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essentiel 14 / 21 décembre 2012 Licence pro "Management des entreprises agrico le retour sur leur voyage d’étude à Bruxelles et aux Pa Les décisions européennes ont des incidences sur les exploitations. En tant qu’agriculteur, il faut comprendre, s’accaparer les futures décisions et saisir comment celles-ci sont prises. ll faut pouvoir faire évoluer sa stratégie d’exploitation afin de "ne pas subir mais agir". C’est dans cette optique qu’un voyage dit prospectif a été organisé pour les étudiants de la licence pro portée par les chambres d’agriculture et l’Université de Bretagne Sud. Conseil européen, Commission européenne, Parlement européen : toutes ces institutions n’ont plus de secret pour la vingtaine d’étudiants de la L’agriculture néerlandaise en chiffres - 65 000 exploitations : 44 000 en élevage et 10 000 en horticulture - 19 000 élevages bovins avec en moyenne 76 vaches/élevage (contre 44 en France) et 616 000 kg produit (293 000 en France) - 100 000 ha de production horticole de plein-champ + 10 000 ha sous-serre licence pro "Management des entreprises agricoles". La promotion 20112012 a tout d’abord été reçue dans les locaux de la Commission européenne pour comprendre son rôle et son implication, notamment dans la Politique agricole commune. La visite s’est poursuivie à l’Espace inter-régional Bretagne – Pays de la Loire – Poitou Charente, qui a pour mission de représenter et de promouvoir les intérêts de ces trois Régions auprès des instances communautaires à Bruxelles. "J’ai été stupéfait par les infrastructures de l’Europe ; cela m’a renforcé dans mon idée d’une Europe forte. On a l’impression d’avoir du poids", souligne Guillaume Trouillard, l’un des étudiants, futur chef d’exploitation céréalière. Les étudiants ont ensuite été reçus par Agnès Le Brun, eurodéputée, et maire de Morlaix, membre de la Commission Agriculture et Développement rural Rencontre avec des agriculteurs belges et néerlandais Comment s’impliquent les agriculteurs au niveau de chaque pays ? Comment gèrent-ils leurs exploitations (emplois, gestion des productions, marchés, installation, transmission…) ? C’était tout l’intérêt des visites d’exploitation belges et néerlandaises de ce voyage d’étude. Les étudiants ont retenu deux témoignages. ● Marie-Ghislaine et Marc Decoster - Jodoigne, Belgique 1,5 million de litres de lait, 200 vaches, 200 ha "Je ne suis pas que la femme d’un agriculteur, je suis une agricultrice à part entière", martèle Marie-Ghislaine, dès le début de la visite. Mais pour obtenir ce statut, "elle a du créer sa propre exploitation avec un troupeau bien distinct", rapporte Chantal, l’une des étudiantes, installée depuis plusieurs années dans les DeuxSèvres. "Elle a dû travailler sur son exploitation, côte à côte avec celle de son mari qui était associé avec leur fils". C’est pourquoi aujourd’hui, Marie-Ghislaine, présidente du Brabant wallon à l'UAW (Union des agricultrices wallonnes) milite farouchement pour la reconnaissance des femmes en agriculture : "les femmes qui travaillent sur l’exploitation de leur mari n’ont pas de véritable statut, pas de droits". ● Michaël et Marian Spreuwel-Borsten - Région d’Eindhoven, Pays-Bas. 600 chèvres bio, 16 ha "Créer une exploitation à taille humaine : voilà l’objectif que l’on s’était fixé avec ma femme", explique Mickaël en introduction. "A nous deux, on arrive à assurer tous les travaux : je trais nos 600 chèvres en 1h30 avec notre salle de traite 2 x 48 places et pendant ce temps, ma femme s’occupe de l’alimentation". Alan, un des étudiants et futur éleveur laitier s’étonne : "dans la mesure où vous ne pouvez pas vous produire plus, pourquoi ne pas développer la transformation du lait en fromage ?". Et Marian de répondre : "nous y avons pensé, mais les process sont compliqués à maîtriser et cela nous obligerait à embaucher un salarié ; or nous ne voulons pas d’un salarié, c’est trop difficile à trouver et à gérer aux Pays-Bas". / 21 décembre 2012 15 essentiel co les" : ux Pays-Bas Le groupe était constitué d’une vingtaine de personnes de la licence pro "Management des entreprises agricoles" option Agrimanager, de l’Université de Bretagne Sud. Comprendre les institutions européennes, était l’un des objectifs du voyage. Ici les étudiants à la Commission européenne. du Parlement européen. Cette rencontre a été l’occasion d’échanger sur le travail d’un député et sur l’actualité de la Commission : "ce qui se discute aujourd’hui, ce sont notamment les modalités de mise en place du verdissement de la PAC ; nous demandons par exemple d’abaisser le pourcentage minimum des infrastructures agro-écologiques de 7 % à 3,5 % et que certaines cultures puissent être comptabilisées pour l’atteinte des objectifs", explique Agnès Le Brun, très impliquée dans ce dossier et consciente des réalités de mise en œuvre sur le terrain. Pour Aurélien Le Brun, installé en production laitière depuis 1996 à Theix (56), et inscrit en licence, cette rencontre "était vraiment enrichissante, notamment pour faire le lien entre le local et les décisions européennes". Une agriculture néerlandaise intensive tournée vers l’exportation L’agriculture est un secteur stratégique de l’économie néerlandaise avec une production primaire spécialisée : les 9/10 de la production sont réalisés dans les secteurs de l’élevage et de l’horticulture. Elle est aussi très intensive : "7 % de la production agricole européenne y est produite sur seulement 1,2 % de la SAU communautaire", rap- Les étudiants ont dit : Clémentine : "c’était un voyage très intéressant ; on comprend mieux la PAC et on a rencontré des agriculteurs avec des visions intéressantes de l’agriculture de demain". Mathilde : "ce que j’ai retenu, c’est que maintenant, pour les néerlandais, il vaut mieux savoir vendre que produire plus". Benjamin : "quand on comprend le fonctionnement de toutes les instances européennes et des puissants lobbyings qui gravitent autour, on comprend mieux pourquoi les décisions se prennent si lentement". Romain : "on ne peut pas être compétitifs, nous les français, si on n’a pas les mêmes normes environnementales". Alan : "comment peut-on parler d’agriculture durable quand on élève 600 chèvres bio sur 16 ha et que 90% de l’alimentation provient d’une exploitation située à 60 km ?". porte Diewe De La Parra, l’attaché sectoriel à l’Agriculture et Environnement de l’Ambassade de France à La Haye qui a reçu les étudiants. Une autre caractéristique de l’agriculture néerlandaise est d’être tournée vers l’exportation : les 3/4 de la production sont exportés. "Les agriculteurs néerlandais donnent l’impression d’être des entrepreneurs et ont une vision plus libérale des marchés que les agriculteurs français", commente Mathilde. Ce que confirme Diewe De La Parra "les agriculteurs ont une approche libérale de la PAC ; ils s’opposent aux paiements directs comme soutien de base aux revenus et veulent une baisse du budget de la PAC". Atouts et contraintes de ces pays Les "recettes" du secteur agricole néerlandais reposent sur : - l’innovation : variétale, clusters (groupe de serristes coopérant pour une meilleure gestion de l’énergie, de la logistique, de la commercialisation…), recherche sur des serres autonomes en énergie, - l’ a d a p t a t i o n e t l’ o p t i m i s a t i o n constantes d’exploitations orientées vers le marché, - la différenciation de l’offre, - la rapidité et la flexibilité du soutien logistique et des transports. "Mais comment peuvent-ils s’en sortir financièrement ?", s’interroge cependant Louis-Vincent, un des futurs porchers de la Licence. En effet, le gros handicap de l’agriculture en Belgique et aux Pays-Bas est le problème de la transmission des exploitations et de l’accession au foncier : le prix des terres y atteint des montants de l’ordre de 50 000 à 70 000 €/ha. Claire Ramezi