avec un biais de participation minimal. De ce fait, elle présente un avantage particulier sur le plan épidémiologique, par rapport à la pratique soit volontaire soit obligatoire des examens de dépistage du VIH dans le cadre de la santé publique. Si le dépistage est convenablement réalisé, l'anonymat n'est pas en danger et les sujets ne peuvent être identifiés.128 Consentement éclairé La question de savoir jusqu'où va le contrôle que sont en droit d'exercer les gens sur leurs organes ou liquides corporels soulève certaines questions très complexes qui dépassent largement le cadre du présent document. Néanmoins, dans le cas d'études anonymes et non reliées sur la séroprévalence, lorsqu'un échantillon déjà prélevé à d'autres fins sera jeté si on ne l'utilise pas pour l'étude et qu'il ne peut pas être corrélé à quiconque, il n'est pas évident que le sujet puisse réellement conserver tous les droits de contrôler cet échantillon. En outre, cette revendication semble perdre encore de sa valeur lorsqu'on la compare aux intérêts considérables que comporte pour le public la mesure précise des taux de séroprévalence.129 En conséquence, tel que l'affirme la CRDO, il n'est pas certain que l'on puisse formuler un argument convaincant en faveur de la thèse voulant que l'on demande aux sujets un consentement éclairé ou qu'on leur fournisse des «renseignements précis» sur une étude de séroprévalence ainsi que l'occasion de s'y soustraire. De tels arguments s'affaiblissent davantage face au «fait bien connu qu'une telle procédure compromettra la qualité et la précision des données recueillies, puisque les personnes qui sont les plus susceptibles d'être séropositives sont aussi les plus susceptibles de se soustraire à l'étude».130 Les 127 CRDO, supra, note 14, à la p. 72. 128 129 130 VIII OMS 1989, supra, note 100, à la p. 2. CRDO, supra, note 14, à la p. 74. Ibid. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail refus spontanés devraient toutefois être respectés, tel qu'établi dans les lignes directrices du Centre fédéral sur le SIDA.131 Connaissance de l'état sérologique à l'égard du VIH L'argument selon lequel les études anonymes et non reliées sur la séroprévalence sont immorales étant donné que le bris du lien entre les résultats des tests et les sujets empêche les pérsonnes séropositives d'être avisées de leur état sérologique, «les laissant froidement dans le noir», n'est pas convaincant. Pourvu que ces études soient effectuées seulement là où les gens ont accès au test volontaire, de pair avec des garanties concernant le consentement éclairé, la confidentialité et un counselling adéquat, les préoccupations d'ordre éthique et juridique soulevées par le DANR n'excluraient pas son utilisation: De toute évidence, comme démontré ci-dessus, les avantages potentiels du test se sont accrus pour les individus et les gens devraient être encouragés à subir un test et à demander un traitement si le résultat en est positif. Cependant, l'objectif d'encourager les gens à subir un test volontaire, avec leur consentement éclairé (notamment en leur rendant accessibles des options de test acceptables et en éduquant les médecins à encourager les patients à subir un test), devrait être distingué de l'objectif, tout à fait autre mais tout aussi utile, de recueillir des données sur la prévalence, l'incidence et la distribution au sein d'une population (par des études de DANR). Le but des études de DANR est indépendant de celui du test volontaire individuel et les deux fonctions ne peuvent être remplies du même coup. Préjudice pour les participants Il faut se souvenir que, même si les études anonymes au sein de populations offrent la meilleure protection aux individus impliqués, elles n'offrent pas une protection complète à la population de laquelle proviennent les échantillons. La simple divulgation de données anonymes au sujet d'une population pourrait donner lieu à des répercussions négatives pour ses membres, particulièrement si la population est mince au point que l'on pourrait deviner l'identité même des personnes séropositives. II faut par conséquent prendre soin de minimiser ces effets.132 Si elles sont menées adéquatement,133 les études épidémiologiques ne peuvent porter préjudice à aucun individu. II existe toutefois un danger que des membres de populations ou groupes vulnérables fassent l'objet de discrimination à la suite d'études de DANR révélant une incidence particulièrement élevée d'infection à VIH. Le récent document de 131 132 133 l'on être Lignes directrices révisées, suprat note 105, à la p. 1746. Fraser et colL, supra, note 35, à la p. 141. Afin de protéger l'anonymat, aucune étude ne devrait comprendre un échantillon de sujets si restreint que puisse deviner l'identité d'un individu et aucune donnée pouvant mener à une telle identification ne devrait conservée. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail travail sur les implications de telles études dans des communautés autochtones fait foi de la grande diversité des préoccupations liées au DANR au sein de populations vulnérables, notamment autochtones. Quoique l'on ne puisse en généraliser les conclusions, et en dépit des inquiétudes exprimées à l'égard du questionnaire qui a servi à recueillir les renseignements sur lesquels il se fonde,134 le document montre clairement le besoin de discussions approfondies impliquant la participation de populations vulnérables, , de chercheurs et de bailleurs de fonds, afin «d'examiner les problèmes éthiques et communautaires ainsi que les obstacles et les facteurs aidant à la recherche sur le VIH».135 (îv) 1.5 Conclusion La règle générale, au Canada, selon laquelle le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être effectué qu 'en présence d'un consentement spécifique et éclairé de la personne à laquelle on l'administre, ne s'applique pas aux tests effectués dans le cadre d'un programme de dépistage anonyme (non relié) du VIH à des fins épidémiologiques ou de recherche, pourvu que soient respectées les Lignes directrices sur les considérations éthiques et juridiques en matière de recherche anonyme et non reliée sur la séroprévalence du VIH. On doit toutefois accroître les efforts afin de réduire le potentiel de discrimination à l'égard de populations ou de groupes observés par cette recherche. En particulier, avant d'entreprendre un programme de dépistage anonyme (non relié) du VIH dans une population donnée, les chercheurs et des membres et représentants de la communauté devraient déployer tous les moyens nécessaires afin que les membres de la communauté comprennent les avantages et les inconvénients rattachés à ce type d'étude, soient impliqués dans le processus de recherche et son issue, afin que les résultats puissent être appliqués de manière utile aux programmes et politiques en matière de VIH/sida. 1 3 4 L'inquiétude de Santé Canada, exprimée dans une lettre du Dr D. Sutherland, de Santé Canada, à D. Albert, de 2-Spirited People of the 1st Nations, (en date du 30 juillet 1996) est que «la formulation des questions peut contribuer à la peur et aux sentiments négatifs qui existent déjà dans les communautés autochtones et innuat, au sujet du VIH/sida» et que le questionnaire «est rédigé avec un biais négatif, clairement opposé à cetteméthode de cueillette de données». 1 3 5 2-Spirited People, supra. note 108, à la p. 17, avec référence à K. Hankins, HIV Infection of Women in Aboriginal Populations in Northern Québec. Childbeâring VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail D. COMMENT PROCÉDER AU TEST VOLONTAIRE? TEST ANONYME vs AUTRES FORMES DE TEST Le test volontaire avec le consentement spécifique et éclairé de la personne à laquelle on l'administre est appuyé de manière presque unanime au Canada. Un débat important se poursuit cependant sur la manière de procéder au test volontaire: • La première question, controversée depuis l'apparition des tests de sérodiagnostic du vm, concerne la déclaration des résultats aux autorités de santé publique et la disponibilité du test anonyme. • La deuxième question, controversée depuis peu, concerne le counselling: le counselling pré-test et le counselling post-test sont-ils toujours requis? Cette question est abordée dans le chapitre E. • La troisième question, liée à la deuxième, concerne la disponibilité des nouvelles technologies de tests qui permettent d'effectuer soi-même le test du VIH dans l'intimité du foyer, sans counselling pré-test, parfois même sans counselling post-test Quels sont les avantages et lesrisquesliés à la disponibilité de ces tests? Le chapitre F aborde ce sujet. Nous examinerons d'abord, dans ce chapitre, les recommandations relatives au test anonyme formulées par diverses organisations canadiennes (Historique). On observera ensuite certaines questions liées à l'accès au test, en soulignant que malgré l'accès relativement facile de la majorité des Canadiens aux diverses formes de test de sérodiagnostic du VIH, deux domaines sont problématiques: les femmes continuent d'éprouver de la difficulté à passer le test au cabinet de leur médecin; et, dans certaines provinces, le test anonyme n'est pas disponible (Situation actuelle). On discute ensuite des avantages de la disponibilité du test anonyme, en soulignant plusieurs points où il l'emporte sur les autres formes de test. En outre, le chapitre pose la question de voir si l'argument principal en faveur de la disponibilité du test anonyme n'a pas perdu de son importance en raison de deux nouveaux développements: (1) la disponibilité de nouveaux traitements qui inciteront les personnes diagnostiquées positives à avoir recours à de l'aide médicale (et laisser tomber par conséquent l'anonymat); et (2) l'avènement de trousses de test à domicile qui permettent de le faire chez soi dans l'anonymat (Évaluation). On conclut que (1) il est urgent d'éliminer les obstacles à l'accès des femmes au test; (2) la disponibilité de nouveaux traitements vient souligner l'importance de la disponibilité de centres de test anonyme; et (3) l'avènement de trousses de test à domicile ne rend pas superflus les centres de test anonyme (Conclusions). VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 1. Terminologie On confond souvent le test anonyme et d'autres formes de test. • Le test anonyme ne permet de relier le résultat au patient que par un code (sans indicateur de l'identité) connu uniquement du patient; le médecin et les autres personnes ne peuvent pas connaître l'identité de la personne qui subit le test. • Le test non-nominal permet lui aussi de relier le résultat au patient uniquement par un code (sans indicateur de l'identité) connu seulement par le patient. Le médecin connaît l'identité de cette personne, mais le résultat du test demeure confidentiel et les noms de personnes séropositives ne sont pas rapportés aux autorités de santé publique. • Le test nominal relie directement le résultat à la personne qui a subi le test et le lien est un indicateur d'identité. 2. Historique Le mouvement et les alliés de la lutte contre le sida militaient en faveur du test anonyme. Des codes seraient alors utilisés plutôt que des noms, de manière à ce qu'aucun registre identifiant des personnes ne puisse être tenu et rapporté aux autorités. Les responsables de la santé publique étaient généralement opposés au test anonyme puisqu'ils considéraient le test nominal obligatoire comme un pré-requis d'interventions éventuelles pour aider les personnes séropositives et pour prévenir la transmission. Au cœur du débat résidait la question de savoir si le test vise à procurer à l'État les noms des gens séropositifs (nominatif obligatoire) ou d'informer les personnes dont la santé est en jeu (anonyme).136 Bien que l'on observe au Canada un consensus sur la question de l'accès facile des gens au test de sérodiagnostic du VIH, on n'en observe pas encore sur la question d'y inclure l'option du test anonyme. La plupart des organisations ont cependant reconnu les avantages à tirer de l'implantation de possibilités de test anonyme et ont recommandé que — là où ce n'est pas encore fait — les options de test soit élargies pour comprendre le test anonyme. (1 ) Association du Barreau canadien - Ontario L'ABC-Ontario s'est prononcée en faveur de l'existence de centres de dépistage, se disant convaincue qu'il y a «un certain nombre de personnes de la communauté àrisque[sic] qui ont si peu confiance au gouvernement et à la profession médicale que, malgré la confidentialité du résultat, [elles] ne se présenteraient pour subir un test même si elles en avaient le désir, de peur que leur vie privée ne soit respectée». L'Association a cependant 136 VIII Sears, supra, note 20, à la p. 160. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail déclaré que, à son avis, les centres de test anonyme ne devraient pas être nécessaires bien longtemps, ajoutant qu'ils pointaient «ne pas être économiques au sens général».137 (2) Comité consultatif national sur le sida Dans ses recommandations sur la recherche de l'anticorps anti-VIH au Canada, le CCNsida n'a pas abordé la question du test anonyme. Toutefois, le rapport de Somerville et Gilmore, sur lequel les recommandations du comité ont été basées, souligne que «[i]l est d'autant plus important de comprendre la vulnérabilité de quiconque subit le test que les renseignements fournis spontanément par le sujet ou obtenus par le truchement du test ont un caractère intime», déclarant conséquemment que «le caractère secret des résultats doit être garanti, ou le test doit être pratiqué sous le sceau de l'anonymat de manière à assurer la protection du sujet testé».138 (3) Société royale du Canada La Société a appuyé le test anonyme et a exprimé sa préoccupation liée au fait que, dans certaines provinces, les lois de santé publique pouvaient ne pas permettre qu'il soit offert: [LJ'idée que les résultats des tests ne seraient pas toujours confidentiels pourrait avoir un effet dissuasif sur de nombreuses personnes séropositives qui hésiteraient alors à subir le test. À moins que le but de l'identification dès quelque 30 000 personnes séropositives au Canada soit de les isoler, il ne semble pas y avoir de raisons d'exiger que toutes les personnes séropositives soient identifiées. Que le test soit nominal ou anonyme, apprendre que le résultat est positif peut profondément bouleverser une personne et entraîner un changement de son comportement. Cependant, puisqu'un test anonyme semble plus acceptable à la personne testée et qu'il remplit de nombreux buts épidémiologiques, les lois provinciales sur la déclaration devraient être amendées afin de permettre les tests anonymes.139 (4) Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le sida Son Groupe de travail s'est opposé à l'introduction du test anonyme. En particulier, il a déclaré que «[c]omme principe général de santé publique, l'épreuve nominative est supérieure à l'épreuve anonyme, car cette dernière peut entraver la prestation d'un service adéquat de counseling après l'épreuve et empêcher la notification des résultats, tout particulièrement lorsqu'une "obligation de mettre en garde" existe».140 137 138 139 ABC-Ontario, supra, note 8, à la p. 41. Somerville et Gilmore, note 6, aux p. 7-8. Société royale, Rapport sommaine, supra, note 11, à la p. 15. Comité consultatif f/p/t, supra, note 12, à la p. 44. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (5) Comité parlementaire sur le sida Le Comité parlementaire sur le sida141 a dit n'avoir pas entendu assez de témoignages pour faire des recommandations fermes relativement au test anonyme, bien que plusieurs de ses membres étaient «fermement convaincus» que l'on doive l'appuyer. (6) Commission de réforme du droit de l'Ontario La CRDO a recommandé que tout patient «qui.demande à passer un test relativement au VIH devrait avoir l'option de subir le test de manière non nominale ou de conserver l'anonymat et d'accorder son consentement volontaire, spécifique et informé, par le biais d'un système codé qui ne relie pas le résultat du test à l'identité du patient».142 (7) Comité sida d'Ottawa Selon l'opinion du CSO, le test anonyme d'individus «constitue la seule manière acceptable et légale de concevoir un système de test». De plus, le CSO souligne que même si la disponibilité du test anonyme est d'une importance extrême, ceci ne constitue pas de soi une «panacée»: L'anonymat devrait être élargi au-delà du test et du lieu de déclaration, afin de protéger complètement les droits de la personne des personnes séropositives. A l'heure actuelle, il est nécessaire de révéler son statut pour obtenir l'assurance-chômage et les prestations familiales. Il faut donner son nom et son adresse pour l'accès aux essais cliniques. Il faut généralement divulguer son statut pour prendre arrangement avec son employeur. La Croix-Rouge a reçu l'ordre de révéler l'état sérologique de personnes. Rien de ceci ne devrait se produire.143 (8) Association canadienne de santé publique Selon l'ACSP, «[t]ous les Canadiens devraient connaître et disposer d'une variété de tests volontaires, de grande qualité et exempts de préjugés, y compris des tests confidentiels nominaux et non nominaux ainsi que des tests anonymes».144 Elle a aussi recommandé que toutes les options de test soient rendues disponibles et accessibles à une diversité d'endroits, y compris dans les communautés autochtones et en milieu rural, et que des méthodes scientifiques d'évaluation soient appliquées pour mesurer l'efficacité et l'utilité des différents types de test. Enfin, elle a souligné l'importance d'assurer l'accès au test pour les femmes qui sont vulnérables à l'infection à VIH. 3. Situation actuelle Même si la majorité des Canadiens disposent d'un accès relativement facile au test de sérodiagnostic du VTH, les problèmes persistent dans deux domaines: (1) les femmes 1 Supra, note 13, à la p. 42 (recommandation 34). CRDO, supra, note 14, à la p. 111. 1 4 3 CSO, supra, note 15, à la p. 14. 1 4 4 ACSP, supra, note 16, à la p. 18. 14 142 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail continuent de trouver difficile d'obtenir le test au cabinet de leur médecin; et (2) le test anonyme n'est pas disponible dans certaines provinces: (1 ) Accès au test L'un des obstacles importants dans l'accès des femmes au test découle dè l'idée erronée selon laquelle elles ne sont pas vulnérables à l'infection à VIH. Des conseillers de centres de test anonymes ont exprimé une préoccupation à l'égard du fait que certains médecins n'identifient pas adéquatement, et n'incitent pas à subir un test, les femmes qui sont vulnérables à l'infection à VIH.145 L'Association médicale canadienne a reconnu que l'identification des patients qui devraient penser à subir le test, que ce soient des femmes ou des hommes, est «difficile et constitue le maillon le plus faible dans la décision relative à un tel dépistage».146 Des sondages montrent que moins de la moitié des médecins interrogent systématiquement leurs patients au sujet de leurs antécédents sexuels.147 Une préoccupation encore plus grande est liée au fait que certains médecins déconseillent aux femmes de subir le test. Des lignes directrices sur le counselling citent que les conseillers ne devraient pas tenter de convaincre les gens de ne pas subir le test, même lorsque — selon les discussions qu'ils ont avec eux — ils semblent être «à faible risque».148 Les femmes se voient pourtant souvent refuser le test parce qu'on présume qu'elles ne sont pas «à risque».149 Ceci soulève de graves questions. Comme déclaré dans un mémoire du Réseau juridique canadien VIH/sida présenté au Sous-comité parlementaire sur le VIH/sida: Une caractéristique frappante du débat concernant les femmes et le VIH/sida est le fait qu'il se préoccupe souvent des femmes en tant que mères ou futures mères; on considère rarement les femmes elles-mêmes et les nombreux problèmes qu'elles vivent face au VIH/sida. Par exemple, bien qu'une vive controverse entoure le test obligatoire du VIH pour les femmes enceintes ou les femmes en âge de procréer, celles qui ne sont pas enceintes ou en âge de procréer affirment qu'elles ont toujours de la difficulté à obtenir un test. Cette situation soulève la question de savoir si l'on s'inquiète moins du bien-être des femmes que de celui de leurs enfants ou des enfants qu'elles pourraient avoir. Il faudra s'assurer que les besoins des femmes, «leurs connaissances ... et diverses situations de la vie soient systématiquement prises en considération 1 4 5 Communication avec K. Nallanagagam, Hassle Free Clinic (Toronto), le 23 août 1996. Autre problème: étant donné que les femmes ignorent souvent les risques de leurs partenaires, elle peuvent ne pas avoir conscience de leur propre risque. 1 4 6 Canadian Task Force on the Public Health Examination, Periodic Health Examination, 1992 Update: 3, «HIV Antibody Screening», Journal de l'Association médicale canadienne, 1992, 147(6) 867, à la p. 867. 1 4 7 Voir p. ex. C.E. Lewis, K. Montgomery, «The AlDS-related Experiences and Practices;of Primary Care Physicians in Los Angeles», American Journal of Public Health, 1990, 80: 1511-1513; et W.C. Matthews, L.S. Linn, «AIDS Prevention in Primary Care Clinics: Testing the Market», Journal of General Internal Medicine, 1989, 4: 34-38; ces deux documents sont cités dans Canadian Taskforce on the Periodic Health Examination! supra; note 146, à la p. 868. 1 4 8 Ministère de la Santé de l'Ontario, Test du VIH - Directives sur les consultations préalables et consécutives aux tests anonymes, Toronto, le Ministère, juin 1992, à la p. 3. Ibid., à la p. 3; K. Nallanagam, supra, note 145; communication avec J. Cullingworth, Voices of Positive Women (Toronto), le 2 septembre 1996. 149 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail dans l'élaboration de solutions à l'épidémie»: jusqu'à maintenant, très peu de politiques et de programmes de lutte contre le VIH/sida sont adaptés aux situations concrètes que vivent les femmes».150 On se préoccupe aussi de ce que les femmes qui reçoivent un résultat de sérodiagnostic positif subissent d'autres conséquences néfastes — que ne subissent habituellement pas les hommes séropositifs. Notamment, une étude a révélé que: • 52% des femmes diagnostiquées séropositives craignaient que leurs partenaires ne les quittent lorsqu'elles leur parleraient de leurs résultats; et • 12% s'attendaient à ce que leurs partenaires les agressent et la moitié d'entre elles ont effectivement subi des actes violents de leurs partenaires.151 (2) Test anonyme Le test anonyme n'est pas disponible dans toutes les provinces et tous les territoires canadiens. Les provinces qui offrent expressément le test anonyme sont: • Terre-Neuve,152 • la Nouvelle-Écosse,153 • le Québec,154 • l'Ontario,155 et • la Saskatchewan.156 1 5 0 R. Jûrgens, VIH/sida et discrimination: mémoire présenté au Sous-comité parlementaire sur le VIH/sida par le Réseau juridique canadien VIH/sida, Montréal, le Réseau, 15 mai 1996 (disponible sur l'Internet: http://www.odyssee.net/-jujube), avec référence à Reid, E., «Gender, Knowledge, and Responsibility», dans Mann, J.M., D . J . M Tarantola et T.W. Netter (éd.), AIDS in the World, Cambridge (Massachusetts), Harvard University Press, 1992, aux pages 657 à 667. 1 5 1 «HIV in Women Conference: Women Seek Greater Influence in Research, Prevention Policies», AIDS Policy & Law, 1995, 10(4): 9. 1 5 2 Le test anonyme est pratiqué par des infirmières de santé publique, à défaut de cliniques désignées: Communication avec C. Donovan, Medical Health Officer, Eastern Newfoundland, le 29 août 1996. 1 5 3 Communication avec le Dr Blaikie, Medical Health Officer Central Region (N.-É.), le 30 août 1996. 1 5 4 Au Québec, les premières cliniques de test anonyme étaient créées en. 1987. Deux cliniques à Montréal, une à Sherbrooke.et une à Québec. Depuis 1995, on en trouve 175, réparties dans toutes les régions. Voir MSSS, Centre québécois de coordination sur le sida (Direction générale de la Santé publique) et Direction de la recherche et de l'évaluation (Direction générale de la Planification et de l'Évaluation). «Dépistage»^ Rapport de la consultation réalisé pour le bilan de la phase 3 et l'élaboration de la phase 4 de la Stratégie québécoise de lutte contre le sida, novembre 1996, aux p. 45-49. 1 5 5 Communication avec A. Bowlby, supra, note 109. 1 5 6 Communication du 28 août 1996. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Dans les autres provinces et territoires, le test anonyme est techniquement interdit. Cependant, dans la pratique, on peut parfois l'obtenir malgré leurs règlements sur la déclaration de cas. A f • L'Ile-du-Pnnce-Edouard n'offre que le test nominatif et non nominatif. Toute demande à un laboratoire est codifiée et déclarée. Quatre-vingts p. cent des tests sont déclarés de manière non-nominative et 20% nominative.1563 • Au Nouveau-Brunswick, le test de sérodiagnostic du VIH est offert dans certaines cliniques de santé sexuelle, qui ne demandent pas de carte d'assurance-maladie ou de pièce d'identité. Si le client donne un faux nom, l'anonymat du test est bien protégé, mais il revient à la personne d'y penser.157 • Dans les Territoires du Nord-Ouest158 et le Yukon, comme au Nouveau-Brunswick, le client peut donner un faux nom, ce qui rend le test anonyme.159 • Au Manitoba, le test anonyme n'est pas encouragé, mais on peut l'obtenir de professionnels de la santé, à l'amiable, si l'on insiste sur l'anonymat (sans quoi le test est effectué de manière non-nominative).160 • En Alberta, les cliniques spécialisées dans les maladies transmissibles sexuellement offrent le test non nominatif «mais on peut faire un test anonyme si le client insiste».161 • La Colombie-Britannique n'offre pas le test anonyme, «mais effectue tous les tests de VIH de manière strictement non-nominative».162 t 4. Évaluation La disponibilité de nouveaux traitements contre l'infection à VIH apporte un certain nombre de défis. D'abord, elle met en relief l'importance d'offrir des centres de test anonyme à tous les Canadiens (de pair avec des traitements accessibles pour les personnes séropositives). Afin d'inciter les gens à se prévaloir du test (et des traitements), il est nécessaire que l'accès à des centres soit facile. 156a Communication avec le Dr Sweet, supra, note 46. 1 5 7 Communication avec C. Olivier, SIDA Nouveau-Brunswick, 23 août 1996. Communication avec A. Corveau, 27 août 1996. 1 5 9 Communication avec P. Mandel, 29 août 1996. Communication avec P. Matusko, coordonn. Programme sida, Division Santé publique, Manitoba Health, 2 septembre 1996. 161 Communication avec K. Walls, coordonn. provincial Programme sur le sida (Alberta), 28 août 1996. 162 Communication avec D. Patrick, ministère de la Santé, Colombie-Britannique, le 27 août 1996. 158 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (1) Accès au test Diverses activités doivent être entreprises afin d'améliorer l'accès des femmes au test: • Pour inciter les femmes à subir un test, il faut les sensibiliser au fait qu'elles pourraient être en situation derisqued'exposition au VIH et il faut effectuer davantage de travail d'éducation axée spécifiquement sur leurs besoins. • Si le souhait d'une femme de subir le test n'est pas pris en considération ou est rejeté par son médecin, l'accès de cette femme au test de sérodiagnostic du VIH peut être réellement coupé. Donc, il est nécessaire que l'on adopte une approche qui soit plus sensible dans l'évaluation durisqued'infection à VIH chez une femme et que l'on voie à l'éducation et à la formation afin de conscientiser davantage les médecins à la vulnérabilité potentielle des femmes à l'infection à VIH. • H faut s'attaquer également aux problèmes plus globaux de l'abus de femmes et de leur dépendance économique, afin d'arriver à un climat où elles craindront moins des conséquences possibles du test. • Enfin, plutôt que de concentrer les efforts d'amélioration de l'accès du test uniquement sur les femmes enceintes — ce qui donne l'impression qu'on se préoccupe moins du bien-être de la femme que de celui des enfants ou des enfants éventuels — il sera nécessaire de voir à ce que les efforts s'adressent à toutes les femmes et tiennent compte de leurs besoins, de leurs connaissances et de divers contextes de vie: les politiques sur le test doivent être rattachées aux situations concrètes que vivent les femmes. (2) Test anonyme Le test anonyme est considéré comme un mécanisme de test qui maximise le nombre de gens qui se porteront volontaires au test et au counselling, spécialement parmi ceux qui sont les plus vulnérables à l'infection. Le fait de maximiser le test et le counselling de ces personnes permettra que plus de personnes séropositives utilisent les options de traitements au moment le plus bénéfique — avant l'apparition de symptômes [référence omise].!63 (i) Avantages à rendre disponible le test anonyme Les avantages de la disponibilité du test anonyme sont exposés en détail dans les écrits. On trouve notamment des preuves que: • 163 VIII la disponibilité du test anonyme incite les gens à subir un test de sérodiagnostic du VIH; CRDO, supra, note 14, à la p. 99. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • la disponibilité du test anonyme incite particulièrement les personnes vulnérables à subir le test; • l'abolition des centres actuels de test anonyme serait nuisible; et • les centres de test anonyme offrent souvent une pratique optimale en matière de counselling pré- et post-test. Incitation au test Plusieurs études menées au Canada, aux É.-U. et ailleurs, montrent que la disponibilité du test anonyme incite les gens à subir le test.164 1 6 4 I. Hertz-Picciotto, J; Goltz, J. Noble, «HIV Test-Seeking Before-and After the Restriction of Anonymous Testing in North Carolina», American Journal of Public Health, 1996; 86(10): 1446-1450, à la p. 1448, avec référence à L.J. Fehrs et coll., «Trial of Anonymous Versus Confidential Human Immunodeficiency Virus Testing», Lancet, 1988, ii: 379-382; W.D. Johnson, F.S. Sy, K L . Jackson, «TTie Impact of Mandatory Reporting of HIV Positive Persons in South Carolina», dans: IV International Conference on AIDS, juin 1988, Stockholm (Suède), abrégé 6020; L. Gardner, R. Trow, «Anonymous Testing Considered Essential, Good Follow-up Results», dans VI International Conference on AIDS, juin 1990, San Francisco, Calif., abrégé ThD.831 (étude sur les clients de la Hassle-Free Clinic de Toronto, qui révèle que 30% des personnes y ayant subi un test auraient décidé de ne pas le subir sans possibilité de test anonyme); S.M. Kegeless et coll., «Mandatory Reporting of HIV Testing Would Deter Men From Being Tested», Journal of the American Medical Association, 1989; 261: 1275-1276; S . M Kegeless et coll., «Many People Who Seek Anonymous HIV-Antibody Testing Would Avoid It under Other Circumstances», AIDS, 1990, 4: 585-588; P. Phanuphak et coll., «Thailand's First Anonymous Alternative Test Site: A Lesson for Asian Countries», dans VII International Conference on AIDS/III STD World Congress, juillet 1992; Amsterdam, Pays-Bas, abrégé MoC 0061; G. Ohi et coll., «Notification of HIV Carriers: Possible Effect on Uptake of AIDS Testing», Lancet, 1988, ii: 947-949; K A . Phillips, «The Relationship of 1988 State HIV Testing Policies to Previous and Planned Voluntary Use of HIV Testing», AIDS, 1994, 7: 403-409 (étude américaine montrant que, dans les États américains offrant le test et où il existe, des lois strictes sur la confidentialité des résultats de test du VIH, les gens ont davantage recours au test). VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Incitation des personnes vulnérables En particulier, des études montrent que les personnes les plus vulnérables à l'infection à VIH sont plus susceptibles de subir le test s'il est anonyme:165 les centres de test anonyme attirent un plus grand nombre de client séropositifs et de personnes qui pourraient autrement remettre le tout à plus tard, craignant une perte de confidentialité et la discrimination. Effet néfaste de l'abolition du test anonyme Une étude menée récemment en Caroline.du Nord suggère que les tentatives d'abolition du test anonyme pourraient dissuader les gens de subir le test. De 19S5 à 1991, la Caroline du Nord offrait le test anonyme et le test nominatif dans chacun des cent comtés de l'État, sur ordre de la cour. Mais en 1991, on a pris la décision d'éliminer graduellement le test anonyme. Après une importante opposition publique, on a opté pour le compromis en vertu duquel: • le test anonyme a été interrompu dans 82 comtés, maintenu dans 18; • le test confidentiel est demeuré disponible dans tout l'État; et • l'abolition permanente du test anonyme dépendait de la preuve que sa disparition n'affecterait pas le nombre de tests administrés. Le I janvier 1993, le test anonyme a été rétabli dans tous les comtés, sur ordre de la cour. En 1996, la Caroline du Nord prévoyait encore de mettre un terme au test anonyme, mais des poursuites judiciaires l'en ont empêchée: la Cour suprême de l'État a été saisie de l'affaire. Hertz-Picciotto et colL, supra, note 164, avec référence à T. Hoxworth et coll., «Anonymous HTV Testing: Does It Attract Clients Who Would not Seek Confidential Testing?», AIDS Public Policy Journal, 1994, 9: 182-189; T.L. Cheng et coU., «Confidentiality in Health Care: A Survey of Knowledge, Perceptions and Attitudes Among High School Students», Journal of the American Medical Association, 1993, 269: "14041407; Kegeless et coll., 1989, supra, note 164; Phanuphak et coll., supra, note 164; Ohi et coll., supra, note 164; H J . Hull et coll., «Comparison of HIV-antibody Prevalence in Patients Consenting to and Declining HIVantibody Testing in an STD Clinic», Journal of the Americal Medical Association, 1988, 260: 935-938; W.J. Kassler et coll., Anonymous vs Confidential HIV Testing in North Carolina», dans VIII International Conference on AIDS/III STD World Congress, juillet 1992, Amsterdam, Pays-Bas, abrégé PoC 4818; T. Myers et coll., «Factors Affecting Gay and Bisexual Men's Decisions and Intentions to Seek HIV Testing», American Journal of Public Health, 1993, 83: 701-704; J. Browne et coU., «HTV Anonymous Testing - Does It Make a Difference?», dans IX International Conference on AIDS/IV STD World Congress, juin 1993, Berlin, Allemagne, abrégé PO-C28-3249 (étude effectuée après l'expansion des services de test anonyme en Ontario); G. Godin et coll., «Understanding the Intention of Gay Men to Take the H3V Antibody Test», dang IX International Conference on AIDS/IV STD World Congress, juin 1993, Berlin, Allemagne, abrégé PO-C25-3223; J. Reardon et coll., «Are HIV-infected Injection Drug Users Taking HIV Tests?», American Journal of Public Health, 1993, 83: 1414-1417. Voir aussi New Brunswick Needs Anonymous HIV Testing, Fredericton, SIDA NouveauBmnswick, 1996, avec référence a AIDS Bureau, Ministère de la Santé de l'Ontario, «Anonymous HIV Testing Evaluation - January 1992 to June 1993», Toronto, AIDS Bureau, juin 1993; Nova Scotia Department of Health, Four Month Progress Report on the Anonymous Testing Program in Nova Scotia, Halifax, le Ministère, novembre 1994. Par contraste, au Québec, l'évaluation initiale des centres de test anonyme a montré qu'ils avaient jusqu'à ce jour échoué à attirer les personnes les plus vulnérables au VIH. Ceci pourrait être attribuable à plusieurs facteurs sur lesquels il faudra se pencher, y compris le manque de sensibilisation, parmi les personnes vulnérables, quant à l'existence de ces centres. 165 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail L'étude mesure l'impact de la restriction ayant fràppéTe test anonyme en 1991-92 sur le nombre de demandes de tests. Elle montre que le nombre de tests a augmenté partout dans l'État, durant toute l'étude, à mesure que la sensibilisation au sida s'accroissait Cependant, • les comtés qui avaient maintenu le test anonyme ont observé une augmentation de 64%, alors que • les comtés qui l'avaient interrompu ont observé une augmentation de 44%. D'importance particulière: • les comtés qui avaient interrompu le test anonyme ont observé une diminution de 12,4% du nombre de tests d'hommes gais et une diminution de 3,1% du nombre de tests d'utilisateurs de drogue par injection (dans les comtés ayant maintenu le test anonyme, 10% des clients étaient des hommes gais et bisexuels, comparativement à 4% dans les autres); • dans les comtés qui avaient aboli le test anonyme, davantage de gens (0,5%) refusaient le test après avoir reçu le counselling que dans les comtés qui l'avaient maintenu (0,16%); et • les personnes subissant le test nominatif étaient plus susceptibles de ne pas se présenter pour obtenir le résultat que celles dont le test était anonyme (21,3% contre 8,7%). Selon les auteurs de l'étude, la corrélation entre la disponibilité du test anonyme et une plus forte augmentation du nombre de tests «peut en être une de cause à effet ou, en partie ou en entier, attribuable à des différences non mesurées entre les deux catégories de comtés».166 Toutefois, des «preuves circonstancielles» de l'étude appuient la conclusion que l'abolition du test anonyme a eu un effet négatif, une conclusion qui rejoint les résultats de plusieurs autres études.167 Les auteurs concluent ainsi que «les personnes qui prennent les décisions relatives aux politiques affectant la disponibilité du test anonyme doivent tenir compte des conséquences possibles pour les personnes "àrisqueélevé" ou vulnérables».168 Counselling Le test anonyme n'a pas pour seul effet d'inciter les gens à se porter volontaires au test, particulièrement lorsqu'ils sont vulnérables au VIH: il offre souvent aussi une pratique 1 6 6 Hertz-Picciotto et coll., supra, note 164, à la p. 1448. Les comtés ayant maintenu le test anonyme étaient plus urbanisés et comptaient plus de cas de sida que les autres; leurs résidents étaient probablement plus conscients de l'épidémie. ™Ibid. 168 Ibid., à la p. 1449. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail optimale en matière de counselling pré- et post-test. Les employés de centres de test anonyme ont acquis une expérience inestimable en counselling et on a montré que certaines personnes choisissent ces centres à cause de la qualité du counselling. Le counselling dans les centres de test anonyme est considéré comme un moyen rentable de promouvoir la réduction des comportements non sécuritaires au sein de popidations qui, malgré des années de campagnes d'éducation du public, demeurent mal informées sur la prévention. Le fait que l'accent sur le counselling dans les centres de test anonyme porte fruit est démontré par l'évaluation de ces centres en Ontario, qui démontre que les personnes qui passent régulièrement des tests dans ces centres demeurent séronégatifs dans une plus grande proportion que celles qui passent le test ailleurs.169 (ii) Préoccupations quant à l'implantation du test anonyme En dépit des avantages à rendre disponible le test anonyme, le débat à son sujet se poursuit. Ses opposants soutiennent qu'il: • entrave la cueillette de données épidémiologiques importantes, relativement à l'incidence et à la prévalence du VIH et aux tendances de la transmission; • compromet la notification des partenaires; • sont onéreux. Us se disent aussi se préoccuper de ce que des clients de centres anonymes ne retournent pas chercher le résultat de leur test. Ces arguments ne sont toutefois pas fondés. Cueillette de données épidémiologiques La déclaration nominative ne contribue pas de manière importante à l'utilité de l'information à desfinsépidémiologiques:170 Ce qu'il faut, ce sont des données constantes et précises sous une forme qui permette de surveiller la propagation du VIH. Des données pertinentes comprendraient desrenseignementsdémographiques sur l'âge, le sexe et le lieu géographique d'une personne séropositive, ainsi que sur le dossier de test antérieur de la personne afin d'éviter la duplication de déclarations. Les renseignements d'identification personnelle ne sont pas pertinents à des objectifs d'épidémiologie [emphase ajoutée].171 Il convient aussi de se demander si l'on peut tirer des renseignements épidémiologiques fiables dans le cadre du test volontaire. Afin d'établir des données sur la séroprévalence, les études épidémiologiques adéquatement menées sont plus utiles puisqu'on a démontré Communication avec A. Bowlby, supra, note 109. CRDO, supra, note 14, à la p. 91, avec références. 1 7 1 J. Hamblin, M. Somerville, «Surveillance and Reporting of HIV Infection and AIDS in Canada: Ethics and Law», University of Toronto law Journal, 1991,41: 224-246, à la p. 236. 169 170 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail que l'autosélectionrattachéeau tëst volontaire peut fausser le portrait de la prévalence au sein de la population (voir supra, chapitre C,5). ,* Notification des partenaires . La préoccupation la plus fréquemment exprimée à l'égard du test anonyme se rattache à la notification des partenaires. Lorsqu'un individu a subi le test de manière anonyme, cette mesure dépend entièrement de sa volonté. En raison de sa nature, le test anonyme ne permet pas d'identifier les personnes séropositives et les professionnels de la santé n'ont pas la possibilité de contacter des partenaires qui peuvent ne se douter derienet être en situation de risque. Cependant, comme le mentionnent Hamblin et Somerville, le lien entre la relance des contacts et la déclaration obligatoire des cas est loin d'être clair, puisque la relance des contacts peut être effectuée par les personnes séropositives elles-mêmes ou par leur médecin, sans qu'il soit nécessaire de déclarer des cas. Ce n'est que lorsque les responsables de la santé publique désirent effectuer ou superviser une relance des contacts, et qu'ils ont des raisons valables de ce faire, que l'on peut justifier une quelconque forme de déclaration obligatoire à desfinsde relance des contacts. Et même dans ce cas, la déclaration des cas n'a pas besoin d'être nominative, car la déclaration par code ou autres moyens peut quand même conduire à la personne séropositive nécessaire à la relance des contacts. * 7 2 En général, au Canada, on a (1) souligné que plusieurs personnes séropositives préviennent volontairement leurs partenaires sexuels ou de partage de seringue, ce qui rend superflue l'intervention des responsables de la santé publique; (2) expliqué les nombreuses limites des programmes de notification des partenaires, en recommandant que le mécanisme de relance ne soit pas coercitif, mais invite plutôt les personnes séropositives à collaborer de plein gré avec leur médecin pour notifier leurs partenaires sexuels ou de partage de seringue (détails infra,, chapitre H).173 Coût dés programmes de test anonyme Les programmes de test anonymes ne sont pas nécessairement onéreux. En fait, dans l'évaluation d'un programme canadien, le programme de test anonyme de l'Ontario, on a Ibid., à la p. 237. Le test anonyme ne pose pas d'obstacles absolus aux programmes de notification des partenaires: deux États américains ont fait mention de programmes qui fonctionnent même lorsque des patients indexés avaient subi un test anonyme. (Hertz-Picciotto et coll., supra, note 164, â la p. 1448, avec référence à A T. Pavia et colL, «Partner Notification for Control of HIV: Results after Two Years of a Statewide Program in Utah», American Journal of Public Health, 1993, 83: 1418-1424; E M . Blankenship et coll., «HIV Partner Notification with an Anonymous Testing System», dans V International Conference on AIDS, juin 1989 Montréal, Canada, abrégé WDP1.) 173 CRDO, supra, note 14, à la p. 95. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail évalué à 44$ le coût d'un test anonyme, comparativement au double (100$) chez un médecin.174 Taux d'assiduité au rendez-vous pour obtenir le résultat Contrairement à ce que suggèrent certains, l'expérience des programmes actuels de test anonyme montre que la vaste majorité des clients de centres de test anonyme retournent effectivement chercher leur résultat. En Ontario, par exemple, plus de 90% des clients de ces cliniques vont s'enquérir de ieur résultat.175 De plus, le problème de personnes qui ne se présentent pas au rendez-vous pour l'annonce du résultat et le counselling post-test ne concerne pas que les programmes de test anonyme: • Une étude effectuée en Oregon, dans laquelle on offrait aux clients les options de test anonyme et de test nominatif, a montré que 94% de ceux qui avaient reçu du counselling pré-test et donné un prélèvement étaient retournés pour obtenir le résultat et le counselling post-test. La proportion était presque identique pour les deux types de test.176 • En Caroline du Nord, les clients du test nominatif étaient moins enclins à retourner chercher le résultat que les clients anonymes: dans les comtés offrant les deux options, 30% des personnes testées de manière nominative n'ont pas reçu le résultat, comparativement à 8% chez les clients anonymes. Parmi les personnes qui recevaient un résultat positif, les taux de résultats non reçus sont à peu près identiques.177 En dépit de l'inquiétude légitime liée au fait que certaines des personnes qui reçoivent un test anonyme ne retournent jamais chercher leur résultat, on voit clairement que le problème n'est pas unique à la provision de services de test anonyme. Un moyen d'encourager les patients à retourner chercher le résultat consiste à assurer une éducation et un counselling pré-test qui soient aussi complets que possible et un délai d'attente aussi bref que possible entre le prélèvement et l'annonce du résultat. (iii) Évaluation Les données actuelles montrent que les programmes de test anonyme peuvent comporter plusieurs avantages par rapport aux autres formes de test et que les préoccupations exprimées à leur égard sont en grande partie injustifiées. Afin d'inciter autant de personnes 1 7 4 Ministère de la Santé de l'Ontario, AIDS Bureau, Anonymous Testing Evaluation. January 1992 to June 1993, Toronto, le Ministère, novembre 1994, à la p. 7. En Ontario, le test anoyme pour le sérodiagnostic du VIH est offert depuis 1985 à la Hassle Free Clinic, à Toronto. Cependant, il n'est devenu légal qu'en 1990, lorsqu'on a amendé les règlements de santé publique et que certaines cliniques désignées ont été exemptées de déclarer aux autorités de santé publique les noms des personnes qui recevaient un résultat positif. Le counselling pré-test et la cueillette de renseignements épidémiologiques sont obligatoires et sont des conditions préalables de l'analyse d'un échantillon. L'évaluation du programme a révélé une satisfaction très élevée de la clientèle. L'évaluation du programme est continue et l'on s'efforce de démontrer l'efficacité du test anonyme a encourager les personnes vulnérables à s'en prévaloir. i & ù £ , à l a p . 7. CRDO, supra, note 14, à la p. 99, avec référence à Fehrs et coll., «Trial of Anonymous versus Confidential Human Immunodeficiency Virus Testing», The Lancet, 1988, ii: 379, à la p. 381. 1 7 7 Hertz-Picciotto et coll., supra, note 164, à la p. 1448. 175 176 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail que possible à apprendre leur statut sérologique, de tels programmes devraient être mis à la disposition des Canadiens de toutes les provincesét tous les territoires.178 (iv) Réévaluation Cette conclusion nécessitera peut-être d'être réévaluée, à la lumière de deux développements: • la disponibilité de nouveaux traitements; et • la commercialisation, aux États-Unis, de trousses de test à domicile qui permettent de profiter de l'anonymat de son propre foyer. Disponibilité de nouveaux traitements Certains pourraient prétendre que, vu la disponibilité de nouveaux traitements, il ne serait plus nécessaire d'offrir des services de test anonyme. De fait, les personnes qui reçoivent un résultat positif ont intérêt à se prévaloir de soins médicaux dès qu'elles l'apprennent. Or, dès qu'elles entrent dans le cabinet d'un médecin, l'anonymat n'est plus possible: les renseignements médicaux relatifs à leur état sérologique au VIH demeureront confidentiels, mais un patient ne peut pas demeurer anonyme. De plus,-certains pourraient affirmer que le VTH/sidà devrait être «normalisé» et que les personnes séropositives ne devraient plus craindre de faire l'objet de discrimination comme plus tôt dans l'épidémie. Ces arguments ne sont cependant pas tout-à-fait convaincants. On a déjà montré (voir supra, chapitre C) que la discrimination demeure l'une Hes principales inquiétudes des personnes séropositives au Canada et qu'elles ont toutes les raisons de craindre d'être l'objet de stigmatisation et de discrimination. En -dépit des nouveaux traitements, la décision de subir le test demeure très difficile à prendre pour bien des gens, particulièrement pour ceux qui se croient en situation derisquepar rapport au VIH. Les gens peuvent continuer de désirer subir un test anonyme et pouvoir choisir eux-mêmes le moment de laisser tomber l'anonymat et de se prévaloir d'aide médicale. La disponibilité de l'option de test anonyme n'est pas devenue superflue; le test anonyme continuera d'inciter les gens à subir le test ou à le subir plus tôt. Trousses de test du VIH à domicile Ces trousses permettent d'effectuer soi-même un test dans l'anonymat du chez-soi. Toutefois, même si de telles trousses devenaient accessibles pour les Canadiens, elles ne pourraient pas remplacer les actuels centres de test anonyme, mais seulement en constituer un complément, pour plusieurs raisons: 1 7 8 Un mémoire préparé par Sida Nouveau-Brunswick conclut que «les bénéfices potentiels [du test anonyme] sont largement supérieurs à ses coûts» et propose qu'un «système global de test anonyme soit minutieusement élaboré, mis en oeuvre et rendu disponible partout au Nouveau-Brunswick.dès que possible.... L e programme de test anonyme doit être prodigué par du personnel adéquatement formé, doit avoir une composante pré-test et posttest approfondie, et doit être bien annoncé et accessible à tous les habitants du N.-B.» (J. Goltz, J. Noble, New Brunswick Needs Anonymous HIV Testing, Sida Nouveau-Brunswick, 1996). VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • De première importance, le test anonyme s'accompagne de counselling pré- et posttest, alors que l'absence de counselling adéquat est l'une des principales inquiétudes exprimées à l'endroit des trousses de test à domicile. En fait, comme on l'a souligné précédemment, les centres de test anonyme sont souvent ceux qui offrent le meilleur counselling, et où ce dernier constitue une étape réelle et importante dans la préparation des gens à recevoir leur résultat et à mieux prendre soin d'eux-mêmes et de leurs partenaires. • Deuxièmement, les trousses de test à domicile ne sont pas gratuites. Aux États-Unis, elles coûtent entre 35 et 40SUS dans les commerces, 50SUS par la poste,179 des sommes qui constituent un obstacle majeur dans leur accessibilité pour plusieurs des personnes qui sont les plus vulnérables à l'infection à VIH et ont davantage besoin de découvrir leur statut sérologique — comme les UDI, les jeunes de la rue et, en général, les personnes pauvres et marginalisées. À moins d'offrir le test gratuitement, il serait illusoire de vouloir croire que les personnes qui ont le plus grand besoin d'accès au test anonyme seraient capables de s'offrir un test • En outre, plusieurs des trousses à domicile (particulièrement celles qui utilisent la salive) ne sont que des tests préliminaires, ce qui veut dire que les gens qui obtiennent un résultat positif doivent faire confirmer leur résultat par un test «conventionnel». Par conséquent, les gens n'auront réellement accès au test anonyme que s'il existe des centres de test anonyme pour confirmer le résultat d'un test effectué à domicile. Préoccupations dépassées L'option de test anonyme, une question fort débattue par le passé, devrait... soulever beaucoup moins de controverse à l'avenir.1^ Nous l'avons expliqué ci-dessus: les nouveaux développements (disponibilité de nouveaux traitements et de trousses de test à domicile) ne rendent pas superflus les centres de test anonyme. De plus, ces nouveaux développements diminuent la valeur de certaines objections exprimées vis-à-vis de la disponibilité du test anonyme. Ceci s'applique en particulier aux préoccupations relatives à la notification des partenaires: Auparavant, on se préoccupait (avec ou sans raison) du fait que les personnes séropositives au VIH pourraient subir un test anonyme et que les professionnels de la santé ne disposeraient d'aucun moyen d'identifier les personnes séropositives qui continueraient d'exposer autrui à unrisque:ces professionnels seraient ainsi incapables d'entreprendre des actions appropriées, comme le counselling ou, dans certains cas, la relance des contacts. Maintenant que nous disposons d'interventions efficaces contre le VIH, immanquablement toutes les personnes séropositives demanderont un ^ «Seeking Assurance from a $40 Kit», New York Times, 21 novembre 1996, à la p. D l . ISO w . Flanagan, commentaire formulé sur M Balles, Testing and Confidentiality, ébauche, avec référence à W. Flanagan, «Equality. Rights for People With AIDS: Mandatory Reporting of HIV Infection and Contact Tracing», McGill Law Journal, 1989, 34: 531-602. 17 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail traitement, y compris celles qui ont subi un test anonyme. Puisque ce traitement continu ne peut pas,-d'un point de.vue logistique, être offert sous le couvert de l'anonymat, on ne devrait plus s'inquiéter de l'absence de moyens permettant aux professionnels de la santé d'identifier et de conseiller les personnes qui peuvent continuer de présenter un risque pour autrui. En somme, ces nouveaux traitements pour l'infection à VIH rendent dépassé l'ancien débat sur [les problèmes issus du] test anonyme. Puisque le test anonyme incite les gens à demander un test, la seule voie est d'appuyer cette stratégie utile de santé publique.1**1 5. Conclusions Les centres de test anonyme demeurent importants. Les avantages du test anonyme sont démontrés. De nombreuses études montrent que sa disponibilité incite les gens à subir le test. En particulier, les personnes les plus vulnérables au VIH sont plus susceptibles de se prévaloir du test de sérodiagnostic du VIH s'il est anonyme. Par opposition, les arguments contre le test anonyme sont largement injustifiés: le test anonyme n'entrave pas la cueillette de données épidémiologiques, il peut être rentable et il n'entraîne pas d'augmentation du nombre de sujets testés qui ne retournent pas chercher leur résultat De plus, le test anonyme n'entre pas en conflit avec l'approche canadienne relative à la notification des partenaires, qui préfère l'approche volontaire à l'approche cœrcitive, en recommandant que l'on encourage !es personnes séropositives à collaborer avec leurs médecins pour avertir leurs contacts sexuels ou de partage de seringue. Par ailleurs, la disponibilité de nouveaux traitements ne rend pas superflus les services de test anonyme. Étant donné que le VIH/sida est encore stigmatisé et que l'appréhension de discrimination à la suite d'un résultat positif est souvent justifiée, certaines personnes peuvent encore s'empêcher de subir un test ou retarder cette décision à cause de l'absence de garantie initiale d'anonymat. Enfin, même si les trousses de test à domicile permettant de s'administrer un test dans l'anonymat de son foyer devenaient disponibles au Canada, les centres de test anonyme (et autres services de test et de counselling sur le VIH défrayés par le système public) demeureraient importants: plusieurs des personnes les plus vulnérables n'ont pas les moyens d'acheter une trousse de test à domicile et la qualité du counselling offert n'est pas comparable à celui offert dans les centres de test anonyme. Des centres de test anonyme de sérodiagnostic du VIH devraient être rendus accessibles dans toutes les provinces et tous les territoires du Canada. La disponibilité de ces centres devrait être largement annoncée, les périodes d'attente ont besoin d'être raccourcies et l'on devrait procéder à une évaluation continue. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 2.1 La disponibilité de nouveaux traitements de l'infection à VIH met en relief l'importance d'offrir à tous les Canadiens un accès facile au test de sérodiagnostic du VIH. Les obstacles au test, particulièrement pour les femmes, doivent être éliminés. 2.2 Des centres de test anonyme de sérodiagnostic du VIH devraient dans divers endroits de chaque province et territoire. VIII être accessibles Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail E. COMMENT PROCÉDER AU TEST VOLONTAIRE? COUNSELLING Au Canada et dans le monde, on a observé un consensus selon lequel le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être administré qu'accompagné de counselling pré- et post-test. Dans la pratique, toutefois, des personnes qui subissent le test ne reçoivent que peu de counselling, voire aucun. Par ailleurs, certains ont commencé à exprimer l'avis que le fait d'exiger que tous ceux qui veulent subir un test reçoivent du counselling pourrait décourager certaines personnes de subir le test, à cause d'une apparence de «dramatisation» de la situation du test et de «crise» autour de la décision de le subir. Ce chapitre observe d'abord les recommandations formulées au sujet du counselling par des organisations canadiennes (Historique), puis examine brièvement la situation actuelle, en soulignant qu'en pratique les gens qui subissent un test de sérodiagnostic du VIH au Canada ne reçoivent souvent pas du counselling approprié avant et après le test (Situation actuelle). On se demande ensuite,.de manière critique, s'il est toujours nécessaire, en 1997, de donner du counselling avant et après le test (Évaluation). Les conclusions de ce chapitre sont que: (1) le counselling pré-test et le counselling post-test continuent d'être des composantes importantes du test de sérodiagnostic du VIH; (2) les actuelles lignes directrices sur le counselling devraient être mises à jour de manière régulière; et (3) les professionnels de la santé ont besoin d'éducation sur la nécessité du counselling et sur les techniques appropriées pour y procéder (Conclusions). Ce chapitre ne se penche pas sur les inquiétudes qui se rattachent de manière spécifique au développement de trousses de test du VIH à domicile, sans counselling pré-test et même, parfois, post-test. Ces préoccupations sont abordées au chapitre F. 1. Historique Pour assurer que la personne tire profit du test, que la peur et l'incidence d'effets négatife du test soient réduites et que les avantages possibles pour la santé publique soient accrus, on a insisté sur le counselling en tant qu'élément essentiel du test volontaire. Idéalement, le processus de counselling devrait s'amorcer avant le début du test, afin de discuter du besoin de subir le test, d'offrir de l'information adéquate sur le VIH, de clarifier certains aspects techniques du test, de discuter des comportements àrisqueantérieurs et de stratégies de réduction des risques, et d'examiner les implications du résultat du test, particulièrement dans le cas où il serait positif. Le counselling après le test devrait offrir un appui émotif et aider la personne à trouver les soins médicaux et sociaux les plus appropriés.182 182 D. Schopper, G. Vercauteren, «Testing for HIV at Home. What Are the Issues?», AIDS, 1996, 10: 1455-1465. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Les organisations canadiennes qui ont formulé des recommandations sur ce sujet ont toutes déclaré que c'est une composante importante, voire essentielle, du test de sérodiagnostic du VIH. (1) Comité consultatif national sur le sida (2) Société royale du Canada (3) Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le sida (4) Association canadienne de santé publique Le Comité a déclaré que «[l]a recherche de l'anticorps anti-VIH ne doit être pratiquée que si... des services de counseling et d'information sont [disponibles et] offerts».183 La Société royale du Canada a souligné que le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être offert que s'il est accompagné de counselling psychosocial et comportemental184 De l'avis du Comité, «[a]vant l'épreuve, un counseling doit être offert, faisant état des limites et des répercussions de l'épreuve, notamment des renseignements sur la déclaration nominative des résultats positifs dans les provinces et territoires où la loi l'exige» et «[l]es résultats doivent être communiqués au sujet qui a subi l'épreuve de façon à étayer et à compléter les renseignements donnés avant l'épreuve, ainsi qu'à assurer l'à-propos du counseling après l'épreuve».185 L'ACSP a déclaré que le counselling pré- et post-test est «un aspect essentiel de chaque test de dépistage du VIH»,186 tout en établissant les principes suivants: • tous les professionnels offrant du counselling sur le VIH doivent respecter des normes de pratiqué élevées; • tous les conseillers doivent avoir une formation complète pour respecter les normes de compétence en counselling sur l'infection à VIH et les questions connexes; et • si l'on veut que le counselling soit efficace, il est essentiel de mieux comprendre les techniques de modification du comportement. On a conclu par la suite que l'ACSP devrait inciter les gouvernements fédéra1, provinciaux et territoriaux, en coUaboration avec des groupes communautaires, à élaborer des lignes directrices nationals sur le counselling pour le test de sérodiagnostic du VIH et appuyer 183 184 185 186 VIII CCN-SIDA, supra „ note 1, à la p. 38. Société royale du Canada, supra, note 11, à la p. 371. Supra, note 12, p. 44. ACSP, supra, note 16, à la p. 21. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail la recherche sur la corrélation entre le counselling et la modification des comportements.187 (5) Ministère de la Santé de l'Ontario En juin 1992, le ministère ontarien de la Santé a publié des lignes directrices sur le counselling pré- et post-test effectué par les centres de test anonyme, à partir d'un guide sur le counselling élaboré par la Hassle Free Clinic de Toronto, afin de: • rehausser la qualité du counselling pré- et post-test de sérodiagnostic du VIH en Ontario; • contribuer à assurer que les gens qui reçoivent ce counselling bénéficient d'information fondée au sujet durisqueet de la prévention; • prévenir la propagation du VIH en Ontario, en donnant aux gens les renseignements dont ils ont besoin pour leur propre protection et celle d'autrui; • offrir des lignes directrices aux centres et aux personnes qui pratiquent le counselling avant et après le test de sérodiagnostic du VIH; et • offrir aux conseillers une liste de vérification point par point qui présente les éléments auxquels ils peuvent avoir recours dans leur travail, en termes d'information et de questionnement relatifs au test des anticorps anti-VIH. Les directives déclarent que: [l]es consultations sur l'infection par le VIH sont le meilleur moyen de prévenir la transmission de ce virus et d'aider les personnes infectées à trouver le soutien, la force et les ressources dont elles ont besoin pour faire face à ce diagnostic. De l'avis du ministère de la Santé, les consultations relatives au test de dépistage du VIH sont plus importantes que le test même. Les personnes qui demandent à subir le test sont disposées à recevoir l'information disponible et peuvent avoir besoin de soutien. La qualité des consultations qu'elles reçoivent aura un effet profond sur leur capacité de modifier leur comportement ou de vivre avec l'infection par le VIH [emphase ajoutée]. 188 (6) Association médicale canadienne Les lignes dirèctrices publiées par l'AMC au sujet du counselling soulignent que P]e sérodiagnostic du VIH sans counselling a des répercussions psychologiques, médicales et sociales sur les patients. C'est pourquoi les experts conviennent 187 188 Ibid., à la p. 4. Ministère de la Santé de l'Ontario, supra, note 148, à la p. 4. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail que ces tests doivent être précédés et suivis d'un counselling approprié fourni par des professionnels formés ou expérimentés.189 2. Situation actuelle En dépit du consensus observé quant à l'importance de procéder à du counselling avant et après le test, et malgré l'existence de lignes directrices exhaustives comme celles de l'AMC et du ministère de la Santé de l'Ontario, la plupart des 60 personnes et organismes consultés lors de la Phase I du Projet Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida ont exprimé des inquiétudes quant au fait que plusieurs personnes qui demandent à subir un test de sérodiagnostic du VIH ne reçoivent aucun counselling ou du counselling qui n'est pas approprié. En particulier, tandis que la qualité du counselling offert dans les cliniques de test ou par des médecins expérimentés dans le domaine du VIH/sida n'est que rarement critiqué, on rapporte que les médecins qui ont peu d'expérience dans le domaine du VIH/sida n'offrent souvent pas un counselling adéquat:190 «Certains médecins abordent le test du VIH comme si c'était un test comme tous les autres, disent au patient: "Vous êtes séropositif' et en restent à peu près là».191 D'autres médecins sont conscients de leur manque d'expertise dans te counselling des personnes qui subissent le test: la Hassle Free Clinic de Toronto rapporte que de plus en plus de médecins y envoient leurs patients pour le counselling et le test.192 H est évident qu'il existe peu d'éléments incitant les médecins qui ont une expérience limitée du VIH, dans leur pratique médicale, à améliorer leurs compétences de counselling: ils sont en face d'une multitude de problèmes de santé et ils n'ont souvent pas le temps de — et ne sont pas convenablement rémunérés pour — consacrer l'attention nécessaire à un counselling adéquat. 3. Évaluation Il n'a pas été prouvé que les tensions psychologiques associées à la connaissance de la séropôsitivité, chez les personnes qui ont récemment été identifiées [comme séropositives], ont été réduites.193 Les counsellings pré- et post-test sont considérés comme des éléments essentiels du test de sérodiagnostic du VIH. Effectivement, avant que les traitements pour le VIH ne fassent leur apparition, l'occasion d'offrir des conseils était souvent considérée comme là raison principale pour laquelle les gouvernements devaient appuyer le test194 Selon l'OMS, AMC 1995, supra, note 72, à la p. 4. 0 Communication avec M. Shore, Hassle Free Clinic (Toronto), le 26 août 1996. 191 Conversation avec J. Cullingworth, supra, note 149. 189 19 192 193 194 VIII Communication avec K. Nallànagagam, supra, note 145. Miller et Pinching, supra, note 53, à la p. S191. Voir Field, supra, note 4, à la p. 48. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail [pjour être bénéfique ... le dépistage volontaire du VIH doit... faire partie d'un programme de conseil complet^ doté de conseillers formés fournissant des conseils avant que ne soit prise la décision de subir un test (conseil pré-test), etfournissantdes services de conseil assortis d'autres services (distribution de préservatifs et matériel d'injection stérile, le cas échéant) ou pouvant adresser la personne vers des centres spécialisés après le test (conseil post-test).195 Le counselling peut constituer un moyen direct de: • réduire l'anxiété, le déni et l'incompréhension qui se rattachent au VIH; • éduquer les gens sur l'importance et la nature des comportements réduisant le risque; • expliquer ce que signifie un résultat positif au test; et • aider les gens à faire face aux sérieuses conséquences psychologiques, sociales et économiques de l'infection à VIH, de même qu'aux sentiments face à la mort et au deuil.196 (1) Counselling pré-test Le counselling pré-test est une occasion d'éduquer et un moyen d'amorcer les soins continus et préventifs. La décision de subir ou non le test appartient toujours au patient197 Idéalement, un médecin qui donne du counselling pré-test devrait: • évaluer lerisqueque la personne ait été exposée au VIH ou soit infectée; • évaluer la période fenêtre; • fournir des renseignements sur l'infection au VIH et les tests de sérodiagnostic, y compris sur la signification d'un résultat positif, négatif et indéterminé, ainsi que sur l'impact de la période fenêtre; • discuter de la réduction du risque et explorer des façons précises qui peuvent permettre à la personne d'éviter ou de réduire les comportements à risque; • identifier les options de test disponibles dans la région; 195 OMS 1992, supra, note 2, à la p. 7. 197 AMC 1995, supra, note 72, à la p. 8. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • discuter de la tenue des dossiers, en précisant au patient que les résultats du test et des renseignements seront consignés à son dossier médical et seront accessibles à tous les professionnels de la santé qui ont besoih.de les connaître (si le patient s'y objecte, il faut discuter avec lui de la possibilité de se soumettre à un test anonyme); • examiner les problèmes posés par le test et en discuter avec le patient afin qu'il puisse analyser les avantages et les inconvénients du test et se préparer aux répercussions que pourrait avoir un résultat positif ou négatif. Le patient ne doit subir un test que lorsqu'il considère que les avantages l'emportent sur les inconvénients; • discuter de la confidentialité des résultats du test par rapport aux procédures du bureau ou de la clinique, de la transmission des résultats à d'autres dirigeants de la santé, ainsi que des exigences de déclaration obligatoire et de la notification des partenaires; • discuter du stress lié à l'attente des résultats et des réactions possibles au dévoilement de ceux-ci; • fixer les dates du test et de la visite post-test; • obtenir et consigner le consentement éclairé avant d'effectuer le test; et • offrir un soutien et un suivi en encourageant les patients à communiquer avec le médecin, avec des organismes de service sur le sida ou des groupes d'entraide s'ils ressentent une anxiété intolérable entre le moment du prélèvement sanguin et celui où ils reçoivent le résultat du test.198 La plupart de ces étapes s'appliquent aussi au counselling offert dans les cliniques de test. De plus, le counselling doit être un processus interactif — pas seulement une transmission d'information, mais une discussion ouverte au sujet des problèmes, des sentiments, des inquiétudes et des réactions: [vjous devez utiliser votre connaissance des techniques de consultation lois des séances, adaptant l'information, s'il y a lieu, afin de répondre aux besoins des clients et clientes. Vous devez vous rappeler que la culture, la langue, la perception de l'infection par le VIH, l'estime de soi et de nombreux autres facteurs auront un effet sur la compréhension que les clients et les clientes auront de l'information qu'ilsreçoiventet sur leur faculté de prendre les mesures appropriées. Ces facteurs doivent tous être pris en compte lors des séances de consultation.199 198 199 7W., aux p. 9,11 et 24. Ministère de la Santé de l'Ontario, supra, note 148, aux p. 4-5. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (2) Counselling post-test Au cours du counselling post-test, il faut travailler avec le patient pour s'assurer qu'il comprend le résultat du test, tenir compte de ses réactions psychologiques, suggérer des changements de comportements et évaluer le besoin d'un suivi et de soins.200 Les lignes directrices de l'AMC soulignent que les résultats du test, positifs ou négatifs, «ne doivent être communiqués au patient qu'au cours d'une entrevue face à face». Elles précisent qu'il est «inacceptable de les communiquer par téléphone», même s'ils sont négatifs, et que le médecin «s'expose à des poursuites s'il divulgue par inadvertance les résultats à quelqu'un d'autre». En outre, les lignes directrices insistent sur le fait que communiquer le résultat face à face permet de mieux connaître la réaction de la personne et de mieux la conséiller.201 Le counselling post-test devrait notamment: • évaluer dans quelle mesure la personne comprend les résultats du test; • en cas de résultat négatif ou indéterminé: discuter de la nécessité d'un autre test; passer en revue les modes de transmission du VIH; évaluer dans quelle mesure la personne est déterminée à suivre les stratégies de réduction du risque; • en cas de résultat positif: la première visite post-test peut servir principalement à offrir un soutien moral au patient puisque, immédiatement après le diagnostic, la personne séropositive est habituellement incapable d'absorber beaucoup plus d'information. Au cours des visites suivantes fil en faut habituellement plusieurs), le counselling devrait insister sur le fait que la personne peut demeurer en bonne santé et productive pendant longtemps; insister sur l'importance du suivi médical, des références à d'autres spécialistes au besoin, de la promotion de la santé et de la réduction du stress en général; discuter des répercussions du VIH sur la reproduction chez les hommes et les femmes, y compris des interventions destinées à réduire la transmission de la mère à l'enfant; organiser au besoin des services de soutien psychologique et social; encourager l'auto-éducation sur les soins et le traitement et être prêt à discuter de nouveaux progrès dans le traitement de l'infection à VIH; discuter de stratégies de réduction durisqueet, si nécessaire, organiser la notification du ou des partenaire(s).202 2 0 0 201 202 AMC-199S, supra,, note 72, à la p. 12. Ibid., p. 11. Ibid., aux p. 12-16 et 24. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (3) Importance maintenue du counselling (i) Counselling pré-test Comme mentionné ci-dessus, certaines personnes commentent à dire que le fait de demander que tous les gens désireux de le subir le test reçoivent d'abord du counselling pourrait en réalité en repousser certains, parce que Ton «dramatise» ainsi la situation du test et que Ton crée une atmosphère de «crise» autour de la décision de le subir. Les tenants de ce point de vue sont les personnes mêmes qui ont commencé à prétendre que le consentement spécifique et éclairé ne devrait plus être nécessaire pour le test et, en général, que (1) le VIH/sida ne se distingue plus des autres maladies et que (2) le test de sérodiagnostic du VIH devrait être abordé comme tout autre test médical. Ces personnes souhaitent qu'autant de gens que possible'passent le test dès que possible pour que les personnes séropositives puissent obtenir des traitements contre le VIH et modifient leurs comportements afin de prévenir la transmission du VIH à d'autres personnes. Pourtant, comme expliqué ci-dessus (chapitre C), la stigmatisation et la discrimination se poursuivent à l'endroit des personnes vivant avec le VIH/sida au Canada parce que le VIH/sida continue d'affecter de manière disproportionnée les populations vulnérables et marginalisées qui subissent depuis longtemps de la discrimination. Par conséquent, les possibles préjudices sociaux, psychologiques et économiques découlant d'un sérodiagnostic positif demeurent importants. De plus, même si les nouveaux traitements ont le potentiel d'être très bénéfiques pour les personnes séropositives, l'accès même à ces traitements demeure un problème sérieux et leur efficacité à long terme n'est pas encore démontrée. En 1997, et probablement pour encore bien des années, le VIH/sida continue d'être.une maladie fort différente des autres. Ce serait une grave erreur que de «banaliser» le test de sérodiagnostic du VIH et de pousser les gens à le subir sans avoir reçu de counselling pré-test permettant de discuter des avantages et préjudices potentiels du test. Certes, les gens devraient être encouragés à subir le test, mais il faut qu'on leur offre le soutien qui leur permettra de maximiser les avantages du test pour eux-mêmes et pour autrui, tout en réduisant les préjudices potentiels. (ii) Counselling post-test Le counselling post-test est peut-être encore plus important que le counselling pré-test: • les personnes qui reçoivent un sérodiagnostic négatif ont besoin de conseils sur les façons de demeurer séronégatives, Elles ont aussi besoin d'être renseignées sur la «période fenêtre» entre le moment de l'infection comme tel et le moment à partir duquel le test pourra la déceler, sans quoi l'onrisquede rassurer les gens à tort, par un résultat négatif; VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • les gens qui reçoivent un sérodiagnostic positif comprennent généralement peu des choses qu'on leur dit après l'annonce du résultat: il est essentiel de planifier des séances de suivi pour les aider à affronter la nouvelle.203 Plutôt que de réduire le besoin de counselling, la disponibilité de nouveaux traitements en accroît l'importance. Plus que jamais, le counselling des personnes qui reçoivent un résultat positif doit insister sur le fait qu'elles peuvent demeurer en santé et productives pendant longtemps; souligner l'importance du suivi médical; encourager l'auto-éducation sur les soins et le traitement; discuter des nouveaux développements dans le contrôle de l'infection à VIH; discuter des stratégies de réduction durisque;et, au besoin, voir à organiser la notification des partenaires. En outre, certaines mises en garde peuvent être appropriées: Nos connaissances ... sont encore incomplètes. Dans un scénario de l'activité sur le VIH où des rumeurs ou espoirs prennent rapidement l'allure de faits accomplis, les chercheurs et les cliniciens ont uneresponsabilitéfondamentale de s'assurer que les décisions de diagnostic et de contrôlereposentsur des procédures et des découvertes scientifiques que l'on peut observer en détail et analyser. Il est de plus en plus difficile, mais de plus en plus important à la fois, que les conseillers offrent un juste portrait des progrès scientifiques en cours et, au besoin, un portrait prudent tandis que bien d'autres gens acclament «les nouveaux habits du roi anti rétroviral » 2 0 4 4. Conclusions La discussion qui précède souligne de nouveau l'importance du counselling pré- et posttest dans le contexte du test de sérodiagnostic du VIH:' Cette emphaserenouvelée... le fait indéniable que les changements de volume et de contenu des connaissances médicales n'ont pas été accompagnés d'autant de progrès dans la disponibilité de soutien psychologique ou d'aide au bien-être pour les personnes séropositives, ni par une amélioration des retombées psychologiques d'unrésultatpositif. En conséquence, même si les raisons, particulièrement d'effectuer le counselling pré-test, ont considérablement évolué, la base fondamentale du counselling, ainsi que la nature du mécanisme et les besoins auxquels il répond, demeurent pratiquement intacts. Comme avant, il est vital dereconnaîtreque le conseiller sur le VIH doit demeurer une personne qui offre unerelationcontinue et confidentielle de confiance, de soutien implicite et explicite, qui s'élève au-dessus de la rhétorique' de l'enthousiasme précoce, des attentes irréalistes et des priorités cachées'qui sous-tendent les discussions publiques auxquelles ils sont continuellement exposés — tout comme leurs patients, peu importe leur profession.205 203 204 205 Schopper et Vercauteren, supra, note 182. Miller et Pinching, supra, note 53, à la p. S192. Ibid. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 3.1 men que la disponibilité de nouveaux traitements de l'infection à VIH souligne l'importance d'éliminer les obstacles dans l'accès au test de sérodiagnostic du VIH, le counselling pré-test et le counselling post-test ne devraient pas être considérés comme des obstacles au test Ils contribuent plutôt à maximiser les avantages du test pour les personnes qui le subissent et pour la société, et à en réduirç tes préjudices potentiels. Par conséquent, en règle générale, le test ne devrait pas être administré sans un counselling pré- et post-test de qualité et fidèle aux lignes directrices en vigueur sur le counselling. 3.2 Les lignes directrices et rendues largement 3.3 Les professionnels de la santé ont besoin d'éducation sur l'importance du counselling et sur les approches adéquates, par le biais d'une d'éducation des éducateurs. sur le counselling accessibles. devraient être mises à jour régulièrement d'offrir approche VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail F. TEST DE VIH A DOMICILE [L]'introduction du test du VIH à domicile sur le marché n'estriende moins qu'une révolution dans l'histoire de la santé et de la médecine. Ce serait la première fois qu'on aurait la capacité de diagnostiquer soi-même une condition chronique, incurable et fort probablement mortelle.206 Les questions soulevées par le counselling pré- et post-test sont intimement liées à celles entourant la disponibilité de nouvelles technologies qui rendent possible le test du VIH dans l'intimité du foyer, sans counselling pré-test et même parfois sans counselling posttest. Les avantages potentiels de la possibilité de rendre disponibles les trousses de test du VIH à domicile sont-ils si grands qu'ils justifieraient — entre autres — une exception à la règle générale selon laquelle le counselling est une composante essentielle du test de sérodiagnostic du VIH? Ce chapitre examine d'abord les recommandations formulées par diverses organisations canadiennes au sujet du test du VIH à domicile (Historique), puis observe la situation actuelle en faisant remarquer que, même si des trousses de test du VIH à domicile sont approuvées et vendues aux États-Unis depuis le milieu de 1996, aucun test du VIH à domicile n'a encore été approuvé au Canada (Situation actuelle). On observe ensuite de manière critique les avantages et préjudices potentiels de tels tests et les questions à examiner au Canada avant qu'ils ne puissent être mis sur le marché (Évaluation). Ce chapitre conclut que les trousses de test du VIH à domicile comportent de grands avantages potentiels mais aussi, clairement, de possibles préjudices, puis recommande d'adopter une approche pmdente quant à leur introduction au Canada (Conclusions). 1. Terminologie Le terme «test du VIH à domicile» sème souvent la confusion parce qu'il est utilisé pour désigner deux formes différentes de test: • le test par autoprélèvement à domicile^*) et • le test d'auto-analyse à domicile.^*) H est important de distinguer ces deux formes lorsque l'on évalue leurs impacts respectifs. Dans le texte qui suit, l'expression générale «test à domicile» n'est utilisée que lorsqu'il est question simultanément des deux. Commentaire de D. Schopper lors du débat sur le test du VIH à domicile, à la Xle Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 8 juillet 1996. 2 0 6 O "Home-collection" ou "home-access testing" en anglais. ("*) "Home-selT ou "home-validated testing" en anglais. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (1) Test par autoprélèvement à domicile Ce système permet de faire soi-même son prélèvement à la maison au moyen d'une trousse à cet effet Le spécimen prélevé, identifié par un numéro de code, est posté à un laboratoire d'analyse; environ sept jours plus tard, on peut téléphoner pour obtenir son résultat. Selon le résultat du test, le counselling est prodigué soit par boîte vocale (résultat négatif), soit par une personne au téléphone (résultat positif). Les trousses de prélèvement à domicile ne permettent donc pas d'obtenir un résultat surle-champ, en quelques minutes comme les tests de grossesse et l'autre type de test du VIH à domicile: l'auto-analyse à domicile. (2) Test d'auto-analyse à domicile Ces tests, basés sur la salive, peuvent être effectués entièrement à domicile, sans le concours d'une autre personne. Si l'indicateur de VIH est négatif, le feuillet d'accompagnement encourage la personne à effectuer de nouveau le test dans trois à six mois. Si l'indicateur de VIH est positif (ce qui se traduit, par exemple, par un changement de couleur), le feuillet encourage la personne à consulter un médecin ou une clinique de test de sérodiagnostic du VIH pour un test supplémentaire. Pour des raisons évidentes, le counselling ne fait pas partie intégrante de ce système. Bien que le feuillet puisse inciter l'utilisateur à prendre contact avec lin établissement de santé en cas de résultat positif, la personne est laissée à sa seule initiative de le faire ou non. Ce test n'est qu'un test de dépistage préliminaire/*) non pas un test de sérodiagnostic. On l'appelle également «indicateur de VIH» parce que, plutôt que d'établir un diagnostic à l'égard du VIH, il indique que des tests supplémentaires sont nécessaires. 2. Évolution du domaine des tests du VIH L'évolution ou la révolution dans ce domaine vient d'un progrès technologique qui permet d'utiliser des liquides corporels autres que le sérum ou le plasma pour la détection de l'anticorps anti-VIH. Les tests traditionnels sont basés sur la détection de l'anti-VIH dans le sérum/plasma dérivé de sang entier prélevé par ponction veineuse et requièrent des professionnels de la santé expérimentés dans le prélèvement et des équipements de laboratoire pour l'analyse. La possibilité d'utiliser des liquides corporels comme la salive ou l'urine pour la détection de l'anti-VIH est attrayante pour plusieurs raisons: • un spécimen de salive peut êtré prélevé ou autoprélevé pratiquement n'importe où — à la maison, dans la rue, dans un bar, "Screening test", en anglais. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • les méthodes de prélèvement non effractives présentent moins derisquepour le sujet et pour le travailleur de la santé: il;n'y a nirisquede contamination par une seringue non stérilisée, nirisquede blessure d'aiguille; • l'utilisation de spécimens d!urine offre des avantages similaires: l'infectivité des deux liquides corporels semble très faible.207 Une autre méthode de prélèvement consiste à recueillir des gouttes de sang sur un papier filtre. Le sang est généralement obtenu par une piqûre qu'on se fait au doigt à l'aide d'une lancette à ressort. On laisse tomber quelques gouttes, suffisamment pour saturer au moins deux endroits sur un papierfiltreabsorbant que l'on fait ensuite sécher à l'air et que l'on place dans un sac de plastique hermétique. Jusqu'à tout récemment, tout test du VIH - même réalisé à partir de liquides corporels autres que le sérum ou le plasma - était confiné aux laboratoires. Aujourd'hui, des tests du VIH peuvent être réalisés à la maison: les tests du VIH par autoprélèvement ou autoanalyse à domicile sont devenus réalité. 3. Historique (1) États-Unis (ï) Première trousse de test à domicile approuvée par la FDA Quand le premier test du VIH à domicile a été mis au point aux États-Unis, plusieurs militants dans la lutte contre le sida, de même queTAmerican Medical Association, s'opposaient à sa mise en marché; en 1987 la-Food and Drug Administration (FDA) refUsait même d'en considérer l'approbation. La controverse a refait surface en 1993, lorsque Johnson & Johnson acheta de son inventeur les droits relatifs à la technologie de test à domicile. Johnson & Johnson a alors entrepris une vigoureuse campagne pour obtenir l'approbation de la FDA.208 Le 14 mai 1996, sa trousse de test par prélèvement à domicile, lè Confide HIV Testing Service (Direct Access Diagnostics), était approuvée.209 (ii) Le Confide Testing Service La trousse se compose de trois éléments: • un nécessaire de prélèvement du sang à domicile, vendu sans ordonnance; • un test de recherche de l'anticorps au VIH-1, effectué dans un laboratoire agréé; et 2 0 7 2 0 8 2 0 9 D. Schopper, G. Vercauteren, supra, note 182, avec références. N. Fieundlich, «The Trials of a Home HIV Test», Business Week, 18 mars 1996, p. 56. «Health Notes. Home Testing for HIV Infection», United Press International, 15 mai 1996. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • un centre téléphonique qui donne les résultats du test et des services anonymes de counselling et d'orientation. La trousse Confide peut être achetée en pharmacie ou en composant un numéro sans frais pour livraison à domicile. La trousse contient un dépliant de conseils pré-test, un mode d'emploi, le nécessaire de prélèvement et une enveloppe protectrice. À l'aide de la lancette contenue dans la trousse, l'utilisateur se pique au doigt et applique trois gouttes de sang sur un carton à cet effet, qui porte un code unique. Le carton est ensuite posté à un laboratoire dans une enveloppe pré-adressée, port payé. Au laboratoire, des analyses immuno-enzymatiques et des tests de confirmation sont effectués. Après environ sept jours, l'utilisateur peut composer un autre numéro sans frais pour obtenir son résultat en donnant son numéro de code. La personne dont le résultat est négatif entend un message enregistré qui l'informe de la signification du résultat et lui offre la possibilité de parler avec un conseiller. Les résultats positifs sont donnés de vive voix par une personne qui conseille et oriente l'utilisateur vers des services de suivi clinique et des agences de services sociaux.210 Tous les éléments qui composent le service d'analyse sont soumis à de nombreux règlements dont la FDA surveille de près l'application. Les services d'analyse et de counselling doivent être agréés à chaque année et les procédures d'analyse doivent satisfaire aux normes de la FDA. (iii) Concurrence Un compétiteur, Home Access Health Corporation, a reçu l'autorisation de la FDA le 22 juillet 1996 pour sa trousse appelée Home Access Test.211 Depuis, les deux sociétés reçoivent des commandes postales de toutes les régions des États-Unis, ont accru l'offre au détail à l'échelle nationale et lancé des campagnes de publicité nationales 2 1 2 D'autres sociétés américaines ont présenté à la FDA des demandes d'approbation de leurs trousses de prélèvement à domicile.213 Diverses trousses, bien qu'elles n'aient pas encore été approuvées par la FDA, font déjà l'objet de publicité aux Etats-Unis214 et au moins une société, SmithKline Beecham, a annoncé son intention de demander l'autorisation de commercialiser auprès des consommateurs son test de salive, qui bénéficie actuellement d'une approbation pour usage par des médecins seulement (iv) Tests de salive Jusqu'à présent, les États-Unis sont le seul pays où un test de ce genre a été approuvé pour le test préliminaire de l'infection à Vffl; dans d'autres pays, ce type de test n'est utilisé qu'à des fins de surveillance. Comme le soulignent Schopper et Vercauteren, «la 10 Direct Access Diagnostics. The Confide HIV Home Testing and Counselling Service, publicité distribuée  l'occasion du HIV & Telemedicine Symposium, Vancouver, 9 juillet 1996. 2 1 1 «New Home HIV Test Goes on Sale Nationwide», Bangor Daily News, 25 juillet 1996. 2 1 2 M Wilke, « J & J S Confide Faces Legal Battle, New Rival», Advertising Age, 1996, 67(32): 3; C. Hutchcraft, «AIDS Tests Join At-Home Diagnostics», Chicago Tribune, 1 octobre 1996, p. 4-1. 2 1 3 R B a y a , «Testing for HIV Infection at Home», New England Journal of Medicine, 1995, 332: 1296. Voir aussi une version légèrement modifiée de cet article, dans Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1996, 3(1): 40-42. 2 1 4 Schopper et Vercauteren, supra, note 182. 2 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail majorité des pays européens entretiennent des réserves à l'égard des tests de salive pour le sérodiagnostic, parce que leur efficacité est encore inférieure à celle des spécimens traditionnels et que leur sensibilité aux spécimens de séroconversion est encore inconnue».215 (2) Développements internationaux Plusieurs gouvernements, incluant ceux de l'Australie, de l'Autriche, de la France, de l'Allemagne, du Japon, des Pays-Bas, de la Suisse et du Royaume-Uni, ont déclaré que l'utilisation par le public des tests d'autosérodiagnostic du VIH ne devrait pas avoir lieu sans être précédée et suivie de counselling.216 Au Royaume-Uni et en Autriche, des lois interdisent actuellement la vente ou la fourniture aux membres du public de trousses de test du VIH ou de tout élément qui en fait partie. Mais les temps changent et d'autres pays pourraient, dans un avenir proche ou lointain, emboîter le pas aux États-Unis et approuver la vente sans ordonnance de trousses de prélèvement à domicile. (3) Développements au Canada Même si des trousses de test du VIH à domicile sont approuvées et vendues aux ÉtatsUnis depuis le milieu de 1996, aucune n'a encore été approuvée au Canada. La plupart des organisations canadiennes qui ont abordé les questions soulevées par ces tests ont exprimé un certain nombre d'inquiétudes sérieuses, jusqu'à rejeter parfois complètement leur introduction. i (i) Atelier de 1993 Le 16 juillet 1993, Santé Canada organisait un ateHer sur les trousses de test par autoanalyse à domicile. Son objectif était de recueillir les opinions de divers représentants fédéraux, provinciaux et communautaires, avant qu'une demande d'approbation ne soit présentée par un manufacturier. Deux points étaient considérés comme catalyseurs de ce besoin de discussion: • le progrès des technologies de détection de l'anti-VIH; et • les pressions de sociétés d'assurance pour pouvoir utiliser ces tests. On a rapporté que des sociétés d'assurance canadiennes utilisaient des tests de salive pour dépister le VIH chez leurs candidats à l'assurance, et qu'elles conseillaient aux candidats dont le résultat indiquait une possibilité d'infection à VIH de subir un test sanguin de confirmation. Selon les participants à la rencontre, ceci déborde de la simple procédure d'examen de dossier et contrevient à la législation provinciale sur la santé: il est interdit au Canada d'utiliser un test de salive comme instrument de diagnostic. Wibid. Ibid.y avec références. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (ii) Association canadienne de santé publique En 1993, l'ACSP a établi le principe que «[t]ous les Canadiens devraient connaître et disposer d'une variété de tests volontaires, de grande qualité et exempts de préjugés, y compris des tests confidentiels nominaux et non nominaux ainsi que des tests anonymes». Toutefois, l'Association poursuivait en disant que «[c]ela ne comprend pas les trousses de test à domicile ou d'autres types de tests sans contrôle de la qualité ni possibilité de profiter de services de counselling avant ou après le test» [emphase ajoutée].217 (iii) Association médicale canadienne Dans ses lignes directrices sur le counselling, l'AMC a abordé la question des «nouvelles méthodes de détection du VIH» parmi les «questions nouvelles», en déclarant que: Des tests rapides et simples de détection du VIH peuvent présenter des avantages par rapport aux protocoles en vigueur dans des contextes particuliers comme les régions éloignées, les pays en développement ou les sites de soins hors-établissements. L'arrivée de ces tests qui n'exigent pas de matériel de laboratoire complexe ni de formation technique avancée soulève d'importantes questions scientifiques, techniques, épidémiologiques,financièreset éthiques. L'utilisation de ces tests affecterait le contenu de l'information communiquée au cours du counselling. C'est pourquoi il faudra modifier les lignes directrices pour le counselling une fois que ces tests auront été approuvés [...]. L'arrivée des testsrapideset simples ne réduit en rien la nécessité de contrôler la qualité des méthodes de test, ni la formation des personnes qui exécutent les tests et donnent du counselling.218 (iv) Promotion d'un test à domicile au Canada Le 13 mai 1996, une société américaine appelée 1-888-444-TEST Inc. tenait une conférence de presse à Toronto pour faire la promotion auprès des Canadiens de.son service de vente par commande postale d'une trousse de test du VIH par auto-analyse de salive à domicile. Les trousses étaient offertes au prix de 90S la paire pour «utilisation personnelle». La société contrevenait à des règlements fédéraux en offrant ces trousses avant qu'elles aient même été soumises pour l'évaluation de leurfiabilité.La Direction de la protection de la santé (DPS) de Santé Canada a demandé à cette société de cesser toutes ses activités et de présenter une demande d'évaluation pré-commercialisation afin d'obtenir un avis de conformité. Selon ce qui a été rapporté dans les médias, un représentant de la société a annoncé que la société soumettrait la trousse à Santé Canada pour évaluation.219 2 1 7 2 1 8 2 1 9 VIII ACSP, supra, note 16, à la p. 18. AMC, 1995, supra, note 72, à la p. 19. W. Immen, «Mail-Order HIV Saliva Test Raises Concerns», The Globe & Mail, 13 mai 1996. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (v) Société canadienne du sida Lors de sa réunion des 22-24 novembre 1996, le conseil d'administration de la SCS s'est vivement opposé au test du VIH à domicile, en adoptant la résolution que «la SCS n'appuie pas l'utilisation de trousses de dépistage à domicile» au Canada. Le conseil a recommandé que l'utilisation et ta vente de ces trousses soit interdite au Canada, à cause des préoccupations suivantes: • la précision limitée de certaines trousses; • le manque de counselling et de soutien appropriés; • le fait que des individus pourraient être forcés à passer le test ou testés sans leur consentement; et • le fait que les gens auraient à payer pour se procurer les trousses alors que «le test du VIH fait partie du système public de soins de la santé» et que «les gens ne devraient pas avoir à payer pour Je test du VIH». 4. Situation actuelle Au Canada, la vente d'instruments de diagnostic in vitro pour la détection de l'infection à VIH est régie par la Loi sur les aliments et drogues et le Règlement sur les instruments médicaux. Tous les instruments médicaux offerts pour la vente au Canada doivent rencontrer les critères des articles 3 et 19 à 21 de la Loi sur les aliments et drogues et les parties I à IV du Règlement sur les instruments médicaux. De plus, les instruments de diagnostic in vitro pour la détection de l'infection à VIH doivent aussi se conformer à la partie V de ce Règlement. La partie V du Règlement stipule que tout fabricant doit obtenir une autorisation avant d'offrir pour vente au Canada un instrument de diagnostic in vitro pour la détection de l'infection à VIH. L'autorisation de vente, sous la forme d'un avis de conformité, peut être obtenue en présentant au directeur: • une preuve de qualité assurée; • une preuve de sécurité et d'efficacité; et • des exemplaires de toute étiquette et du matériel d'accompagnement de l'instrument. En vertu du Règlement, le Bureau des instruments médicaux recevra, examinera et évaluera les demandes de vente sans ordonnance de trousses de test de l'infection à VIH à domicile, sur la base de leurs qualités scientifiques. Des études pré-cliniques et des analyses cliniques appropriées devront vérifier tout aspect technique des trousses — sensibilité, VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail spécificité, reproductibilité, stabilité, etc. — en comparaison avec un système adéquatement validé pour utilisation professionnelle, de prélèvement et d'analyse de sang ou de tout autre spécimen. D'autres aspects de sécurité et d'efficacité directement reliés à l'utilisation du test, comme la compréhensibilité du mode d'emploi pour les consommateurs, la sécurité de la manutention, etc., devront également être validés dans un essai clinique réalisé auprès de la clientèle cible. Si la sécurité et l'efficacité d'une trousse sont démontrées, en conformité avec les articles 35 et 36 du Règlement, la DPS émettra un avis de conformité. La vente et la publicité annonçant la vente par la poste (au Canada ou de l'étranger) de trousses de test du VIH à domicile qui n'ont pas reçu d'avis de conformité (comme c'était le cas de 1-888-444-TEST Inc.) sont considérées comme contrevenant aux articles 34 et 35 du Règlement. Dans de tels cas, la DPS intervient «et continuera d'intervenir pour faire cesser cette pratique».220 Cependant, lorsque des particuliers achètent des trousses de test du VIH hors du Canada et les importent pour leur usage personnel, ceci n'est pas considéré comme enfreignant la Loi sur les aliments et drogues, ni le Règlement sur les instruments médicaux, pourvu que ces personnes ne tentent pas de distribuer les trousses. En mars 1997, aucune trousse de test du VIH à domicile n'avait encore été approuvée pour la vente au Canada. Dans une entrevue du 30 août 1996, le Dr Choquet du Bureau des instruments médicaux de la Direction de la protection de la Santé a dit que, pour des motifs de confidentialité, Santé Canada ne pouvait révéler si des sociétés avaient demandé un examen de leurs tests pour approbation. Selon M. Choquet, le processus d'approbation de tests pour le VIH prendrait généralement environ un an.221 5. Évaluation Comme l'ont dit Schopper et Vercauteren, «les gouvernements de plusieurs pays industrialisés entretiennent peut-être des réticences concernant l'approbation de la vente libre de trousses d'autoprélèvement et d'auto-analyse à domicile, parce qu'ils craignent que les conséquences négatives potentielles de cette nouvelle technologie puissent être plus importantes que ses effets positifs».222 La présente section se penche donc sur les principaux arguments soulevés par ceux qui sont en faveur du test à domicile et par ceux qui s'y opposent. 2 2 0 221 2 2 2 VIII Communication reçue de C. Choquet, Direction de la protection de la santé. Santé Canada, 14 novembre 1996. Communication avec C. Choquet, Direction de la protection de la santé, Santé Canada, 30 août 1996. Schopper et Vercauteren, supra, note 2. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (1 ) Avantages présumés du test à domicile (i) Test plus répandu Selon lès partisans du test à domicile, il y a un urgent besoin d'une nouvelle méthode de test Ils soulignent que, malgré l'existence de centres de test anonyme, bien des gens sont réticents à aller subir un test: • près de la moitié des Américains séropositifs n'ont subi un test qu'un an avant de recevoir un diagnostic de maladie liée au sida; et • environ un tiers n'étaient qu'à deux mois d'un diagnostic de sida quand ils ont reçu un résultat positif au test.223 Au Canada, peu d'études ont observé la manière dont le test de sérodiagnostic du VIH se déroule dans la pratique. Une étude sur le comportement des Canadiens à l'égard du test a été présentée lors de la Xle Conférence internationale sur le sida.224 Un sondage téléphonique à l'échelle nationale a été effectué pour déterminer combien de gens avaient passé un test, quel genre de gens c'était, pourquoi ils avaient décidé de subir le test et où ils l'avaient subi. Environ un quart des Canadiens âgés d'entre 20 et 50 ans avaient subi le test; près de la moitié de ce nombre l'avait passé au cours des deux années précédentes. Les gens étaient plus susceptibles d'aller passer un test s'ils étaient jeunes, plus pauvres, non mariés et résidants d'un grand centre urbain. Fait à souligner: seulement 11% avaient subi un test non nominatif, comparativement à 78% qui avaient passé un test au cabinet d'un médecin ou en milieu hospitalier. La raison la plus fréquemment invoquée pour avoir passé le test était un contrôle général de la santé (40% chez les hommes, 32% chez les femmes), suivi par l'inquiétude d'être «àrisque»d'infection (30% dans chacun des sexes). Aucune des 259 femmes testées et seulement 3 des 237 hommes testés ont rapporté qu'on leur avait annoncé un diagnostic positif. Selon les tenants du test à domicile, le caractère anonyme et pratique de ce type de test encouragera plus de gens à se décider à subir un test: Maintenant, pour la première fois, le test du VIH peut être fait de manière anonyme dans le confort de son propre foyer. Pas besoin de rendez-vous et pas besoin de s'absenter du travail. Vous pouvez subir le test au moment qui vous convient.225 Cependant, les tenants d'une approche prudente soulignent que 0 ) les données sur les attitudes des gens face aux trousses d'autoprélèvement à domicile sont très limitées, et que 2 2 3 Témoignage devant le Comité consultatif sur les produits du sang de la FDA, Washington DC: Centers for Disease Control and Prevention, 1994, cité dans Baya- et coll., supra, note 213. 2 2 4 D. Sutherland et coll., HIV Testing Behaviour of Canadians, abrégé Mo.C.210, présenté à la Xle Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 7-12 juillet 1996. 22 ^ Direct Access Diagnostics, supra, note 210. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (2) il n'existe aucune donnée pour confirmer l'affirmation souvent répétée que «le public veut» des trousses d'auto-analyse à domicile. Selon un sondage effectué en 1992, • 29% de l'ensemble des répondants et 42% des répondants considérés «à risque» relativement au VIH disaient être très susceptibles ou assez susceptibles d'utiliser un test par autoprélèvement à domicile, et • 22% de tous les répondants et 31% de ceux considérés «àrisque»relativement au VIH disaient qu'ils préféreraient un test par autoprélèvement à domicile à toutes les autres options.226 Les personnes les plus susceptibles de répondre qu'elles utiliseraient un test par prélèvement à domicile étaient de sexe masculin, jeunes, non blanches, sans diplôme universitaire, avaient un revenu peu élevé et présentaient des facteurs de vulnérabilité au VIH/sida ou croyaient qu'elles avaient des chances d'avoir le sida. Ces résultats doivent être lus avec prudence: les répondants n'avaient pas été informés du prix du test et on ne leur a pas demandé pourquoi ils préféreraient le test par autoprélèvement. En 1996, The Advocate, un magazine américain visant un lectorat gai, a mené un sondage informel auprès de ses lecteurs. Cinquante-deux pour cent des répondants (dont le nombre total est inconnu) disaient qu'ils subiraient un test plus volontiers s'ils pouvaient utiliser une trousse d'autoprélèvement à domicile, tandis que 42% répondaient que la disponibilité de ces trousses ne ferait aucune différence pour eux, et que 6% se disaient indécis.227 (ii) Accès accru au test anonyme Actuellement, le test anonyme n'est pas facilement accessible à tous les Canadiens. En fait, comme on le mentionne dans le chapitre D, il n'existe que dans quelques cliniques désignées, dans certaines provinces. Pour plusieurs personnes, surtout dans des régions éloignées ou dans des provinces où le test anonyme n'est toujours pas offert, il est tout simplement impossible de se rendre à ces centres. Un test à domicile pourrait leur donner la possibilité de subir un test dans l'anonymat c Il faut toutefois noter que les tests d'auto-analyse ne sont souvent que des tests de dépistage préliminaire: si une personne obtient un résultat positif, elle devrait subir un test de confirmation par prélèvement sanguin, qui ne sera pas anonyme à moins d'être effectué dans un centre de test anonyme du VIH. K. Phillips , et coll., «Potential Use of Home HIV Testing», New England Journal of Medicine, 1995, 332: 1308. 2 2 7 «Advocate Poll Results», The Advocate, 23 juillet 1996, p. 8. 2 2 6 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (iii) Tests moins effractifs que les tests traditionnels Les nouvelles trousses sont moins importunes que les méthodes traditionnelles de test: elles ne requièrent que le prélèvement de quelques gouttes à l'aide d'une légère piqûre, ou le prélèvement de salive. On laisse entendre que les gens seraient ainsi plus disposés à subir un test. Par exemple, • un centre multidisciplinaire européen d'étude sur les prostitués a démontré que plusieurs personnes qui refusaient qu'on prélève de leur sang pour le test du VIH consentiraient à un prélèvement de salive;228 • une étude canadienne a montré qu'en offrant la possibilité d'un test au moyen de trousses de prélèvement de salive plutôt que par prise de sang, on augmentait de 69% à 83% le consentement des utilisateurs de drogue par injection à donner un spécimen.229 Les nouvelles trousses de test pourraient également être la seule option pour les personnes qui, pour des raisons religieuses, s'opposent au prélèvement de sang. (iv) Impact positif en santé publique Les partisans du test à domicile sont d'avis que l'augmentation de la disponibilité et de l'utilisation des tests du VIH auraient pour principaux avantages le traitement précoce, la réduction des coûts et la diminution de la transmission du VIH par contact sexuel. Comme l'exprimait Donna E. Shalala, du ministère des Services de santé des États-Unis: [t]rop de gens ignorent leur état sérologique au VIH. La connaissance c'est le pouvoir, et le pouvoir conduit à la prévention. La disponibilité d'un test à domicile devrait donner à plus de gens la possibilité de connaître leur état, de se protéger et de protéger les personnes qu'ils aiment.230 Traitement précoce L'accès précoce à un traitement, basé sur une connaissance plus rapide de la séropositivité, procurera des avantages à l'individu si ces services sont disponibles, là où ils le seront 231 Certes, le fait de savoir tôt qu'on est séropositif peut être avantageux — mais seulement si l'on a accès à des traitements. Malheureusement, même au Canada, l'accès aux traitements demeure un problème important. 228 European Working Group on HIV Infection in Female Prostitutes, «HIV Infection in European Female Sex Workers: Epidemiological Link with the Use of Petroleum-Based Lubricants», AIDS, 1993, 7: 401. 2 2 9 C.J. Major et coll., «Comparison of Saliva and Blood for Human Immunodeficiency Virus Prevalence Testing», dans British Columbia Centre for Excellence in HIV/AIDS, HIV/AIDS Reserach in British Columbia. A Ten Tear Retrospective, Vancouver, le Centre, 1996,200, à la p. 203. 2 3 0 «HIV Home Test Could Aid Prevention, Awareness», The Nation's Health, juiUet 1996, p. 6. 2 3 1 Schopper et Vercauteren, supra, note 182. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Diminution des coûts H a été suggéré que la disponibilité de trousses de tests à domicile pourrait réduire la demande et les coûts associés au test dans les établissementsfinancéspar l'État: P]e principal argument est que les personnes séronégatives n'auraient besoin que d'un seul test, administré à la maison, et de peu ou pas de counselling, ce qui réduirait les coûts en ressources humaines et lesfiaisgénéraux. De plus, les gens paieraient eux-mêmes au moins le premier test, ce qui réduirait les coûts pour le secteur public, particulièrement là où le gouvernement offre le test sans fiais.232 Comme le note Frerichs, [seulement environ 2% des personnes qui se présentent dans les centres de test et de counselling sont séropositives. L'argent dépensé pour les nombreuses personnes séronégatives ne peut pas être dépensé pour le traitement et les soins prolongés des personnes séropositives. En supportant un système dans lequel seulement deux pour cent des personnes qui se présentent sont séropositives, nous dépensons pour des personnes séronégatives des sommes d'argent énoimes qui pourraient être réparties de façon plus efficace pour ralentir l'épidémie.233 Dans un autre texte il conclut: Il est trop coûteux et inefficace pour la plupart des pays d'offrir un test en clinique aux personnes chez qui des marqueurs du VIH n'ont pas été décelés auparavant. [...] Les économies réalisées en évitant de tester et de conseiller d'innombrables personnes séronégatives pourraient être affectées aux soins de celles qui sont séropositives, incluant le suivi à long terme, l'éducation et le soutien.234 Cependant, cette façon de voir néglige de prendre considérer les avantages du counselling et du test volontaire pour les personnes séronégatives: le counselling peut être particulièrement important pour les personnes séronégatives qui s'adonnent à des comportements àrisque.Ce point de vue passe également outre au fait que les centres de test anonymefinancéspar l'État demeureront importants même si le test à domicile est rendu disponible (voir supra, chapitre D). Diminution de la transmission par voie sexuelle On a suggéré que la disponibilité de tests à domicile entraînerait une diminution de la transmission sexuelle du VIH. Cette opinion prend pour acquis que: 2 3 2 / A i r f . . et référence.à S.R. Salbu, «HIV Home Testing and the FDA: The Case for Regulatory Restraint», Hastings Law Journal, 1995, 46(2): 403-457. Voir aussi Bayer, infra. Supra, note 5. 2 3 4 VIII R. Frerichs, HIV Testing - A Reply, de [email protected], 2 octobre 1996. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • plus de gens subiront un test sans attendre et, s'ils découvrent qu'ils sont séropositifs, éviteront d'avoir des comportements àrisque;' • les couples pourraient établir la présence ou l'absence d'anticorps au VIH chez l'un ou l'autre partenaire et agir en conséquence; et • des partenaires pourraient «se tester subtilement».235 (2) Craintes soulevées par le test à domicile En général, on peut s'attendre à ce que les risques et les conséquences potentiellement négatives du test à domicile seront beaucoup plus importants dans la mesure où les personnes les plus démunies sont mal protégées par les lois et les règlements, le statut desfemmesest inférieur à celui des hommes, le contrôle de la qualité des instruments et procédures médicaux est difficile à assurer, les règlements ne sont pas appliqués, le degré d'instruction est faible et les services de santé sont insuffisants ou difficiles d'accès 2 3 6 Bien que le test à domicile semble avoir gagné de plus en plus d'appui au cours des récentes années, un certain nombre de questions restent à aborder: • l'ampleur des effets bénéfiques du test à domicile sur la santé publique; • l'exactitude des tests; • l'absence de counselling adéquat; • lesrisquesd'abus; • l'effet sur les services de test existants; et • dans quelle mesure les personnes qui vivent en région éloignée, apprenant leur séropositivité par un test à domicile, auraient tout de même de la difficulté à avoir accès à des traitements médicaux prodigués par un praticien expérimenté. 1 1- (i) Effet discutable en santé publique [L'efficacité du] test comme stratégie de prévention ou de modification du comportement demeure incertaine. Ceci est particulièrement vrai dé toute forme de test des anticorps au VIH administrée en l'absence de counselling avant et après le test.237 2 3 5 Schopper et Vercauteren, supra, note 182, avec référence à R. Frerichs, «Personal Screening for HIV in Developing Countries», Lancet, 1994, 343: 960-962. 2 3 *> Schopper et Vercauteren, supra, note 182. 237 Graydon, Rapport sur l'atelier de Santé Canada (DPS) sur les Tousses de test du VIH à domicile, 16 juillet 1993, Ottawa, Société canadienne du sida, 23 juillet 1993. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail La disponibilité du test à domicile aurait-elle réellement un effet bénéfique sur la santé publique, comme le soutiennent les gens qui sont en faveur du test à domicile? Tel que l'affirment Schopper et Vercauteren: [bjien que personne n'irait jusqu'à nier les avantages potentiels du test du VIH pour l'individu, son effet sur la santé publique demeure controversé. En général, la preuve que le test du VIH est susceptible d'entraîner une modification du comportement est mitigée. Il a été démontré que le recours volontaire au test et au counselling peut favoriser l'adoption d'un comportement sexuel plus sécuritaire chez les couples de statut sérologique disparate si les deux partenaires reçoivent un test et du counselling. Cependant, sur le plan de la santé publique, peu de changements de* comportement ont été démontrés chez les hétérosexuels s'ils subissent un test seuls... De plus, certaines études ont révélé uné augmentation des comportements àrisquechez les personnes qui ont établi leur séronégativité au moyen d'un test. Le principal problème est qu'il n'y a que peu de données fiables provenant d'études épidémiologiques solides et que plusieurs variables sont susceptibles de semer la confusion, par exemple la qualité du counselling offert parallèlement au test, la perception initiale durisquepar l'individu, l'attitude des membres de la famille et l'environnement social. Donc après dix années d'expérience en ce qui a trait au test du VIH... nous sommes incapables de tirer des conclusions définitives sur le rôle du test du VIH dans la lutte contre la propagation ultérieure. Le principal argument en faveur d'une plus grande disponibilité des tests du VIH est que chacun devrait avoir accès à de l'information sur son propre état de santé pour être en mesure de faire des choix personnels éclairés sur la prévention du VIH et les soins nécessaires, [références omises]238 En outre, comme tout test anonyme, le test à domicile rendrait impossible la déclaration des noms des personnes séropositives. Certains croient qu'une augmentation de l'accessibilité au test anonyme nuirait aux efforts visant à contrôler l'épidémie du VIH par la notification des partenaires ét d'autres mesures traditionnelles de santé publique. (ii) Exactitude L'exactitude des nouvelles méthodes de test demeure aussi controversée. Comme l'ont indiqué Schopper et Vercauteren: un certain nombre de problèmes concernent l'exactitude des tests, y compris leur sensibilité et leur valeur prédictive; la qualité du test au moment de l'utilisation, dépendant non seulement du fabricant, mais également du transport et de l'entreposage aux points de vente et à la maison; la qualité du spécimen prélevé; la compréhension de l'utilisateur concernant la période d'incubation; et, de façon plus générale, le degré d'éducation nécessaire pour comprendre adéquatement la procédure à suivre. Les tests d'auto-analyse à domicile posent des problèmes supplémentaires, comme les possibilités 2 3 8 VIII Schopper et Vercauteren, supra, note 182, avec nombreuses références. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail ' — • 1 -a , ,(• • " d'erreurs de manipulation par les profanes, l'inteipiétation des résultats et les mesures pour passer un test de confirmation.23? : Certains des nouveaux tests semblent exacts etfiables:par exemple, la FDA a basé son approbation du test Confide sur des études montrant que: • 99,95% des spécimens séronégatifs et 100% des spécimens séropositifs furent identifiés correctement;240 • des personnes de milieux divers ont été capables de suivre le mode d'emploi de la trousse assez bien pour obtenir un spécimen adéquat pour l'analyse.241 Par contraste, selon Schopper et Vercauteren, «l'exactitude de la nouvelle génération de tests à partir de sang de capillaires, d'urine et de salive, qui pourraient éventuellement être utilisés à domicile, n'a pas encore été évaluée à fond, et il n'a pas été démontré qu'ils pouvaient êtrefiableslorsque réalisés par des profanes.» On se préoccupe particulièrement du fait que les données sur l'exactitude des tests sont généralement obtenues dans des conditions optimales par des techniciens expérimentés et que cela ne reflète pas toujours la situation réelle: P]'exactitude des tests simples et rapides qui requièrent une 'interprétation subjective est étroitement liée à l'expérience. Des opérateurs sans expérience, comme les profanes, peuvent facilement errer dans l'interprétation des résultats. Lés dépliants insérés dans les trousses dé tests d'auto-analyse à domicile ... prétendent à une très grandefiabilité,alors que pratiquement aucune donnée externe n'est disponible. Il est clair que ces affirmations devraient être validées par des études indépendantes.242 De plus, la confirmation d'un résultat positif comporte certaines difficultés.243 Ceci a amené Schopper et Vercauteren à conclure que: [l]a sensibilité légèrement inférieure et la difficulté de confirmer un résultat positif demeurent les principales lacunes des spécimens autres que le sérum/plasma. Le degré de sensibilité actuellement observé dans les spécimens autres que le sérum/plasma constitue un problème dans l'utilisation pour diagnostic, mais il est acceptable dans le cadre des programmes de surveillance. (iii) Manque de counselling 239 Ibid. « H I V Home Test Could Aid Prevention, Awareness», supra, note 230. 2 4 1 «Home HIV Test Is Found to Be Reliable and Effective», AIDS Weekly Plus, 2 octobre 1995, p. 29. 2 4 2 Schopper et Vocauteren, supra, note 182, avec références. 243 Ibid., avec de nombreuses références. 240 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail En tant qu'homme qui vit avec le VIH depuis 14 ans, je ne peux pas imaginer de me tester moi-même. Je ne peux pas. Je veux dire... vous [Dr Frerichs] avez comparé ceci à une femme qui se fait un test des seins, mais cette femme est allée voir son médecin^ elle a appris comment le faire, on lui a parié des conséquences, que ça pourrait être soit bénin, soit malin, elle a reçu du counselling. Dans mon cas, c'est le counselling qui m'a gardé en vie, l'attitude positive, l'aide, le soutien. Mais de le lancer en disant «voilà, testez-vous vous-mêmes», je pense que c'est s'attirer des problèmes.244 De sérieuses inquiétudes se rattachent aux possibles conséquences négatives de: • l'absence de counselling pré-test, dans le cas des deux types de test à domicile; • l'absence de counselling post-test, dans le cas du test d'auto-analyse à domicile; • la prestation téléphonique du counselling post-test, dans le cas du test par autoprélèvement à domicile, que ce soit par boîte vocale (résultat négatif) ou de vive voix (résultat positif). Tel qu'abordé ci-dessus (chapitre E), le test du VIH ne devrait pas être entrepris généralement sans counselling pré- et post-test. Par ailleurs, on a exprimé l'avis que le counselling post-test par téléphone ne peut pas être aussi efficace que le counselling de personne à personne: dans le counselling post-test, on doit porter attention aux réactions émotionnelles du candidat face à son résultat. Ceci est particulièrement important quand le résultat est positif, car il peut causer un grand bouleversement émotif, une panique ou des pensées suicidaires. Sous le coup du choc, le client pourrait simplement raccrocher le téléphone et mettre fin à toute possibilité de l'aider à surmonter ses réactions. En outre, les conseillerstiennentfortement compte d'indices visuels comme le langage corporel, pour orienter leur intervention 2 4 5 Ces nuances ne peuvent pas être perçues dans une conversation téléphonique. Par opposition, les partisans du test du VIH à domicile sont d'avis que: • le counselling préalable au test n'est pas essentiel; et que • le counselling après le test à domicile «pourrait être donné plus efficacement par téléphone, ce qui coûterait moins cher et assurerait l'anonymat. Les personnes dont le résultat est positif seraient orientées vers les services de santé appropriés, ou prendraient elles-mêmes contact avec eux».246 Personne vivant avec le VIH/sida,.propos rapportés dans A. Picard, «Home HIV Test Sparks Hot Debate», The Globa and Mail, 10 juillet 1996, à A5. 2 4 5 Communication avec M. Shore, supra, note 190. 2 4 ® Schopper et Vercauteren, supra, note 182, avec références. 2 4 4 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail En réponse à l'argument selon lequel le counselling de personne à personne est essentiel à cause du risque de suicide que peut provoquer la nouvelle d'un résultat positif, certains disent que les pensées suicidaires sont liées de plus près à la manifestation des symptômes qu'à la nouvelle d'un résultat positif comme tel.247 Enfin, il a été allégué que le counselling par téléphone peut en fait être de qualité supérieure au counselling en personne que reçoivent bien des gens. Selon un commentateur Les commerçants de produits de test à domicile peuvent former des conseillers spécifiquement pour faire du counselling sur le VIH à temps plein. La supériorité potentielle des conseillers téléphoniques découlerait de leur formation spécifique sur le VIH et de l'expérience qu'ils acquerraient à accomplir cette fonction à temps plein. Grâce à leur formation et à leur expérience, ces professionnels pourraient atteindre un degré d'expertise difficile à égaler par des médecins dont les activités sont plus diversifiées.248 Les partisans du test à domicile insistent pour que le counselling téléphonique soit évalué par rapport à la pratique réelle plutôt que par rapport à des normes idéalisées.249 Tout en admettant que le counselling face à face offert dans les cliniques de test spécialisées puisse être de fait plus efficace que le counselling téléphonique, ils rappellent que la plupart des Canadiens passent le test chez leur médecin, dont plusieurs n'ont pas beaucoup d'expérience de counselling et souvent peu de temps à y consacrer: le counselling téléphonique peut constituer une amélioration par rapport au soutien que reçoivent bien des gens dans la réalité. Certains évoquent le succès des services téléphoniques d'urgence suicide pour démontrer que le counselling téléphonique peut être efficace en situation de crise.250 Cependant, Schopper et Vercauteren mettent en garde contre ce type d'arguments, en indiquant qu'un certain contrôle de la qualité du processus de counselling téléphonique est nécessaire, et que on ne sait pas clairement qui offrirait ce service et qui en paierait les coûts. Si c'est la responsabilité du fabricant du test, comme cela a été suggéré, les incitations à la formation, à la supervision et au maintien de conseillers qualifiés seraient limitées, à moins qu'un système de certification périodique soit mis en place.251 2 4 7 B.M. Branson, H.D. Gayle, «Home Testing for HIV - It's Coming. Are You Ready?», International Society Newsletter, mars 1996, 4. 2 4 8 S. Salbu, supra, note 232, à la p. 424. 2 4 9 Voir Bayer et coll., supra, note 213. 2 ™Ibid. 2 5 1 Schopper et Vercauteren, supra, note 182. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail AIDS Civ) Risques d'abus L'une des principales inquiétudes soulevées par les opposants du test à domicile est la possibilité que des abus soient commis par des institutions — employeurs, sociétés d'assurance, police, douanes — et par les partenaires sexuels, en particulier par des hommes contre des femmes.252 Les partisans du test à domicile prétendent que les possibilités d'abus ne seraient pas très différentes de celles qui existent déjà, et qu'une technologie potentiellement bénéfique ne devrait pas être écartée en raison du fait qu'elle pourrait être utilisée de manière abusive.253 Il serait préférable, selon eux, de minimiser les abus potentiels des tests à domicile en adoptant ou en renforçant des lois pour punir les personnes qui feraient subir des tests à d'autres contre leur gré ou à leur insu. Cependant, certaines inquiétudes subsistent: la facilité avec laquelle un test à domicile peut être imposé à une personne et l'accès rapide et facile au résultat, que ce soit à la maison ou par téléphone, rendent l'option séduisante et pratique pour ceux qui voudraient faire subir un test à d'autres sans leur consentement. Selon Schopper et Vercauteren, il y a au moins deux raisons pour lesquelles le test à domicile serait plus propice aux abus que le test effectué en établissement: * le test est plus facile à administrer sous la menace; et • il y a moins d'assurance de confidentialité, parce que le résultat est directement disponible à la maison ou par un appel téléphonique. De plus, les tests d'auto-analyse, qui permettent d'obtenir un résultat immédiat, pourraient être utilisés directement aux frontières, où par de futurs employeurs ou des partenaires sexuels, avec peu ou pas de consentement par la personne testée. Compte tenu du degré de persistance de la discrimination et de la stigmatisation dans plusieurs pays, ces risques d'abus sont inquiétants.254 (v) Impact sur les mécanismes actuels de test Une autre inquiétude réside dans les effets possibles de la disponibilité des tests à domicile sur les options existantes. Il a été affirmé qu'en augmentant la fiabilité du test à domicile on allégerait le fardeau imposé aux laboratoires actuels, et qu'on pourrait consacrer des ressources à d'autres secteurs, tels les campagnes de prévention et la recherche. Cependant, les autorités pourraient être tentées de couper simplement les fonds publics affectés au test, pour faire des économies. Par ailleurs, une étude 252 2 5 3 2 5 4 VIII Ibid. Salbu, supra, note 232, à la p. 427. Schopper et Vercauteren, supra, note 182. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail australienne sur le test du VIH a démontré que, dans un État australien où l'on a commencé à imposer des frais pour le test du VIH; le nombre de candidats a diminué même s'il est encore offert sans frais dans certaines cliniques.255 (3) Leçons à tirer des tests de grossesse à domicile Comme l'indiquent Schopper et Vercauteren, le seul autre test à domicile permettant la détection initiale d'une condition physique — par opposition aux procédés de surveillance de l'évolution d'une maladie déjà diagnostiquée, comme l'hypertension ou le diabète •— qui est utilisé de façon très répandue est le test de grossesse à domicile. Évidemment, les conséquences d'un sérodiagnostic positif au VIH sont fort différentes de celles d'un test de grossesse positif: Apprendre qu'est enceinte peut être vu de plusieurs manières. Une telle nouvelle peut être considérée comme positive ou négative selon plusieurs facteurs, tel le statut économique, le statut social, le logement, l'emploi, l'état de santé, etc. De plus, quand une femme considère qu'être enceinte est une mauvaise nouvelle, elle peut prendre plusieurs mesures pour modifier cette réalité, comme envisager l'adoption, se faire avorter ou tenter de changer sa situation par d'autres moyens.256 Néanmoins, certaines leçons des tests de grossesse pourraient être utiles en ce qui a trait aux tests du VIH à domicile. En particulier, des études ont démontré que: • le résultat d'un test est en moyenne moins précis quand le test est effectué par un profane; • l'utilisateur doit être suffisamment éduqué pour comprendre les procédures de fonctionnement et il doit comprendrre l'existence de la période fenêtre; et • l'utilisateur doit avoir accès sans délai à des services de santé pour obtenir confirmation du résultat du test ou recevoir les soins nécessaires 2 5 7 (4) Réactions possibles au test à domicile J'imagine que nous serions tous d'accord sur le fait que les gens devraient avoir accès à un renseignement qui leur permet d'acquérir davantage de contrôle sur leur vie. Mais en même temps, nous devons reconnaître que des circonstances extérieures peuvent rendre une même technologie attrayante ou dangereuse. Si nous voulons respecter le principe d'Hippocrate, avant tout de ne pas faire de tort, il nous faut s'assurer que les avantages d'une nouvelle technologie surpassent ses conséquences négatives:258 ^ 5 E.M. Stevenson, S.C. THompson, N. Crofts, «HIV Testing and Policy Change, an Analysis Based on Statewide HIV Testing Data», abrégé Mo.C.212, XI Conférence internationale sur le sida, 7-12 juillet 1996. 2 5 6 Graydon, supra, note 237. 2 * 7 Schopper et Vercauteren, supra, note 182. 258 Ibid. 2 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (i) La réglementation et ses limites Ceux qui considèrent que les préjudices potentiels dè la disponibilité des tests par autoprélèvement ou auto-analyse surpassent considérablement ses avantages possibles peuvent soutenir que leur introduction sur le marché canadien devrait être bloquée. Toutefois, bien que la loi soit rédigée en termes suffisamment larges pour empêcher là plupart des tentatives visant la promotion de ces produits auprès des Canadiens, il serait difficile d'empêcher les gens de les acheter à l'extérieur du Canada et de les rapporter pour usage personnel: Il semble que les États-Unis adopteront bientôt une politique en faveur du test duVIH à domicile. Pour le Canada, la question peut donc devenir désuète, parce qu'il sera presque impossible d'y empêcher complètement l'utilisation de ce type de test. La publicité et la vente du test au Canada auraient beau, être interdites, les Canadiens pourront probablement avoir facilement accès au test soit aux États-Unis, soit par la poste en provenance des États-Unis.259 (ii) Etablir des conditions préalables à l'approbation: Bayer et coll. Une autre solution possible consisterait à adopter une politique permettant la vente de trousses de test à domicile qui rencontreraient un certain nombre de critères établis pour minimiser les préjudices potentiels. Les fabricants devraient démontrer que leurs trousses offrent une exactitude et des normes de counselling comparables à celles que l'on attend des tests traditionnels. Si les trousses de test à domicile étaient d'abord offertes à titre d'essai limité, nous serions peut-être mieux en mesure d'évaluer lesrisqueset les avantages qu'elles comportent. Bayer suggère, comme condition à l'approbation gouvernementale, que, des études ultérieures à la mise en marché soient entreprises, incluant: • une comparaison du test à domicile par rapport aux pratiques actuelles, et non par rapport à des normes idéalisées; • une étude démographique des utilisateurs du test, des renseignements sur la qualité du counselling téléphonique, et des données sur le degré de satisfaction des consommateurs; 4 une comparaison avec le counselling en personne; et • les effets sur le système public de test et de counselling en place.260 (iii) L'approche de Schopper et Vercauteren Selon Schopper et Vercauteren, on devrait aborder avec beaucoup de prudence l'évaluation des trousses de test du VIH à domicile. Tout en reconnaissant que les nouvelles 2 5 9 260 Flanagan, supra, note 180. Supru, note 213. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail technologies peuvent avoir des mérites considérables et modifier de plusieurs façons notre approche de l'épidémie du VIH, ils ajoutent que: nous devons reconnaître que plusieurs questions techniques, psychologiques et sociales demeurent sans réponse. Étant donné la nature de l'infection — à vie, incurable et mortelle — et la stigmatisation qui s'y rattache, il semblerait irresponsable de mettre ces nouveaux tests entre les mains de profanes avant d'avoir répondu au moins à quelques-unes des questions les plus essentielles.261 Ces questions concernent les deux formes de test à domicile, mais doivent dans certains cas les aborder distinctement: • Quelle est l'exactitude intrinsèque des tests par autoprélèvement à domicile et des tests par auto-analyse à domicile qui existent actuellement? • Quelle est leurfiabilitédans le contexte d'une utilisation par des profanes, compte tenu de la périodè fenêtre suivant un comportement à risque? • Quelle est la probabilité que les personnes qui obtiennent un résultat positif au moyen d'un test à domicile négligent de subir un test de confirmation et quelles pourraient être les conséquences d'un tel comportement? • Quel est le rapport coût/efficacité des tests par autoprélèvement ou des tests d'autoanalyse à domicile, par comparaison au test effectué en clinique? • Quelle est la demande à l'endroit de ces tests et comment sont-ils acceptés dans divers environnements socio-économiques? • Quels besoins et quelles craintes les utilisateurs potentiels expriment-ils? • Quelle est l'importance du counselling avant et après le test? Cette importance est-elle liée au fait que le résultat soit négatif ou positif? • Comment le counselling post-test peut-il être assuré dans des milieux défavorisés ? • Que feront les individus après avoir reçu un résultat de test à la maison? • Quels sont les risques d'abus dans diverses circonstances et comment ces abus peuvent-ils être prévenus? Schopper et Vercauteren sont d'avis que des recherches qualitatives et quantitatives relativement limitées pourraient nous permettre de trouver certaines réponses, et que l'expérience américaine des tests par autoprélèvement approuvés devrait être étudiée de 261 Schopper et Vercauteren, supra y note 182. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail près. Us ajoutent que certaines exigences minimales communes à tous les tests devraient être définies, notamment: • tout test vendu comme test d'auto-analyse devrait comporter un mécanisme de contrôle interne qui valide le résultat du test; • aucun test ne devrait être vendu dans un autre pays avant d'avoir été approuvé par l'organisme de réglementation du pays de fabrication, car il y a un danger que des tests de qualité inférieure soient mis en marché dans des pays en voie de développement où il n'y a pas d'organisme de réglementation, ou dont une telle instance manque de pouvoir; et • le test doit donner des directives claires sur la façon de confirmer un résultat positif Finalement, Schopper et Vercauteren suggèrent que les nouvelles technologies de test pourraient être utilisées dans des centres existants de test volontaire et de counselling, pour permettre aux clients d'obtenir immédiatement une indication du résultat d'un test: En cas de résultat positif initial, un spécimen de sang peut immédiatement être prélevé pour qu'un test de confirmation soit réalisé, ce qui rend tout le système plus humain pour le client et probablement moins coûteux. En outre, cette approche pourrait réduire le taux élevé d'abandon, qu'observent actuellement certains établissements après le counselling initial et le prélèvement de sang. 6. Conclusions Considérant la gravité du test et pour maximiser les aspects de prévention et de soins, la réglementation de santé publique devrait assurer, lorsque possible, que du counselling pré- et post-test soit prodigué dans tous les cas de tests du VIH. Avec l'arrivée des tests à domicile, les gouvernements devraient assurer un contrôle de qualité, maximiser les aspects du counselling et des services de référence pour les utilisateurs de ces trousses, et mettre sur pied des services juridiques et de soutien pour les personnes qui seront victimes d'utilisation abusive de tels tests par autrui.262 Nos décisions en matière de politiques doivent se fonder non pas sur l'existence de la technologie, mais sur des données scientifiquesfiableset sur la consultation avec les consommateurs, y compris les personnes vivant avec le VIH et le sida. Par-dessus tout, c'est la science, et non la technologie, qui devrait nous guider 263 ONUSIDA, supra, note 92, à la p. 20. Commentaire du Dr M Merson lors du débat sur le test de VIH à domicile, à la Xle Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 8 juillet 1996. 262 263 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail La disponibilité de trousses de test du. VIH à domicile peut comporter de grands avantages potentiels — notamment parce qu'elle offre un nouveau moyen confidentiel, accessible, qui encourage les personnes vulnérables à passer le test et, si nécessaire, à recevoir des traitements —, mais elle comporte également desrisquesimportants. Contrairement à ce qu'a déclaré l'ancien ministre de la Santé américain, C. Everett Koop,264 les trousses de test à domicile ne sont certainement pas «l'arme la plus importante que nous puissions employer dans la lutte contre le sida». En fait, cette déclaration reflète l'échec de la politique de lutte contre le sida aux États-Unis — pays où les programmes d'échange de seringues ne sont pas encore autorisés, bien qu'on ait démontré qu'ils réduisent considérablement le taux de transmission parmi les UDI — davantage que l'efficacité des tests à domicile. Elle reflète également la croyance répandue, mais non démontrée, que le test équivaut à la prévention, approche d'autant plus dangereuse qu'elle peut conduire à la réduction du financement des efforts de prévention qui ont connu du succès, comme le counselling, l'éducation, l'accès généralisé à des moyens de prévention comme des condoms et des seringues stériles et, de façon plus générale, les efforts communautaires pour prévenir la propagation du VIH. Actuellement, nous n'avons pas assez de données sur les tests par autoprélèvement à domicile, ni, en particulier, sur les tests d'auto-analyse. En même temps, les gens peuvent déjà importer ces trousses de dépistage au Canada, pour usage personnel. Comment le Canada devrait-il aborder les nombreuses questions soulevées? Les principaux sujets de préoccupation seront: • l'absence de counselling face à face, • lesrisquesd'abus, • l'impact sur les services de test existants, • l'exactitude et la fiabilité des trousses. La préoccupation quant à l'exactitude et à la fiabilité des trousses est facilement résolue: en vertu du Règlement sur les instruments médicaux, les compagnies demandant l'autorisation de vendre leurs trousses de test à domicile au Canada doivent prouver qu'elles satisfont à la norme technique établie par les tests approuvés à l'heure actuelle. De fait, on peut facilement présumer qu'au moins certains tests — en particulier par autoprélèvement — satisferont à la norme et qu'on ne pourra pas s'y opposer pour des motifs d'inexactitude ou de manque de fiabilité. D'autres trousses échoueront à satisfaire à la norme et ne recevront pas l'avis de conformité requis pour leur commercialisation au Canada. Les autres inquiétudes, parce que moins techniques, sont plus difficiles à résoudre. En bout de compte, la vente de trousses de test à domicile qui sont précises et fiables devrait 264 Cité dans Bayer et coll., supra, note 213. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail être autorisée au Canada si leurs avantages potentiels surpassent leurs préjudices potentiels. Les personnes qui prodiguent du counselling, les personnes séropositives et celles qui les soignent et travaillent avec elles devront être consultées, pour qu'il soit possible de mieux évaluer l'impact potentiel de leur disponibilité au Canada. Ces personnes seront mieux en mesure de répondre à certaines questions soulevées par Schopper et Vercauteren et elles pourront contribuer à la conception et à la réalisation d'études qui permettront d'obtenir des réponses à ces questions. Il est particulièrement important d'étudier l'effet potentiel de l'approbation d'un test comportant uniquement un counselling téléphonique (autoprélèvement à domicile) ou aucun counselling (auto-analyse à domicile). Ces personnes pourront aussi aider à trouver des moyens pour réduire les préjudices potentiels rattachés à la disponibilité des tests à domicile, par exemple: • l'exigence que toutes les trousses vendues au Canada s'accompagnent d'un dépliant informatif élaboré au Canada, qui traitera des sujets habituellement abordés lors du counselling pré- et post-test; • la surveillance du counselling téléphonique, pour s'assurer qu'il satisfait à la norme de qualité appropriée; • des initiatives contre les possibilités d'utilisation abusive, en réitérant la nécessité du consentement éclairé et spécifique au test du VIH, en offrant du soutien aux victimes d'abus et en prévoyant des peines sévères et des mécanismes accélérés de plainte dans ces cas; • le renouvellement de l'engagement à offrir le test et le counselling sans frais dans divers centres de test subventionnés par l'État, la publicité de ces services et, autant que possible, la réduction des délais dans ces cliniques;265 et • le renouvellement de l'engagement aux efforts de prévention qui fonctionnent, comme le counselling, l'éducation, l'accès généralisé à des moyens préventifs comme les condoms et les seringues stériles et, de manière générale, les efforts communautaires de lutte contre la propagation ultérieure du VIH. 4.1 Les trousses de test à domicile sont des instruments comportant des avantages potentiels pour les individus, des bénéfices non démontrés pour la société et des intérêts commerciaux énormes. Leur introduction implique un certain nombre de risques qui doivent être mieux évalués avant qu 'elles ne soient répandues au Canada. Les décisions relatives à leur commercialisation ne devraient pas reposer sur l'existence de la technologie, mais plutôt sur des données scientifiques fiables et sur la consultation des consommateurs, y compris des personnes vivant avec le VIH/sida. 2 6 5 Une façon d'y arriver consisterait à autoriser l'utilisation des trousses d'auto-analyse dans les établissements actuels de test et de counselling. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 4.2 La vente au Canada ne devrait être autorisée qu'aux trousses de test à domicile qui satisfont à un ensemble de critères établis pour réduire leurs effets préjudiciables possibles. Notamment, les fabricants devraient être capables de faire la preuve qu 'elles satisfont à la norme technique établie par les tests approuvés jusqu 'ici et que le counselling téléphonique est adéquat De plus, on devrait considérer sérieusement l'adoption de mesures qui réduiraient les risques de préjudices liés à la disponibilité de ces trousses; notamment (1) s'attaquer aux possibilités d'utilisation abusive, en réitérant la nécessité du consentement éclairé et spécifique au test du VIH, en offrant du soutien aux victimes d'abus et en prévoyant des peines sévères et des mécanismes accélérés de plainte dans ces cas; (2) le renouvellement de l'engagement à offrir le test et le counselling sans frais dans divers centres de test subventionnés par l'État, la publicité de ces services et, autant que possible, la réduction des délais dans ces cliniques; et (3) le renouvellement de l'engagement aux efforts de prévention qui fonctionnent, comme le counselling, l'éducation, l'accès généralisé à des moyens préventifs comme des condoms, des seringues stériles et, de manière générale, les efforts communautaires de lutte contre la propagation ultérieure du VIH. 4.3 On devrait considérer sérieusement la possibilité d'offrir les pousses de test à domicile d'abord sur une base limitée d'essai, en exigeant que des études sur cette mise en marché soient l'un des préalables de l'approbation. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail G. TEST REQUIS ET TEST OBLIGATOIRE La valeur du test en tant que stratégie de lutte contre le VIH/sida repose entièrement sur la manière dont on utilisera l'information qu'il procure. Dans la réflexion sur toute politique de test, il est donc essentiel que l'on se demande ce que Ton fera avec les résultats de tests qui seraient générés.266 Qu'est-ce qui rend attrayant le test requis? «Il a l'air d'une solution rapide. Les gens considèrent encore le test du VIH avec une perspective de "nous/eux". Et il fut croire aux contribuables que les législateurs font quelque chose contre l'épidémie.»267 En dépit du consensus sur le fait que le test de sérodiagnostic du VIH ne devrait être pratiqué qu'avec le consentement éclairé et spécifique de la personne qui le subit, on observe des plaidoyers répétés en faveur du test requis268 ou obligatoire269 de toute la population ou de certains groupes. Le présent chapitre examine diverses propositions de test requis ou obligatoire du VIH pour des populations données. La discussion ne répertorie pas tous les groupes possibles que certains voudraient tester, ni même tous les groupes auxquels on a déjà songé à imposer le test: il se penche plutôt sur les propositions de test requis ou obligatoire qui ont été formulées le plus fréquemment au Canada et qui surviennent encore de nos jours. Ainsi, il analyse la question de savoir s'il existe des justifications pour demander le test requis ou obligatoire des • femmes enceintes, • nouveau-nés, • détenus, • personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle, • travailleurs du sexe, • travailleurs de la santé et patients, et/ou • immigrants. Field, supra, note 4, à la p. 37. Field, cité dans S. Abrams, «Mandatory HIV Testing: The Search for a Quick Fix», Harvard AIDS Letter, maijuin 1995. 268 Voir définition de test requis, au glossaire. 2 6 6 2 6 7 2 6 9 VIII Voir définition de test obligatoire, au glossaire. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Le chapitre présente d'abord un bref survol du raisonnement qui sous-tend les propositions de test requis ou obligatoire du VlH (Survol global), puis résume l'approche canadienne en matière de test requis ou obligatoire du VIH, en particulier les recommandations contenues dans divers rapports et énoncés de politiques publiés par des oiganisations canadiennes entre 1986 et 1996 (Historique — Canada). Pour chacun des groupes concernés, le chapitre présente une section analysant la question du bien-fondé des propositions de test requis ou obligatoire; chaque section examine d'abord les recommandations d'organisations canadiennes, puis décrit la situation actuelle en soulignant que les responsables des politiques canadiennes ont résisté jusqu'à présent à l'adoption de politiques qui rendraient le test de sérodiagnostic du VIH requis ou obligatoire pour les personnes qui font partie de quelque groupe que ce soit. On se demande ensuite de manière critique si, en raison des nouveaux développements, le test requis ou obligatoire de certains ou de tous les individus appartenant à ces groupes serait justifié. Ces sections arrivent à la conclusion que, malgré les nouveaux développements, les arguments pour le test requis ou obligatoire demeurent faibles. Dans certains cas, le fait d'imposer le test ne servirait pas à un but précis ni valide: Dans d'autres cas, le but peut être atteint par d'autres moyens moins envahissants. 1. Survol global À travers le monde, les opinions sur le test de sérodiagnostic du VIH sont très diversifiées: Il y a ceux qui recommandent le dépistage de tout le monde: leurs arguments sont irrationnels et ne sont pas basés sur des faits scientifiques. D'autres s'intéressent au dépistage de groupes ciblés: le problème réside ici dans le choix de ces groupes et dans les motifs de ce choix, qui sont tout autant subjectifs qu'objectifs. Enfin, il y a ceux qui recommandent le test volontaire:* ils se portent à la défense des droits de la personne et insistent sur l'investigation scientifique.270 (1 ) Propositions de test forcé Tel que l'indique Field, [d]ans le domaine du sida, les élaborateurs de politiques se trouvent en face d'une crise de la santé publique aux proportions catastrophiques: la maladie est mortelle. Il n'existe aucune cure, aucun vaccin. Le nombre de personnes séropositives augmente à un rythme géométrique. Ces faits effrayants et la réaction du public à leur égard donnent envie aux législateurs de faire quelque chose, n'importe quoi, qui pourrait changer quoi que ce soit.271 P. Enel et coll., «Ethical Confusion: Detection of HIV Seropositives», AIDS & Public Policy 1992, 7(1): 42-49. 271 Supra, note 4, à la p. 34. 2 7 0 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Journal, Au début de l'épidémie de VIH/sida, on pouvait facilement comprendre que des propositions favorables au test requis ou obligatoire soient lancées. Il est naturel que les gens cherchent des solutions; le concept de test requis — de pair, peut-être, avec la ségrégation forcée des personnes vivant avec le VIH ou le sida — était de toute évidence attrayant, en apparence.272 Les plaidoyers en faveur du test requis ou obligatoire sont devenus une réaction politique fréquente au VIH/sida, en partie parce qu'ils créent l'illusion d'adopter une position ferme contre la menace de l'épidémie. Par ailleurs, ils semaient le doute sur la crédibilité des opposants au test forcé. Par exemple, comment pourrait-il être mieux de ne pas savoir qui porte le virus? Les gens qui rejettent l'imposition du test tenteraient-ils de protéger les droits individuels des personnes vivant avec le sida aux dépens de la santé publique?273 ' Les années ont passé et les appels au test requis ont continué. Poussés par un mélange d'émotion et d'idéologie, ils sont «revenus en écho ..., en soulignant les résultats de nouvelles études et en ciblant d'autres populations».274 (2) Test de la population entière Au début de l'épidémie, d'aucuns ont même recommandé que la population entière soit soumise à un test requis des anticorps anti-VIH. Une idée fausse laissait croire que le test du VIH à grande échelle, voire universellement, pourrait identifier «tous ceux qui portent le virus, afin qu'on puisse les isoler et que la majorité non infectée puisse être à l'abri de tout risque de transmission» 2 7 5 Cependant, un consensus plus répandu s'est créé sur le fait que la promulgation de lois obligeant la population entière à passer le test serait en fait une erreur: «La préoccupation de protéger la santé publique mène à la même conclusion que celle de protéger les libertés individuelles: chacun de ces objectifs milite indépendamment contre le test requis». 276 On a souligné, en particulier, que: • 272 273 274 275 276 même si le test universel pouvait être réalisé, il ne parviendrait pas à endiguer le VIH, d'une part à cause de résultats faussement négatifs et d'autre part parce que l'infection ne serait pas détectée chez des personnes où l'infection serait dans la période fenêtre au moment du prélèvement; des tests périodiques seraient nécessaires pour remédier à ces erreurs et, entre-temps, les personnes dont l'infection n'a pas été détectée pourraient continuer à propager le VIH; Ibid., à la p. 35. Ibid. Abrams, supra, note 4, à la p. 54. Field, supra, note 4, à la p. 54. Ibid:, pour détails supplémentaires, voir les p. 54-61. Voir aussi CRDO, supra, note 14, aux p. 29-32. VIII VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • il existerait un danger que la population «non infectée» en retire un sentiment de sécurité et n'applique pas les précautions contre l'infection, bien que cette population ne pourrait pas être entièrement «à l'abri» des personnes séropositives; • un programme de test à grande échelle ou universel ne constitue pas une approche applicable, à cause des coûts qu'il engendrerait; et, d'importance primordiale, • dans la communauté, le fait de se trouver dans l'entourage de personnes séropositives ne comporte pas de risque pour les personnes séronégatives; elles peuvent se protéger contre la transmission du VIH en prenant elles-mêmes des précautions. (3) Test de «groupes à risque élevé» En reconnaissant les problèmes liés au test universel de la population entière, certains ont recommandé que le test requis ou obligatoire soit limité aux membres des soi-disant «groupes à risque élevé», en particulier les hommes gais, les UDI et les hémophiles. De telles propositions ont toutefois été rejetées pour les raisons suivantes: • le VIH est un virus non discriminant, il n'infecte pas les gens en fonction de critères fondés sur l'appartenance à des groupes: la transmission du VIH est causée par des activités, et non par l'appartenance à un groupe au sein duquel la séroprévalence est élevée; et • un programme de test requis qui viserait des «groupes à risque élevé» rencontrerait des problèmes évidents à identifier les membres de ces groupes: le test serait associé à la stigmatisation et les membres des groupes en question seraient poussés à rester à l'écart. , (4) Test de populations données De plus en plus de gens prennent conscience que les plaidoyers pour le test requis sont habituellement de nature politique plutôt que des propositions de politiques de la santé; ils sont souvent motivés par un esprit homophobe ou anti-UDI, rarement par des objectifs légitimes de santé publique. À mesure que les gens comprennent ceci et deviennent aussi plus enclins, à prendre le sida au / sérieux, la plupart des propositions en faveur du test de groupes devraient perdre l'appui des partisans qu'ils comptent encore.277 Vu l'existence de problèmes relatifs au test forcé de la population entière et de «groupes à risque élevé», certains ont demandé que l'on établisse des programmes de test requis plus ciblés. Comme le montre Field, un ou plusieurs des facteurs suivants semblent soustendre les propositions de test pour certains groupes: • 277 la perception d'un risque élevé d'être séropositif; Field, supra, note 4, à la p. 105. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • la perception d'un risque élevé de propager le VIH; • la culpabilité d'avoir participé à une activité criminelle, de sorte que l'obligation de subir le test puisse être considérée comme une partie juste de la punition; et • l'utilisation possible des résultats des tests. 278 Par exemple, Werdel a soutenu que le test devrait être requis pour les détenus, les prostitués et les usagers de drogue qui sont arrêtés et les personnes qui fréquentent les cliniques de MTS et de services en toxicomanie. Selon lui, «ces groupes sont non seulement à risque élevé, mais ils représentent aussi un risque sérieux pour la santé de la communauté» et «il se peut qu'ils transmettent la maladie dans la société à des membres innocents et sains». 279 Puisque chaque type de proposition de test soulève un ensemble particulier de questions de politiques, il faut analyser chacune séparément. Par exemple, les propositions de test pour toutes les femmes enceintes soulèvent des préoccupations et ont des implications différentes de celles qui concernent le test des détenus. (5) Opinions La plupart des plaidoyers en faveur du test requis ne pourraient fonctionner qu'en exploitant l'ignorance du public au sujet de la maladie.280 Le test requis ou obligatoire, qu'il vise la population entière ou des groupes spécifiques, rencontre habituellement de la résistance «parce qu'il est peu probable qu'il engendre les modifications de comportement qui sont nécessaires pour endiguer la propagation du VIH, et à cause de son potentiel d'intrusion dans la vie privée et de discrimination».281 Selon Persky, le test forcé pourrait servir à localiser une minuscule proportion de la «population vulnérable» mais ceci serait probablement contrebalancé par une proportion plus importante qui serait repoussée par la peur des perspectives et des conséquences rattachées à des mesures obligatoires.282 Selon l'Amèrican Civil Liberties Association, «indépendamment des violations des libertés civiques, le test requis semble voué à être contreproductif, à gaspiller les fonds publics de manière irrationnelle, ou aux deux à la fois». Ibid., à la p. 62. A-A. Werdel, «Mandatory AIDS Testing: The Legal, Ethical and Practical Issues», Notre-Dame Journal of Law, Ethics & Public Policy, 1990, 5: 155-255. 280 field, supra, note 4, à la p. 35. 278 279 L. Gostin, W.J. Cunan, «AIDS Screening, Confidentiality, and the Duty to Warn», American Journal of Public Health, 1987, 77(3), (reproduit dans AIDS Reference Guide, juillet 1988, no 512). 2 8 2 S. Perky, «The Practical Case Against Mandatory Testing)), dans J. Russell (éd.), Liberties, Vancouver, New Star Books, 1989, aux p. 176-185. 281 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail vs- is Ceci concorde avec la Déclaration de la consultation [de l'OMS, 1992] sur le dépistage de l'infection à VIHet le conseil, qui souligne que «[l]e test obligatoire et autres types de test sans consentement éclairé n'ont pas leur place dans un programme de lutte contre le sida». 283 La Déclaration poursuit en précisant: Il n'y a, pour l'individu ou la santé publique, aucun avantage à retirer du test pratiqué sans consentement éclairé, qui ne pourrait être obtenu par des moyens moins importuns, tels que le test volontaire assorti du conseil. L'expérience acquise en santé publique montre que les programmes ne respectant ni les droits ni la dignité des individus ne sont pas efficaces. Il est donc essentiel de privilégier la coopération volontaire des individus plutôt que de leur imposer des mesures coercitives. Par ailleurs, les programmes de test qui ne requièrent pas et ne consignent pas le consentement éclairé d'une personne testée peuvent nuire aux efforts de prévention de la transmission du VIH — et sont par conséquent contraires à l'intérêt de la santé publique — pour les raisons suivantes: • vu la stigmatisation des personnes séropositives et la discrimination à leur endroit, les gens qui croient qu'ils pourraient être séropositifs ont tendance à rester à l'écart pour éviter le test requis. Par conséquent, les personnes qui sont les plus vulnérables à l'infection à VIH pourraient ne pas recevoir les messages d'éducation sur le sida ou ne pas en tenir compte; • le test sans consentement éclairé entache la crédibilité des services de santé et pourrait décourager les gens qui ont besoin d'y avoir recours; • dans tout programme de test, onrencontrerades gens qui sont faussement diagnostiqués séronégatifs — par exemple, à cause d'une erreur de laboratoire ou parce que leur corps n'a pas encore développé d'anticorps anti-VIH détectables. Ainsi, le test requis ne parviendrait jamais à identifier toutes les personnes vivant avec le VIH; • le test requis peut procurer une fausse impression de sécurité, en particulier parmi les gens qu'il ne vise pas et qui l'exploitent comme une excuse pour ne pas adopter des mesures de protection plus efficaces pour eux-mêmes et pour autrui — exemples: professionnels de la santé qui n'appliquent pas les précautions universelles lorsque tous les patients de l'établissement subissent un test; clients de travailleurs du sexe qui n'utilisent pas de condom lorsqu'ils croient que tous les prostitués sont soumis au test; • les programmes de testrequissont onéreux et accaparent desressourcesqui pourraient être affectées à des mesures de prévention efficaces.284 Supra, note 2, à la p. 3, avec référence à la 45ème Assemblée mondiale de la Santé, qui a reconnu que «aucune considération de santé publique ne peut légitimer des mesures de lutte contre le sida attentatoires aux droits des individus, et notamment des mesures tendant à l'instauration d'un dépistage obligatoire» (résolution WHA45.35, 14 mai 1992). 2 8 4 OMS, 1992, supra, note 2, aux p. 2-3. 283 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (6) Principes généraux Peu importe le modèle du test, il est important d'identifier l'objectif qu'il poursuit — ce pour quoi sera utilisé son résultat.285 La détection des anticorps anti-VIH doit se faire de manière à respecter et à protéger, dans toute la mesure du possible, l'individu testé et la communauté. La détection forcée constitue un empiétement sur les droits d'une personne, notamment une atteinte à son autonomie et à sa vie privée. Attendu que nous vivons dans une société libre, le décret de tests obligatoires doit être moralement justifié, ce qui demeure une question en suspens pertinente, même lorsque ce genre de test est autorisé ou prescrit par la loi. Le recours à des mesures coercitives pour obtenir des renseignements provenant du test de détection des anticorps anti-VIH [,] ou pour opérer un changement de comportement par l'intermédiaire de ce test, est inacceptable à moins qu'il ne soit clairement justifié. Pour justifier la détection obligatoire des anticorps anti-VIH, il faut faire droit à la condition nécessaire, mais pas forcément suffisante, que les effets bénéfiques l'emportent sur les effets préjudiciables et que [les premiers] sont suffisamment importants pour justifier [1*] infliction [des seconds].286 Plusieurs principes devraient guider la considération de toute proposition de test: 287 • En premier lieu, l'objectif du test doit être acceptable du point de vue de l'éthique 2 8 8 La protection de la santé publique et la prévention de la transmission du VIH sont des objectifs acceptables, mais pas le refus de services nécessaires et l'expression de désapprobation à l'endroit de groupes. • Deuxièmement, l'utilisation proposée des résultats du test doit contribuer à l'atteinte de l'objectif du programme. • Troisièmement, le programme de test doit être le moyen le moins contraignant et le moins importun possible d'atteindre l'objectif du programme. • Quatrièmement, les bénéfices pour la santé publique doivent justifier le degré d'intrusion dans les libertés individuelles. Ce principe ne suggère pas de sacrifier la santé publique pour protéger les libertés civiques, mais simplement le fait qu'on ne devrait pas invoquer des avantages de santé publique qui sont incertains, ou minces, pour justifier une grossière invasion dans les droits personnels: «Cette épidémie Field, supra, note 4, à la p. 54. Somerville et Gilmore, supra,vote 6, à la p. xii 2 8 7 Field, supra, note 4, à la p. 64. 288 Ibid., avec référence À R. Bayer, Levine et Wolf, «HIV Antibody Screening: An Ethical Framework for Evaluating Proposed Programs», New England Journal of Public Policy, 1988,4: 173, à la p. 177. 285 286 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail comporte la question centrale suivante: serons-nous capables de préserver nos valeurs et principes habituels tout en réagissant à une menace à notre existence même». 289 2. Historique — Canada Les principaux intervenants dans les efforts du domaine des politiques canadiennes sur le sida se sont généralement entendu sur un point: le test relatif au VIH devrait être volontaire. Le testrequisn'a que peu, voire rien, à offrir en termes de réels avantages pour la santé et son coût est exorbitant, à la fois en dollars et en pertes au niveau du bien-être et des droits de la personne. Un engagement à l'égard du test volontaire et une opposition constante au test requis sont parvenus à créer un phénomène rarement observé dans l'arène des politiques sur le sida — un consensus.290 Au Canada, l'approche en matière de test de sérodiagnostic du VIH démontre une grande prudence, en reconnaissant que le test peut comporter de grands avantages mais aussi de graves préjudices pour la personne testée et que, en plus, les avantages pour la communauté étaient jusqu'à maintenant limités et discutables. Les élaborateurs de politiques n'ont pas cédé à la tentation d'adopter des programmes de test forcé pour donner l'impression d'une approche ferme contre les menaces de l'épidémie: ils ont compris qu'une telle approche n'aurait que peu d'effet sur la propagation du VIH au Canada et qu'on devait plutôt créer des programmes efficaces de prévention, y compris des mesures controversées comme l'échange de seringues. Par conséquent, on n'a noté presque aucune demande visant le test de la population entière. De plus, malgré quelques appels au test requis ou obligatoire de certains groupes ou populations — détenus, travailleurs du sexe, femmes enceintes et professionnels de la santé, notamment — et à la déclaration obligatoire de tous les résultats aux autorités de santé publique, tous les rapports importants abordant cette question, en particulier les recommandations du CCNSIDA 2 9 1 et le rapport de la CRDO, 292 ont rejeté cette approche. Ils ont écarté toute pratique de test au sein de populations données sans le consentement spécifique et éclairé des individus, en concluant que les approches de test requis ou obligatoire ne serviraient à aucun objectif de santé publique en particulier. Ils ont fait remarquer que le VIH/sida n'était comparable à aucune autre maladie infectieuse face à laquelle un programme de test et de traitement pourrait permettre de réduire de manière importante la propagation, parce qu'il n'existait aucun traitement efficace pour guérir l'infection à VIH ou réduire de manière importante l'infectivité des personnes séropositives. Les rapports soulignent en outre que les programmes de test requis ou obligatoire auraient pour effet d'éloigner du système de soins de santé les personnes les plus vulnérables à l'infection à VIH et celles qui ont le plus grand besoin d'éducation sur la prévention. 289 Ibid., avec référence à Gray, «The AIDS Epidemic: A Prism Distorting Social and Legal Principles» New England Journal of Public Policy, 1988,4: 227, à la p. 230. ' 2 9 0 Sears, supra, noté 20, à la p. 158. 291 Supra, note 1. 292 Supra, note 14. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Les conclusions de rapports et énoncés de politiques canadiens sélectionnés sont résumées ci-dessous. (1 ) Association du Barreau canadien - Ontario L'ABC-Ontario s'est demandé si le test des personnes ou groupes suivants était nécessaire ou justifié: donneurs de liquides corporels ou de parties du corps, détenus, patients d'hôpitaux, patients d'établissements de soins psychiatriques, membres des forces armées, employés, personnes désirant souscrire à une assurance, enfants à l'école, immigrants, couples avant le mariage et personnes appartenant à des «groupes à risque élevé». Dans la plupart des cas, l'association a déconseillé le test requis, à l'exception des donneurs de liquides corporels ou de parties du corps, des personnes désirant souscrire à une assurance293 et des immigrants (et non les visiteurs) au Canada. (2) Comité consultatif national sur le SIDA Selon le CCN-SIDA, le test obligatoire de sérodiagnostic du VIH n'est justifié que «si ses avantages l'emportent sur ses effets délétères potentiels et réels et qu'il se fait "par les moyens les moins restrictifs, les moins envahissants et les plus efficaces qui soient"». L'analyse des avantages et des préjudices du test obligatoire pour la personne qui le subirait, pour la communauté et pour la société en général a mené le comité à la conclusion que «[à] l'heure actuelle, au Canada, la détection forcée des anticorps anti-VIH est injustifiée». En particulier, le Comité a souligné que, bien que le test obligatoire puisse comporter certains avantages (identifier les personnes séropositives qui continuent d'avoir des comportements risquant de propager le VIH, référer les personnes séropositives à des services de traitement et de soutien, rassurer les personnes séronégatives), les préjudices peuvent être nombreux et comprendre: la discrimination, le préjudice, la stigmatisation ou l'ostracisme de la population, de la communauté, de l'organisation ou de l'institution dont font partie les sujets contaminés [sic] par le virus; les coûts du test de détection et de ses conséquences et le danger que la détection forcée ne favorise des comportements à risque ou le fait pour les sujets qui encourent le risque d'être exposés ou d'être infectés par le virus d'éviter de se soumettre au test. De plus, la détection forcée risque de faire subir un grave préjudice à la société canadienne en enfreignant les nonnes de l'éthique actuellement en vigueur.294 ABC-Ontario, supra, note 8. Relativement aux personnes désirant souscrire à une assurance-vie ou à une assurance-invalidité, l'association a accepté la proposition suivant laquelle la séropositivité au VIH est pertinente a la question de Tassurabilité de l'individu et elle a déclaré qu'il serait irréaliste et irresponsable de laisser entendre que ce ne serait pas un facteur pertinent dans l'obtention d'une assurance. Elle a conclu que «les compagnies d'assurance devraient avoir le droit d'insister sur le test des anticorps an VIH comme ce serait le cas pour tout autre test pertinent à l'obtention d'assurance, afin de mesurer le risque lié à la signature d'un contrat d'assurance avec quelqu'un» (à la p. 34). 2 9 4 Somerville et Gilmore, supra, note 6, à la p. 28. 293 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Le Comité a toutefois reconnu qu'il peut y avoir de rares exceptions au principe général selon lequel le test obligatoire (ou le test requis) est injustifié, en spécifiant que ces exceptions doivent être examinées cas par cas 2 9 5 Enfin, le Comité a formulé des recommandations précises concernant le test de certains groupes de la population (personnes ayant reçu des produits du sang, femmes enceintes, gens sur le point de se marier, résidants de régions où l'infection à VIH est endémique, hétérosexuels, gais, prostitués, UDI, professionnels de la santé, détenus, immigrants, etc.) ou dans certaines situations (demande d'assurance, demande de soins de santé ou d'emploi, évaluation pour l'adoption). Le Comité en est venu à la conclusion que le test requis ou obligatoire est injustifié dans tous les cas — sauf dans les cas des donneurs de sang, d'organes, de tissus, d'ovaires ou de sperme. (3) Société royale du Canada De l'avis de la Société royale, S'il y a proposition de tests obligatoires, un dilemme peut naître entre les droits individuels et le bien de la société. Comme principe général, il est préférable d'adopter des mesures qui respectent les droits de la personne que des mesures restrictives visant la protection de la société. Ce n'est seulement quand la menace pour la société et le risque d'atteinte à l'existence même de la société sont réels et imminents comme, par exemple, en temps de guerre, que les droits des particuliers doivent céder le pas devant les intérêts de la société. Nous croyons que le SIDA ne représente pas aujourd'hui une telle menace.296 La Société a souligné que • à moins que le sida ne crée une urgence nationale telle que le Parlement fédéral canadien doive adopter une loi extraordinaire sur la santé publique, les décisions relatives au test obligatoire doivent être du ressort des provinces; • les lois provinciales actuelles n'autorisent pas le test obligatoire de la population entière; • des tests sanguins obligatoires porteraient atteinte à plusieurs droits et libertés garantis constitutionnellement en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés, tels que le droit à la liberté et à la sécurité de la personnë et le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives; • les tests obligatoires fourniraient une somme énorme de renseignements confidentiels quirisqueraientd'être mal utilisés; 295 296 Ibid.,* lap. xiv. Société royale du Canada, Rapport de synthèse et recommandations, supra, note 11, à la p. 16. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • on peut, pour bon nombre de raisons, être totalement opposé aux tests obligatoires pour certains groupes, tels les patients d'hôpitaux, les étudiants et les professeurs, les candidats à un emploi, les prostitués, les détenus et les immigrants;297 et ° «ce qui est encore plus grave, c'est que le test obligatoire, s'il était institué, serait basé sur de fausses idées de la transmission du VIH et la société ne doit pas laisser de telles idées guider les politiques publiques». (4) Comité parlementaire sur le sida Ce comité n'a pas abordé spécifiquement la question du test requis ou obligatoire de certains groupes de la population, mais il a recommandé que «tous les tests de détection de l'anticorps anti-VIH soient volontaires» et il a mentionné que tous les témoins qu'il a entendus ont recommandé que le test requis soit rejeté dans tous les cas. 298 (5) Commission de réforme du droit de l'Ontario La CRDO a rejeté les propositions de test de la population entière299 ou de «groupes à risque élevé», 3 0 0 pour ensuitè évaluer si le test non volontaire au sein de quelconque population parmi les suivantes, ou dans quelconque situation parmi les suivantes, était ou non justifié: • donneurs de produits sanguins ou de tissus; • milieu scolaire ou préscolaire; • patients; • femmes enceintes; • travailleurs du sexe; • détenus d'établissements provinciaux; • demandeurs d'assurance vie ou d'assurance maladie; et • employés de milieux où la sécurité revêt une importance particulière, ou du milieu hospitalier. En particulier, le test requis pour des groupes donnés serait discriminatoire «parce qu'il imposerait des tests à certains et pas à d'autres, et il pourrait enfreindre le droit des membres de groupes identifiables à la sécurité de la personne, le droit de ne pas faire l'objet de fouilles ou de saisies abusives et celui de ne pas être placé en détention de manière arbitraire» Voir Mackinnon, Cottrelle et Krever, supra, note 80, aux p. 366-367. La Société a abordé et rejeté les propositions de test requis pour les patients d'hôpitaux, immigrants, étudiants, enseignants ou autres personnes à l'emploi d'écoles (Société royale du Canada, Rapport de synthèse et recommandations, 5upnz, note 11, à la p. 16). 297 298 299 300 VIII Supra, note 13, aux p. 46-47. Supra, note 13, aux p. 41-42. Ibid.t aux p. 33-34. . Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail LaCRDO a conclu que le test obligatoire ou requis est injustifié dans tous les cas, sauf lorsque le test est pratiqué dans le contexte de l'utilisation de sang, organes, tissus ou partie du corps dans la recherche médicale, le traitement ou la transplantation. Par ailleurs, elle était d'accord pour accorder aux compagnies d'assurance le droit de pratiquer un test requis aux personnes souhaitant souscrire à une assurance.301 (6) Comité sida d'Ottawa Selon le CSO, toute dérogation au principe du consentement au test de VIH «est complètement inacceptable». Le CSO «s'oppose totalement à toute tentative de forcer des individus ou des groupes ciblés à se soumettre au test pour quelque raison que ce soit», en déclarant que de telles tentatives sont «répréhensibles du point de vue moral» et «illégales»: «Tout programme de test requis contreviendrait clairement à l'article 8 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantit la protection contre la fouille et la saisie abusive, et contreviendrait probablement aussi à l'article 7, droit à la sécurité de la personne».302 (7) Association canadienne de santé publique Le rapport de l'ACSP a conclu que «[l]e dépistage obligatoire des employés, des travailleurs de la santé et d'autres segments de la population du Canada n'est pas justifié» et il insiste sur' le fait que lorsqu'un test est administré à une personne à des fins d'assurance, «[l]es compagnies d'assurance doivent respecter les mêmes principes de dépistage que ceux adoptés par la santé publique, les hôpitaux et les médecins de pratique privée». Le rapport recommande que toutes les parties intéressées (p. ex. médecins, groupes communautaires de lutte anti-sida, professionnels de santé publique, représentants du gouvernement, conseillers juridiques) soient réunis pour discuter et pour clarifier toute exception au test volontaire, de même que pour régler d'autres problèmes de politiques relatives à des cas exceptionnels.303 301 Ibid., aux p. 57-62. La Commission a soutenu qu'une évaluation précise du risque est nécessaire, compte tenu des principes entourant l'obtention d'une police d'assurance. De plus, eUe a souligné l'échec des lois visant à protéger les applicants contre de tels tests dans certains États américains. Elle a recommandé qu'on prenne des mesures pour que les applicants soient informés qu'un test relatif au VIH sera pratiqué et que du counselling approprié soit offert Elle a aussi incité à l'adoption de garanties procédurales strictes sur la confidentialité. Néanmoins, cette section du rapport de la ÇRDO a été critiqué par Sears, supra, note 20, aux p. 159-160, qui souligne.ses nombreux emprunts à des documents publiés par l'industrie dè l'assurance. Pour plus de détails sur le VIH/sida et les questions d'assurance privée, voir aussi L. Locas, Volet assurances privées, Ottawa, Société canadienne du sida (Projet sur la sécurité du revenu, 2e volet, série de documents de travail), 1996. 302 303 CSO, supra, note 15, aux p. 5-6. ACSP, supra, note 16, aux p. 14-16. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 3. Test des femmes enceintes Depuis plusieurs années, les législateurs et élaborateurs de politiques, en particulier aux É.-U., mais aussi au Canada de plus en plus, discutent de la manière d'offrir test du VIH et counselling aux femmes enceintes. Quatre possibilités principales sont considérées: • counselling et test uniquement aux femmes enceintes qui présentent des facteurs de risque, ou sur demande (option 1); • counselling de routine et test volontaire pour toutes les femmes enceintes (option 2); • test de routine pour toutes les femmes enceintes, avec possibilité de refus (option 3); • counselling et test requis pour toutes les femmes enceintes (option 4). La section qui suit discute de ces options pour conclure que la meilleure est l'option 2 — counselling de routine et test volontaire pour toutes les femmes enceintes — et que toutes les provinces et tous les territoires canadiens devraient adopter des politiques à cet effet. (1) Historique Le débat sur la question de savoir si l'on devrait demander un test requis pour toutes les femmes enceintes s'est transformé considérablement au cours des dernières années. Pour une femme enceinte, le fait de connaître son état sérologique est désormais plus utile que dans les années 80 et le début des années 90: • • les femmes diagnostiquées séropositives peuvent bénéficier de nouveaux traitements; et depuis 1994, on sait que les traitements peuvent réduire considérablement le risque de transmission verticale du VIH. (i) Avant 1994 Au début, les connaissances sur le VIH et la grossesse étaient minces. Les données suggéraient qu'environ un tiers des bébés de femmes qui étaient séropositives avant la grossesse seraient eux-mêmes séropositifs, et l'on craignait que la grossesse puisse accélérer l'apparition de symptômes du sida chez les femmes séropositives asymptomatiques. De plus, l'allaitement était déconseillé aux mères séropositives, vu le potentiel de transmission du VIH. Dû au manque d'information, l'utilité potentielle du test requis était tout de même restreinte. Comme l'a exprimé Field, [t]andis que les gouvernements ont évidemment un intérêt marqué à réduire le nombre de nouveau-nés séropositifs, il n'est pas clair que le test requis des femmes enceintes contribuerait à atteindre cet objectif. Une fois qu'une VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail femme est enceinte, le test ne pourrait contribuer à contrer le VIH que s'il menait à ravortement.304 Field poursuivait en disant que «le spectre que l'État puisse encourager ou requérir l'avortement, à cause d'un résultat de test positif, en effet est effrayant». Selon elle, le test requis ne devrait pas être envisagé: d'abord parce que l'enfant d'une femme séropositive a plus de chances de ne pas être séropositif que le contraire; ensuite parce que le fait de lui demander de subir un avortement enfreindrait le droit fondamental d'une femme d'exercer ses propres choix én matière de reproduction. H y avait consensus général à l'effet que le test sans consentement éclairé n'offrait aucun avantage par rapport au test volontaire et à des programmes de counselling conçus pour aider les femmes à prendre des décisions sur la grossesse et l'allaitement. L'OMS a déclaré que: P]es femmes qui veulent savoir si elles sont infectées ou non avant de prendre leur décision à cet égard sont en général disposées à participer aux programmes de dépistage volontaire et de conseil. En outre, il est non seulement contraire à l'éthique de contraindre les femmes à prendre des décisions concernant la reproduction ou l'allaitement, pour quelque raison que ce soit, y compris leur infection à VIH, mais encore, les femmes les plus susceptibles d'être infectées essaieront d'éviter le test obligatoire, précisément pour éviter les pressions, ce qui aura pour autre résultat non souhaité de dissuader lesfemmesenceintes de se rendre dans les services prénataux.3®5 Pour les mêmes raisons, au Canada, le CCN-SIDA concluait en 1988 que le test requis ou obligatoire de sérodiagnostic prénatal du VIH «n'est pas nécessaire». 306 En 1992, la CRDO a souligné que le test des femmes enceintes ne contribuerait à l'atteinte d'aucun objectif particulier de santé publique pour la prévention de la propagation du VIH, puisque, à cette époque, aucun traitement n'était disponible qui aurait pu prévenir la transmission verticale ou traiter de manière efficace les nouveau-nés séropositifs asymptomatiques. Par conséquent, la CRDO a conclu que «aucune exception à la règle générale quirequiertun consentement volontaire, spécifique et éclairé, n'est justifiée dans le cas de femmes ènceintes».307 En pratique, le counselling et le test du VIH étaient la plupart du temps offerts seulement aux femmes que leurs médecins considéraient comme vulnérables au VIH, ou il était effectué à la demande spécifique de la patiente. (ii) Depuis 1994 En 1994, des cherchèurs et collaborateurs des National Institutes for Health (É.-U.) ont rendu publics les résultats d'un essai clinique randomisé (ACTG 076), indiquant que l'administration de médicaments antirétroviraux à des femmes enceintes pendant la grossesse, le travail et l'accouchement, et au nouveau-né durant les six premières semaines de sa vie, pouvait réduire considérablement le risque de transmission de l'infection à VIH 304 305 306 307 Field, supra, note 4, à la p. 95. OMS 1992, supra, note 2, à la p. 4. CCN-sida, supra, note 1, à la p. 39. CRDO, supra, note 14, à la p. 51. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail de la mère au bébé. Des études en France, aux États-Unis et au Canada ont confirmé des réductions de la transmission, de 25% ou plus, à 8% ou même moins. 308 Vu ces progrès, l'Association médicale canadienne recommande à présent d'offrir le test du VIH et le counselling à toutes les femmes enceintes 3 0 9 De plus, certaines provinces ont modifié leurs politiques (officielles ou non) en matière de test des femmes enceintes, abandonnant l'option 1 (counselling et test seulement aux femmes présentant des facteurs de risque) au profit de l'option 2 (offrir systématiquement, à toute femme enceinte, la possibilité de subir un test). À ce jour, aucune province canadienne n'a élaboré de politique de test de routine ou requis pour les femmes enceintes (options 3 et 4). Plusieurs provinces n'ont pas encore modifié leur politique mais songent à le faire sous peu. (2) Situation actuelle Voici un aperçu des politiques (officielles ou informelles) en vigueur dans les provinces et territoires canadiens, en matière de test du VIH pour les femmes enceintes. Terre-Neuve A Terre-Neuve, une politique recommandant que toute femme enceinte passe un test de sérodiagnostic du VIH et que le médecin discute des options de test du VIH avec elle durant ses premières visites prénatales est en vigueur depuis 1992. Environ les trois quarts des femmes enceintes subissent un test. Toutefois, la province considère actuellement la possibilité de passer à une politique qui inclurait le test du VIH dans la batterie de tests systématiques de laboratoires anténataux 3 1 0 île-du-Prince-Édouard Il n'existe pas à PÎ.-P.É. de politique officielle sur le test des femmes enceintes, mais il est recommandé que l'on repère toute femme qui présente des facteurs de vulnérabilité au VIH. L'absence d'une politique officielle pourrait s'expliquer en partie par le fait qu'une étude de séroprévalence d'une durée de 2 ans a rapporté un taux de séroprévalence prénatale de 0%. 3 1 1 E.M. Connor et coll. «Reduction of Maternal-Infant Transmission of Human Immunodeficiency Viras Type 1 with Zidovudine Treatment», New England Journal of Medicine, 1994, 331: 1173-80; N. Lapointe et colL, «Mother to Child HIV Transmission Associated with Duration of the Second Stage of Labour», Xle Conférence internationale sur le sida, Vancouver, abrégé Tu.C.340; pour un sommaire de ACTG 076 et de ses résultats, une discussion des implications de ces résultats pour le counselling périnatal et le test, de même qu'une description des besoins de recherches futures, voir MA. Rogers, L.M. Mofensen, R.R. Moseley, «Reducing the Risk of Perinatal HIV Transmission through Zidovudine Therapy: Treatment Recommendations and Implications», Journal of the American Medical Women's Association, 1995, 50(3 et 4): 78-82; voir aussi Centers for Disease Prevention and Control, «Recommendations of the US Public Health Service Task Force on Zidovudine to Reduce Perinatal Transmission of Human Immunodeficiency Virus», Pediatric AIDS and HIV Infection: Fetus to Adolescent, 1994, 5(6): 387-398. 3 0 9 AMC, 1995, supra, note 72, à la p. 17. Communication avec le Dr Ratman, supra, note 46. Communication avec le Dr Sweet, supra, note 46. 308 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Nouvelle-Écosse La Nouvelle-Écosse n'a pas de politique officielle sur le test des femmes enceintes. Toutefois la province a émis des recommandations qui incitent fortement les médecins à discuter des facteurs de risque avec les patientes et à leur offrir l'option de subir le test. Les recommandations ne sont pas en faveur du test requis et se fondent sur la prémisse que le counselling pré- et post-test, de pair avec des programmes d'éducation, faciliteront l'«auto-identification».312 Nouveau-Brunswick Le Nouveau-Brunswick n'a pas de politique officielle sur le test des femmes enceintes. Le test et la méthode de test d'une femme varient d'une région à l'autre. Dans la plupart des régions, les cliniques de santé sexuelle offrent du counselling pré-test et un test anonyme aux femmes enceintes. Toutefois, dans l'une des régions, la responsable médicale de la santé a affirmé que ces cliniques ne sont plus autorisées à administrer le test du VIH aux femmes enceintes et que si une femme désire subir ce test, elle devra consulter son médecin. Cette déclaration n'est pas seulement importante à cause de l'effet direct pour les femmes d'une région donnée du N.-B., mais à cause de son influence possible sur les décisions d'autorités de santé d'autres régions de la province. Hors des cliniques d'obstétrique, le test de femmes enceintes est effectué par les médecins sur une base discrétionnaire. D'aucuns croient que certains médecins administrent peutêtre le test du VIH aux femmes dans le cadre des tests prénataux de routine, sans consentement. A la suite d'une étude de séroprévalence menée par la Faculté d'infirmerie de l'Université du Nouveau-Brunswick, une lettre a été envoyée aux médecins, leur suggérant d'offrir le test du VIH à toutes les femmes enceintes.313 Québec Au Québec, un nouveau programme visant à offrir la possibilité de subir un test de sérodiagnostic du VIH à toutes les femmes enceintes, ou qui désirent le devenir, a été présenté à l'automne 1996. En vertu de ce nouveau programme, «l'offre du test du VIH réservée jusqu'à présent aux patientes enceintes à risque ou aux femmes en faisant la demande, devrait désormais être faite à. toutes les femmes enceintes et à celles qui souhaitent le devenir». 314 La discussion sur le test du VIH devrait avoir lieu dès que possible, afin de permettre qu'elles puissent «effectuer un choix éclairé». Lors de la première visite prénatale, le médecin donne à la femme enceinte des renseignements sur les avantages et les inconvénients de subir un test du VIH pendant la grossesse, afin de l'aider à prendre une décision à cet égard et de lui expliquer les conditions du test. Lors de visites subséquentes, le médecin évaluera le risque de VIH, donnera du counselling et de l'éducation qui varient selon le besoin de la patiente. Le programme souligne que les Communication avec le Dr Lynn Johnston, ii/pra, note 46. Communication avec le Dr Grace Getty, Faculté d'infirmerie de l'Université du Nouveau-Brunswick, le 10 janvier 1997. 3 1 4 Direction de la santé publique de la Régie régionale de la santé et des services sociaux dé Montréal-Centre, «Nouveau programme prénatal contre le VIH - Le médecin traitant y jouera un rôle primordial», Bulletin de l'unité maladies infectieuses, Montréal, la Direction, p. 1. 312 313 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail femmes diagnostiquées séropositives ont besoin de counselling sur la continuation et l'interruption de la grossesse. Les femmes qui décident de poursuivre la grossesse ont l'option de prendre des médicaments antirétroviraux comme l'AZT, la ZDV ou le 3TC, qui sont offerts gratuitement. Ontario En Ontario, il n'existe pas de politique officielle régissant le test des femmes enceintes, mais le Comité consultatif de l'Ontario sur le test du VÏH et l'usage de zidovudine pour les femmes enceintes a recommandé que l'on discute du test avec toutes les femmes enceintes ou qui désirent le devenir, afin qu'elles puissent prendre une décision éclairée à l'endroit du test. Tout test doit s'accompagner de counselling pré- et post-test et d'un consentement éclairé, tel.que le veut la norme régissant tout test du VIH en Ontario. Ainsi, le médecin hygiéniste en chef a recommandé que «l'on discute avec toutes les femmes enceintes, ou qui songent à le devenir, du test des anticorps anti-VIH. Le test des anticorps anti-VIH devrait être rendu disponible à toute femme qui le demande». Cette déclaration doit toutefois être mise en perspective par son affirmation suivante, selon laquelle «il est d'une importance cruciale que l'on administre le test aux femmes qui présentent un quelconque risque d'infection à VIH [...] Le succès de cette approche de prévention de la transmission du VIH de la mère au foetus repose sur la capacité des professionnels de la santé d'identifier les femmes à risque accru», 315 un message qui, lorsqu'on le lit en entier, suggère que l'accent soit placé principalement sur l'identification des facteurs de risque, non pas sur le test volontaire de toutes les femmes enceintes ou qui désirent le devenir. Manitoba En 1994, le Manitoba a adopté une politique selon laquelle tous les médecins devraient offrir du counselling pré-test et un test de VIH à toutes les femmes enceintes, et le choix volontaire de subir le test ou non repose sur le consentement éclairé.316 Saskatchewan La Saskatchewan a publié des directives sur la prévention de la transmission verticale qui appuient le test volontaire et recommandent que tous les médecins offrent du counselling prénatal à leurs patientes. Les directives citent par ailleurs que les médecins doivent être conscients de tout facteur possible de risque d'une patiente et, le cas échéant, offrir du counselling et l'option de passer un test. Suite aux conclusions d'une étude de séroprévalence non reliée d'une durée de 18 mois qui a relevé un taux de séroprévalence de 3 sur 10 000, la province n'a pas jugé nécessaire de modifier sa politique en la matière.317 315 316 VIII R.Schabas, «Message du médecin hygiéniste en chef au sujet du test du VIH pour les femmes enceintes». Communication avec P. Matusko, supra, note 46. Communication avec Nida Wurtz, le 10 janvier 1997. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Alberta La section albertaine de l'Association médicale canadienne a créé un groupe de travail pour examiner la possibilité d'élaborer un programme de dépistage systématique pour les femmes enceintes. Supposant l'adoption d'un tel programme, le test du VIH serait ajouté à la liste des tests de dépistage prénatal et la seule alternative pour une femmp serait celle d'y exprimer un refus. En d'autres mots, le test serait administré de manière automatique à moins que la patiente demande à ce qu'il ne lui soit pas administré.318 Colombie-Britannique La C.-B. était la première province à «recommander fortement» que le test du VIH soit administré en tant que composante de la routine prénatale à toutes les femmes enceintes. Dans un communiqué de presse du 29 juin 1994, on recommande aux médecins de la province de conseiller toutes les femmes enceintes sur le bien-fondé de subir le test au début de chaque grossesse; on poursuivait en écrivant que «0 n'est pas prudent de prendre pour acquis qu'une femme qui était séronégative à sa première grossesse le demeurera lors de toutes les autres grossesses». On souligne aussi que le test doit s'accompagner de counselling adéquat et d'un consentement éclairé.319 Une présentation par affiche, lors de la Xle Conférence internationale sur le sida, offrait une évaluation préliminaire de l'impact de la politique, et concluait que: le fait de recommander le dépistage de routine de toutes les femmes enceintes s'est avéré utile et efficace. Nous avons prévenu 2 infections au cours de la première année. A mesure que le taux de séroprévalence parmi les femmes augmentera, les bienfaits devraient être encore plus importants.320 Yukon Depuis plusieurs années, au Yukon, on recommande le test du VIH pour toutes les femmes enceintes, quels que soient les facteurs de risque.321 Territoires du Nord-Ouest Dans les T.N.-0., les docteurs offient le test du VIH à leurs patientes de façon systématique.322 Communication avec le Dr Larke, supra, note 46. «B.C. First Province to Advise HIV Test for Pregnant Women», Victoria, Office of the Provincial Health Officer, 29 juin 1994. 3 2 0 J. Foibers, D. Burdge, D. Money, «Outcome of Infants Bom to HIV Seropositive Mothers in British Columbia, Canada», abrégé Tu.C.2574, Xle Conférence internationale sur le sida, Vancouver, Canada, 7-12 juillet 1996. 3 2 1 Communication avec P. Mandel, supra, note 46. 3 2 2 Communication avec À. Corveau, supra, note 46. 318 3 1 9 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (3) Évaluation (i) Counselling en présence de facteurs de risque (option 1) versus counselling de routine et test volontaire (option 2) Dans l'option 2, les professionnels de la santé offrent de façon systématique aux femmes enceintes l'option du test du VIH et ils les conseillent au sujet des avantages et inconvénients du test du VIH, puis leur laissent la décision de subir ou non le test Dans le cas où une femme qui demande le test est diagnostiquée séropositive, le choix quant à sa grossesse lui appartient: elle peut décider de la poursuivre sans traitement visant à réduire le risque de transmission à son enfant, elle peut suivre ces traitements ou elle peut choisir de mettre fin à sa grossesse. L'option 2 étend l'offre de counselling et de test à toutes les femmes enceintes, plutôt que seulement à celles qui sont perçues comme vulnérables (option 1). Tel que mentionné cidessus, c'est maintenant la politique officielle dans certaines provinces canadiennes, notamment la C.-B. et le Québec. Des associations professionnelles comme l'AMC, la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, le Collège des médecins de famille du Canada, le Collège des médecins du Québec, ainsi que des organismes communautaires comme la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida (COCQ-sida) ont exprimé leur à l'offre du test volontaire du VIH à toutes les femmes enceintes.323 Il n'y a aucun doute qu'à ce stade de l'épidémie cette approche est préférable à celle d'offrir le counselling et le test seulement aux femmes considérées vulnérables. Plusieurs études montrent que cette dernière échoue à identifier beaucoup des femmes séropositives 3 2 4 Souvent, les femmes ne reçoivent pas de test parce qu'elles ne sont pas au courant de leur propre vulnérabilité ou parce qu'elles sont réticentes à parler de comportements qui pourraient les stigmatiser. Par opposition, l'offre routinière de counselling et de test assurera les avantages du counselling à toutes les femmes enceintes et accroîtra le nombre de femmes qui acceptent de subir le test. Afin de rehausser l'efficacité de cette approche, on devrait l'accompagner d'information et d'éducation des RRSSS Montréal-Centre, supra, note 314, p. 2. M.B. Barbacci et coll., «Human Immunodeficiency Virus Infection in Women Attending an Inner-City Prenatal Clinic: Ineffectiveness of Targeted Screening», Sexually Transmitted Diseases, 1990, 00: 122-126; L.J. Fetus et coll., «Targeted HIV Screening at a Los Angeles Prenatal/Family Planning Health Center», American Journal of Public Health, 1991, 81: 619-622; D. Gibb et coll, «Evaluating Antenatal HIV Testing in London, UK», abrégé Th.C.4615, présenté à la XI Conférence internationale sur le sida, 7-12 juillet 1996 (il s'agit d'un sommaire des politiques sur le test dans des unités de maternité à Londres, Royaume-Uni; il démontre que dans la plupart on offrait le test du VIH seulement aux femmes considérées comme vulnérables et seulement sur ^«mam*» de la patiente; en deux ans, on n'a identifé que 2 femmes séropositives et on estime que 154 autres n'ont pas été diagnostiquées alors qu'elles l'étaient aussi). Entre-temps, en Caroline du Nord, on utilisait une approche plus vigoureuse pour identifier les femmes enceintes séropositives et leur offrir des traitements. À la fin de l'étude, 90% des mères séropositives étaient diagnostiquées avant l'accouchement, comparativement à 60% plus tôt Le taux de transmission verticale est passé de 21% à 9% (SA. Fiscus et coll., «Périnatal HIV Infection and the Effect of Zidovudine Therapy on Transmission in Rural and Urban Communities», Journal of the American Medical Association, 1996, 275(19):1493.) 323 324 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail médecins, et d'autres professionnels de la santé, surl'importance d'offrir du counselling et le test aux femmes enceintes sur une base routinière. Au Québec, par exemple, les médecins et autres professionnels de la santé recevront une trousse d'information expliquant le fondement du programme, les procédures régulières qu'il convient de suivre, et une liste de références. (ii) Test de routine (option 3) Selon cette approche, le test du VIH serait tout simplement ajouté à la batterie des tests prénataux, mais les femmes enceintes auraient la possibilité de ne pas subir le test du VIH, par une option de refus. Les tenants de cette approche soutiennent que l'infection à VIH ne devrait pas être abordée différemment des maladies couvertes par les tests prénataux de routine, et que cette approche permettrait probablement d'accroître le nombre de femmes enceintes à passer ce test. Cependant, comme on l'a montré dans des chapitres précédents, l'infection à VIH est encore fort différente des autres maladies, en dépit des nouveaux traitements, ce qui nécessite que ce test ne soit effectué qu'avec le consentement spécifique et éclairé de la personne qui le subirait, et accompagné de counselling avant et après. Il n'y a pas de raison de déroger à ce principe dans le cas des femmes enceintes. De fait, le consentement préalable et le counselling avant et après le test d'une femme enceinte revêtent même une importance particulière. Le test en soi n'est pas un objectif: pour qu'il conduise à des avantages, il faudrait qu'une femme enceinte qui est diagnostiquée séropositive accepte de suivre une thérapie antirétrovirale, pour elle-même et, si elle choisit de poursuivre sa grossesse, pour son enfant. En vertu de la législation canadienne, la décision d'interrompre ou de poursuivre la grossesse, ainsi que celle de suivre un traitement, sont des choix volontaires. Plus tôt on informera une femme enceinte sur les avantages et inconvénients du test et des traitements disponibles, plus probable il sera qu'elle prenne des décisions ultimement bénéfiques pour elle même et, si elle choisit de poursuivre sa grossesse, pour son enfant. .Par opposition, le test de routine, sans offrir aux femmes les avantages du counselling, pourrait nuire à la relation patiente-médecin, qui est cruciale pour la continuité des soins: Le but du test de VIH n'est pas d?étiqueter une femme comme étant séropositive, mais bien de l'inciter à des soins de santé adéquats. Ceci a plus de chances de se concrétiser si lafemmea pris part aux décisions qui concernent sa santé et celle de son enfant.325 Plusieurs études ont d'ailleurs montré que lorsque l'on informe les femmes enceintes sur les avantages du test du VIH et que le test est recommandé par leur professionnel de la santé, la plupart acceptent de le subir. 326 Le test de routine ne peut présenter que peu Rogers, Mofensen et Moseley, supra, note 308, à la p. 81. M.K. Lindsay et coll., «Routine Antepartum Human Immunodeficiency Vims Infection Screening in an InnerCity Population», Obstetrics and Gynecology, 1989, 74: 289-294; M. Barbacci, J.T. Repke, R.E. Chaisson, «Routine Prenatal Screening for HIV Infection», Lancet, 1991, 337: 709-711. Voir aussi E. Cooper, «Mandatory HIV Testing of Pregnant/Delivering Women and Newborns: A Legal, Ethical, and Pragmatic Assessment», abrégé We.D.491, présenté à la Xle Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 7-12 juillet 1996, avec nombreuses références. 325 326 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail d'avantages, voire aucun, en plus de ne pas offrir aux femmes enceintes les avantages du counselling pré-test et la participation à des décisions qui, somme toute, leur reviennent. (iii) Test requis (option 4) Comme le traitement à la ZDV ne peut pas et ne devrait pas être imposé, les résultats de 076 n'incitent pas non plus à effectuer un test non volontaire sans consentement éclairé, et à abroger le droit de la patiente à la vie privée.327 Le test obligatoire pourrait dissuader les femmes d'avoir recours à tout soin prénatal. Si vous voulez que des femmes prennent de l'AZT 4 fois par jour pendant 6 mois, puis en intraveineuse pendant le travail et qu'elles le donnent ensuite à leur bébé pendant 6 semaines, croyez-vous que la coercition soit un bon départ?328 Les propositions de test requis ne serviront pas à améliorer le bien-être des nouveau-nés séropositifs ou vulnérables au VIH, parce qu'elles ne serviront pas à améliorer le bien-être de leurs mères. Plutôt que d'aider à la relation de confiance patiente-médecin qui est essentielle pour que les soins et les services soient adéquats, elles la détérioreraient.329 Dans un programme de test requis, toutes les femmes enceintes subiraient le test de sérodiagnostic du VIH, sans possibilité de refus. Les arguments rencontrés à Pëgard de cette approche sont sensiblement les mêmes que ceux en faveur et contre le test de routine. Les propositions de tests requis résultent de la disponibilité de traitements qui peuvent réduire considérablement le risque de transmission du VIH de la mère à l'enfant. Par conséquent, d'aucuns soutiennent que toute femme enceinte devrait subir le test et, si elle est séropositive, devrait suivre un traitement Certains pédiatres et néonatologues sont frustrés que plusieurs femmes séropositives ne soient pas identifiées, ce qui élimine leurs chances de prendre de l'AZT pour réduire le risque de transmission à l'enfant En tant que pédiatre qui est concerné par l'épidémie depuis ses débuts, je dois admettre que je suis déçu qu'il n'y ait pas eu d'appui unanime pour que l'on offre à autant d'enfants que possible, dès que possible, des traitements qui sauvent la vie. 330 Les tenants du test requis soulignent que (1) dans plusieurs juridictions de l'Amérique du Nord, les femmes enceintes sont déjà soumises au dépistage de routine de maladies qui pourraient compromettre la santé du nouveau-né, comme la syphilis et l'hépatite B, 3 3 1 et 3 2 7 C.B. Britton, «An Argument for Universal HIV Counselling and Voluntary Testing of Women», Journal of the American Women's Association, 1995, 50(3 & 4): 85-86. 328 Z. Lazzarini, cité dans Abrams, supra, note267. 3 2 9 Cooper, supra, note 326. 3 3 0 A. Ammann, «Unrestricted Routine Prenatal HIV Testing: The Standard Care», Journal of the American Merical Women 's Association, 1995, 50(3 & 4): 83-84. 3 3 1 Bayer, supra, note 199, à la p. 33. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail que (2) seulement un programme devest requis permettra que le test du VIH soit administré à toutes les femmes enceintes. En 1996,l'American Medical Association s'est jointe à eux, en abandonnant sa recommandation antérieure à l'endroit du counselling de routine mais du test volontaire, pour prôner à présent le test requis de toutes les femmes enceintes (seulement, toutefois, là où le counselling et le traitement sont disponibles pour les patientes).332 L'argument selon lequel on effectue déjà des tests de routine pour une batterie d'autres maladies et que ceci devrait constituer un précédent qui permette d'ajouter le VIH à cette liste n'aborde cependant pas la question de savoir si la pratique du dépistage de routine, précisément, est justifiée en soi. On peut faire valoir que le dépistage prénatal requis chez les femmes enceintes constitue une violation de leurs droits. De plus, tel que souligné précédemment, le test n'est pas une fin en soi et l'administration du test du VIH à toutes les femmes enceintes n'assurera pas, et ne pourrait pas assurer, que toutes celles qui sont séropositives suivent un traitement pour réduire le risque de transmission à leur enfant: la décision de suivre un traitement reste un choix qu'il revient à la femme de faire elle-même après avoir été informée des risques et avantages associés au traitement. Comme le soutient Bayer, les femmes enceintes ont le droit de décider si oui ou non elles suivront un traitement, même si une décision négative signifie que leurs enfants auront une plus grande chance de naître avec l'infection à VIH. «Je dis que c'est une question de principe moral. Je ne crois pas que quiconque ait le droit de forcer qui que ce soit à prendre un médicament.»333 Bayer poursuit en soulignant que des problèmes pratiques sont aussi en jeu: Ce protocole de l'AZT nécessite que l'on prenne le médicament 5 fois par jour pendant presque les deux tiers de la grossesse. D n'y a pas d'autre moyen que l'incarcération pour forcer une personne à prendre un médicament 5 fois par jour si elle ne veut pas le prendre. Du point de vue pratique et du point de vue moral, nos bases seraient bien plus solides si l'on développait des programmes qui encouragent les femmes vulnérables à subir le test et qui les incitent — et non qui les forcent — à suivre un traitement à l'AZT. 334 American Medical Association Standard, adopté le 27 juin 1996. En juin 1996, les membres de l'AMA se sont prononcés par un vote serré en faveur du test requis de sérodiagnostic du VIH pour les femmes enceintes, décision réaffirmée par une plus grande majorité, plus tard en 1996, après qu'un des comités de l'AMA eut demandé un nouveau vote en espérant que .la décision initiale soit renversée. Le Dr W.R. Jones souligne que l'AMA appuie aussi le test requis pour les donneurs de sang, de lait maternel, d'organes, de sperme et d'ovules, ainsi que pour les immigrants et les militaires, en notant que le VIH devrait être «dépolitisé» et abordé comme les autres maladies infectieuses. Aux États-Unis, le test volontaire reçoit toujours l'appui des Centers for Disease Control and Prevention, de l'American College of Obstetricians and Gynecologists, et d'autres regroupements de la profession médicale.. Voir C. Kent, «AMA: Mandatory HIV Testing in Pregnancy», American Medical News, 1996, 39(48): 6. 333 334 Bayer, 1995, supra, note 119, à la p. 33. Ibid. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail En outre, le test requis pourrait aboutir à des résultats contraires aux buts puisque, tel qu'expliqué ci-dessus, il pourrait nuire à la relation entre la patiente et le médecin, qui est fondamentale dans la continuité des soins. Par ailleurs, certaines femmes qui ne veulent pas subir le test pourraient carrément décider d'éviter le recours aux soins prénataux si le test du VIH n'était pas explicitement volontaire. Tel que l'explique Cooper, on n'a pas de données pour montrer que les programmes de test requis parviendraient à inciter aux soins les femmes et les nouveau-nés. Au contraire, l'histoire montre qu'il existe une résistance au test imposé, à la déclaration nominale, ou à une ingérence indue du gouvernement dans le milieu des soins de santé.335 Enfin, même si le traitement comporte de grands avantages potentiels, il pourrait entraîner des risques que nous ne connaissons pas. Selon Lazzarini, «nous ne connaissons pas encore à fond l'AZT — ses méfaits possibles sur le bébé, ses effets possibles à long terme sur les femmes qui le prennent pendant la grossesse, ni son efficacité pour les femmes aux divers stades de la grossesse». 336 Jusqu'ici, on n'a pas rapporté d'effets nocifs de l'AZT sur les enfants de l'ACTG 076, mais on a créé une base de données sur leur développement des 20 prochaines années. 337 En janvier 1997, de nouveaux résultats d'études montrant que la progéniture de souris qui avaient reçu des doses importantes d'AZT pendant la grossesse avait de plus grandes chances d'avoir le cancer ont soulevé une vague d'inquiétude à l'égard de l'usage de l'AZT chez les femmes enceintes séropositives. Les US National Institutes of Health ont créé un groupe de patientes vivant avec le sida et d'autres vivant avec le cancer, pour travailler à l'élaboration de lignes directrices sur l'utilisation de l'AZT pendant la grossesse. Le groupe a exprimé un appui massif au maintien des lignes directrices en vigueur aux E.-U., qui encouragent le traitement des femmes enceintes séropositives et de leurs bébés pour réduire le risque de transmission verticale. Le groupe a fait valoir que, alors que de fortes doses du médicament avaient causé le cancer chez les souriceaux, les femmes enceintes en prennent des doses beaucoup plus faibles, 338 pour conclure que les risques théoriques montrés par 335 Cooper, supra, note 326. Au surplus, certains opposants du test requis chez les femmes enceintes croient que ce serait un gaspillage de ressources, que l'on devrait investir avant tout dans des programmes d'éducation visant à prévenir l'infection des femmes, et qu'un programme de test requis accaparerait des sommes inutiles pour tester un grand nombre de femmes enceintes qui n'ont jamais été exposées à un quelconque risque réel d'infection. Toutefois, une étude américaine a comparé l'efficacité du coût de trois approches en matière de test prénatal (tests des femmes perçues comme «à risque» seulement; counselling requis de toutes les femmes enceintes; et test obligatoire), et a conclu que le test obligatoire serait l'approche la plus économique. On y estimait que le test obligatoire, en identifiant plus de femmes séropositives, préviendrait assez de cas de transmission verticale du VIH (et éviterait les coûts de traitement des nouveau-nés malades) pour contrebalancer le coût d'un programme de test universel. Les chercheurs mettaient toutefois en garde contre la possibilité que les bénéfices mis en relief H t m g ce modèle statistique pourraient être annulés si une stratégie de test obligatoire créait des changements dans le comportement des femmes auxquelles on se proposerait d'administrer le test, notamment si elles évitaient le recours aux services médicaux. Voir J.W. Thompson, EJt. Myers, K.N. Simpson, «The CostEffectiveness of screening strategies to prevent vertical transmission of Human Immunodeficiency Virus», abrégé We.C.3590, présenté a la XI Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 7-12 juillet 1996. 336 337 Cité dans Abrams, supra, note 267. Voir J. Fricke, «A Conversation with Yvonne Bryson, UCLA AIDS Institute: Prespectives, 1996, 4(1): 1, à la «Panel to Review AZT Use During Pregnancy», Washington Post, 1 janvier 1997, à la p. A13. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail l'étude sont de loin surpassés par la connaissance d'une réduction considérable du risque de transmission de la mère à l'enfant. En outre, le groupe a recommandé de continuer d'évaluer les données disponibles et de réévaluer les programmes en cours afin de procéder à une surveillance continue des enfants nés de mères qui ont été traitées avec l'AZT. 3 3 9 Il n'en demeure pas moins que les inquiétudes persistent, relativement aux effets secondaires et aux limites possibles du traitement (4) Conclusion L'éthique et le contexte légal concernant les tests de dépistage du VIH au Canada exigent comme préalables le contentement éclairé du patient, le counselling avant le test et lors de l'obtention des résultats, ainsi que le maintien de la confidentialité. Aussi, comme les autres patients, la femme enceinte ou qui souhaite le devenir doit bien saisir les avantages et les conséquences possibles du test de dépistage du VIH avant de s'y soumettre. À cet égard, un résultat sérologique positif peut l'influencer dans sa décision d'interrompre cette grossesse, ou d'éviter l'allaitement, décisions qui, au Canada, reviennent à la patiente. Le programme québécois vise ainsi à assurer aux femmes séropositives enceintes qui désirent poursuivre leur grossesse tous les moyens de réduire lerisquede transmission du VIH à leur enfant et ce, dans lerespectdes droits de toutes les femmes enceintes de décider elles-mêmes de passer ou non le test.340 Maintenant que l'on a découvert un traitement préventif, les pressions sont fortes en faveur du test pour les femmes enceintes. La ruée pour réagir à cette thérapie innovatrice comporte le risque grave que soient balayés les droits fondamentaux de la mère. Tel que l'explique Cooper, plusieurs des propositions de programmes de test de routine ou de test requis peuvent bien avoir été formulées avec les meilleures intentions, elles reflètent en même temps l'ensemble suivant de facteurs: (1) les gens en général, et les législateurs en particulier, en ont tout simplement assez du sida; particulièrement en temps deressourcesrestreintes, les législateurs cherchent à adopter des mesures qui, malheureusement, ne sont pas toujours positives; (2) les voix et les besoins desfemmes,en général,... ne sont pas suffisamment valorisés dans l'élaboration des politiques et l'allocation des ressources; (3) lorsque les enfants sont concernés, l'émotivité règne.34! Compte tenu de la disponibilité d'un traitement qui peut réduire le risque de transmission verticale, on peut difficilement douter du fait que les femmes enceintes seraient bien avisées de considérer la possibilité de passer un test du VIH. On devrait par conséquent, sur une base routinière, prodiguer du counselling à toutes les femmes enceintes et non Recommendations Regarding Treatment of HIV-infected Pregnent Women with AZT. PR Newswire. 14 janvier 1997. 339 340 341 RRSSS Montréal-Centre, supra, note 314, p. 2. Cooper, supra, note 326. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail seulement à celles considérées comme vulnérables, sur les avantages et les inconvénients du test de sérodiagnostic du VIH et leur offrir de passer ce test. Les provinces et territoires qui n'ont toujours pas mis en oeuvre un programme de counselling de routine et de test volontaire devraient suivre l'exemple de la Colombie-Britannique et du Québec, et élaborer des trousses informatives qui présentent lés fondements d'un tel programme, la procédure régulière à observer et des sources d*information supplémentaire. Elles devraient en même temps résister à la tentation d'intégrer le test du VIH à la batterie de tests prénataux de dépistage de routine ou de rendre le test du VIH requis pour les femmes enceintes. Le test de routine ou requis n'est pas justifié: ce n'est pas l'approche «la moins contraignante, la moins envahissante, la plus susceptible d'être efficace et raisonnablement accessible» puisqu'il y a lieu de croire que la grande majorité des femmes enceintes choisiront de plein gré de passer un test du VIH si les risques et avantages de ce test leur sont bien expliqués: adéquatement informées et soutenues dans leurs choix, les femmes enceintes agiront dans le meilleur intérêt de leur santé et de celle de leur enfant, sans coercition. En outre, le test seul ne servirait pas à atteindre l'objectif de réduire la transmission du VIH de la mère à l'enfant, d'une part, et d'autre part on serait incapable — on ne devrait jamais tenter, non plus — d'imposer un traitement par la coercition.342 Toute intervention axée sur la contrainte, y compris le test requis et le traitement requis, constituerait une enfreinte considérable aux droits des femmes enceintes à l'autonomie. Cela représenterait le couplage d'un système de traitement volontaire et d'un programme de test requis, une approche illogique et qui réduirait la probabilité que les femmes puissent se prévaloir, et se prévalent, des services du système de santé. Au contraire, un système volontaire appuie la relation de confiance entre la patiente et le médecin, en permettant à.la femme de prendre les décisions qui sont les meilleures pour elle et pour sa famille — au sujet du test, de l'usage d'antiviraux, et de traitement pour ellemême et pour le nouveau-né. C'est cette approche que nous devrions appuyer.343 3 4 2 L'ingérence de l'État H a n g les droits des femmes enceintes à l'autonomie n'est généralement pas justifiée. Quoique certains cas très exceptionnels d'abus du foetus puissent justifier une telle intervention, les arguments seraient beaucoup plus faibles le cas où une femme enceinte ne ferait que refuser de consentir au test et au traitement pour le VIH que, par exemple, dans un cas survenu récemment au Manitoba où une femme enceinte s'adonnait à une activité (usage de drogue) qui affectait activement et irréparablement le foetus; pourtant, même H«ng ce cas manitobain, les tribunaux ont jugé qu'il n'y avait pas de motif en vertu duquel l'État pouvait intervenir (Winnipeg Child and Family Services (Northwest Area) v. D.F.G., Man QB, 13 août 1996, j. Schulman, no CP 91-01-04256, non publié; rév., Man CA, 12 septembre 1996, no AH 96-30-02891, non publié; en appel, Cour suprême du Canada, no 25508). Le simple refus de consentement à un test de sérodiagnostic et à un traitement qui peut être ou ne pas être, somme toute, bénéfique pour le foetus, ne comporte qu'un risque indirect pour le foetus et relève de la non-faisance plutôt que de la malfaisance. Les motifs pour intervenir seraient alors beaucoup plus faibles. De manière générale, à ce jour, le droit canadien a largement établi que le foetus n'est pas une personne et n'a pas droit à la reconnaissance légale, ce qui rend l'intervention d'autant plus difficile dans ces cas. 3 4 3 Cooper, supra, note 326. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 5. Dans toutes les provinces et tous les territoires canadiens, on devrait offrir à toutes les femmes enceintes — et non seulement à celles qui sont considérées comme vulnérables au VIH— la possibilité de subir un test de sérodiagnostic du VIH durant la grossesse et de recevoir du counselling sur les avantages et les inconvénients de ce test Par opposition, les mesures coercitives comme le test de routine ou le test requis des femmes enceintes impliquent une enfreinte indue des droits des femmes enceintes à Vautonomie et ne peuvent pas être justifiées comme une question de nécessité légale ou métïïcale. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 4. Test des nouveau-nés La question de savoir si le test de routine et le test obligatoire des nouveau-nés est justifié a rarement été abordée au Canada. Aux États-Unis, par contre, la question est débattue depuis la fin des années 80. (1) Historique (i) Les débuts A l'origine, le consensus était que le test de routine ou le test obligatoire n'était pas justifiable, du point de vue de l'éthique, pour au moins deux rusons: • d'abord, la technologie de test ne permettait pas l'identification des bébés séropositifs sur une base routinière. Les tests immuno-enzymatiques ne parvenaient qu'à révéler la présence d'anticorps de la mère. Étant donné que la majorité des enfants qui naissent de mères séropositives sont eux-mêmes séronégatifs, le test n'offrait pas de base adéquate pour identifier les nouveau-nés qui pourraient en théorie profiter d'une intervention thérapeutique ou prophylactique: il ne faisait que révéler que la mère était séropositive. Comme l'a expliqué Bayer, «[certainement, avant que l'identification qu'il procurait ne soit autorisée sans consentement, il devrait être nécessaire de démontrer un avantage plus que théorique, pour le nouveau-né»;344 • deuxièmement, il n'avait pas été démontré que l'on puisse faire quoi que ce soit pour les bébés séropositifs, durant la phase asymptomatique, pour contribuer à modifier le cours de leur vie. Certains ont soutenu que si l'on parvenait à élaborer un mécanisme de diagnostic de l'infection à VIH chez le nouveau-né et que s'il existait une thérapie pour les nouveau-nés séropositifs, il existerait unfondementclinique permettant de faire une demande au nom de l'enfant vulnérable. Ceci pourrait bien suffire à établir les bases pour le test sans consentement parental.345 Es considéraient que l'État a le droit de traiter un nouveau-né sans le consentement parental si la vie de l'enfant est en jeu, et ils soulignaient l'existence de cas largement acceptés de test de routine ou obligatoires chez les nouveau-nés, qui permettaient . l'identification de ceux qui ont besoins d'un traitement particulier: Le dépistage, dans ces cas, est considéré comme un exercice légitime des pouvoirs étatiques afin de protéger des personnes vulnérables. Le dépistage de la phényloétonurie est paradigmatique. L'identification précoce est cruciale 344 345 VIII Bayer, supra, note 21. lbid.9 à Up. 121. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail pour permettre qu'une diète spéciale soit adoptée. Le défaut de procéder à une telle intervention thérapeutique peut être catastrophique pour l'enfant. Un test de sérodiagnostic fiable, une intervention ftérapeutique fiable, une nécessité d'agir rapidement; ce sont les conditions qui mènent aux raisons empiriques et morales du dépistage des nouveau-nés sans demander d'abord le consentement parental.346 (ii) Histoire récente Au cours des récentes années, il est devenu possible de détecter l'infection chez les nouveau-nés et l'on considère maintenant que l'identificàtion précoce et la surveillance étroite des nouveau-nés séropositifs au VIH est essentielle à un contrôle médical optimal. 347 Par exemple, les lignes directrices sur la prophylaxie contre la pneumonie à Pneumocystis carinii [PCP] chez les enfants recommandent maintenant que tous les enfants de mères séropositives reçoivent une thérapie prophylactique dès l'âge de 4 ou 6 semaines.348 De plus, un suivi minutieux de ces enfants, afin de diagnostiquer rapidement d'autres conditions liées au VIH et pouvant être traitées (p. ex., infections bactériennes graves ou tuberculose) peut prévenir la maladie et réduire le besoin d'hospitalisation.349 Les nouveau-nés de mères séropositives ont aussi besoin que l'on modifie le programme d'immunisation de routine dès l'âge de 2 mois 3 5 0 Certains soutiennent qué du point de.vue de l'éthique, malgré ces développements et d'autres, il ne sera jamais justifiable d'administrer le test aux bébés sans le consentement de la mère puisque le test d'un bébé équivaut en même temps au test de la mère: les femmes qui accouchent seraient le seul groupe de citoyens à être soumis au test dù VIH en l'absence de consentement éclairé.351 (2) Situation actuelle Jusqu'à ce jour, au Canada, on n'a pas tenté d'implanter le test de routine ou obligatoire de sérodiagnostic du VIH chez les nouveau-nés. Cependant, un premier État américain, celui de New York, a adopté en 1996 des lois qui rendent obligatoire le sérodiagnostic du VIH chez lès nouveau-nés. 346 ibid. Centers for Disease Control and Prevention, US. Public Health Service Recommendations for Human Immunodeficiency Virus Counselling and Voluntary Testing for Pregnant Women, les Centres, 7 juillet 1995 (voL 44, no RR-7), avec plusieurs références. * CDC, 1995, «Revised Guidelines for Prophylaxis against Pneumocystis Carinii Pneumonia for Children Infected with or Perinatally Exposed to Human Immunodeficiency Virus», Morbidity and Mortality Weekly Review, 1995,44 (no RR-4). 3 4 9 W. El-Sadr et coll.. Evaluation and Management of Early HIV Infection, Rockville, MD, US Department of Health and Human Services, Public Health Service, Agency for Health Care Policy and Research, janvier 1994 DHHS publication no (AHCPR) 94-0572 (Clinical Practice Guideline no 7). 350 ACIP, «Recommendations of the Advisory Committee on Immunization Practices (ACIP): Use of Vaccines and Immune Globulins in Persons with Altered Immunocompetence», Morbidity and Mortality Weekly Review 1993,42 (no RR-4). 3 5 1 C. Henderson, «Prenatal HIV Screening Raises Ethical Issues», Medical Tribune News Service, 1995. 347 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail G) Canada Conformément au principe général régissant le test de sérodiagnostic du VIH au Canada, les lignes directrices de l'AMC sur le counselling soulignent que «[cjomme dans le cas des adultes, pour soumettre des enfants à un test de sérodiagnostic du VIH, il faut obtenir un consentement éclairé, maintenir la confidentialité et donner du counselling pré-test et post-test». Les lignes directrices poursuivent en précisant que lorsqu'il s'agit de soumettre un nouveau-né à ce test, le résultat s'applique à la fois à la mère et à l'enfant et que, par conséquent, «tous les aspects qui s'appliquent au test subi par une de ces deux personnes s'appliquent aussi à l'autre». 352 (ii) États-Unis En mai 1996, le Congrès américain a débattu d'un amendement au Ryan White Care Act — la première source de fonds fédéraux pour les soins et le soutien des personnes vivant avec le VIH — qui aurait impliqué le test du VIH pour tous les nouveau-nés aux É.-U.; après de longues délibérations, l'amendement proposé a été lui-même modifié et requiert maintenant que chaque État, d'ici 2 ans, arrive à soit (1) réduire de 50% le taux de cas pédiatriques de sida rapportés, par rapport aux données de 1993, soit (2) connaisse l'état sérologique de 85% des femmes enceintes qui reçoivent des soins prénataux au moins à deux reprises jusqu'à la 34e semaine de la grossesse. Si un État ne parvient pas à satisfaire à au moins un de ces deux critères, on lui accordera une période de «probation» de 18 mois au cours de laquelle il devra voir à remédier à la situation ou à mettre en oeuvre un mécanisme de test obligatoire du VIH chez les nouveau-nés. Si un État demeure incapable de satisfaire à ces critères, il risque de voir interrompu lefinancementqu'il reçoit en vertu de la loi Ryan White.353 En juin 1996, le gouvernement de l'État de New York a approuvé le test obligatoire du VIH chez tous les nouveau-nés. La loi ne requiert pas que la mère reçoive du counselling pré- ou post-test, ni que les professionnels de la santé tentent d'abord d'obtenir son consentement ou de savoir si elle a déjà reçu sérodiagnostic à l'égard du VIH, laissant toute décision d'application au commissaire d'État à la Santé. 352 353 VIII Association médicale canadienne, 1995, supra, note 72, a la p. 18. Cooper, supra, note 326, avec référence à 42 USCA, par. 300£f-34. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (3) Évaluation Les tenants du test obligatoire des nôuveau-nés mettent l'accent sur ses avantages potentiels, 354 en soulignant l'importance de la détection précoce et du traitement des nouveau-nés séropositifs au VIH. Comme l'a déclaré le Dr Martha Rogers, chef en épidémiologie à la division du VIH/sida des Centers for Disease Control and Prevention: Nous avons maintenant des enfants [séropositifs] qui deviennent des adolescents. Ils peuvent avoir une bonne vie et faire des choses que font les enfants normaux [sic]. 355 Plusieurs médecins disent ne pas comprendre pourquoi ils ne peuvent pas administrer un test de VIH à un nouveau-né sans le consentement de sa mère. Comme l'exprimait un pédiatre new-yorkais, si je pense qu'un enfant a la syphilis ou la gonorrhée, je peux lui faire un test. Si je crois qu'un enfant est victime d'abus, je peux l'envoyer à l'hôpital pour 3 jours. Mais si je soupçonne qu'un enfant a l'infection à VIH, ça peut me prendre 2 mois avant d'avoir la permission de faire un test. 356 Comme c'est le cas pour les propositions de test de routine ou de test requis du VIH pour les femmes enceintes, la présomption qui sous-tend les propositions de test des nouveaunés est celle selon laquelle on devrait l'intégrer à la routine ou le rendre obligatoire parce que l'on ne peut pas avoir confiance que toutes les femmes agiront dans le meilleur intérêt de leur enfant ou foetus. Ainsi, on prétend que l'État doit avoir le pouvoir d'intervenir dans les soins de l'enfant 3 5 7 L'intervention de l'État pour forcer le traitement médical d'un enfant contre la volonté des parents n'est pas sans précédent au Canada. Bien que les tribunaux aient généralement laissé au jugement des parents la décision sur ce qui contribue aux meilleurs intérêts de la santé de l 'enfant, il arrive à l'occasion qu'un juge intervienne pour imposer un traitement médical. Des tribunaux canadiens ont souvent exercé leur pouvoir de parens patriae — c'est-à-dire le droit inhérent de l'État de s'occuper de ceux qui ne peuvent pas prendre soin d'eux-mêmes — pour ordonner que l'on procède à des transfusions de sang en vue de sauver la vie, en dépit des objections parentales pour des motifs religieux. 358 Ce pouvoir est toutefois étroitement limité: Bien que la portée ... du pouvoir de parens patriae puisse être illimité, il ne s'ensuit aucunement que la discrétion de l'exercer serait elle aussi illimitée. ... C'est un pouvoir discrétionnaire ... qui doit en tout temps être exercé avec 3 ^ 4 J. Stemlight, «Mandatory Non-Anonymous Testing of Newborns for HIV: Should it Ever Be Allowed?», Marshall Law Review, 1994,27: 373, à la p. 381. 3 5 5 P. Hellman, «Suffer the Little Children», New York, 21 février 1994,27, a la p. 30. 356 Ibid., a la p. 29. 3 5 7 Stemlight, jw/ra, note 354, à la p. 381. 3 5 8 Voir par exemple Re K(R) (1987), 79 AR 140 (Family Court). VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail grande prudence, une prudence dont il faut redoubler à mesure que le sérieux de l'aflaire s'accroît.359 Au surplus, le problème demeure que le sérodiagnostic du VIH chez un nouveau-né révèle aussi l'état sérologique de sa mère; les préjudices potentiels sont grands, pour la mère, d'être identifiée séropositive. En outre, le fait de requérir que les nouveau-nés soient tous testés passe à côté du but: Le test des nouveaù-nés signifie que les mères séropositives ont raté une occasion de se prévaloir de traitements pour elles-mêmes ou de prévenir l'infection à VIH chez leurs nouveau-nés. Il n'y a que le test prénatal qui offre cette occasion double.3^0 (4) Conclusion Contrairement au counselling de routine et au test volontaire des femmes enceintes — doublés, au besoin, de traitement volontaire — le test des nouveau-nés ne présente pas l'avantage de réduire de manière importante le risque de transmission verticale.361 Plutôt que d'opter pour le test de routine ou obligatoire chez les. nouveau-nés, il convient d'encourager les femmes enceintes à subir un test volontaire et — si elles sont séropositives — à suivre des traitements qui présentent des avantages pour elles-mêmes et qui peuvent réduire le risque de transmission verticale. Pour les femmes qui ont reçu un sérodiagnostic positif durant (ou avant) la grossesse, ainsi que les femmes qui ont refiîsé le test du VIH pendant leur grossesse mais que leurs médecins considèrent comme vulnérables, on devrait demander leur consentement avant d'administrer le test à leurs nouveau-nés. Les refus devraient généralement être respectés. Le test d'un nouveauté sans le consentement parental peut, toutefois, être justifié de manière exceptionnelle dans certaines circonstances, lorsqu'un tribunal établit que c'est un moyen nécessaire, efficace, et le moins restrictif et le moins envahissant qui soit disponible pour parvenir à l'objectif d'aider cet enfant. Ce pourrait être le cas, par exemple, lorsqu'un médecin a des motifs valables de croire qu'un enfant souffre d'une maladie liée au VIH, quand les états sérologiques des parents et de l'enfant sont inconnus, que les parents refusent de consentir au test, et que la connaissance du sérodiagnostic de l'enfant serait nécessaire pour prendre des décisions sur la manière de traiter de la meilleure façon la condition de l'enfant. 6. Au Canada à l'heure actuelle, le test systématique ou obligatoire des nouveaunés n 'est pas justifié Plutôt, on devrait offrir le test volontaire à toutes les femmes enceintes et, lorsqu'une femme est séropositive, l'encourager à suivre un traitement qui sera bénéfique pour elle et pour réduire le risque de transmission verticale du VIH (voir conclusion 5). Re Eve (1987) 31 DLR 4th 1, à la p. 29. Ammann, supra, note 330, à la p. 84. 3 6 1 Sauf dans la mesure où un test positif peut indiquer un besoin d'interrompre l'allaitement afin de prévenir tout risque ultérieur de transmission, dans le cas où elle.n'a pas eu lieu. 359 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 5. Test des détenus y '. Le test requis ou obligatoire des détenus d'établissements correctionnels et de prisons suscite un débat depuis l'apparition du test de sérodiagnostic du VIH, en 1985. Plus récemment, ce débat a repris, avec la publication d'un rapport du Réseau et de la SCS sur Ie VIH/sida et les prisons. 362 (1) Historique (i) Développements au Canada On s'entend généralement, au Canada, sur le fait que le test non volontaire des détenus contreviendrait aux dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés.363 Sur ce point, la politique carcérale de la province de Terre-Neuve affirme explicitement que: On ne peut forcer quiconque à se soumettre à un test des anticorps au VIH. Un tel test peut seulement être administré par un professionnel de la médecine si le patient accorde un consentement éclairé. Toute tentative de forcer un détenu à se soumettre au test sans son consentement peut non seulement contrevenir à des droits fondamentaux de la personne en vertu de la Charte des droits et libertés (le droit à la «vie, à la liberté et à la sécurité de la personne» et celui d'être «libre de fouille et de saisie abusive») mais aussi être considéré comme une infraction au Code criminel.364 La plupart des organisations canadiennes qui ont analysé les questions soulevées par le test des détenus se sont entendues sur le fait qu'il ne devrait être effectué que sur une base volontaire, avec le consentement éclairé du détenu. Voici un survol des énoncés de politiques et des rapports qui ont abordé ces questions. Association du Barreau canadien - Ontario Dans son rapport de 1986,I'ABC-Ontario est arrivée à la conclusion qu'il ne serait pas légitime d'établir une. distinction entre la population carcérale et d'autres groupes identifiables, aux fins d'un programme de test requis: Indéniablement, la population carcérale en est une à laquelle il serait facile d'administrer ce test, pour des raisons évidentes; mais indépendamment des questions de droits garantis par la constitution, nous rejetons l'idée selon laquelle la facilité de procéder au test justifierait cette enfreinte de l'autonomie individuelle. ... Nous ne croyons d'ailleurs pas que le test requis 3 6 2 It Jttrgens, VIH/sida et prisons: rapport final, Montréal, Réseau juridique canadien VIH/sida et Société canadienne du sida, 1996. 3 ® 3 En réponse à une question du député réformiste Ringma lors d'une audience du Sous-comité parlementaire sur le VIH/sida,.le 26 novembre 1996, le commissaire du SCC a déclaré que le Service avait demandé au ministère de la Justice un avis sur la légalité du test obligatoire des détenus. Il a poursuivi en disant: «L'opinion que nous avons reçu jusqu'à présent est qu'en vertu de la législation générale et de plusieurs articles de la Charte il existe des obstacles potentiels. Nous discutons de nos circonstances particulières avec le Ministère». 3 6 4 Terre-Neuve et Labrador, ministère de la Justice, Adult Corrections Division, Policy Directive 16.40.06, article: Special Health Care Services — HIV/AIDS, révisée le 1 avril 1992. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail dans les prisons soit nécessaire pour protéger la santé publique [références omises].365 Comité consultatif national sur le SIDA En 1988, le CCN-SIDA a conclu que, comme principe général, le test obligatoire ou requis du VIH n'est pas justifié pour les détenus, en soulignant que; [à] l'instar de tous les Canadiens, les droits des personnes incarcérées, dont ceux relevant de la détection du VIH, doivent être respectés sauf lorsque l'incarcération entraîne l'abrogation de ces droits. Au nombre de ces derniers figurent le droit à l'autonomie, à l'inviolabilité et à l'anonymat. À moins qu'il ne soit irréfutablement prouvé qu'une personne incarcérée est susceptible de transmettre le VIH, les risques de transmission du virus au sein des établissements correctionnels ne sauraient justifier une action coercitive de dépistage 3 6 6 Selon le Comité, [fjournir aux personnes incarcérées les moyens d'adopter un comportement responsable-et de se protéger ainsi qu'autrui constitue une obligation, voire un impératif éthique. Il convient donc de veiller à ce que les personnes incarcérées puissent se procurer gratuitement et facilement des préservatifs, qu'elles aient accès à des séances d'éducation et de conseils sur l'infection et ses modes de transmission ainsi qu'au test de détection du VIH sur une base volontaire. Des efforts doivent également être déployés pour les inciter à adopter des comportements! sexuels non contaminants et à éviter de partager leurs aiguilles hypodermiques, le cas échéant.367 Le Comité a cependant reconnu que dans certains cas isolés, le test requis ou obligatoire pourrait être justifié, lorsqu'il constitue le moyen le moins contraignant, le moins envahissant et le plus efficace qui soit d'aider à empêcher qu'une personne n'en expose une autre au risque de transmission du VIH en prison, par la force ou sans son consentement. Société royale du Canada Dans son rapport de 1992, la Société royale a insisté sur le fait que les détenus qui purgent des sentences à causes d'infractions dont on les a reconnus coupables sont condamnés à une perte de liberté mais ne perdent pas pour autant tous leurs droits. Par conséquent, la Société a déclaré que les «droits des détenus de ne pas être soumis au test requis devraient être évalués en vertu des mêmes principes qui s'appliquent aux autres Canadiens» 3 6 8 La Société a souligné que le test volontaire, de l'éducation, du counselling, 365 366 367 368 VIII ABC-Ontario, supra, note 8, à la p. 29. Somerville et Gihnore, supra, note 6, à la p. 60. Ibid. Mackinnon, Cottrelle et Kiever, supra, note 82, à la p. 368. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail des condoms, des programmes de traitement de la toxicomanie et du matériel de décontamination du matériel d'injection devraient être rendus accessibles aux détenus, afin de favoriser chez eux un comportement responsable. Considérant le préjudice qui pourrait être imposé à un détenu stigmatisé, la Société ajoutait que «la confidentialité doit être préservée, dans le milieu correctionnel».369 Elle a conclu que le test requis ne protégerait pas les employés correctionnels, en faisant valoir qu'ils disposent «d'autres moyens plus efficaces de se protéger».370 Commission de réforme du droit de l'Ontario Le rapport de 1992 de la CRDO souligne que ceux qui sont en faveur du test non volontaire des détenus «se concentrent sur la prévention de la propagation de l'infection à VIH par le matériel d'injection de drogue et les agressions sexuelles, ou de détenu à employé par l'exposition au sang ou à des fluides corporels d'un détenu séropositif». Toutefois, la CRDO poursuit en disant ne pas voir clairement «comment l'identification des détenus séropositifs contribuerait de manière importante aux efforts de prévention de la propagation du VIH au sein d'un établissement»371 et a conclu que il n'y a pas d'exception justifiée au principe général qui requiert un consentement volontaire, spécifique et éclairé pour tout test relatif au VIH en ce qui concerne les détenus d'établissements correctionnels. Des campagnes d'éducation ciblées et des programmes axés sur les besoins particuliers des détenus et des employés correctionnels, y compris la disponibilité de condoms et d'eau de Javel, constituent les meilleurs moyens de réduire la transmission dans ce milieu.372 Comité du caucus progressiste conservateur sur la famille L'un des rares documents recommandant le test non volontaire des détenus était publié par le Comité du caucus progressiste-conservateur sur la famille, en juin 1993. En particulier, le Comité a recommandé de «[m]odifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, afin d'obliger tous les détenus de pénitenciers fédéraux dont le dossier fait état d'infractions sexuelles, d'infractions avec violence ou d'infractions relatives aux drogues, à consentir à se soumettre au test des anticorps anti-VIH et à divulguer les résultats du test dans certaines conditions, s'ils veulent être admissibles à une forme quelconque de mise en liberté avant la fin de leur peine».373 Selon le rapport du Comité, les mesures législatives proposées «sont conçues pour protéger la population contre les voies de fait de la part de détenus soiis responsabilité fédérale qui sont dangereux et qui sont infectés par le VIH et de faire en sorte que l'information nécessaire soit facilement accessible aux victimes de voies de fait de ce genre». Les détenus dont les M Ibid. Ibid. 3 7 1 CRDO, supra, note 14, à la p. 55. 372 /Wrf., à la p. 57. 3 7 3 Comité du caucus du-Parti progressiste conservateur sur les questions familiales, Recommendations HIV/AIDS Testing of Federal Prison Inmates on Conditional Release Programs, Ottawa, 8 juin 1993, p. 1. 370 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail for antécédents comprennent des infractions particulières, qui souhaitent être admissibles à une forme quelconque de mise en liberté sous condition, à une libération d'office, à des permissions de sortir sous surveillance ou à des programmes de placement à l'extérieur seraient «tenus de consentir» à subir un test de sérodiagnostic du VIH. Le Comité indiquait également que: [d]onc, ils devraient se soumettre à un test volontaire,374 sinon ils seraient détenus en prison jusqu'à l'expiration de leur peine. De plus, le détenu serait tenu de consentir à la divulgation des résultats de son test, à la discrétion du chef de l'établissement, à un médecin qualifié qui serait obligé au secret. Le consentement s'appliquerait à la divulgation des résultats pour des raisons médicales valables, par exemple, pour protéger la santé physique ou émotive de toute personne qui pourrait être exposée au VIH à la suite d'actes commis par le détenu pendant sa mise en liberté.375 Comité d'experts sur le sida et les prisons En 1994, dans Le VIH/SIDA en milieu carcéral: Rapport final, le Comité d'experts sur le sida et les prisons (CESP) a félicité le Service correctionnel du Canada (SCC) et les systèmes de prisons provinciaux pour leurs politiques et leur pratique de ne procéder au test de sérodiagnostic du VIH que lorsqu'il est volontaire. De plus, le CESP s'est fortement opposé à toute proposition de test requis ou obligatoire de détenus ou de groupes donnés, au sein des détenus d'établissements correctionnels fédéraux, en tant que préalable à la libération sous condition ou à toute autre forme de libération. Le CESP s'est dit inquiet que «les avantages de tels tests sont très limités et très discutables, alors que leurs inconvénients englobent un manquement au droit d'une personne à l'inviolabilité, à l'autodétermination et à l'autonomie, au respect à la vie privée et à la protection des renseignements personnels, ainsi que le risque de traitement discriminatoire et autre traitement préjudiciable». 376 En particulier, le CESP a formulé les recommandations suivantes: 2. (1) Le CESP recommande que, comme c'est le cas à l'extérieur des établissements correctionnels, les détenus des établissements correctionnels fédéraux aient la possibilité de subir le test de détection des anticorps anti-VIH, à leur propre demande. 3 7 4 L'expression «test volontaire» n'est pas appropriée dans ce contexte. Tout test constituant une condition préalable que doit remplir un détenu pour être admissible à une mise en liberté sous condition, à une libération d'office, à des permissions de sortir sous surveillance ou à des programmes de placement à l'extérieur est, en fait, un test requis, voire une forme camouflée de test «obligatoire». 3 7 ^ Comité du caucus du Parti progressiste conservateur, supra, note 373, à la p. 2. 3 7 6 Service correctionnel du Canada, VIH/SIDA et prisons: Rapport final du Comité d'experts sur le SIDA et les prisons, Ottawa, ministre des Services et Approvisionnements Canada, 1994, à la p. 33. Cette question est abordée plus en détail dans le document sur la Communication de renseignements médicaux sur les détenus: Analyse juridique et éthique, dans Service correctionnel du Canada, VIH/SIDA et prisons: Documentation, Ottawa, ministre des Services et Approvisionnements Canada, 1994, annexe 7. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (2) Ces tests devraient toujours être conformes à la volonté du détenu, c'est-à-dire avec son consentement explicite, et devraient toujours être précédés et suivis.de séances de counselling et d'éducation. (3) Tous les détenus devraient être informés qu'ils ont la possibilité de subir le test de détection des anticorps anti-VIH, en particulier au moment de leur admission en prison, mais aussi pendant leur incarcération, peu importe qu'ils aient été ou non exposés au VIH (c'est-à-dire qu'ils se soient adonnés ou non à des «activités à risque élevé»). (4) Tous les détenus devraient pouvoir subir le test de détection des anticorps anti-VIH auprès du personnel médical du SCC, ou auprès du personnel d'un centre de soins primaires indépendant du SCC, ou d'une clinique communautaire indépendante. (5) Tous les détenus devraient avoir la possibilité de subir des tests anonymes. Le SCC a accepté ces recommandations. Néanmoins, en date de mars 1997, le test anonyme n'avait toujours pas été rendu accessible aux détenus.377 Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique En 1996, le rapport sur le VIH/sida dans les prisons, publié par le Projet conjoint Réseau/SCS sur les questions d'ordre juridique et éthique, a félicité le SCC pour sa décision de rendre le test anonyme disponible pour les détenus des établissements fédéraux, mais a incite le Service à passer à l'action pour remplir sa promesse. Le rapport soulignait que: Une fois réellement implanté, le dépistage anonyme du VIH pour les détenus des prisons fédérales permettra aux détenus qui ne voulaient pas passer de test de dépistage, par peur que leur résultat soit divulgué, de se faire tester sans crainte. Le rapport déclarait ensuite que: Pour les mêmes raisons, le dépistage anonyme devrait être offert aux détenus des prisons provinciales. En parallèle, il est important que les tests offerts par le personnel de santé des prisons fédérales et provinciales soient plus facilement accessibles et mieux acceptés par les détenus, via la possibilité de tests non-nominaux, la formation du personnel de santé en matière de conselling pré-/post-test, et l'amélioration de la protection de la confidentialité des renseignements médicaux.378 377 378 Pour plus de détails, voir Jûrgens, Rapport final, supra, note 362, aux p. 14-17. Ibid., à la p. 110. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (ii) Développements internationaux On n'a que rarement proposé, et jamais adopté, le test requis ou obligatoire des détenus au Canada, mais il a été adopté par certains systèmes carcéraux aux États-Unis et ailleurs. Par exemple, le US Federal Bureau of Prisons administre le test à certaines classes de détenus, y compris une sélection au hasard de 5% des détenus à l'admission, tous les détenus qui participent à des activités communautaires et tous les détenus au moins 60 jours avant la libération. Les prisons américaines qui font subir le test aux détenus appliquent généralement une politique «cas par cas» de ségrégation pour les détenus qui reçoivent un sérodiagnostic positif. Certaines prisons n'isolent que les détenus qui ont des symptômes de maladie liée au VIH. Très peu de prisons isolent tous les détenus séropositifs. 3 7 9 De telles mesures coercitives n'ont été adoptées que par un nombre minime de systèmes correctionnels et elles ont été critiquées presque à l'unanimité. En particulier, les Directives de l'OMS sur l'infection à VIH et le SIDA dans les prisons déclarent que «[l]e dépistage obligatoire de l'infection à VIH chez les détenus est contraire à l'éthique et inefficace, et devrait être interdit», en ajoutant que: Le dépistage volontaire de l'infection à VIH devrait être mis à la disposition des détenus, s'il est déjà offert à l'ensemble de la population, et devrait s'accompagner de l'octroi de conseils pré- et post-test. Il'ne devrait être entrepris qu'avec le consentement éclairé de l'intéressé. Un appui devrait être offert aux détenus lors de la notification des résultats des examens et dans la période qui s'ensuit.380 De plus, il importe de remarquer que certains systèmes correctionnels qui avaient adopté des mesures coercitives — comme le test non volontaire et, à l'occasion, la ségrégation — au cours des années 1980, les ont abandonnées entre-temps, reconnaissant qu'elle sont coûteuses et inefficaces. (2) Situation actuelle Dans tous les systèmes correctionnels au Canada, le test du VIH n'est effectué que de manière volontaire. L'appui à cette politique est quasi unanime. Pourtant, il y a eu de temps en temps des appels au test requis ou obligatoire pour les détenus. Récemment, le député réformiste Art Hanger et le président du syndicat des gardiens de prisons du Québec Jorge Escola ont soutenu que, plutôt que de donner accès aux détenus aux mesures qui leur permettraient de se protéger contre la transmission du VIH en prison — comme des condoms, de l'eau de Javel, des programmes d'entretien à la méthadone et la provision de matériel d'injection stérile — on devrait leur faire subir un test requis ou obligatoire du VIH afin de les,isoler s'ils sont séropositifs.381 Voir CRDO, supra, note 14, aux p. 54-55, avec références. OMS; Directives de l'OMS sur IHnfection à VIH et le SIDA dans les prisons, Genève, OMS, 1993. 3 8 1 A. Noël, «Guards Urge Mandatory Blood Tests to Combat AIDS in Prisons», The Gazette, 21 septembre 1996, à la p. A6; «Give Inmates Needles, Study Says», The Globe and Mail, 18 septembre 1996. 379 380 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (3) Évaluation Comme mentionné précédemment, lorsque l'on réfléchit à toute politique sur le test il est fondamental de s'interroger sur les raisons d'effectuer le test et sur l'utilité escomptée de ses résultats. Les personnes qui sont en faveur du test requis ou obligatoire pour tous les détenus prétendent que cette mesure permettrait aux systèmes correctionnels de: • connaître exactement le nombre de détenus qui vivent avec le VIH/sida; • offrir à ceux qui vivent avec le VIH/sida les soins, le soutien et les traitements nécessaires; • protéger le personnel et les autres détenus contre la transmission du VIH en prison; • protéger des tiers contre la transmission du VIH, comme les conjoints et d'autres gens avec lesquels un détenu pourrait avoir des contacts après sa libération de prison. / (!) Nombre de détenus vivant avec le VIH et le sida Le consénsus est presque unanime au Canada, sur le fait que nous avons déjà, et depuis plusieurs années, suffisamment de preuves que le VIH est un problème grave dans les prisons. Au moins sept études ont été menées sur la séroprévalence du VIH parmi des populations incarcérées, montrant des taux de séroprévalence situés entre 1% et 7,7% — donc au moins 10 fois supérieurs à ceux de la population en général. 382 Il n'est pas nécessaire que les systèmes correctionnels connaissent exactement le nombre de détenus vivant avec le VIH/sida: (1) ils disposent déjà de statistiques qu'ilstiennentà jour, sur les détenus qui ont fait connaître leur état sérologique aux services médicaux; (2) les études de séroprévalence ont démontré l'ampleur du problème; et (3) on a suffisamment de données pour constater que le nombre de détenus vivant avec le VIH/sida continuera d'augmenter, en particulier à causé de la progression de l'épidémie parmi les UDI, dont plusieurs passent plusieurs années de leur vie en prison 3 8 3 De plus, même si l'on avait besoin de renseignements supplémentaires sur la prévalence du VIH dans les prisons au Canada, il serait moins envahissant et plus efficace de procéder à des études anonymes non reliées qui soient convenablement élaborées, plutôt qu'au test requis ou obligatoire de tous les détenus. 3 8 2 Voir par exemple, C. Hankins et .coll., «Prior Risk Factors for HIV Infection and.Current Risk Behaviours Among Incarcerated Men and Women in Medium-Security Correctional Institutions - Montréal», Journal canadien des maladies infectieuses, 1995, 6 (suppl. B): 31B; P. Ford et coll., «Seroprevalence.in a Male Medium Security Penitentiary - Ontario», Relevé des maladies transmissibles au Canada, 1994, 20(6): 45-47; D. Rothon et coll., «Prevalence of HIV Infection in Provincial Prisons in British Columbia», Journal de I 'Association médicale canadienne, 1994, 151(6): 781-787; L. Calzavara, «Preliminary Results from an Anonymous Unlinked HIV Seroprevalence Study of Inmates in Ontario», dans SCC, Documentation, supra y note 376. 3 8 3 JQrgens, Rapport final, supra, note 362, à la p. 35. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (ii) Soins, soutien et traitement des détenus vivant avec le VIH ou le sida H ne peut y avoir aucun doute que les systèmes correctionnels ont une obligation de prodiguer aux détenus connus comme vivant avec le VIH ou le sida (et qui demandent des soins, du soutien et des traitements) des services de santé qui sont équivalents à ceux disponibles hors des prisons.384 Par ailleurs, il n'y a aucun doute non plus sur le fait que les détenus ont le même droit que les gens de l'extérieur de refuser un traitement. Bien que les détenus devraient être encouragés à se porter volontaires au test et, s'ils sont séropositifs, à se prévaloir des soins et des nouveaux traitements qui existent, il n'y a aucun besoin d'imposer un test requis afin de leur rendre disponibles ces soins et traitements. La décision de subir un test et de suivre un traitement appartient à chacun, et la meilleure façon d'encourager les détenus à prendre cette décision consiste à assurer que — s'ils sont séropositifs — ils ne subiront pas de discrimination et auront accès à des soins, du soutien et des traitements équivalents à ceux disponibles dans la communauté. (iii) Protection du personnel et des détenus Le simple fait de mettre en oeuvre le test requis ou obligatoire des détenus ne servirait pas à protéger le personnel ou les détenus contre la transmission du VIH en prison. Les partisans de telles mesurés • considèrent habituellement que les résultats du test devraient être communiqués à certains des employés, ou à tous, de manière à ce que le personnel puisse (1) mieux se protéger et (2) prendre les mesures appropriées s'ils ont été exposés au sang ou à des liquides corporels d'un détenu connu comme étant séropositif; • soutiennent parfois que les résultats devraient aussi être communiqués aux autres détenus, ou du moins aux partenaires de cellule, afin que les détenus puissent (1) mieux se protéger et (2) prendre les mesures appropriées s'ils ont été exposés au sang ou à des liquides corporels d'un détenu connu comme étant séropositif; • prétendent parfois que, dans le but de réduire le risque de transmission du VIH derrière les barreaux, on devrait isoler de la population générale tous les détenus qui reçoivent un sérodiagnostic positif au VIH. Ni la communication des résultats de tests au personnel et aux autres détenus, ni la ségrégation des détenus séropositifs ne sont cependant justifiées: Dans les établissements correctionnels fédéraux, la divulgation de renseignements médicaux personnels sans le consentement de la personne est rarement justifiable. Dans la majorité des cas, une telle communication ne peut être considérée comme nécessaire, et son efficacité est contestable. Elle semble souvent contreproductive ou préjudiciable, et les inconvénients sont de loin supérieurs aux avantages, réels ou possibles, qui pourraient en résulter. 384 Voir par exemple, SCC, Rapport final, supra, note 376, aux p. 108-110; Jttrgens, supra, note 362, aux p. 9096 et 122-123. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Les mesures susceptibles d'être prises afin d'empêcher l'exposition au VIH et l'infection doivent l'être, peu importe si le personnel, le directeur de l'établissement ou les détenus savent si le détenu ou le membre du personnel est infecté ou non par le VIH. Si l'on veut prévenir la transmission du VIH dans les établissements correctionnels, il est essentiel d'informer le personnel et les détenus sur les précautions pouvant contribuer à cette prévention, et de mettre à leur disposition les moyens nécessaires. La divulgation ne sera justifiée que rarement, dans des cas exceptionnels, lorsqu'une évaluation individuelle indique que cette communication est nécessaire, susceptible d'être efficace et qu'elle constitue le moyen le moins intrusif et le moins restrictif possible pour prévenir des préjudices qui ne peuvent l'être autrement. Dans tous les autres cas où la divulgation est demandée, d'autres moyens disponibles s'imposent, qui seraient moins dommageables et plus susceptibles d'être efficaces.385 Cette conclusion demeure valide. Dans les prisons comme à l'extérieur, il existe des situations où la communication de renseignements médicaux confidentiels à un tiers peut être justifiée. Toutefois, ce sont des situations exceptionnelles qui, comme le CESP l'a souligné, doivent être clairement définies en collaboration avec des détenus et des experts indépendants.386 Ségrégation de détenus La ségrégation de tous les détenus vivant avec le VIH ou le sida afin de réduire le risque de transmission du VIH derrière les barreaux n'est pas justifiée non plus.: Il est clair qu'une telle mesure n'est pas nécessaire, puisque la grande majorité des détenus séropositifs ne présente aucun danger pour le personnel ou les pairs. Ceci a été réaffirmé dans un jugement de la Cour de l'Ontario qui a déclaré que la ségrégation pourrait être justifiée lorsque le comportement pourrait exposer autrui air VIH, mais que la ségrégation d'un détenu simplement en raison de sa séropositivité'n'est pas justifiée. 387 (iv) Protection de tiers Cette question est similaire à la précédente. Dans certains cas exceptionnels, la divulgation de la séropositivité d'un détenu à un tiers peut être justifiée, 388 mais, dans l'ensemble, ceci n'offre pas de justification pour le test requis ou obligatoire de tous les détenus. 385 Communication de renseignements médicaux sur les détenus: Analyse juridique et éthique, Amg SCC, Documentation, supra, note 376, aux p. 161-162. 386 SCC, Rapport final, supra, note 376, à la p. 45 (Recommandation 3.(5)); cette recommandation a été réitérée dans Jûrgens, Rapport final, supra, note 362, à la p. 110 (Recommandation 33). 3 7 ? Ratte v. Kingston Penitentiary (Warden), Ontario Judgements [1991] O.J. no .1745 (Cour de justice de l'Ontatio - Division générale). Pour plus de détails, voir SCC, Documentation, supra, note 376, Annexe 4: Examen de la jurisprudence canadienne. 3 8 8 Dims certains cas, les responsables provinciaux de la santé publique devraient être impliqués. Si la notification d'un partenaire devient nécessaire, ce sont eux, plutôt que les systèmes correctionnels, qui devraient y procéder. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (4) Conclusions Comme le déclarent les Directives de l'ONUsur le VIH/sida et les droits de l'Homme: [i]l n'y a aucun motif de santé publique , ou de sécurité de soumettre les prisonniers à un test obligatoire de dépistage du VIH, ni de priver ceux qui en sont atteints de l'accès à toutes les activités que sont autorisés à exercer les autres détenus.389 Les détenus, comme tous les Canadiens, devraient être encouragés à subir un test volontaire de sérodiagnostic du VIH, avec leur consentement éclairé et spécifique, ainsi qu'en présence de counselling pré- et post-test et de garanties sur la confidentialité du résultat du test. D est nécessaire de reconnaître que, dans les prisons, les inconvénients du test peuvent être d'une importance particulière à cause du grand potentiel de stigmatisation et de discrimination. Bien que la situation dans les prisons canadiennes se soit améliorée sur ce point, il reste encore beaucoup à faire afin que les avantages du test pour les détenus soient accrus tout en réduisant les inconvénients possibles. De toute évidence, les individus qui prônent un test pour un test et pour se montrer «durs avec les. prisonniers» n'aident pas ce processus. En outre, les systèmes correctionnels doivent éduquer le personnel et les détenus sur le fait que (1) le test requis ou obligatoire, de pair avec la divulgation des résultats et/ou la ségrégation, n'est pas nécessaire à leur protection et que (2) l'application des précautions universelles les protégera bien mieux. 7. Il n 'existe pas de justification de santé publique ou de sécurité pour l'imposition dut est requis ou obligatoire aux détenus. Plutôt, il est nécessaire que les systèmes correctionnels rendent le test anonyme disponible pour les détenus,390 et rendent plus accessibles et acceptables pour eux le test qui est offert par le personnel des services de santé, par l'offre du test non nominatif, la formation du personnel médical de prison en matière de counselling pré- et post-test, l'amélioration de la protection de la confidentialité des renseignements médicaux, et par des dispositions assurant que les détenus séropositifs ne subiront pas de discrimination indue et auront accès aux soins, au soutien et aux traitements qui sont offerts à l'extérieur,. 3 8 9 ONUSIDA, Directives de l'ONU sur le VIH/sida et les droits de l'homme, supra;.note 92, à la p. 17 [du texte anglais]. 3 9 0 Cependant, puisque les détenus ne sont pas «chez eux» et n'ont pas accès au counselling et aux autres services de soutien disponibles hors des prisons, les trousses de test à domicile ne devraient pas être rendues accessibles en prison. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 6. Test des personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle La question de savoir si • des personnes accusées d'agression sexuelle et • des personnes reconnues coupables d'agression sexuelle devraient ou non être soumises au test obligatoire de sérodiagnostic du VÏH est fortement débattue et a reçu une attention marquée des médias, ainsi que dans les discussions de la communauté et les débats politiques au Canada et ailleurs. Peu de sujets sont aussi bouleversants sur le plan émotif que le VIH et l'agression sexuelle.391 On a dit que «[l]a question du test pour les agresseurs sexuels est si chargée que la plupart des groupes qui ont dû l'aborder — législateurs, juristes, responsables de la santé publique, défenseurs des droits des victimes et intervenants dans la lutte anti-sida — n'ont réussi qu'à proposer des fondements incomplets et parfois confus pour expliquer leur position.392 (1) Historique (i) Développements au Canada La plupart des organisations et personnes qui ont analysé les questions soulevées par le test des agresseurs ou accusés d'agression sexuelle ont affirmé que le test obligatoire ne serait pas justifié. Certains ont toutefois soutenu que «le test du VIH est adéquat pour les accusés ou les violeurs coupables»393 et que <<[p]eut-être que la loi [au Canada] a besoin d'être modifiée» pour autoriser le test.394 Nous présentons ci-dessous un sommaire des énoncés de politiques, rapports, articles et cas de jurisprudence canadienne sur cette question. Comité consultatif national sur le SIDA En 1987, le CCN-SIDA s'est prononcé sur une proposition «que les personnes reconnues coupables d'agression sexuelles et susceptibles de transmettre l'infection à VIH subissent un test obligatoire de la présence d'anticorps au VIH». 395 La proposition a été rejetée. Le CCN-SIDA a plutôt énoncé et adopté deux résolutions en faveur du test volontaire des personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle: P.H. MacDonald, note, «AIDS, Rape, and the Fourth Amendment Schemes for Mandatory AIDS Testing of Sex Offenders», Vanderbilt Law Review, 1990,43: 1607-1636, à la p. 1607. 3 9 2 J. Hoffinan, «AIDS and Rape. Should New York Test Sex Offenders?», The Village Voice, 12 septembre 1989, 35-41, p. 36. 3 9 3 «Nightmares of Uncertainty: HIV Test is Proper on Accused or Convicted Rapists», The Gazette, 10 janvier 1993. 3 9 4 B. Friedman, ((AIDS and Rape», The Gazette, 7 novembre 1992, à la p. B6. 3 9 5 Rapporté dans C. Hankins, «AIDS and the Correctional System», SIECCAN Journal, 1988, 3(4): 43-46, à la p. 45. 391 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Le CCN-SIDA recommande fortement que la recherche de .Panti-VIH soit volontaire pour les personnes reconnues c o u p a b l e s d'une forme d'agression sexuelle susceptible de transmettre l'infection à VIH, et que les résultats de l'épreuve soient traités en toute confidentialité - exception faite de leur divulgation à la victime. Le CCN-SIDA recommande fortement que la recherche de l'anti-VIH soit volontaire pour les personnes accusées d'avoir commis une agression sexuelle susceptible de transmettre l'infection à VIH, et que les résultats de l'épreuve soient traités en toute confidentialité - exception faite de leur divulgation à la yictime.396 R c. Beaulieu Dans R c. Beaulieu, le juge Roberge a déclaré qu'un homme accusé d'agression sexuelle ne pouvait pas être forcé à subir un test des anticorps au VIH. 397 L'accusé dans cette affaire était en permission d'un jour de l'établissement de Cowansville. L'agression sexuelle aurait eu lieu en septembre 1992 dans un presbytère voisin. La victime, Margo B., travaillait au presbytère comme secrétaire, était mariée depuis 25 ans et mère de 3 enfants de 18 à 24 ans. Dans le cadre de l'enquête préliminaire, le Procureur général a demandé au juge"d'ordonner un test de sérodiagnostic du VIH de l'accusé parce que la femme craignaient d'avoir été infectée par le VIH. Dans son affidavit, la femme a déclaré que: • puisqu'il était possible qu'elle fut infectée par le VIH par l'agression sexuelle et puisqu'elle devait attendre au moins 3 mois avant de ne pouvoir déterminer si elle l'avait contracté, elle et les membres de sa famille faisaient l'objet de discrimination; • sa vie personnelle et sa relation avec son mari et ses enfants étaient perturbées suite à cette agression sexuelle; • si l'accusé était forcé de subir un test du VIH à intervalles réguliers, elle serait dans une meilleure position pour déterminer si elle avait contracté le VIH; et • elle avait le droit de savoir si au cours de l'agression l'accusé lui avait transmis le VIH ou une MTS. 3 9 8 Le procureur a reconnu que sa demande était fort inusitée et que le Code criminel ne l'autorisait pas à formuler une telle requête. Il fondait sa demande sur un article de la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels, en vertu de laquelle «la victime d'un acte criminel a droit d'être traitée avec courtoisie, équité, compréhension et dans les respects de sa dignité et de sa vie privée». 399 Le juge a toutefois statué qu'il n'était pas de son CCN-SIDA, supra, noie 1, aux p. 42-43. R c. Beaulieu, juge Yvon Roberge, C.Q. Bedford (Cowansville) 455-01-000963-920, 1992-11-03, jugement no 92-1769 (Cour du Québec). 398 /*itf,p.3. 3 9 9 RSQ, c. A-13.2, art 2 et 3 396 397 144 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail recours d'autoriser le procureur à intervenir au nom de la victime, dans le cours d'une affaire criminelle et de demander à ce que l'accusé subisse un test, en jugeant que le procureur n'avait pas le pouvoir de déposer une telle requête. Le juge a déclaré que même si la loi permettait au procureur de faire cette demande au nom de la victime il faudrait rejeter cette demande puisque «ni la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels ni quelque autre loi n'autorise» que l'on impose un test de sérodiagnostic aux auteurs de crimes sexuels. 400 Le juge a fait référence au Code civil du Québec et aux chartes canadienne et québécoise, qui protègent le droit des individus à la sécurité de la personne et celui de refuser toute intervention médicale. Le juge a cité un jugement de la Cour suprême du Canada dans l'affaire R v Dyment, où le juge La Forest, au nom de la majorité, a statué que «l'utilisation du corps d'une personne, sans son consentement, en vue d'obtenir des renseignements à son sujet, constitue une atteinte à une sphère de la vie privée essentielle au maintien de sa dignité humaine».401 Le juge La Forest avait continué en se disant d'avis que «la protection accordée par la Charte va jusqu'à interdire à un agent de police, qui est mandataire de l'État, de se faire remettre une substance aussi personnelle que le sang d'une personne par celui qui la détient avec l'obligation de respecter la dignité et la vie privée de cette personne».402 Dans un autre jugement, le juge J.A. Angers, à la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, a statué que «le fait de prendre des parties du corps d'une personne, en l'absence de législation qui autorise de tels actes, contrevient au droit à la sécurité de la personne et constitue une saisie non justifiée». 403 Plus tard, le prévenu a été reconnu coupable d'agression sexuelle infligeant des lésions corporelles et a été condamné à un emprisonnement de 12 ans. Le juge de première instance a rejeté une deuxième requête pour que l'accusé soit soumis au test, mais apparemment l'accusé a consenti à le subir quand même. Mme Blackburn a elle-même subi plusieurs tests de sérodiagnostic du VIH, dont les résultats furent négatifs. Elle a entrepris par la suite une campagne nationale et a présenté au ministre de la Justice Allan Rock une pétition de 50 000 signatures lui demandant d'amender la loi pour forcer les personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle à subir le test. Rapport du coroner A la fin de 1992, un homme est décédé de maladies liées au sid% 11 semaines après avoir été reconnu coupable d'agression sexuelle contre un garçon de 5 ans. Le coroner montréalais Claude Paquin, qui a pratiqué l'autopsie du défunt, a déposé un rapport dans lequel il recommande le test obligatoire des personnes reconnues coupables d'agression sexuelle, selon lequel les deux motifs d'une telle mesure seraient de: • 400 401 402 403 «prendre les mesures appropriées afin que la maladie ne se propage pas dans les centres de détention»; et R c. Beaulieu, supraf note 397, à la p. 8. R v Dyment, [1988] 2 R.C.S. 417, aux p. 431-432. J6ù/., à la p. 432. R v Legere, [1989] 43 C.C.C. (3d) 502, à la p. 513. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail permettre «aux victimes d'agression sexuelle de savoir si elles ont pu contracter la maladie».404 R a J.P.B. R c. J.P.B. 4 0 5 est la première affaire au Canada dans laquelle un tribunal à ordonné que l'auteur d'une agression sexuelle subisse le test de sérodiagnostic L'accusé a été reconnu coupable d'agression sexuelle après avoir eu des rapports sexuels avec un jeune de 14 ans qui était sous l'effet de drogue. Au moment du prononcé de la sentence, l'avocat de l'accusé a fait savoir que son client était disposé à subir un test de sérodiagnostic du VIH. Néanmoins, après le procès, le tribunal a rendu une ordonnance en vertu de laquelle l'accusé devait dans un délai d'un mois, fournir un échantillon suffisant de son sang à un médecin pour une analyse qui permettra de déceler la présence du VIH. Les résultats du test, qu'ils soient positifs ou négatifs, seront communiqués sans délai à la victime en l'espèce. D'après le tribunal, cette mesure était nécessaire pour que la «victime ne soit pas tenue en otage, sur le plan émotif, de la bonne volonté de l'accusé et de ses engagements». Le juge Bourassa a fait une distinction avec l'affaire R c. Beauiieu, faisant remarquer qu'aucun des facteurs qui entraient en jeu dans cette affaire n'était présent en l'espèce. Il a fait l'analogie avec le prélèvement obligatoire de sang dans les affaires d'ivresse au volant et, bien qu'il ait admis que «le législateur n'a peut-être jamais envisagé que l'on ait ainsi recours à cet article», il s'est appuyé sur l'article 20(1) de la Loi sur les jeunes contrevenants pour rendre l'ordonnance du test 4 0 6 De l'avis du juge Bourassa, «un test sanguin aidera à dissiper l'anxiété et l'angoisse qui ne cessent de tourmenter la victime». Il a statué que «les importantes considérations d'ordre public que servent le prélèvement non consensuel du sang du prévenu pour le test du VIH et la divulgation subséquente des résultats à un très petit nombre de personnes l'emportent clairement sur les droits du défendeur d'empêcher le prélèvement». Assemblée générale du parti Libéral du Québec A cause de ces affaires, la question du test obligatoire des personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle a fait l'objet d'un intérêt ravivé, en 1993. Lors de l'assemblée générale annuelle du parti Libéral du Québec, tenue à Montréal les 24-25 avril 1993, le parti a adopté une résolution proposant que le gouvernement du Québec entreprenne des démarches auprès du gouvernement fédéral en vue que soit adoptée une loi qui permettrait aux autorités compétentes de forcer un agresseur sexuel à subir le test. Gouvernement du Québec, Bureau du coroner, Rapport d'investigation, Claude Paquin, coroner investigateur, Montréal, 24 novembre 1992. 405 R c. JJ>J$. [1992] NWTJ no 207 (Tribunal de la jeunesse des Territoires du Nord-Ouest). 406 En vertu de l'art 20(1), lorsque le tribunal de la jeunesse reconnaît un jeune coupable d'une infraction, il doit envisager les conditions raisonnables et accessoires à imposer au jeune qui lui semblent souhaitables et dans le meilleur intérêt du jeune et du public. 4 0 4 146 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Comité interministériel sur les droits de la personne et le sida Vu l'intérêt médiatique créé par ces affaires, le gouvernement fédéral a été soumis à de fortes pressions pour réagir aux inquiétudes de Margot B. et d'autres victimes d'agressions sexuelles. Par conséquent, on a créé un Groupe de travail du Comité interministériel sur les droits de la personne et le sida 4 0 7 afin qu'il se penche sur la question du test de sérodiagnostic du VIH pour les personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle et de «déterminer quelles mesures sont appropriées pour s'occuper du VIH dans le contexte des délits sexuels». 408 Dans son rapport du 19 avril 1994, le Groupe de travail: • examine l'état du test de sérodiagnostic du VIH et des traitements, ainsi que les préoccupations des victimes d'agressions sexuelles; • considère les arguments qui vont à rencontre du test obligatoire des personnes accusées d'agression sexuelle; • analyse la question de savoir si le recours au pouvoir du droit criminel pour imposer le test de sérodiagnostic est justifié; • discute de stratégies possibles pour assurer que les victimes d'agressions sexuelles reçoivent de l'aide en rapport avec leurs inquiétudes relatives au VIH. . Le rapport conclut que «l'imposition du test obligatoire de sérodiagnostic du VIH aux personnes accusées d'agression sexuelle n'est pas la façon la plus efficace de réagir aux inquiétudes des victimes», qu'il ne les aidera pas, en bout de ligne, et serait une mesure indue, pour 5 raisons: 409 • il ne procure pas de renseignement opportun ou fiable au sujet du risque que l'infection ait été transmise; • il s'agit d'une approche indue et irréaliste pour réagir aux besoins des victimes d'agression sexuelle; • il perpétue la fausse et dangereuse impression que l'information sur l'état sérologique de l'agresseur est vitale pour la santé de la victime; • il n'aide pas au rétablissement psychologique de la victime; Pour information sur le Comité interministériel, voir Bulletin canadien VJH/sida et droit; 1994, 1(1): 12. Comité interministériel sur les droits de la personne et le sida, Human Rights Issues Relating to HIV Antibody Testing of Persons Accused or Convicted of Sexual Assault, Report of the Working Group on Sexual Assault and HIV Antibody Testing, Ottawa, le Comité, 1994. 4 ® 9 Center for Women Policy Studies, More Harm Than Help: The Ramifications for Rape Survivors of Mandatory Testing of Rapists, Washington (D.C.), le Centre, 1991 (publié à nouveau dans AIDS Reference Guide, Atlantic Information Services Inc., décembre 1992, no 505; et cité dans le rapport du Groupe de travail). 407 4 0 8 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • il crée un dangereux précédent dans l'expansion du test obligatoire à d'autres personnes, en particulier les femmes enceintes et les travailleurs du sexe. Selon le rapport, une victime d'agression sexuelle, plutôt que d'apprendre l'état sérologique de son agresseur, «a besoin de renseignements fiables sur la quéstion de savoir si elle-même a contracté le VIH, et dé recevoir du soutien et de l'aide pour affronter l'incertitude qui accompagne la période fenêtre et pour vivre avec un résultat positif si cela se produit». Par conséquent, le Groupe de travail a conclu que l'accent ne devrait pas être placé sur le test des personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle, mais bien sur la recherche d'autres façons plus pratiques et plus sensibles derépondreaux besoins des victimes de délits sexuels: En tentant d'avoir recours au droit criminel pour contrôler la propagation du VIH, nous devons être prudents afin de ne pas lancer le mauvais message à la société et de ne pas diviser la communauté entre ceux qui vivent avec le VIH/sida et les autres. On devrait plutôt mettre l'accent sur la prestation de counselling adéquat et d'aide pour les personnes qui ont peut-être été exposées, et assurer que les auteurs de délits sexuels violents soit traduits en justice pour les infractions qui sont définies par le Code criminel. Le Groupe de travail a recommandé que Santé Canada, le ministère de la Justice et Condition féminine Canada examinent «la possibilité de développer, en consultation avec les organismes non gouvernementaux qui sont impliqués, un modèle de meilleures pratiques en matière de counselling, de soins à court et long terme, traitements et autres services qui devraient être disponibles pour les victimes d'agression sexuelle», notamment les options suivantes: • accès au test dé sérodiagnostic anonyme et à du counselling, pour les victimes, effectué par du personnel qualifié des centres de crise pour les délits sexuels ou d'autre type d'établissement; • étude de la possibilité de rendre disponible le test de réaction en chaîne à la polymérase, pour les victimes, afin qu'elles puissent savoir en quelques jours si oui ou non elles ont contracté le VIH; et élaboration d'un plan de mise en oeuvre de cette proposition; • accès à la zidovudiné en prophylaxie et à d'autres antiviraux, pour les victimes, accompagné de counselling sur l'efficacité incertaine; • sensibilité à la culture et à la diversité sociale dans la prestation de counselling, test et services de soutien; et • assistance à la formation concernant le VIH/sida à l'intention du personnel des centres de crise et d'autres professionnels qui sont en contact avec des personnes qui ont subi une agression sexuelle. 148 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Le ministre de la Justice, Allan Rock a accepté les conclusions présentées dans le rapport du Groupe de travail, se disant lui-même convaincu qu'on ne gagnerait rien à forcer le test obligatoire des auteurs d'agressions sexuelles. L'affaire Bernardo La juge Macdonald, de la Cour de l'Ontario, division générale, a ordonné le 23 septembre 1996 que Paul Teale, également connu sous le nom de Paul Bernardo, subisse à la demande de six de ses victimes de viol des tests du VIH et d'autres maladies transmises sexuellement:410 Aucun avocat ne représentait Teale pour s'opposer à l'ordonnance. Les requérantes ont présenté une requête pour obtenir une ordonnance, conformément aux paragraphes 105 (1), (2) et (3) de la Loi sur les tribunaux judiciaire5411 et aux règles 33.01 412 et 33.06 des Règles de procédure crn/e, exigeant que un praticien de la santé fasse subir à Teale un examen physique incluant tous les tests nécessaires pour déterminer si le défendeur, Paul Teale, est infecté par le VIH ou toute autre maladie transmissible sexuellement.413 DÇ v. Paul Bernardo et al., no 93-CQ-46124, décision non rapportée du 23 septembre 1996, Cour de l'Ontario (division générale), j. MacDonald. 4 1 1 Les paragraphes 105 (1), (2) et (3) de la Loi sur les tribunaux judiciaires se lisent comme suit 410 105. (1) Dans le présent article, «praticien de la santé» s'entend d'une personne autorisée à pratiquer la médecine ou la dentisterie en Ontario ou ailleurs, d'un psychologue inscrit aux termes de la Loi sur les psychologues ou d'une personne agréée ou inscrite en tant que psychologue par une autre compétence territoriale. 1989, c. 55, par. 18(1). (2) Si la santé physique ou mentale d'une partie à une instance est mise en cause, le tribunal peut, sur motion, ordonner qu'un pu plusieurs praticiens de la santé lui fassent subir un examen physique ou mental. 1984, c. 11, par. 118 (2); 1989, c. 55, par. 18(2). (3) Si une partie soulève d'abord la question de la santé physique ou mentale d'une autre partie, le tribunal ne rend l'ordonnance prévue au présent article que si l'allégation est pertinente à une question substantielle de l'instance et qu'il existe des motifs suffisants de croire qu'elle est fondée. 412 Les règles 33.01 et 33.06 des Règles de procédure civile se Usent comme suit 33.01 La motion d'une partie opposée visant à obtenir une ordonnance en application de l'article 105 de la Loi sur les tribunaux judiciaires qui autorise l'examen physique ou mental d'une partie dont l'état physique ou mental est en cause dans l'instance est présentée sur préavis à toutes les autres parties. Règl. de l'Ont 560/84, règle 33.01. 33.06 (1) Après avoir effectué un examen, le praticien examinateur rédige un rapport dans lequel il expose ses observations, les résultats des tests qu'il a faits et ses .conclusions, diagnostic et pronostic. Il remet sans délai ce rapport à la partie qui a obtenu l'ordonnance. RègL de l'Ont 560/84, par. 33.06(1); Règl. de l'Ont 711/89, art 21. 413 DC v. Paul Bernardo et a/., no 93-CQ-46124, Avis de motion du 8 septembre 1996, p. 1-2. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Selon l'ordonnance du 23 septembre, des échantillons du sang de Teale devaient être prélevés dans les 45 jours au pénitencier de Kingston, où M. Teale purge un peine d'emprisonnement de durée indéterminée. L'une des victimes, qui poursuit en dommages-intérêts, a déclaré que la peur d'avoir contracté le VIH lui faisait éprouver «d'affreux cauchemars, de l'anxiété, de la dépression, des maux de tête, de l'instabilité émotionnelle, de l'agoraphobie, des difficultés de concentration et une incapacité de travailler» et que tout cela lui avait causé beaucoup de souffrances. 4 1 4 Elle a été attaquée le 22 décembre 1989 et a été diagnostiquée séronégative, mais, selon son avocat, elle désire «faire savoir à qui veut bien l'entendre que les personnes qui sont agressées de cette façon ont sincèrement peur d'avoir contracté ces genres de maladies».415 (ii) Développements aux États-Unis Groupe de travail sur le test du VIH, le counselling et la prophylaxie après l'agression sexuelle En mai 1994, ce Groupe de travail a publié des propositions en vue de l'élaboration de politiques et de principes d'intervention clinique dans le soin des victimes d'agression sexuelle. Entre autres, le Groupe aborde sur les plans de l'éthique, de la santé publique et du droit, la question de la justification d'une politique limitée de test obligatoire des personnes accusées de crimes sexuels 4 1 6 Niveau de risque d'avoir contracté le VIH Le document du Groupe évalue d'abord le niveau de risque que la victime ait contracté le VIH, en concluant que ceci dépend de l'état sérologique et clinique de l'agresseur, du type d'agression et de la fréquence d'agression. Le document explique que la séroprévalence au sein de la population d'individus qui commettent des crimes sexuels est difficile à évaluer. D cite ensuite que le taux d'infectivité du VIH d'homme à femme par contact pénienvaginal a été estimé à moins de 2 contacts sur 1 000, dans deux cohortes d'étude, 417 mais D. Downey, «Bernardo to Take AIDS Test after Victims Make Request», The Globe and Mail. 24 septembre 1996, p. A7. 41 Ibid. 4 1 6 L.O. Gostin et coll., «HIV Testing, Counseling, and Prophylaxis after Sexual Assault», Journal of the American Medical Association, 1994, 271(18): 1436-1444. À moins d'indication contraire, toutes les citations de cette section proviennent de ce texte. 4 1 7 TA. Peterman et colL, «Risk of Human Immunodecifiency Virus Transmission from Heterosexual Adults with Transfusion-Associated Infections», Journal of the American Medical Association, 1988, 259: 55-58; N. Padian, Heterosexual Transmission of HIV, dans N.J. Alexander et coll. (éd.), Heterosexual Transmission of AIDS, New York, Wiley-Liss, 1990, aux p. 25-34. 414 150 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail que des taux plus élevés avaient été rapportés ailleurs.418 La présence de lésions ou de sang peut accroître considérablement la probabilité de transmission. Généralement, le risque de transmission peut varier beaucoup: chez certaines personnes, la transmission a lieu dès la première occasion, tandis que d'autres demeurent séronégatives après des centaines de contacts sexuels non protégés.419 Fardeaux physique et psychologique de Vagression Le document souligne que les victimes s'inquiètent souvent d'avoir contracté des MTS de leur agresseur. Dans l'étude, 40% des victimes ont dit craindre d'avoir contracté le VIH en conséquence du viol. 4 2 0 En général, la «crainte d'avoir contracté une MTS, particulièrement l'infection à VIH, à la suite d'un viol semble constituer un lourd stress qui s'ajoute à ceux de l'incidence, de la prevalence et de la gravité de conséquences psychologiques chez les victimes de viol». Counselling des victimes Le document insiste sur l'importance du counselling pour les victimes d'agression sexuelle, en déclarant que, idéalement, «toutes les victimes d'agression sexuelle recevraient un examen médical, et de l'information et du counselling sur les expositions possibles à toute une diversité de maladies transmissibles, sur le risque de grossesse et d'autres séquelles possibles de l'agression». Test des victimes Selon le document, les victimes d'agression sexuelle ont besoin d'un diagnostic minutieux et d'un suivi sur de multiples conditions cliniques, y compris les tests pour les MTS. On souligne que: • le test volontaire de sérodiagnostic du VIH devrait être offert aux victimes; • de l'information devrait être donnée au sujet des avantages du test anonyme; et • les victimes ont un droit et la capacité de prendre des décisions de manière autonome. Le document poursuit en citant que les nouvelles technologies de diagnostic abrègent la période, après l'exposition, durant laquelle l'infection ne peut pas être détectée. Toutefois, au moment où le texte a été écrit, ces tests n'étaient pas couramment 4 1 8 N.H. Steigbigel et coll., «Heterosexual Transmission of HIV Infection», dans Program and Abstracts of the IVth International Conference on AIDS, 12-16 juin 1988, Stockholm, Suède, abrégé 4057; N. Padian et coll., «Clinical and Immunological Correlates of the Heterosexual Transmission of HTV», dans Program and Abstracts of the 28th Interscience Conference on Antimicrobial Agents and Chemotherapy, 23-26 octobre 1988, Washington, D.C., abrégé 344. S.D. Holmberg et coll., «Biological Factors in Sexual Transmission of Human Immunodeficiency Virus», Journal of Infectious Diseases, 1989, 160: 116-125. 4 2 0 National Victim Center, Crime Victims Research and Treatment Center, National Women's Study, rapporté dans Rape in America: A Report to the Nation, Arlington, VA, National Victim Center, Crime Victims Research and Treatment Center, Dept of Psychiatry and Behavioral Sciences, Medical University of South Carolina, Charleston, 23 avril 1992. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail disponibles dans la plupart des circonstances. Le document conclut que le test périodique amorcé durant les 6 semaines après l'agression peut comporter un certain nombre d'avantages potentiels pour la victime: Il peut alléger le fardeau psychologique des victimes qui se demandent si elles ont contracté l'infection à VIH. La connaissance de leur état sérologique peut permettre aux victimes de prendre des décisions éclairées au sujet de leur santé, de leurs pratiques sexuelles ou de partage de seringue, de leur reproduction, de l'allaitement et de leur rôle de parent Chinûoprophylaode pour l'infection à VIH Au moment où était écrit le document que nous évoquons, il n'y avait par de données montrant clairement l'efficacité de l'administration de zidovudine prophylactique tôt après l'exposition au VIH. Le document concluait: La décision de prendre la zidovudine à la suite d'une agression sexuelle devrait être fondée sur une évaluation du risque d'exposition. L'évaluation du risque devrait considérer des renseignements déjà disponibles sur l'état de l'agresseur, le type d'exposition (la- pénétration anale, vaginale ou orale, et l'éjaculation), le type de blessures et le nombre d'agressions. La victime n'aura presque jamais d'information adéquate permettant de connaître l'état sérologique de l'agresseur tout de suite après l'agression. L'évaluation personnelle de la personne assaillie devrait aussi porter sur la santé reproductive et la capacité de supporter les effets secondaires. Test de l'accusé Dès le départ, le document souligne que le test de l'accusé ne sera pas possible dans la majeure partie des cas, vu la faible proportion d'agresseurs qui sont arrêtés et reconnus coupables rapidement. Par conséquent, «pour répondre aux besoins de toutes les victimes, il faut mettre en oeuvre des systèmes globaux de counselling, de traitement et de test anonyme ou confidentiel pour les victimes, qui leur permettent d'en avoir le cœur net et d'adopter des mesures pour protéger leur santé et celle de leurs proches». Le document se prononce en faveur du test obligatoire dans certains cas, en soulignant que certaines caractéristiques du viol le distinguent d'autres situation d'exposition au VIH: Les personnes qui survivent à une agression sexuelle n'ont d'aucune manière consenti au comportement qui a causé leur potentielle exposition. Etant donné que l'agression est, par définition, coercitive, elle constitue une violation et un préjudice à la victime. Son dénuement de consensus la distingue profondément d'autres expositions potentielles au VIH, y compris les relations sexuelles consensuelles, le partage d?aiguille consensuel et l'emploi volontaire dans un milieu où l'exposition occupationnelle peut se produire. Puisque l'exposition de la victime commence par une faute, l'accusé a envers la victime le devoir de limiter le préjudice lié à l'agression. L'agression sexuelle crée un tort qui se perpétue, incluant la peur continuelle d'infection à " VIH, qui peut retarder ou limiter la guérison. C'est cette nature dynamique et continue du préjudice qui laisse songer que les politiques publiques devraient 152 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail faire tout ce qui est possible pour limiter le tort éventuel et pour protéger la santé dé la victime et celle de(s) partenaire(s) et enfants. Il est fondamentalement injuste de placer sur la victime le fardeau entier de limiter les torts éventuels. Dans le cas d'agression sexuelle, les victimes portent habituellement tout le fardeau de l'angoisse continuelle et de se protéger, ainsi que leurs partenaires et leurs familles. Si le test de l'accusé pouvait limiter le tort éventuel à la victime et alléger le fardeau d'injustice, il y aurait un bon argument en faveur du test non volontaire de l'accusé. Selon le document, les États qui permettent que les victimes soient informées de l'état sérologique de l'agresseur disposent d'au moins quatre options, «qui sont toutes imparfaites»: • ne compter que sur le counselling et le test de la victime; • demander à l'accusé un consentement à subir le test; • procéder au test de l'accusé sans son consentement (test obligatoire), mais seulement après qu'il a été reconnu coupable; et • procéder au test de l'accusé sans son consentement (test obligatoire), avant le jugement, avec des garanties procédurales. On rejette dans le document l'option de se fier au counselling et au test de la personne qui a été agressée, parce qu'elle «ne faitrienpour soulager de l'injustice inhérente à demander que la personne agressée supporte seule l'incertitude prolongée et l'altération possible de plans de vie». On poursuit en rejetant une politique de test volontaire de l'accusé: le test volontaire pourrait offrir les mêmes avantages que le test obligatoire, lorsque l'accusé consent, mais l'accusé a le contrôle sur l'information et il peut ne pas être motivé à aider la personne agressée. Par ailleurs, le document soutient que les élaborateurs de politiques qui privilégient le test forcé devraient: faire face à un dilemme lorsqu'ils déterminent le moment d'imposer le test. Le dilemme provient du lien changeant entre l'utilité de l'information à la personne agressée et l'importance des intérêts privés de l'accusé. Dans la plupart des cas, le meilleur argument en faveur d'une utilité pour la personne agressée de demander le test de l'accusé est liée au fait d'apprendre le résultat du test le plus tôt possible. Administrer le test à l'accusé tard au cours du processus criminel ne contribue pas à aider les personnes agressées parce qu'elles ont déjà porté le fardeau de l'inquiétude. Parallèlement à ceci, l'accusé a davantage de raisons derequérirla protection au début des poursuites. D'un autre côté, le test de l'accusé avant le prononcé de la culpabilité constitue une invasion importante dans l'autonomie et la vie privée de l'accusé sans qu'un procès n'ait établi sa culpabilité. Par conséquent, toute solution aboutit soit à une réduction de l'utilité durenseignementpour la personne qui a été agressée, soit à l'enfreinte des intérêts légitimes de l'accusé. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Le document conclut que l'option de politique qui comporterait les plus grands avantages pour le plus grand nombre de personnes agressées serait de permettre le test avant le jugement de l'accusé, à la demande de la personne agressée. Cependant, des garanties procédurales appropriées devraient être en vigueur afin d'éviter d'imposer le test à des personnes injustement accusées, de limiter la divulgation des résultats et d'empêcher que l'information ne soit utilisée à des fins punitives. Une politique élaborée à cet effet devrait: • autoriser le test avant le jugement, initié à la demande de la personne qui a été agressée; • requérir que la poursuite démontre un motif raisonnable de croire qu'une agression a été commise, que c'est l'accusé qui a commis cette agression, et que l'agression a été d'un type qui peut comporter un risque de transmission du VIH (c.-à-d. qu'un transfert de sang ou de sperme a eu lieu de l'agresseur à la victime, ou que la victime ait eu des blessures graves qui ont été exposées à ces liquides); • autoriser un deuxième test de l'accusé 6 mois après l'agression, si le résultat du premier test avait été négatif, à moins que l'accusé n'ait déjà été acquitté; • communiquer les résultats de tests seulement à la personne agressée et à l'agresseur, mais offrir à ce dernier la possibilité de ne pas en être informé; • protéger la confidentialité du résultat, sauf dans les cas requis pour informer la personne agressée et ses partenaires sexuels ou les membres de sa famille auxquels elle croit devoir le dire afin de protéger leur sécurité, en prévoyant des peines de droit civil pour la divulgation non autorisée à d'autres tiers; et • limiter l'utilisation de l'information obtenue par le test forcé, en faisant que les résultats du test ne sont pas admissibles comme preuve dans la poursuite criminelle ou les poursuites civiles subséquentes [réf. 91]. Afin de protéger l'accusé contre un test inapproprié ou une divulgation non autorisée, les garanties procédurales qui seraient incluses dans cette politique, y compris une audition pour déterminer l'existence d'un motif raisonnable, la divulgation limitée et la confidentialité des renseignements, sont d'une importance particulière et méritent une considération soignée des élaborateurs de politiques et des personnes qui rédigent les textes de loi. 154 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (2) Situation actuelle (i) Canada Tel que mentionné précédemment, le seul tribunal au Canada à s'être prononcé expressément sur cette question, jusqu'à maintenant, a statué qu'une personne accusée d'agression sexuelle ne peut pas, en vertu des lois actuelles, être forcée à subir un test du VIH. 4 2 1 Ceci soulève la question de savoir si l'on devrait modifier la législation pour autoriser le test obligatoire. En ce qui concerne le test de personnes déclarées coupables d'agression sexuelle, l'ordre de la cour qui a exigé que Paul Bernardo subisse un test du VIH n'établit pas de précédent puisque Bernardo ne s'y est pas opposé. Par conséquent, la question de savoir s'il existe un fondement légal permettant de forcer une personne reconnue coupable d'agression sexuelle à subir un test du VIH demeure ouverte. (ii) États-Unis Aux États-Unis, des lois fédérales obligent les États à procéder au test de sérodiagnostic du VIH après la condamnation d'un agresseur sexuel, dans le cadre des dispositions entourant le paiement de 10% des fonds alloués à un État en vertu des programmes de bourses du Bureau of Justice. Les États doivent aussi offrir du counselling à la personne agressée. En 1994, 32 États avaient expressément autorisé le test obligatoire des agresseurs sexuels. Quinze de ces États n'autorisaient que le test après condamnation, cinq n'autorisaient que le test avant l'établissement de la culpabilité, et sept autorisaient les deux. Les provisions de ces lois différaient considérablement sur un certain nombre de facteurs clés: • le stade des procédures auquel l'agresseur peut être testé; • l'étendue des gens auxquels peut être communiqué le résultat de ce test; et • la question de savoir si oui ou non la demande doit venir de la personne agressée. Quatre États offraient également du financement pour le test ou le counselling des victimes.422 (3) Évaluation Le test obligatoire des personnes accusées ou condamnées pour agression sexuelle serait justifié seulement si: 421 422 Voir supra, note 397. Gostin et coll., supra, note 416. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • ses avantages surpassaient ses préjudices et ses méfaits potentiels; et • il constituait le moyen «le moins contraignant, le moins envahissant, le plus susceptible d'être efficace, et raisonnablement disponible» pour accomplir quelconque objectif d'un tel test (i) Objectifs possibles du test obligatoire des agresseurs sexuels Tests des personnes accusées d'agression sexuelle Le test obligatoire des personnes accusées d'agression sexuelle peut poursuivre des objectifs divers. Ceux cités le plus souvent sont de: • protéger la santé de la personne agressée; • protéger la santé de tiers; • offrir de l'aide à la personne agressée. Test des personnes reconnues coupables d'agression sexuelle En plus des mêmes objectifs que nous venons d'énumérer pour le cas des accusés, le test obligatoire des personnes déclarées coupables d'agression sexuelle peut avoir les objectifs suivants: • offrir des renseignements qui sont nécessaires pour prévenir la propagation du VIH dans les prisons; • recueillir de l'information sur l'état sérologique des auteurs de délits sexuels, qui pourrait être révélée à des victimes d'agressions ultérieures en cas de récidive. (ii) Justification du test obligatoire Test des personnes accusées d'agression sexuelle En 1993, Jurgens et coll., ont conclu qu'il est peu probable que le test des personnes accusées d'agression sexuelle accomplisse quelque objectif que ce soit parmi ceux qui sont énumérés ci-dessus. 423 À cette époque, le test n'offrait «que des renseignements incertains et d'une utilité limitée». D'abord, il était peu utile pour protéger la santé de la personne agressée: 23 Voir R. Jûrgens et coll., «Are Compulsory HIV Testing and Disclosure of HIV Status Ever Justifiable? Ethical and Legal Analysis Using Sex Offenders, Health Care Providers, Patients as Examples», présentation par affiche à la Ille Conférence annuelle sur la recherche sur le VIH/sida, Montréal, 13-15 mai 1993. À moins d'indication contraire, toutes les citations des paragraphes suivants proviennent de cette présentation. 4 156 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Il est douteux que la victime ait besoin de ce renseignement pour être capable de décider si elle devrait suivre un traitement à la zidovudine (prophylaxie post-exposition). Si le traitement à la zidovudine offre des avantages, ce qui est pour le moins incertain, il devrait être amorcé dès que possible après l'agression et non pas être retardé jusqu'au moment où l'on recevra le résultat du test. Deuxièmement, les auteurs soutenaient que le test de l'accusé n'offrira pas de renseignéments utiles pour protéger la santé de tiers: Étant donné que la séropositivité de l'accusé ne dira pas à la victime si elle-a été exposée au VIH, la victime devrait s'abstenir de rapports sexuels non protégés qui peuvent transmettre le VIH, après l'agression, peu importe que l'accusé reçoive un sérodiagnostic positif ou négatif. Enfin, les auteurs soutenaient que le test de l'accusé ne contribuerait pas à aider les personnes qui ont subit une agression sexuelle: [le test] peut indiquer précisément si l'accusé était séropositif au moment de l'agression, mais il ne peut indiquer avec aucune certitude qu'il ne l'était pas. Dans certains cas le résultat du test peut être négatif même si l'accusé est infecté et infectieux (c.-à-d. pendant la période fenêtre, avant que les anticorps ne soient détectables). Dans ces cas, la victime serait rassurée à tort. Les auteurs concluent que, en considérant l'incertitude des renseignements que procure le test, et le fait que les seules mesures efficaces et fiables qui s'offrent à la victime sont le counselling, le soutien, l'éducation et possiblement le traitement à la zidovudine, il est peu probable que le test de personnes accusées d'agression sexuelle soit considéré nécessaire. De plus, les auteurs ont affirmé que le test obligatoire des personnes accusées d'agression sexuelle entraînerait des préjudices réels et potentiels pour l'accusé et la société: [p]our l'accusé, les risques et préjudices découlant du test comprennent l'enfreinte de ses droits à l'inviolabilité, à l'autodétermination, à l'autonomie, à la vie privée et à la confidentialité; l'enfreinte de la règle interdisant l'autoincrimination; et le risque de discrimination ou d'autres traitements préjudiciables. Au niveau de la société, il y a un risque que le système légal soit lui-même affecté par le fait de renverser le principe fondamental de la présomption d'innocence et par l'impact plus large lié à des précédents établis par la violation des droits de l'accusé. La plupart de ces conclusions demeurent valides, mais certaines peuvent nécessiter une réévaluation ou avoir été remises en question. En particulier, les avantages de commencer un traitement de prophylaxie post-exposition dès que possible après l'exposition VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail potentielle au VIH sont maintenant reconnus. Toutefois, comme auparavant, là personne agressée ne recevra presque jamais tout de suite après Pincident des renseignements adéquats au sujet de l'état sérologique de l'accusé. La décision d'amorcer la prophylaxie devra se fonder sur l'évaluation du type d'exposition, de la nature des blessures physiques et du nombre d'agressions. Ainsi, le fait imposer le test à l'agresseur ne pourrait pas aider la personne agressée à faire un choix concernant la prophylaxie: le résultat du test arriverait trop tard. Toutefois, le.test de l'agresseur pourrait fournir des renseignements utiles à la décision de cesser la prophylaxie: si la victime apprend que l'agresseur a reçu un sérodiagnostic négatif, elle pourrait arrêter la prophylaxie et éviter les possibles effets secondaires d'un traitement continu avec des médicaments antiviraux. Même si la personne ne peut pas se fier à un résultat négatif unique (il faut s'assurer que ce n'est pas un faux négatif), ceci pourrait offrir un soulagement considérable aux personnes qui subissent des effets secondaires importants. Au surplus, en termes d'avantages du test de l'accusé pour la santé publique, Gostin et coll. ont reconnu qu'un tel test n'est strictement pas nécessaire pour protéger la santé des autres: d'autres options s'offrent aux personnes agressées. Ils ont cependant reconnu que ces autres choix sont plus lourds pour les victimes et impliquent des modifications de comportement importantes, des risques pour les autres (transmission du VTH ou grossesse à la suite d'un usage inadéquat du condom, et effets à long terme inconnus pour les enfants suite à un traitement prénatal à la zidovudine), et certains coûts (personnels ét financiers), y compris la modification des plans de vie (remettre à plus tard le mariage, les relations sexuelles ou la reproduction). Par conséquent, Gostin et coll. ont conclu que «l'équité demande que les risques et le fardeau de limiter les préjudices futurs ne reposent pas uniquement sur la victime». 424 Finalement, Gostin et coll. ont soutenu que, bien que les avantages psychologiques pour les victimes puissent être limités, ils constituent de. sérieux arguments en faveur de l'imposition du test avant le jugement: Même en présence d'une mince possibilité de résultats faussement négatifs ou faussement positifs, la nouvelle devrait procurer un réconfort important à la victime. Bien sûr, si le résultat montre que l'accusé est séropositif la victime pourra subir un stress psychologique supplémentaire. Ce fardeau, bien que lourd, serait porté par un nombre de victimes beaucoup moindre que le nombre qui s'inquiète de l'infection à l'heure actuelle. La connaissance de l'exposition pourrait même permettre aux victimes de commencer à se préparer psychologiquement au résultat de leur propre test. Dans certains cas d'agression sexuelle où l'accusé est arrêté peut après l'incident, le test non volontaire assorti de garanties procédurales et de confidentialité à l'endroit de l'accusé pourrait tempérer l'un des principales conséquences négatives et continuelles de l'agression, la peur et l'incertitude de la victime quant au risque d'avoir contracté le VIH. 424 158 Supra, note 416, à la p. 1439. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Bayer est d'accord: «Le test aide les victimes», dit-il en commentant une étude publiée dans le Journal of the American Medical Association où l'on notait que la santé mentale des personnes agressées était aidée par le test précoce de l'accusé». 425 Pour toutes ces raisons, Bayer et Gostin et coll. ont déclaré que le test obligatoire des personnes accusées d'agression sexuelle est justifié, pourvu que les préjudices de ce test pour l'accusé soient limités autant que possible. Bayer ajoute toutefois que: Il fut un temps où jusqu'à 6 mois pouvaient être nécessaires pour pouvoir déterminer si une personne agressée avait été infectée par le VIH. Maintenant, par l'usage du test de réaction en chaîne à la polymérase,426 le temps d'incertitude est réduit à 2 ou 3 semaines. Ce progrès technologique considérable comporte des implications importantes pour les personnes agressées sexuellement et pour les personnes accusées d'agression sexuelle. Puisque l'objectif du test avant le jugement est de procurer aux victimes un renseignement qui ne serait autrement pas disponible, il serait crucial que l'on procède au test de l'accusé dans les 2 ou 3 premières semaines suivant l'agression. Au-delà de cette période, le test avant le jugement perdrait sa justification.427 Bayer soulève un point important: l'information sur l'état sérologique de l'accusé est beaucoup moins importante pour la personne agressée que ne l'est celle qui concerne son propre état. Encore plus important: le résultat du test de l'accusé n'offrirait aucun renseignement utile pour savoir s'il a transmis le VIH à la personne agressée. Par conséquent, tel que l'a proposé le Comité interministériel [canadien] sur les droits de la personne et le sida, il semble désirable que l'on puisse offrir aux personnes agressées sexuellement un accès précoce au test de réaction en chaîne à la polymérase, ce qui permettrait de procéder à un diagnostic dans les semaines qui suivent la possible. infection.42* Si ce test peut être rendu disponible à ces personnes, le test de l'accusé perd sa justification dès quelques semaines après l'agression. Test des personnes reconnues coupables d'agression sexuelle Le test obligatoire des personnes reconnues coupables d'agression sexuelle a peu de chances d'accomplir quelconque de ses objectifs potentiels suivants: • Premièrement, le test aux fins de protéger la personne agressée ou des tiers, ou aux fins de rassurer la personne agressée, ne sera pas nécessaire dans la plupart des cas. En général, il faut attendre de 8 à 12 mois avant le j ugement. À ce moment, même si le test de réaction en chaîne à la polymérase n'a pas été offert à la personne agressée, elle R. Bayer, «Assault Victims Have Right to Know Attacker's HI.V. Statut», Medical Tribune News Service, 1996. Le test de réaction en chaîne à la polymérase, qui détecte la présence du VIH et non des anticorps anti-VIH, peut déceler la présence quelques semaines après la transmission. 427 Supra, note 425. 428 Supra, note 408. 425 VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail pourrait subir elle-même un test et obtenir une information fiable pour savoir si elle a ou n'a pas contracté le VIH, tandis que le test de l'agresseur n'offrirait pas ce renseignement • Deuxièmement, le test aux fins de prévenir la transmission du VIH dans les prisons n'est pas nécessaire. H ne serait pas efficace pour parvenir à cet objectif:et il existe des mesures moins envahissantes d'y parvenir. Un risque entoure aussi le fait d'administrer un test aux agresseurs sexuels et d'identifier ceux qui sont séropositifs: ceci pourrait accroître leur vulnérabilité en prison. Le test obligatoire de cette population de détenus serait discriminatoire et les stigmatiserait comme des menaces et des sources potentielles d'infection dans les prisons. • Finalement, le test aux fins de recueillir de l'information sur l'état sérologique des agresseurs sexuels afin de la divulguer à d'éventuelles nouvelles victimes ne serait pas justifié. (1) Savoir que l'agresseur a reçu un sérodiagnostic négatif n'offre aucun renseignement sur l'état sérologique au moment d'une agression ultérieure, vu la période fenêtre et le laps de temps écoulé entre le test et l'agression suivante. (2) Savoir que l'agresseur a reçu un sérodiagnostic positif pourrait aider dans la prise de décision relative à la prophylaxie post-exposition, mais seulement si cette information pouvait être mise à la disposition de la victime dans un délai très court suivant l'agression. De tels cas seraient extrêmement rares. (4) Conclusion Le test, à lui seul, pourrait ne pas être bien utile à l'intention des élaborateurs de politiques d'aider les victimes. Il peut procurer un certain soulagement à certaines victimes, mais dés programmes qui comprennent du counselling, le suivi de l'état de santé de la victime elle-même ainsi que l'accent sur leur propre bien-être pourraient s'avérer plus bénéfiques à long terme. Les gouvernements continueront de s'impliquer dans cette question vivement émotionnelle et difficile à résoudre du point de vue juridique. Au moment de déterminer quelles réactions sont préférables, les législateurs pourraient juger bon de consulter des conseillers juridiques, des groupes d'aide aux victimes de viol, d'autres oiganismes communautaires et des employés du secteur de la santé publique.429 La question du test obligatoire de personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle se caractérise souvent par un dilemme entre les droits de la personne accusée et ceux de la personne agressée. Toutefois, la volonté de caractériser le choix de requérir ou non le test de sérodiagnostic des personnes accusées comme étant soit «pro-femme» soit «pro-accusé» tend à obscurcir la complexité réelle de la question ainsi que les besoins L. Bryant, TA. Hooker, «Testing Sex Offenders for HIV», State Legislative Report, 1991,17(7): 1-7, à la p. 5 (Denver. National Conference of State Legislatures). 429 160 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail concrets de la victime d'agression. Ce faisant, on risque d'exploiter les sentiments par ailleurs compréhensibles qu'éprouve la victime — colère, frustration et peur — afin d'appuyer une position qui, en bout de compte, ne l'aide pas. 430 Indéniablement, les personnes reconnues coupables d'agression sexuelle ont commis un acte criminel grave — si le test obligatoire pouvait servir à atteindre un objectif utile pour la victime de l'agression, il pourrait être approprié de considérer que le droit de l'accusé à l'autonomie soit suffisamment subsidiaire. Cependant, comme nous l'avons démontré cidessus, le test obligatoire et la divulgation du résultat à la victime d'agression sexuelle ne comporteraient que peu d'avantages pour elle, voire aucun. Le test d'une personne reconnue coupable d'agression sexuelle ne peut pas apporter d'information utile à la victime. Au moment du jugement, la victime peut savoir si elle est séropositive, en subissant elle-même le test. Par opposition, le test de l'agresseur ne servirait qu'à informer la victime de l'état sérologique de l'agresseur. De la même manière, le test obligatoire des personnes accusées servirait que rarement un objectif utile à la victime. Ceci d'agression sexuelle ne n'est pas la façon la plus efficace de s'occuper des inquiétudes d'une personne agressée sexuellement, quant à la possibilité qu'elle ait été infectée. La victime a besoin d'information fiable sur le fait qu'elle-même ait ou non contracté le VIH, elle a besoin de soutien et d'assistance pour faire face à l'incertitude durant la période fenêtre et à vivre avec un diagnostic positif si c'est le cas. Le test obligatoire va par ailleurs à rencontre des objectifs de santé publique d'encourager le counselling, la prévention et le test volontaires. De plus, il ne respecte pas les principes du droit criminel ou du droit constitutionnel. Alors qu'il s'est avéré passablement efficace en réaction à certaines conduites relatives à la transmission du VIH, le droit criminel actuel ne semble pas constituer l'approche la plus efficace pour s'occuper des inquiétudes des victimes d'agressions sexuelles, en matière de VIH, car si peu d'agressions sexuelles donnent lieu en fiait à des poursuites criminelles.431 En outre, contrairement aux cas de personnes reconnues coupables d'agression sexuelle, les personnes accusées d'agression sexuelles sont innocentes jusqu'au moment où l'on prouve leur culpabilité. Par conséquent, la question de savoir comment le test obligatoire pourrait être pratiqué de manière légale est loin d'être claire. Sans verdict de culpabilité, le test ne pourrait pas être imposé comme une partie de la punition d'une personne Comité interministériel, supra3 note 408. lbid.,à lap. 19. 430 43] VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail accusée, 432 et il est peu probable que les lois sur la santé publique puissent être utilisées pour requérir le test dés personnes accusées.433 À l'instar du Comité interministériel, plutôt que de se concentrer sur la question du test de l'agresseur, il faut examiner la pleine complexité des questions soulevées par l'agression sexuelle au regard du VIH: la société a la capacité et le devoir de mieux s'occuper des besoins des victimes d'agression sexuelle. La tentation est forte de créer des lois qui requièrent le test obligatoire des personnes accusées ou reconnues coupables d'agression sexuelle. Une telle législation recevrait probablement un vaste appui du public et donnerait l'impression que le gouvernement fait un grand geste pour protéger les victimes d'agression sexuelle. En réalité, toutefois, cela nè les aiderait que peu, voire pas du tout, et aurait l'effet de détourner l'attention des problèmes réels et sous-jàcents. Ce qui est nécessaire, plutôt, c'est une réaction gouvernementale qui s'occupe des inquiétudes bien réelles des victimes. Comme déclaré par le Comité interministériel, «il est nécessaire de voir précisément quels besoins des victimes ne sont pas satisfaits et de trouver des façons d'offrir des services de manière efficace au plus grand nombre possible de victimes, pas seulement à celles dont les cas résultent en des poursuites criminelles» 4 3 4 II semble difficile d'établir un fondement constitutionnel pour un mécanisme régulatoire permettant le test de personnes accusées d'agression sexuelle. Si le but d'un tel mécanisme était de fournir le renseignement à la victime pour ses propres fins, mais non pour utilisation dans le procès criminel, il n'est pas clair qu'il puisse être justifié par la compétence en matière de droit criminel, spécialement parce que l'autorisation du test serait alors donnée dans le cadre d'une procédure distincte, longtemps avant le procès criminel et l'établissement de culpabilité. La compétence du droit criminel ne pourrait pas servir à réglementer une activité ou un état de fait qui n'est pas en soi un crime. Ceci laisse entendre que les gouvernements provinciaux, dans l'exercice de leurs pouvoirs législatifs en vertu de l'article 92 de la Loi constitutionnelle de 1867, seraient mieux placés que le gouvernement fédéral pour créer un mécanisme régulatoire relatif à l'autorisation d'imposer le test 4 3 3 Ces b i s sur la santé publique, généralement, ne permettent d'imposer un test ou un traitement médical que danc des circonstances où il y a une menace importante pour la santé et la sécurité publiques. Il est improbable que le simple fait d'être accusé d'agression sexuelle constitue un motif suffisant pour établir qu'il y a une telle menace. 4 3 4 Comité interministériel, supra, note 408, à la p. 20. 432 162 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 8. Le test obligatoire des personnes accusées àu reconnues coupables d'agression sexuelle ne comporte que peu d'avantages pour les personnes agressées. Des lois visant à autoriser ce type de test n 'auraient pas grand utilité pour les victimes et détourneraient Vattention des problèmes réels et sous-jacents. Ce qui est requis est plutôt une réaction gouvernementale qui réponde aux inquiétudes très réelles des victimes d'agression sexuelle et leur offre de l'aide. Par conséquent, Santé Canada, le ministère de la Justice, Condition féminine Canada et leurs homologues provinciaux devraient élaborer, en consultation avec des organisations non gouvernementales, un modèle de pratiques en matière de counselling, de soins à court et à long terme, de traitements et d'autres services qui devraient être nus à la disposition des victimes d'agression sexuelle. Ceci devrait inclure: • l'accès au test de sérodiagnostic du VIH et au counselling pour toutes les personnes agressées sexuellement, par du personnel qualifié des centres pour victimes d'agression sexuelle ou d'établissements similaires; • une réflexion sur la question de savoir si le test de réaction en chaîne à la polymérase devrait être offert aux victimes d'agression sexuelle; • / 'accès à la prophylaxie post-exposition pour les victimes d'agression assorti de counselling au sujet de ses effets; • la sensibilité nécessaire à l'égard de la diversité culturelle prestation des services de counselling,; de test et de soutien; • l'aide dans la formation relative au VIH/sida, à l'intention du personnel des centres pour victimes d'agression sexuelle et des autres professionnels qui sont contact avec ces personnes. VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail sexuelle, et sociale dans la 7. Test des travailleurs du sexe L'histoire de la santé publique et du contrôle des maladies est marquée par la présomption que certaines femmes transportent la maladie, éclipsant le fait qu'elles aussi souffrent des maladies.435 La censure légale, morale et sociale des travailleurs du sexe s'est accrue de façon importante depuis l'avènement du VIH/sida. Les femmes et les hommes qui travaillent dans la prostitution sont considérés comme des vecteurs de transmission plutôt que comme des personnes qui, pour plusieurs raisons, y compris légales, sont vulnérables au VIH. Les femmes qui exercent la prostitution, en particulier, sont vues comme un pont entre un «monde souterrain infecté par le VIH» et la «population générale»: «partout au monde, les prostitués sont utilisés comme boucs émissaires pour le sida chez les hétérosexuels.»436 Ce blâme se produit «dans le contexte d'une perception générale des femmes comme vecteurs de transmission de maladie à leurs partenaires sexuels mâles... et à leurs bébés». 4 3 7 Dans certains pays, des lois ont été «créées pour protéger les intérêts des clients des prostitués, considérés comme de potentielles victimes innocentes du sida, au détriment des prostitués, auxquels semble revenir tout le blâme». 438 Les médias ont également réagi avec hystérie en blâmant les travailleurs du sexe pour la transmission du VIH dans la population hétérosexuelle. Comme l'a dit Brock, «on oublie [en blâmant les travailleurs du sexe] que ce sont dès femmes et des hommes qui tentent de conserver autant de contrôle que possible sur leurs conditions de travail, y compris l'hygiène, autant que possible» 4 3 9 Toutefois, selon certains élaborateurs de politiques et les médias, la protection de la santé publique justifie des mesures légales draconiennes et l'intolérance morale. 440 Peu, voire aucune, des mesures proposées réduisent le risque d'un travailleur du sexe de contracter lui-même le VIH. 441 L'une de ces mesures proposées est le test obligatoire des travailleurs du sexe. 4 3 ^ C. Pies, Ethics, Reproductive Rights: No Easy Answers, dans B. Schneider et N. Stoller (éd.), Women Resisting AE)S: Feminist Strategies of Empowerment, Philadelphie, Temple University Press, 1995, 322-334, à la p. 323, avec référence à J. Teny, «The Body Invaded: Medical Surveillance of Women as Reproducers», Socialist Review, 1989, 19: 13-43. 4 3 6 P. Alexander, Response to AIDS: Scapegoating of Prostitutes, San Francisco, Calif., National Taskforce on Prostitution, 1988. 437 Ibid. 4 3 8 A.E. Willis, «Public Health, AIDS and Sex Workers in New South Wales», National AIDS Bulletin [Australie], novembre 1991: 39-43. 4 3 9 D. Brock, «Prostitutes are Scapegoats in the AIDS Panic», RFR/DFR, 1989, 18(2): 13-16. 4 4 0 D. Brock, « Scapegoating Prostitutes in the AIDS Epidemic», Broadside, 10(4): 6. 4 4 1 M. Plant, Conclusions and Strategies, dans M. Plant (éd.), AIDS, Drugs and Prostitution, Londres et New York, Tavistock/Routledge, 1090, à 198. 164 Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (1) Historique (i) Développements au Canada Peu d'organisations canadiennes ont abordé spécifiquement la question du test requis ou obligatoire du VÏH pour les travailleurs du sexe. Par ailleurs, dans quelques cas, des tribunaux canadiens ont requis qu'un travailleur du sexe subisse un test. Comité consultatif national sur le SIDA Le CCN-SIDA a conclu que le test requis ou obligatoire de sérodiagnostic du VIH n'est pas justifié pour les personnes qui travaillent dans le commerce du sexe parce que les préjudices en surpasseraient tous les avantages.442 Commission de réforme du droit de l'Ontario Selon la CRDO, il n'est pas clair que le test requis des travailleurs du sexe aurait un effet dissuasif contre les activités à risque: «L'effet de ces lois est de pousser la prostitution dans la marginalité et de délimiter les secteurs où elle a lieu». 443 Dans le même sens, la Commission poursuit en disant que «il n'est pas évident que les clients d'une prostituée soient exposés à un risque particulièrement accru»: «Une grande proportion de prostituées affirme utiliser des condoms avec leurs clients, ce qui réduit le risque d'infection». Enfin, la Commission a souligné que le risque de transmission de femme à homme est plus faible que dans le sens inverse: Ceci pourrait expliquer pourquoi le taux d'infection est peu élevé parmi les clients mâles de prostituées. Cela suggère aussi que la prostitutionféminine,en soi, ne constitue pas un facteur majeur de transmission du VIH. 444 La Commission a conclu que: En l'absence de traitement efficace contre l'infection à VÏH, il n'est pas clair que le test non volontaire puisse être utile pour prévenir la transmission du VIH dans l'industrie du sexe.445. RvGDM En 1987, dans l'affaire R v GDÀ/,446 la Cour provinciale de la Colombie-Britannique a imposé à un jeune contrevenant une condition de probation de présenter à son travailleur social, au moins une fois par mois, un certificat d'examen médical mensuel pour le VIH et autres MTS. La cour a soutenu que cela constituait une condition raisonnable qui allait dans le meilleur intérêt du jeune et du public, en vertu de l'art. 20(lXe) dé la Loi sur les jeunes contrevenants. Le jeune gai, travailleur du sexe âgé de 17 ans, avait plaidé coupable 442 443 444 445 446 CCN-SIDA, supra, note 1, à la p. 40. CRDO, supra, note 14, à la p. 53. Ibid., k Up. 54. Ibid. R v GDM (1987), 2 WCB (2d) (BC Prov. CL) VIII Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail à une accusation d'avoir sollicité à des fins de prostitution; son dossier ne présentait pas d'antécédents de cette nature et il avait passé une journée en institution. R y Cornier En 1991, une prostituée accusée de sollicitation, en Colombie-Britannique, a été condamnée à subir mensuellement un test du VIH et de MIS. Elle a interjeté appel de la sentence, soutenant que cela violait son droit d'être libre de fouille et saisie abusive (art 8 de la Charte canadienne des droits et libertés). En appel, la Cour d'appel de la C.-B. a jugé que, bien que des examens mensuels étaient une mesure excessive, un examen était raisonnable et encouragerait la «bonne conduite».447 (ii) Développements internationaux A l'échelle internationale, on observe principalement deux réactions gouvernementales à l'égard de la question des travailleurs du sexe et du sida: le test requis assorti de mesures de quarantaine, ou rien du tout. 448 Ceci trouve son pendant dans les ouvrages, où beaucoup d'attention est consacrée à la question de savoir si les travailleurs du sexe devraient faire l'objet de tests requis de sérodiagnostic du VIH.449 La plupart des auteurs rejettent le test requis et d'autres mesures obligatoires visant à «contrôler» les travailleurs du sexe et ils suggèrent d'autres façons de réduire la propagation du VIH parmi ces personnes et leurs clients. La politique établie par le AIDS Civil Liberties Project de l'American Civil Liberties Union (ACLU) souligne que, d'un point de vue simplement pratique, le test obligatoire des travailleurs du sexe est voué à l'échec: «[s]'il y a un groupe qui sera poussé à la clandestinité par une telle politique, c'est bien celui des prostitués». 450 La recherche montre que les mesures punitives visant à contrôler le commerce du sexe — comme l'accroissement des sanctions pénales, le test obligatoire et la surveillance électronique — détériorent davantage la capacité des travailleurs du sexe de négocier des pratiques sécuritaires et les éloignent davantage des initiatives de santé publique. En conséquence, les risques de VIH sont accrus plutôt que diminués.451 Les fondements de ces mesures, qui portent exclusivement sur les travailleurs du sexe et non sur les clients, sont généralement critiqués. Alexander croit que «les gouvernements * V Cornier, non rapporté, 1991, CA 12803 BCCA. Alexander, 1988, supra, note 436. 4 4 9 Voir, par exemple, P. Alexander, Testing of Prostitutes Will Not Prevent AIDS, dans C. C. Abt, K. M Hardy (éd.), AIDS and the Courts, Cambridge, MA: Abt Bookds Inc., 1990, aux p. 132-139; L. Bowleg, Unjust Punishments: Mandatory HIV Testing of Women Sex Workers and Pregnant Women, Washington, D.C., Center for Women Policy Studies, National Resource Center on Women and AIDS, 1992; J. Cohen, P. Alexander, C. Wofsky, «Prostitutes and AIDS: Public Policy Issues», AIDS & Public Policy Journal, 1988, 3(2): 16-22; C. Leigh, «No Mandatory Testing! A Feminist Prostitute Speaks Out», On the Issues, 1988, 10:10,24. 447 448 4 5 0 AIDS and Civil Liberties Project, American Civil Liberties Union Foundation, Mandatory HIV Testing of Female Prostitutes: Policy Statement of the American Civil Liberties Union, dans M. Blumberg (éd.), AIDS. The Impact on the Criminal Justice System, Columbus, OH, Merrill Publishing Company, 1990. 45 1 Policy Paper on the Forced Testing and Quarantining of Prostitutes - Prostitutes Safe Sex Project (Maggies), Toronto, lé Projet, 1993; English Collective of Prostitutes, Prostitute Women and AIDS: Resisting the Virus of Repression, San Francisco, Calif., PROstitutes Collective, 1988 (US edition). Voir aussi Sex Industry and the AIDS Debate '88. Report and Conference Papers from the First National Sex Industry Conference, Melbourne, Australie, 25-27 octobre 1988, St Kilda, Victoria: Prostitutes Collective of Victoria, 1988. 166 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.166 sont plus intéressés à blâmer les prostitués et à se donner l'air de faire quelque chose pour contrer la propagation du VIH qu'à élaborer des programmes qui aident réellement les gens à se protéger».452 En outre, s'agissant des travailleuses du sexe, le fait que la transmission du VIH de femme à homme soit plus difficile laisserait croire que le commerce du sexe n'est peut-être pas une source de propagation du VIH. Des études datant des début de l'épidémie, auprès d'hommes utilisant les services de travailleuses du sexe, confirment ceci; elles n'ont révélé aucun cas de client ayant contracté le VIH d'une prostituée.453 Il est beaucoup plus probable, en particulier dans le contexte juridique actuel, qui refuse la protection de la loi aux travailleurs du sexe, que ces derniers soient vulnérables face à leurs clients. (2) Situation actuelle (i) Canada Le Canada ne dispose pas de lois prévoyant le test requis ou obligatoire des travailleurs du sexe et l'on ne prévoit pas adopter de telle législation. Toutefois,.surtout à Toronto, les médias ont dépeint les travailleurs du sexe comme des vecteurs de transmission; ceci a contribué à un climat favorable à des mesures coercitives à leur endroit. En général, les responsables des politiques du Canada sont en faveur de resserrer les lois en matière de prostitution. En 1992, un Groupe de travail sur la prostitution était créé par les sous-ministres fédéral-provinciaux-territoriaux de la Justice. Le Groupe de travail a publié «Dealing with Prostitution in Canada - A Consultation», en mars 1995. Le document aborde plusieurs options proposées par divers intervenants du pays. On y aborde principalement deux points: les jeunes prostitués et la prostitution de rue. 454 La plupart des options examinées concernent des modifications aux articles 212 et 213 du Code criminel455 Ces options comprennent: • des peines d'emprisonnement plus lourdes ou obligatoires pour les souteneurs et les clients de jeunes; • faire en sorte que l'infraction prévue à l'article 213 soit une infraction mixte ou hybride pour que Ton puisse prendre des empreintes digitales et des photos des travailleurs du sexe et des clients accusés en vertu de l'art 213; Alexander, 1988, supra, note 436. Ibid., Brock, supra, notes 439 et 440. 4 5 4 Le sommaire qui suit est une version abrégée de R. Achilles, The Regulation of Prostitution, document de travail non publié, préparé pour le Service de santé publique de la Ville de Toronto (mis à jour le 14 avril 1995), dont l'auteur a copie. 4 5 5 L'art. 212 prévoit diverses infractions appelées collectivement «proxénétisme» ou «vivre des produits de la prostitution», qui ne visent pas les travailleurs du sexe mais qui sont destinées à empêcher quiconque d'être contraint de vivre dans la prostitution; en vertu de l'art. 213, il est interdit aux clients, comme aux travailleurs du sexe, de communiquer en public aux fins de la prostitution. 452 453 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.1180 • la surveillance électronique et l'interception des communications entre travailleurs du sexe, souteneurs et clients; • des peines d'emprisonnement plus lourdes ou obligatoires pour les clients; et • la permission aux provinces, territoires ou municipalités d'accorder des permis d'opération d'établissements pour la prostitution ou de zones définies de tolérance de la sollicitation sur la rue. Le document présente aussi une liste d'«options d'intervention sociale». Pour les jeunes, on examine les options de: • référer les jeunes contrevenants aux services d'aide à la jeunesse; et • élaborer du matériel d'information et d'éducation pour faire connaître aux jeunes les dangers de la prostitution. On discute aussi de l'élaboration de sèrvices de rue, incluant des programmes de santé, de formation et de réhabilitation, situés dans des gares d'autobus, des restaurants ou dans des commerces, et la création de centres d'aide offrant du counselling. Le 6 novembre 1995, le Globe and Mail rapportait que le ministre de la Justice, Allan Rock, entrevoyait «des mesures plus strictes — et non la légalisation du commerce du sexe — pour s'attaquer aux problèmes associés à la prostitution de rue». 456 (ii) États-Unis Depuis l'avènement du VIH/sida, plusieurs États américains ont adopté des lois prévoyant le test requis des travailleurs du sexe qui sont trouvés coupables ou, dans certains cas, accusés de prostitution. Par exemple, en vertu d'une loi californienne qui prévoit le test requis, si un travailleur du sexe est diagnostiqué séropositif, les condamnations subséquentes pour prostitution.entraînent des. peines d'emprisonnement de trois ans, peu importe que cette personne ait eu recours à des mesures de prévention ou non.457 Comme le fait remarquer Bastow, le droit «a engendré des formes navrantes d'oppression étatiques envers les prostitué(e)s séropositifs: par exemple, deux prostituées séropositives ont été libérées de la détention à la condition qu'elles acceptent d'être "surveillées électroniquemenf'».458 (3) Évaluation «Tougher Sex Trade Penalties Planned — Rock to Propose Changes in the Code», The Globe and Mail, 6 novembre 1995, p. A4. 4 5 7 «AwfulNew Prostitution Laws», COYOTE (Call off your old tired ethics) Howls, janvier 1989, aux p. 1-2. 4 5 8 K. Bastow, «Prostitution et VIH/sida», Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1996, 2(2): 13-15, à la p. 13. 4 5 6 168 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.168 Cibler les prostitués pour le test forcé nefonctionneraittout simplement pas, en tant que mesure de prévention.459 (i) Test requis ou obligatoire Tel que l'a souligné la CRDO, il n'est pas facile d'imaginer comment le test requis ou obligatoire des travailleurs du sexe pourrait servir à prévenir la transmission du VIH: À moins que les Canadiens ne soient disposés à envisager la mise en isolement de tous les travailleurs du sexe séropositifs pour une durée indéterminée, ou une autre forme de restriction — des mesures qui pousseraient les prostitué(e)s et d'autres personnes vulnérables à éviter le test de sérodiagnostic et d'autres démarches de recherche d'aide — il n'y a que peu d'utilité à ce renseignement. Bref, la Commission est d'avis que fece au risque de transmission, à la fois pour le client et pour le travailleur du sexe, il est plus approprié de déployer des efforts d'éducation ciblée et des programmes conçus pour favoriser des comportements qui réduisent le risque, y compris de l'information sur l'utilisation des condoms et d'aiguilles stériles. Aucune exception à la règle générale requérant le consentement volontaire, spécifique et éclairé n'est justifiée pour le test du VIH en ce qui concerne les travailleurs du sexe, hommes ou femmes.460 (ii) Autres options Plutôt que des mesures coercitives, il est nécessaire d'élaborer des interventions qui offriraient aux travailleurs du sexe des façons de se protéger contre la transmission du VIH et qui leur donneraient les moyens de les mettre en application. Une diversité de telles mesures sont proposées: • Cohen et coll. sont en faveur de l'élaboration de stratégies d'éducation visant à rejoindre les travailleurs du sexe, pour leur donner de l'information précise sur les façons de prévenir la transmission et pour appuyer leurs efforts d'utiliser ces mesures de façon soutenue.461 • Leigh recommande des prestations d'invalidité pour les travailleurs du sexe qui seraient séropositifs, ainsi que des prestations financières et des possibilités de formation à l'emploi pour ceux qui désirent cesser de travailler dans le commerce du sexe.462 • Le English Collective of Prostitutes a rendu publique une liste de demandes qui comprend la provision «d'argent et d'autres ressources, y compris des prestations pour élever des enfants, des bénéfices supplémentaires et d'autres prestations d'aide 459 460 461 462 Supra, note 450. CRDO, supra, note 14, à la p. 53. Cohen et coU., supra, note 449. Leigh, supra, note 449. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 169 sociale, afin que les femmes ne soient pas poussées à la prostitution par nécessité pécunière et pour aider celles qui veulent sortir de ce jeu». 463 (iii) Impact des lob en matière de prostitution Au surplus, il est nécessaire que soit reconnu le fait que les lois actuelles sur la prostitution influencent la propagation du VIH parmi les travailleurs du sexe: Le commerce sexuel étant criminalise, les prostitué(e)s qui sont l'objet d'abus de la part de leurs clients sont moins en mesure de porter plainte contre ces derniers. En outre, il est difficile pour eux d'insister pour que leurs clients portent un condom, si bien qu'ils sont plus susceptibles d'être infectés. Dans des conversations que j'ai eues avec desfemmesqui avaient été violées sans condom par des clients, elles ont affirmé que, parce que leur travail était illégal, elles n'étaient pas disposées à porter plainte contre ces hommes. Elles dressent plutôt une «liste noire» et la distribuent à d'autres prostituées. Par contraste, on a constaté que la décriminalisation de la prostitution permet aux travailleurs du sexe d'avoir des relations sexuelles sécuritaires, ce qui réduira en bout de compte le taux d'infection. Il se peut que le législateur, en augmentant les peines prévues dans les lois sur la prostitution, ait voulu décourager la prostitution et réduire ainsi les risques pour la santé. Cependant, dans les faits, peu de prostitués sont dissuadés par des lois plus strictes, qui ont plutôt pour effet de les rendre encore plus vulnérables. Par exemple, des peines plus lourdes auront pour effet d'aggraver leurs antécédents judiciaires, ce qui réduira les perspectives d'emploi de ceux et celles qui veulent renoncer à la prostitution. Des questions de preuve ont également un effet sur la capacité des prostitué(e)s d'éviter de contracter le VIH de leurs clients. Par exemple, la possession de condoms sert parfois à faire la preuve de la prostitution. Par conséquent les prostitués sont moins susceptibles d'avoir des condoms sur eux. 464 En reconnaissant l'impact des lois actuelles sur la propagation du VIH, l'Organisation mondiale de la santé a recommandé que soit organisée une rencontre pour s'occuper de problèmes tels les lois qui affectent les droits sociaux, économiques et légaux des travailleurs du sexe et qui font par conséquent obstacle aux efforts de prévention du VIH.465 Le groupe de travail juridique du Australian Intergovernmental Committee on AIDS a déjà effectué une analyse approfondie des questions d'ordre juridique pertinentes aux travailleurs du sexe et au VIH/sida — en particulier de l'impact des lois régissant et/ou English Collective of Prostitutes, supra, note 451. Bastow, supra, note 458, avec référence à R. Perkins, «AIDS Preventative Practices among Prostitutes in New South Wales»* National AIDS Bulletin [Australie], 1991, à la p. 28; voir aussi C.A. Campbell, «Women and AIDS», Social Sciences in Medicine, 30(4): 411. 465 programme mondial de lutte contre le sida et Programme des maladies sexuellement transmissibles. Déclaration par consensus adoptée à l'issue de la Consultation sur l'épidémiologie du VIH et la prostitution, (Genève, 3-6 juillet 1989), Genève, OMS, 1989. 463 464 170 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.170 punissant la prostitution sur les efforts de prévention du VIH. 466 Le rapport du groupe de travail propose que les objectifs de santé publique suivants servent de guide à line réforme des lois sur la prostitution: • éliminer les dispositions qui rendent difficile aux travailleurs du sexe et à leurs clients d'adopter des mesures de protection contre l'infection; • favoriser chez les travailleurs du sexe et chez leurs clients des comportements responsables; • réduire la stigmatisation associée au commerce du sexe; • promouvoir des conditions, au sein de la culture du commerce du sexe, qui permettent et favorisent les activités sexuelles àrisqueréduit; et • améliorer les conditions de travail au sein de cette industrie. Le rapport recommande en outre que l'on décriminalise la prostitution et que l'État en régisse les conditions de travail.467 (4) Conclusion Les lois par lesquelles les prostitué(e)s peuvent être obligé(e)s de s'abstenir de certains comportements, de subir un certain traitement ou counselling, de se soumettre à la surveillance, de subir des traitements pendant leur détention ou, en cas d'infection à VIH, d'être détenuës pendant l'application de l'ordonnance, peuvent être nuisibles: les prostitué(e)s resteront à l'écart des tests de dépistage. Les clients seraient relevés de toute responsabilité quant aux pratiques sécuritaires dans leurs rapports sexuels, parce que les lois les porteraient à croire que les prostitué(e)s qui travaillent sont clean Intergovernmental Committee on AIDS, Legal Working Party, Legal Issues Relating to HIV/AIDS, Sex Workers and Their Clients, Canberra, Department of Health, Housing and Community Services, 1991. 4 6 7 Même si de nombreux auteurs sont en faveur de la décriminalisation, ils précisent que la sollicitation aux fins de prostitution ne devrait pas être légalisée (la légalisation étant définie comme la reconnaissance légale de la prostitution, assortie d'un contrôle étatique complet). Une avocate canadienne a déclaré: 466 J'aimerais que les femmes soient capables de travailler chez elles. Ce serait la situation idéale, tant pour la sécurité que pour la dignité. Mais je ne suis pas en faveur de la légalisation de la prostitution. Selon elle, dans toutes les juridictions où la prostitution a été légalisée, «le contrôle a été retiré aux femmes et elles ont été soumises à des conditions de travail opprimantes» (A. Derrick, citée dans S. Fraser, «Defending the Right to Do the Work They Do», Atlantic Insight, juin 1988: 14-19). R. Jûrgens, «Prostitution et VIH/sida: enquête bibliographique», Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1995, 2(1): 3-5, à la p. 3, avec référence à Wills, supra, note 438. 468 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 171 Le test requis ou obligatoire des travailleurs du sexe, de même que d'autres mesures coercitives à leur endroit, n'auront que peu d'effets préventifs relativement à la propagation du VÏH parmi eux et leurs clients. Plutôt que de telles mesures, il est nécessaire de concevoir des interventions qui offriraient aux travailleurs du sexe des méthodes pour se protéger et qui leur donneraient les moyens de les mettre en application. Ceci nécessite également que l'on procède à l'analyse de l'impact des lois régissant et/ou punissant la prostitution sur les efforts de prévention du VIH. 10. 172 Le test requis ou obligatoire des travailleurs du sexe, de même que d'autres mesures coercitives à leur endroit, n'auront que peu d'effet préventif quant à la propagation du VIH parmi eux et leurs clients. Plutôt que de recourir à de telles mesures, les élaborateurs de politiques devraient consulter des travailleurs du sexe afin d'en élaborer qui préviendront et réduiront réellement la propagation du VIH. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.172 8. Test des travailleurs de la santé Le test de certains travailleurs de la santé, ou de tous, a été proposé pour réduire tout risque que ces personnes, lorsque séropositives, pourraient présenter pour les patients. Certains travailleurs de la santé, en particulier les dentistes et les chirurgiens, pratiquent fréquemment des interventions très effractives. À l'occasion, ils peuvent avoir une perforation de la peau, d'où peut s'écouler de leur sang qui pourrait pénétrer dans le corps d'un patient. Ainsi, de telles interventions peuvent, dans des circonstances très limitées, causer la transmission du VIH d'un travailleur de la santé séropositif à un patient. On ne connaît cependant que deux cas de transmission du VIH d'un travailleur de la santé à un patient, depuis le début de l'épidémie: • En juillet 1990, les Centers for Disease Control (CDC, États-Unis) ont rapporté le premier cas identifié de transmission possible du VIH à un patient par un travailleur de la santé vivant avec le VIH. Cette transmission semble s'être produite au cours d'une intervention effractive pratiquée par un dentiste en Floride. En 1991, le CDC a rapporté que quatre autres patients avaient possiblement été infectés par ce dentiste. Les experts demeurent perplexes face à ce cas.469 • En janvier 1997, le ministère français de la Santé a annoncé qu'un chirurgien avait «presque certainement» transmis le VIH à une patiente au cours d'une intervention chirurgicale dans un hôpital à proximité de Paris. Après que le chirurgien eut informé les autorités françaises de sa séropositivité, celles-ci ont contacté 5 000 personnes qu'il avait opérées depuis 1983, année où l'on croit que le chirurgien a lui-même contracté le* VIH. Des 986 personnes qui ont répondu et qui se sont prêtées à un test de sérodiagnostic, une femme était séropositive.470 Ces cas (ainsi que d'autres cas de chirurgiens ou de dentistes séropositifs desquels on ne rapporte pas de transmission à un patient) ont provoqué une angoisse considérable au sein du public. Us soulèvent les questions et problèmes qui suivent: Compte tenu de l'existence d'un risque, si minime soit-il, de transmission du VIH d'un travailleur de la santé séropositif à un patient au cours d'une intervention effractive:. • • • Serait-il approprié de requérir que les travailleurs de la santé vivant avec le VIH s'abstiennent de pratiquer des interventions effractives, ou encore certaines interventions effractives dont on croit qu'elles comportent un risque plus élevé? Devrait-on requérir que les travailleurs de la santé qui sont séropositifs en informent leurs patients avant de pratiquer des interventions effractives? Serait-il approprié d'appliquer le test requis des travailleurs de la santé qui pratiquent des interventions effractives, afin d'assurer que (a) ils Voir CRDO, supra, note 14, aux p. 64-65, avec nombreuses références. «Le médecin transmet le sida», Le Devoir, 16 janvier 1997, p. A2; «Surgeon Blamed in HIV Case», The Globe and Mail, 17 janvier 1997, p. A8. 469 470 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 173 s'abstiennent de pratiquer de telles interventions; et/ou (b) ils informent leurs patients de leur état sérologique avant de telles interventions?471 Certaines de ces questions débordent largement de la portée du présent document Nous ne tenterons pas ici, par exemple, de définir l'expression «intervention ef&active». Une récente rencontre de concertation, organisée à Ottawa les 19-20 novembre 1996 par le Laboratoire de lutte contre la maladie (LLCM), de Santé Canada, a abordé de telles questions et le LLCM publiera plus tard en 1997 des lignes directrices mises à jour au sujet des pathogènes transmissibles par le sang dans les établissements de soins de santé. Le texte qui suit offre un bref sommaire des questions principales, ainsi que des conclusions préliminaires. (1) Historique Les organisations canadiennes qui ont abordé la question de savoir si lès'travailleurs de la santé devraient être soumis à un test requis du Vffi ont toutes rejeté cette approche. (i) Comité consultatif national sur le SIDA (ii) Association dentaire canadienne (iii) Laboratoire de lutte contre la maladie En 1988, le CCN-SIDA a déclaré qu'il n'y avait pas de preuves que les patients soient exposés à un risque d'infection issu du contact avec des travailleurs de la santé séropositifs, et a conclu que «il est injustifié que la recherche de l'anticorps anti-VIH soit requise ou obligatoire pour le personnel soignant, dans le but d'éviter que le VIH ne se transmette d'un membre du personnel à un malade».472 En avril 1991, l'Association dentaire canadienne (ADC) a émis une politique préliminaire déclarant que les dentistes séropositifs n'avaient pas à s'abstenir de pratiquer des interventions effectives et n'avaient pas à informer leurs patients de leur état sérologique. L'ADC concluait que le risque qu'un dentiste séropositif transmette le VIH à un patient «est si faible qu'il n'a en fait aucune incidence».473 En août 1991, la politique était adoptée par l'assemblée annuelle de I'ADC. Des inquiétudes relatives aurisquede transmission de l'hépatite B et du VIH en milieu de soins hospitaliers ont mené à la tenue d'une série de rencontres, à partir de décembre 1991, organisées par le LLCM, qui visaient à cerner les terrains d'entente chez les groupés canadiens intéressés, en ce qui concerne les problèmes liés à la transmission de pathogènes à diffusion hématogène, notamment les virus de l'hépatite B (VHB) et de Société canadienne du sida, Le droit des travailleurs de la santé atteints du VIH à exercer leur profession sans restrictions - un exposé de principes, Ottawa, la Société, 11 septembre 1992, p. 5. 4 7 2 CCN-SIDA, supra, note 1, à la p. 40. 4 7 3 .Dr J Brookfïeld, président du comité de déontologie de l'ADC, cité dans SCS 1992, supra, note 471, à la p. 2. 471 174 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.174 l'immunodéficience humaine (VIH), par un travailleur de la santé à un patient, en milieu de soins.474 En 1992, un certain nombre d'énoncés et de recommandations était fait, notamment:475 • U n'est pas justifié d'exiger que les travailleurs de la santé subissent un test de sérodiagnostic. • On devrait inciter les travailleurs de la santé qui ont déjà subi une exposition importante, ou qui présentent des facteurs personnels de risque, à subir volontairement les tests du VHB et du VIH. • À la suite d'une exposition importante au sang d'un patient ou à un autre liquide organique à risque élevé, on recommande que les travailleurs de la santé subissent un test volontaire si: (1) on sait que le patient en question est infecté; (2) les signes épidémiologiques évoquent la possibilité d'une infection; (3) on ne connaît pas les antécédents du patient en question ou ce dernier n'est pas en mesure d'accepter de subir un test où s'il refuse. • Les travailleurs de la santé ont l'obligation morale de subir un test, à la suite d'une exposition importante d'un patient au sang ou à un liquide organique à risque élevé d'un travailleur de la santé, si l'état sérologique de ce dernier est inconnu. • Tout travailleur de la santé atteint d'une maladie infectieuse qui pourrait présenter un danger pour les patients est invité à demander de son propre gré une évaluation médicale quant à la possibilité de transmission de l'infection aux patients. • C'est le médecin de premier recours du travailleur de la santé infecté qui devrait être chargé de l'évaluation médicale de ce dernier. On incite les médecins de premier recours qui comptent des travailleurs de la santé infectés parmi leurs patients à demander conseil relativement à l'évaluation durisquede transmission de l'infection en milieu de soins et à avoir recours, pour ce faire, à un mécanisme établi de consultât!oa • n faudrait mettre sur pied (de préférence dans chaque province) un mécanisme de consultation auquel les médecins de premier recours pourraient avoir facilement accès. Ce mécanisme devrait protéger la confidentialité et favoriser la participation des responsables de la santé publique, des organismes de réglementation professionnelle ou des associations professionnelles, des spécialistes des maladies infectieuses et de la prévention des infections ainsi que d'autres intéressés, selon le cas. H n'est pas nécessaire que les participants à cet exercice connaissent l'identité du travailleur de la santé en question. 4 7 4 «Risques de transmission des pathogènes à diffusion hématogène dans les établissements de soins de santé», Journal de VAssocation médicale canadienne, 1993, 148(10): 1753-1759 (reproduit du Relevé des maladies transmissibles au Canada, 1992, 18: 177-184). 4 7 5 Jfeù/., aux p. 1754-1759. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 175 • Les critères en fonction desquels on devrait évaluer les travailleurs de la santé séropositifs devraient comprendre: l'évaluation médicale, la connaissance et l'application des mesures de prévention des infections, et le risque de blessures causées par des aiguilles et des objets tranchants dans le cadre des fonctions du travailleur. • D faudrait élaborer des programmes d'appui non menaçants, par l'entremise d'organismes de réglementation ou d'organisations professionnelles, de façon à assister les travailleurs de la santé qui doivent modifier leur pratique en raison de leur séropositivité. • La divulgation automatique de la séropositivité d'un travailleur de la santé n'est pas justifiée. • Un patient ayant subi une exposition importante à un travailleur de la santé infecté devrait en étire informé. H n'est pas nécessaire de divulguer l'identité du travailleur en question. En outre, lors des rencontres, «[i]l a été convenu que les mêmes recommandations s'appliqueraient au dépistage, à la divulgation et au traitement des patients».476 (iv) Société canadienne du sida En septembre 1992, la SCS publiait un énoncé de principes sur «Le droit des travailleurs de la santé atteints du VTH à exercer leur profession sans restrictions». Le document contient les énoncés suivants: La Société canadienne du sida croit que les risques de transmission du VIH d'un travailleur de la santé à son parient durant une intervention effractive sont très faibles. À ce jour, on a recensé cinq cas seulement, tous liés au même dentiste de la Floride, où on soupçonne que la transmission a eu lieu de cette façon. De nombreux éléments prouvent que le dentiste en question ne prenait pas de mesures anti-infectieuses adéquates. Il n'y a aucun cas recensé de transmission du VIH d'un travailleur de la santé à un malade lorsqu'il a été . prouvé que le travailleur respectait la consigne en matière de lutte contre l'infection. îbid., à la p. 1748. On connaît un certain nombre de cas documentés où des travailleurs de la santé ont contracté le VIH par une exposition dans l'exercice de leur profession (pour de plus amples détails, voir W. Flanagan, «HIV Testing in the Health Care Setting», Queen's Law Journal, 1993, 18: 71). Par conséquent, plusieurs propositions ont été formulées pour mettre en oeuvre le dépistage requis des patients, en particulier dans des hôpitaux ou dans des cas d'intervention chirurgicale, dans l'espoir que ce test puisse réduire le risque de transmission à des travailleurs de la santé. Toutes ces demandes ont cependant été rejetées sur la base du fait que le meilleur moyen de prévenir la transmission du VIH en milieu de soins de santé est d'appliquer les précautions universelles, non pas de faire passer un test aux patients. Immanquablement, il a été conclu que le fait d'identifier les patients séropositifs aurait peu d'effet préventif, voire " " " n . contre la transmission. De fait, la grande majorité des cas d'exposition professionnelle et d'infection se sont produits alors que le travailleur de la santé traitait un patient pour un problème de santé lié au sida et que la séropositivité du patient était déjà connue du soignant (ibid. ). 476 176 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.176 Le risque de transmission est si faible qu'il ne justifie pas l'atteinte aux droits de la personne et à la vie privée, ni les coûts prohibitifs qu'entraînerait une politique de dépistage obligatoire, d'interdiction pour les travailleurs infectés [de pratiquer des interventions effractives] et de divulgation obligatoire de l'état de séropositivité avant les interventions. La SCS croit aussi que le dépistage obligatoire et les restrictions professionnelles imposées aux travailleurs de la santé infectés mèneraient au dépistage obligatoire des malades hospitalisés. Cette mesure serait synonyme d'atteinte grave à la vie privée; elle coûterait très cher; de plus, la possibilité de faux négatifs contribuerait à un faux sentiment de sécurité parmi les travailleurs de la santé et le personnel hospitalier. Le dépistage obligatoire et les restrictions professionnelles imposés aux travailleurs de la santé ne contribueraient pas de façon significative à la réduction desrisquesde transmission du VIH au sein de notre société. Au lieu d'affecter des crédits au dépistage obligatoire, il serait beaucoup plus sage de promouvoir l'adoption de mesures anti-infectieuses et de subventionner l'éducation et les programmes de prévention ciblée qui souffrent d'un manque de fonds. Nous pourrions ainsi sauver un plus grand nombre de vies. Le moyen le plus rentable de réduire les risques de transmission du VIH (et d'autres agents pathogènes à diffusion hématogène) en milieu de soins est l'applicationrigoureusedés mesures anti-infectieuses. La SCS conclut ainsi que: 1. les travailleurs de la santé pratiquant des interventions effractives n'ont pas à être soumis au test requis; 2. les travailleurs de la santé séropositifs n'ont pas à divulguer leur état aux patients; 3. les travailleurs de la santé séropositifs devraient être libres de pratiquer les interventions effractives et toute procédure liée à leur pratique professionnelle; 4. des efforts accrus sont nécessaires pour encourager l'application des précautions universelles de contrôle des infections — y compris l'élaboration de programmes d'éducation et de formation — et pour surveiller leur application. La SCS affirme que les travailleurs delà santé séropositifs ne devraient faire l'objet d'aucune restriction professionnelle à moins que leur état de santé ne leur permette plus de traiter leurs patients. Le médecin traitant du travailleur est la personne la mieux placée pour juger de l'incapacité du travailleur. (v) Commission de réforme du droit de l'Ontario Dans son Rapport sur les tests de dépistage du SIDA de 1992, la CRDO concluait que: Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 177 [a]ucune exception à la règle générale requérant un consentement volontaire, spécifique et éclairé n'est justifiée pour le test du VIH en ce qui concerne les travailleurs de la santé. La prévention de la transmission du VIH en milieu de soins de santé est mieux servie par l'observance stricte des précautions universelles et de la promotion de mécanismes appropriés pour le contrôle des infections.477 (vi) Association canadienne de santé publique Dans son rapport de 1993 sur la réaction de santé publique au VIH et au sida, l'ACSP a adopté la position que le test requis ou obligatoire des travailleurs de la santé n'est pas souhaitable.478 (vii) Association médicale canadienne En 1993, l'AMC a publié le document « Infection à VTH au travail», qui présente des principes et des recommandations relativement au VIH en milieu de travail en général et dans le contexte des soins de santé, afin de servir de guide pour les organisations, les employeurs et les employés.479 Le document reconnaît que le contexte des soins de santé comporte unrisqued'exposition professionnelle au VIH plus grand que celui d'autres milieux de travail en général. Il poursuit en affirmant que «[m]ême s'il n'est pas nul, le risque professionnel d'infection à VIH demeure toutefois très faible chez les travailleurs de la santé».480 On n'a signalé chez les patients, au Canada, aucun cas d'infection à VIH attribuable à une exposition à des travailleurs de la santé séropositifs. Selon le document: P]es travailleurs de la santé doivent agir en professionnels compétents et prendre des précautions raisonnables pour éviter de transmettre le VIH ou tout autre agent pathogène aux patients. Par ailleurs, il faut protéger les droits des travailleurs de la santé contre la discrimination injuste fondée sur le VIH ou le sida, ou sur la situation perçue. Le document affirme que le test systématique du VIH pour les travailleurs de la santé n'est pas justifié, mais que [l]es patients et les travailleurs dé la santé ont le droit d'être protégés par des mesures raisonnables de prévention de l'infection. L'AMC préconise la mise en oeuvre de précautions universelles qui favoriseront la protection des CRDO, supra, note 14, à la p. 71. ACSP, supra, note 16, à la p. 15. 4 7 9 Association médicale canadienne, «Sommaire de politique de l'AMC - Infection à VIH au travail», Journal de l'Association médicale canadienne, 1993; 148(10): 1800A-1800H (reproduit dans Health Law Review 1994 3(2): 27-30). 480 Ibid., à 1800B. (À moins de précision autre, toutes les citations de la présente section proviennent de ce document.) 477 478 178 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.178 travailleurs de la santé contre des patients qui pourraient être infectés, et vice versa. Les travailleurs de la santé qui se croient séropositifs sont encouragés à demander volontairement du counselling et un test de sérodiagnostic du VIH. De plus: [l]es travailleurs de la santé qui sont infectés doivent demander une évaluation médicale à leur médecin de famille. Celui-ci doit au besoin demander conseil à des spécialistes en ce qui concerne les connaissances actuelles sur les risques de transmission aux patients. Vu la faiblesse du risque de transmission, le document affirme que les travailleurs de la santé séropositifs ne devraient pas avoir à en prévenir leurs patients. Une exception à cette règle serait le cas d'un patient exposé au sang d'un travailleur infecté: il faut alors informer le patient de la situation, le conseiller au sujet desrisquesen cause et lui préciser s'il est souhaitable qu'il se soumette à des examens et à une prophylaxie. Il ne convient pas de divulguer l'identité du travailleur de la santé infecté. Finalement, le document souligne que les travailleurs de la santé qui vivent avec le VIH ou le sida devraient pouvoir «postuler des emplois et garder leur travail habituel aussi longtemps qu'ils donnent un rendement acceptable et qu'ils sont psychologiquement et physiquement capables de s'acquitter des aspects essentiels de leur travail de façon sûre, efficace et fiable». (viii) Commission canadienne des droits de la personne En juin 1996, la Commission a publié une version révisée de son énoncé de politique de 1988 sur le sida. 481 La politique de 1996 appuie explicitement la position de FAMC à l'effet que le test systématique du VIH pour les travailleurs de la santé n'est pas justifié. (2) Situation actuelle Tel que mentionné ci-dessus, une rencontre de concertation au sujet des travailleurs de la santé séropositifs a eu lieu à Ottawa les 19-20 novembre 1996.482 Les objectifs de cette rencontre étaient de: 481 Commission canadienne des droits de la personne, Politique de la Commission canadienne des droits de la personne sur le VUJ/sida, la Commission, juin 1996; reproduite dans Bulletin canadien VIH/sida et droit 1996 3(1): 7-9. 4 8 2 Rencontre de concertation sur les travailleurs de la santé infectés: risque de transmission de pathogènes hématogènes. Les renseignements présentés dans la présente section nous ont été transmis le 10 janvier 1997 par Paul Muirhead, qui était membre du comité organisateur de la conférence. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 179 • accroître la compréhension de l'épidémiologie de la transmission des pathogènes hématogènes des travailleurs de la santé aux patients; et • mettre à jour et/ou élaborer un ensemble de lignes directrices, principes ou modèles de pratique pour prévenir et contrôler la transmission d'agents pathogènes hématogènes de travailleurs de la santé infectés à des patients. Les questions spécifiques suivantes ont été abordées: • analyse derisquedes modes et des voies de transmission des pathogènes hématogènes d'un travailleur de la santé à un patient, dans le contexte canadien; • évaluation des mesures actives et passives de prévention de la transmission d'un travailleur de la santé à un patient; • confidentialité et questions de divulgation; • méthodes de surveillance de la transmission de travailleurs de la santé infectés à des patients; • modifications efficaces et appropriées aux pratiques; et • ré-entraînement et soutien des travailleurs de la santé infectés par des pathogènes hématogènes. Comme suite à la rencontre, de nouvelles lignes directrices sur la prévention et le contrôle de la transmission d'agents pathogènes hématogènes des travailleurs de la santé à des patients seront publiées plus tard en 1997. On ne s'attend pas à ce que ces lignes directrices, qui remplaceront les énoncés et recommandations de 1992, soient très différentes de celles-ci. En particulier, elles ne recommanderont pas que les travailleurs de la santé soient soumis à un test requis du VIH. (3) Évaluation (i) Fonctions «hôtelières» en milieu de soins de santé Comme 1 'a déclaré Gilmore, [p]our de nombreux dispensateurs de soins de santé, leur travail ne comporte pas derisqueattribuable au contact avec des patients infectés, ni derisquepour le public lorsque ces travailleurs sont infectés. Les fonctions dites «hôtelières» au sein des milieux de travail en soins de santé ne sont pas différentes des 180 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.180 autres situations générales de travail. Ces emplois ne sont pas associés à un risque d'être exposé au VIH ou d'exposer autrui au VIH.483 Par conséquent, le test de sérodiagnostic du VIH pour ces travailleurs de la santé et l'imposition de restrictions à ceux qui sont séropositifs ne sont pas justifiés. (ii) Interventions effractives Lerisquede transmission du VIH dans le contexte du travail en milieu de soins hospitaliers est issu de la pratique d'interventions effractives. Toutefois, ce ne sont pas les interventions effractives elles-mêmes qui engendrent ce risque, mais plutôt des accidents au cours de telles interventions qui résultent en une exposition parentérale. La peur d'être exposé au VIH, l'éducation en milieu de travail, et l'application stricte des précautions universelles ont indubitablement réduit l'incidence d'exposition au sang et au matériel contaminé, et lerisquede transmission du VOL Néanmoins, ce risque n'a pas été complètement éradiqué.484 Arguments contre le test requis Les arguments suivants ont été formulés contre le test requis des travailleurs de la santé qui pratiquent des interventions effractives:485 • de nombreuses études montrent que lerisquede transmission du VIH d'un travailleur de la santé séropositifs à un patient est extrêmement faible, même dans le contexte d'interventions effractives;486 comme l'a déclaré le président du comité de déontologie de I'ACD, lerisqueest «infinitésimal»;487 • on n'a jamais eu recours au test requis ni à î'èxclusion dans le contexte d'autres maladies plus facilement transmissibles et même parfois mortelles, comme l'hépatite B. Les procédures de contrôle des infections pour les travailleurs de la santé infectés par l'hépatite B ont plutôt été concentrées sur l'application stricte des précautions universelles et d'autres techniques de contrôle des infections. Arguments en faveur du test requis488 Les tenants du test requis sont d'avis que: N. Gilmore, «HIV in the Workplace: Legal and Ethical Issues», texte d'un exposé présenté à la 6e Annual British Columbia AIDS Conference, le 1 novembre 1993. 484 Ibid. 4 8 5 Voir CRDO, supra, note 14, aux p. 65-66. 4 8 6 Voir, en général, Barnes et coll., «The HIV-infected Health Care Professional: Employment Policies and Public Health», Law, Medicine & Health Care,, 1990, 18: 311. 4 8 7 Dr J. Brookfield et coll., .«The HIV-infected Health Care Professionals: Employment Policies and Public Health Law», Law, Medicine & Health Care, 1990, 18, à la p. 311. 4 8 8 CRDO, supra, note 14, à la p. 66. 483 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 181 • même si lerisqueest extrêmement faible, il est d'un ordre tel que des préoccupations de santé publique devraient justifier que certaines précautions soient prises; • contrairement à l'hépatite B, les conséquence du VIH sont à coup sûr graves, voire fatales, en conséquence de quoi seraient justifiées des mesures plus coercitives et onéreuses pour en prévenir la transmission. Compromis Une réaction de santé publique efficace n'implique pas nécessairement le test requis ni l'exclusion. Tel qu'énoncé dans les lignes directrices de 1992 du LLCM: un programme obligatoire de dépistage à l'intention des travailleurs de la santé ne modifierait pas vraiment le risque déjà extrêmement faible qu'un patient soit infecté par le VHB ou le VIH dans un établissement de soins de santé. Étant donné le risque, le dépistage obligatoire constituerait une mesure injustifiée, qui porterait atteinte aux droits à la vie privée etrisqueraitde se . traduire par des gestes discriminatoires. L'existence d'un tel programme de dépistage aurait sans doute des répercussions fâcheuses importantes sur la prestation des services et sur laformationdes travailleurs de la santé en ce qui concerne les pratiques adéquates de prévention des infections; en effet, les rares ressources consacrées à ces activités qui revêtent une importance hautement prioritaire seraient détournées au profit du programme. Én outre, les scientifiques ne sont pas encore en mesure de préciser quelle, devrait être la fréquence du dépistage si un tel programme était mis en oeuvre.489 Pour toutes ces raisons, le test requis n'est pas pratique et n'est pas justifié. Les professionnels de la santé qui pratiquent des interventions effractives devraient plutôt procéder à un contrôle régulier de leur état sérologique au VIH. De plus, s'ils reçoivent un diagnostic positif, il devraient demander conseil sur la question de savoir s'ils devraient limiter leur pratique professionnelle afin de protéger leurs patients. Comme l'a souligné Roy, Rien ne semble justifier les approches draconiennes et radicales comme, par exemple, d'exiger d'un chirurgien infecté par le VIH qu'il cesse immédiatement d'exercer. Le principe général est que l'on doit approprier la décision au risque.490 Selon le Dr Roy, trois «conditions essentielles» doivent être prises en considération: • 489 490 182 Le meilleur moyen d'aider les médecins et les chirurgiens séropositifs et leurs patients consiste à créer un environnement non draconien, confidentiel, bienveillant et compréhensif, qui les encourage à demander de l'aide; Supra, note 474, à la p. 1754. Roy, supra, note 77, à la p. 42. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.182 • les médecins séropositifs, surtout ceux dont la spécialité exige l'emploi de méthodes invasives, doivent demander conseil à un spécialiste pour savoir dans quelle mesure ils doivent limiter l'exercice de leur profession en vue d'assurer la protection de leurs patients; pour déterminer s'ils peuvent continuer d'exercer, les médecins et chirurgiens ne doivent pas de fonder uniquement sur leur propre évaluation du risque pour leurs patients; • on peut offrir une protection suffisante aux patients en défendant simplement aux chirurgiens séropositifs de pratiquer certaines interventions présentant un risque particulièrement élevé, sans aller jusqu'à l'interdiction totale d'exercer.491 (4) Conclusion Si l'on adoptait le test requis, les patients en souffriraient, les travailleurs de la santé en souffriraient et les soins de santé en général en souffriraient — et ceci ne réduirait pas le risque.49^ 10. Le test requis des travailleurs de la santé n'est pas justifié. Plutôt, ceux qui pratiquent des interventions effractives devraient surveiller régulièrement leur état sérologique au VIH. S'ils sont séropositifs, ils devraient chercher conseil pour choisir s'ils devraient limiter leur pratique professionnelle afin de protéger leurs patients. Des restrictions aux pratiques pourraient être justifiables pour certaines interventions effractives à risque élevé d'exposition à la transmission (qui devraient être clairement définies). Il est en même temps important de s'assurer que les travailleurs de la santé séropositifs ne soient pas l'objet de discrimination injustifiée et que leur état sérologique ne soit pas indûment divulgué. 491 Une distinction est établie entre les interventions effractives «enclines à l'exposition» et les interventions effractives «non enclines à l'exposition». À l'égard de ces dernières, on considère généralement que les travailleurs de la santé qui sont séropositifs ne devraient pas être restreints dans leur pratique. Dj Mervyn Silverman, président de TAmerican Foundation for AIDS Research, cité dans SCS, 1992, supra, note 471. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 183 9. Test des immigrants La question de savoir si tous les immigrants au Canada devraient subir un test de sérodiagnostic du VIH et, lorsqu'ils sont séropositifs, se voir refuser l'immigration au Canada automatiquement ou dans certaines circonstances, demeure controversée. Les divergences d'opinion sont considérables. Certains, comme le député réformiste Art Hanger, ont lancé des appels en faveur du test requis de tous les candidats à la résidence permanente au Canada et du refus de statut d'immigrant à tous les candidats séropositifs, y compris les réfugiés. De plus, M. Hanger a demandé que l'on interdise également le séjour temporaire aux visiteurs vivant avec le VIH.493 Un projet de loi présenté par lui, qui proposait le test du VIH pour tous les demandeurs de résidence au Canada a toutefois été défait à la Chambre des Communes, en septembre 1994.494 Par la suite, le ministre de l'Immigration Sergio Marchi a déclaré que de refuser les visiteurs séropositifs serait «aller trop loin», mais a annoncé qu'il examinait la question de savoir si les immigrants devraient subir un test.495 D'autres personnes, comme de nombreux militants dans la lutte contre le sida ou des domaines des droits de la personne et des droits des personnes handicapées, pressent le Canada de ne pas refuser d'éventuels immigrants sur la base de la séropositivité 4 9 6 (1) Historique Au Canada, bon nombre des personnes et organisations qui ont exprimé leur point de vue sur cette question ont rejeté le test requis pour les immigrants éventuels. Certaines ont cependant appuyé la thèse du test requis ainsi que l'exclusion des candidats à l'immigration trouvés séropositifs. (i) Développements au Canada Association du Barreau canadien - Ontario De l'avis de l'Association, il existe de «très bon arguments» en faveur de demander que les immigrants potentiels subissent le test, «vu que l'opportunité d'immigrer au Canada est un privilège et non un droit, vu que c'est un critère légitime d'immigration que de pouvoir s'attendre raisonnablement que la personne contribue à la société canadienne» et vu qu'il y a de~ fortes chances que les personnes séropositives imposeraient des coûts considérables aux systèmes de soins de santé du Canada.497 Comité consultatif national sur le SIDA L'avis du CCN-SIDA est que le test obligatoire ou requis n'est pas justifié pour les personnes entrant au Canada pour une bref séjour et qui ne sont pas éligibles aux J. Bryden, «Marchi Considers AIDS Test for Immigrants», The Gazette [Montréal], 26 avril 1994, à la p. B4. Voir les débats de la Chambre des Communes, rapport officiel (Hansard), voL 33, no 96,23 septembre 1996. 495 Supra, note 493. 4 9 6 W.C. Bartlett, AIDS: Legal Issues, Ottawa, Bibliothèque du Parlement, Current Issue Review 93-7E, 14 avril 1994 (révisé le 19 avril 1995), à la p. 5. 4 9 7 ABC-Ontario, supra, note 8, aux p. 37-38. 493 494 184 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.184 programmes de soins de santé du Canada (comme les voyageurs, les visiteurs ou les personnes d'autres pays qui sont en escale). Le Comité a conclu que le test de ces personnes aux fins de contrôler l'infection à VIH n'est pas justifiable: «H s'agit là d'une méthode totalement inefficace de contrôle de la transmission du virus; elle n'est pas rentable financièrement et les préjudices susceptibles d'en découler l'emportent largement sur les avantages».498 Par ailleurs, le Comité a déclaré que le test obligatoire ou requis pour les personnes qui sont (ou peuvent être) admissibles aux programmes de santé du Canada n'est pas justifié lui non plus. Le Comité a reconnu que l'entrée de personnes qui sont (ou pourraient devenir) admissibles aux programmes de santé pourrait s'avérer un fardeau potentiellement important pour les systèmes de santé et d'aide sociale au Canada, et que l'exclusion de tels candidats diminuerait les coûts supplémentaires liés au VIH au Canada qui seraient attribuables à ces personnes. Néanmoins, le Comité a soutenu que, dans l'examen de la question d'administrer le test aux personnes demandant la résidence permanente au Canada, on dénote facilement d'importantes lacunes relatives à des éléments d'information pertinents et nécessaires, y compris: • le manque d'information sur le nombre possible de personnes qui pourraient être . exclues sur la base de leur séropositivité, ainsi qu'au sujet du fardeau potentiel de soins de santé qui pourrait incomber au Canada si l'on ne les excluait pas; et • l'incertitude à prévoir quelles personnes séropositives pourraient devenir malades ou mourir, ou le moment où cela pourrait se produire. En outre, le Comité a dit se préoccuper des préjudices qui pourraient résulter d'un test hors du Canada, pour les demandeurs, y compris «les souffrances, les inconvénients et la discrimination que le test peut engendrer et la difficulté de vérifier l'exactitude des résultats du test s'il est pratiqué à l'étranger».499 Le Comité a conclu qu'il existe un urgent besoin d'information plus poussée sur l'infection à VIH, sur sa prévalence parmi les personnes qui demandent d'immigrer au Canada et sur son impact économique sur les systèmes de santé et d'aide sociale au Canada. Société royale du Canada La Société royale a rejeté les propositions de test requis des personnes demandant la résidence permanente au Canada. Elle a souligné que le Gouvernement du Canada aurait le pouvoir de prendre la décision de requérir que tous les immigrants subissent le test: Les immigrante potentiels au Canada ne sont pas protégés par les lois canadiennes sur les droits de la personne. Il n'y aurait pas d'obstacle juridique à l'imposition du test avant qu'on leur permette d'arriver au Canada, mais, encore une fois, l'objectif et les effets du test doivent être pris en considération. Le test des immigrants au Canada et la déportation de ceux trouvés séropositifs soulève toutefois des questions éthiques, car il faut se pencher, sur la manière dont ces personnes pourraient être traitées en quittant 49 ® Somerville et Gilmore, supra, note 6, à la p. 69. Ibid., à la p. 70. 499 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 185 le Canada. Une telle action soulève aussi des questions d'ordre juridique, puisque les personnes au Canada ont droit à la protection offerte par les lois canadiennes.500 La Société a souligné que d'administrer le test aux immigrants ne préviendrait probablement pas la propagation du VIH et elle a conclu que «une préoccupation légitime quant à l'augmentation du fardeau des contribuables quifinancentle système de soins de santé ne devrait pas justifier le refus de l'entrée à une personne séropositive qui est en bonne santé»: Une personne séropositive asymptomatique peut ne pas présenter de problème de santé à l'heure actuelle et... il est improbable que cette personne soit connue comme un danger pour la santé publique; il est aussi improbable que l'on puisse prévoir que le sida se développera chez quiconque ou créera une demande de services de santé et sociaux. Nous croyons que l'on ne devrait prendre en considération que la santé actuelle d'un immigrant.501 Arguments contre le test du VIH Eri 1989, Margaret Somerville, alors directrice du Centre de médecine, d'éthique et de droit de l'université McGill, publiait dans le Journal de l'Association médicale canadienne un article qui exposait les arguments contre le test du VIH pour les réfugiés et les immigrants. Somerville y souligne d'abord qu'il serait carrément irrationnel d'expulser les immigrants séropositifs pour le motif qu'ils constitueraient un danger pour la santé et la sécurité du public. Elle se concentre ensuite sur le second motif lié à la Loi sur l'immigration d'exclure les immigrants séropositifs — qu'ils imposeraient, ou que l'on peut raisonnablement s'attendre à ce qu'ils imposent, un fardeau trop lourd pour les services médicaux ou sociaux du Canada. Somerville souligne qu'il est difficile d'établir ce qu'on entend par «trop lourd»: , D'abord, chacun de nous, y compris les immigrants, exercera à un moment ou l'autre une demande sur le système canadien de soins de santé. La question de savoir si cette demande est excessive, admettant que le coût de la demande soit le critère pertinent, implique un jugement de valeur.502 Elle souligne que un immigrant, qui peut être plus productif que la personne moyenne, pourrait apporter en 5 ans de travail au Canada une contribution qui surpasse les coûts qu'elle pourrait représenter, même dans le cas où elle tomberait malade et mourrait de maladie liée au VIH. Ce bénéfice net pour l'économie canadienne signifierait-il que cette personne ne devrait pas être considérée comme un coût trop lourd pour le système de santé? Le cas échéant, ne devrait-on pas Mackinncm, Cottrelle etKrever, supra, note 82, à la p. 367. Ibid., à la p. 368. 5 0 2 M A. Somerville, «The Case against HIV Antibody Testing of Refugees and Immigrants», Journal de l'Association médicale canadienne, 1989, 141: 889-894, à la p. 891. À moins d'indication contraire, toutes les références de cette section proviennent de cet article. 500 501 186 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.186 s'abstenir de considérer non-admissible pour des raisons médicales toute personne qui a une espérance de vie d'au moins 5 ans? La seconde raison avancée par Somerville pour démontrer la difficulté de définir l'expression «trop lourd» est que les données sont insuffisantes, en ce qui concerne le coût rattaché au fait de ne pas imposer le test du VIH aux immigrants qui sont asymptomatiques: «Ceci signifie que nous devons décider si l'on devrait présumer qu'ils constitueront un coût excessif et, en conséquence, ne pas effectuer de dépistage, ou vice versa». Selon Somerville, la première approche est préférable, pour deux raisons: D'abord, cela donne le bénéfice du doute aux éventuels immigrants. Les personnes vulnérables, terme qui s'applique à plusieurs cas d'immigrants, méritent ce bénéfice. Ensuite, nous devrions éviter autant que possible la «réification» - considérer les gens comme des choses ou des produits. L'évaluation des immigrants éventuels selon des critères purement monétaires comporte un risque très élevé de conduire à cela; de fait, elle mènerait directement à cela. ... En outre, le fait de prendre pour acquis, sans preuve, que les immigrants séropositifs constitueraient nécessairement un fardeau trop lourd pour les services médicaux du Canada se rapproche dangereusement, aussi, de la possibilité de traiter des personnes comme si elles étaient des ressources monétaires. L'auteure présente ensuite quatre arguments majeurs contre le test rèquis des immigrants503 et conclut que ^ [l]e Canada pourrait offrir au reste du monde un exemple important, voire crucial, s'il était disposé à déclarer que les potentiels coûts monétaires des soins pour les personnes acceptées comme immigrants et qui développent par la suite une maladie liée au VIH sont largement compensés par les valeurs — humanisme et respect des droits de la personne — que nous désirons préserver en choisissant de ne pas administrer le test de l'anti-VIH aux immigrants éventuels qui sont asymptomatiques. Analyse de rentabilité En 1990, Zowall et coll. ont publié les résultats d'une étude sur l'impact économique, pour le système de soins de santé canadien, du test du VIH pour tous les immigrants potentiels au Canada. Les auteurs ont évalué les coûts et les bénéfices qui auraient pu se rattacher au test de 160 135 immigrants arrivés au Canada en 198S. Us ont conclu que le test aurait permis d'économiser 1,7 à 13,7 millions de dollars dans les 10 ans suivant l'immigration. Toutefois, ils ne se sont pas prononcés en faveur du test pour des raisons économiques uniquement, en reconnaissant que toute politique relative au test «se doit d'intégrer des considérations sociales, légales et éthiques».504 503 voir infra, à «Politique d'immigration du Canada». H. Zowall et coll., «Antibody Screening among Immigrants: A Cost-Benefit Analysis», Journal de l'Association médicale canadienne, 1990, 143(2): 101-107, à la p. 101. 504 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 187 (ii) Développements internationaux L'imposition de restrictions aux voyages et à l'immigration des personnes séropositives sont devenues une «composante importante de la réaction d'un nombre croissant de pays à l'épidémie de sida».505 Les restrictions de voyage, en particulier, ont été fortement critiquées. Selon Gilmore et coll., les possibles conséquences néfastes des politiques d'exclusion comprennent: • l'étiquetage et l'exclusion des «faux positifs»; • la création d'une situation propice à un marché noir de certificats falsifiés de séronégativité; • l'interruption de commerce, de migration de travailleurs, d'échanges étudiants, d'activités touristiques et d'autres activités liées au voyage, qui sont essentielles à l'économie de certains pays; • les coûts d'administration de ces politique ou lois, y compris ceux du test lui-même; • l'obstacle à la ramification de familles; • l'abrogation de droits des réfugiés; • le non respect des traités internationaux relatifs à la santé et des lois nationales et internationales en matière de droits de la personne; • la discrimination indue sur la base de l'origine nationale, d'une maladie, d'un handicap, ou de l'orientation sexuelle; • la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH ou le sida, plutôt que des activités qui créent le risque; • la création, parmi les citoyens, d'une fausse impression de sécurité selon laquelle leur pays serait ou deviendrait «sans VIH» à cause de l'exclusion des voyageurs séropositifs; et • le détournement de fonds des efforts nationaux de prévention plus efficaces.506 Selon les Principes directeurs sur le VIH/sida et les droits de la personne, adoptées lors de la Deuxième Consultation internationale sur le VIH/sida et les droits de l'Homme, 5 0 5 M. Duckett, A.J. Oridn, «AIDS-Related Migration and Travel Policies and Restrictions: A Global Survey», AIDS, 1989, 3 (suppl. 1): S231-252, à la p. S231. 506 N Gilmore et coll., International Travel and AIDS», AIDS, 1989, 3 (supplé 1): S225-230, aux p. S228-S229, avec nombreuses références. 188 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.188 » [i]l n'y a pas de fondement de santé publique pour restreindre la liberté de mouvement ou le choix de résidence pour le motif de la séropositivité. En vertu des traités internationaux en matière de santé, la seule maladie qui nécessite un certificat pour les voyages internationaux est lafièvrejaune. Par conséquent, toute restriction de ces droits, y compris le dépistage du VÏH pour les voyageurs internationaux, sur la seule base de la séropositivité au VIH, sont discriminatoires et ne peuvent pas être justifiés par des préoccupations de santé publique. Si des États refusent la résidence à long terme aux personnes vivant avec le VIH/sida, à cause des coûts économiques, ces États ne devraient pas faire un cas particulier du VIH/sida à ces fins, par opposition à d'autres conditions comparables, et devraient s'assurer que de tels coûts sont réellement probables dans le cas individuel de la personne qui demande la résidence. Dans l'évaluation des demandes d'admission, les considérations économiques devraient céder le pas aux préoccupations humanitaires comme la réunification de familles et le besoin d'un asile.507 (2) Situation actuelle (i) Canada Politique du Canada à l'endroit des voyageurs La Loi sur l'immigration du Canada ne mentionne ni le VIH/sida en particulier, ni aucune autre maladie. L'article 19(l)(a) de la loi déclare que les visiteurs au Canada doivent satisfaire à deux critères avant d'entrer au pays: • il ne doivent pas constituer un danger pour la santé et la sécurité publiques; et • leur entrée ne doit pas représenter un fardeau trop lourd pour les services médicaux et sociaux du Canada. Avant 1991, le gouvernement considérait que les personnes vivant avec le VIH/sida représentaient un danger pour la santé publique. La politique gouvernementale était que l'on ne devrait pas permettre à ces personnes de visiter le Canada. Une exception a été faite à l'occasion de la Ve Conférence internationale sur le sida, à Montréal, en 1989; les personnes vivant avec le VIH ou le sida ont eu le droit d'entrer au pays pour participer à la conférence. En avril 1991, le ministre de la Santé et du Bien-être social et le ministre de l'Emploi et de l'Immigration ont annoncé conjointement une nouvelle politique concernant les visiteurs pour une courte durée, qui déclare qu'une personne vivant avec le VIH/sida ne constitue pas une menace pour la santé publique lors d'un voyage de courte durée au Canada et, par 507 Supra, note 92, aux p. 11-12. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 189 conséquent, sera abordée comme n'importe quel autre visiteur au Canada. Les personnes qui «poseraient un risque de devenir un fardeau important pour le système de soins de santé durant leur séjour au Canada seraient encore généralement non-admissibles, ou du moins sujets à une évaluation médicale, mais la nouvelle politique signifie effectivement que les personnes séropositives au VIH et asymptomatiques qui viennent au Canada pour un bref séjour (moins de 6 mois) ne devraient pas se voir refuser l'entrée ou avoir des problèmes à la frontière à cause de leur séropositivité au VIH». 508 Toutefois, même après l'annonce de cette nouvelle politique, certains cas se sont produits où des personnes vivant avec le VIH/sida se sont vu refuser l'entrée au Canada: La nouvelle politique a connu quelques soubresauts dès ses débuts, lorsqu'un homme américain, Craig Rowe, a soutenu qu'on lui avait refusé l'entrée au Canada pour une visite de trois jours à Montréal, le 29 décembre 1991. Il poursuit le gouvernement, alléguant qu'un agent d'immigration lui a dit qu'il représentait un risque de devenir un fardeau pour le système de soins de santé puisqu'il était séropositif au VIH. Cela s'est produit malgré le fait que M. Rowe était en bonne santé et qu'il avait une assurance privée ainsi qu'un billet de retour indiquant que sa visite prévue serait très brève.509 Les responsables de l'immigration ont reconnu par la suite qu'il était nécessaire de donner davantage de formation au personnel des postes-frontières, afin d'assurer une application uniforme de la politique relative aux visiteurs de courte durée.510 Le 3 août 1994, le ministre de l'Immigration d'alors, Sergio Marchi, a écrit à la SCS pour clarifier la politique du gouvernement. Selon le ministre Marchi, • un diagnostic de VIH/sida n'est pas en soi un obstacle au séjour au Canada; • en règle générale, les personnes vivant avec le VIH/sida ne représentent pas un danger pour la santé publique en vertu de l'art. 19 de laLoi sur lImmigration, • il s'agit donc seulement de déterminer si la présence du visiteur séropositif imposera un fardeau trop lourd au système canadien de soins de santé; • les autorités ne croient pas que les visiteurs séropositifs imposent habituellement un fardeau au système de soins de santé; • par conséquent, dans la plupart des cas, les autorités n'invoqueront probablement pas le critère du fardeau trop lourd en ce qui concerne les personnes vivant avec le VIH/sida qui entrent au Canada pour un séjour de courte durée; 508 Bartlett, supra, note 496, aux p. 6-7. Ibid. ™Ibid. 509 190 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.190 • le critère du fardeau ne sera invoqué que si les autorités ont raison de croire que la personne aura besoin de soins médicaux durant son séjour, mais même en pareil cas, une personne ayant pris les dispositions nécessaires pour se faire soigner et payer les traitements pourrait obtenir une permission ministérielle; • la possession de médicaments pour le traitement du VIH/sida ne justifie pas l'interdiction d'entrer au pays; • le gouvernement donnera des renseignements détaillés sur la politique aux agents d'immigration et mettra en oeuvre un programme de formation des agents d'immigration au sujet du VIH/sida. La politique est encore en vigueur et il semble peu probable qu'elle soit modifiée dans un futur proche.511 La mise en oeuvre du programme de formation mentionné dans la lettre du ministre a été complété avant la Xle Conférence internationale sur le sida, tenue à Vancouver en juillet 1996.512 Politique canadienne en matière d'immigration Les personnes qui désirent immigrer au Canada doivent répondre aux mêmes critères que les visiteurs: il ne doivent pas représenter un danger pour la santé ou la sécurité publiques, et leur présence ne doit pas représenter un fardeau trop.lourd pour les services médicaux et sociaux du Canada. À l'heure actuelle, le gouvernement canadien soutient que les* personnes vivant avec le VIH/sida ne représentent pas un danger pour la santé et la sécurité publiques, mais qu'elles représenteraient un fardeau trop lourd pour les services sociaux et de santé du pays. Par conséquent, les candidats à l'immigration qui sont trouvés séropositifs sont évalués «non-admissibles pour des raisons de santé» et ne sont généralement pas acceptés pour immigrer au Canada. Test À l'heure actuelle, il est toutefois possible que des immigrants séropositifs ne soient pas repérés, car il n'existe «aucun programme systématique de dépistage du VIH chez les immigrants éventuels» 513 dans le cadre de l'examen médical que doivent subir les 511 Communication avec le Dr G A. Giovinazzo, directeur. Services de santé de l'immigration, Ottawa, le 13 février 1997. 512 Éditeur, «Rapport sur les politiques canadiennes d'entrée au. pay s et d'immigration des personnes vivant avec le VIH/sida», Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1996, 2(2): 15-16, avec référence à Société canadienne du sida, Rapport sur les politiques canadiennes d'entrée au pays et d'immigration des personnes vivant avec le VIH/sida, Ottawa, la Société, 25 septembre 1995. Correspondance reçue du Dr Giovinazzo, directeur, Services de santé de l'immigration, Ottawa, le 13 février 1997. Cette politique pourrait être révisée d'ici deux ans (communication avec le Dr G A.. Giovinazzo, supra, note 511). Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 191 candidats à l'immigration au Canada, pour vérifier leur état de santé.514 Le médecin chargé de l'examen peut demander à un postulant à l'immigration de subir un test du VIH. Toutefois, les médecins qui effectuent ces examens au Canada ont reçu la directive que «le pays d'origine, la race, le sexe, et l'orientation sexuelle, en soi, ne sont pas des raisons suffisantes de requérir un test du VIH» (emphase dans l'original) [trad.]. Le test du VIH (à la suite de counselling), n'est nécessaire que s'il est indiqué pour des raisons cliniques. L'âge du candidat devrait aussi être pris en considération lorsque l'on évalue l'à-propos d'un test du VIH — le bon sens et l'estimation réaliste du risque devraient prévaloir. Une liste partielle d'indications possibles comprend que: (1) le dossier du candidat fait mention de transfusion de sang ou de produits sanguins n'ayant pas fait l'objet d'un dépistage, ou pour laquelle le matériel utilisé était recyclable et non stérilisé; (2) le candidat présente une perte de poids importante et non expliquée; (3) la candidat a utilisé des drogues par injection à un moment donné par le passé — spécialement si les aiguilles ont été partagées; (4) le dossier ou l'examen médical du candidat présente une condition apparentée au sida; (5) la radiographie du candidat montre des traces d'une ancienne infection tuberculeuse et la personne «risque» d'avoir contracté le virus de l'immunodéficience humaine (i.e. rapports sexuels non protégés avec des prostitués); (6) la mère biologique du candidat est séropositive; (7) le candidat a participé à des activités sexuelles à risque avec un partenaire connu comme séropositif (ou dont il est raisonnable de croire qu'il est séropositif); (8) le candidat a des raisons de croire qu'il peut être séropositif.515 De plus, tout enfant candidat à l'adoption devrait subir un test «lorsqu'il y a une probabilité importante que sa mère biologique était séropositive au moment de la naissance de l'enfant». Par contraste, dans le cas de candidats à un «visa de courte durée 5 1 4 Cet examen médical est un dépistage général dont le but est de déceler des conditions médicales et psychiatriques qui pourraient placer un fardeau trop lourd sur les services sociaux ou de santé du Canada, ou dont ou pourrait raisonnablement s'attendre à ce qu'elles constituent une menace pour la santé ou la sécurité publiques. 515 Supra, note 513. Ces directives sont celles adressées aux médecins chargés des examens de candidats à l'immigration au C m * * » Il est prévu que leur application soit élargie aux États-Unis au cours des prochains mois, mais «il pourrait bien y avoir des changements aux directives à l'intention des médecins qui pratiquent outre-mer (correspondance reçue du Dr Giovinazzo, le 14 février 1997). 192 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.192 pour le Canada, on ne devrait demander de subir un test du VIH qu'en présence de signes du syndrome de l'immunodéficience acquise».516 «Fardeau trop lourd» De nouveaux règlements sur la non-admissibilité pour des raisons de santé sont en développement depuis plusieurs aimées. Si elles sont adoptées, elles pourraient modifier la situation actuelle, qui interdit l'immigration au Canada des personnes connues comme étant séropositives ou.ayant le sida. Une première ébauche de la nouvelle réglementation, pré-publiée en août 1993, prévoyait une «fenêtre de comparaison» d'une durée de 5 ans, dans l'évaluation d'un «fardeau trop lourd»: les candidats à l'immigration seraient admissibles du point de vue médical lorsque, sur une période de 5 ans, ils ne coûteraient pas plus cher au système de santé que la moyenne des citoyens canadiens ou des résidents permanents. Ainsi les cas de VIH «récent» seraient admissibles au Canada.517 Une ébauche révisée des règlements était censée être pré-publiée vers la fin de juin 1995 518 Cependant, le processus de définition de la non-admissibilité pour des raisons médicales se poursuit et il semble maintenant «improbable» que la «fenêtre de comparaison» de 5 ans proposée dans la première ébauche soit maintenue après cette étape.519 Par ailleurs, il semblerait que certaines personnes vivant avec le VIH, quoique techniquement non-admissibles pour des raisons médicales, aient été autorisées à entrer au Canada pour des motifs d'ordre humanitaire.520 516 Ibid. Bartfett, supra, note 496, à la p. 6. Pour plus de détails, voir S. Wilson, «Développements récents en droit de Timmigration», Bulletin canadien VÏH/sida et droit, 1994, 1(1): 10-11. 5 1 8 Bartlett, ibid. Communication avec le Dr.Giovinazzo, supra, note 511. 520 Ibid:, voir aussi R. Carey, ((Remise en question du refus de soins médicaux à des immigrants séropositifs par l'Ontario», Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1997, 3(2-3): à paraître. 517 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 193 Politique canadienne à l'endroit des réfugiés Contrairement aux immigrants, les personnes reconnues comme des réfugiés ne sont soumises à aucun critère médical. On connaît au moins un cas de personne qui a été ouverte au sujet de sa séropositivité et qui a été admise au Canada en tant que réfugié.521 (S) Hors du Canada Des sondages ont révélé qu'au moins 50 pays restreignent l'entrée aux personnes vivant avec le VIH ou le sida. 522 Très peu de pays vont aussi loin que d'interdire l'entrée aux personnes séropositives, même pour de brèves périodes de temps, comme le font les États-Unis. Certains pays demandent le test de tous les demandeurs de résidence à long terme et prévoient l'exclusion des candidats diagnostiqués séropositifs. D'autres pays administrent le test à tous les candidats mais n'excluent pas automatiquement tous ceux qui sont diagnostiqués séropositifs. Le texte qui suit examine la situation en Australie, pays qui se compare le mieux avec le Canada en termes de politiques générales d'immigration. Australie En Australie, jusque en 1994, aucune personne vivant avec le VIH n'avait pu obtenir le statut de résident permanent. En 1994, les pressions d'organismes communautaires ont toutefois entraîné l'instauration d'un nouveau système d'examen des demandes formulées par des personnes vivant avec le VIH. Le système australien permet maintenant aux personnes vivant avec le VIH d'obtenir le statut de résident permanent - dans certaines circonstances.523 En 1989, le gouvernement australien publiait un premier document, intitulé HIV/AIDS Strategy, qui contenait la déclaration suivante: National Les candidats à la résidence permanente seront soumis à des tests de sérodiagnostic du VIH. Cette mesure n'est pas destinée à avoir une influence - significative sur la propagation du VIH, mais l'infection à VIH, comme toute autre maladie, est un facteur à considérer dans l'examen des demandes, du fait des coûts éventuels considérables pour la société australienne. Un résultat positif n'aura pas automatiquement pour effet d'exclure les candidats à la résidence permanente; une certaine latitude sera conservée pour que certaines demandes soient acceptées dans les cas qui le justifient, pour des raisons humanitaires ou autres. 5 2 1 Voir S. Wilson, «Réfugié séropositif admis au Canada», Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1995, 1(3): 5. La Commission de I mmigration et du statut de réfugié a accordé le statut de réfugié à un Polonais persécuté à cause de son orientation sexuelle et de son statut de personne séropositive ([1994] DSSR no 92 (QL). Cette décision a été critiquée par le député réformiste Grant Hill, qui a prétendu que le Canada attirerait désormais les personnes atteintes de graves maladies. Sergio Marchi, alors ministre de l'Immigration, a répondu en soulignant que chaque demande de statut de réfugié était évaluée de façon individuelle. 522 voir, par exemple, Duckett et Orkin, supra, note 505. 523 Voir Éditeur. « Australie: résidence permanente accordée à des:personnes séropositives», Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1995,2(3): 19-20, avec référence à M Alexander, «HIV and Permanent Residence», HIV/AIDS Legal Link [Australie], 1995, 6(2): 8-10. Certaines parties du texte qui suit sont tirées de l'article de Alexander. 194 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.194 *u Entre 1989 et 1993, cependant, aucune demande de résidence permanente d'un candidat séropositif n'a été acceptée et un certain nombre de personnes ont été refusées uniquement à cause de leur séropositivité. Ce n'est qu'après une rencontre entre la Australian Federation of AIDS Organisations (AFAO) et le Department of Immigration and Ethnic Affairs de l'Australie, que les directives concernant le VIH/sida dans l'examen des demandes ont été révisées pour être conformes avec la politique gouvernementale annoncée en 1989. Depuis le début de 1994, un certain nombre de personnes vivant avec le VIH ont obtenu la résidence permanente en Australie. Test du VIH Par opposition au Canada, en Australie toute personne âgée de 15 ans ou plus qui désire obtenir la résidence permanente, ou une résidence temporaire de 12 mois ou plus, doit subir un test du VIH. Les enfants de moins de 15 ans doivent subir un test s'ils sont adoptés par un résident australien et qu'ils ont déjà reçu des transfusions sanguines ou qu'ils présentent des signes de maladie. Le test de sérodiagnostic du VIH fait partie des examens médicaux subis par toute personne qui demande la résidence permanente. Exigences en matière de santé En pratique, une personne dont le résultat au sérodiagnostic du VIH est positif ne satisfait pas aux exigences relatives à la santé qui s'appliquent à toutes les classes d'immigrants, sauf aux demandeurs de statut de réfugié qui soumettent leur demande une fois arrivés en Australie. Toutefois, les exigences en matière de santé peuvent être écartées dans certaines circonstances. Les exemptions sont d'une portée limitée, et seules les personnes des catégories suivantes peuvent s'en prévaloir: • le conjoint, y compris le conjoint de fait, d'un citoyen australien ou d'un résident permanent; • les interdépendants, incluant les partenaires gais ou lesbiennes de citoyens australiens ou de résidents permanents; • l'enfant d'un citoyen australien ou d'un résident permanent; et • les cas de réfugiés ou de considérations humanitaires. Si un candidat appartenant à l'une, de ces catégories ne satisfait pas aux exigences habituelles en matière de santé, le Department of Immigration and Ethnie Affairs (DIEA) a l'obligation d'établir s'il y a lieu d'écarter ces exigences. Dans cette optique, la question principale consiste à déterminer si le fait d'accorder un visa à une personne vivant avec le VIH est susceptible d'imposer un coût démesuré à la communauté. Dans chaque cas, le DIEA devra obtenir du Department of Human Services and Health une évaluation, pour la durée de la vie de la personne, du coût global des traitements, des soins, de la sécurité sociale et du logement que devrait supporter l'État. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 195 Le montant actuellement utilisé se chiffre à environ 240 000$ CDN, mais il peut être inférieur selon le stade de développement de la maladie. Dans leur décision, les fonctionnaires du DIEÀ doivent prendre en considération: • l'étendue des services sociaux, médicaux, hospitaliers ou autres soins institutionnels susceptibles d'être requis en Australie; • les besoins éducatifs et occupationnels du candidat en Australie, et ses perspectives d'avenir, • la disponibilité de services de santé, de bien-être, d'éducation et d'emploi adéquats dans la région où le candidat souhaite résider, et la demande locale en ce qui a trait à ces services; • la volonté et la capacité d'un répondant, d'un autre membre de la famille, d'une autre personne ou d'un organisme de fournir des services et des soins spéciaux sans frais pour le public; • le risque de détérioration de l'état de santé du candidat, considérant non seulement les facteurs médicaux connus, mais l'influence de facteurs tels les contraintes d'adaptation à un nouvel environnement, le style de vie, l'occupation, etc.; • le coût global supporté par les fonds publics australiens pendant la durée de la vie du candidat. La décision doit comparer le coût estimé (un «facteur négatif») et les facteurs positifs relevés dans la demande. Si les facteurs positifs l'emportent, le décideur peut mettre de côté les exigences relatives à la santé et accorder le visa. Mise en oeuvre de la politique Selon l'AFAO, la politique semble fonctionner de façon satisfaisante: à sa connaissance, depuis le début de 1994, aucun candidat n'aurait vu sa demande de résidence permanente refusée uniquement à cause du VIH. Des demandes ont été accordées dans des cas de: • maris ou femmes de citoyens australiens et de résidents permanents; • partenaires gais de citoyens australiens et de résidents permanents; • enfants de citoyens australiens et de résidents permanents; • réfugiés. Les candidats séropositifs sont considérés de la même façon que ceux atteints d'autres types d'invalidités, telles les maladies cardiaques. Cependant, il y a encore un grand 196 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.196 nombre de personnes séropositives -et autrement admissibles à l'immigration — qui n'ont aucune chance d'obtenir la résidence dans le cadre dé la loi actuelle. (3) Évaluation Le Canada est fortement engagé aux: droits de la personne, mais pour la plupart d'entre nous il s'agit d'un engagement théorique plutôt qu'un engagement qui est régulièrement mis à l'épreuve par la pratique. La transmission du VIH et le sida constituent un test pratique de notre engagement réel vis-à-vis des droits de la personne; la manière dont nous relèverons ce défi dans le domaine de l'immigration offrira un exemple particulier et important, à ce chapitre.524 (i) Politique canadienne en matière de voyages Comme l'a déclaré la SCS, la politique actuelle du Canada en matière de voyage pour les personnes vivant avec le VIH ou le sida représente le meilleur compromis que nous pouvions obtenir. Le gouvernement ne donne aucune garantie absolue en ce qui concerne l'entrée au pays de toute personne vivant avec le VIH/sida. Il exige que tous les visiteurs, y compris les personnes vivant avec le VIH/sida, remplissent les deux conditions d'ordre médical décrites dans la Loi sur l'Immigration et que chaque cas soit évalué en fonction de ces conditions.525 En particulier, dans sa lettre à la SCS, datée du 3 août 1994, le ministre de l'époque offrait: • une clarification de la politique et une déclaration claire à l'effet que (1) les visiteurs ne seraient pas exclus en raison de leur état sérologique et que (2) la grande majorité des personnes vivant avec le VIH/sida pourraient visiter le Canada; • . un engagement à expliquer clairement la politique aux agents d'immigration; • 524 525 un engagement à former les agents d'immigration au sujet du VIH/sida. Somerville, supra, note 502, à la p. 893. Supra, note 512. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 197 (ii) Politique canadienne en matière d'immigration Tandis que le Canada mérite des félicitations pour n'avoir pas rendu obligatoire le test du VIH pour tous les candidats à l'immigration, l'exclusion systématique de tous les immigrants connus comme vivant avec le VIH/sida n'est pas appropriée. Test Pour plusieurs raisons, le Canada devrait conserver sa politique actuelle de ne pas demander systématiquement un .test du VIH à tous les candidats à l'immigration. Somerville en a bien exposé les raisons: • L'existence même d'un test n'est pas gage d'un usage acceptable, encore moins du fait que l'on doive l'utiliser. Plusieurs tests qui deviendront disponibles ne devraient probablement pas être utilisés pour le dépistage chez les immigrants, ou des gens dans bien des circonstances, parce que les préjudices qui s'y rattachent, que ce soit pour les personnes qui les subiraient ou pour les valeurs de notre société, ne sont pas surpassés par leurs bénéfices compensatoires. • Deuxièmement, l'instauration d'une telle procédure de test pourrait éveiller et confirmer les préjugés les plus profonds chez des gens qui s'opposent à quiconque leur semble différent d'eux-mêmes, parmi lesquels les immigrants font souvent figure de proue. • Troisièmement, à une époque où plusieurs pays ferment leurs portes aux immigrants et aux visiteurs pour le motif de leur séropositivité au VIH, le Canada pourrait se distinguer comme un exemple éclairé de la conduite opposée. • Quatrièmement, il existe des préoccupations techno-humanitaires à l'appui de l'argument défavorable au test requis de sérodiagnostic des candidats à l'immigration qui sont asymptomatiques. ... Un problème [important] serait l'effet sur les personnes identifiées séropositives et vivant dans des pays dont les lois sont coercitives... Somerville a conclu que «même si le Canada devait assumer des coûts pour les soins de santé supplémentaires parce que des immigrants vivant avec le VIH étaient admis, le fait de ne pas demander un test requis des anticorps anti-VIH aux candidats à l'immigration qui sont asymptomatiques représenterait pour le Canada des accomplissements qui surpassent de beaucoup n'importe quelles pertes qu'impliquerait une telle politique de test requis».526 H est reconnu que l'opportunité d'immigrer au Canada est un privilège et non un droit, et que le critère est légitime, aux fins d'immigration, de pouvoir s'attendre raisonnablement à ce qu'un candidat contribue à la société canadienne. Il est aussi reconnu que les personnes séropositives imposeront des coûts aux systèmes de soins de santé du Canada. 526 198 Supra, note 502, aux p. 893-894. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.198 Néanmoins, tel que le démontre Somerville, le test requis n'est pas justifié. Les immigrants seraient le premier groupe et — puisque les garanties constitutionnelles s'appliquant aux résidents canadiens n'autorisent pas le test sans consentement sauf dans des circonstances très limitées — probablement le seul auquel on imposerait un test requis de sérodiagnostic du VIH. Ceci aurait pour effet de stigmatiser fortement tous les candidats à l'immigration et les immigrants qui vivent déjà au Canada, qui pourraient ainsi être perçus comme un groupe «à risque élevé» de VIH alors qu'il n'y a aucune preuve que le VIH soit particulièrement plus prévalent parmi les immigrants au Canada. Par ailleurs, bien que le test requis de tous les immigrants constituerait le seul moyen d'identifier tous les candidats à l'immigration qui vivent avec le VIH, on effectue déjà une étude de dossier relativement au VIH et l'on demande déjà à plusieurs candidats à l'immigration de se prêter au test de sérodiagnostic. En conséquence, il est probable que la majorité des candidats séropositifs soit déjà repérée, et ce, sans que l'on doive procéder au test de tous les immigrants. En outre, un nombre croissant de tests deviennent disponibles, notamment des instruments de dépistage génétique, qui peuvent «nous permettre, si nous sommes prêts à les utiliser, de prédire plus ou moins précisément lë moment et la cause probables du décès éventuel d'une personne».527 La question, si l'on imposait le test requis de sérodiagnostic du VIH, serait de savoir si l'on doit aussi avoir recours à de tels tests dans le cas des immigrants. «Fardeau trop lourd» Tel que mentionné ci-dessus, le Canada a amorcé une révision de ses règlements relatifs à la non-admissibilité pour des raisons médicales. La formulation d'un ensemble de règlements proposé en juin 1992 par Emploi et Immigration Canada52* semblait s'éloigner de l'actuelle politique d'exclusion systématique des personnes vivant avec le VIH/sida, mais en des termes vagues ët sujets à interprétation. À l'heure actuelle, la redéfinition de la non-admissibilité pour des raisons médicales se poursuit. Indéniablement, il faut au Canada un système qui n'exclura pas de l'immigration les personnes vivant avec le VIH/sida ou des conditions semblables, mais qui prendra en considération les circonstances personnelles de chaque cas. En ce qui concerne le VIH, la situation évolue rapidement: à cause de nouveaux traitements, les personnes vivant avec le VIH ont une vie plus longue et potentiellement plus productive, au cours de laquelle elles peuvent contribuer considérablement à la société canadienne. Par contre, le coût de ces nouveaux traitements est élevé. Il ne sera pas facile d'évaluer les coûts potentiels et les gains potentiels liés au fait d'autoriser une personne séropositive à immigrer au Canada, mais il est nécessaire de tenter cette évaluation. Dans un grand nombre de cas, les bénéfices surpasseront les coûts et les personnes vivant avec le VIH devraient pouvoir immigrer au Canada pour cette raison. Par ailleurs, dans certains cas, même si en termes strictement financiers les coûts surpassaient les bénéfices, on devrait autoriser des personnes vivant avec le VIH à immigrer au Canada pour des raisons humanitaires. Le système de l'Australie, pour évaluer l'éligibilité des candidats, quoique imparfait, est certainement 7&K*.,àlap. 892. 527 ^ Medical Inadmissibility Review, recommandations préparées par Emploi et Immigration Canada en consultation avec Santé Canada, juin 1992. 52 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 199 meilleur que le système actuel du Canada et pourrait nous servir d'exemple. Dans tout système, il faudra s'assurer de ne pas considérer le VIH et le sida différemment d'autres maladies ou situations auxquelles sont rattachés des coûts potentiellement élevés pour les contribuables canadiens. Tout règlement relatif à la non-admissibilité pour des raisons médicales doit être appliqué de façon juste et équitable pour tous les candidats à l'immigration, y compris les personnes vivant avec le VIH/sida. Enfin, en tant que société, nous devons aussi prendre une décision fondamentale sur la manière dont nous voudrions procéder à l'exclusion de candidats à l'immigration. Décidera-t-on de considérer non-admissible pour des raisons médicales quiconque a plus de 50 ans parce qu'il est peu probable qu'il contribue à la société canadienne de manière importante, en termes économiques, mais qu'il aura probablement besoin de soins médicaux coûteux, relativement peu après avoir immigré au Canada? Procédera-t-on au dépistage de problèmes génétiques? Nous suggérons que l'on devrait ne pas le faire. Les immigrants, en tant que groupe, ont contribué et continuent de contribuer à la société canadienne de manière importante. En reconnaissant ceci, le mécanisme de révision relatif à la non-admissibilité pour des raisons médicales devrait permettre que l'on tienne compte de considérations humanitaires. (4) Conclusion IL Pour plusieurs raisons, le Canada ne devrait pas. mettre en oeuvre une politique de test requis de tous les candidats à l'immigration. De plus, le système actuel, en vertu duquel les candidats à l'immigration trouvés séropositifs sont déclarés «non-admissibles pour des raisons médicales», devrait être modifié pour ne pas rejeter automatiquement les demandes d'immigration des personnes vivant avec le VIH/sida ou des conditions semblables. Un nouveau système devrait prendre en considération les circonstances individuelles de chaque cas, comparer les coûts et les bénéfices relatifs à l'autorisation d'une personne à immigrer, et tenir compte de considérations humanitaires. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.200 H. Confidentialité"? La confidentialité médicale est un aspect tellement important, dans le contexte du test du VIH et de la déclaration de cas, parce qu'elle a été largement reconnue comme un élément crucial d'une réaction efficace contre le sida. Non seulement le principe repose-t-il sur des normes d'éthique quant à l'autonomie et au respect de la vie privée, mais il est aussi considéré comme crucial pour inciter les personnes les plus vulnérables à se prévaloir du test du VIH et de soins cliniques. Mais, si important soit le principe de la confidentialité, il a ses limites. Lorsque des préoccupations sociales concurrentes sont suffisamment importantes, les médecins et les spécialistes de l'éthique reconnaissent que l'on peut y faire exception. La définition du seuil où les préoccupations atteignent une importance suffisante, néanmoins, a toujours été au cœur d'un débat sérieux.53® Tel que l'a déclaré la CRDO, [l]a cueillette, l'utilisation et la divulgation appropriée de renseignements personnels relatifs au VIH peut être utile pour la société: Mais la divulgation non autorisée de l'état sérologique au VIH d'un individu peut entraîner l'opprobe social, l'abandon par la famille et les amis, la perte de l'emploi, du logement et de l'assurance.531 La majorité des personnes vivant avec le VIH/sida au Canada font partie de groupes qui subissent de la discrimination. Ceci est d'une importance particulière étant donné que «en ce moment, l'arme principale dans le combat contre la propagation du VIH réside dans la modification des comportements». Par conséquent, les responsables de la santé publique, les associations professionnelles du domaine médical et les organisations de lutte anti-sida, entre autres, ont demandé à ce que l'on renforce les protections de la confidentialité des renseignements personnels relatifs au VIH. Où la ligne de démarcation se situe-t-elle, cependant, entre le besoin de confidentialité du patient et la protection de la santé publique? Devrait-il y avoir une obligation à préserver la confidentialité du patient si un partenaire qui ne se doute derienest en situation de risque d'infection? La ligne devrait-elle s'étendre pour inclure les groupes de la société qui prétendent avoir un «droit de connaître» l'état sérologique de personnes séropositives au VIH?532 5 2 ^ Le terme «confidentialité» est dérivé de deux racines latines: con- (complétude) et fidere (faire confiance). La notion de confidentialité comprend donc celle de confiance complète, de donner un renseignement en ayant confiance au secret 53 ® r Bayer, «HIV Testing and Reporting», supra, note 28. 531 Supra, note 14, avec référence à L. Gostin, «A Decade of a Maturing Epidemic: An Assessment and Directions for Future Public Policy», Notre Dame Journal of haw. Ethics & Public Policy, 1990, 5: 7, à la p. 27. 532 Ibid., avec références nombreuses. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 201 Ces questions que soulevait la CRDO en 1992 sont au centre d'un débat qui se poursuit. De fait, le degré de controverse qui les entoure s'est accru, en raison des nouveaux développements qu'aborde le présent Document de travail Ce chapitre examine en premier lieu les recommandations formulées par des organisations canadiennes, de 1986 à 1996, quant aux points suivants: • la déclaration de cas • la notification des partenaires (aussi appelée «relance des contacts»);533 et • la confidentialité et le «besoin de connaître» des renseignements relatifs au VIH/sida (Historique). Le chapitre examine ensuite la situation actuelle au Canada sur ces trois points, en soulignant que — spécialement en ce qui concerne la déclaration de cas et la notification des partenaires — on observe dans la législation et la pratique, d'un territoire ou d'une province à l'autre, des divergences marquées (Situation actuelle). On procède ensuite à: «La relance des contacts» ou «notification des partenaires» a été définie comme «la diversité des activités du domaine de la santé publique par lesquelles on informe et on conseille des partenaires sexuels ou de partage de matériel d'injection, et on -leur offre dies services» (OMS, «Consensus Statement on Partner Notification for Preventing HIV Transmission», Venereology, 1990, 3(1): 17) [trad.]. On rencontre principalement trois modèles d'identification et de recherche des contacts d'une personne séropositive ou ayant le sida (voir Flanagan, «Equality Rights for People with AIDS: Mandatory Reporting of HIV Infection and Contact Tracing», McGill Law Journal, 1989, 34: 531-602, à la p. 551, avec référence au Intergovernmental Health Policy Project, George Washington University, AIDS: A Publie Health Challenge, Washington (D.C.), George Washington University, 1987): 533 La «recherche active» des contacts (aussi appelée «référence à un médecin») implique la notification, au sujet de leur potentielle exposition au VIH, d'autant de contacts d'une personne séropositive qu'il est possible de réaliser. Les responsables de la santé publique demandent au patient les noms des personnes avec lesquelles il a eu des contacts et ils les informent de l'exposition sans révéler l'identité de la personne séropositive. On conseille alors à ces partenaires de se prévaloir de counselling et de considérer la possibilité de subir un test La «recherche limitée» des contacts ne vise pas à identifier le plus grand nombre possible de partenaires de la personne séropositive, mais seulement de prévenir ses partenaires " n m ^ a t c ou principaux pour les relations sexuelles ou le partage de matériel d'injection, lorsque ces partenaires pourraient ne pas être conscients d'un risque d'infection. La «recherche volontaire» des contacts (aussi nommée «référence au patient») consiste à inciter la personne séropositive à avertir elle-même ses partenaires et à leur conseiller d'obtenir du counselling et un test Le médecin du patient et les responsables de la santé publique ne sont généralement pas . impliqués dans ce mécanisme de notification, mais ils peuvent apporter de l'aide si la personne séropositive le demande. Depuis quelques années, on tend à utiliser les termes «notification ou counselling des partenaires» pour refléter une approche qui encourage les personnes séropositives à faire connaître à leurs partenaires sexuels, ou d'injection, une exposition à l'infection (voir ACSP, supra, note 16, à la p. 22). 202 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.202 • analyser les raisons pour lesquelles la confidentialité est généralement importante en médecine et particulièrement importante dans le contexte du VTH/sida; • souligner que, pour plusieurs raisons, il est souvent très difficile de protéger la confidentialité et il peut même s'avérer irréaliste de viser ceci — certains ayant qualifié la confidentialité de «concept désuet»; • examiner certaines limites au principe de confidentialité, qui viennent s'ajouter à la difficulté de la protéger, le document aborde trois sujets controversés: la déclaration des cas de VIH et de sida, les programmes de notification des partenaires ou de relance des contacts, ainsi que les arguments de certaines personnes qui prétendent avoir un «besoin de connaître» l'état sérologique d'autres personnes au VIH; et • suggérer des façons de mieux protéger la confidentialité (Évaluation). Le document conclut que, en dépit des nouveaux développements, la confidentialité continue de revêtir une importance particulière dans le contexte du VIH/sida, puisque le VIH/sida continue d'être une condition différente de la plupart des autres maladies et d'attirer la stigmatisation et la discrimination à l'endroit des personnes vivant avec le VTH/sida ou affectées autrement. En ce qui concerne la déclaration de cas, le document exhorte à ce que lès cas de VIH et de sida soient déclarés toujours de façon non nominative: la déclaration nominative n'est justifiée ni par des objectifs de surveillance, ni par des objectifs de notification. En ce qui concerne la notification des partenaires, le document reconnaît son utilité dans certaines situations. Toutefois, il met en garde contre l'exagération de l'importance des efforts consacrés à la notification des partenaires. Pour les populations les plus vulnérables à contracter le VIH, l'éducation ciblée et le soutien par des programmes communautaires demeurent essentiels. Il serait dangereux d'accroître le financement consacré aux programmes de notification des partenaires sans, à tout le moins, maintenir le niveau actuel dufinancementdes programmes d'éducation et de soutien. En ce qui concerne la communication de renseignements personnels sur le VIH/sida à des tiers, le document soutient que, dans la grande majorité des cas, il n'existe pas de «besoin de connaître» l'état sérologique d'une personne. Enfin, le document conclut que, en dépit de l'importance d'efforts pour mieux protéger la confidentialité, il est peut-être plus important de déployer des efforts pour protéger les personnes vivant avec le VIH/sida contre la discrimination, compté tenu des limites de la confidentialité et du constat des difficultés de la protéger en pratique. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 203 t. Historique (1 ) Association du Barreau canadien — Ontario Les individus et les organisations qui ont analysé les questions soulevées par la confidentialité des renseignements personnels relatifs au VIH/sida au Cànada ont généralement insisté sur l'importance du respect de la confidentialité de cette information, mais ils ont reconnu les limites de la confidentialité. En ce qui concerne la déclaration, la plupart des individus et des organisations ont conclu que les cas de VIH et de sida ne devraient pas être rapportés de façon nominative; en ce qui concerne les programmes de notification des partenaires, ils ont souligné les limites de tels programmes et déclaré qu'ils ne peuvent être utiles que dans des circonstances limitées; quant aux demandes de certaines personnes qui affirment avoir «besoin de connaître» l'état sérologique d'autres personnes, ils ont généralement considéré que ce besoin n'existe que dans des circonstances exceptionnelles et que la prétention d'avoir besoin de connaître l'état sérologique d'autrui afin de se protéger est basée la plupart du temps sur l'ignorance ou sur des conceptions érronées. (i) Déclaration Le rapport de l'Association a recommandé que les cas de VIH et de sida doivent être déclarés, mais soulignait que lés mécanismes de déclaration devraient s'abstenir d'utiliser des renseignements personnels tels les initiales du patient, son adresse de résidence ou sa date de naissance, qui ne devraient d'ailleurs pas faire partie des formulaires de déclaration à envoyer aux autorités médicales. Selon le rapport, les renseignements personnels ne sont pas utiles à l'objectif de cueillette de données épidémiologiques visé par la déclaration. De plus, à la lumière de la recommandation du rapport, que la responsabilité de notifier les partenaires soit celle du médecin et non d'un responsable de la santé ou d'un médecin hygiéniste,534 «il n'est pas nécessaire que le responsable de la santé publique connaisse les renseignements sur l'identité personnélle aux fins d'informer des partenaires».535 (ii) Notification des partenaires L'Association a exprimé l'avis que, dans certaines circonstances, «la relance des contacts peut aider aux objectifs de l'éducation et du counselling, aidant ainsi à la prévention de la propagation de la maladie».536 Elle a toutefois admis que la relance des contacts au sein de groupes dits «à risque» peut être à la fois irréalisable et non nécessaire, et ce, dans la plupart des cas: Si les personnes des groupes «àrisqueélevé» agissent comme si elles étaient séropositives, qu'elles connaissent ou non leur état sérologique, alors l'éducation et le counselling.ne leur seraient pas nécessairement utiles. .De plus ... il peut s'avérer impossible de retrouver les contacts au sein de certains 534 535 536 204 Voir infra. ABC-Ontario, supra, note 8, à la p. 50. T&tf., à la p. 51. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.204 groupes à risque élevé, du moins si le patient a eu des partenaires très nombreux» 5 3 7 Par contre, l'Association a conclu que, dans les cas de partenaires qui pourraient ne pas être informés des risques auxquels ils sont exposés, la relance des contacts est une initiative nécessaire et justifiable dans le cadre des efforts pour protéger la santé publique».538 En ce qui concerne la façon et la personne responsable die procéder à la notification des partenaires, l'Association a déclaré que l'obligation initiale de notification des partenaires devrait reposer sur le médecin du patient. En reconnaissant toutefois que «certains membres de la profession médicale sont incapables de, ou non disposés à, s'acquitter de cette fonction», l'Association reconnaît que les médecins devraient avoir le choix de s'occuper eux-mêmes dé la notification des partenaires ou de référer l'affaire à un médecin hygiéniste. De manière importante, l'Association a reconnu que si l'on s'attend à ce que les médecins soient des partenaires efficaces dans le mécanisme de notification des partenaires, il doivent recevoir mie compensation adéquate pour leur implication. Enfin, elle a recommandé que des changements soient apportés aux règlements relatifs à la confidentialité, afin que les médecins puissent procéder à informer les partenaires sans crainte de tromper leur devoir envers leur patient. (iii) Confidentialité et besoin de savoir De l'avis de l'Association: [i]l est très important pour la relation médecin-patient et, en fait, pour toute provision efficace de soins de santé dans le cadre du système actuel, qu'il y ait un respect mutuel du caractère confidentiel de l'information sur les soins du patient qui circule entre ce dernier et la personne qui le soigne. Le médecin ne peut pas porter un diagnostic précis sur un patient, ni le traiter, si le patient ne lui révèle pas toute l'information pertinente. En revanche, le patient ne sera pas porté à communiquer l'information aussi complètement et précisément s'il n'a pas absolument confiance que cette information demeurera confidentielle. À la lumière de ces faits, le médecin a à la fois une obligation éthique et légale de respecter l'information confidentielle qu'il reçoit de son patient.539 Toutefois, l'Association a souligné que «l'obligation de confidentialité est sujette à des requêtes qui peuvent être imposées par la loi». Outre la déclaration obligatoire requise par les lois sur la santé publique, l'Association n'a accepté que deux situations dans lesquelles il serait justifié qu'un médecin communique de l'information confidentielle à une tierce personne: 537 m 5 3 8 Ibiâ.t 539 Ibid., à la p. 54. à la p. 52. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 205 o lorsqu'un patient semble incapable ou ne pas vouloir agir de façon responsable, et qu'il expose par conséquent d'autres personnes à un risque de préjudice grave; et • lorsqu'un médecin a besoin de communiquer de l'information dans le contexte de la notification des partenaires ou du counselling. (2) Comité consultatif national sur le VIH/SIDA (i) Déclaration Dans ses recommandations de 1988 sur le test du VIH au Canada, le CCN-SIDA a recommandé que «à l'heure actuelle au Canada, la déclaration aux autorités de la santé publique des résultats de la recherche de l'anticorps anti-VIH ... [soit] non nominative».540 (ii) Notification des partenaires Dans un énoncé publié en 1987,541 le CCN-SIDA a privilégié l'approche «la moins envahissante, la moins restrictive et la plus efficace qui soit», en matière de notification des partenaires. Cette approche, a reçu ensuite l'appui de Somerville et Gilmore.542 De l'avis du CCN-SIDA, afin que la notification des partenaires porte fruit, tous les efforts possibles doivent être faits pour: • protéger les droits à la vie privée et à la confidentialité du sujet testé; • favoriser la coopération des personnes diagnostiquées séropositives au VIH à informer leurs partenaires de la possibilité qu'ils aient été exposés au VIH ou y aient exposé d'autres personnes; et • donner aux médecins les moyens de demander légalement l'aide des instances de santé publique «chaque fois que la recherche des partenaires n'est pas faite volontairement et que la recherche par un tiers est moralement justifiée».543 Il est reconnu que la notification des partenaires par un tiers sans le consentement explicite de la personne testée constitue une intrusion dans sa vie privée et un abus de confiance et peut luifoiresubir un préjudice ou établir une discrimination à son égard. En conséquence, la recherche des partenaires doit être justifiée dans chaque cas où le sujet contaminé [sic.] refuse de procéder lui-même à cette recherche ou d'autoriser son médecin à le faire.544 CCN-SIDA, supra, note 1, à la p. 39. 1 Rapport hebdomadaire des maladies au Canada, 1987, 13: 13-14. 542 Supra, note 6, à la p. xii. M Ibid. 5 4 4 7&irf.,àlap. 19. 540 54 206 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un documentdetravail.206 En outre, le rapport publié par le Comité en 1992, sur Le VIH et les droits de la au Canada contenait lui aussi un chapitre sur la notification des partenaires.545 personne (iii) Confidentialité et besoin de savoir Selon le rapport de Somerville et Gilmore de 1988, présenté au CCN-SIDA et approuvé par lui, [l]a divulgation à autrui, sans le consentement explicite du sujet testé, de renseignements obtenus par le biais du test de détection des anticorps antiVIH, représente un abus de confiance, une incursion dans sa vie privée et constitue unrisquetrès réel de préjudice ou de discrimination injustifiée pour le sujet testé. Il est d'autant plus important de comprendre la vulnérabilité de quiconque subit le test que les renseignements fournis spontanément par le sujet ou obtenus par le truchement du test ont un caractère intime. En conséquence, le caractère secret des résultats doit être garanti, ou le test doit être pratiqué sous le sceau de l'anonymat de manière à assurer la protection totale du sujet testé.546 (3) Société royale du Canada (i) Déclaration De l'avis de la Société, «que l'objectif de la déclaration soit la surveillance à des fins épidémiologiques ou la réduction de la propagation du VIH, si le déclaration ést justifiée, il semblerait préférable qu'elle concerne à la fois l'infection à VIH et le sida». 547 Cependant, la Société a recommandé que les lois relatives à la déclaration soient amendées pour stipuler que la déclaration de la séropositivité au VIH et du sida n'identifient pas la personne 5 4 8 La Société a soutenu que la déclaration par nombre de cas, âge, sexe et municipalité offre des renseignements qui suffisent aux objectifs épidémiologiques: L'identification de la personne n'est pas nécessaire dans le cas d'une maladie incurable pour laquelle l'isolement ou la ségrégation ne sont pas recommandés comme mesures de santé publique. ... Nous n'appuyons pas [la] déclaration nominale.549 (ii) Notification des partenaires La Société a souligné que la notification des partenaires, même dans le cas d'une maladie contagieuse pour laquelle il n'existe pas de remède, peut généralement réduire les risques pour la société. Elle a toutefois fait cette mise en garde: Des preuves anecdotiques laissent croire ... qu'il y a plusieurs difficultés dans la relance des contacts. Les médecins refusent souvent d'effectuer du travail Voir infra, note 597. Somerville et-Gilmore, supra, note 6, à la p. 7. 547 MacKinnon, Cottrelle et Krever, supra, note 82, à la p. 358. 548 /£>/<£, à la p. 359; voir aussi supra, note II, Documents de travail, à là p. 6. 545 546 549 Société royale du Canada, Rapport de synthèse, supra, note 11, à la p. 12. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 207 dont la nature leur paraît policière. Les personnes desquelles on requiert des renseignements mentent souvent ou ne se souviennent pas de l'information que nous cherchons à obtenir. Dans l'évaluation de toute législation qui l'autorise, on déviait évaluer l'efficacité de la relance des contacts.550 Selon la Société, l'évaluation de la faisabilité d'une relance des contacts devrait être influencée «par le nombre de partenaires par personne, leur degré d'anonymat et la période de temps depuis laquelle on croit que les personnes sont contagieuses».551 La Société â reconnu qu'il ne serait pas possible de retracer tous les partenaires de toutes les personnes séropositives et a suggéré que l'on devrait mettre l'accent sur la recherche des partenaires • qui n'ont pas de raison de se douter qu'ils ont été exposés; et • auxquels il serait vraisemblablement le plus profitable de connaître leur état sérologique.552 De l'avis de la Société, la responsabilité première de la notification des partenaires repose toujours sur le patient séropositif, auquel on devrait laisser le soin d'informer ses partenaires sexuels qu'ils ont peut-être été exposés au VIH. Toutefois, il est probable qu'il y ait des cas où le patient voit l'importance de prévenir ses partenaires mais est incapable ou ne veut pas assumer lui-même cette responsabilité. Dans ces cas, avec le consentement du patient et son aide pour identifier les individus concernés, le médecin traitant peut s'occuper d'informer les partenaires et de les référer. Le service de santé publique peut aussi apporter une aide utile dans ce domaine. Les lois et règlements des provinces en matière de confidentialité des renseignements sur l'infection à VIH doivent être modifiés, là où cela est nécessaire, afin que le cadre de réglementation de ce mécanisme protège les droits et les intérêts de toutes les parties concernées.553 (iii) Confidentialité et besoin de savoir La Société a déclaré que «[l]a confidentialité de tous les renseignements relatifs à la santé a une importance capitale».554 Cependant, en citant un extrait du rapport du juge Krever sur la confidentialité de l'information en matière de santé, la Société souligne que: Non seulement des fuites se produisent-elles depuis longtemps, mais l'indifférence à l'égard de la vie privée et des intérêts protégés par le concept de confidentialité n'est pas ... limitée à un seul groupe. C'est un problème universel.555 550 552 553 554 555 208 MacKinnon, Cottrelle et Krever, supra, note 82, à la p. 358. Fraser et coll., supra, note 35, à la p. 136. Ibid. à lap. 37. Supra, note 11, Rapport de synthèse, à la p. 12: Ibid. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.208 La Société a conclu que, puisque «les fuites continuent de se produire et elles pourraient bien augmenter à la suite d'incitations au non respect de la confidentialité qui pourraient survenir et de l'utilisation de plus en plus répandue des ordinateurs pour stocker les renseignements médicaux», un moyen de dissuasion juridique pourrait aujourd'hui être justifié. Ainsi, elle a recommandé que les provinces adoptent des lois imposant une responsabilité en cas de violation de la confidentialité sans qu'il soit nécessaire de prouver l'existence d'un dommage. La responsabilité doit correspondre à un montant déterminé suffisamment élevé pour agir comme moyen dissuasif.556 Elle a toutefois reconnu que l'obligation de confidentialité n'est pas absolue: les arguments d'éthique en faveur de la violation de la confidentialité par un médecin ne manquent pas, à condition que la personne séropositive refuse catégoriquement de cesser de mettre en danger la santé et là vie d'un partenaire sexuel, que le médecin connaisse.la personne en danger et qu'il soit le seul à être au courant de la situation. Le cas semble encore plus clair lorsque la personne en danger est elle-même un patient du médecin.557 Par conséquent, la Société a recommandé que: la législation relative aux professions prévoie que, lorsqu'un professionnel de la santé a un motif raisonnable de croire qu'une personne infectée par le VIH est dans un tel état mental, physique ou émotionnel qu'elle représente un danger pour les autres, et que la divulgation de l'information sur le patient est nécessaire afin d'éviter ce danger, il puisse divulguer une telle information à la personne ou aux personnes en danger sans le consentement du patient infecté. La divulgation faite en vertu de cette intime conviction ne sera pas considérée comme une faute professionnelle.558 (4) Comité consultatif fédéral/provincial/territorial sur le SIDA (i) Déclaration Le Comité a formulé la recommandation suivante: En principe, les laboratoires doivent déclarer aux autorités de santé publique les résultats de la recherche de l'anticorps anti-VIH selon une formule non nominative, à condition que les activités provinciales et territoriales visant à prévenir la transmission du VIH n'en soient pas entravées.559 556 / W r f , à l a p . 13. 557 Ibid , 558 m d , 559 Supra, note 12, à la p. 45. Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 209 (ii) Notification des partenaires Le Comité s'est dit d'avis qu'il est «souhaitable» que l'identification et la relance des contacts soient menées si l'on veut réduire la propagation du VIH; et que le test peut être non nominatif là où la loi le permet, pourvu que la relance des contacts soit effectuée selon l'un des mécanismes suivants: i) Le médecin qui a demandé le test veille à ce que la relance des contacts soit effectuée et fournit des données non nominatives concernant toutes les personnes VIH séropositives. ii) Le médecin obtient du patient VIH positif une liste de contacts qu'il remet aux autorités de santé publique à desfinsde relance. iii) Lorsque les formules susmentionnées (i et ii) ne peuvent être appliquées, le médecin doit signaler aux autorités de santé publique le sujet VIH positif en précisant le nom de ce dernier, aux fins de la relance des contacts.560 Le Comité a recommandé que «[ljorsque l'éthique le justifie, les médecins devraient être autorisés à demander légalement l'aide des autorités de santé publique pour la relance des contacts» et que toutes les provinces adoptent des lois qui autorisent les autorités de santé publique «à avoir recours à des moyens légaux pour isoler des personnes et les empêcher de commettre des actes irresponsables pouvant représenter une menace pour d'autres».561 (iii) Confidentialité et besoin de savoir Le Comité a déclaré que l'information sur l'état sérologique «ne devrait être communiquée que dans l'intérêt du patient, c'est-à-dire pour lui permettre de recevoir les soins appropriés, ou lorsqu'il y a tout lieu de croire que la conduite de la personne infectée par le VIH représente un [danger] inacceptable pour la santé d'autres sujets». Il a établi le principe qui suit: 562 Communication pour protéger les contacts sexuels et autres i) Les personnes dont on a tout lieu de croire qu'elles ont été exposées à un sujet infecté par le VIH, par suite de contacts sexuels ou d'usage de drogues i.v., et qui peuvent être identifiées, doivent être informées de leur risque. ii) Lorsque les médecins ne sont tenus ni par la législation^ ni par la réglementation professionnelle, d'informer directement les personnes à risque, ils doivent se décharger de l'obligation d'informer d'autres personnes des torts éventuels qui les menacent en notifiant les autorités de santé publique. 560 S6} 562 Ibid. Ibid., à la p: 45. Ibid., à la p. 46. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.210 Communication pour protéger la santé publique i) La législation provinciale devrait prévoir des dispositions permettant ou exigeant qu'un médecin signale aux autorités de santé publique tout patient VIH positif lorsque ce médecin a des motifs raisonnables et probables de croire que, par son comportement, le sujet en question exposera d'autres personnes au risque d'infection. ii) Lorsqu'un représentant de la santé publique a des motifs raisonnables et probables de croire que le comportement d'un sujet VIH positif entraîne un risque d'infection pour d'autres personnes, et que les mesures de santé publique en vigueur n'ont pas réussi à protéger le public, il doit être habilité à communiquer les renseignements pertinents aux autorités policières locales. iii) Dans les cas i) et ii) susmentionnés, la législation provinciale devrait permettre ou exiger la déclaration, et doit protéger le médecin qui viole le secret professionnel en divulguant des faits confidentiels concernant la séropositivité de son patient à l'égard du VIH. Communication pour protéger les patients Le rapport soulignait que les travailleurs de la santé ont le même droit à la confidentialité des renseignements personnels que tout autre travailleur, en déclarant que «[l]es patients doivent compter sur le fait que les médecins et autres travailleurs sanitaires ne se conduiront pas de façon à présenter un risque de transmission d'infection». i) Les associations professionnelles et les organismes de réglementation des travailleurs de la santé doivent définir des normes professionnelles d'exercice pour leurs membres VIH positifs. ii) Les médecins et autres travailleurs sanitaires tels que les dentistes, les infirmières et les infirmiers, qui savent être VIH séropositifs, devraient être invités à demander des conseils confidentiels à leur organisme de réglementation en ce qui concerne les précautions à prendre pour protéger la santé de leurs patients. iii) Les autorités locales de santé publique doivent veiller à ce que des précautions adéquates soient prises. Communication à un employeur La rapport déclare que «[ajucun médecin n'a le droit ou l'obligation d'informer un employeur de la séropositivité d'un sujet à l'égard du VIH» et que «[a]ucun employeur n'a le droit d'exiger qu'un employé subisse l'épreuve de dépistage, ou qu'un employé l'informe de son statut sérologique lorsqu'il a déjà subi l'épreuve». Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 211 (5) Commissaire à la protection de la vie privée du Canada En 1989, le rapport du Commissaire sur Le Sida et la Loi sur la protection des renseignements personnels563 s'est penché sur la compilation, l'utilisation et la communication de renseignements personnels relatifs au sida par les institutions fédérales. L'un des thèmes fondamentaux du rapport est celui de la prudence: prudence dans la cueillette de renseignements personnels relatifs au sida, prudence dans leur utilisation et prudence dans leur communication. (6) Droits à l'égalité, déclaration obligatoire et relance des contacts Dans un article de 1989, Flanagan soutient qu'un programme requérant la déclaration obligatoire du VIH et la relance des contacts ne servirait pas à atteindre l'objectif légitime de prévenir la propagation du VIH pour protéger la santé publique et constitue une enfreinte inacceptable des droits à l'égalité des personnes vivant avec le VIH. 564 (7) Document de travail sur l'infection à VIH, le sida et la vie privée En mars 1990, Glenn et coll. ont publié un document de travail sur l'infection à VIH, le sida et la vie privée, dans lequel ils soutiennent que, compte tenu de l'accord généralisé entourant le besoin derespectde la vie privée des personnes vivant avec le VIH/sida, il est nécessaire d'accroître l'efficacité des mesures actuelles de protection de la confidentialité et de développer de nouvelles méthodes d'analyse et de protection.565 Le document souligne que la législation est en soi un moyen inadéquat dans l'amélioration de la protection des renseignements personnels relatifs au VlH/sida: [i]l existe un besoin de développement à grande échelle, aux niveaux des communautés et des institutions s'occupant de réglementation (procédures écrites, politiques, principes directeurs, protocoles) pour améliorer la protection de la vie privée des personnes vivant avec le VIH/sida. Si l'on adoptait une loi à cet effèt, elle devrait par conséquent requérir que des règlements soient créés au niveau local, plutôt que d'aborder la diversité des problématiques qui devraient être couvertes par la réglementation.566 En ce qui concerne la cueillette de renseignements personnels relatifs au VIH/sida, le document suggère qu'elle ne devrait avoir lieu «qu'en conformité avec une épreuve de "d'équilibre" qui permettrait de comparer les avantages de la cueillette de tels renseignements par rapport aux risques concurrents pour la vie privée». Les auteurs insistent sur le fait que, en principe, la cueillette de tels renseignements sans le consentement de la personne qu'ils concernent n'est pas justifiable, et que la cueillette Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Le Sida et la Loi sur la protection des renseignements personnels, Ottawa, ministre des Approvisionnements et Services Canada, 1989. 5 6 4 Flanagan, supra, note 533, aux p. 538-539. 5 6 5 P. Glerm et coll., HIV Infection, AIDS and Privacy, Montréal, Centre de médecine, d'éthique et de droit de l'Université McGill, 1990, à la p. 5. 566 Ibid. 5 6 3 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.212 comme pré-requis à un contrat ou à un avantage n'est acceptable «que dans des circonstances très limitées».567 En ce qui concerne la communication de renseignements personnels relatifs au VIH/sida, il y est souligné qu'elle «contrevient par principe au droit à la vie privée si l'on n'a pas le consentement de la personne concernée par les renseignements».568 Le document recommande que l'on ait davantage recours à l'anonymat des renseignements, dans la gestion des données relatives au VIH/sida, notamment en ce qui concerne la déclaration de l'état sérologique au VIH ou du sida, et des dossiers médicaux, «qui devraient être modifiés pour s'accommoder d'information anonyme».569 D'autres recommandations sont formulées au sujet de la protection de la vie privée dans les communautés institutionnelles et dans la recherche. (i) Déclaration Le document remet en question le fait même que l'on doive déclarer les cas de séropositivité aux anticorps anti-VIH. Dans le cas où la déclaration a lieu, on suggère que ce soit fait par l'usage de code.570 (ii) Notification des partenaires Le document souligne que, puisqu'elle ne peut habituellement avoir lieu qu'avec la collaboration du patient indexé, la notification des partenaires sera volontaire. Les auteurs soutiennent que la notification des partenaires devrait en principe être menée • par le patient indexé; • par le médecin traitant seulement si le patient indexé n'y procédera pas; et • par les autorités de santé publique seulement lorsque ni le patient indexé ni le médecin traitant ne sont disposés et capables d'y procéder.571 (iii) Confidentialité et besoin de savoir Le document souligne que la communication peut être justifiée par le besoin de protéger la vie humaine et de prévenir la transmission de la maladie: Même en tenant compte de la nature délicate des renseignements personnels relatifs au VIH/sida, il est improbable que la communication aux fins de protéger la vie d'autres personnes soit perçue comme fautive en vertu des normes traditionnelles de faute civile. Elle ne devrait pas non plus être perçue comme reprehensible sur le plan moral. Des exceptions précises et justifiables à la confidentialité médicale sont plus acceptables qu'un manque de respect Ibid., aux p. 5-6. ™Ibid. 569 Ibid., à la p. 7. 570 Ibid., aux p. 64-66. 571 Ibid., ux p. 78-79. 567 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 213 répandu dans ce domaine. ... Les personnes qui se préoccupent de la confidentialité desrenseignementspersonnels relatifs au VIH/sida devraient... faire attention de ne pas invoquer des arguments de droits à la confidentialité pour défendre une conduite qui pourrait être malveillante, car ceci nuirait à leur cause plutôt que de la faire avancer. De préférence, on devrait concentrer notre attention sur les cas tropfréquentsde communication non justifiée.572 (8) Comité parlementaire sur le sida Ce Comité n'a pas formulé de recommandation relativement aux questions de déclaration, de notification des partenaires et de confidentialité, mais il a appuyé l'importance de protéger l'information relative au résultat du test et à l'état sérologique au VIH, en exprimant son accord pour que: • les lois soient révisées, et amendées lorsque nécessaire, pour assurer cette protection; et • davantage d'attention soit consacrée à l'application de la législation existante.573 (9) Commissaire à l'information et à la protection de la vie privée/Ontario En 1990, le Commissaire a publié un rapport intitulé Le VIH et le sida: la protection de ta vie privée. Selon le rapport, p]es conséquences de la divulgation au grand public de renseignements personnels touchant au VIH et au sida risquent d'être trèsfâcheusespour les particuliers. En effet, une telle divulgation risque d'entraîner une perte d'emploi, d'avantages médicaux ou de logement, la discrimination, etc. D'autre part, la collecte de renseignements personnels touchant au VIH et au sida est dans l'intérêt du public, notamment pour communiquer avec les contacts qui courent des risques, poiir conseiller les personnes infectées, pour faire progresser la recherche médicale, etc.574 Le rapport reconnaît qu'il est difficile d'établir un équilibre entre les possibles avantages et conséquences négatives de la collecte, de la garde, de l'utilisation et de la divulgation de renseignements personnels touchant au VIH ou au sida. On y souligne que «les méthodes de dépistage doivent avoir nettement pour but de rassurer tous les groupes de la société, notamment ceux qui se livrent à des comportements àrisqueélevé, que le dépistage ou la divulgation derenseignementspersonnels touchant au VIH ou au sida n'amèneront pas la Ibid., aux p. 76-77. Supra, note 13, à la p. 41. 5 7 4 Commissaire à l'information et à la protection de la vie privée/Ontario, Le VIH et le sida: la protection de la vie privée, octobre 1990, à la p. 3. 572 573 214 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.214 divulgation de ces renseignements à d'autres personnes que celles qui en ont absolument besoin, par exemple, le médecin traitant».575 (i) Déclaration Selon le rapport, la loi ne devrait pas prescrire la déclaration obligatoire de l'identité des personnes séropositives au VIH et «il y aurait lieu d'éliminer toute obligation imposée par la loi de déclarer l'identité des personnes atteintes du VIH ou du sida».576 (ii) Notification des partenaires Le rapport contient la recommandation suivante: Il serait souhaitable que le médecin qui demande une épreuve de dépistage des anticorps anti-VIH ait la responsabilité de prévenir les partenaires et de leur fournir les conseils nécessaires - l'objectif principal étant d'inciter le particulier infecté à prévenir lui-même ses partenaires. Si le particulier s'y refuse, il reviendrait au médecin de le faire, avec ou sans la collaboration du particulier. Le médecin peut déléguer cette responsabilité à un médecinhygiéniste, s'il ne veut ou ne peut pas lui-même prévenir les partenaires, ni leur fournir les conseils nécessaires.577 (iii) Confidentialité et besoin de savoir Le rapport a recommandé qu'au besoin, la loi devrait être modifiée pour inclure «le principe de l'obligation du médecin de prévenir les personnes qui risquent de contracter une maladie transmissible. Le médecin n'aurait cette obligation que si le particulier atteint d'une maladie transmissible ... refuse de prévenir ses partenaires et refuse également de donner au médecin la permission de le faire à sa place.»578 (10) Roy: l'infection à VIH, le sida et les questions éthiques et juridiques Dans son rapport de 1991,579 Roy aborde, entre autres nombreux sujets, la question de la notification des partenaires. L'auteur rejette tout modèle de notification des partenaires qui menacerait les objectifs de la politique publique de soins de santé qui préconise une action librement consentie, en ce qui concerne l'infection à VIH: Les modèles systématiques de relance active des contacts, qui forcent les personnes infectées à révéler les noms de leurs partenaires, qui mêlent indûment des tiers à leur vie privée et conservent sous forme officielle et nominative des renseignements délicats, dont la divulgation peut être préjudiciable, ne méritent pas d'être sérieusement pris en considération et ™ Ibid. Ibid., à la p. 4. 577 Ibid. ™Ibid. 5 7 9 Voir supra, note 77. 576 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 215 doivent être rejetés, car ils sont incompatibles avec l'éthos de notre société.580 Cependant, Roy poursuit en déclarant que, Même si l'on ne peut juguler pour l'instant l'infection par le VIH, nous-avons l'obligation morale d'en combattre la propagation et de protéger contre des dangers évitables les personnes exposées qui ne se doutent derien.D nous faut donc, à cette fin, prendre tous les moyens possibles, et ce dans le respect des droits et de la dignité de la personne humaine. C'est justement ce que nous permet d'accomplir la méthode de la recherche volontaire des contacts.581 En conséquence, l'auteur recommande que l'on entreprenne une recherche sur les manières par lesquelles la relance volontaire des contacts et la notification des partenaires pourraient être effectuées avec le plus d'efficacité et de respect possible. (11) Hamblin et Somerville: l'éthique et le droit Dans un article de 1991, Hamblin et Somerville remettent en question l'efficacité des systèmes actuels de surveillance du VIH et du sida, en rapport avec l'atteinte de leurs deux principaux objectifs:582 • de fournir des données épidémiologiques sur l'incidence et la prévalence du VIH et du sida; et • de favoriser des mesures de santé publique telles le counselling et la notification des partenaires, qui visent spécifiquement les personnes séropositives et celles identifiées comme étant à risque. Les auteures se demandent si les règlements actuels de déclaration des cas d'infection à VIH et de sida pourraient résister à une contestation fondée sur la Charte des droits et libertés: En ce qui concerne l'objectif épidémiologique, elles soutiennent que le besoin en est un de données fiables et précises sous une forme qui permette de mesurer la propagation du VIH, mais elles indiquent que les renseignements d'identification personnelle ne sont pas pertinents pour les buts épidémiologiques.583 Ibid., à la p. 45. Ibid, aux p. 45-46. j Hamblin, MA. Somerville, «Surveillance and Reporting of HIV Infection and AIDS in Canada: Ethics and Law», University of Toronto Law Journal, 1991, 41: 224-246, aux p. 224-225. 583 Ibid., à la p. 236. 580 581 216 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.216 Elles concluent que «les règles sur la déclaration obligatoire de cas, au Canada, ne sont pas conçues pour atteindre l'objectif épidémiologique de là manière la plus efficace et la moins dommageable».584 Quant à l'objectif de faciliter des mesures de santé publique comme la notification des partenaires, les auteures soulignent que «la majeure partie des règlements sur la déclaration, au Canada, vont plus loin que ce qui est réellement requis par la relance des contacts».585 Les auteures concluent en soulignant que «la diversité que nous observons, en matière de surveillance de l'infection à VIH et du sida au Canada, engendre un manque de cohérence dans la façon dont l'information relative à ces conditions est recueillie». Selon elles, le manque d'uniformité entre les approches sur la déclaration des cas dans les diverses juridictions du Canada constituent de réels obstacles à une surveillance efficace du VIH et du sida, et révèlent une incertitude marquée quant à la meilleure façon de recourir à la déclaration des cas dans le contexte du VIH et du sida.586 Toutefois, elles sont d'avis qu'il serait possible de tirer profit de l'actuelle diversité des formes de surveillance, car ceci rend possible l'évaluation des avantages et des préjudices de chaque approche.587 (12) Commission de réforme du droit de l'Ontario (i) Déclaration Selon la CRDO, l'obligation de déclaration nominative des cas n'est pas essentielle au traitement ou au counselling des personnes séropositives. Par contre, la déclaration des cas d'infection à VIH sans-renseignements personnels sur l'identité peut contribuer aux intérêts de là santé publique de rassembler de l'information scientifique importante au sujet de la maladie, sans imposer un fardeau indu au patient [italiques dans l'original]. 5 8 8 (ii) Notification des partenaires La Commission a élaboré les principes suivants pour la notification des partenaires: (a) on devrait inciter le patient à informer ses partenaires de plein gré ou à demander l'aide de son médecin traitant dans le cadre d'un système de notification conduit par le médecin traitant; (b) le médecin traitant devrait pouvoir informer personnellement les partenaires de patients infectieux à risque, selon des principes directeurs spécifiques quant à la divulgation de renseignements sur le VIH; ™ Ibid. Ibid, à la p. 237. 586 Ibid., à la p. 245. ™Ibid. 5 8 8 CRDO, supra, note 14, à la p. 92, avec référence. 585 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 217 (c) le médecin traitant, comme le patient, devrait pouvoir faire appel aux services de santé publique au cours du processus d'information des partenaires; (d) le médecin qui informe des partenaires devrait pouvoir jouir de l'immunité contre toute poursuite découlant de l'exercice de cette c h a r g e . 5 8 9 (iii) Confidentialité et besoin de savoir La Commission estime que «[l]a protection de l'information sur les tests et les traitements anti-VIH est cruciale pour le respect de la vie privée comme valeur sociale et pour la sauvegarde de la santé publique» et que toute exception au principe de confidentialité devrait être clairement justifiée.590 Elle a conclu que la communication de renseignements personnels relatifs au VÏH ne devrait être autorisée que dans les cas où un risque important d'infection à VTH constitue un danger pour des personnes pouvant être identifiées et qui ne se doutent de rien.591 (13) Comité sida d'Ottawa (i) Déclaration De l'avis du CSO, un système qui requiert la déclaration obligatoire des personnes vivant avec le VIH/sida aux autorités de santé publique n'est «définitivement pas» un système adéquat en matière de test.592 (ii) Notification des partenaires Le Comité n'a pas abordé cet aspect. (iii) Confidentialité et besoin de savoir Selon le CSO, les compensations pour les bris de confidentialité, en Ontario, sont soit inexistantes, soit des compensations qui impliquent des amendes payables à l'État. L a Colombie-Britannique dispose d'une action enchâssée dans la loi, en cas de violation du droit à la vie privée, tandis que l'Ontario n'en a pas et qu'il n'existe pas de dispositions, en common law, pour protéger les intérêts de la vie privée des personnes vivant avec le VIH/sida. 5 9 3 Le Comité a conclu en exprimant sa volonté de collaborer à une étude plus approfondie des problèmes que rencontrent les personnes vivant avec le VIH/sida, en matière de confidentialité. Ibid., à la p. 114; aussi dans la présente forme française dans Commission de réforme du droit de l'Ontario, Rapport sur les tests de dépistage du sida: sommaire, Toronto, la Commission, 1992, à la p. 3. 5 9 0 CRDO, supra, note 14, à la p. 78. M Ibid. 592 Supra, note 15, aux p. 16-17. 593 Ibid., à la p. 14. 589 218 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.218 (14) Association canadienne de santé publique La déclaration de cas et la notification des partenaires font partie des questions abordées par PACSP dans son rapport sur l'approche de santé publique face au VIH et au sida. Pour les deux sujets, on dégage des principes généraux, on examine les implications de ces principes pour la pratique en santé publique et l'on présente des recommiandations d'action aux divers intervenants du domaine du VIH/sida.. (i) Déclaration On n'a pas atteint de consensus concernant la déclaration des résultats positifs au test du VIH aux autorités de santé publique. Tout le monde a reconnu que la déclaration non nominale est utile, politiquement, et importante pour la surveillance, mais les opinions sont partagées quant à savoir si la déclaration est un moyen efficace de mettre fin à la propagation du VIH. 594 Plusieurs problèmes sont soulevés, relativement aux pratiques actuelles de déclaration: • doublés dans le dénombrement; • manque de cohérence entre les divers secteurs de compétence dans la déclaration des cas de VIH et de sida; et • insuffisance de données sur la séropositivité et sur le comportement sexuel dans certains segments de la population. De plus, I'ACSP a souligné qu'il a été soutenu que la déclaration obligatoire • augmente la résistance à l'endroit du test dé sérodiagnostic par crainte que la confidentialité soit violée, notamment lorsque des renseignements sur l'identité sont utilisés; et • renforce la perception du public que le VIH est une maladie contagieuse et redoutable, et donne en outre l'impression que la réduction desrisquesn'est plus nécessaire.595 Elle a conclu que le «déclaration confidentielle, cohérente et normalisée partout au Canada aux ministères provinciaux et territoriaux de la santé et à Santé et Bien-être social Canada est nécessaire pour mieux comprendre l'épidémiologie du VIH et du sida». Elle a recommandé que Santé Canada, en collaboration avec les ministères provinciaux et territoriaux de la santé, • comparent et signalent les expériences des provinces où la déclaration du VIH est obligatoire et de celles où elle ne l'est pas; Supra, note 16, à la p. 20. 595 Ibid. 594 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 219 • établissent un mécanisme unique, normalisé et sans répétitions de cas déclarés, pour l'ensemble du Canada; • définissent un protocole de déclaration au niveau provincial/territorial et à Santé Canada.596 (ii) Notification des partenaires De l'avis de l'Association, la notification des partenaires est un moyen utile.pour informer des personnes qui peuvent ne pas se douter qu'elles risquent de contracter le VIH et pour encourager le test et le counselling. Elle a reconnu que la divulgation volontaire par le patient «est évidemment le choix préféré», en expliquant cependant que [d]ans l'éventualité où une personne séropositive refuse la notification à un partenaire et où le partenaire en cause aurait peu ou pas de raison de soupçonner qu'il est à risque, il peut être approprié de procéder à la notification du partenaire sans consentement. L a notification du partenaire sans consentement est justifiée si les conditions suivantes sont respectées: 1. le professionnel de la santé croit que la notification du partenaire est appropriée sur le plan médical et qu'il existe un risque important d'infection du partenaire; 2. le professionnel de la santé a conseillé la personne sur la nécessité d ' a v e r t i r le partenaire et le p r o f e s s i o n n e l de la santé croit raisonnablement que le patient n'informera pas le partenaire; et 3. le professionnel de la santé a informé la personne de son intention d'avertir le partenaire et a donné au patient la possibilité d'exprimer une préférence quant à savoir si la notification devrait se faire par le professionnel de la santé ou un agent de la santé publique. L a préférence du patient devrait être respectée. 5 9 7 L'Association a exprimé son appui à deux principes fondamentaux relatifs à la notification des partenaires: • les partenaires sexuels ou ceux qui partagent des seringues ont le droit de savoir s'ils ont été exposés au VIH; et • pour toute notification des partenaires, on doit appliquer des normes très élevées de pratique et de confidentialité.598 Entre autres, l'ACSP a recommandé l'élaboration d'un protocole à la fois normalisé et souple (un guide, par exemple) de notification des partenaires, avec la collaboration des médecins et des personnes affectées par le VIH/sida. 597 ifcirf.,aux p. 22-23. Jfciirf., à la p. 23. 598 220 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.220 (15) Association médicale canadienne En vertu du code de déontologie de l'AMC, adopté en août 1996, les médecins doivent 22. Respecter le droit du patient à la confidentialité, s a u f lorsque ce droit entre en ^conflit a v e c [leur] responsabilité devant la loi ou lorsque le maintien de la confidentialité risquerait de causer un préjudice grave à des tiers ou à un patient inapte. Il faut alors prendre toutes l e s m e s u r e s raisonnables pour prévenir le patient du bris de la confidentialité 2. Situation actuelle Au Canada, les questions de santé publique relèvent de la compétence des provinces, en tant que! matières d'une nature «locale ou privée», selon l'art 92(16) de la Loi constitutionnelle de 1867600 On observe ainsi de grandes disparités dans la législation et la pratique, entre les provinces et territoires, de même qu'au sein de chacun. (1 ) Déclaration (i) Déclaration du sida Dans tous les territoires et provinces du Canada, les lois sur la santé publique ou les règlements s'y rattachant ont été amendés pour inclure le sida dans les maladies à déclaration obligatoire aux autorités de santé publique.601 Déclaration nominativeou non nominative . • Terre-Neuve, la Nouvelle-Ecosse, le Nôuvèau-Brunswick, l'Ontario et le Manitoba exigent la déclaration nominative du sida. • En Saskatchewan, la nouvelle Public Health Act, adoptée le 1 janvier 1997, requiert la déclaration nominative du sida au médecin hygiéniste en chef et la déclaration non nominative au CDC de Saskatchewan Health.602 5 9 9 Association médicale canadienne, «Code de déontologie de l'Association médicale canadienne», Journal de l'Association médicale canadienne, 1996, 155: I176A-1176B. En 1989, l'AMC a souligné l'importance que les renseignements relatifs aux patients vivant avec le VIH/sida demeurent confidentiels, et a recommandé que des mesures d'ordre juridique et réglementaire soient prises pour garantir cette confidentialité («Une position de l'AMC: Le syndrome d'immunodéficience acquise», Journal de l'Association médicale canadienne, 1989; 140: 64C-64D). 6 0 0 Voir, en général, Schneider v. i t , [1982J s SCR 112. 6 0 1 Le survol qui suit a été compilé en demandant à des individus des ministères de la santé de chaque province et territoire de nous transmettre une mise à jour sur l'information contenue dans des listes antérieures, telles que celles de MacKinnon, Cottrelle et Krever, supra, note 82, à la p. 359; J. Hamblin et coll., Responding to HIV/AIDS in Canada, Toronto, Carswell, 1990, et mises à jour par R. Jurgens, N. Gilmore, M. Somerville; Hamblin et Somerville, supra, note 582; Le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, supra, note 563. 6 0 2 Communication avec Nida Wurtz, AIDS Coordinator (Saskatchewan), le 28 janvier 1997. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 221 • • • En Colombie-Britannique, la déclaration peut se faire de façon non nominative, mais certains médecins donnent le nom complet du patient.603 * a » A rHe-du-Prince-Edouard, la déclaration se fait «de la manière que peut déterminer le médecin hygiéniste en chef». 604 En février 1991, «la notification pour le sida et les anticorps au VIH ... a été rattachée ... à l'évaluation du risque».605 Le médecin qui déclare le cas peut choisir de le faire de façon nominative «lorsqu'il y a une raison de croire qu'une personne diagnostiquée séropositive au VIH ne collaborera pas à la relance des contacts ou que cette personne doit être déclarée de façon nominative afin de protéger la santé dù public». Le Québec, l'Alberta et le Yukon ne requièrent pas la déclaration nominative des cas de sida. (ii) Déclaration de la séropositivité au VIH Les cas de séropositivité au VIH doivent être déclarés dans toutes les provinces et tous les territoires, à l'exception du Québec, de l'Alberta, de la Colombie-Britannique et du Yukon. Toutefois, • En Alberta, les laboratoires d'analyse signalent sur une base volontaire les résultats de tests positifs aux anticorps au VIH. De plus, la Public Health Act est susceptible d'être révisée en 1997 et il est possible que l'on y requière la déclaration non nominative du VIH. V. • En C.-B., les médecins n'ont pas à rapporter les cas de VIH, mais la cueillette de données non nominatives est effectuée au niveau des laboratoires d'analyse. • Au Yukon, tout test des anticorps anti-VTH est effectué sous la direction du responsable des maladies transmissibles du territoire, quitientà jour un dossier sur les cas. Déclaration nominative et non nominative • Terre-Neuve, le Nouveau-Brunswick et l'Ontario606 requièrent la déclaration nominative de l'infection à VIH. 6 0 3 Communication avec le Dr David Patrick, Associate Director of HIV/AIDS, British Columbia Centre for Disease Control, le 29 janvier .1997. 6 0 4 EC 409/87, art 17. 6 0 5 Correspondance reçue du Dr Lamont Sweet, médecin hygiéniste en chef, Department of Health and Social Services, Charlottetown, Î.-P:É., datée du 14 mai 1991. 6 0 6 En général, en Ontario, la déclaration nominative de la séropositivité au VEH est requise. Des médecins qui offrent des services professionnels dans certaines cliniques ont toutefois été exemptés de déclarer le nom et l'adresse du patient. 222 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.222 • Àl'île-du-Prince-Édouard, la déclaration se fait «de là manière que peut déterminer le médecin hygiéniste en chef».607 • Dans les autres provinces et dans les Territoires du Nord-Ouest, la déclaration est non nominative. (iii) Obligation de déclaration Les catégories de personnes auxquelles l'obligation de déclaration est imposée varie d'une province à l'autre. • Au Québec, seuls les médecins et les directeurs de laboratoires ont une obligation de déclaration. • Au Manitoba, les médecins et les techniciens de laboratoire ont une obligation de déclaration.608 • Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, l'Ontario et l'Alberta imposent une obligation de déclaration à d'autres catégories de personnes, notamment les professeurs (Albeita et T.-N.), les directeurs d'école (Ontario), les personnes en charge de certaines institutions désignées comme les hôpitaux, les prisons et les écoles pensionnats (Alberta, T.-N., N.-É. et Ontario), ainsi que les propriétaires d'hôtels et de maisons de pension (T.-N.). Voir supra, note 605. Les laboratoires ont l'obligation de déclaration non nominative et les médecins ont une obligation de déclaration nominative pour le sida. Les médecins ne sont pas actuellement tenus de déclarer le VIH de manière non nominative. Cependant, cette législation est sujette à être modifiée pour qu'ils doivent le faire. 607 608 Testde.sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 223 (iv) Tableau récapitulatif JURIDICTION Tene-Neuve Qe-du-Prince-Édouard DISPOSITIONS SUR LA DÉCLARATION SIDA VIH oui (nominatif) oui (nominatif) • oui (nominatif ou non) oui (nominatif ou non) Nouvelle-Ecosse oui (nominatif) oui (non nominatif)* Nouveau-Brunswick oui (nominatif) oui (nominatif) Québec oui (non nominatif) non Ontario oui (nominatif) oui (nominatif, avec exceptions) Manitoba oui (nominatif: médecins) oui (non nominatif: laboratoires) Saskatchewan oui (nominatif ou non) oui (non nominatif) Alberta oui (non nominatif) non (en voie de changer) Colombie-Britannique oui (non nominatif / nominatif) non (non nominatif: laboratoires) , Territoires du Nord-Ouest oui oui (non nominatif) Yukon oui (non nominatif) non * En 1992 était adopté le Act to Combine the Nova Scotia Commission on Drug Dependency with the Department ofHealth and Fitness and to AmendChapter 195 of the Revised Statutes, 1989, the Health Act Les clauses 4 et 5 de cette loi stipulent que les cas de personnes vivant avec le VIH soient déclarés de manière non nominative. (2) Notification des partenaires Nous présentons ici un bref survol des lois et règlements provinciaux et territoriaux qui autorisent ou requièrent la notification des partenaires. La législation varie grandement d'une province à l'autre, mais ces différences ne sont souvent pas reflétées dans la pratique des provinces en la matière. La plupart ont adopté «des procédures largement informelles de relance des contacts, qui mettent habituellementl'accent sur la notification volontaire et, dans certains cas, un programme de relance des contacts qui se limite à des populations qui peuvent être exposées sans le savoir à l'infection à VIH». 609 (i) Lois requérant la notification des partenaires L'Ontario, la Saskatchewan, les T.N.-O. et le Yukon sont les seuls dont les lois requièrent la notification des partenaires. 6 0 9 224 Flanagan, supra, note 533, à la p. 551. Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.224 • En Ontario, la notification des partenaires est requise par les Directives sur les programmes et services de santé obligatoires,, en vertu de l'art. 7 de la Loi sur la protection et la promotion de la santé. Ces directives sont présentement en évaluation et pourraient être révisées par le Ministère dans un avenir proche.610 • En Saskatchewan, un responsable attitré de la santé publique qui reçoit une liste de contacts devra notifier sans délai les personnes nommées dans la liste du fait qu'elles ont été exposées à une maladie transmissible, sans nommer la personne qui est à la source de cette exposition 6 1 1 • Dans les T.N.-O., les médecins traitants et les infirmiers qui ont un patient vivant avec le VIH ou le sida ont l'obligation d'effectuer «la relance des contacts et la surveillance des aspects de l'incidence et de la propagation d'une maladie transmissible qui sont pertinents à la prévention efficace de la propagation de cette maladie». Également, le médecin ou l'infirmier peuvent demander au médecin hygiéniste en chef de s'occuper de la relance des contacts ou de la surveillance.612 • Au Yukon, des lois faisant partie de la Public Health Act imposent une obligation positive aux médecins de mener une relance des contacts relativement à une personne qui a le sida. Cette disposition déclare que «[t]out professionnel de la santé ayant une raison de croire ou de soupçonner que l'un de ses patients est infecté par une maladie transmissible conseillera à ce patient, à toute personne qui s'en occupe et à tout contact ou porteur connu, d'adopter les mesures spécifiques de contrôle de la maladie concernée et leur donnera les indications nécessaires pour ce faire».613 Puisque le sida, au Yukon, a été désigné comme une maladie transmissible, mais non l'infection à VIH, un médecin n'est pas expressément tenu de rechercher les contacts d'un patient séropositif qui n'a pas le sida. Néanmoins, là législation utilise les termes «suspect» et «infecté», et il a été soutenu que ces mots englobaient la séropositivité au VIH, au surplus du sida.614 (i) Lois autorisant la notification des partenaires Dans plusieurs provinces, les dispositions des lois sur la santé publique ou les règlements qu'elles gouvernent, quoiqu'elles ne requièrent pas ou n'autorisent pas explicitement la notification des partenaires, semblent assez larges pour la permettre. • 610 611 612 5. À l'île-du-Prince-Édouard, les dispositions de la Public Health Act autorisent, mais ne requièrent pas, qu'un médecin ou le médecin hygiéniste en chef ou son représentant donnent de l'information au sujet dë la condition d'une personne à des membres de sa Communication de F. McGee, AIDS Coordinator (Ontario), le 3 mars 1997. Ait 35 de la Public Health Act Communicable Diseases Regulations, RRNWT 1980, régi. 212, tel qu'amendé dans NWT Reg R 013-99, art. Communicable Diseases Regulations, YT OIC 1961/48, s(l). D.G. Casswell, AIDS, Ethics and Law, Victoria (C.-B.), University of Victoria, Division of University Extension, 1990, à la p. 32. 613 614 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 225 famille «pour la protection de leur santé».615 De pertinence dans ce contexte est aussi une provision qui autorise le médecin hygiéniste en chef à procéder à un. examen médical de toute personne soupçonnée d'être infectée par une maladie désignée.par la réglementation, «y compris un porteur soupçonné ou un contact soupçonné».616 Le sida, mais pas l'infection à VIH, a été désigné comme une maladie réglementée. Les règlements imposent aussi à toute personne qui soupçonne d'être infectée par une maladie réglementée, ou qui a été informée à cet effet par un médecin ou un responsable de la santé, l'obligation d'identifier tout contact ou de donner d'autres renseignements que peut requérir le médecin ou le médecin hygiéniste en chef.617 • Au Nouveau-Brunswick, un responsable de la santé peut prendre toute mesure «qui s'avère efficace dans la gestion de la santé publique et qui est acceptée par les autorités de santé publique» [trad.] pour contrôler et prévenir la propagation du VIH 6 1 8 En pratique, le ministère de la Santé et des Services communautaires incite les médecins à s'acquitter de cette tâche en collaboration avec la personne séropositive. Si le médecin n'est toutefois pas disposé à s'en occuper, les autorités ministérielles considéreront la possibilité de se charger elles-mêmes de la relance des contacts. • En Alberta, une personne atteinte d'une maladie transmissible pouvant être propagée par voie sexuelle devra donner, à la demande du médecin ou de la personne de la clinique de MTS qui est en charge de son traitement, les noms de toutes les personnes avec lesquelles elle a eu des contacts sexuels.619 Le sida, mais pas l'infection à VIH, est désigné comme une maladie transmissible par la Communicable Diseases 1 620 Regulation, en vertu de la Public Health Act De plus, la réglementation stipule que le médecin hygiéniste en chef «devra tenter d'identifier les partenaires sexuels du patient».621 Un médecin à qui est remise une liste de contacts devra immédiatement remettre l'information au «directeur», qui peut prévenir une personne dont le nom s'y trouve.622 Puisque l'on n'a pas à déclarer les cas de VIH, il n'y a en théorie aucune obligation de relance des contacts dans ces cas. En pratique, la relance des contacts est effectuée lorsque les ressources le permettent623 (iii) Absence de législation autorisant ou requérant explicitement la notification des partenaires À Terre-Neuve, en Nouvelle-Écosse, au Québec et en Colombie-Britannique, aucune loi n'exige ou n'autorise expressément qu'un médecin ou un responsable de la santé publique 615 Notifiable and Communicable Diseases Regulations, EC 330/85, art 14. JWA, art 2(g). Aûf.,artL4. 616 617 Règlement général - Loi sur la santé, NB Reg. 84-283, art 98. Public Health Act, SA 1984, c. P-27.1, ss66(l), 31(2). 620 The Public Health Act Communicable Diseases Regulation, Alta Reg 238/85. 621 Ibid. 622 Supra, note 619, ss 66(2), 66(3). 6 2 3 Communication avec le Dr Bryce Laxke, directeur médical, Provincial AIDS Program (Alberta), le 4 février 1997. 618 619 226 Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document detravail.226 procède à la notification des partenaires. En pratique, toutefois, des efforts de notification des partenaires sont déployés. • En Nouvelle-Écosse, les Medical Guidelines for HIV Antibody Screening publiées par le ministère de la Santé de la N.-É. en novembre 1987 stipulent que le Ministère «a légalement le droit d'obtenir des renseignements sur les contacts et de s'assurer que la relance des contacts est effectuée». De plus, le document déclare que les médecins ont une «obligation légale et éthique» de s'assurer que «tout effort raisonnable» a été fait pour avertir les contacts, comme moyen de prévenir la propagation du VIH. • Au Québec, le Code de déontologie des médecins stipule que, en général, un médecin doit s'abstenir de divulguer des renseignements obtenus dans le cadre de la pratique de sa profession. 624 Le médecin peut cependant «divulguer les faits dont il a eu personnellement connaissance, lorsque le patient ou la loi l'y autorise, lorsqu'il y a une raison impérative et juste ayant trait à la santé du patient ou de son entourage» 6 2 5 H n'existe aucun programme ou service formel de notification des partenaires dans la province. La notification des partenaires est toutefois effectuée dans certains cas ad hoc, suite à des demandes individuelles. De plus, un projet de démonstration sur la notification des partenaires de personnes séropositives a été amorcé à Montréal, en août 1996, se fondant sur l'expérience acquise dans un programme de notification des partenaires de personnes atteintes de MTS qui avait été l'objet d'un projet pilote en 1995 et qui a été intégré aux programmes réguliers des Régies régionales de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre et de Laval à compter de janvier 1997. La notification des partenaires est effectuée par les autorités de santé publique si la demande en est faite par un médecin, qui n'a pas.à donner le nom du cas indexé, mais simplement des renseignements sur la personne et une liste de ses partenaires. Les renseignements d'identification sur les partenaires sont effacés des dossiers après la notification. Dans le cadre d'un autre programme informel de notification des partenaires, au nord de Montréal, un organisme de lutte anti-sida se charge de la notification des partenaires lorsque des médecins de la région des Laurentides lui en font la demande.626 • Au Manitoba, les dispositions de la Public Health Act imposent aux médecins une obligation de rapîporter les contacts d'une personne atteinte d'une MTS lorsqu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'il y a eu transmission. La séropositivité au VIH et le sida sont toutefois explicitement exclus de cette disposition.627 Par conséquent, il n'y a à l'heure actuelle aucune obligation de rechercher ou de déclarer les contacts des personnes vivant avec le VIH ou le sida. Néanmoins, la notification des partenaires est offerte sur une base volontaire. En outre, on s'attend à ce que la réglementation soit modifiée sous peu, pour faire du VIH une infection à déclaration (non nominative) 624 ^ 626 627 Code de déontologie des médecins, L.R.Q. 1980, c. M-9, r. 4, ait 3.01. Code de déontologie, art 3.04. Communication avec Nicole Turcotte, RRSSS Montréal-Centre, le 27 février 1997. The Public Health Act Diseases and Dead Bodies Regulation, Man Reg P 210-338/88R, ss 6 et 43(lXb). Test de. sérodiagnostic du ViH et confidentialité: un document de travail. 227 obligatoire par les médecins, ainsi que pour prévoir une obligation d e notification dés partenaires.628 • E n C o l o m b i e - B r i t a n n i q u e , il e x i s t e d e s principes directeurs et la notification d e s partenaires est fortement r e c o m m a n d é e . On a toujours incité l e s cliniciens et l e s patients à notifier les p a r t e n a i r e s . 6 2 9 (3) Confidentialité des renseignements relatifs au VIH/sida (i) Dispositions des lois ou règlements sur la santé publique A l ' î l e - d u - P r i n c e - É d o u a r d , au Q u é b e c , en Ontario, au M a n i t o b a , en Alberta et en Colombie-Britannique, des lois ou d e s règlements sur la santé publique imposent aux r e s p o n s a b l e s d e la santé p u b l i q u e une obligation d e confidentialité relativement à l'information q u ' i l s reçoivent, soit dans l'exercice de leurs fonctions en général, sçit en rapport particulier a v e c line personne atteinte d ' u n e maladie transmissible ou à déclaration o b l i g a t o i r e . 6 3 0 T o u t e f o i s , à l'î.-P.-É., en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta, des e x c e p t i o n s r é g l e m e n t a i r e s s p é c i f i q u e s autorisent à c o m m u n i q u e r d e s r e n s e i g n e m e n t s p e r s o n n e l s d a n s certaines c i r c o n s t a n c e s l i m i t é e s , l o r s q u e c e l a est n é c e s s a i r e « d a n s l'intérêt du p u b l i c » 6 3 1 ou pour toute raison « q u i est d e l'intérêt d e protéger la santé p u b l i q u e » . 6 3 2 D a n s les autres provinces et territoires, il n ' e x i s t e p a s de dispositions législatives sur la santé publique qui contiennent d e s protections spécifique de la confidentialité. Communication avec Pat Matusko, le 4 . février 1997. Communication avec le Dr Patrick, supra, note 603. 6 3 0 Hamblin et Somerville, supra, note 582, à la p. 239; communication avec le Dr Patrick, ibid., avec référence à l'art 6(1) de la Communicable Diseases Regulation. 631 Alberta Public Health Act, SÀ 1984, c: P-27.1, s 63(5)(b). 632 Ibid., s 63(2). 628 629 Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail (ii) Obligation de confidentialité du médecin633 Le droit E n droit, l e s m é d e c i n s ont u n e o b l i g a t i o n d e confidentialité e n v e r s l e u r s patients les renseignements résultant d'une relation médecin-patient doivent 6 3 4 être Tous tenus c o n f i d e n t i e l s : l e patient a droit à l a c o n f i d e n t i a l i t é et l e m é d e c i n a u n e o b l i g a t i o n à cet é g a r d . 6 3 5 C e t t e o b l i g a t i o n est r e c o n n u e e n common lois. 637 E n outre, d a n s l'arrêt Mclnerney Z G W 6 3 6 et e s t s o u v e n t r e p r i s e d a n s l é s c. MacDonald\ l a C o u r s u p r ê m e du C a n a d a a q u a l i f i é d e « f i d u c i a i r e » l a r e l a t i o n m é d e c i n - p a t i e n t et a s t a t u é q u e c e r t a i n s d e v o i r s découlent d e cette relation d e c o n f i a n c e particulière: Parmi ceux-ci, il y à le devoir du médecin d'agir en toute bonne foi et avec le plus g r a n d d é v o u e m e n t , et de préserver le caractère confidentiel d e s renseignements obtenus d'un patient ou à son sujet. [...] Q u a n d un patient communique dès renseignements personnels dans le contexte d'une relation médecin-patient, il le fait en s'attendant légitimement à ce que ces devoirs soient r e m p l i s . 6 3 8 L a C o u r s u p r ê m e a p o u r s u i v i en d i s a n t que, q u o i q u e l e m é d e c i n soit l e p r o p r i é t a i r e du d o s s i e r m é d i c a l en tant q u e s u p p o r t , il doit utiliser son c o n t e n u p o u r l e p r o f i t d u patient et q u e , « [ c ] o m m e l'information e s t c o n f i é e au m é d e c i n à d e s fins m é d i c a l e s , il en résulte u n e attente d e l a part d u patient qu'il continuera d'avoir un droit et d ' e x e r c e r u n contrôle sur cette i n f o r m a t i o n » . 6 3 9 La section qui s'amorce ici est une version légèrement remaniée de R. Jûrgens, N. Gilmore, «Communication de renseignements médicaux sur les détenus - Analyse juridique et éthique», dans Service correctionnel du Canada, Le VTH/sida en milieu carcéral: Documentation, Ottawa, ministre des Approvisionnements et Services Canada, 1994, Annexe 7, p. 141-162. 6 3 4 D.G. Casswell, {(Disclosure by a Physician of AIDS-related Patient Information: An Ethical and Legal Dilemma», (1989) 68 R. du B can. 225-258,228, avec d'autres références. 6 3 5 N. Gilmore, et M A . Somerville, Physicians, Ethics arid AIDS, Ottawa, Association médicale canadienne, 1989,21. 6 3 6 Casswell, supra, note 634, à la p. 228, note 12 en référence à AB. v. CD., (1851) 14 Sess. Cas. (Second Series) 177 (Scot Ct Sess.X Re Inquiry into the Confidentiality of Health Records in Ontario, (1979) 98 DX.R. (3d) 704, 714, 24 O.R. (2d) 545, 555 (C.A. Ont), le juge d'appél Dubin, pour la majorité: «Les membres de la profession médicale ont une obligation de confidentialité envers leurs patients. Ils sont tenus de ne donner aucun renseignement touchant l'état dé leurs patients ou les services professionnels qu'ils rendent [...]». 6 3 7 Pour une liste des lois provinciales reconnaissant l'obligation de confidentialité, voir Casswell, loc. cit., note 4,228, note 13: le Health Disciplines Act Medicine Regulation, RRO. 1980, Règlement rfi 448, art 27.22; la Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q. (1977), ch. C-12, art 9; la Loi médicale, L.R.Q. (1977), ch. M-9, art 42, et le Code de déontologie des médecins, L J t Q . (1981), ch. M-9, r. A, art 3.01. Voir également l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans F renette c. Métropolitaine (La), de d'assurance-vie, [1992] 1 R.C.S. 647696, 666: «Au Québec, les dossiers hospitaliers (art. 7 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux) ainsi que les renseignements révélés à un médecin en raison de sa profession (deuxième alinéa de l'art 9 de la Charte et art 42 de la Loi médicale) jouissent de la protection de la loi qui les place sous le sceau de la confidentialité. Le droit à la non-divulgation de renseignements confidentiels en général est également prévu au premier alinéa de l'art 9 de la Charte.» Voir aussi p. 673. Mclnerney c. MacDonald, [1992J 2 R.S.C. 138, 149, avec de nombreuses références. 639 Id., 151. 633 Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail D a n s la décision Hay v. droit à la confidentialité: University of Alberta Hospitalj640 le j u g e Picard a décrit ainsi le L a relation entre un médecin et son patient est confidentielle, mais le patient peut renoncer à ce droit à la confidentialité. En effet, la confidentialité constitue un attribut important de la relation entre un médecin et son patient, un attribut essentiel pour favoriser une communication franche entre le médecin et son patient. Le patient peut expressément renoncer à ce droit ou on peut juger qu'il Ta fait implicitement d'après les actes qu'il a accomplis. En d'autres cas, l'existence d'un intérêt public supérieur ou d'une directive législative peut justifier un médecin de divulguer des renseignements sur son patient. En l'absence de ces circonstances, le droit demeure et le médecin qui divulgue des renseignements confidentiels pourrait faire l'objet d'une poursuite pour violation du caractère confidentiel, une possibilité qui suscite manifestement certaines préoccupations chez les m é d e c i n s . 6 4 1 C o m m e l'a déclaré la Cour suprême du Canada, le devoir de confidentialité qui découle d e la relation médecin-patient v i s e à favoriser la divulgation de renseignements par le patient à son médecin et à encourager la c o m m u n i c a t i o n . 6 4 2 H faut inciter les patients à demander d'être traités sans crainte que leur maladie, leur état ou leur traitement soient divulgués. E n outre, « l e fait d'encourager l e s patients à se présenter p o u r être traités p r o f i t e non seulement aux patients eux-mêmes, m a i s également à ceux qui peuvent risquer l'infection; c'est dire q u e conserver la confiance du patient n'est p a s seulement d a n s l'intérêt de c e dernier, mais également dans l'intérêt p u b l i c . 6 4 3 L'obligation de confidentialité peut m ê m e être garantie par la C o n s t i t u t i o n . 6 4 4 D e plus, d a n s la majorité d e s provinces et territoires, les m é d e c i n s sont expressément tenus par la loi d e préserver la confidentialité des renseignements sur les patients, relativement aux maladies transmissibles, incluant le s i d a . 6 4 5 A u niveau fédéral, la Loi sur la protection des renseignements personnel1s646 vise à protéger les Canadiens contre la collecte et la diffusion non j u s t i f i é e s d e renseignements personnels à leur sujet, par les institutions et les fonctionnaires fédéraux. Mentionnons, entre autres mesures de dissuasion contre la communication d e renseignements personnels pouvant s'appliquer dans c e cas, la responsabilité résultant d e la communication injustifiée (1990) 69 D.LJt (4th) 755 ( C 3 I L Alb.% cité dans Frenette, supra, note 637, à la p. 688. M , 757-758. 642 Mclnerney, supra, note 638, à la p. 153. 6 4 3 Casswell, supra, note 634, à la p. 229. 6 4 4 Casswell, supra, note 634, à la p. 228, note 14, référence à EX Picard, Legal Liability of Doctors and Hospitals in Canada, 2 e éd., 1984, 8i n. 51, se reportant à la Charte canadienne des droits et libertés, Loi constitutionnelle de 1982, partie I, art 7, 6 4 5 Pour un aperçu des lois et règlements qui exigent la confidentialité des renseignements sur les patients relativement aux maladies contagieuses, infectieuses, transmissibles et à déclaration obligatoire, voir Casswell, supra, note 634, à la p. 255 (tableau A); R. Jûrgens, N. Gilmore et M. Somerville, mai 1992, mise à jour de J. Hamblin, M Duckett, MA. Somerville, N. Gilmore et S. Zimmerman, Responding to HIV/AIDS in Canada, Carswell, Toronto, 1990. 6 4 6 L.RiC. (1985), ch. P-21. 640 641 Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail ou non autorisée et d e l'usage abusif de tels renseignements après leur communication, ainsi q u e l e s r e c o u r s p o u v a n t être e x e r c é s en c a s d ' a b u s résultant d ' u n e t e l l e communication, par exemple la protection contre la discrimination. Les obligations éthiques L e s m é d e c i n s ont é g a l e m e n t l'obligation éthique de préserver la confidentialité d e s renseignements fournis par leurs patients. Cette obligation a son origine dans le Serment dHippocrate, établi au IV* siècle av. J.-C., qui contient c e voeu: Quoi que j e voie ou entende dans la société pendant l'exercice ou même hors de l'exercice de ma profession, j e tairai ce qui n'a jamais besoin d'être divulgué, regardant la discrétion comme un devoir en pareil c a s : 6 4 7 Pour c e qui est du VIH/sida, on a dit que, « s e l o n un principe général d e l'éthique médicale, le médecin qui a connaissance de résultats positifs ou m ê m e d'un diagnostic confirmé de s i d a d o i t p r o t é g e r la c o n f i d e n t i a l i t é d e c e s r e n s e i g n e m e n t s et en é v i t e r l a communication».648 (iii) Exceptions à l'obligation de confidentialité T a n d i s q u e « l a présomption refutable régissant la confidentialité des renseignements médicaux, y compris dans le cas du sida, est q u e tous ont droit au respect de leurs droits à la protection des renseignements personnels et à la confidentialité, qui ne peuvent être violés q u e pour des raisons très s é r i e u s e s » , 6 4 9 la protection de la v i e privée doit parfois céder le p a s à d'autres intérêts s o c i a u x . 6 5 0 Le droit D a n s certains cas, les renseignements médicaux confidentiels peuvent être communiqués s a n s qu'il y ait infraction à l'obligation de confidentialité; d e plus, des e x c e p t i o n s à l'obligation d e confidentialité permettent ou m ê m e exigent le m a n q u e m e n t à cette obligation. U n médecin peut divulguer des renseignements sur un patient avec le consentement éclairé de c e dernier (il ne s'agit pas alors d'une violation) ou si la loi l'exige. Toutes les provinces canadiennes et les territoires ont adopté une loi obligeant les médecins à signaler les c a s de sida et, parfois, l e s c a s d'infection à VTH, de f a ç o n nominative ou non nominative, aux représentants d e la santé publique. Cependant, aucune loi particulière sur l e V I H / s i d a n'exige ou n'autorise la divulgation, par un médecin, de c e s renseignements à un partenaire Le Serment cfHippocrate, Grand Larousse universel, tome 13, 1985, 9513. R. Belitzky et R_A. Solomon, «Doctors and Patients: Responsibilities in a Confidential Relationship» dans L.H. Dalton et S. Bunis (éd.), AIDS and the Law: A Guide for the Public, New Haven, Yale University Press, 1987, 201-209, 202. 6 4 9 MA. Somerville, AIDS: A Challenge to Health Care, Law and Ethics, dans D. Snowden, D.F. Cassidy (éd.), AIDS: À Handbook for Professionals, 1989, 200-220, à la p. 211. 6 5 0 Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, supra, note 563, à la p. 1. 647 648 Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail sexuel ou à u n e personne a v e c qui l e patient partage d e s seringues. Certains territoires et provinces ont toutefois adopté u n e loi exigeant ou autorisant la communication, par un médecin, d e renseignements sur un patient si une telle communication est nécessaire à la protection d'un tiers. L a notification des partenaires est requise ou autorisée par certaines lois sur la santé publique; E n l'absence, du consentement éclairé du patient et d'une loi e x i g e a n t ou autorisant la communication, l a communication d e renseignements sur les patients peut encore être j u s t i f i é e par les doctrines du droit général, qui s'appliquent afin de prévoir des exceptions à l'obligation d e confidentialité. En premier lieu, la défense de nécessité peut s'appliquer afin de justifier une violation d e la confidentialité l o r s q u e « l e préjudice résultant d e la violation est c o m p e n s é de toute évidence par l e préjudice qu'elle permet d'éviter, l e préjudice évité n e peut l'être d'une autre f a ç o n moins envahissante, et le préjudice évité est suffisamment g r a v e pour justifier qu'on l'évite par une violation de la confidentialité». 6 5 1 E n d e u x i è m e lieu, dans de rares c a s , il y a « o b l i g a t i o n d'avertir» ou « o b l i g a t i o n d e protéger» autrui. E n général, une telle obligation s'applique « s e u l e m e n t à des personnes identifiées ou facilement identifiables, par e x e m p l e celles qu'une personne vivant a v e c le V I H met clairement en danger et qui n'ont aucun autre moyen d é connaître ce risque, et donc de l'éviter, ou qui, à cause d e leur ignorance, pourraient mettre d'autres personnes en danger».652 D a n s l'arrêt Mclnerney, la C o u r s u p r ê m e du C a n a d a a statué q u e le droit du patient à exiger que l e s secrets que le médecin apprend dans l e cadre de s a pratique ne soient p a s divulgués est absolu s a u f s'il y a u n e raison primordiale d'y déroger: Il peut se présenter des cas où des motifs liés à la sécurité [...] des personnes ou du public seraient suffisamment convaincants pour supplanter ou limiter les obligations de prime abord imposées par la relation confidentielle. 6 5 3 D a n s un autre arrêt, la C o u r s u p r ê m e a traité d é la communication d e renseignements médicaux confidentiels au cours d'une procédure judiciaire. Toutefois, elle s'est également prononcée s u r la communication d a n s un contexte e x t r a j u d i c i a i r e . 6 5 4 E l l e a statué que, dans un contexte extrajudiciaire, l e respect d e l a v i e privée du particulier constitue l e principe m a j e u r qui sous-tend l'obligation d'un professionnel ou d'un hôpital de garder secrets leurs dossiers médicaux: Gilmore et Somerville, supra, note 635, à la p. 21; Somerville, supra, note 249, aux p. 211-212. Gilmore et Somerville, ibid., à la p. 21. 653 Mclnerney, supra, note 638, à la p. 154, citant Halls v. Mitchell, [1928] R.C.S. 125, 136. 6 5 4 n faut distinguer le contexte extrajudiciaire du contexte judiciaire. Dans ce dernier, il s'agit de déterminer si les communications entre un patient et son médecin bénéficient du privilège lorsque ce dernier est demandé au N cours d'une procédure judiciaire. 651 652 Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Un tribunal est donc en droit, dans ces circonstances, d'interpréter d'une façon libérale l'obligation générale de, non divulgation imposée aux hôpitaux et aux professionnels de la santé, et d'une façon stricte toute violation du droit à la confidentialité. 6 5 5 A u x É t a t s - U n i s , les tribunaux ont déclaré plusieurs f o i s que, « d a n s certains c a s , la nécessité d'assurer la sécurité du public l'emporte sur le devoir de non divulgation du médecin»[trad.]. 6 5 6 D a n s certains États, les tribunaux ont tenu r e s p o n s a b l e s envers les membres de la famille d'un patient des médecins qui n'avaient p a s dit que le patient avait une maladie contagieuse. Belitzky et Solomon ont conclu que « l e médecin connaissant un diagnostic d e sida qui n e c o m m u n i q u e p a s c e s renseignements à une v i c t i m e prévisible pourrait être tenu r e s p o n s a b l e » . 6 5 7 D a n s la décision Tarasoff v. Regents of the University of California,658 la C o u r s u p r ê m e de la Californie a i m p o s é aux psychothérapeutes l'obligation d e protéger les tiers contre les actes potentiellement dangereux d e leurs patients. E l l e a statué que, lorsqu'un thérapeute décide ou aurait dû décider «qu'un patient présente un g r a v e risque d e v i o l e n c e pour autrui, il acquiert l'obligation d'exercer une diligence raisonnable afin de protéger la victime éventuelle contre un tel d a n g e r » . 6 5 9 E l l e a c o n c l u q u e «l'intérêt p u b l i c , qui f a v o r i s e la protection d e la c o n f i d e n t i a l i t é d e s communications entre le patient et son médecin doit céder le p a s dans la mesure où une telle divulgation est essentielle pour éviter des dangers à autrui». Les obligations éthiques L'obligation éthique d'assurer l a confidentialité des renseignements c o m m u n i q u é s au m é d e c i n par son patient n'est p a s a b s o l u e . Tel q u e mentionné p r é c é d e m m e n t , 6 6 0 l'Association m é d i c a l e canadienne a résolu qu'il n'est p a s contraire à l'éthique, p o u r un médecin, d e c o m m u n i q u e r d e f a ç o n discrète, à une p e r s o n n e appropriée et au s u du patient, m a i s sans son consentement, le fait q u e le patient est séropositif. Frenette, supra, note 637, à la p. 675. 656 Belitzky et Solomon, supra, note 648, à la p. 203, note 24, référence à Edwards v. Lamb, 69 N J i 599,45 A. 480 (1899); Earle v. Kuklo, 26 N J . Super. 471, 98 A .2d 107 (1953) (le propriétaire expose les locataires à la tuberculose); Kliegel v. Aitken, 94 Wis. 432, 60 N.W.67 (1896) (l'employeur expose les employés à la fièvre typhoïde); Davis v. Rodman, 147 Aïk. 385, 227 S.W. 612 (1921) (fièvre typhoïde); Skillings v. Allen, 143 Minn, 323, 173 N.W. 663 (1919) (scarlatine); Edwards, 69 N.H. 599, 45 A.480 (blessures infectieuses); Fosgate v. Corona, 66 N.J. 268, 330 A.2d 355 (1974) (tuberculose); Wojick v. Aluminium Company of America, 18 Mise. 2d 740, 183 N.Y.S^d 351 (Sup. CL 1959) O'employeur fait passer des radiographies de façon régulière à un employé responsable de ne pas avoir divulgué sa tuberculose). 655 657 658 659 660 Belitzky et Solomon, supra, note 648, à la p. 203. 17 Cal. 3d 425, 551 P. 2d 334, 131 CaL Rptr. 14 (1976). Belitzky et Solomon, supra, note 648, aux p. 203-204, référence à Tarasoff. Voir supra, note 599. Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 3. Évaluation Nous avons la conviction qu'il faut mettre au point de nouvelles lignes de conduite et de nouvelles méthodes pour trouver un meilleur équilibre entre le besoin d'enrayer la propagation de l'infection du V Ï H et la nécessité de protéger la vie privée des particuliers. Il faut reconnaître explicitement. le besoin de protéger au maximum la confidentialité des renseignements touchant au VIH ou au sida. Ces lignes de conduite et ces méthodes doivent reconnaître clairement que la prédominance de la confidentialité maximale des renseignements touchant au V I H ou au sida est une mesure essentielle pour la protection de la santé publique. Afin de garder la confiance totale des personnes à risque, les pouvoirs publics ont un intérêt à la fois à empêcher la divulgation indue des renseignements touchant au VIH ou au sida et à adopter des règles claires pour la divulgation appropriée de tels renseignements. Nos recommandations placent le médecin au centre du processus de dépistage et d'information des partenaires. 6 6 1 Jusqu'à un certain point, le respect des confidences et la promotion de la santé publique sont des objectifs qui vont ensemble; les campagnes sur la santé publique dépendent souvent de la confiance et de la collaboration de la communauté et impliquent des protections substantives et procédurales relativement aux renseignements obtenus au cours du travail de santé publique. Néanmoins, il existe une tension entre le besoin d'obtenir certains renseignements et l'importance de la vie privée. De façon réaliste, des degrés élevés de confidentialité ne peuvent pas exister au sein du réseau vaste et complexe de cueillette d'information par l'État. Par conséquent, en tant que société, nous sommes confrontés à une problématique contrariante: où se situe le juste équilibre entre la cueillette d'information sur la santé publique et la protection de la vie privée, et comment pourrions-nous l'atteindre? 6 6 2 (1 ) Importance de la confidentialité N o u s o b s e r v o n s un consensus sur le fait que, vu la stigmatisation et la discrimination à l'endroit d e s personnes vivant avec le V I H / s i d a ou autrement affectées, la confidentialité revêt u n e importance particulière dans le contexte du VIH/sida: Depuis leur apparition, l'infection à V I H et le sida soulèvent de sérieuses préoccupations relativement à la vie privée, donnant lieu à des débuts de manifestations d'une «troisième épidémie» de blâme, de stigmatisation, de préjugés et de discrimination. 6 6 3 Commissaire à l'information et à la vie privée/Ontario, supra, note 574, à la p. 4. L.O. Gostin, Z. Lazzarini, K.M. Flaherty, Legislative Survey of State Confidentiality Laws, with Specific Emphasis on HIV and Immunization: Final Report Presented to: The U.S. Centers for Disease Control and Prevention, The Council of State and Territorial Epidemiologists, The Task Force for Child Survival and Development, Carter Presidential Center, 2 juillet 1996, à la p. 32, avec référence à L.O. Gostin, «Health Information Privacy», Cornell Law Review, 1995, 80: 101-184. 663 Ibid., à la p. 62, avec référence à The Panos Institute, The Third Epidemic: Repercussions of the Fear of AIDS, Londres, Croix-Rouge norvégienne, 1990. 661 662 Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail M a l g r é les m e s u r e s adoptées par plusieurs pays, y c o m p r i s le Canada, pour réduire la discrimination i s s u e d e la peur des gens à l'endroit d e l'infection à V I H , on n'est p a s parvenu à f a i r e grand chose qui s'attaque aux causes profondes de la discrimination, de la peur, d e s p r é j u g é s et d e l ' i n c o m p r é h e n s i o n du risque du V I H , p a s p l u s q u ' à la discrimination sous-jacente à laquelle font f a c e les personnes vulnérables à contracter le VIH: L'infection à VIH continue d'être associée à des actes profondément intimes, y compris l'activité sexuelle et l'utilisation de drogue, dont la révélation peut exposer les gens à la stigmatisation, à la discrimination, voire même au rejet par la famille, les amis et la communauté. Aux États-Unis [et au Canada], le VIH et le sida affectent de façon disproportionnée des populations qui se heurtaient déjà à la discrimination au sein de notre société. ... Vu la nature persistante de certains de ces préjugés, et de la dimension foncièrement intime des renseignements, il n'est pas surprenant que plusieurs personnes ne veuillent pas que leur état sérologique au VIH soit divulgué. 6 6 4 Outre son i m p o r t a n c e particulière dans le contexte du V I H / s i d a , la confidentialité est importante de f a ç o n générale en médecine, pour deux raisons principales: 6 6 5 • la raison éthique est que le respect de la confidentialité est un moyen d e respecter la dignité du patient. L e s p l u s intimes secrets physiques et p s y c h o l o g i q u e s du patient sont gardés confidentiels afin de réduire un sentiment de honte et de vulnérabilité; . • la raison p r a g m a t i q u e est que, si les m é d e c i n s et d ' a u t r e s p r o f e s s i o n n e l s veulent obtenir des renseignements de leurs patients et clients, ils doivent être c a p a b l e s d e garantir q u e c e qui leur est révélé demeurera confidentiel: « E n l ' a b s e n c e d ' u n e telle garantie, il ne peut exister aucune assurance de franchise et, en l ' a b s e n c e d e franchise, la capacité de procéder à un travail clinique efficace serait menacée». (2) Limites et problèmes sous-jacents B i e n q u e le b e s o i n de confidentialité soit généralement reconnu, en particulier dans l e contexte des renseignements personnels relatifs au V I H / s i d a , cette acceptation s e m b l e n'avoir en pratique qu'un effet limité dans le cadre des soins médicaux, à notre époque. Selon d'aucuns, la protection juridique du secret médical n'est souvent qu'illusoire: « T r o p Ibid., à Up. 62. Voir par exemple R. Bayer, «Confidentiality and Its Limits», dans H. Fuenzalida-Puelma et coll. (éd.), Ethics and Law in the Study of AIDS, Pan American Organization Scientific Publication No 530; P. Wilson, «Medical Confidentiality - A Decrepit Concept?», document présenté lors de la réunion de la Law and Society Association, Toronto, 2 juin 1995; M Siegler, «Confidentiality in Medicine - A Decrepit Concept», The New England Journal of Medicine, 1982, 307(24): 1518-1521, à la p. 1519. 664 Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail d e c h o s e s , d a n s , l a loi e l l e - m ê m e , r e c o m m a n d e n t l a d i v u l g a t i o n , l a j u s t i f i e n t ou r e x c u s e n t » 6 6 6 Certains ont m ê m e déclaré que [l]a confidentialité médicale, telle que les patients et les médecins la comprenaient traditionnellement, n'existe plus. Ce principe médical ancien, qui fait partie du serment et du code de déontologie de tout médecin depuis l'époque d'Hippocrate, est devenu vieux, usé, inutile; c'est un concept désuet. L e s efforts pour préserver la confidentialité semblent voués à l'échec et entraînent davantage de problèmes que de solutions. 6 6 7 D a n s c e contexte, l e V I H / s i d a présente un défi à la dérive actuelle v e r s u n e nonconfidentialité médicale: L a communication de renseignements personnels relatifs au VIH/sida peut détruire une vie qui n'est même pas menacée par la maladie; elle peut rendre futiles les efforts pour soulager une infection déjà contractée. De sérieux problèmes de justification subsistent dans les cas de communication les plus avisés, les plus réfléchis et les plus protégés; néanmoins, la communication est trop souvent le résultat de négligence, de malveillance ou de simple ignorance. 6 6 8 Selon Glenn et coll., l ' e n s e m b l e de ces constatations incite à reconsidérer le l a n g a g e et la p r a t i q u e d e la confidentialité m é d i c a l e , à la l u m i è r e du V I H / s i d a . C e t e f f o r t est fondamental si l'on veut que la confidentialité médicale, en général et dans le contexte particulier d e renseignements personnels relatifs au V I H / s i d a , p u i s s e survivre. L e s problèmes actuels sont n o m b r e u x : 6 6 9 • U n premier problème consiste à définir les p o s s i b l e s exceptions au principe de la confidentialité. • U n d e u x i è m e p r o b l è m e se rattache au fait q u e le d o m a i n e d e s soins m é d i c a u x s ' e s t élargi: plusieurs personnes sont impliquées dans la prestation et l'administration des s o i n s d e santé. P a r conséquent, déclarer q u e les renseignements m é d i c a u x sont c o n f i d e n t i e l s « é q u i v a u t à n e rien dire qui porte à c o n s é q u e n c e relativement a u x renseignements qui sont transmis au sein d ' u n g r o u p e autogéré d e personnes qui ont a c c è s à d e tels renseignements m é d i c a u x » . 6 7 0 • U n troisième problème réside dans l'apparente inefficacité des déclarations f o r m e l l e s du droit pour renforcer la confidentialité médicale. À l'heure actuelle, les protections B . M Dickens, «Legal Limits of AIDS Confidentiality», Journal of the American Medical 1988, 259: 3449-3451, aux p. 3449 et 3551. 6 6 7 Siegler, supra, note 665, à la p. 1518. 6 6 8 Glenn et coll., supra, note 565, à la p. 55. 669 Wok Ibid.y aux p. 30-32. 670 Ibid., à \a p. 31. 6 6 6 Annexe - 5 - Association, Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail légales sont disparates ou i n a d é q u a t e s . 6 7 1 M ê m e là où l ' o n a légiféré spécifiquement sur la c o n f i d e n t i a l i t é relative aii V I H / s i d a ; c o m m e a u x É t a t s - U n i s , c e r t a i n s c o m m e n t a t e u r s considèrent que «il n ' y a p a s d e garantie e f f i c a c e en m a t i è r e de confidentialité des résultats du test ou d e l'utilisation qui pourrait être faite d e c e s résultats».672 • U n quatrième p r o b l è m e est q u e l'utilisation croissante d e s y s t è m e s informatiques, p o u r l e s r e n s e i g n e m e n t s m é d i c a u x , conduit à u n e p r é o c c u p a t i o n e n c o r e p l u s importante en ce qui concerne la sécurité: « P l u s de g e n s sont autorisés à utiliser les renseignements sur la santé d'une personne, l'accès non autorisé peut s'avérer difficile ou i m p o s s i b l e à détecter, et un v o l u m e d'information b e a u c o u p plus important peut, être obtenu ou copié d ' u n seul c o u p . » 6 7 3 Plusieurs ont suggéré des façons d e régler ces problèmes. Toutefois c o m m e l'ont souligné Gostin, Lazzarini et Flaherty, la «cueillette croissantè d e données relatives à la santé et le potentiel d e divulgation indue, d ' u s a g e subséquent et d e brèches dans la sécurité d e s s y s t è m e s i n f o r m a t i q u e s suggèrent ... que l a résolution du c o n f l i t entre le b e s o i n d e renseignements et la confidentialité des patients ne sera p a s c h o s e s i m p l e » . 6 7 4 E n c e moment, l a loi ne protège p a s adéquatement la vie privée et elle n ' a s s u r e p a s non p l u s des pratiques j u s t e s en matière d'information. L e s problèmes q u e ceci engendre d é p a s s e n t toutefois l a portée du présent document et nous renvoyons le lecteur aux rapports et documents qui ont e x a m i n é les problèmes en détail et qui proposent des s o l u t i o n s . 6 7 5 N o u s n o u s pencherons ici sur trois sujets qui ont s e m é une controverse considérable dans le contexte du VIH/sida: la déclaration, la notification des partenaires et le « b e s o i n de savoir». • . i. Q u o i q u ' i l en soit, nous appuyons les Directives concernant le VIH/sida et les droits de l'homme, adoptées lors de la D e u x i è m e Consultation internationale sur le V I H / s i d a et les droits de l ' H o m m e , où il est déclaré que: Il convient de promulguer des lois pour protéger d'une manière générale la confidentialité et la vie privée. L e s informations relatives au V I H concernant les individus doivent être inscrites dans les définitions des données personnelles et médicales à protéger, de façon à interdire leur utilisation ou publication abusive. L a législation sur la vie privée doit permettre à toute personne de consulter son dossier et de demander que des modifications y soient apportées pour que les données soient exactes, pertinentes, complètes et à jour. Un organe indépendant devrait être chargé de réparer les atteintes à la confidentialité. Des dispositions devraient être prévues pour permettre aux organes professionnels de prononcer des sanctions en cas d'atteinte à la A Legal Framework for Health Information - Consultation Paper, Toronto, ministère de la Santé de l'Ontario, juin 1996, à la p. 5. 6 7 2 M. Closen et coll., «AIDS in America: Death, Privacy and the Law», Human Rights, 1987,14: 27, à la p. 48. 673 A Legal Framework for Health Information, supra, note 671, à la p. 9. 674 Supra, note 662, à la p. 154. 6 7 5 Voir par exemple ibid.', Glenn et colL, supra, note 565; Gostin, Lazzarini et Flaherty, supra, note 662. 671 Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail confidentialité, en la considérant comme une faute professionnelle aux ternies des codes de conduite examinés c i - a p r è s . 6 7 6 Une atteinte excessive à la vie privée par les médias pourrait également figurer dans les codes professionnels applicables aux journalistes. L e s personnes touchées par le V I H / S I D A devraient être autorisées à demander que leur identité et leur vie privée soient protégées dans les actions judiciaires où des informations à ce sujet seront présentées [ . ] 6 7 7 (3) Déclaration Les responsables de la santé publique doivent pouvoir prouver le besoin d'un élément donné d'identification personnelle, lorsqu'ils recueillent de l'information. S'ils pouvaient atteindre l'objectif de santé publique aussi bien, ou même mieux, mais en n'utilisant aucun renseignement sur l'identité, la cueillette de données dépersonnalisées ou globales serait préférable. Ces principes de cueillette de données reconnaissent que le pouvoir étatique d'acquérir des renseignements personnels délicats devrait être, justifié par des objectifs importants de santé publique qui ne pourraient pas être atteints par des moyens qui sont moins envahissants pour la vie privée des individus. 6 7 8 C o m m e démontré précédemment, tous les territoires et provinces du C a n a d a requièrent la déclaration d e s c a s de sida aux autorités de santé publique et la plupart, m a i s p a s tous, requièrent a u s s i la déclaration d e s c a s de séropositivité au V I H . C e r t a i n e s p r o v i n c e s requièrent u n e déclaration nominative, d'autres non. L e s disparités m a r q u é e s d a n s la législation et la pratique, entre les provinces et territoires, rend plus difficile la surveillance de l ' é p i d é m i e au C a n a d a et donnent naissance à d e s d e m a n d e s q u e soit d é v e l o p p é un m é c a n i s m e de déclaration normalisé et apte à éviter la duplication des dossiers, en matière de déclaration au Canada. Étant donné que les questions de santé publique relèvent d e la compétence d e s territoires et provinces, l'élaboration d ' u n tel m é c a n i s m e d e déclaration nécessiterait q u e tous les territoires et provinces s'entendent sur u n e f a ç o n de procéder, p u i s amendent leurs lois d e santé publique en conséquence. Il s e m b l e i m p r o b a b l e que, plus d e 15 a n s après l'avènement du VIH/sida, on parvienne à un c o n s e n s u s pan-canadien sur la meilleure f a ç o n d'atteindre les objectifs d e la déclaration, m a i s il s e m b l e q u e des provinces qui n'ont j u s q u ' à maintenant pas requis l a déclaration des c a s d e séropositivité au V I H s'orientent vers une modification d e leurs l o i s et règlements afin de la requérir. Ceci pourrait bien aboutir à une situation où t o u s l e s territoires et provinces du C a n a d a requièrent la déclaration des c a s de sida et de séropositivité au V I H . A u s s i longtemps q u e la déclaration est non nominative, ceci n'est p a s inquiétant. A f i n d'atteindre l ' o b j e c t i f 676 Selon la stratégie. 10 des Directives (voir supra, note 92, à la p. 30 du document anglais), Les États devraient veiller à ce que les pouvoir publics et le secteur privé élaborent pour les questions concernant le VIH/SIDA des codes de conduite traduisant les principes des droits de l'homme en codes de pratique et de responsabilité professionnelles,, assortis de mécanismes d'accompagnement en vue de la mise en oeuvre et de l'application de ces codes. 677 678 Supra, note 92, à la p. 24. Gostin, Lazzarini et Flaherty, supra, note 662, à la p. 164. Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail é p i d ë m i o l o g i q u e d e la déclaration, il peut exister de b o n n e s raisons, à c e s t a d e d e l'épidémie» d e requérir la déclaration d e s c a s de séropositivité au V I H . Cependant, ni l ' o b j e c t i f épidémiologique d e la déclaration, ni l'objectif de faciliter des mesures d e santé p u b l i q u e c o m m e l a notification des partenaires, ne requiert q u e la déclaration soit effectuée de façon nominative. • Relativement à l'objectif épidémiologique, le besoin en est un de données fiables et . précises s o u s une f o r m e qui permette de mesurer la prévalence et l'incidence du V I H , y c o m p r i s d e s d o n n é e s d é m o g r a p h i q u e s sur l ' â g e , le s e x e et l ' e m p l a c e m e n t g é o g r a p h i q u e d ' u n e personne séropositive, et sur les antécédents d e cette personne au test, afin d ' é v i t e r la duplication des déclarations. L e s r e n s e i g n e m e n t s d'identité personnelle ne sont p a s pertinents à cet objectif. • Relativement à l'objectif de faciliter l'application de mesures d e santé publique c o m m e la notification des partenaires, les renseignements d'identité personnelle ne sont p a s pertinents non plus: dans le cadre du s y s t è m e de notification des partenaires p r o p o s é c i - d e s s o u s , les m é d e c i n s n'auraient p a s à c o m m u n i q u e r d e r e n s e i g n e m e n t s sur l'identité personnelle, m a i s seulement une liste de partenaires et de renseignements qui sont strictement pertinents aux buts d e prévenir les partenaires, c o m m e l e m o d e d'exposition présumé. E n conséquence, on peut conclure que les obligations de déclaration nominative ne sont p a s c o n ç u e s pour aider à atteindre les objectifs de la f a ç o n la plus e f f i c a c e et la m o i n s nuisible qui soit. L e s provinces et les territoires qui requièrent actuellement la déclaration nominative d e la séropositivité au V I H et/ou du sida devraient donc amender leurs lois et règlements sur la santé publique pour ne requérir qu'une déclaration non nominative. (4) Notification des partenaires En matière de relance des contacts et d'avertissement des partenaires, la question controversée sur le plan éthique n'est pas de savoir si l'on doit informer les partenaires sexuels ou les toxicomanes partageant seringues et aiguilles qu'ils sont peut-être infectés, mais de savoir comment il convient de les en informer. 6 7 9 Il y a eu de v i v e s discussions sur les questions de savoir si la notification des partenaires devrait avoir cours au Canada et, le cas échéant, de quelle manière. C e u x qui sont en faveur ont d e m a n d é à c e q u e l'on étende au V I H les programmes de notification des partenaires sur l e s M T S . 6 8 0 A l ' a p p u i de leur position, ils ont i n v o q u é la longue expérience d e notification des partenaires dans le cadre des programmes de contrôle des M T S , la bonne note d e s p r o g r a m m e s sur l e s M T S en matière c o n f i d e n t i a l i t é et le p o u r c e n t a g e Roy, supra, note 77, aux p. 44-45. K.E. Toomey, W. Cates, «Partner Notification for the Prevention of HIV Infection», AIDS, 1989, 3(suppL 1): S57-S62, aux p. S57-S58. 679 680 Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail relativement élevé d e personnes séropositives qui semblent ne p a s être au courant du fait q u ' e l l e s avaient été e x p o s é e s à l'infection. C e u x qui s ' o p p o s e n t à la notification des partenaires font valoir q u e cette mesure « n ' a que p e u d e valeur démontrée, comparativement à s e s coûts relativement é l e v é s » , q u e « [ l ] a l o n g u e période d'incubation asymptomatique rend pour le m o i n s difficile d e retrouver tous l e s c o n t a c t s » et q u e l ' o n n e parvient p a s à retracer les partenaires a n o n y m e s et plusieurs autres. D e plus, il a été soutenu que l ' e f f i c a c i t é des mesures de notification des partenaires pour réduire la propagation du V I H n ' a p a s été démontrée, q u e de telles m e s u r e s peuvent enfreindre les libertés individuelles et donner lieu à de la discrimination, et q u ' e l l e s peuvent en bout d e c o m p t e dissuader les personnes les plus vulnérables au V I H d ' a v o i r recours au counselling et au t e s t . 6 8 1 E n outre, d'autres critiques soulignent q u ' e n p r é s e n c e de violence conjugale, le fait d ' i n f o r m e r un partenaire de s e x e masculin peut e x p o s e r une f e m m e séropositive à des s é v i c e s ou à des blessures de la part d e son partenaire violent, voire à la m o r t . 6 8 2 À l ' a u b e d e l'épidémie, il était largement reconnu que > au sein des communautés ou populations les plus vulnérables, comme les hommes gais et les usagers de drogue par injection, la relance des contacts ne sert à aucun objectif particulier. Puisque toutes ces personnes étaient exposées à un risque élevé, la seule mesure efficace était d'encourager tout le monde à adopter des comportements qui réduisent les risques, peu importe leur état sérologique et peu importe le fait qu'ils aient déjà eu ou non des contacts avec une personne séropositive. En outre, la nature du contact sexuel entre hommes ou la transmission par des aiguilles réutilisées rendaient très difficile, voire impossible, de mener efficacement des programmes de notification des partenaires. L e s divers contacts pouvaient tout simplement être introuvables. Finalement, la possibilité de la relance des contacts, particulièrement la mise en oeuvre d'un mécanisme impliquant de près l'État et les responsables de la santé publique, était perçue comme très menaçante par la majorité des personnes « à risque élevé» d'infection à VIH. L a relance des contacts peut entraîner une divulgation publique et des actions même plus coercitives de la part de l'État, et la simple menace de déclaration obligatoire de l'état sérologique aux responsables de la santé publique, et de relance des contacts, a eu un effet de douche froide sur les efforts de prévention au sein de populations à risque.683 Selon F l a n a g a n , il est encore vrai en 1997 que la relance des contacts n ' a aucune fonction particulière dans les populations qui sont les p l u s touchées par le V I H : pour cette raison, c e n ' e s t p a s une mesure q u e l ' o n tend à viser activement, où q u e c e soit, au C a n a d a , «ni m ê m e en Ontario, où les autorités de santé publique semblent plus favorables à la relance de contact c o m m e mesure de santé publique». Ibid., à la p. S58. R.L. North, K J J . Rothenberg, «Partner Notification and the Threat of Domestic Violence Against Women with.HIV Infection», New England Journal of Medicine, 1993, 329: 1194-1196. 6 8 3 Flanagan, commentaire, supra, note 180, à la p. 15. 681 682 Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Néanmoins, Flanagan admet que en ce qui concerne les personnes qui peuvent ne pas être au courant qu'elles sont exposées à un risque accru de VIH, et qui ne sont ainsi au courant d'aucun besoin d'adopter des comportements pour réduire ce risque, la relance des contacts peut jouer un rôle important. Une fois de plus, en présence de nouveaux traitements, il est essentiel que toutes les personnes vulnérables connaissent leur état sérologique dès que possible et, au besoin, aient immédiatement recours à une intervention. 6 8 4 Flanagan conclut que le moment est peut-être venu de réévaluer l'opposition qu'offrent depuis longtemps de nombreux militants de la lutte au sida face à toute forme de relance des contacts dans le contexte de l'infection à VIH. Parmi les personnes susceptibles d'avoir la fausse impression qu'elles ne sont pas exposées à un risque particulier, plus généralement des femmes, la relance des contacts pourrait être utile comme incitatif à demander un test du VIH et à se faire traiter si elles sont séropositives. ... L a disponibilité d'interventions valables contribue à appuyer la cause des programmes ciblés de relance des contacts, mieux qu'au moment où il n'existait aucune intervention particulièrement u t i l e . 6 8 5 Cependant, bien q u e l ' o n ne puisse nier qu'il y a davantage d'éléments qu'auparavant en f a v e u r d e s p r o g r a m m e s d e notification des partenaires et q u e , par c o n s é q u e n t , la notification des parteniaires devrait être menée dans certaines circonstances 6 8 6 les efforts d e prévention et d e contrôle doivent continuer,de privilégier l'éducation a x é e sur la réduction personnelle des risques par le biais de la modification des comportements. E n raison des taux élevés d e prévalence parmi les hommes qui ont des relations sexuelles a v e c d'autres h o m m e s et parmi les U D I , et/ou en raison d e l'impossibilité d e procéder à un suivi, les p r o g r a m m e s de réduction des risques qui ciblent c e s communautés continuent d ' ê t r e p l u s rentables q u e la relance des contacts ciblant d e s individus au sein d e ' c e s groupes.687 D e plus, un important débat se poursuit au sujet du meilleur m é c a n i s m e de notification des partenaires. Cette mesure ne peut pas fonctionner sans la collaboration de la personne séropositive. S a n s cette collaboration, la personne séropositive peut n e p a s informer son ou s e s partenaires, ou ne p a s donner leurs n o m s afin q u e quelqu'un d'autre s ' e n charge. L e s approches obligatoires ou coercitives pourraient pousser les g e n s vers la marginalité, les aliéner e t nuire à l a notification des partenaires et à la prévention. A i n s i , c o m m e 684 ibid. Ibid. 6 8 6 Voir aussi Gostin, Lazzarini et Flaherty, supra, note 662, à la p. 82. 687 Voir aussi CCN-SIDA, supra, note 541, à la p. 13. Ceci ne signifie pas que la notification d'un gai ou d'un UDI n'est jamais appropriée. Plusieurs hommes gais ou UDI peuvent n'avoir qu'un petit nombre de partenaires et ne pas être au courant d'un risque d'exposition au VIH. 685 Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail principe général, à l'instar du test de sérodiagnostic du VIH, l a notification des partenaires devrait être une mesure volontaire, c'est-à-dire entreprise a v e c le consentement éclairé d e la p e r s o n n e séropositive. D e plus, elle devrait être f a i t e d e préférence par la p e r s o n n e séropositive elle-même. Seulement dans l e c a s où la personne séropositive r e f u s e d'avertir elle-même son ou s e s partenaires et q u e l e partenaire a p e u ou pas.de raison d e soupçonner qu'il est e x p o s é à un risque, la notification obligatoire des partenaires devrait être prise en considération. D e préférence, cette notification devrait être e f f e c t u é e par le médecin traitant, seulement a p r è s q u e l ' o n ait averti la personne séropositive q u e l ' o n procédera à la notification d e s e s partenaires. U n p r o g r a m m e « c e n t r é sur le m é d e c i n » est m o i n s menaçant q u ' u n p r o g r a m m e impliquant l ' É t a t et — afin de permettre q u e les m é d e c i n s consacrent du t e m p s à la notification des partenaires — des b a r è m e s d'honoraires devraient assurer une rémunération adéquate. Cependant, si un patient préfère q u e la notification des partenaires soit e f f e c t u é e par les responsables de la santé publique ou si le médecin du patient n'est p a s d i s p o s é ou apte à s ' e n occuper, cette mesure devrait être menée a v e c l ' a i d e des autorités d e santé publique, à la demande du médecin. Étant donné q u e l e nom du patient indexé ne devrait j a m a i s être communiqué à la personne qui a peut-être été exposée, les responsables d e la santé publique n'ont p a s besoin d'être i n f o r m é s du nom d u patient ni d ' a u c u n autre renseignement sur son identité. D e plus, il e s t n é c e s s a i r e d e f a i r e p r e u v e d ' u n e g r a n d e p r u d e n c e pour protéger l'identité d e s partenaires à contacter, et d e détruire tout renseignement personnel à leur sujet dès q u e la notification des partenaires a eu lieu. E n f i n , les p r o g r a m m e s de notification des partenaires doivent être souples, éviter de nuire au patient indexé et aux partenaires notifiés, et concentrer leurs efforts sur les personnes qui sont les plus susceptibles d'en profiter le plus. i (5) Confidentialité et «besoin de savoir» Les analyses de la confidentialité médicale ont généralement mis l'accent sur la tension entre, d'une part la responsabilité d'un médecin de conserver le secret de l'information que lui transmettent les patients, et d'autre part l'obligation légale et morale du médecin de révéler à l'occasion ces confidences à des tiers, comme la famille, l'employeur, les responsables de la santé publique, les autorités policières, etc. Dans tous ces cas, la question centrale concerne le niveau de rigueur dont doit faire preuve le médecin dans son obligation de préserver la confidentialité sur son patient lorsque la santé, le bien-être et la sécurité d'autres personnes identifiables ou de la société en général seraient menacées si les renseignements sur le patient n'étaient pas Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail communiqués. Dans de tels cas, la tension réside entre le bien du patient et le bien des autres. 6 8 8 Plusieurs groupes ont prétendu avoir besoin d e connaître l'état sérologique des personnes séropositives au V I H , dans certaines situations: notamment des agents correctionnels, d e s travailleurs d e la santé, des patients et des victimes d ' a g r e s s i o n sexuelle. L o r s q u e l ' o n évalue la valeur d e telles revendications, il est important de prendre en considération les objectifs q u e viserait la communication. D e plus, il est nécessaire d e déterminer si cette communication est nécessaire ou si d'autres moyens moins envahissants pourraient mener à l'atteinte des m ê m e s objectifs. (i) Objectif de la communication U n e d e m a n d e d e communication de renseignements médicaux peut survenir dans deux situations: • avant q u e ne se produise une exposition au V I H , afin de prévenir la transmission du VIH; et • après une exposition au VIH. (ii) Communication avant une exposition au VIH L ' o b j e c t i f de la communication dans cette situation est d'éviter ou d e réduire la possibilité d'exposition au V I H . L a communication mènerait à une intervention visant à empêcher l ' e x p o s i t i o n d ' a v o i r lieu. D e s m e m b r e s du personnel d ' é t a b l i s s e m e n t s correctionnels fédéraux, par exemple, prétendent souvent avoir besoin de connaître l'état sérologique des détenus s é r o p o s i t i f s afin de prendre les précautions a d é q u a t e s pour s e protéger et protéger leurs proches. N o t a m m e n t , certains de c e s employés trouvent qu'il n ' e s t p a s pratique d'appliquer les mesures de précautions universelles et qu'il n'est p a s réaliste de penser q u e les précautions qui peuvent empêcher la transmission du V I H dans les prisons puissent être toujours appliquées. Ils ont aussi a f f i r m é que le fait d e savoir qu'un détenu est séropositif au V I H les protégerait puisqu'ils useraient alors d e prudence accrue envers ce détenu. La communication ayant l'exposition est-elle nécessaire? V u les possibilités limitées d e transmission du V I H , m i s à part les rapports s e x u e l s et le partage de matériel d'injection, les c a s où pourrait survenir le « b e s o i n d e savoir» sont très rares. On observe un consensus sur le fait q u e l'application des précautions universelles est une meilleure f a ç o n de prévenir l'exposition. L e s personnes qui préfèrent adopter des précautions « a c c r u e s » seulement l o r s q u ' i l s sont en présence de q u e l q u ' u n dont elles savent qu'il est séropositif sont peut-être en train de militer en f a v e u r d'une politique mal avisée. Par exemple, si les e m p l o y é s de prison devaient être régulièrement informés de l'identité des détenus dont la séropositivité est connue, on créerait u n e f a u s s e impression de sécurité. L e personnel n e connaîtrait en fait q u e certains d e s détenus qui sont 688 Siegler, supra, note 665, à la p. 1519. Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail s é r o p o s i t i f s , p u i s q u e les détenus n e seraient p a s tous s o u m i s a u test et q u e T o n n e procéderait p a s à c e test d e manière répétée. H y a également lieu d e s'inquiéter q u e si l'état s é r o l o g i q u e d e s détenus séropositifs était révélé au personnel, m o i n s de détenus s e porteraient volontaires au test ou choisiraient d e révéler eux-mêmes leur séropositivité, c e qui réduirait e n c o r e d a v a n t a g e la p r o p o r t i o n d e d é t e n u s d o n t on connaîtrait l a séropositivité. (iii) Communication après une exposition au VIH L ' e x p o s i t i o n au V I H donne presque toujours lieu à une peur et une détresse intenses, et il est s o u v e n t prétendu q u e la p e r s o n n e qui a p o s s i b l e m e n t été e x p o s é e a l e droit de connaître l ' é t a t s é r o l o g i q u e de l a p e r s o n n e qui est à la s o u r c e d e cette e x p o s i t i o n potentielle. La communication après l'exposition est-elle nécessaire? D e s d e m a n d e s reposant sur l'opinion q u ' u n e personne possiblement e x p o s é e au V I H a besoin d e connaître l'état sérologique d e la personne à la source d e l'exposition ont été a n a l y s é e s précédemment, dans le contexte des victimes d ' a g r e s s i o n s e x u e l l e . 6 8 9 N o u s a v o n s démontré que, bien q u e l'on devrait encourager la personne qui est à la source d e l ' e x p o s i t i o n à révéler son état sérologique, le test imposé et la communication d e l'état sérologique ne peuvent que rarement être justifiés. (4) Conclusions E n 1989, l e rapport du C o m m i s s a i r e à la vié protection de la privée — compte tenu des conséquences négatives possibles de là communication de l'état sérologique au V I H d ' u n e personne — a exhorté à la «prudence, dans la cueillette de renseignements p e r s o n n e l s , relatifs au sida, prudence d a n s son utilisation, prudence dans sa c o m m u n i c a t i o n » . L e rapport soulignait que la situation m ê m e qui requérait cette extrême prudence était sujette à se modifier H est possible qu'un jour la communication de renseignements personnels relatifs au VIH/sida ne menace plus le bien-être physique et psychologique des personnes affectées par la divulgation ... et qu'elle n'affecte plus les conditions de leur appartenance à la société canadienne. Mais pour l'instant, la possibilité est forte que les opinions et les actes du public, et même le gouvernement, puissent nuire à ces individus au sujet desquels sont communiqués des renseignements personnels - sans procurer aucun avantage tangible pour la société 6 9 0 Tristement, en 1997, la divulgation de renseignements personnels relatifs au V I H / s i d a m e n a c e encore l e bien-être physique et mental des personnes q u ? e l l e concerne. L e besoin d e p r u d e n c e est d o n c toujours présent. B i e n q u e la plupart s ' e n t e n d pour dire q u e 689 Chapitre G 6(3Xii). Wlbid Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail certaines situations peuvent j u s t i f i e r une b r è c h e d e confidentialité, d e telles b r è c h e s soulèvent des questions épineuses: Qu'arriverait-il s'il venait à se savoir que les cliniciens brisent la confidentialité pour protéger des tierces personnes? L e s patients cesseraientils de parler franchement de leurs comportements? ... L a santé publique en subirait-elle aussi les conséquences? 6 9 1 Selon B a y e r , n o u s s o m m e s en f a c e d'une ironie exceptionnelle: l'éthique d e la relation clinique, qui privilégie habituellement une confidentialité rigoureuse, semble inciter à briser cette confidentialité, tandis que l'éthique d e la santé publique, qui est habituellement m o i n s préoccupée par la confidentialité, peut nécessiter q u ' o n y adhère plus strictement D a n s le m ê m e sens, Gillon conclut ainsi: Bien que dans des cas très exceptionnels, il puisse y avoir des justifications pour passer par-dessus la confidentialité, l'obligation de confidentialité médicale est une obligation très forte, quoique non absolue. Les patients, leurs partenaires, les médecins et membres du personnel, et le bien-être des gens en général seraient fort probablement f a v o r i s é s par le respect de cette tradition. 6 9 2 K a i n s ' i n q u i è t e de c e q u e les personnes vivant a v e c le V Ï H / s i d a ne parleraient p l u s ouvertement de leur séropositivité ou de leur activité sexuelle, après qu'on les informe q u e cette d i v u l g a t i o n pourrait engendrer un b r i s d e c o n f i d e n t i a l i t é et u n e p o s s i b i l i t é supplémentaire d e discrimination. Il avance, en conclusion, q u e la question d e bris ou respect de la confidentialité semble jeter l'ombre sur une question plus cruciale: Si un client n'informe pas son ou s a partènaire sexuelle au sujet de sa séropositivité, pourquoi pas? L a prévention de la propagation du V I H ne passe pas par des pratiques quasi policières de déclaration, mais bien par l'élimination graduelle de problèmes enracinés profondément, comme le rejet, l'abandon, la solitude, l'homophobie et l'infidélité. L e s clients viennent voir des conseillers pour qu'on les aide contre des problèmes dérangeants, pas pour être livrés aux autorités médicales 6 9 3 Ceci s o u l è v e un autre point important: tout en reconnaissant l'importance d e protéger la c o n f i d e n t i a l i t é , il est peut-être p l u s i m p o r t a n t d e p r o t é g e r l e s g e n s c o n t r e la d i s c r i m i n a t i o n : l e s e f f o r t s pourraient être p l u s f r u c t u e u x si l ' o n ne s ' a s s u r a i t p a s seulement de protéger la confidentialité m a i s q u e l ' o n réduisait aussi la discrimination à l'endroit des personnes vivant a v e c le VIH/sida 6 9 4 L ' u n e : d e s raisons d e l'importance de protéger la confidentialité des renseignéments personnels relatifs au V I H / s i d a est l e fait que l a divulgation de l'état sérologique au V I H d ' u n e personne (voire m ê m e souvent, la 691 Bayer, supra, note 665. R. Gillon, «AIDS and Medical Confidentiality», British Medical Journal, 1987, 1675-1677. 693 C D . Kain, «To Breach or Not To Breach; Is that .the Question?: A Response to Gray and Harding», Journal of Counselling and Development, 1988, 66: 224-225. 692 694 Dickens, supra, note 666. Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail divulgation de l'orientation sexuelle ou de l'usage de drogue) l ' e x p o s e à la stigmatisation, à la discrimination et au rejet. L e s personnes vivant a v e c le V I H ou l e sida pourraient craindre m o i n s la divulgation de leur état si ceci ne les exposait p a s à tant d e réactions négatives et si elles étaient m i e u x protégées contre la discrimination. L a confidentialité demeurerait n é c e s s a i r e p o u r toutes l e s raisons habituelles, m a i s e l l e aurait m o i n s d'importance. P a r c e q u e la confidentialité est souvent brisée, parce qu'il est si difficile d e prévenir la divulgation de renseignements, et parce q u e les personnes vivant avec le V I H ou le sida auraient avantage à pouvoir être ouvertes à p r o p o s de leur état sérologique, il est nécessaire q u e l ' o n augmente les e f f o r t s pour protéger les personnes vivant avec l e V I H ou le sida contre la discrimination. 6 9 5 12. La déclaration des cas de VIH et la déclaration des cas de sida devraient toujours être non nominatives: la déclaration nominative n'est souhaitable ni à des fins de surveillance épidémiologique, ni pour procéder à la notification des partenaires. Les provinces et les territoires qui requièrent actuellement la déclaration nominative devrait amender leurs lois et règlements de santé publique en conséquence. 13. Des programmes limités de notification des partenaires, fondés sur les soignants, peuvent contribuer à faire avancer un objectif vital de santé publique, pourvu 9 qu ils s'adressent en particulier aux personnes qui pourraient autrement ne pas se douter qu 'elles ont peut-être été exposées au VIH. Afin d'inciter les médecins à effectuer la notification des partenaires à la demande de leurs patients, des barèmes d'honoraires devraient assurer une rémunération adéquate des efforts de notification des partenaires. Les autorités de santé publique devraient entreprendre des mesures de notification des partenaires seulement lorsqu'un patient préfère qu 'elle soit effectuée par elles ou lorsqu 'un médecin ne veut pas ou ne peut pas le faire lui-même. Cependant, la santé publique ne devrait pas requérir que le médecin leur déclare le nom ou des renseignements sur l'identité du patient indexé. La déclaration non nominative devrait être suffisante. En outre, les responsables de la santé publique doivent s'assurer que les renseignements personnels sur les partenaires à notifier sont éliminés des dossiers de santé publique dès la notification effectuée. En général, on devrait s'abstenir d'exagérer l'importance des efforts de notification des partenaires. Pour les populations les plus vulnérables à contracter le VIH, l'éducation ciblée et le soutien par le biais de programmes communautaires demeurent essentiels. 77 serait dangereux d'augmenter le De la même façon, Spencer suggère que les législateurs portent leur attention sur la discrimination de la société contre le sida, qui fait obstacle aux programmes de test volontaire du VIH et de contrôle des MTS (voir E.T.H. Spencer, «The Sexually Active, HIV-infected Patient: Confidentiality Versus the Duty to Protect», Psychiatric Annals, 1988, 18(10): 571-576). 695 Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail financement des programmes de notification des partenaires sans au moins maintenir le niveau actuel du financement dés programmes d'éducation et de soutien. 14. La communication de renseignements personnels relatifs au VIH ou au sida à des personnes qui prétendent avoir un besoin ou un droit de connaître l'état sérologique de personnes séropositives est rarement justifiable. Dans la plupart des situations, cette communication est non nécessaire et son efficacité serait douteuse. De plus, la communication a souvent des effets qui vont à Vencontre de ses buts, ou des effets négatifs plus importants que les avantages qui pourraient en résulter. Les mesures qui peuvent être adoptées pour prévenir l'exposition au VIH et l'infection doivent être adoptées indifféremment du fait que l'on connaisse ou non l'état sérologique de la personne concernée. Il est essentiel que l'on éduque les gens sur les précautions qui peuvent prévenir la transmission du VIH et qu 'on leur rende disponibles les moyens nécessaire pour ce faire. Seulement dans de rares cas d'exception la divulgation peuUelle être justifiée, lorsque l'évaluation d'un individu montre qu'une communication est nécessaire, qu'elle sera probablement efficace et constitue le moyen le moins envahissant et le moins contraignant qui soit disponible pour prévenir des méfaits qu 'on ne pourrait éviter autrement Dans toutes les autres situations où se présentent des demandes de communication, d'autres moyens sont déjà disponibles, qui seraient moins nuisibles que la divulgation, et qui sont possiblement nécessaires et susceptibles d'être plus efficaces. 15. À cause des limites de la confidentialité et des difficultés de la protéger dans la pratique, il est nécessaire d'augmenter les efforts pour protéger contre la discrimination les personnes vivant avec le VIH/sida et les celles autrement affectées. Ceci devrait comprendre le financement de recherche sur l'ampleur et les conséquences de la discrimination à l'endroit des personnes atteintes et celles qui sont autrement affectées, l'éducation du public, le resserrement des lois et des politiques antidiscrimination et la mise en oeuvre de mécanismes efficaces de réparation des dommages. Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail SOMMAIRE DES CONCLUSIONS N o u s savons que le test du V I H est un instrument de santé publique fort efficace, mais il n'est efficace que lorsqu'on l'utilise d'une manière qui est appropriée sur les plans social, politique et médical. Sinon, il peut en fait nuire à la santé publique. 6 9 6 Bien que nous en sachions beaucoup au sujet de la prévention de la maladie du VIH, nous avons tendance à concentrer nos espoirs sur des solutions techniques. Plusieurs de ces espoirs ont été déçus et nous ont empêchés d'observer les genres de programmes sociaux, comportementaux et préventifs qui pourraient avoir un impact très positif tout de s u i t e . 6 9 7 Même si le contexte du traitement et du suivi se modifiait, le contexte nécessaire pour assurer le respect éthique des procédures de test ne changerait pas. L e s médecins ont l'obligation éthique d'offrir le test comme une possibilité, à ceux qui s'inquiètent en raison de leurs antécédents de vie ou d'état de santé; le patient peut et doit encore choisir s'il désire ou non subir le test à la lumière des renseignements disponibles et de sa propre situation. 6 9 8 A u x p r e m i è r e s a n n é e s d e l ' é p i d é m i e de V I H / s i d a , on a fait un e f f o r t concerté pour s'attaquer aux q u e s t i o n s entourant l e test des anticorps anti-VIH et la confidentialité d'une manière qui respecte les droits d e la personne, m a i s pour favoriser en m ê m e temps l'atteinte des o b j e c t i f s d e protection d e la santé publique. E n particulier au C a n a d a , un vaste c o n s e n s u s s ' e s t créé à l'effet que, sauf dans certaines circonstances très limitées, on ne devrait administrer le test à un individu que lorsqu'il y donne son consentement éclairé, volontaire et s p é c i f i q u e ; q u e du counselling et d e l'éducation avant et après le test sont disponibles et o f f e r t s ; et lorsque la confidentialité du résultat ou l ' a n o n y m a t du test peut être garanti. C e c o n s e n s u s est e x p r i m é dans des r e c o m m a n d a t i o n s c o m m e celles q u ' a f o r m u l é e s le C C N - S I D A , 6 9 9 qui procuraient un c a d r e d e r é f é r e n c e é t h i q u e pour l ' é v a l u a t i o n d e s p o l i t i q u e s en m a t i è r e d e test à partir d ' u n e p r i s e en considération attentive des coûts et avantages du test pour les individus et pour la société. A. Brandt, professeur d'histoire de la médecine à la Harvard Medical School, sité dans Abrams, supra, note 267. «ÏJWrf. 6 9 8 Miller et Pinching, supra, note 53, à la p. S191. 699 Supra, note 1. 696 Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail A u cours d e s récentes années, ce v a s t e consensus a montré des s i g n e s d'effritement. L e s nouvelles techniques de test, notamment l'existence de trousses d e test à domicile, les nouveaux traitements et I'épidémiologie changeante de l'infection à V I H , nous forcent à reconsidérer l e s approches au test du V I H et à la confidentialité. N o u s devons être ouverts a u x d é f i s q u ' a p p o r t e n t c e s n o u v e a u x d é v e l o p p e m e n t s et mettre à l ' é p r e u v e n o s convictions profondes. Toutefois, n o u s devons le faire en gardant à l'esprit l e s leçons a p p r i s e s au c o u r s d e s quinze dernières années et en n ' o u b l i a n t p a s que, p u i s q u e le V I H / s i d a continue d ' a f f e c t e r de f a ç o n disproportionnée d e s populations marginalisées et de donner lieu à de la discrimination contre les personnes infectées et affectées, il demeure différent d ' a u t r e s m a l a d i e s . E n particulier, les n o u v e a u x traitements constituent un progrès énorme, m a i s ils ne sont p a s une solution à tous les problèmes auxquels font f a c e les personnes qui vivent a v e c le V I H ou le sida — des problèmes découlant des problèmes sous-jacents q u e sont la pauvreté et la discrimination, qui sont à la f o i s un résultat et une cause d e l'infection à V I H . Par conséquent, bien que la détection p r é c o c e de l'infection à V I H soit effectivement devenue u n e priorité pressante, la tendance à f a i r e du test du V I H un test systématique ou un test requis doit être abordée a v e c une g r a n d e prudence. C e serait une g r a v e erreur que de négliger l'importance du respect des droits des personnes et le risque de discrimination, et il serait imprudent d'adopter de manière expéditive des mesures d e coercition tandis que les traitements ne sont p a s a c c e s s i b l e s pour plusieurs des personnes vivant a v e c le VIH, q u e leurs bénéfices à long terme sont encore à voir, et que l ' e f f i c a c i t é des stratégies coercitives est pour le moins douteuse. Tel que l ' a déclaré B a y e r [s]i la fin de l'approche exceptionnelle à l'égard du VIH signifiait que l'on retournerait aux pratiques du passé, ceci serait la perte d'une importante occasion de revigorer la tradition de santé publique afin qu'elle soit adaptée pour faire face non seulement aux défis inévitables que pose la menace continuelle du sida, mais aussi aux menaces pour la santé communautaire qui se manifesteront inévitablement dans le f u t u r . 7 0 0 L e s politiques en matière d e test continueront d ' e x i g e r une constante réévaluation, à m e s u r e q u ' é v o l u e r o n t les traitements et la technologie, m a i s la prise en considération soignée des risques et des bénéfices, appuyée par des recherches scientifiques fondées, pour assurer l'équilibre entre les droits de la personne d'un individu et le besoin social d e protéger la santé publique, doit demeurer la b a s e de toute approche juridique ou éthique face à la menace du V I H 700 Bayer, supra, note 665, à la p. 1504. Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 1. Consentement 1.1 E n dépit des récents développements, les arguments en f a v e u r d'un consentement spécifique et éclairé conservent toute leur pertinence. R è g l e générale, au Canada, l e test d e s é r o d i a g n o s t i c du V I H n e devrait être p r a t i q u é qu'en p r é s e n c e d'un consentement spécifique et éclairé par la personne qui l e subit. 1.2 L e s h ô p i t a u x d e v r a i e n t être i n c i t é s à a d o p t e r , r e l a t i v e m e n t au test d e s é r o d i a g n o s t i c du VIH, d e s politiques qui précisent q u e c e test n e devrait être pratiqué qu'en présence d'un consentement spécifique et éclairé par la personne qui le subit. 1.3 L e s m é d e c i n s devraient o f f r i r l e test d e s é r o d i a g n o s t i c d u V I H d e f a ç o n s y s t é m a t i q u e aux patients dont l'historique montre une possibilité d'infection à V I H , m a i s s'abstenir d'administrer le test sans le c o n s e n t e m e n t s p é c i f i q u e et éclairé, p o u r d e u x m o t i f s : les p r é j u d i c e s p o s s i b l e s du test et le r e s p e c t d e l'autonomie des patients. 1.4 L a règle générale, au Canada, selon laquelle le test de sérodiagnostic du V I H ne devrait être pratiqué qu'en présence du consentement s p é c i f i q u e et éclairé de la personne qui le subit, ne s'applique pas dans le c a s du test de donneurs d e sang, organes, s p e r m e et produits corporels similaires. D a n s t o u s c e s c a s d e dons, les donneurs éventuels devraient être informés, avant q u e ne soit pratiqué le test, du fait qu'on p r o c é d e r a à un test relatif au V I H , et recevoir d e s r e n s e i g n e m e n t s appropriés sur s a nature et son but. 1.5 L a règle générale, au Canada, selon laquelle le test d e sérodiagnostic du V I H ne devrait être e f f e c t u é qu'en présence d'un consentement s p é c i f i q u e et éclairé de la personne à laquelle on l'administre, ne s'applique p a s aux tests e f f e c t u é s ' d a n s le c a d r e d'un p r o g r a m m e d e d é p i s t a g e a n o n y m e (non relié) du V I H à des f i n s é p i d é m i o l o g i q u e s ou de recherche, pourvu q u e soient r e s p e c t é e s l e s L i g n e s directrices sur les considérations éthiques et juridiques en matière de recherche anonyme et non reliée sur la séroprévalence du VIH. On doit toutefois accroître les efforts afin de réduire l e potentiel de discrimination à l'égard de populations ou de groupés observés par cette recherche. E n particulier, avant d'entreprendre un p r o g r a m m e de d é p i s t a g e a n o n y m e (non relié) du V I H dans une population donnée, les chercheurs et des m e m b r e s et représentants de la communauté devraient déployer tous les m o y e n s nécessaires afin q u e les membres d e la c o m m u n a u t é comprennent les avantages et les inconvénients rattachés à c e type d'étude, soient impliqués dans le processus de recherche et son issue, afin q u e les résultats puissent être appliqués d e manière utile aux p r o g r a m m e s et politiques en matière de VIH/sida. Annexe-5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 2. Accès au test de sérodiagnostic du VIH 2.1 L a disponibilité d e n o u v e a u x traitements d e l'infection à V I H met en reliëf l'importance d'offrir à tous les Canadiens un a c c è s f a c i l e au test d e sérodiagnostic du V I H . L e s obstacles au test, particulièrement pour les f e m m e s , doivent être éliminés. 2.2 D e s centres d e test anonyme d e sérodiagnostic du V I H devraient être a c c e s s i b l e s dans divers endroits de chaque province et territoire. 3. Counselling 3.1 B i e n que la disponibilité de nouveaux traitements d e l'infection à V I H s o u l i g n e l'importance d'éliminer les obstacles dans l ' a c c è s au test de sérodiagnostic du VIH, le c o u n s e l l i n g pré-test et le counselling post-test rie devraient p a s être considérés c o m m e des obstacles au test. Ils contribuent plutôt à m a x i m i s e r l e s avantages du test pour les personnes qui le subissent et pour la société, et à en réduire l e s préjudices potentiels. Par conséquent, en règle générale, le test ne devrait p a s être administré sans un counselling pré- et post-test de qualité et fidèle aux lignes directrices en vigueur sur le counselling. 3.2 L e s lignes directrices sur le counselling devraient être m i s e s à j o u r régulièrement et rendues largement accessibles. 3.3 L e s professionnels d e la santé ont besoin d'éducation sur l'importance d ' o f f r i r du c o u n s e l l i n g et s u r les a p p r o c h e s a d é q u a t e s , p a r l e b i a i s d ' u n e a p p r o c h e d'éducation des éducateurs. 4. Trousses de test à domicile 4.1 L e s trousses d e test à domicile sont des instruments comportant d e s a v a n t a g e s potentiels pour les individus, des bénéfices non démontrés pour la société et des intérêts commerciaux énormes. L e u r introduction implique un certain nombre d e risques qui doivent être m i e u x é v a l u é s avant q u ' e l l e s ne soient répandues au Canada. L e s décisions relatives à leur commercialisation ne devraient p a s reposer sur l'existence de la technologie, m a i s plutôt sur des données scientifiques fiables et sur la consultation des consommateurs, y compris des personnes vivant a v e c le VIH/sida. 4.2 L a vente au C a n a d a ne devrait être autorisée qu'aux trousses de test à domicile qui satisfont à un ensemble de critères établis pour réduire leurs e f f e t s préjudiciables possibles. N o t a m m e n t , les fabricants devraient être c a p a b l e s de f a i r e la preuve Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail qu'elles satisfont à la norme technique établie par les tests a p p r o u v é s j u s q u ' i c i et que le counselling téléphonique est a d é q u a t D e plus, on devrait considérer sérieusement l'adoption d e m e s u r e s qui réduiraient les risques de préjudices liés à la disponibilité d e c e s t r o u s s e s ; notamment ( 1 ) s ' a t t a q u e r aux p o s s i b i l i t é s d'utilisation a b u s i v e , en réitérant la n é c e s s i t é du consentement éclairé et s p é c i f i q u e au test du VTH, en o f f r a n t du soutien a u x v i c t i m e s d ' a b u s et en prévoyant des peines sévères et des m é c a n i s m e s accélérés de plainte dans ces cas; (2) le renouvellement d e l ' e n g a g e m e n t à offrir le test et le c o u n s e l l i n g s a n s f r a i s dans d i v e r s centres de test subventionnés par l ' É t a t , la publicité de c e s services et, autant que possible, la réduction des délais d a n s c e s cliniques; et (3) le renouvellement de l ' e n g a g e m e n t aux e f f o r t s d e prévention qui fonctionnent, c o m m e le counselling, l'éducation, l ' a c c è s g é n é r a l i s é à des m o y e n s préventifs c o m m e des condoms, des seringues stériles et, d e manière générale, les efforts communautaires de lutte contre la propagation ultérieure du VTH. 4.3 On devrait considérer sérieusement la possibilité d ' o f f r i r l e s trousses d e test à domicile d'abord sur une b a s e limitée d ' e s s a i , en exigeant q u e d e s études sur cette m i s e en marché soient l'un des préalables d e l'approbation. 5. Test des femmes enceintes D a n s toutes les provinces et tous les territoires canadiens, on devrait o f f r i r à toutes les f e m m e s enceintes — et non seulement à celles qui sont considérées c o m m e vulnérables au V l H — la possibilité d e subir un test d e sérodiagnostic du V I H durant la g r o s s e s s e et d e recevoir du counselling sur l e s a v a n t a g e s et les inconvénients de c e test. Par opposition, les mesures coercitives c o m m e le test d e routine ou le test requis des f e m m e s enceintes impliquent u n e enfreinte i n d u e des droits d e s f e m m e s enceintes à l'autonomie et n e peuvent p a s être justifiées c o m m e une question de nécessité légale ou médicale. 6. Test des nouveautés A u C a n a d a à l'heure actuelle, le test systématique ou obligatoire des nouveau-nés n ' e s t p a s justifié. Plutôt, on devrait offrir le test volontaire à toutes les f e m m e s e n c e i n t e s et, l o r s q u ' u n e f e m m e est s é r o p o s i t i v e , l ' e n c o u r a g e r à s u i v r e un traitement qui sera bénéfique pour elle et pour réduire le risque d e transmission verticale du V I H (voir conclusion 5). Annexe-5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 7. Test des détenus Il n ' e x i s t e p a s d e justification d e santé publique ou d e sécurité pour l'imposition du test requis ou obligatoire aux détenus. Plutôt, il est nécessaire que les systèmes correctionnels rendent le test a n o n y m e disponible pour les détenus, et rendent plus a c c e s s i b l e s et acceptables pour eux le test,qui est offert par le personnel des s e r v i c e s de santé, p a r l ' o f f r e du test non nominatif, la formation du personnel médical de prison en matière de counselling pré- et post-test, l'amélioration de la protection d e la confidentialité d e s r e n s e i g n e m e n t s m é d i c a u x , et par des dispositions assurant que les détenus séropositifs ne subiront p a s de discrimination indue et auront a c c è s aux soins, au soutien et aux traitements qui sont offerts à l'extérieur. 8. Test des personnes accusées/coupables d'agression sexuelle L e test obligatoire des personnes a c c u s é e s ou reconnues c o u p a b l e s d ' a g r e s s i o n sexuelle ne comporte que peu d ' a v a n t a g e s pour les personnes agressées. D e s lois visant à autoriser ce type de test n'auraient p a s grand utilité pour les victimes et détourneraient l'attention des problèmes réels ei sous-jacents. C e qui est requis est plutôt une réaction gouvernementale qui réponde aux inquiétudes très réelles des victimes d'agression sexuelle et leur o f f r e de l'aide. Par conséquent, Santé Canada, le ministère d e la Justice, Condition f é m i n i n e C a n a d a et leurs h o m o l o g u e s p r o v i n c i a u x devraient élaborer, en consultation a v e c des o r g a n i s a t i o n s non gouvernementales, un modèle de pratiques en matière de counselling, d e soins à court et à long terme, de traitements et d'autres services qui devraient être mis à la disposition des victimes d'agression sexuelle. Ceci devrait inclure: • l ' a c c è s au test d e sérodiagnostic du V I H et au counselling pour toutes les personnes a g r e s s é e s sexuellement, par du personnel qualifié des centres pourvictimes d'agression sexuelle ou d'établissements similaires; • u n e réflexion sur la question d e savoir si le test de réaction en chaîne à la polymérase devrait être offert aux victimes d'agression sexuelle; • l ' a c c è s à la prophylaxie post-exposition pour les victimes d'agression sexuelle, assorti de counselling au sujet de s e s effets; • la sensibilité nécessaire à l ' é g a r d de la diversité culturelle et sociale dans la prestation des services de counselling, de test et d e soutien; • l ' a i d e dans la formation relative au VIH/sida, à l'intention du personnel des centres pour victimes d'agression sexuelle et des autres professionnels qui sont contact avec ces personnes. Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 9. Test des travailleurs du sexe L e test requis ou obligatoire des travailleurs du sexe, d e m ê m e q u e d'autres mesures c o e r c i t i v e s à leur endroit, n ' a u r o n t q u e p e u d ' e f f e t p r é v e n t i f quant à la propagation d u V I H parmi eux et leurs clients. Plutôt q u e d e recourir à d e telles mesures, les élaborateurs d e politiques devraient consulter des travailleurs du s e x e afin d ' e n élaborer qui préviendront et réduiront réellement la propagation du VIH. 10. Test des travailleurs de la santé L e test r e q u i s des travailleurs d e la santé n ' e s t p a s j u s t i f i é . Plutôt, c e u x qui pratiquent d e s interventions effractives devraient surveiller régulièrement leur état s é r o l o g i q u e au V I H . S ' i l s sont séropositifs, ils devraient chercher conseil pour choisir s ' i l s devraient limiter leur pratique professionnelle afin de protéger leurs patients. D é s restrictions aux pratiques pourraient être j u s t i f i a b l e s pour certaines interventions e f f r a c t i v e s à risque é l e v é d ' e x p o s i t i o n à la t r a n s m i s s i o n (qui devraient être clairement définies). Il est en m ê m e t e m p s important d e s ' a s s u r e r q u e les travailleurs de la santé séropositifs n e soient p a s l'objet d e discrimination injustifiée et q u e leur état sérologique ne soit p a s indûment divulgué. 11. Test des immigrants Pour plusieurs raisons, le C a n a d a ne devrait p a s mettre en oeuvre une politique de test requis d e t o u s les candidats à l'immigration. D e plus, le s y s t è m e actuel, en vertu duquel les candidats à l'immigration trouvés séropositifs sont déclarés «nona d m i s s i b l e s p o u r des raisons m é d i c a l e s » , devrait être m o d i f i é pour ne p a s rejeter a u t o m a t i q u e m e n t les d e m a n d e s d ' i m m i g r a t i o n d e s p e r s o n n e s v i v a n t a v e c l e V I H / s i d a ou d e s conditions semblables. U n nouveau s y s t è m e devrait prendre en considération les circonstances individuelles de chaque cas, comparer les coûts et les b é n é f i c e s relatifs à l'autorisation d'une personne à immigrer, et tenir c o m p t e deconsidérations humanitaires. 12. Déclaration de cas L a déclaration des c a s de V I H et la déclaration des c a s d e sida devraient toujours être non nominatives: la déclaration nominative n'est souhaitable ni à d e s fins de surveillance épidémiologique, ni pour procéder à la notification des partenaires. L e s p r o v i n c e s et l e s territoires qui requièrent a c t u e l l e m e n t l a déclaration n o m i n a t i v e d e v r a i t a m e n d e r leurs lois et r è g l e m e n t s d e s a n t é p u b l i q u e en conséquence: Annexe-5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail 13. Notification des partenaires D e s p r o g r a m m e s limités de notification des partenaires, f o n d é s sur les soignants, peuvent contribuer à faire avancer un objectif vital de santé publique, pourvu q u ' i l s s'adressent en particulier aux personnes qui pourraient autrement ne p a s se douter q u ' e l l e s ont peut-être été e x p o s é e s au VIH. A f i n d'inciter les médecins à effectuer la notification des partenaires à la demande de leurs patients, des barèmes d ' h o n o r a i r e s devraient a s s u r e r u n e rémunération a d é q u a t e d e s e f f o r t s d e notification des partenaires. L e s autorités de santé publique devraient entreprendre des m e s u r e s d e notification des partenaires seulement l o r s q u ' u n patient préfère qu'elle soit effectuée par elles ou lorsqu'un médecin ne veut p a s ou n e peut pas le faire lui-même. Cependant, la santé publique ne devrait pas requérir q u e le médecin leur déclare le nom ou des renseignements sur l'identité du patient indexé. L a déclaration non nominative devrait être suffisante. E n outre, les responsables de la santé p u b l i q u e doivent s ' a s s u r e r q u e les r e n s e i g n e m e n t s p e r s o n n e l s sur les partenaires à notifier sont é l i m i n é s d e s d o s s i e r s de santé p u b l i q u e d è s la notification effectuée. E n général, on devrait s'abstenir d'exagérer l'importance des efforts de notification des partenaires. Pour les populations les plus vulnérables à contracter le VIH, l ' é d u c a t i o n c i b l é e et le soutien par le b i a i s d e p r o g r a m m e s c o m m u n a u t a i r e s d e m e u r e n t e s s e n t i e l s . D serait d a n g e r e u x d ' a u g m e n t e r l e f i n a n c e m e n t des p r o g r a m m e s de notification des partenaires sans au m o i n s maintenir le niveau actuel du financement des programmes d'éducation et de soutien. 14. Communication L a communication d e renseignements personnels relatifs au V I H ou au sida à des p e r s o n n e s qui prétendent a v o i r un b e s o i n ou un droit d e c o n n a î t r e l'état s é r o l o g i q u e de personnes séropositives est rarement justifiable. D a n s la plupart des situations, cette communication est non nécessaire et s o n e f f i c a c i t é serait douteuse. D e plus, la communication a souvent des e f f e t s qui vont à l'encontre de ses buts, ou des effets négatifs plus importants que les avantages qui pourraient en résulter. L e s mesures qui peuvent être adoptées pour prévenir l'exposition au V I H et l'infection doivent être adoptées indifféremment du fait q u e l ' o n connaisse ou non l'état sérologique de la personne concernée. Il est essentiel q u e l ' o n éduque les g e n s sur les précautions qui peuvent prévenir la transmission du V I H et qu'on leur rende disponibles les moyens nécessaire pour c e faire. Seulement dans d e rares c a s d ' e x c e p t i o n la divulgation peut-elle être j u s t i f i é e , l o r s q u e l ' é v a l u a t i o n d'un individu montre q u ' u n e communication est nécessaire, q u ' e l l e sera probablement e f f i c a c e et constitue le moyen le moins envahissant et le m o i n s contraignant qui soit disponible pour prévenir des méfaits qu'on ne pourrait éviter autrement/ Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail D a n s toutes les autres situations où se présentent des demandes de c o m m u n i c a t i o n , d ' a u t r e s m o y e n s sont d é j à d i s p o n i b l e s , qui seraient m o i n s nuisibles q u e la divulgation, et qui sont possiblement n é c e s s a i r e s et susceptibles d'être plus efficaces. Discrimination À c a u s e d e s limites de la confidentialité et des difficultés d e la protéger dans la pratique, il est n é c e s s a i r e d ' a u g m e n t e r l e s e f f o r t s p o u r p r o t é g e r contre la discrimination l e s p e r s o n n e s vivant a v e c l e V I H / s i d a et l e s c e l l e s autrement affectées. Ceci devrait comprendre le financement de recherche sur l'ampleur et les conséquences d e la discrimination à l'endroit des personnes atteintes et celles qui sont autrement a f f e c t é e s , l'éducation du public, le resserrement des l o i s et d e s politiques antidiscrimination et la m i s e en oeuvre de m é c a n i s m e s e f f i c a c e s d e réparation des dommages. Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail BIBLIOGRAPHIE Doctrine Ammann A. Unrestricted Routine Prenatal HIV Testing: The Standard o f Care. 1995; 50(3&4): 83-84. of the American Medical Women's Association Journal Barbacci, M B , et coll. 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Wojick v Aluminium Company of America, 18 Mise 2d 740, 183 N Y S 2d 351 (Sup Ct 1959). Annexe-5-Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail ANNEXE Projet conjoint du Réseau juridique canadien VIH/sida et de la Société canadienne du sida sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail ANNEXE Projet conjoint du Réseau juridique canadien VIH/sida et de la Société canadienne du sida sur les questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida À c h a q u e j o u r , l e s personnes vivant a v e c le V I H / s i d a et les o r g a n i s m e s communautaires font f a c e à des questions c o m p l e x e s d'ordre juridique et éthique s o u l e v é e s par l'épidémie. L ' o n s'entend généralement pour dire qu'il faut des ressources informatives plus détaillées sur l e s p r i n c i p a l e s questions, p o u r p o u v o i r répondre adéquatement aux b e s o i n s d e s personnes vivant a v e c le V I H / s i d a et des organismes communautaires qui les soutiennent. F a c e à c e s besoins, le R é s e a u juridique canadien VIH/sida et la Société canadienne du sida mènent un projet conjoint afin d e produire un e n s e m b l e documentaire détaillé sur les questions fondamentales d'ordre j u r i î q u e et éthique soulevées par le VIH/sida au Canada. L e P r o j e t c o n j o i n t S C S / R é s e a u s'est a m o r c é en j a n v i e r 1 9 9 5 p a r u n e p h a s e d e développement d e 5 mois, puis a amorcé sa deuxième phase en j u i n 1995. Phase I A u c o u r s de la p h a s e I j a n v i e r à mai 1995), les activités et initiatives suivantes ont été entreprises: • L e s r e s s o u r c e s existantes qui portent sur les questions d'ordre j u r i d i q u e et éthique soulevées par le VIH/sida ont été recherchées puis documentées. E l l e ont été évaluées et incluses dans une enquête bibliographique et u n e bibliographie. 1 • L e s principales questions d'ordre juridique et éthique s o u l e v é e s par le V I H / s i d a au C a n a d a ont été é v a l u é e s et c l a s s é e s par o r d r e d e priorité. A p r è s u n e étroite consultation a v e c p l u s d e 6 0 p e r s o n n e s v i v a n t a v e c l e V I H / s i d a , représentants d ' o r g a n i s m e s c o m m u n a u t a i r e s , avocats, universitaires et a n a l y s t e s de la politique gouvernementale qui oeuvrent dans l e d o m a i n e du VIH/sida, on a établi une liste d e huit s u j e t s qui c o m p r e n n e n t l e s q u e s t i o n s d'ordre j u r i d i q u e et éthique j u g é e s prioritaires dans l'immédiat par les personnes et les organismes consultés: 1 R. Jûigens, Questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida: Enquête bibliographique et bibliographie annotée, Montréal, Société canadienne du sida et Réseau juridique canadien VIH/sida, 1995. On peut s'en procurer copie gratuitement auprès du coordonnâtes, jusqu'à l'épuisement des stocks. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Annexe - 2 - (1) questions d'ordre juridique soulevées par le V I H / s i d a en prison; (2) droit criminel et VIH/sida; (3) questions juridiques concernant les g a i s et lesbiennes; (4) test de sérodiagnostic et confidentialité; (5) discrimination; (6) accès aux soins et aux traitements; (7) I d s et politiques en matière de drogue; (8) lois et politiques en matière de prostitution. • U n plan détaillé a été élaboré pour la réalisation d e ressources sur ces questions. • D e s personnes clés ont été repérées (personnes vivant a v e c le VIH/sida, représentants d'organisations communautaires, avocats, universitaires et analystes de la politique g o u v e r n e m e n t a l e ) qui oeuvrent dans le d o m a i n e du V I H / s i d a et qui pourraient participer à l'élaboration de ressources documentaires. • L e c o o r d o n n â t e s d u projet est entré en rapport a v e c d i v e r s e s o r g a n i s a t i o n s g o u v e r n e m e n t a l e s et n o n g o u v e r n e m e n t a l e s , i n s t i t u t i o n s et a s s o c i a t i o n s professionnelles, pour acquérir davantage d'appui au projet. Phase II C o m m e suite à l'initiative de développement, du financement a été obtenu d e l'Unité des soins, traitements et soutien pour le sida, de Santé Canada, d e s P r o g r a m m e s d ' a c t i o n communautaire et de prévention du VIH/sida, de Santé Canada, du Service correctionnel du C a n a d a et de Justice Canada, pour amorcer la Phase II du P r o j e t L e s objectifs de cette phase sont de: • stimuler u n e discussion aux niveaux local, provincial et national, sur les questions juridiques et éthiques soulevées par le VIH/sida; • publier un document de travail sur chacune des huit questions identifiées c o m m e . prioritaires, au cours de la phase I; • tenir à travers le pays une série d'ateliers sur ces questions prioritaires; et Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail • produire un ensemble compréhensif d e documents de ressource sur c e s questions, afin d e g u i d e r l e C a n a d a dans son effort pour prévenir la p r o p a g a t i o n du V I H et m i e u x prendre soin d e s personnes infectées ou autrement affectées. E n date d e m a r s 1997, le travail du Projet était en cours sur les questions d'ordre juridique s o u l e v é e s par le V I H / s i d a en prison; le droit criminel et l e V I H / s i d a ; les q u e s t i o n s j u r i d i q u e s touchant l e s g a i s et les lesbiennes; et l e test de s é r o d i a g n o s t i c du V I H et la confidentialité. Il avait permis d e tenir des ateliers sur l e droit criminel et le V I H / s i d a et sur l e s questions j u r i d i q u e s touchant les g a i s et les lesbiennes; et il avait donné lieu à la production d e s ressources suivantes: 2 • VIH/sida et prisons: un document de travail • Droit criminel et VIH/sida: un document de travail • Projet de loi C-8 — L 'impact des lois canadiennes propagation du VIH (avril 1996) • VIH/sida et prisons: rapport final • Bulletin canadien VIH/sida et droit • Nouvelles du Projet conjoint (no (novembre 1995) (avril 1996) en matière de drogue sur la (septembre 1996) '(vol. 1, n o s 1 à 4 ; vol. 2, n o s 1 à 4 ; vol. 3, no 1) 1, juillet 1995; no 2, octobre 1995; no 3, mai 1996) L a plupart de c e s r e s s o u r c e s et d ' a u t r e s renseignements sur l e Projet conjoint sont disponibles notamment sur l'Internet à l'adresse <http://www.odyssee.net/-jujube> . 2 Voir aussi "Nouvelles du Projet", nos 1 et 2 Oeillet et octobre 1995), R. Jttrgens, Questions d'ordre juridique et éthique soulevées par le VIH/sida: rapport de projet (1 juin - 15 octobre 1995), Montréal, Société canadienne du sida et Réseau juridique canadien VIH/sida, 1995. Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail Annexe - 2 - Partenaires de cette initiative Le Réseau juridique canadien VIH/sida L e R é s e a u j u r i d i q u e c a n a d i e n V I H / s i d a est l e seul o r g a n i s m e c o m m u n a u t a i r e d e bienfaisance à oeuvrer au C a n a d a sur les questions de politiques et de droit que soulève le VIH/sida. F o n d é en 1992, il s e donnait pour mandats l'amélioration des connaissances et d e l'éducation sur les aspects juridiques, éthique et de politiques liés à l'épidémie, ainsi q u e la promotion de réactions au VIH/sida qui respectent les droits de la personne. L e s services du R é s e a u s'adressent aux personnes vivant a v e c le VIH/sida, aux personnes autrement a f f e c t é e s et à celles qui travaillent dans c e domaine. H facilite l'accès à une i n f o r m a t i o n j u r i d i q u e p r é c i s e et à j o u r . H relie les g e n s dont l e travail et/ou les préoccupations personnelles touchent les questions s o c i a l e s et l é g a l e s pertinentes au VIH/sida, afin d e limiter la propagation de l'infection à V I H et de réduire son impact sur les gens qu'elle affecte. E n octobre 1994, le R é s e a u amorçait la publication du Bulletin canadien VIH/sida et droit, un trimestriel consacré aux questions d'ordre juridique, éthique et politique. Il a pour objet d'éduquer et d'informer l e s élaborateurs de politiques, l e s a v o c a t s et toute p e r s o n n e i m p l i q u é e dans les développements d'ordre j u r i d i q u e et d e s politiques, m a i s a u s s i de stimuler sur c e s questions un débat fort nécessaire. La Société canadienne du sida L a S o c i é t é c a n a d i e n n e d u s i d a est u n e coalition n a t i o n a l e qui a p p u i e l ' a c t i o n communautaire dans le domaine du VIH/sida au Canada. L a Société représente plus d e 100 o r g a n i s m e s communautaires canadiens qui prodiguent d e s p r o g r a m m e s d'éducation, de soutien et d'intervention aux personnes et aux communautés touchées par le VIH/sida. L a S o c i é t é est le porte-parole et la tribune nationale de la lutte communautaire contre l'infection à V I H et le sida. E l l e défend les droits des personnes vivant a v e c le VIH/sida, agit à titre de ressource dans le d o m a i n e du VIH/sida a u p r è s des o r g a n i s m e s a f f i l i é s et c o o r d o n n e l a participation c o m m u n a u t a i r e à u n e stratégie nationale d e lutte contre l'épidémie. L a Société s'acquitte de son rôle au moyen d'activités d'envergure nationale sur les plans de l'éducation, des traitements, des soins et du soutien. Annexe - 5 - Test de sérodiagnostic du VIH et confidentialité: un document de travail i I 12,592 E-1832 ex.2 Jurgens, R. et ai. Test de sérodiagnostic du VIH et "confidentialité" : un document de DATE NOM I 12,592 ex.2