Quotidiens en ligne

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Quotidiens en ligne
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Stratégies éditoriales web de la presse quotidienne
Bayard Presse, Antoine Peillon, 4 octobre 2007
« Les œuvres seront de plus en plus amenées à voyager d’un média à l’autre » - 26/06/2007
La ministre de la Culture et de la Communication, Mme Christine Albanel, a clôturé, lundi 25
juin, la journée de la création TV. Elle a notamment plaidé pour une optimisation de la circulation des
œuvres. « Dans le nouvel ordre numérique, les œuvres seront de plus en plus amenées à voyager
d’un média à l’autre, d’un mode d’exploitation à l’autre (comme la vidéo à la demande) », a-t-elle
indiqué. « Cela se fera de façon volontaire, et maîtrisée, si nous parvenons à fluidifier leur circulation,
ou bien de façon anarchique, si nous laissons le piratage se développer ».
(Site internet de la DDM, ministère de la Culture et de la Communication : http://www.ddm.gouv.fr/)
« Ainsi, la possibilité offerte par internet d’accéder à des milliards d’informations crée un
espace dans lequel profusion rime trop souvent avec confusion. La presse, avec son label, l’identité
cultivée par chaque titre, n’est-elle pas la mieux placée pour donner un peu de sens, (…) et,
surtout, assurer une fiabilité des informations qui n’est pas le principal atout des nombreux sites que la
toile met à notre disposition. »
Michel Muller (rapporteur), Garantir le pluralisme et l’indépendance de la presse quotidienne pour assurer son
avenir, Avis et Rapport du Conseil économique et social, Journaux officiels, juillet 2005, page II-88.
« L’espace public ne peut pas se concevoir comme une institution, ni, assurément, comme
une organisation ; lui-même n’est pas une structure normative avec différenciation des compétences
et des rôles, réglementation de l’affiliation de ses membres, etc. Il ne constitue pas non plus un
système ; il admet certaines frontières intérieures, mais, vis-à-vis de l’extérieur, se caractérise par des
horizons ouverts, poreux et mobiles. L’espace public se décrit le mieux comme un réseau
permettant de communiquer des contenus et des prises de position, et donc des opinions ; les
flux de la communication y sont filtrés et synthétisés de façon à se condenser en opinions publiques
regroupées en fonction d’un thème spécifique. Tout comme le monde vécu dans son ensemble,
l’espace public se reproduit lui aussi par le moyen de l’activité communicationnelle, la connaissance
d’une langue maternelle étant suffisante pour y participer ; il lui importe que la pratique de la
communication soit à la portée de tous. »
Jürgen Habermas, Droit et démocratie, Gallimard, 1997, page 387
(les soulignés en ital. sont d’Habermas)
Avertissement : Nous avons choisi d’écrire systématiquement « internet » en minuscules, malgré les usages
typographiques, un tant soit peu idolâtres, qui se sont imposés pour l’instant et qui donnent de la majuscule et/ou
de l’article défini à ce qui n’est, au même titre que le livre, le journal, le télégraphe, la radio, la télévision ou le
téléphone (même portable), qu’un « média ». Jusqu’à preuve du contraire, l’internet n’est pas un nom propre ; ni
celui d’une personne, ni celui d’un pays, ni celui d’une marque, ni même celui d’un nouveau dieu (encore que)...
Ce n’est, à notre connaissance, que la contraction de « international network » (réseau international).
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Sommaire
1 - Cadrage de l’étude ----------------------------------------------------------- p. 3
2 – Contexte ------------------------------------------------------------------------ p. 4
a - Gratuité
b- Publicité
c- Papier / web : la divergence numérique ?
d - Internet / télévision / papier : le règne des écrans
e - web 2.0, internet « participatif », « journalisme citoyen »
f- Convergences numériques
g - Images à vendre
h - Librairies en ligne
i - (sans) Frontières
j - Pour aller (beaucoup) plus loin
3 – Quotidiens en ligne ------------------------------------------------------- p. 26
a - Liste des sites étudiés
b - Grille de lecture
c - Tableau de synthèse joint (tableur)
d - Quelques dispositifs originaux et/ou intéressants -------------------- p. 28
Ergonomie. Semi-gratuité. E-commerce. Editoriaux. Mise à jour. Articles
originaux. Infos pratiques. Audiovisuel. Services numériques.
Interactivité et participation.
4 – Quelques pistes pour La Croix et le groupe Bayard ---------- p. 36
5 – Annexes ---------------------------------------------------------------------- p. 40
« Audiences et stratégies des acteurs en ligne ». Premier
observatoire de la convergence média. Blogging Between the
Lines. D’un blog à l’autre + « participatory journalism ». Procès
Yahoo! (novembre 2000). Glossaire du web. « L’internet
contemporain », par Joël Ronez.
3
1/ Cadrage de l’étude
a - Une lettre de la directrice des ressources humaines, Catherine Becquelin (30 avril
2007), me charge, pour trois mois1, d’une « mission d’étude sur la manière dont les
quotidiens régionaux et nationaux, éventuellement internationaux, payants et
gratuits, gèrent éditorialement la complémentarité papier/web ».
b - Un entretien avec le président du directoire, Bruno Frappat (3 mai 2007), permet
de préciser qu’il s’agit bien d’explorer les méthodes rédactionnelles et éditoriales
propres aux sites des quotidiens, sans trop se préoccuper des aspects
économiques, voire des stratégies business.
c – Un entretien avec la directrice de la rédaction de La Croix, Dominique Quinio (15
mai 2007), suggère un centrage pragmatique de l’étude sur les dispositifs
rédactionnels et éditoriaux « intéressants » des sites web des quotidiens, en
comparaison de ceux mis en œuvre par le site de La Croix.
d – Une seconde lettre de la directrice des ressources humaines, Catherine
Becquelin (8 août 2007), me confirme le renouvellement du détachement du service
de la fabrication, jusqu’au 30 septembre 2007, « afin de finaliser l’étude ».
e – Un nouvel entretien avec la directrice de la rédaction de La Croix, Dominique
Quinio (23 août 2007), est l’occasion d’une première présentation du tableau de
synthèse (tableur) de l’observation et de la « lecture » des sites internet
retenus pour l’étude. Lors de la discussion, il apparaît clairement que l’utilité
principale de ce travail consistera dans l’identification des dispositifs
rédactionnels et éditoriaux potentiellement intéressants (et pertinents) pour le
développement éventuel du site internet de notre quotidien.
Les questions de l’exploitation des articles de l’édition papier et de l’originalité
(et de l’exclusivité) des informations publiées sur les sites web, mais aussi de
l’interactivité avec les lecteurs (forum, courriers des lecteurs) et de l’image de
marque de La Croix… ont été plus particulièrement posées.
1
N’ayant pu être, en pratique, détaché de la fabrication des magazines Planète Jeunes et Planète Enfants qu’à la
mi-juin 2007 et ayant pris mes congés d’été en juillet, l’étude a été essentiellement réalisée (sauf observation
quotidienne des principaux sites, en mai et juin) au mois d’août 2007. Voir le point d, ci-dessus.
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2/ Contexte (notes sur quelques lignes de force)
Gratuité
Certes, le Wall Street Journal a vendu ses informations à quelque 811.000 abonnés,
fin 2006, soit à 5,5% de lecteurs en plus qu’en 2005… Mais les généralistes français et
américains ont, presque tous, renoncé à faire payer l’accès à leurs sites. Selon Bruno
Patino2, gourou du Monde interactif, « seule l’information locale et l’information économique
paraissent mériter paiement ». La voie payante a été effectivement choisie par la presse
économique, Les Echos surtout et, plus modérément, par La Tribune et le Financial Times.
De même, la presse hebdomadaire régionale (lors du Congrès du SPHR, à Brest, 31 mai et
1er juin 2007) a compris l’importance d’offrir, sur le web, des informations locales
complémentaires à celles des éditions imprimées, informations locales à forte valeur d’usage
qui sont vendues par L’Est républicain, par exemple.
Mais, misant surtout sur la recette publicitaire, la plupart des autres éditeurs se sont
jetés dans la course à l’audience. (La Tribune, 14 mars 2007)
Cependant, la croissance des audiences semble de plus en plus réservée aux mass
medias les plus importants, « pure players » (entreprises exerçant uniquement leurs
activités sur internet : portails de FAI, moteurs de recherche…) en tête. En ce qui concerne
les sites internet de journaux, une étude du Joan Shorenstein Center on the Press, Politics
and Public Policy, de l'université d'Harvard, révèle que le trafic de la majorité des sites de
quotidiens n'a pas bougé depuis un an, voir reculé. « ... The websites of most other
newspapers — whether in large, medium-sized, or small cities — have lost audience and
their sites on average have substantially fewer visitors now than a year ago », affirme l'étude.
Elle contredit ainsi le l'annonce (ici) de la Newspaper Association of America (NAA). Quelque
160 quotidiens ont été étudiés par le Joan Shorenstein Center. La progression annoncée par
la NAA vient, en réalité, des augmentations du trafic des sites du New York Times, du
Washington Post et de USA Today, alors que les sites des quotidiens des petites et
moyennes villes américaines sont en général en recul. L’étude (fichier Word) de
l’université d’Harvard estime que l’audience des sites de la presse à audience nationale aux
USA (ceux des marques connues : New York Times, Washington Post, USA Today et Wall
Street Journal) a augmenté de 10%, entre avril 2006 et avril 2007, pour atteindre près de 9
millions de visiteurs uniques/mois, le Wall Street Journal (accès payant) ayant un trafic
inférieur. Par contre les audiences des sites de presse des journaux locaux des villes
moyennes américaines ont tendance à stagner ou à baisser sur la même période, avec
environ 665.000 visiteurs uniques/mois. Les sites du San Francisco Chronicle et du Seattle
Post-Intelligencer (qui ont en moyenne 2 millions de visiteurs uniques par mois) échappent à
cette tendance.
De son côté, Le Parisien va revenir, pour son site internet, à un modèle gratuit,
abandonnant l’abonnement payant qu’il avait mis en place il y a plus de deux ans. Les 26-27
juin 2007, à l’occasion des « journées » du CFPJ sur les « stratégies éditoriales web/papier
à l’ère numérique », Vincent Régnier, le directeur des rédactions du Parisien, affirmait : « La
2
Jean-François Fogel et Bruno Patino, Une Presse sans Gutenberg, Grasset, 2005 : « Internet a dépouillé le
journalisme de ses privilèges. Diffuser l’information, donner des rendez-vous à une audience, décider ce qui fait
l’actualité sont des tâches désormais accessibles à tous. L’influence qu’une profession exerçait sans partage a
vécu. Cela explique, pour une large part, les crises récurrentes, éthiques et économiques, de la presse classique.
Internet n’est pas un support de plus ; c’est la fin du journalisme tel qu’il a vécu jusqu’ici. Sur le réseau mondial,
une presse neuve est née avec son identité, son langage, ses journalistes aidés de "confrères" qui, avec eux,
alimentent et éditent des sites d’information : navigateurs, bloggers, internautes en mal d’expression. Sans
oublier les algorithmes et moteurs de recherche. Dans ce contexte, le processus de destruction et de recréation
que traverse aujourd’hui la presse devient irréversible. Contrainte de réviser sa relation avec l’audience, elle
n’entame pas un nouveau chapitre de son Histoire, mais bien une autre Histoire… »
5
bataille du payant en ligne est perdue, les gens ne veulent pas payer pour l’information.
Resteront payants uniquement certains pronostics hippiques… Mais sinon, le gratuit a
gagné. »
Ce constat, sans état d’âme, heurte de front une conception plus « coûteuse » de
l’information de qualité, instrument essentiel de la démocratie. Dans une belle adresse aux
citoyens européens, le philosophe allemand Habermas expliquait : « Sans l’afflux
d’informations, dont la recherche peut être coûteuse, et sans une reprise de cette information
au moyen d’arguments qui supposent une expertise qui n’est pas non plus précisément
gratuite, la communication publique ne peut que perdre sa vitalité discursive. La sphère
publique risque alors de n’être plus à même de résister aux tendances populistes et de
remplir la fonction qu’il est de son devoir de remplir dans le cadre d’un Etat de droit
démocratique. »3 Et plus récemment, Olivier Bomsel (Ecole des Mines) a publié une
analyse critique particulièrement pointue de la gratuité numérique4 et de la domination du
commerce électronique (et donc des portails et des moteurs de recherche) dans la
structuration globale du web (cf. les pp. 148 et suivantes de Gratuit !).
Cependant, de l’autre côté de l’Atlantique, d’où nous vient le vent dominant, le New
York Times a décidé d’abandonner, le 17 septembre 2007, la zone payante de son site
internet (« TimesSelect »), lancée en 2005, laquelle a pourtant engrangé quelque 227.000
abonnements (nombre en stagnation) générant un chiffre d’affaires annuel de 7,2 millions
d’euros. Désormais, les célèbres pages « op-ed » (opinions, chroniques et éditoriaux) sont
en libre accès. Tout le site, en fait, est devenu entièrement gratuit, à la petite exception des
archives datées de 1923 à 1986, alors que, depuis deux ans, la consultation des éditoriaux
et des articles passés était facturée 50 dollars par an. Vivian Schiller, directrice (general
manager) du nyt.com, explique clairement ce changement de stratégie par l’importance
croissante des internautes-lecteurs « opportunistes » (13 millions de personnes) qui arrivent
au site du quotidien via les moteurs de recherche (Google et Yahoo) et qui n’acceptent pas
de payer leur consommation aléatoire d’informations. Ce phénomène de plus en plus massif
(du point de vue de l’audience) contraint la direction du nyt.com au choix rapide du business
model axé sur la publicité, l’audience et la gratuité. Le quotidien new-yorkais se déclare
même prêt à cibler les publicités portées par son site internet selon les préférences des
lecteurs qui le fréquentent… Ce repositionnement stratégique aurait été précipité par
l’intention de Rupert Murdoch d’abandonner l’accès payant du site du Wall Street Journal
qu’il vient d’acquérir, au profit du modèle d’accès gratuit financé par la publicité.
Ces dernières années, le Los Angeles Times et le magazine Slate du Washington
Post avaient déjà changé de modèle économique après deux ans d'abonnements payants
dans l'espoir de récupérer leur lectorat ayant fui vers des sources gratuites. Finalement, seul
le Financial Times se permet encore de faire payer les internautes assidus, fort de ses
contenus spécialisés. Ses abonnements payants ont effectivement progressé de +12% entre
juin 2006 et juin 2007, mais le titre proposera bientôt une formule originale d’accès gratuit :
ce 1er octobre 2007, le FT.com annonce l’accès gratuit jusqu’à la limite de 30 articles par
mois. Au delà de ce volume il faudra s’abonner. La mesure prendra effet au milieu du mois
d’octobre. Selon Ien Cheng, l’éditeur du site FT.com, l’initiative est destinée à ouvrir le site
aux lecteurs irréguliers et à permettre de faciliter les citations et liens en provenance des
blogs de commentateurs et des agrégateurs de news. Evidemment il s’agit aussi d’accroître
le volume de pages vues afin de capter plus de revenus publicitaires. (Rue89, 8 août 2007 ;
3
« Il faut sauver la presse de qualité », in Le Monde daté du 21 mai 2007.
Gratuit ! Du déploiement de l’économie numérique, Gallimard, Folio, 2007 : « Ainsi, le gratuit n’est-il plus une
subvention publique mais un outil privé, une arme économique au service de firmes créatrices de marchés. Ses
mécanismes sont plus subtils, plus violents, plus contestables que les promesses qui les entourent. Qui a intérêt à
donner ? Comment les transferts s’opèrent-ils ? Dans quels buts, au bénéfice de qui, en quête de quels effets ?
L’économie numérique jette un nouveau regard sur la notion de demande et les formes de concurrence qu’elle
suscite… » Interview d’Olivier Bomsel par NetEco : « Les industriels du numérique n’hésitent pas à piller une
industrie voisine ». Interview d’Olivier Bomsel par le Journal du Net : « Le haut débit s’est développé grâce aux
contenus gratuits ».
4
6
Libération, 19 septembre 2007 ; Le Monde, 21 septembre 2007 ; L’Expansion.com du 19
septembre 2007 : « ecosphere » du 1er octobre 2007)5.
En novembre 2006, le nouveau gourou du web 2.0, le journaliste Benoît Raphaël (Le
Dauphiné libéré, puis groupe Le Monde pour « lepost.fr » ; blog : « Demain tous
journalistes ? » : http://benoit-raphael.blogspot.com/), affirmait : « Après avoir été au tout
gratuit, puis au tout payant, puis au gratuit avec couche payante, la tendance revient
aujourd'hui au gratuit. » (http://benoit-raphael.blogspot.com/2006/11/presse-en-ligne-lepayant-est-il-payant.html) Le feuilleton de la gratuité, et de son corollaire, la publicité,
continue…
D’un point de vue strictement économique, il est intéressant de citer les conclusion du
doctorat de Danielle Attias (L’Impact d’internet sur l’économie de la presse, Paris X –
Nanterre, avril 2007) : en épousant, par mimétisme, le modèle économique des grands
portails (FAI, moteurs de recherche…), soit la vente de publicité en masse auprès d’une
large audience, les éditeurs d’informations générales se sont lancés dans une concurrence
mortelle pour les plus « faibles » (qui seront exclus du marché publicitaire), prenant ainsi
le risque d’une liquidation du pluralisme.
Le plus révoltant, peut-être, dans cette évolution, est la complaisance, pour ne pas
dire la complicité, des pouvoirs et services publics qui favorisent aujourd’hui la
domination sans partage des « éditeurs » les plus puissants. N’est-il pas paradoxal
d’annoncer, le 26 septembre 2007, une hausse de 5,8% du montant des « aides à la
presse » (niveau record de 288 millions d’euros), programmée par le projet de loi de
Finances 2008, afin de soutenir le pluralisme, et d’avoir accepté, d’une manière ou d’une
autre, que la RATP annonce, le 18 septembre, avoir confié au groupe Bolloré la distribution,
dans les stations de métro, de ses deux quotidiens gratuits, Matin Plus et Direct Soir ? Cette
scandaleuse duplicité a été parfaitement décrite et analysée par Olivier Bomsel et n’a
d’autre explication que la corruption généralisée6.
En attendant un authentique débat démocratique sur la question, Denis Olivennes,
président de la FNAC, affirme : « Je veux faire un Grenelle de la gratuité ». Chargé par la
ministre de la Culture et de la Communication, Christine Albanel, et la ministre de
l'Économie, Christine Lagarde, d'une mission sur la lutte contre le piratage et pour le
développement des offres légales musicales, audiovisuelles et cinématographiques, Denis
Olivennes sait que le terme de « gratuité » n'est pas innocent7. Il englobe à la fois la
« nécessité de changer l'état d'esprit des internautes pour qui le téléchargement de
fichiers sur Internet doit être gratuit - donc piraté - et l'idée que les professionnels doivent
inventer de nouveaux modèles économiques dont le recours à la publicité pour financer le
téléchargement légal ». La mission de Denis Olivennes est de réunir les créateurs, les
5
Nouveautés certaines de la rentrée 2007 : l’éditeur de jeux vidéo Ubisoft offre le téléchargement gratuit de ses
titres Far Cry, Prince of Persia et Rayman, en échange de publicités insérées dans ces trois « œuvres », tandis
que YouTube propose un nouveau format publicitaire qui se superpose sur environ 20% de la surface des vidéos.
Pour le moment seuls les contenus proposés par des professionnels ou soumis à des droits d’auteur seront
concernés. Les autres vidéos mises en ligne par les internautes ne seront donc pas interrompues pas la publicité.
Avec ce service publicitaire, YouTube cherche à attirer les contenus professionnels en proposant aux ayant droits
un modèle économique qui se rapproche de celui des chaînes de télévision.
Déjà, en mai 2007, le modèle économique de la vidéo à la demande gratuite, financée par la pub, faisait
son arrivée en France. « Allociné » propose, depuis, une offre de « free VOD ». « Nous avons signé un accord
avec une association qui regroupe tous les producteurs de dessins animés français » annonçait Grégoire Lassale,
directeur d’Allociné.fr, à l’occasion du Festival de Cannes. Cette offre (« zoolookids ») concerne surtout le plus
jeune public avec des épisodes de dessins animés de Lucky Luke, Kid Paddle, Oggy et les cafards et Didou.
Chaque diffusion est précédée d’une fenêtre incompressible de 12 secondes de publicités. Une première étape
qui jouera le rôle de test. Car, selon une récente étude de Forrester Research, « le marché du téléchargement
payant de vidéo, dans son état actuel d’évolution, va bientôt s’éteindre malgré sa croissance rapide », la
diffusion de vidéo soutenue par la publicité étant l’issue de ce drame…
6
Op. cit., terribles pp. 165 à 167, entre autres.
7
Cf. son très intéressant débat avec Jacques Attali, « La gratuité va-t-elle tuer la culture ? », dans le Nouvel
Observateur du 22 mars 2007.
7
producteurs et les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) pour enfin aboutir, d’ici à novembre
2007, à des accords interprofessionnels « capables d'inverser une tendance très grave
pour les industries culturelles ». (Le Figaro, 6 septembre 2007)
Sujet de réflexion plus anecdotique. Une récente étude Precepta (groupe Xerfi) s’interroge :
« Les titres gratuits sont-ils vraiment en mesure de s’imposer sur le web où ils n’ont plus l’avantage
de la gratuité et sont en concurrence avec les médias références de l’information ? » Réponse :
« Rien de moins sûr », car « les résultats d’audience les relèguent pour le moment très loin dans les
classements de portails de contenus… » (Correspondance de la presse, 27 avril 2007). Ajoutons que
la qualité assez déplorable, pour le moment, du site internet de 20 Minutes, le manque total
d’originalité de celui de Metro, et la fonction purement vitrine de ceux de Direct Soir et Matin Plus
n’incitent pas à leur consultation ni à leur fréquentation assidue.
Publicité
En 2006, les dépenses publicitaires sur internet, dans le monde, ont dépassé celles
sur l’affichage.
En 2007, l’agence ZenithOptimedia les voit progresser 7 fois plus vite que la publicité
traditionnelle (+ 28% contre + 3,9%).
En 2009, internet détrônera, sans doute, la radio.
Aux Etats-Unis, au Japon et en Grande-Bretagne, les taux de croissance du CA
publicitaire d’internet varient, en 2006, de +20% à +30% par an. Sur ces trois marchés, les
consommateurs consacrent 22% de leur consommation média (mesurée en temps) à
internet, alors que l’investissement internet des annonceurs n’y représente encore que 6,8%
de la totalité de leurs dépenses. D’où une marge de progression « énorme », selon
ZenithOptimedia, qui profitera d’abord aux liens sponsorisés sur les moteurs de recherche.
(La Tribune, 30 mai 2007)
Aux Etats-Unis, le budget de la publicité en ligne dépassera celui de la presse écrite
d’ici à quatre ans (2011), selon le cabinet Veronis Suhler Stevenson (VSS), grâce à une
croissance de 21% par an. En 2007, le temps de lecture de la presse papier américaine sera
inférieur à celui passé en ligne.
En France, en 2007, les dépenses publicitaires en ligne auraient enregistré une
croissance de 48% par rapport à 2006, selon Rue89 (8 août 2007). TNS donne +43,4%.
13,6 %
la part du Web dans les investissements pub en France en juillet
Répartition des investissements publicitaires
par média
Recettes Juil. 07 (en millions
Secteurs
Evolution annuelle
d'euros)
Plurimédia*
1.359,6
+ 4,4 %
Presse*
405
- 2,8 %
Radio
203,5
+ 1,2 %
Télévision
369,8
+ 3,6 %
Publicité extérieure
183,1
- 3,4 %
Cinéma
12,8
+ 40,4 %
Internet
185,3
+ 43,4 %
Source TNS Media Intelligence, août 2007.
* Univers constant 2007 vs 2006.
Part de marché
100 %
29,8 %
15 %
27,2 %
13,5 %
0,9 %
13,6 %
De fait, il est aujourd’hui quasi impossible de consulter les sites internets des
« grands » quotidiens, sans être équipé d’un logiciel de blocage des fenêtres pop-up. Et il est
tout de même assez choquant de trouver, en page d’accueil du site du Monde, par exemple,
une page entière de publicité… Cette explosion sans fin de la publicité nous oblige, me
semble-t-il, à une mise en question critique du consumérisme absolu, voire tyrannique, au
8
nom de la démocratie, telle qu’analysée par Tocqueville (1840)8 et toute la tradition critique.
Suivons aussi, entre autres (car on devrait encore citer, par excellence, John Kenneth
Galbraith, The New Industrial State, 1967), le pionnier Jean Baudrillard qui, dans La Société de
consommation (1970), relevait le débordement du besoin par le désir à cause de l’extension
totale et hystérique du « schème de consommation »9 : « Dans la logique des signes,
comme celle des symboles, les objets ne sont plus du tout liés à une fonction ou à un besoin
défini. Précisément parce qu’ils répondent à tout autre chose, qui est soit la logique sociale,
soit la logique du désir, auxquels ils servent de champ mouvant et inconscient de
signification. (…) La vérité de la consommation, c'est qu'elle est non une fonction de
jouissance, mais une fonction de production - et donc, tout comme la production matérielle,
une fonction non pas individuelle, mais immédiatement et totalement collective. (…) Cette
fonction sociale et cette organisation structurale dépassent de loin les individus et s'imposent
à eux selon une contrainte sociale inconsciente… » Baudrillard, dès 1970, relevait aussi le
lien organique entre publicité et gratuité, dénonçant la substitution de la « magie du Cargo »
à la « rationalité économique de l’échange marchand »10… Tout dernièrement, une analyse
critique systématique (assez effrayante !) de la publicité a été produite par Marie Bénilde 11.
Pour la pub, nos « cerveaux » sont à vendre ou acheter12…
Et pour Google, donc, leader mondial de la marchandisation numérique de la vie, tout
est bon pour en connaître les ressorts les plus secrets.
Google, le Béhémoth numérique
La domination quasi totale du moteur de recherche Google (qui vient de fêter son
dixième anniversaire, le 15 septembre 2007) sur le web mondial13, ses développements
8
Entre autres lectures contemporaines de Tocqueville : Yves Charles Zarka, « Le maître anonyme », in Critique
des nouvelles servitudes, PUF, 2007, pp. 5-31 ; Agnès Antoine, L’Impensé de la démocratie ; Toquville, la
citoyenneté et la religion, Fayard, 2003, pp. 41-42 et 48-51 ; Serge Audier, Tocqueville retrouvé, Vrin, 2004. La
référence à Hannah Arendt, à l’Ecole de Francfort (Horkheimer, Adorno, Marcuse) et à Jürgen Habermas, Axel
Honneth, Christopher Lasch, Norbert Wiener, Paul Virilio, Benjamin R. Barber, Pierre Bourdieu, Marcel
Gauchet, Pierre-André Taguieff, Jean-Marc Mandosio, etc., est aussi pertinente, à propos de la question morale
et politique, voire anthropologique, dans le « cybermonde » des mass médias.
9
La Société de consommation, Gallimard, coll. Folio, 1986, pp. 186 et 187.
10
La Société de consommation, éd. citée, pp. 261 et suivantes.
11
On achète bien les cerveaux ! La publicité et les médias, Raisons d’agir, 2007 : « Le temps n’est plus où l’on
se contentait de tests et de post-tests pour prouver l’efficacité des messages publicitaires. Face à des nouveaux
médias comme Google ou Yahoo, qui proposent à l’annonceur de payer pour chaque contact transformé en trafic
et de suivre le client à la trace, les grands médias cherchent à montrer qu’ils arrivent à pénétrer l’inconscient des
consommateurs. A l’instar des grands annonceurs américains, ils ont confié à une société spécialiste des sciences
cognitives, Impact Mémoire, le soin d’explorer ce que le cerveau retient dans la communication publicitaire.
Pour cela, les « neuro-marketers » ont recours à une machine uniquement utilisée jusqu’à présent à des fins
médicales, pour détecter les tumeurs par exemple : l’imagerie à résonance magnétique (IRM)… »
12
Patrick Le Lay, alors président de TF1 : « Or, pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau
du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le
divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps
de cerveau humain disponible… » (Les Dirigeants face au changement, Paris, Editions du huitième jour, 2004).
13
En France presque 9 activités de recherche sur 10 (85,8%) se font sur un site du groupe Google (Google,
Youtube…), a révélé, mardi 25 septembre, une étude de ComScore, l’un des principaux organismes de mesure
d’internet. Arrivent ensuite les sites Yahoo! (3,8%), Microsoft (3,4%), eBay (2,2%) et France Télécom (2%).
L’étude a été réalisée en juillet, sur un panel de 20.000 personnes. Elle prend en compte le trafic issu des
ordinateurs publics (cybercafés), téléphones portables ou assistants numériques personnels. Google était
également en tête de classement dans l’enquête réalisée en janvier 2007, avec 82,8% de parts de marché (+3
points). L’ordre des quatre premiers n’a pas changé depuis: Yahoo! (5,3%), Microsoft (2,9%), eBay (2,5%) et
France Télécom (2,5%).
ComScore dispose d’un échantillon de 2 millions de personnes dans 160 pays. Il mesure l’activité de recherche
("search") des internautes dans les 50 principaux sites, comme les moteurs de recherche (Google, Yahoo!, le
chinois Baidu), les sites de commerce en ligne (Amazon, eBay...), de documentation (Wikipedia...), de partages
(YouTube...), des annuaires... ComScore précise que le panel de ces 50 sites est identique de pays à pays, mais
que sa composition est amenée à évoluer avec le temps.
9
concurrentiels débridés et son opacité dans la gestion des données privées suscitent de plus
en plus de mises en cause, voire d’appels à la résistance.
Google = Big Brother ? Pour Olivier Andrieu, spécialiste des moteurs de recherche
et éditeur du site abondance.com, le soupçon existe. « Google collecte une masse de
données inimaginable. Ils me connaissent mieux que moi-même », explique-t-il. De fait, si
vous utilisez l'ensemble de ses services, Google analyse vos recherches, mais aussi le
contenu de vos e-mails (Gmail), les vidéos que vous regardez (YouTube), le contenu de
votre ordinateur (Google Desktop), ce que vous achetez (via le comparateur de prix
Froogle), etc. Des données utilisées pour offrir aux annonceurs des publicités toujours
plus ciblées. Google prévoit même à l'avenir de s'appuyer sur la localisation géographique
de l'internaute et vient de déposer un brevet sur une technologie analysant le
comportement des joueurs en ligne afin de diffuser dans leurs jeux vidéo des réclames
correspondant à leur profil psychologique ! Et la critique ne se limite pas aux questions de
respect de la vie privée.
« Dans notre société de l'information, celui qui la contrôle est virtuellement le maître
du monde. Si Google décide de ne plus référencer un site, il n'existe plus », explique Daniel
Ichbiah, hauteur d'un livre-enquête sur la firme14. Hyperpuissant, « l'ogre de Mountain
View », introduit en Bourse en 2004 et qui a engrangé 10,6 milliards de dollars de recettes
en 2006, rêve de dominer le marché publicitaire mondial. Il vend déjà des pubs pour la
presse, la télé, la radio et les téléphones portables. Et il rachète les entreprises à tour de
bras, comme le leader de la vidéo en ligne YouTube. Mais pour alimenter sa folle croissance
(ses revenus doublent quasiment tous les ans), Google est acculé à multiplier les services
(mails, cartographie, shopping, blogs, etc.) et à indexer toujours plus de contenus. Et tant pis
s'ils ne lui appartiennent pas.
Du coup, les procès pleuvent. On l'accuse, entre autres, de violer
systématiquement les droits d'auteur. Il s'est ainsi fait condamner par l'Agence France
Presse et la presse pour reproduction illégale d'articles. Sa filiale YouTube est devenue la
bête noire des producteurs d'images. Et, à lui seul, le géant américain de l'audiovisuel
Viacom lui réclame 734 millions d'euros d'indemnités. Google est aussi pris à partie par ses
clients annonceurs. Ceux-ci sont facturés en fonction du nombre d'internautes qui cliquent
sur leur publicité. Or les experts estiment que 15 à 30% des clics sont en fait générés par
des concurrents mal intentionnés. A l'été 2006, 80 annonceurs ulcérés par cette fraude
persistante ont attaqué Google, qui a préféré transiger en leur accordant une ristourne de
60 millions de dollars. Pis encore, Google n'hésite pas à commercialiser les noms de
marques... à leurs concurrents. Il a ainsi été condamné en juin dernier pour avoir cédé le
mot-clé « imitation Louis Vuitton » à des sites qui vendaient des sacs contrefaits. Le
voyagiste « Bourse des vols » ou les hôtels Méridien ont eux aussi obtenu gain de cause
pour contrefaçon.
Mais malgré les critiques et les procès qui s'abattent sur lui, rien ne semble pour
l'heure entraver Google dans sa course en tête. Pas même Microsoft. Sa dernière prouesse
technologique est venue le rappeler à ses détracteurs. Baptisée modestement « recherche
universelle », cette nouvelle version de son moteur de recherche permet d'accéder sur une
seule page à tous les contenus à la fois. Il suffit de taper « Paris » pour trouver les sites web,
Google domine encore le marché au niveau mondial, avec une part de marché de 60% en juillet. Yahoo! s’arroge
14,1%, et Baidu 5,7%. Aux Etats-Unis, Google domine 48,3% du marché, toujours devant Yahoo! (18,4%).
Le moteur de recherche veut « tirer parti des extraordinaires talents informatiques en Europe » en y augmentant
ses équipes d’ingénieurs, afin qu’ils soient aussi nombreux qu’aux États-Unis. Google va en embaucher
« plusieurs milliers », a assuré Nelson Mattos, le 27 septembre 2007, fraîchement nommé vice-président pour la
zone EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique), dans une interview au Financial Times. Il était auparavant viceprésident de la recherche chez IBM. Selon des estimations, sur 7000 salariés de Google actuellement dans le
monde, environ 500 se trouveraient en Europe ; 2500 personnes au total travaillent dans la zone EMEA. Basé en
Suisse, Nelson Mattos sera « chargé des projets internationaux d’ingénierie entreprise, ainsi que du
développement des nouveaux produits locaux et de l’innovation », indique Google, en pleine phase de
diversification de ses activités.
14
Comment Google mangera le monde, L’Archipel, 2007.
10
livres, photos, journaux, cartes et vidéos d'amateurs consacrés à la capitale. Et un nouveau
logiciel traduit automatiquement les documents en douze langues. Google, qui détient à lui
seul la moitié du marché mondial de la recherche, enfonce une fois de plus la concurrence.
Ce qui conforte Sergey Brin lorsqu'il répète à l'envi : « Nous nous sentons assurément le
numéro un. »15 (Le Journal du Dimanche, 27 mai 2007)
Il est patent que Google transgresse sans dommages et en toute puissance les
lois, imposant au monde entier « le désordre mortel de l’absence de Loi » (Gérard
Rabinovitch) qui est exactement le fait du Béhémoth16.
Car, c’est aujourd’hui une évidence, Google pose un problème politique majeur !
Jean-Claude Michéa l’écrit, de manière provocatrice, mais stimulante : « Dans une société
libérale, la main invisible du Marché est, par définition, toujours plus difficile à percevoir
que la main visible de l'État, alors même que le pouvoir qu'elle exerce sur la vie des individus
est autrement plus développé. Remarquer l'existence de contrôles policiers permanents ne
demande ainsi aucune une agilité intellectuelle particulière. (…) Reconnaître, en revanche,
l'emprise que Google, par exemple, exerce sur les individus modernes, constitue une
opération infiniment plus compliquée pour un individu soumis depuis toujours aux techniques
du contrôle maternel. (…) Pour autant, on imagine assez mal la Gauche et l'Extrême Gauche
modernes (toujours prêtes à s'indigner du moindre contrôle policier opérée dans une gare de
banlieue) appeler un jour les classes populaires à se révolter contre le contrôle permanent
de leur vie par Google, ou même simplement contre cette omniprésente propagande
15
C’est sans doute Montaigne qui sous-titra Le Discours sur la servitude volontaire de La Boétie par « Le Contre
Un », signifiant par là que l’unique, hors Dieu, est cause de la servitude…
16
Pour le sociologue Gérard Rabinovitch (CNRS), « Hobbes, après St Augustin, popularisa deux figures de
monstres de l’eschatologie juive d’origine babylonienne. Léviathan, qui désigna l’État coercitif, Béhémoth, qui
désigna le non-Etat, le chaos, le désordre mortel de l’absence de Loi. Aujourd’hui Léviathan est le nom
générique et allégorique des formes totalitaires du politique. Béhémoth peut être opportunément employé pour
désigner génériquement les forces exacerbées de la destruction de l’humanité en l’homme. (…) On commence
seulement à remarquer que c’est peut-être Béhémoth qui a pris ses quartiers dans le monde démocratique. »
Genèse, I, 24 : « Dieu dit : « Que la terre produise des êtres vivants selon leurs espèces : bestiaux (Béhémoth),
reptiles, et bêtes sauvages selon leurs espèces ! » Cela s’accomplit. » Job, XL, 15 : « Vois donc le Bestial
(Béhémoth) que j’ai créé comme je t’ai fait. » André Paul, dans l’Encyclopaedia Universalis : « Béhémoth :
Pluriel du mot qui désigne, en hébreu biblique, le bétail, les animaux domestiques (Genèse, I, 24). Dans le livre
de Job (XL, 15), Béhémoth prend l’allure d’un pluriel intensif et mythique : il désigne la Bête par excellence, la
force animale que Dieu peut seul maîtriser, mais dont la domestication échappe à l’homme. Comme monstre
mythique, Béhémoth, joint à Léviathan, est d’origine Babylonienne : ils représentent les deux monstres
primordiaux du chaos, Tiamat et Kingu. On retrouve Béhémoth dans la littérature apocalyptique juive, au seuil
de l’ère chrétienne. Dans le Baruch syriaque (XXIX, 4), il est dit que Béhémoth et Léviathan, apparus au
cinquième jour de la Création, seront servis en nourriture aux Justes, lors du grand banquet messianique. La
même idée se retrouve dans le IVe Livre d’Esdras (VI, 47). Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, Le Cerf,
1993 : « Le Léviathan (en hébreu : Liviatan) est souvent évoqué en même temps que le terrible Béhémot (Job,
XL, 15-24). Dans les livres apocryphes (2 Esdras VI, 49-52), il est dit que ces deux êtres existent depuis le
cinquième jour de la Création. Quant à la littérature rabbinique, elle voit en eux les « grands dragons » de la
Genèse (I, 21). Ce sont eux qui seront consommés lors du banquet des Justes, dans le monde à venir (Lévitique
Rabba, XIII, 3 ; Babba batra, 74a-75a). On raconte en effet que, dans les temps messianiques, D. égorgera le
Léviathan et Béhémot (appelé aussi « bœuf sauvage » : chor ha-bar) et qu’il donnera leur chair en nourriture lors
du festin eschatologique ».
Henri Atlan, Les Etincelles du hasard, tome 1, Seuil, 1999, pp. 112 à 114 : « L’immanence de l’Eros y éclate
(dans le Talmud) en deux mouvements opposés de chute et de désincarnation, dont on ne sait lequel est source
des plus grands maux : sa chute dans la violence de l’ordre des choses (Behémoth) ou sa dilution désincarnée
dans l’ordre des esprits ou de la religion (Léviathan). (…) « Behémot », pluriel désignait habituellement de gros
animaux terriens herbivores plus ou moins domestiqués, représenterait la force musclée des corps pesants,
comme ceux d’éléphants ou d’hippopotames imaginaires. »
Cf., enfin : Franz Neumann, Béhémoth ; Les Structures et pratiques du national-socialisme, Payot, 1987, et
Gérard Rabinovitch, « Carnets du jusant (fragments) », in Barca, n° 13, novembre 1999.
11
publicitaire, sans laquelle le dressage capitaliste des humains resterait un vain
mot. »17
Le 27 septembre, Emmanuel Parody (Les Echos, blog « ecosphere ») notait :
« Quelque chose me dit que le débat ne fait que commencer. Microsoft et ATT se sont
opposés au rachat de Doubleclick par Google, situation plutôt paradoxale mais qui a conduit
cette semaine à une audition devant une commission du Sénat US pour évaluer la question.
Deux thèses s’affrontent: le rachat crée une situation monopolistique pouvant conduire à des
manipulations des prix du marché (au détriment des annonceurs), côté Google on fait valoir
l’ouverture du marché à de nouveaux acteurs, type PME, auparavant exclu du marché
publicitaire. Il fallait s’y attendre et on n’a pas finit d’en débattre, la puissance de Google
sera désormais une question politique. Non parce que Google se révèle une entité hostile
mais parce que le contrôle de l’information est la clé du contrôle de l’économie, ceci depuis
toujours. Curieusement pas de trace de cette audition dans les médias français. »
Par essence, Google (comme ses concurrents) fonde toute son économie sur la
connaissance toujours plus massive et aussi plus précise de la vie privée des internautes (le
datamining). Cette firme mise donc, en priorité absolu, sur le « potentiel illimité apporté par la
connaissance, chaque jour, des requêtes et des désirs de millions d’internautes. Ajoutez
quelques services comme le courrier électronique, la messagerie instantanée, l’agenda
personnel ou professionnel, les blogs, les forums et vous obtenez, par recoupement, la
cartographie intime de millions de profils. Le rêve ultime du marketeur, le cauchemar du
citoyen. » (« ecosphere », 18 mais 2005)18
17
L’Empire du moindre mal, Climats, 2007.
Note bibliographique : 1/ Barbara Cassin, Google-moi, Albin Michel, 2007 : « Our mission is to organize all
the information in the world ("Notre mission est d’organiser toute l’information dans le monde") ; Don’t be evil
("Ne sois pas mauvais, méchant"). Tels sont les deux axes principaux de Google Inc. que Barbara Cassin,
directrice de recherche au CNRS et codirectrice de la collection l’Ordre philosophique au Seuil, examine en
philosophe. Elle montre qu’ils se traduisent par deux mots d’ordre : organiser et faire le bien. L’histoire de
l’invention de Google, le "meilleur" moteur de recherche, par deux étudiants de Stanford, de son développement
jusqu’à son entrée fracassante en bourse, permet à Barbara Cassin d’aborder sous un angle nouveau la question
décisive de la dimension culturelle de la démocratie. "Google est un champion de la démocratie culturelle, mais
sans culture et sans démocratie. Car il n’est un maître ni en culture (l’information n’est pas la paideia) ni en
politique (la démocratie des clics n’est pas une démocratie)." »
2/ Daniel Ichbiah, Comment Google mangera le monde, L’Archipel, 2007 : « Dix milliards de pages
web mémorisées... Deux cent millions de requêtes satisfaites chaque jour... gratuitement ! Que cache donc
l’insolente réussite de Google, qui pèse aujourd’hui plus lourd dans l’économie américaine que Ford ou Disney ?
Google, c’est d’abord une équation dont la formule, élaborée par deux touche-à-tout de génie, Sergey Brin et
Larry Page, est gardée plus secrète que celle du Coca-Cola. Là s’arrête le conte de fées. Car le business model de
l’entreprise repose sur la mise aux enchères de liens publicitaires : tandis que les annonceurs se battent pour
figurer sur ses pages, Google compte les coups... et les sous. Résultat : ses profits doublent chaque année ! Le
char d’assaut écrase tout sur son passage, menaçant la suprématie des géants Microsoft et Yahoo !. Actualités,
messageries, blogs, logiciels gratuits : Google ne cesse de proposer de nouveaux services, poursuit son projet de
bibliothèque numérique universelle, malgré les procès intentés par les éditeurs, et accumule des milliards de
données privées sur ses utilisateurs, que ses détracteurs l’accusent de vouloir un jour monnayer. Google, meilleur
ami de l’internaute, est-il en passe de devenir le Big Brother du village global ? Quel est donc le vrai prix de la
gratuité ? »
3/ John Battelle, La Révolution Google, Eyrolles, 2006 : « Quelles sont les vraies raisons de la réussite
de Google ? Devenue passerelle instantanée vers la connaissance, plus efficace qu’aucun de ses concurrents,
Google est utilisée par des centaines de millions de personnes en quête de réponses à leurs besoins et désirs, à
leurs peurs et obsessions. Elle constitue une gigantesque base de requêtes, que l’auteur a baptisée la "Base de
données de nos intentions". Cette dernière, croisée avec d’autres, devient une mine d’or dont toute organisation
-notamment gouvernementale- rêve de s’emparer. Avec lucidité, l’auteur analyse leur énorme impact sur le
marketing, les médias, la culture pop, les rencontres, l’emploi, le droit international, les libertés individuelles.
Nul n’était plus qualifié que John Bottelle, co-fondateur de Wired et fondateur de The industry Standard, pour
exposer ce phénomène. Cet ouvrage repose sur plus de 350 entretiens accordés par les plus éminentes
personnalités du secteur, à commencer par les fondateurs de Google, Lorry Page et Sergey Brin, leur P.-D.G.
Eric Schmidt, mais aussi Jeff Bezos, P.-D.G. d’Amazon, Terry Semel de Yahoo !, ou encore Louis Monier,
l’inventeur d’AltaVista. »
18
12
Mais le marché mondial de la publicité ne suffit plus, comme territoire de conquête, à
la firme américaine. Expansion sans fin oblige, Google a décidé de régner aussi sur la
diffusion d’informations, en contrôlant l’accès des internautes aux productions des (autres)
éditeurs (puissance du référencement !) et en se déclarant ouvertement concurrent, en tant
que nouvel éditeur, des sites et portails des éditeurs de presse !
Au cœur de l’été 2007, Google est discrètement devenu éditeur. La firme
annonçait, effectivement, le 7 août 2007, via le blog de l’équipe de Google News la mise en
place d’un dispositif permettant aux personnes citées dans les articles repris par Google
News de réagir en ligne. Google se chargera de contacter les personnes concernées et
publiera les commentaires sans les rééditer. Le 15 août, « ecosphere » commentait, à juste
titre : « On y sent comme une revanche sur certaines pratiques de la presse traditionnelle.
D’ailleurs l’initiative a été comprise par beaucoup comme une déclaration de guerre contre la
presse. J’y vois surtout l’émergence d’une arrogance d’un nouveau genre. Devenu
l’intermédiaire ultime (distribution, pub, recherche) Google ne résiste pas à la tentation
d’utiliser son nouveau pouvoir. Nous voilà prévenus. L’initiative a une conséquence non
négligeable : en prenant en charge la collecte d’informations et leur mise en ligne,
Google vient très exactement de franchir la ligne qui sépare l’hébergeur/prestataire
technique de l’éditeur. A vrai dire la ligne est franchie depuis longtemps de mon point de vue
avec le rachat de YouTube et pour ceux qui en douteraient l’organisation récente du débat
sur la présidentielle américaine avec CNN. (…) Deuxième conséquence : Google News ne
pourra plus être considéré comme un espace neutre. Un fantasme qui ne tenait plus
beaucoup tant Google ne parvenait plus à justifier le choix des sources d’information de
son portail19. (…) Il n’est pas impossible que derrière cette initiative se cache une des raisons
pour lesquelles Google a entrepris de devenir client des principales agences de presse. Ce
sont les dépêches d’agence qui pourraient servir de base au nouveau service (simple
hypothèse de ma part). »
Il y a quelque chose de suicidaire dans l’attitude des agences de presse (dont l’AFP)
et des éditeurs de journaux qui, tous aujourd’hui, jouent frénétiquement le jeu de la course
au référencement par Google en permettant, voire en favorisant, le pillage de leurs
contenus par le moteur de recherche total. Une réaction collective, soutenue par des
pouvoirs publics dignes de ce nom, est la seule alternative imaginable à un Google World
sans foi (au sens de fidélité20) ni loi, où toutes les structures sociales d’une humanité
solidaire seraient livrées à la dévoration insatiable du Béhémoth numérique.
Cependant, en France, l’Etat semble, une fois de plus, faire le lit de sa propre
négation et de la marchandisation ultralibérale de la culture. En effet, la ministre de la
Culture, Christine Albanel, a rencontré, le 1er octobre 2007, Mats Carduner, président de
Google France. Le but de cette entrevue est d’accélérer, grâce à l’aide du géant du web, la
numérisation du patrimoine culturel français et sa mise à disposition sur Internet.
Cette soudaine collaboration pourrait paraître assez étonnante, aux naïfs, puisqu’en 2005,
Google fut accusé de vouloir étendre son hégémonie au secteur culturel européen, à cause
de son service de recherche de livres. Le précédent président de la République, Jacques
Chirac, sous l’impulsion de la direction de la BNF, avait alors lancé en réaction le projet
bibliothèque numérique européenne… Ces relations tendues n’ont pas empêché Christine
Albanel de faire appel à Google pour la promotion du portail culture.fr lancé, sans fracas,
en août dernier et qui donne déjà accès à 1,5 million de documents numérisés.
Papier / web : la divergence numérique ?
19
Google News affirme en bas de sa page d’accueil : « La sélection et le positionnement des articles de cette
page ont été réalisés automatiquement par un programme informatique. »
20
Cf. le magnifique chapitre « Le devoir de fidélité », de Pascal Bruckner, dans Le Vertige de Babel, Arléa,
1999, pp. 42-51.
13
Les principaux titres de presse quotidienne ont créé leurs sites à partir de 1995.
Pendant la décennie qui a suivi, ils les ont pratiquement alimentés avec leurs contenus
quotidiens tels que publiés sur le papier, mettant en œuvre des maquettes très peu
illustrées et surtout peu animées.
Depuis peu (2006 surtout), le développement explosif du haut débit21 et, en
conséquence, l’arrivée de la vidéo sur les écrans d’ordinateurs ont entraîné les sites de forte
audience dans une animation audiovisuelle marquée, parfois anarchique, et surtout dans
une mise à jour, voire (dans les meilleurs cas) une production originale des informations
publiées en ligne. Dès lors, certains sites de quotidiens sont aujourd’hui « plus réactifs, plus
illustrés d’images fixes et mobiles, et progressivement envahis de tchats et de blogs sur les
grands dossiers du jour, ce qui implique de façon manière la populations des lecteurs dans
l’élaboration du contenu », constate Antoine de Tarlé, administrateur et directeur général
adjoint de Ouest France (lire, ci-dessous : « Et pour aller (beaucoup) plus loin »).
Depuis le début des années 2000, aux Etats-Unis d’abord, puis au Japon, en Grande
Bretagne et en Europe continentale (actuellement le phénomène est réellement mondial), les
grands éditeurs de quotidiens en ligne ont fait le même constat qu’Antoine de Tarlé :
« L’examen des chiffres d’audience nous montra qu’il y avait une forte attente des
internautes pour l’actualité encore plus immédiate et qu’on ne pouvait pas se contenter
des les renvoyer à l’édition du journal du lendemain. Il a donc fallu imaginer un système
d’informations rapides mais contrôlées, quitte à renvoyer, pour plus de détails et de réflexion
à l’édition papier. »
L’expert poursuit (citation un peu longue, mais, me semble-t-il, assez cruciale) : « Cet
état de choses conduit à se poser, une fois de plus, la question de la nature exacte du media
internet. Les dirigeants des entreprises de presse ont tendance encore maintenant, à n’y voir
qu’un prolongement du journal, une concession faite à un public qui ne fait pas son devoir en
s’informant en priorité par le papier mais dont on espère qu’il y reviendra, l’âge aidant, en
faisant amende honorable. Or, il s’agit de bien autre chose : la combinaison de
l’instantané et de l’interactivité, ce que même le quotidien le mieux organisé ne parvient
pas à réaliser complètement en raison de la relative lourdeur de l’impression et de la
distribution du papier. De ce point de vue, les services d’information sur le Web sont proches
de la radio pour qui ils constituent une menace grandissante mais ils offrent, à la différence
de celle ci, des images, photos et vidéo ainsi que des analyses plus approfondies. Les
directions des entreprises de presse doivent donc s’adapter à une réalité nouvelle qui
transforme progressivement leurs publications en agences de communication multisupports. »22
Cette perception de la « nature exacte » de l’internet rejoint exactement celle d’un
autre observateur, Michel Muller, qui écrivait, en 2005 : « Les éditeurs de presse ont
également développé leurs propres sites en mettant d’abord leurs textes en ligne et en
développant des offres payantes pour accéder aux archives ou à certaines informations.
C’est ainsi que sont nées des éditions internet de quotidiens, qui diffèrent, dans leur
conception, du support papier. En effet, il est apparu à l’usage que les habitudes de lecture
sur écran et les spécificités du fonctionnement en réseau conditionnent le traitement des
articles. La concision est une règle et la mise à jour permanente un atout essentiel dans
l’appréhension de l’information aujourd’hui. La toile (web) redonne au support écrit un atout
qu’il avait perdu devant la capacité de réaction de l’audiovisuel : la possibilité de coller au
plus près au rythme réel de l’information. »23
21
Au 30 juin dernier, l’Hexagone affichait un nombre total d’abonnés au « haut débit » de 14,25 millions, contre
13,6 au cours du premier trimestre. La croissance s’établit à 28 % sur un an. En un an, le nombre d’abonnés a
donc crû de 3,15 millions. L’ADSL est évidemment la technologie reine du haut débit, avec un parc de
13,55 millions de lignes, contre 10,45 millions au deuxième trimestre 2006. Le reliquat va essentiellement au
câble et, à la marge, à des technologies alternatives comme le satellite.
22
Antoine de Tarlé, « Presse et internet. Une chance, un défi : enjeux économiques, enjeux démocratiques », Les
Cahiers En Temps Réel, n° 26, octobre 2006, page 10.
23
Michel Muller (rapporteur), Garantir le pluralisme et l’indépendance de la presse quotidienne pour assurer
son avenir, Avis et Rapport du Conseil économique et social, Journaux officiels, juillet 2005, page II-88. Michel
14
Ce sont, ainsi, les thèmes du bi-média, du multimédia et de la convergence
numérique qui sont stratégiquement mobilisés. La priorité donnée, coûte que coûte (parfois
au prix du manque de rigueur), à la « réactivité » s’exprime clairement sur les sites
« quotidiens » (en fait, mis à jour en permanence) des news magazines et autres hebdos
d’information générale : Nouvel Obs en tête, mais aussi L’Express, Le Point et le JDD.
Associée à l’interactivité avec les internautes (web 2.0), elle a fait le succès spectaculaire du
site du Dauphiné libéré spécialement ouvert et animé à l’occasion de la campagne
présidentielle : « QuelCandidat.com » (35.000 visites par jour, après deux mois d’existence,
une semaine avant le premier tour ; 11 millions de pages vues par mois). A noter : ce site
événement a été conçu par Benoît Raphaël (blog personnel : http://benoitraphael.blogspot.com) qui a ensuite été débauché, en juin 2007, par Le Monde pour diriger
son
projet
de
site
web
participatif
(nom
de
code :
« lepost.fr » :
http://www.lepost.fr/mentions-legales.html.
Première
analyse,
par
ecosphere :
http://ecosphere.wordpress.com/2007/09/09/lepostfr-le-monde-interactif-sessaye-au-web20/)
Internet / télévision / papier : le règne des écrans
La suprématie de la télévision est sérieusement attaquée par internet, selon une
étude de l’Institute for business value d’IBM. Alors que 19% des sondés américains passent
6 heures ou plus sur le web chaque jour, 9% seulement sont encore « téléphages ». En
Allemagne et au Japon, les consommateurs privilégient déjà massivement internet par
rapport à la télévision.
Dans un contexte où « le public prend de plus en plus le contrôle et où il choisit
davantage le contenu qu’il veut visionner », sites communautaires et plateformes
collaboratives comme YouTube donnent l’avantage au web, selon l’étude. (Le Figaro
Economie, 28 août 2007)
En France, selon l’étude Simm 2006 de TNS Media Intelligence, menée auprès de
10.000 interviewés, 15,7% d’entre eux placent le web au rang de média prioritaire, alors
qu’ils ne sont que 11,7% à choisir les quotidiens et 7,5% les magazines. Cependant, la
télévision reste en tête (40,3%) et la radio résiste encore (18,7%) à l’offensive numérique.
Dans « La révolution internet sous l’angle de la sociologie. A l’heure de la
convergence numérique » (Le Monde 2, 18 novembre 2006), Jean-Louis Missika,
sociologue, auteur de La Fin de la télévision (Seuil, mars 2006), annonce l’annexion de la
télévision par le web et la présence d’écrans (téléphones mobiles, ordinateurs, consoles
vidéo...) qui ne cessent de diffuser en tous lieux des infos (textes, images et sons) émises
par les « citoyens » : « On assiste à une profonde transformation socioculturelle :
aujourd’hui, la production, l’édition et la diffusion d’une information ont un coût extrêmement
bas sur le Web. C’est à la portée des amateurs... Jusqu’à présent, nous étions habitués à
des médias puissants et prescripteurs, où la place occupée par celui qui parle et celui qui
écoute était claire et immuable. Désormais, nous sommes dans un univers foisonnant et
étrange, où celui qui écoute a aussi envie de parler. L’heure est au média
conversationnel. »
Web 2.0, internet « participatif », journalisme « citoyen » ou
« collaboratif »…
Le média de demain sera-t-il « Pro-Am », c’est-à-dire réalisé tout à la fois par des
professionnels et des amateurs24 ? Telle est la question qui a couru, en mars 2007, les
Muller est, par ailleurs, secrétaire général de la FILPAC-CGT, dite « Fédération du Livre ».
24
Charles Leadbeater et Paul Miller, The Pro-Am Revolution, Demos, Londres, 2004.
15
premières « Assises du journalisme » (Lille) et les « Rencontres du cinquième pouvoir »
(Saint-Denis).
Il n’est effectivement plus possible de passer sous silence le phénomène protéiforme
de la soi-disant « révolution communautaire » du web 2.0, lorsque plus de 112 millions
de personnes sont « membres » inscrits de MySpace, devenu en quelques mois le deuxième
site le plus fréquenté au monde, après Yahoo !, lorsque NowPublic, créé en 2005, fédère
aujourd’hui 127 000 « reporters citoyens » dans 140 pays et dans plus de 4 000 villes,
lorsque AgoraVox, lancé en mai 2005 par la société de veille parisienne Cybion, affiche 1,2
million de visiteurs par mois (lors de la campagne électorale du printemps 2007).
Il est d’ailleurs fort probable que l’expansion du web 2.0 soit une « tendance
lourde », pour reprendre les termes d’une analyse du sociologue Jean-Claude Burgelman
(Institute for Prospective Technological Studies, Commission européenne) qui explique :
« Sociologiquement, ce que nous observons n’est déjà plus un épiphénomène, mais une
tendance lourde. D’autant plus que nous vivons dans un monde beaucoup plus mobile, où
chacun a besoin de se sentir en communauté… Sans compter que d’ici cinq à dix ans,
tous nos appareils électroniques communiqueront ensemble. La vitesse et les débits de
connexion vont augmenter. On peut donc imaginer que les communautés virtuelles vont
prendre de l’ampleur. » (Le Monde, 23 octobre 2006)
Consécration suprême : Le 18 décembre 2006, Time Magazine a choisi « les
internautes » comme personnalité de l’année 2006. Depuis sa création en 1926, c’est la
huitième fois que la personnalité de l’année n’est pas une personne en particulier, mais un
groupe de personnes. Le magazine américain a souhaité rendre ainsi hommage à « la
multitude d’internautes anonymes qui a pris le contrôle de l’information sur le web grâce aux
applications web 2.0 », dixit WikiPédia (200.000 auteurs en 2006)...
L’intrusion particulière du web 2.0 dans le secteur de l’information (presse)
peut être rapidement évoquée, afin d’évaluer, essentiellement, les potentialités et
aussi les risques de l’offre de « participation » faite par un nombre croissant de sites
de journaux à leurs lecteurs internautes.
Au commencement était le blog, pourrait-on dire. Apparus en 1999, utilisés par des
journalistes depuis 2003 (reporters embedded de la BBC, lors de la guerre en Irak), les
blogs de journalistes, d’invités des rédactions et de lecteurs ont désormais pignon sur sites
de nombreux quotidiens. Citons, entre autres, le blog permanent de Pierre Assouline (« La
république des livres »), hébergé par le site du Monde, ou celui de Bruno Frappat (« A vif »),
tenu sous la bannière internet de La Croix. (Lire, en annexe, le très dense article de Dana
Hull, sur l’avènement des blogs dans la presse américaine).
Sont venus, dans la même foulée, les forums et les tchats, premiers formats de
participation des internautes, puis les réactions directes aux articles et les commentaires,
votes, recommandations… En mars 2007, Jacques Espérandieu, directeur de la rédaction
du Journal du Dimanche, promeut ainsi la mutation du site internet de son titre en véritable
quotidien en ligne : « Les trois gros plus du JDD : les blogs et vidéos de nos reporters ;
l’opinion des Français grâce aux sondages qui ont fait la réputation du journal ; la possibilité,
ouverte aux internautes enfin, de réagir, de participer, de s’exprimer. » Le modèle du
« journalisme citoyen »25 fait donc des émules, et parfois des ravages, dans le sillage des
succès d’Ohmynews, de Slate, de Netzeitung, d’AgoraVox (lancé en mai 2005), de
MySpace, de YouTube ou, peut-être, de Rue89, pour ne pas parler de tous les « wikis »…
Aujourd’hui, sur certains sites de grands médias, apparaissent les échanges de
vidéos produites (et visionnées) par les internautes. Depuis juillet 2006, CNN propose un
service en ligne de partage de contenus inspiré de YouTube : les internautes s’y expriment
par des billets, des photos et aussi par des reportages vidéos… En France, TF1 (Wat) et M6
(Wideo) copient la formule. A noter que DailyMotion, entreprise française, comptait 15,5
millions de visiteurs uniques dès novembre 2006…
25
Le terme a été inventé par le journaliste américain Dan Gillmor, en 2004, dans son livre We the media.
16
Expérience régionale particulièrement audacieuse, le Dauphiné libéré, stimulé par la
campagne présidentielle, a propulsé Quelcandidat.com, « média entièrement
participatif » qui permettait aux internautes de « s’exprimer, d’envoyer leurs informations, de
donner leur avis aux côtés des articles des journalistes professionnels et des dépêches
d’informations » (promo du site)26. Le journal rhône-alpin a aussi inventé le concept de
« village reporter », premier blog « collaboratif » réalisé depuis le petit village de La Murette
(Isère), où un journaliste travaille avec les habitants pour réaliser un reportage interactif. Le
contenu est rédigé par le journaliste selon les suggestions des habitants et des internautes...
A noter que c’est La Dépêche du Midi qui peut revendiquer d’avoir été le premier
quotidien français à avoir lancé, en septembre 2006, un site d’informations entièrement
alimenté par les contributions de ses lecteurs internautes (textes, photos, puis vidéos) :
www.madepeche.com...
Plus massive est, aujourd’hui l’offre de publication de blogs de personnalités
intellectuelles, politiques ou expertes, « invitées » ou « hébergées » par les sites de
journaux. Bien entendu, la campagne présidentielle fut une bonne occasion pour tester la
formule. L’expérience la plus spectaculaire fut l’initiative éditoriale du Nouvel Obs qui invita,
sous sa bannière, dix intellectuels à tenir leur journal en ligne. En complément des carnets
rédigés par les journalistes maison, le premier invité du nouvelobs.com a été Michel Onfray,
dont le blog a été lancé le 10 février 2007. D’autres personnalités de gauche ont très vite
suivi. Cette liste n’entendait pas refléter exactement sa ligne éditoriale du journal. « C’est
plutôt une famille », précisait Patrick Fiole, rédacteur en chef du site. « Une famille
étendue », complétait le directeur de la rédaction, Guillaume Malaurie, pour qui les bloggers
invités forment une intelligence collective. Leurs « carnets de notes » ont stimulé
l’audience du site de l’hebdomadaire, dont le total des blogs enregistre en moyenne 12 000
visites quotidiennes.
Au journal gratuit 20 Minutes, une autre forme de participation a été inaugurée le 20
janvier 2007 : le blog présidentiel collectif, mêlant, à raison d’un billet hebdomadaire pour
chacun, réflexions de chroniqueurs maison, de bloggers chevronnés, d’experts, de militants
et de représentants de partis. Sur le site de Libération, plusieurs blogs sont apparus pour la
campagne ou ont été montés sur la page d’accueil à cette occasion. Parmi eux, celui d’un
jeune professeur à l’Institut d’études politiques, qui décryptait le sens des mots en politique,
celui écrit par des observateurs européens, le cyber-fruit de quatre économistes ou encore le
« journal » signé par deux profs en ZEP.
Enfin, dans la séquence présidentielle du site lemonde.fr, trois blogs ont été mis en
évidence, jouant la carte du multimédia : celui du sociologue Cyril Lemieux analysait le
traitement médiatique de la campagne ; « Un monde de sons », cosigné par deux
journalistes qui s’intéressaient à l’univers sonore et déclaratif des candidats ; un blog visuel
du photographe Ludovic Maillard. Du 26 février au 20 mars 2007, ces trois blogs ont totalisé
250.000 pages vues. (Le Monde, 29 mars 2007)
Cette année (2007), la dernière mode est, très nettement, le journalisme
« participatif » (« participatory journalism »). En France, Rue89, projet mûri en janvier
2007, peut être considéré comme le premier site d’information collaborative ou
participative. Abandonnant le mirage du « journalisme citoyen » les créateurs de Rue89,
issus de Libération, revendiquent l’encadrement éditorial de la participation des
internautes. Au moins trois ou quatre autres projets de ce type ont été récemment lancés en
France: Youvox, Obiwi, Cafebabel et, depuis le 9 septembre, lepost.fr (« Toute l’actualité
minute par minute », rien que ça !), lancé par Le Monde interactif27. Les deux derniers sites
26
L’expérience a été dirigée par Benoît Raphaël (Le Dauphiné libéré, puis groupe Le Monde pour « lepost.fr » ;
blog : « Demain tous journalistes ? » : http://benoit-raphael.blogspot.com/)
27
Créé par Le Monde interactif, filiale des groupes Le Monde et Lagardère, ce site espère drainer l’intérêt d’un
lectorat « plus jeune » et « moins élitiste » que celui du Monde. Le site (présenté comme « le mix de l’info ») est
pour le moment en phase bêta. Les informations ne sont ni organisées, ni hiérarchisées, ni thématisées. On peut
par exemple y lire un article sur des profanateurs néonazis, suivi d’un zoom sur le rugby, d’une anecdote sur les
ex-petits amis de Pamela Anderson, puis d’un focus sur les problèmes rencontrés par les étudiants handicapés
lors de leur rentrée universitaire. Il s’agit apparemment d’un choix réfléchi, puisque Dao Nguyen, directrice
17
se positionnent sur le créneau du magazine. Youvox affiche une stratégie d’agrégation de
billets en provenance de blogs. Animés par des professionnels de l’information, tous
semblent avoir compris que l’on ne peut plus fonder un projet éditorial sur la seule
contribution des internautes ou sur l’agrégation de contenus tiers. A la manière du coréen
Ohmynews, ils développent un encadrement professionnel, ou semi pro, et une proportion
affichée de productions exclusives. Ces sites d’information participative se distinguent les
uns des autres par des proportions différentes de contenus exclusifs, d’encadrement pro,
d’agrégation de contenus tiers, de blogs de lecteurs, de gadgets web 2.0, de positionnement
sectoriel ou généraliste (lire aussi le point 4 des Annexes)…
Dans le « mixeur » du petit dernier, LePost.fr, on trouve à la fois des contenus
produits par la rédaction et des contenus produits par les internautes, en un flux non
hiérarchisé et non thématisé. Une info succède à l’autre, presque « minute par minute ».
Exemple : lundi 10 septembre, 17 h 52, un article est en ligne, titré « Un suicide toutes les
trente secondes dans le monde », signé lepost, donc écrit par un membre de la rédaction ; à
17 h 43, « Crée ta Jet Set en 4 leçons », par un « posteur », donc un rédacteur issu de
l’extérieur. « Le Post expérimente ainsi le dialogue et le partage de données entre un site et
son audience, mais aussi au sein de son audience », explique le communiqué de presse.
Les utilisateurs ont le loisir de créer leur espace perso et leur groupe de discussion.
Le nouveau venu est accueilli par « Le coach ». Comment « poster », insérer une
image, personnaliser son espace perso, entrer dans le top (le participatif marche à la
popularité), faire une interview vidéo ? LePost.fr se veut pédago, populo, ludique, sans doute
dans l’idée d’attirer un public jeune, en offrant des fonctionnalités techniques innovantes.
Autre site communautaire tout nouveau, ouvert le 6 septembre, BibliObs
(bibliobs.nouvelobs.com). Ce premier satellite communautaire du nouvelobs.com est dédié
aux livres, mais d’autres thématiques sont en préparation, comme Conso et Ile-de-France.
« On vit des angles morts terribles dans un hebdomadaire, explique Jérôme Garcin,
directeur adjoint de l’ Obs . Quand on a suscité le débat sur les Bienveillantes de Jonathan
Littell l’année dernière, on ne pouvait pas alimenter rapidement avec des contributions
d’historiens ou de lecteurs. Le temps réel le permet. » Le livre de Yasmina Reza fournit le
débat de cette rentrée ( « Que nous apprennent les écrivains des présidents ? » ).
BibliObs se présente comme une fusée à trois étages : les articles de la rédaction,
des interventions d’experts (invités, professionnels du livre comme éditeurs, libraires et
bibliothécaires) et les points de vue des internautes, qui ne sont pas cantonnés à commenter
mais à qui on offre de soumettre des articles, des photos et des vidéos.
Ce triptyque ressemble à celui de Rue89, site d’information participatif lancé le 6 mai
et qui a assuré le développement de la plateforme Bibliobs. Le participatif entre dans l’ère
industrielle. (Libération, 11 septembre 2007)
A l’étranger, l’exemple d’El Pais mérite d’être évalué. En mai 2007, le site du
quotidien espagnol a conçu, durant plus de quinze jours et dans le cadre d’élections
municipales à fort enjeu politique national, un véritable « mix » éditorial d’écrivains,
d’éditorialistes, de lecteurs, de journalistes, de bloggers… A la mi-juillet suivante, le succès
de l’opération était évident : les chiffres publiés alors par Nielsen/NetRatings, pour le mois de
mai, montrait que les visiteurs uniques de elpais.com étaient 1.200.000 en plus qu’en avril
(+24%), soit 5.649.000 au total !
Mais l’enthousiasme, parfois primaire, pour le « participatif » ou le « citoyen »
est heureusement tempéré par quelques grands professionnels de l’information qui
n’injurient pas l’avenir pour autant. Citons, par exemple, Jean-Pierre Elkabbach, président
d’Europe 1 :« Le Web 2.0 cacophonique, mal intégré, peut amener une intolérable confusion
entre l’information, la communication et l’opinion. Un formidable bond en arrière. Les foules
ne sont pas toujours sages, elles appellent parfois au lynchage et peuvent être plus
générale du Monde interactif expliquait à nos confrères des Echos : « Il n’y a pas de logique éditoriale dans la
présentation du site »… LePost.fr espère vivre des ressources de la publicité. La rémunération des internautes les
plus « journalistiquement pertinents » n’a pas encore été clairement définie (voir nos Annexes).
18
conformistes qu’il n’y paraît ! La profusion de faits ou d’opinions approximatives crée
parfois la confusion... et une menace pour la démocratie que nous ne pouvons accepter.
(…) L’information, elle, ne souffre pas l’à-peu-près. Le journalisme est un métier : il ne
consiste pas à ramasser les contenus que d’autres ont bien voulu produire. A quoi servent
des journaux qui n’apportent pas de valeur, n’en disent ni plus ni mieux que ce qu’on peut
trouver ailleurs avec un bon moteur de recherche ? (…) Plus que jamais, c’est le traitement
et l’honnêteté de l’information qui font la différence. C’est à sa source qu’il faut aller
chercher l’actualité, pas dans la copie de l’existant ni dans la répétition... »
Pourtant, le patron d’Europe 1 ne ferme pas la porte à l’internet, loin s’en faut. « Que
devient le métier de journaliste quand l’internet de deuxième génération, ce fameux Web 2.0,
permet à chacun de prendre part au débat ? », s’interroge-t-il, afin de nous livrer quelques
pistes de réponse : « La créativité28 est à la base de tout, comme si chaque journaliste
devenait lui-même un moteur de recherche en dénichant les histoires inédites et en leur
donnant l’exposition qu’elles méritent. Mais c’est surtout en devenant des "modérateurs"
que les journalistes réinventent leur métier29. Ils aident à faire le tri entre toutes ces paroles,
à mettre de l’ordre dans la jungle des contenus. Ainsi, chacun peut-il contribuer au débat, sur
des bases solides. Grâce aux forums, aux blogs et à l’internet participatif, les journalistes
peuvent multiplier leurs sources et leurs angles. Ils affinent la pertinence de leurs analyses et
la véracité de leur propos. (…) La France est, après les Etats-Unis, le pays le plus actif en
termes de blogs ouverts par habitant. Nous disposons là d’un incroyable observatoire de la
société, d’un révélateur de notre époque et de notre pays. (…) Les contributions qui y sont
postées et les discussions qu’elles amènent offrent une dimension inédite à la démocratie. »
(Le Monde, 4 janvier 2007)
Nous épargnant de commenter The Cult of the Amateur ; How today’s Internet is
destroying our Culture, du polémiste réactionnaire Andrew Keen, livre qui fait « beaucoup de
bruit pour rien » en ce moment, consultons, à nouveau, Antoine de Tarlé : « En réalité,
quand on pénètre dans le magma des blogs dans sa forme la plus organisée, c’est-à-dire,
les espaces ouverts par les médias traditionnels sur leurs sites, on y trouve peu d’idées
originales et guère de révélations. Ce constat n’a rien de surprenant. Vérifier un fait, rendre
compte d’un événement petit ou grand, analyser une situation politique sont des activités qui
exigent un travail considérable et à temps plein. Les journalistes professionnels ne
l’accomplissent pas toujours de manière satisfaisante et ils ne doivent jamais être au dessus
de légitimes critiques. Ils savent cependant qu’en cas d’erreur répétée, ils risquent la
sanction des lecteurs qui ont toujours la possibilité de les abandonner et d’aller voir ailleurs.
Or ce type de sanction n’existe pas dans la blogosphère. (…) En matière d’information, il
n’existe pas de demi ou de quart de vérité mais des faits vérifiés ou erronés. C’est le
message que tous ceux qui se préoccupent de l’avenir de nos sociétés pluralistes ne doivent
cesser de répéter et d’enseigner dès l’école aux futurs citoyens. »30
28
Pierre Manent, l’excellent historien humaniste du libéralisme et de la pensée de Tocqueville, développe une
réflexion très intéressante sur les conditions de la créativité, voire de la production (originale), en matière de
communication (Cours familier de philosophie politique, Fayard, coll. L’Esprit de la Cité, 2001, pp. 160-161). Il
relève ainsi la contradiction entre la diffusion massive et immédiate, quasi universelle, des « choses » et des
idées, et la « concentration » nécessaire à la production originale, voire à celle d’une œuvre authentique.
29
Cette affirmation, lourde de conséquence professionnelle, mérite d’être soulignée, voire éventuellement
dénoncée, car elle oriente le journalisme vers un traitement de l’événement en deuxième instance. L’information
plus ou moins informelle livrée par le public deviendrait, à suivre Elkabbach, le matériau de base du journalisme,
en substitution des faits ! Olivier Trédan, chercheur à l’IUT de Lannion – Université de Rennes I, membre du
Réseau d’études sur le journalisme, note déjà cette déchéance du métier : « On constate un déplacement de la
figure traditionnelle du journaliste reporter vers un rôle de médiation, de validation. On laisse le public produire
dans le média, mais en ayant quand même le dernier mot. (…) La validation, le commentaire, la mise en
perspective restera (sic) le domaine du journaliste. » (Propos recueillis par Frédérique Rousselle, Libération, 20
août 2007)
30
Antoine de Tarlé, « Presse et internet. Une chance, un défi : enjeux économiques, enjeux démocratiques », Les
Cahiers En Temps Réel, n° 26, octobre 2006, page 21.
19
Cependant, Antoine de Tarlé ne parvient pas vraiment à formuler une réponse
massive au chaos libertarien31 qui légitime la logorrhée numérique et mondialisée32 du web
2.0, sauf l’affirmation (pas seulement déclarative) de la qualité de l’information journalistique
professionnelle. C’est avec un peu de désarroi qu’il relève, à juste titre, l’idéologie latente
des bloggers militants, sur l’air de « on nous cache tout, on nous dit rien »33. Aussi,
préconise-t-il modestement la « défense du professionnalisme face à un discours
démagogique mais très populaire chez les bloggers selon lequel la collaboration spontanée
de centaines de milliers d’individus disséminés dans le monde entier permettrait de vaincre
l’autocensure et la manipulation permanente des médias traditionnels ». Car, « selon ce
discours, les internautes, sans pour autant se substituer aux journalistes, apporteraient, dans
de nombreux cas un éclairage sur une vérité qu’on ne cesse de leur dissimuler ou qui est
déformée en permanence pour satisfaire d’obscurs intérêts économiques ou politiques ».
Plus opérationnelle que la trop informelle « défense du professionnalisme », une
solution collective (paritaire ?) pour séparer le bon grain de l’ivraie semble faire peu à peu
son chemin au sein de différentes institutions publiques (Conseil économique et social,
septembre 2001, « Rapport sur les effets des nouvelles technologies sur l’industrie de la
presse » ; Forum des droits sur internet ; Commission nationale de déontologie des services
de communication au public en ligne, 2007), patronales (GFII : www.gfii.asso.fr, GESTE :
http://www.geste.fr, SPMI, FNPS, rapport Lancelot en 2005, rapport Tessier en 2007 : pp.
63-69) et syndicales (« Rapport Muller » du Conseil économique et social, juillet 2005 ;
FILPAC-CGT : Projet fédéral, VIe Congrès, Lille, 5 au 8 novembre 2007, pp. 12 et 13,
notamment) : la « labellisation » ou la « certification ». En juillet 2005, le Conseil économique
et social faisait cette proposition : « Gagner la confiance du lectorat, c’est également donner
des garanties sur la crédibilité et la sincérité des contenus de la presse, quel que soit son
support, papier ou électronique. (…) Cette procédure peut s’apparenter à une démarche
qualité certifiée par un label. »34
Ironie du web 2.0, depuis août 2007, un site « participatif », NewsTrust, s’érige en
« gardien du bon journalisme ». A la différence des sites "Digg-like" qui se contentent de
permettre à un utilisateur d'évaluer positivement ou négativement un article, sur la base de
son « goût » (intérêt) pour le sujet ou le texte, NewsTrust se propose d'utiliser « l'intelligence
collective des lecteurs-citoyens » pour améliorer la qualité « technique » des articles, en
utilisant une batterie de critères dits « objectifs » : qualité générale de l'article ; quantité
d'informations contenues ; impartialité ; mention et qualité des sources ; contextualisation ;
confiance dans le site éditeur… NewsTrust est, paraît-il, à but non lucratif.
31
Noam Chomsky, Robert Nozick… Cf. Christian Delacampagne, La Philosophie politique aujourd’hui, Seuil,
2000, pp. 146-150.
32
Ne parlons même pas, ici, des dérapages incontrôlés de certains, sur la toile, étrangement tolérés, voire
défendus, par les idolâtres libertaires de l’internet. Sur la fameuse « affaire Yahoo ! », la réaction des
associations antiracistes, ses suites judiciaires et politiques, lire : Mark Knobel et Antoine Peillon, « Des barbelés
dans la pensée », Libération du 28 novembre 2000 et Tribune juive du 7 décembre 2000 : reproduit en annexe.
33
Symptomatique, cet « Appel aux vrais journalistes » lancé par un certain Richard Patrosso, en juillet 2007, sur
AgoraVox, « le média citoyen » : « Il n’y a plus de doute : aujourd’hui la société ne fait plus confiance aux
journalistes. Dans l’esprit du public, un journal est un prospectus d’un homme politique puissant ou d’un grand
patron bien connu et un journaliste réputé est un ami ou un admirateur de telle ou telle personnalité. Les citoyens
n’ont donc plus le sentiment d’être informés, mais manipulés. (…) Avec l’arrivée d’internet, une nouvelle forme
de journalisme est née. (…) Cette forme de journalisme développé par les internautes volontaires a pour nom le
journalisme citoyen… » (http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=26917) Un écho à la prise de
conscience d’une « crise du journalisme » analysée, entre autres, par Hervé Brusini, directeur délégué à
l’information de France 3 : « AgoraVox, c’est un signal d’alarme pour notre profession. On nous dit : Nous ne
nous reconnaissons plus dans ce que vous écrivez, vous avez rejoint la sphère de la suspicion, de la politique.
Vous ne parlez pas de notre vérité, de notre quotidien, où nous avons des problèmes… Enfin une technologie
nous permet de hurler notre vérité. » (Libération, 23 mars 2007) Voir aussi le dernier sondage sur la confiance
des Français dans les médias (TNS-SOFRES / La Croix, février 2007) http://www.tnssofres.com/etudes/pol/140207_confmedias_r.htm
34
Michel Muller (rapporteur), Garantir le pluralisme et l’indépendance de la presse quotidienne pour assurer
son avenir, Avis et Rapport du Conseil économique et social, Journaux officiels, juillet 2005, page I-18.
20
La solution de régulation de l’information publiée sur le web sera-t-elle
l’autodiscipline, selon l’esprit ultra-libéral du rapport Tessier ? Ou, pis encore, dans
l’exploitation sans vergogne du narcissisme des bloggers et autres « correspondants » ou
« posteurs » du web 2.0, encadrés par des « pros », comme semble l’indiquer la floraison de
sites « collaboratifs » ? En avril 2007, Carlo Revelli, directeur d’AgoraVox, avouait : « Quand
j’ai lancé ce projet, je m’attendais à ce que les rédacteurs fassent remonter davantage de
faits et réalisent eux-mêmes de petites enquêtes. Force est de constater que beaucoup s’en
empare pour donner leur opinion. » Conclusion : « Jusqu’à présent, nous n’avions pas de
journalistes professionnels dans notre équipe, mais nous allons en recruter quelques-uns. »
(Le Figaro, 23 avril 2007) Une troisième voie est-elle encore possible ? L’affirmation
vigoureuse et rigoureuse de « l’exigence éthique » du journalisme professionnel est, de
toute façon, la pierre de touche d’une défense de l’information sur le web35.
Il peut être utile de rappeler, pour finir, la profondeur historique (et politique) du débat
sur le « professionnalisme » (ou, au contraire, le « partage citoyen ») de la diffusion de
l’information, pour en mesurer tout l’enjeu. Réfléchissant sur la floraison des « placards » sur
les murs de Paris, lors de la Révolution de 1848, et rêvant d’un « pouvoir spirituel, pouvoir de
tous », exercé par l’opinion publique, Auguste Comte estime que les affichettes des artisans
et ouvriers du faubourg Saint-Antoine furent les « seuls véritables journaux » et qu’ils
incarnaient « l’essence même de la presse ». Pour le philosophe positiviste, « une infinité de
journaux libres, (…) les cabarets et estaminets, les salles de réunions et les clubs seront
donc le véritable Parlement du peuple ». Cette utopie d’une opinion publique à la charge de
tous (droit et devoir) est associée à une défiance envers « les journalistes professionnels, en
général inféodés aux pouvoirs en place »36. Une défiance qui ne fut pas toujours sans
fondement, notamment dans certains contextes historiques du XXe siècle37…
Les blogs d’aujourd’hui ne portent-ils pas l’égalitarisme démocratique puissant des
placards de 1848 ? Certains intellectuels semblent le penser. Ainsi, François Ewald,
professeur au Conservatoire des arts et métiers le dit sans ambages : « Les journaliste
peuvent garder la nostalgie du temps où ils pouvaient encore croire faire la démocratie, ce
temps est sans doute déjà dépassé ; exactement comme la démocratie de représentation
est bousculée par la poussée d’une démocratie plus directe et participative : l’ultradémocratie de Régis Soubrouillard. (…) Avec internet et les moteurs de recherche,
l’information ne se fait plus du haut vers le bas, d’une élite journalistique vers un peuple
dépendant et assoiffé d’une information rare et contrôlée, mais dans une capacité infinie de
communication latérale de chacun avec tous. La grande révolution de la démocratie en cours
est que le citoyen trouve avec internet l’espace et le moyen d’une liberté d’expression
affranchie de tout pouvoir, y compris de ce pouvoir de la presse censé l’affranchir des autres
pouvoirs. »38
Convergences numériques
35
François Ernenwein, « Tous journalistes », pages 12 et 13, « Forum & débats », de La Croix du 29 juin 2007.
Juliette Grange, Auguste Comte ; La politique et la science, Odile Jacob, 2000, pp. 129-131.
37
Cf. l’extraordinaire Schmock ou le triomphe du journalisme ; La grande bataille de Karl Kraus, de Jacques
Bouveresse (Seuil, 2001) : Karl Kraus (1874-1936) a publié, à Vienne, depuis le début du mois d’avril 1899
jusqu’en février 1936, une revue satirique intitulée Die Fackel (Le Flambeau), dont il est devenu à partir de 1912
le seul auteur. Pendant toutes ces années, les satires et les polémiques, parfois féroces, de Kraus ont visé
essentiellement la presse, qu’il considérait comme responsable de la corruption en Autriche. A ses yeux, la
presse, en particulier libérale, n’est qu’un auxiliaire dévoué et indispensable dans le système du marché universel
qui est en train de s’instaurer. Et la corruption du langage, à laquelle elle contribue de façon essentielle, est
indissolublement liée à la corruption morale elle-même, dont elle constitue le symbole par excellence. Il n’est
pas exagéré de dire que Kraus a fourni la première critique des médias et des systèmes de communication
moderne qui soit réellement à la hauteur du phénomène. Jacques Bouveresse, professeur au Collège de France,
analyse minutieusement cette critique du journalisme, pour en montrer la pertinence et la modernité.
38
François Ewald, « Internet, la fin du journalisme ? », dans Enjeux – Les Echos, janvier 2007. Dans le même
sens : « Penser la société des médias », Le Débat, n°s 138 et 139, Gallimard, 2006.
36
21
Selon le premier « Observatoire de la convergence média », publié le 14 mai 2007,
par Ipsos, 81% des internautes français « pratiquent la convergence », c’est-à-dire ont
recours à un média pour en consulter un autre, et 26% le font « tous les jours ou
presque ». (La Tribune, 30 mai 2007) :
http://www.ipsos.fr/CanalIpsos/articles/2231.asp.
Plus précisément, ce premier « observatoire » relève que 31% des internautes lisent
des quotidiens ou magazines au format électronique (PDF) et que 23% le font même
quotidiennement. Globalement, 46% des internautes lisent des articles sur les sites de
presse (avec ou sans téléchargement de fichier PDF), ce qui est tout de même important.
Par ailleurs, les 2/3 des sites web de la PQN (presse quotidienne nationale) proposent
désormais (juin 2007) de la vidéo…
Dans les rédactions françaises, la mise en œuvre du journalisme bi-média, voire
multimédia, se fait plus précautionneusement qu’au Wall Street Journal, qu’au Financial
Times ou qu’au Daily Telegraph… Cependant, la pente est très volontairement prise à La
Tribune, à Libération, à L’Express (sous l’impulsion de Christophe Barbier), à LCI et… au
CFJ/CFPJ (sous la conduite de Fabrice Jouhaud et Valérie Payet), entre autres. Mais,
attention : la précipitation dans la formule bi-média a, par exemple, gravement déstabilisé,
en 2006, la rédaction du Daily Telegraph, et un ancien rédacteur en chef du Daily Express,
Richard Addis émet un avertissement intéressant : « Les journalistes qui seront capables de
passer rapidement de l’écrit à la vidéo, ou du web à l’audio, produiront un type de
journalisme qui n’a aucune valeur aujourd’hui : de l’info de base, en continu, déjà accessible
gratuitement. L’avenir des journaux est au contraire dans des textes apportant une valeur
ajoutée en offrant des analyses, de la personnalité et de l’esprit. » Ce que notre amie
Danielle Darras, en tant que secrétaire générale du SNJ souligne : « Pour que le passage
au multimédia ait une chance de sauver la presse, il faut se focaliser sur la qualité des
contenus. » (Stratégies, 9 novembre 2006)
Ces avertissements ne semblent pas avoir refroidi l’ardeur multimédia du directeur
des rédactions du Parisien, Vincent Régnier, lequel déclarait le 27 juin dernier (Journées
du CFPJ) : « Le parti que nous avons pris : transformer la rédaction en rédaction plurimédia.
C’et à dire que tous les journalistes sont potentiellement tous contributeurs, c’est à dire 350 à
380 journalistes. Nous négocions avec les syndicats (notamment pour le droits d’auteur), et
nous nous sommes fixés la fin de l’année (2007) comme date butoir. On a 12 personnes
dédiées, mais à terme, tout le monde est concerné. Nous avons créé une rédaction en chef
centrale opérationnelle multi-supports. On a beaucoup de retard, on a donc benchmarké. Le
modèle sur lequel on va s’appuyer est celui du Guardian, en Angleterre : une seule et même
rédaction. (…) Il faut qu’on rattrape le retard, notamment aggravé avec la version payante
qui a tari l’audience. »
Retard français… C’est en juin 2006 que le New York Times a annoncé le
rapprochement décisif de ses équipes éditoriales web et papier, afin de produire des
contenus qui seront déclinés sur plusieurs médias. En 2007, le Los Angeles Times place
son site internet en amont de toute son organisation éditoriale et « invite » ses journalistes à
produire eux-mêmes photos (numériques !) et vidéos. A la suite d’une enquête (janvier
2007), l’équipe du LAT préconise quelques « recettes » : mise en place d’une nouvelle partie
du site appelée « mylatimes.com » qui devrait permettre aux utilisateurs de personnaliser les
infos qu’ils reçoivent par e-mail ; utilisation intensive de la vidéo et partenariat avec une
chaîne de télévision locale ; développement de la partie "Your Scene" du site web, qui
permet de poster ses photos et ses propres infos : sa maison, son animal, ses sports favoris,
ses voyages, ses sorties et sa famille…
L’exemple paroxystique d’intégration multimédia est, certainement, le Washington
Post, titre où le web contribue à hauteur de 15% au CA du titre, tandis que le site du Los
Angeles Times fait à peine 6% du CA du groupe (chiffres 2006). Le site internet est produit
par une rédaction séparée de 200 personnes. Les « rédacteurs » sont formés à la vidéo et
pratiquent une couverture hyper locale. Ainsi, Loudounextra.com couvre le county de
Loundoun, en Virginie. Cependant, le site est une référence politique nationale, grâce à
22
des bases de données uniques : l’une permet aux lecteurs de trier chaque vote du congrès
par membre, parti et même par signe zodiacal…
Le site web du Washington Post permet de commenter tous les articles, mais deux
« éditeurs », des logiciels et… les lecteurs modèrent toutes les réactions.
Ce flux ininterrompu de nouvelles fraîches est cité par beaucoup de bloggers, lesquels sont
cités dans une liste sur chaque article. Ce « cercle » de liens apporte des visites aux blogs,
lesquels rapportent à nouveau du trafic au Washington Post… Un tiers du trafic sur le site du
journal provient des blogs !
Plus sagement, le site du New York Times doit son incomparable succès39 à
certaines formules de convergence rédactionnelle forte. Il y a un correspondant du site web
dans chaque service, rompu aux technologies numériques, soit 14 personnes qui
rafraîchissent constamment le site. Leur « Continuous News Desk » poste entre 30 et 40
articles en moyenne chaque jour ordinaire, de 50 à 60 quand l’actualité se réchauffe. En tout,
le site emploie une cinquantaine de personnes.
Enfin, une étude menée par The Bivings Group (TBG) auprès du Top 100 (en
matière de diffusion) des journaux des Etats-Unis et concernant l’évolution de leurs sites
internet relève les faits suivants :
- Bond important de l’utilisation des flux RSS (+ 21% en 2007 / 2006) ;
- multiplication des blogs de journalistes (sur 95% des sites en 2007, contre 80% en
2006) ;
- explosion des vidéos (fournies par Associated Press ou originales) sur les sites de
ces journaux (92% des sites en 2007, contre 61% en 2006) ;
- un tiers des sites permettent aux internautes de commenter les articles ;
47% des sites du Top 100 n’offrent pas encore de contenus pour les téléphones ou autres
appareils mobiles.
Images à vendre
L’enquête Ipsos Insight – nouvelles Images (mars 2007) montre que plus de 80%
des internautes français ont déjà cherché des images sur le web. Surprise : la « vue
aérienne » est le principal type d’images recherché (Google Earth, Géoportail de l’IGN), avec
53% de citations, juste avant les recherches thématiques (52%).
Si les utilisations des images téléchargées sont multiples, la première raison,
invoquée par la moitié des internautes, est la personnalisation du fond d’écran de son
ordinateur. La deuxième est de l’ordre de la célébration : l’envoi d’e-cards est déjà une
pratique courante (4 personnes sur 10), au même titre que l’illustration d’un document
imprimé pour un évènement de type mariage ou anniversaire. Des différences selon l’âge ou
le sexe se retrouvent aussi dans leur utilisation. Á titre d’exemple, les jeunes créent des
jaquettes de CD ou de DVD, illustrent leurs blogs et, plus fréquemment encore, leurs travaux
scolaires ou universitaires.
Si, comme souvent sur internet, le gratuit règne, les « chercheurs d’images »
semblent tout de même prêts, et de plus en plus, à payer pour certains services. La
commande d’impressions via internet, par exemple, est une pratique qui s’installe
progressivement : 40% des interviewés ont déjà commandé en ligne des tirages de leurs
photos. Par ailleurs, et même s’ils n’ont pas encore tous franchi le pas, 60% (les jeunes
surtout) se déclarent prêts à acheter des images de type affiches, affichettes, grand tirage ou
format carte.
Un quart des « chasseurs d’images » a aussi commandé l’impression d’un album
photo composé en ligne, et 45% ont acheté des cartes de vœux imprimées et
personnalisées. L’intérêt des internautes ne se limite d’ailleurs pas aux images imprimées.
50% d’entre eux sont prêts à payer une image pour une utilisation numérique : par
exemple, pour personnaliser un téléphone portable, un site internet ou tout simplement pour
la regarder. Une image sur écran suscite en effet auprès de ce public autant d’intérêt
39
Site web de journal le plus visité dans le monde, avec 13 millions de visiteurs uniques et 476 millions de pages
vues en octobre 2006.
23
qu’une image imprimée. L’idée « qu’une image sur écran, c’est froid et impersonnel » est
rejetée par 6 personnes sur 10.
Librairies en ligne
En 2005, la vente par internet ne représentait que 3,2% du marché du livre, contre
18,1% pour l’ensemble des ventes par correspondance (estimations de l’institut GfK).
Cependant, la e-librairie connaît, depuis, une croissance annuelle de plus de 30% !
En 2010, 10% à 15% des ventes mondiales de livres se feront par internet. D’ores et
déjà, cette proportion est de 17% en Grande-Bretagne.
En France, Amazon et La Fnac se partagent les deux tiers de ce marché, suivis par
Alapage (20%), Price-Minister et Chapitre.com (livres d’occasion récents), Abebooks (livres
anciens), BDnet (bandes dessinées).
Deux phénomènes se développent sur le web : les précommandes de nouveautés,
de BD et de best-sellers prévisibles ; les achats de livres spécialisés (économie, droit…). A
noter, aussi, l’accès des petits et moyens éditeurs à la grande distribution, ainsi que le
développement rapide du marché de l’occasion. (Le Monde, 19 mai 2006)
(sans) Frontières ?
Une étude de la société comScore (mesure d’audience des sites web), réalisée en
avril 2007 (en pleine campagne électorale), relève que « malgré le caractère national de la
plupart des médias français (…), il est intéressant de constater qu’un pourcentage important
du public des sites de journaux français se trouve à l’étranger ». Concernant les sites de
journaux, 9 sur 11 étudiés enregistrent une fréquentation étrangère supérieure à 20% du
trafic (41% pour Le Figaro, 40% pour Le Monde). (Correspondance de la presse, 29 juin
2007)
En Grande-Bretagne, une étude comScore analogue réalisée pour le Royaume-Uni a
montré qu’environ 70 % des visiteurs des journaux anglais tels que Independent et Daily
Mail se trouvent en-dehors du Royaume-Uni !
Voici qui semble confirmer la pertinence du fantasme de « village global » collée sur
le web par ses promoteurs les plus béats. Mais, à y regarder de plus près, s’impose le fait
que les sites de journaux de tel ou tel pays, lorsqu’ils sont massivement consultés à partir de
l’étranger, le sont surtout par des expatriés et non par des étrangers. Et souvent par des
expatriés frustrés de ne pouvoir acheter la version papier de leur journal favori.
Cette observation doit encourager une réflexion sur l’idéologie fallacieuse du « de la
« globalisation » véhiculée par la culture web, à la fois ultralibérale et libertaire, les risques
que sa propagande fait courir à l’enracinement nécessaire de l’universel humain, la
confusion entretenue par les mass media entre « mondialisme » creux et « cosmopolitisme »
authentique. Pascal Bruckner a tracé le chemin de cette réflexion plus que jamais
nécessaire : « Tel le dictateur de Chaplin, jouant avec le globe terrestre comme l’enfant avec
son ballon, chaque spectateur (ou internaute) est invité à considérer la Terre come un seul
village dont tous les habitants lui seraient aussi familiers que ses voisins d’immeuble. Or
cette manière de nier les différences entre les peuples et les continents est le piège du
mondialisme qui est le vertige de la totalité quand le cosmopolitisme est le goût du
pluriel. »40
Sans foi ni loi !
La question de l’enracinement et du cosmopolitisme versus le mondialisme sous le
signe de Babel, à propos de la nouvelle « civilisation numérique », ne peut se résoudre sans
effectuer une approche anthropologique du sujet.
40
Le Vertige de Babel, Arléa, 1999, pp. 20-21.
24
Et pour aller (beaucoup) plus loin :
Audience et stratégie des acteurs en ligne (étude) - 10/07/2007
L’étude « Audiences et stratégies des acteurs en ligne face aux acteurs traditionnels du marché de la
diffusion des contenus », réalisée en décembre 2006 par INEUM Consulting pour la DDM, met
notamment en évidence le mouvement de migration des contenus numérisés de leur support
d’origine vers internet. A partir des transferts déjà constatés, l’étude annonce les évolutions à venir
pour les médias qui, aujourd’hui, sont encore les moins présents sur internet.
http://www.ddm.gouv.fr/article.php3?id_article=1239
En Temps réel a publié (octobre 2006) un cahier intitulé « Presse et internet - une chance,
un défi : enjeux économiques, enjeux démocratiques », rédigé par Antoine de Tarlé, ancien
directeur général adjoint de TF1, aujourd’hui directeur général adjoint de Ouest France et patron des
activités multimédia du groupe.
http://en.temps.reel.free.fr/cahiers/cahier26.pdf
La presse au défi du numérique : rapport de M. Marc TESSIER Le ministre de la culture et de la
communication, Renaud Donnedieu de Vabres, a reçu, lundi 19 février 2007, le rapport de Marc
Tessier, ancien directeur général du Centre national de la cinématographie, ancien président de
France Télévisions, et actuellement directeur général de Netgem Média Services, sur les conditions
d’évolution de la presse dans l’univers du numérique.
Le rapport Jouyet-Lévy (novembre 2006) : « L’économie de l’immatériel ; La croissance de
demain » (pour le
ministère de l’Econome,
des
Finances
et
de l’Industrie) :
http://immateriel.minefi.gouv.fr/images/stories/immateriel.pdf : Thierry Breton, alors ministre de
l’Economie, commanditaire du rapport, n’a pas caché son enthousiasme à la lecture de ce document :
« Le rapport Lévy-Jouyet va devenir le fil rouge de mon action, un carburant pour alimenter le
programme de ma famille politique »…
« Comment sauver la presse quotidienne d'information »
Présidente du groupe de travail : Martine Esquirou
RAPPORT - Août 2006
« Face à la concurrence féroce d'Internet et à la lourdeur écrasante des procédures industrielles et
des contraintes sociales, elle souffre aujourd'hui en France d'une grave désaffection dont témoigne
l'érosion de son lectorat. Et pourtant, chaque année, des centaines de millions d'aides publiques lui
sont octroyées. Sans aucun résultat. Refusant la résignation, le groupe de travail « Media » de
l'Institut Montaigne préconise l'adoption d'un véritable plan Marshall pour sauver la presse
quotidienne d'information. À cette fin, il formule onze propositions immédiatement applicables, qui
débouchent sur un modèle économique complètement renouvelé. »
18 août 2007 : « La révolution internet redistribue l’audience de telle sorte qu’elle a
bénéficié et continuera à bénéficier à quelques distributeurs, et à desservir les autres », résume
le centre Joan Shorenstein de l’université américaine d’Harvard. Le groupe d’étude sur la presse
et la politique a étudié le trafic de 160 sites web durant un an. Résultat : il existe des disparités
fortes entre les différents types de distributeurs d’actualité. Ainsi, les versions web des journaux
locaux - que ce soit dans des petites ou des grandes villes - ont perdu du terrain. Par contre les sites
liés aux journaux nationaux (New York Times, USA Today, etc.) bien connus ont gagné en
moyenne 10% d’audience sur l’année en question. Pas de quoi pour autant réjouir les "tycoons" de la
presse. D’autres profitent bien mieux de la vague internet. C’est ainsi que les portails mis en place par
les télévisions comme CNN, ABC, CBS, NBC et MSNBC ont vu leur audience grimper d’un tiers dans
le même laps temps. Mais le plus gros gain d’audience est pour les distributeurs d’actualité
nouvellement arrivés. Ces distributeurs n’ont rien à voir avec le métier traditionnel de la presse : ce
sont en effet Yahoo, MSN (*), AOL (**) et Google. L’audience de sources d’informations
« alternatives » connaît en effet un progrès fulgurant. En tête, aux côtés des moteurs comme Google
News et Yahoo!, figurent les sites Digg, Reddit et Newsvine. Ces agrégateurs d’articles permettent
25
aux internautes de signaler, voter et commenter les informations repérées sur la Toile. Depuis un an,
leur audience explose !
Face à l’essor de cette « information communautaire » (social news), la moitié des
30 premiers quotidiens américains propose désormais à ses lecteurs de référencer directement un
article sur Digg, Del.icio.us, Slashdot et même Netscape, relancé en juin dernier par AOL sous forme
d’agrégateur. « Notre relation avec des sites comme Digg, Newsvine et Facebook fait partie de notre
stratégie d’ouvrir notre contenu à de nouveaux lecteurs, explique Vivian Schiller, directrice générale
de nytimes.com. Notre mission est de rendre notre journalisme accessible aux lecteurs ayant les
mêmes centres d’intérêt, grâce à internet. » (Le Figaro, 22 août 2007)
(*) Actionnaire de MSNBC
(**) Société parente de CNN via la maison mère Time Warner
http://www.ksg.harvard.edu/presspol/index.htm
26
3/ Quotidiens en ligne
a- Liste des sites étudiés (PQN, PQR, international, divers)
PQN : La Croix, Le Monde, Le Figaro, Libération, 20 Minutes, Le Parisien /
Aujourd’hui, L’Humanité, L’Equipe, Les Echos, Metro, Matin Plus, Direct Soir.
PQR : Ouest France, Le Bien public (Dijon), Le Télégramme, La Voix du Nord,
La Nouvelle République (Tours), Le Progrès (Lyon), La Provence (Marseille), La
Montagne (Clermont-Ferrand), Le Dauphiné (Grenoble), La Dépêche du Midi
(Toulouse), Midi libre (Montpellier), Nice Matin (Nice), Sud Ouest (Bordeaux),
L’Est républicain (Nancy), L’Alsace (Mulhouse), Les DNA (Strasbourg), Le
Républicain lorrain (Metz), Le Courrier picard (Amiens).
International : New York Times (US), Washington Post (US), El Pais (Sp),
The Gardian (GB), Le Temps (Ch), La Repubblica (It), Die Süddeutsche Zeitung
(D), Haaretz (Il).
Divers: Le Nouvel Obs, TF1, Rue89, AgoraVox, CityVox, Le JDD, Le Point,
Courrier international, Ipernity, MySpace, Flickr, YouTube, DailyMotion et
L’Internaute.
b- Grille de « lecture » : plusieurs groupes de questions ont
structuré la grille de lecture des sites observés et, en
conséquence, le tableau (Excel) produit
Une première évaluation, très subjective, ou du moins perceptive, porte sur la
maquette et l’ergonomie de la « home page » de chacun des sites, ce qui permet
aussi de saisir presque immédiatement quels sont les éléments éditoriaux
principalement mis en valeur.
Deuxièmement, l’accès plus ou moins gratuit aux contenus proposés en page
d’ouverture, ainsi que l’envahissement plus ou moins massif par la publicité sont,
certes, des indications fortes sur l’économie de chaque site, mais ont aussi un
incidence fondamentale sur son identité éditoriale. Il m’a paru difficile de ne pas
relever les différentes options commerciales (y compris les « boutiques » en
ligne) mises en œuvre par les éditeurs.
27
Troisièmement, et c’est bien entendu le cœur de l’étude, j’ai tenté de réaliser
une évaluation des différentes formules rédactionnelles, au regard des us et
coutumes, règles et genres fondamentaux du journalisme. Selon le premier
principe du « quotidien » et du « news magazine », c’est-à-dire le fameux
« what’s new (and important) ? »41, la grille de lecture s’est portée prioritairement
sur la mise à jour (updating) des « actualités » portées en ligne et sur leur
originalité (voire, leur exclusivité), y compris vis-à-vis des informations publiées
par les titres (papier) d’origine. C’est ici que peut s’évaluer le « jeu » éditorial
entre les éditions papier des titres et leurs sites web (colonnes J à S du
tableau de synthèse joint).
L’enrichissement, plus ou moins massif, des informations principales par des
documents et d’autres éléments (infographies, photos, documents audiovisuels…) a été estimé, car il est un des « plus » naturels du média électronique.
Ensuite, l’étude a aussi tenté d’estimer l’organisation plus ou moins rigoureuse,
voire inexistante, des sites selon les principaux « genres » journalistiques
(enquête, reportage, dossier, interview, portrait, brève…)42 et les rubriques
traditionnelles. Enfin, il m’a semblé important de relever les différents modes
d’exploitation de données à forte valeur d’usage (archives, infos pratiques).
Quatrièmement, dans le cadre d’une « montée » générale du multimédia
(convergence numérique), il m’a paru nécessaire de recenser les différentes
solutions d’intégration de dessins, photos, infographies, documents sonores et
audio-visuels, en tous formats, dans les pages web des sites de quotidiens
d’information. Il est intéressant de noter que certains sites de bonne qualité
ouvrent, d’ores et déjà, l’accès à de véritables « galeries » de reportages photos
ou « chaînes » audio-visuelles (télévision par l’internet).
Cinquièmement, la transmission des données étant immédiate par l’internet,
un certains nombres de services de télé-information (newsletters, mobiles,
RSS…) sont souvent proposés, qui s’ajoutent aux publications sur le site. Au-delà
des
opérations
commerciales
qui
sont
spectaculairement
simplifiées
(abonnements à géométrie variable), l’interconnexion numérique des réseaux
(# de la « convergence numérique » des contenus) permet la diffusion
41
Michel Voirol, Guide de la rédaction, CFPJ, 1990, p. 11 : « Si l’on devait donner une définition du
journalisme en trois mots, on n’en trouverait pas de meilleure que celle-ci : le journalisme, c’est “quoi de
neuf ?”. Quoi de neuf, quoi d’intéressant dans ma ville, en France, dans le monde ? »
42
Idem, pp. 37 et suivantes.
28
d’actualités par téléchargement et/ou courriels (éditions numériques, newsletters
profilées), sur les téléphones mobiles, par fils RSS… Autant de modes de
transmission qui comprennent, en général, une personnalisation des champs
d’information, capacité diversement utilisée, pour l’instant, par les éditeurs.
Sixièmement, dans le cadre de la croissance accélérée de l’internet interactif
(le fameux « web 2.0 »), il m’a semblé impératif de regarder précisément toutes
les propositions de participation (plus ou moins primaires !) mises en œuvres
par les sites de quotidiens, que ce soit à destination des lecteurs (abonnés ou
pas), de personnalités extérieures aux rédactions (« invités », « experts »,
« pros »…) et même de journalistes attachés aux titres parents : votes,
commentaires, forums, blogs…
Enfin, sans prétendre que cette grille de lecture soit juste et parfaite, un
septième et dernier groupe de renseignements porte sur les différentes mesures
possibles d’audience. Etudiant les sites internet de quotidiens, théoriquement
porteurs de l’actualité la plus vive, il était significatif de mettre en évidence les
performances de fréquentation lors d’un événement majeur (résultats du second
tour de l’élection présidentielle, le lundi 7 mai 2007), afin d’estimer la position de
chacun devant le public de plus en plus vaste des internautes (58% des Français,
soit 30.654.000 personnes de plus de 11 ans, en juin 2007, selon Médiamétrie).
c- Tableau de synthèse :
tableur joint
d- Quelques dispositifs originaux et/ou intéressants (cellules à
fond vert dans le tableau joint)
Ergonomie. Aucune home page de bonne ergonomie ne dépasse 3,5
hauteurs d’un écran 17 pouces (certaines, particulièrement efficaces, tiennent
sur moins de 2 hauteurs d’écran : L’Equipe, Le Télégramme, Le Républicain
lorrain, TF1 et Europe1). Les sites affichant la plus forte actualisation des
informations, et souvent la plus grande richesse de contenu, structurent tous
leur home page en deux blocs principaux : la moitié supérieure est réservée
aux actualités les plus originales et/ou les plus « chaudes », mises à jour en
permanence ; la moitié inférieure est dévolue aux rubriques traditionnelles et
donc aux informations publiées (le plus souvent) par le quotidien papier (Le
29
Monde, Le Parisien, Le Nouvel Obs, Ouest France, New York Times, The
Gardian, El Pais, Die Süddeutsche Zeitung, Haaretz). Ce « design » est,
semble-t-il, adéquat à la lecture « en F » qui serait le mode réflexe de lecture
rapide chez la majorité des internautes (F-Shaped Pattern For Reading Web
Content :
http://www.useit.com/alertbox/reading_pattern.html
+
http://www.rankspirit.com/design-site-web.php#zapping).
Semi-gratuité. Il est intéressant de noter que la plupart des sites de
grande qualité rédactionnelle et parfois de forte notoriété (et, aussi, de forte
audience) affichaient encore récemment une gratuité limitée. Le modèle le
plus poussé était celui du site du New York Times. Y étaient gratuits (mais
accessibles après inscription), jusqu’au 17 septembre 2007 : nouvelles
"chaudes", principaux papiers du quotidien du jour, critiques spectacles et
chroniques gastronomiques courantes, éditoriaux et opinions de personnalités
extérieures. Etaient réservés aux abonnés "TimesSelect" (et signalés comme
tels par une petite icône orange) : éditoriaux et analyses des plumes
influentes, exclusivités web, accès avant parution à une sélection d’articles...
En France, Les Echos et Le Monde, ainsi que Le Parisien et L’Est républicain
d’une autre façon, pratiquent encore une semi-gratuité fortement signalée.
Mais pour combien de temps ? (Cf. pages 4 et suivantes) La plupart des
autres sites soumettent l’accès à leurs archives et à l’édition électronique du
journal papier à un abonnement et/ou à un paiement à l’acte, mais ils sont en
libre consultation pour la presque totalité de leur contenu.
E-commerce. Certes, les sites d’information n’ont pas pour première
vocation de vendre tout et n’importe quoi, au risque d’avilir gravement leur
image de marque (ce que ne semblent pas craindre L’Equipe, Le Télégramme
et The Gardian). Cependant, un espace commercial adéquat à la marque
portée par le site peut, parfois, offrir à l’internaute un service pertinent, qui
participe alors à sa fidélisation. Les Echos, Le Monde, La Nouvelle
République, Le Dauphiné et le New York Times ont développé des
« boutiques » de produits culturels dont les sélections sont sociologiquement
destinées à leurs lectorats. Elles permettent, de plus, par la mise en vitrine
des différentes publications de chaque groupe, de donner un sentiment
d’importante richesse éditoriale. De ce point de vue, les seules productions
30
Bayard (magazines, hors-séries, livres, disques, DVD…) offrent un « fonds »
particulièrement significatif.
Editoriaux. Il est surprenant de constater que la plupart des sites de
quotidiens nationaux français, à l’exception forte de La Croix, dissimulent
presque complètement leurs éditoriaux, dans les recoins des rubriques
« Opinions », ou « Débats » ! En PQR, seuls les sites du Bien public et du
Progrès assument de publier, en home page, leurs éditos, et, plus
exceptionnel encore, L’Est républicain place l’éditorial de Pierre Taribo en
évidence, au centre de la page d’accueil du site du journal lorrain. En
revanche, la presse étrangère, dans son ensemble, et le New York Times,
tout particulièrement, valorisent très fortement leurs éditoriaux. Pour reprendre
l’exemple du New York Times, pas moins de deux éditos sont placés en haut
de la home page du site et quatre autres éditos dominent les autres
« papiers » en haut de la page "Opinion" (rang 2). Au total, le site du New
York Times mobilise en permanence huit éditorialistes en titre ! A noter : les
nombreuses et substantielles chroniques des columnists étaient toutes
réservées aux abonnés TimesSelect. Selon Bertrand Pecquerie (directeur du
World Editors Forum, in Le Monde du 16 novembre 2006), cette exploitation
en ligne des éditos et chroniques par le New York Times génèrait, en 2006,
plus de 200.000 abonnements et une recette annuelle supérieure à 10 millions
d’euros…
Mise à jour (updating) des actualités. La mise en scène des actualités
de « dernière minute », ou un tant soit peu exclusives, procure à l’internaute
un sentiment d’être à la pointe de l’information, ce qui est la fonction
traditionnelle des « unes » de quotidiens (manchettes). Elle est aussi
génératrice de (bons) référencements dans les moteurs de recherche43… Audelà de la mise en (home) page en deux blocs (lire, ci-dessus, le paragraphe
consacré à l’ergonomie), certains sites, parmi les plus efficaces, additionnent
43
Le site d’information du moteur de Mountain View (Google) vient d’annoncer (30 août 2007) un accord avec
quatre grandes agences de presse mondial, afin de reprendre sur son site les fils d’informations de ces
fournisseurs des médias : Agence France Presse (AFP), Associated Press (AP), Canadian Press (CP) et Press
Association (PA). Absence notable : celle de Reuters, dont les dépêches sont fréquemment relayées par les sites
de journaux en ligne. Or une part importante du rang des sites d’information sur le moteur de recherche est due à
la fraicheur et au volume de contenus présent sur leurs sites. Les volumes représentés par les dépêches d’agence
influant évidemment très largement sur le niveau de leur référencement. De nombreux sites de presse en ligne
pourraient donc perdre leur rang dans le référencement de Google et cela va nécessairement influer sur leur
trafic.
Pour
connaître
le
« rang »
(headlines)
des
sites
dans
Google
News :
http://88.198.49.15/~search/gnews/reports/fr/
31
les moyens (y compris visuels et audiovisuels) de mise à jour permanente : le
site du Monde, en plus d’un bloc supérieur avec 8 entrées d’actualités
« chaudes » et d’un cadre de dépêches, coiffe (en cas d’urgent) sa home
page d’une ligne rouge de « dernière minute » ; le site de La Voix du Nord fait
une large place à deux cadres de dépêches : « l’info région en continu » et
« France-Monde en continu » ; le site (« quotidien » !) du Nouvel Obs met à
jour en permanence toute sa première partie de home page (moutures de
dépêches, surtout).
Cependant, la facilité des cadres de dépêches, plus ou moins récrites,
afin de favoriser le référencement en tête des moteurs de recherche
d’informations (Google News…), risque d’avoir atteint sa limite. En effet, le site
Google News a lancé, fin août 2007, un algorithme destiné à éviter la
duplication d'un même article. Ainsi, tous les articles qui recopient
intégralement les dépêches de l'agence France-presse (AFP), Associated
Press (AP), Canadian Press (CP) et le fil anglais Press Association (PA) ne
seront plus affichés. « Au lieu d'avoir cinq ou dix fois la même information
recopiée par différents sites Internet, notre algorithme reconnaîtra l'article
source. Cela laissera de la place à des informations originales », explique
Josh Cohen, chef de produit chez Google. Cette nouvelle fonctionnalité,
destinée à éviter la duplication d'un même article, risque de faire chuter le
trafic de nombreux sites web qui recopient tout ou partie des dépêches.
Aujourd'hui, 23% des connexions sur lemonde.fr proviennent de Google News
selon les chiffres de Nielsen du mois de juillet 2007. Ce chiffre est de 20%
pour le site du Figaro, de 13% pour celui du Nouvel Observateur, de 5,4%
pour lesechos.fr et de… 26% pour la-croix.com (tous moteurs de recherche,
de janvier à juin 2007).
Serait-ce là le début d’une prime d’audience réservée, enfin, à
l’originalité des papiers ? Les experts, comme Manuel Parody (site web du
quotidien Les Echos), s’interrogent.
Articles originaux. Il va de soi que, outre tout le matériau d’information
complémentaire (documents en lignes, photos, infographies et cartes plus ou
moins interactives, fichiers audio-visuels…), la publication en ligne de papiers
originaux, voire exclusifs, est un important facteur de fréquentation et de
notoriété pour les sites internet de journaux. Si certains d’entre eux
32
survendent un peu l’exclusivité (Le Parisien, Le Nouvel Obs, Marianne-enligne et Rue89 qui a fondé ainsi sa rapide notoriété44), d’autres offrent
vraiment un contenu rédactionnel enrichi (Le Monde, Le Nouvel Obs, La Voix
du Nord) et même très enrichi (Les Echos, Washington Post) à leurs abonnés.
A noter que reportages et enquêtes originales sont les grands absents des
home pages…
Infos pratiques. A voir les performances considérables de sites
comme ceux de l’Internaute ( !), mais aussi du Monde, du Nouvel Obs, des
Echos et de Ouest France, la richesse (pas forcément anarchique) des infos
pratiques semble être un important « booster » d’audience45.
Audiovisuel. Il est manifeste que les sites les plus consultés et souvent
les plus riches jouent, désormais, nettement la convergence des contenus.
Au-delà de la référence (par lien) à un document illustré, audio ou vidéo, ce
sont, de plus en plus, de véritable « galeries » et « chaînes » qui sont
proposées en bonne place (haut de colonne de droite, milieu de home
page…) par certains sites véritablement multimédias46 : (L’Equipe), Le
Télégramme, La Voix du Nord, Washington Post, El Pais, The Gardian, La
Repubblica, Haaretz, Nouvel Obs, JDD. Le site de La Croix met bien en valeur
son cadre de « l’actualité en images » (photos). Le site du Monde réserve la
plupart de ses vidéos d’actualité (nombreuses) aux abonnés, ainsi que ses
centaines de sélections de musiques (« bande son »). Le site de Libération et
ceux du Monde, des Echos, du Télégramme, du Washington Post, d’El Pais,
44
Créé début mai 2007 par des journalistes de Libération (Pierre Haski, Pascal Riché, Laurent Mauriac et
Arnaud Aubron) Rue89.com s’est fait connaître rapidement grâce à plusieurs "révélations", dont celle concernant
le Journal du dimanche qui avait renoncé à publier un article sur l’abstention de Cécilia Sarkozy au second tour
de l’élection présidentielle. Aujourd’hui, le site revendique 400 000 visites uniques par mois et s’est placé, en
juin, en tête des durées de visites (28 minutes en moyenne) des sites d’informations. Il a même capté des recettes
publicitaires dès ses débuts, ce qui, selon ses créateurs, était "inespéré". "Notre image d’indépendance joue pour
beaucoup dans cette affluence, note Pierre Haski. Les internautes y trouvent aussi une grande visibilité grâce à
l’importance donnée à la vidéo et à nos commentaires…" Les créateurs sont en contact avec des investisseurs
extérieurs (groupes de presse, fonds d’investissement) pour une entrée minoritaire dans le capital de la société.
Déjà, Le Nouvel Observateur s’est associé au site pour créer en septembre "un portail communautaire sur
l’actualité des livres" qui s’appellera bibliobs.com. Il sera piloté par Jérôme Garcin, directeur adjoint de la
rédaction du Nouvel Obs, et permettra aux libraires, bibliothécaires, enseignants et passionnés de soumettre leurs
critiques ou de tenir des blogs. (Source : Daniel Psenny, « Le succès du site Rue89.com attire les investisseurs »,
Le Monde daté du 9 août 2007)
45
Ce que confirme Jean-Pierre Eskenazi, le président de NetBooster : http://www.netboostergroup.com
46
Le 29/08/2007
LONDRES (Reuters) - Le marché mondial du téléphone multimédia devrait afficher une croissance de 50% en
volume cette année, estime le directeur général de Nokia. Selon Olli-Pekka Kallasvuo, qui s’exprimait lors d’une
conférence de presse à Londres, 120 millions de combinés multimédias se vendront cette année dans le monde
contre 80 millions en 2006…
33
du Gardian ou du Nouvel Obs publient de plus en plus de cartes et
d’infographies animées et interactives 47. Nouveauté pleine d’avenir :
certains sites vendent de la vidéo (en téléchargement) à la demande (VOD :
video on demand)48 et en font un argument massif de fréquentation et de
fidélisation, mais parmi les sites d’information générale, seul celui de TF1 (TF1
Vision) fait partie des poids lourds49.
Services numériques. Pour les abonnements divers et l’inscription aux
diffusions automatisées d’informations, les formules simplifiées à l’extrême
des Echos (« Le Pack »), du Monde (« L’édition abonnés »), du New York
Times (« TimesSelect ») et du Gardian (« News direct to you ») paraissent
très incitatives. Petite originalité, le site du Monde propose, depuis peu, des
faire-parts animés et illustrés (photos), avec musique, à ses lecteurs (19 euros
pour le lancement, 45 ensuite !)…
Interactivité et participation (WEB 2.0). Les « commentaires » des
articles (abonnés ou non, plus ou moins « modérés…) sont proposés par 3
quotidiens nationaux sur 9 étudiés, et ils sont particulièrement mis en valeur
par les sites du New York Times et de la Süddeutsche Zeitung. Il arrive aussi
(rarement) qu’ils apportent à l’ensemble des contributions intéressantes, voire
importantes. Quoi qu’il en soit, à propos de la qualité moyenne de la
participation ainsi permise, les commentaires, qu’ils soient libres ou
télécommandés, futiles ou réfléchis, conformistes ou originaux, etc.,
47
Local Explorer a été mis en ligne, en juin 2007, par le Washington Post. Cette série de cartes interactives (des
mashups avec Google) qui permettent de savoir :
Les derniers délits et crimes dans votre quartier ;
la liste des écoles avec le nombre d’élèves par établissement scolaire ;
les dernières maisons ou appartements vendus avec pour certains le montant de la transaction et un descriptif de
la propriété immobilière ;
mais aussi : les hôpitaux, les commissariats de police, les casernes de pompiers, les bibliothèques, les bureaux de
poste, les cinémas, les musées et les stations de métro ;
sans oublier les bars et les restaurants.
Les cartes sont organisées en quatre catégories. Dans chacune d’elles, on trouve également de l’actu en bref, un
agenda et d’autres services.
Le New York Times produit aussi de très bonnes infographies animées, dont certaines sont mêmes interactives.
De plus, différentes « histoires » sont racontées sous forme multimédia (ici).
El Pais et El Mundo ont été les pionniers de l’infographie animée en Europe. Pionner, également : Antoine
Mazelier, avec son agence Art Movies, qui a sans doute été le premier à proposer des infographies animées en
France et même l’un des premiers dans le monde.
48
Arrivée sur le marché français en 2005, la "video on demand" (VOD) compte pas moins de vingt opérateurs.
Un chiffre qui place la France devant l’Allemagne, les Pays-Bas ou encore le Royaume-Uni. Pour le cabinet
Olivier Wyman, le chiffre d’affaires en France de cette nouvelle génération de vidéo-clubs accessibles via une
connexion internet haut débit et uniquement Windows passerait de 56 millions d’euros en 2007 à 500 millions en
2012. Soit plus du double du volume aujourd’hui engrangé sur le marché de la location de DVD.
49
http://www.totalvod.com
34
produisent une forte impression de proximité rédaction-lectorat, favorisent
certainement
l’appropriation
affective
des
titres,
font
vivre
une
« communauté » (surtout si la capacité de commenter est réservée aux
abonnés). Dans la même perspective participative, les forums et surtout les
tchats (ou « tables rondes de discussion » animées) sont producteurs
d’informations et d’analyses souvent plus pertinentes (Le Monde, Libération
Les Echos, Ouest France, La Voix du Nord, New York Times). L’intrusion
beaucoup plus brutale des internautes dans la production des rédactions,
sous la forme des « votes », « recommandations » et autres mesures
automatisées de « popularité » des articles, est pratiquée sans complexe par
le site du Monde et plus modérément par ceux de Libération, de 20 Minutes et
du New York Times. Cette facilité, particulièrement démagogique, dévalorise,
me semble-t-il, la part majeure de la publication et favorise dangereusement le
spectacle au détriment de la raison, ce qui risque d’entraîner une dévaluation
globale du site. Faisant beaucoup moins appel à l’impulsion, l’offre d’ouverture
-sous marque- de blogs pour les internautes (abonnés ou non) n’est
libéralement pratiquée que par les site du Parisien, du Bien public, d’El Pais et
du Gardian (qui les met fortement en valeur) et du JDD. Mieux maîtrisée par
les éditeurs, la publication abritée de blogs de journalistes et/ou d’experts
« invités » (AmPro) des rédactions semble générer une forte valeur ajoutée
rédactionnelle, en tissant des liens très fluides entre sites et regards plus ou
moins extérieurs (fonction réflexive). Les sites de La Croix, du Monde, des
Echos, de Ouest France, de La Voix du Nord et, par excellence, du New York
Times ont tous développés ce canal de communication de (souvent) très
bonne qualité. Enfin, plus hétérogène est la mise en œuvre de véritables
moyens de participation communautaire, grâce auxquels des personnes
complètement extérieures aux rédactions peuvent publier leurs contributions
(articles,
photos,
vidéos…)
presque
directement
(sous
contrôle
des
rédactions) dans les sites internet des journaux, accédant ainsi au statut
douteux de « journaliste-citoyen »50. En France, le site Rue89 est le premier à
pousser cette démarche, en vendant ses « trois cercles » d’auteurs, mais Le
Monde vient d’ouvrir discrètement un site concurrent (nom de code :
50
Le « rapport Tessier » préconise le rapprochement de la situation de « journaliste-citoyen » avec le statut (peu
enviable !) de « correspondant local de presse » (PQR)…
35
« lepost.fr ») et a déjà entrouvert la brèche avec la formule "Vous" = "articles
interactifs" proposée sur son site actuel. Les sites d’Aujourd’hui-Le Parisien et
d’Ouest France invitent leurs internautes à envoyer témoignages et photos
pour publication en ligne. Les sites de Libération et de 20 Minutes demandent
des photos… Le site de Courrier international recrute les bloggers à grand
renfort de flatteries communautaires et soi-disant journalistiques (« Devenez
Citoyen-Journaliste sur courrierinternational.com ! »). Vincent Régnier, du
Parisien, voulant conjuguer local et participatif, annonce (Journées du CFPJ,
juin 2007) : « Au départ, nous allons travailler département par département.
Mais on ne peut pas faire tout tout seul : nous allons donc développer les liens
avec les associations, on va faire du communautaire. On est en recherche
active de partenariats. »
36
4 / Quelques pistes pour La Croix et le groupe Bayard51
a- Développer la capacité « éditorialiste » (éditoriaux, chroniques) du
site de La Croix avec celle des titres (et des blogs) de Bayard. Le succès des
chroniques (8 par jour, en moyenne) et des éditos du New York Times en
ligne est le fer de lance de l’audience de l’ensemble du site. Celui de La Croix
est le seul de la PQN française a mettre clairement en home page l’édito de la
rédaction (en chef). Il est peut-être opportun de s’interroger sur le statut,
éventuellement ambigu (éditos, chroniques, journal de bord ?) des trois blogs
abrités par le site. Le site du NYT valorise au mieux les contributions de
haute qualité de ses nombreux columnists. Nombreuses sont aussi les
personnalités qui contribuent régulièrement au « Forum » de La Croix ;
certaines d’entre elles ne feraient-elles pas, aux côtés de Bruno Frappat,
d’excellents chroniqueurs ?
b- Proposer plus de « participation » aux lecteurs abonnés : des
blogs thématiques de lecteurs, contrôlés et animés par la rédaction de La
Croix (textes, photos, vidéos, enregistrements audios, dessins…) peuvent
offrir au internautes-lecteurs la possibilité de contribuer à (et de co-signer !)
une œuvre collective ou coopérative ayant du sens ; des « tables rondes
de discussion » ponctuelles, sur des sujets d’actualité. Et pourquoi ne pas
envisager un « wiki » La Croix ?
c- Une mise à jour plus dynamique : 1 bloc (avec photo) de « dernière
minute », ou véritable « manchette », plutôt que le cadre de dépêches, et,
pourquoi pas, un « fil rouge » pour les urgents.
d- Ouvrir un espace d’infos pratiques (domaine religieux…).
e- Un site plus multimédia (convergence numérique) : publier des
reportages photos et vidéos originaux52 ; publier des infographies et cartes
interactives. Pèlerin.info vient de mettre en ligne, en tête de sa rubrique
51
Ces préconisations sont, il me semble, convergentes avec les attentes des lecteurs de La Croix telles que
relevées par l’étude présentée par Anne-Claire Marion et Arnaud de la Porte, le 28 septembre 2007, lors du
séminaire « Le web à La Croix : l’affaire de tous ».
52
Les meilleurs « documentaristes » actuels, experts en techniques numériques, publient de plus en plus sur
internet (Ina…). Voir, par exemple, le site de Carole Trebor, historienne, journaliste, cinéaste (Arte, Ina…) :
http://www.caroletrebor.com
37
« Famille », un vrai documentaire sur un enfant autiste, Mêlée ouverte (26
minutes),
réalisé
par
Isabelle
Marchand,
journaliste
du
magazine :
http://www.pelerin.info/rubrique/index.jsp?rubId=9197.
Vincent Régnier, directeur des rédactions du Parisien annonçait, fin juin 2007 (Journées
du CFPJ) : « On va former tout le monde à la caméra. Le web est une manière habile pour un
groupe comme Le Parisien de rentrer dans la télévision. Nous allons monter un studio télé à
terme au Parisien, avec, trois fois par jours, un journal télé sur le web (d’ici la fin de l’année). »
f- Construire l’espace de publication des « invités » de la
rédaction (« Forum » de La Croix papier), au-delà des chroniques (rendezvous plus quotidiens), afin de rendre notoire la communauté des esprits
forts et des bonnes plumes en affinité avec la tenue éditoriale du quotidien,
voire avec celle du groupe Bayard.
g- Proposer le téléchargement de musiques (ou radio-s en ligne), de
photos, de vidéos (films, grands reportages, enquêtes exclusives, grands
entretiens…) et… d’e-books sélectionnées par la rédaction.
A noter : Aux dires du New York Times, le groupe Amazon parierait sur le « livrel »
en lançant le Kindle, un e-book destiné au marché des Etats-Unis et sur lequel les
lecteurs pourront télécharger du contenu – livres et journaux – via le site
Amazon.com. L’appareil rentrera en concurrence avec celui de Sony, le Sony Reader,
déjà présent aux États-Unis mais dont la sortie n’est pas encore programmée sur le
marché européen. Parallèlement, Google renouvelle son service Google Book Search
par l’intermédiaire duquel les internautes pourront désormais acheter des livres et non
plus seulement en télécharger des extraits. Mais le groupe semble réaliste sur l’état
du marché et ne se lance pas dans la commercialisation d’un support, simplement
dans la diffusion de contenus. (Le Point.fr, 7 septembre 2007)
h- Fédérer certains sites (la sélection du jour, archives) du
groupe Bayard, et développer une « librairie » en ligne sur la base des
publications du groupe et d’éditeurs partenaires…
i- Fédérer (logique de portail) des sites (ou blogs) de villes
hebdomadaires (# « cityweb.fr » et « maville.com ») de bonne qualité
(informations
générales
[politique,
économie,
social,
société,
culture,
38
religion…] locales, informations pratiques) : suite des « 7jours*****.fr », noms
de domaines réservés53 (en partenariat avec un groupe de PQR/PHR ?54).
A noter : La formule du site maville.com produite par Ouest France, le service
propose aux journaux locaux français une sorte de pack tout prêt pour la publication
électronique de leurs infos locales. L'accent est mis sur l'info pratique, avec des bases
de données d'infos services et de loisirs (ciné, sorties) impressionnantes. Le site
propose aussi un début de communauté, avec possibilité offerte aux internautes de
donner leur avis sur les restaurants, les bars et les films (sur le modèle de cityvox).
Toute l'info locale du journal y est proposée gratuitement. Enfin, les petites annonces
bonnes affaires, emploi de proximité et auto sont gratuites. Le réseau maville.com,
d’abord limité à la Bretagne et la Normandie, s’est étendu à certain nombre de
quotidiens régionaux, comme La Provence et Nice Matin par exemple, en 2007.
A noter (bis) : Le groupe de presse américain Sun Times a lancé en juin 2007 un
portail de sites participatifs locaux (http://www.neighborhoodcircle.com/), organisé par
communes. On y retrouve les outils maintenant classiques de ce genre de site :
- Infos locales ;
- agendas ;
- pour les inscrits, la possibilité de poster articles et photos, de créer son blog, de
participer à l'agenda... ;
- forums.
Les contributions seront modérées et vérifiées pas une équipe de journalistes avant
publication. Les journalistes participent aussi au contenu auquel s'ajoutent des infos
locales venant des 90 journaux du groupe Sun Times. Pour l'instant, trois communes
ont été lancées. Le journal prévoit d'en avoir trente d'ici à la fin de l'année 2007.
A noter (ter) : Le web 2.0 est aussi au rendez-vous de l’information locale : Oleg
Tscheltzoff, qui a lancé CitizenBay (http://www.citizenbay.com) en mars 2007, affirme
qu’il « espère devenir plus important que la presse quotidienne régionale ». Les
« meilleurs rédacteurs » participatifs de CitizenBay sont rémunérés entre 1 et 5 euros
l’article… (Libération, 23 mars 2007)
53
www.7joursFrance.fr,
www.7joursFrance.com,
www.7joursParis.fr,
www.7joursParis.com,
www.7joursLyon.fr, www.7joursMarseille.fr, www.7joursLille.fr, www.7joursRennes.fr, www.7joursNantes.fr,
www.7joursMontpellier.fr, www.7joursDijon.com, www.7joursBourgogne.com.
54
Nouvelle du 31 août 2007 : Ouest-France achète 14 hebdomadaires à Hersant. Via sa filiale Publihebdos, le
groupe de presse rennais étend sa couverture dans le nord-ouest de la France et en région parisienne. 14 journaux
pour un tirage global hebdomadaire de 132 000 exemplaires. La nouvelle acquisition représente un chiffre
d’affaire d’environ 19 millions d’euros. Basé à Rennes et propriété du groupe Ouest-France, Publihebdos.com
possédait déjà une quarantaine d’hebdomadaires. En Bretagne, elle publie : La Presse d’Armor, Le Penthièvre,
L’Echo de l’Armor et L’Argoat, Le Petit Bleu des Côtes d’Armor, Le Courrier Indépendant, Le Pays Malouin,
La Chronique Républicaine, L’Hebdo de Sèvre-et-Maine, Pontivy Journal, Le Ploërmelais et La Gazette du
centre Morbihan. Avec un total de maintenant 56 titres, son chiffre d’affaires devrait avoisiner les 56 millions
d’euros. L’entreprise est le leader français de la presse hebdomadaire régionale (PHR).
http://www.publihebdos.com
39
j- Choisir clairement une politique vis-à-vis de la gratuité, de la
publicité, du « collaboratif » et du « label ». Cette nécessité est, me
semble-t-il,
le
sujet
d’une
discussion
essentielle
(enjeu
quasi
anthropologique), premièrement déterminée par la mission éditoriale et le
modèle économique de l’ensemble du groupe Bayard. Affirmer, par exemple,
une position anti-utilitariste, vis-à-vis du « cybermonde », en défendant les
valeurs de proximité, d’humanité, de solidarité, d’honnêteté et de spiritualité.
40
Annexes
1/ Etude « Audiences et stratégies des acteurs en ligne »
L’étude « Audiences et stratégies des acteurs en ligne face aux acteurs traditionnels du marché de la
diffusion des contenus », réalisée en décembre 2006 par INEUM Consulting pour la DDM présente :
•
•
•
•
la croissance de l’audience d’internet et ses conséquences sur le marché publicitaire tous médias
confondus,
une analyse des indicateurs de mesure d’audience sur internet et des problèmes soulevés par
l’absence d’harmonisation entre ces indicateurs,
les stratégies des acteurs en ligne selon leur domaine d’activité (agrégateurs, sites
communautaires ...),
enfin, la stratégie des acteurs traditionnels (presse, TV, radio, jeux, édition, musique) face à la
concurrence de ces nouveaux acteurs.
L’étude met notamment en évidence le mouvement de migration des contenus numérisés de leur support
d’origine vers internet. A partir des transferts déjà constatés, l’étude annonce les évolutions à venir pour les
médias qui, aujourd’hui, sont encore les moins présents sur internet. Le schéma ci-dessous donne une
indication des mouvements déjà réalisés et à venir :
41
Les acteurs « traditionnels » des médias, confrontés à des transferts d’audience, développent alors des
stratégies qui visent tout à la fois à renforcer leur cœur de métier et à se diversifier sur internet. Mais force
est de constater que les pure internet players occupent souvent les premières places du classement en
matière d’audience sur internet, toutes catégories de contenus confondues.
Les 30 sites les plus visités en France (en nombre de visiteurs uniques par mois)
Les lignes grisées correspondent aux pure internet players.
Source : Médiamétrie/Net Ratings – Septembre 2006
42
Analysant les modèles économiques retenus par les acteurs en ligne, soit le payant, soit le gratuit,
l’étude montre également que la gratuité avec financement publicitaire, si elle l’emporte aujourd’hui, fait
place au développement de modèles payants, notamment pour les offres exclusives et à forte valeur
ajoutée. Les services de VoD proposant des films de cinéma ou des séries, les sites d’information
financière entrent ainsi dans la catégorie des sites où l’offre payante s’impose.
http://www.ddm.gouv.fr/IMG/pdf/etude_ineum_20070710.pdf
Le classement « Google news report » pour le mois de d’août 2007 , dernier en date avant la
décision de Google News de publier les dépêches d’agences et de filtrer les duplications.
Top 50 des sources Google News France
rank
01/08/07
01/05/07
1 Le Figaro
Le Figaro
2 Le Monde
nouvelobs.com
3 Libération
L’Express
4 nouvelobs.com
Libération
5 Challenges
Le Monde
6 TF1
TF1
7 Le journal du dimanche en ligne Boursorama
8 L’Express
Romandie.com
9 Romandie.com
Le Point
10 RTL Info.be
Boursier.com
11 AgoraVox
France 2
12 20minutes.fr
Le journal du dimanche en ligne
13 Cyberpresse
Cyberpresse
14 La Tribune.fr
20minutes.fr
15 Radio-Canada
Radio-Canada
16 PC Inpact
7sur7
17 France 2
PC Inpact
18 RTBF
Clubic
19 Francebourse.com
Le Revenu
20 RFI
Canoë
21 XINHUA
Radio Suisse Romande
22 Actualités News Environnement France 3
23 Europe 1
RTBF
24 Le Point
Le Temps (Abonnement)
25 Canoë
Les Échos
26 Clubic
ZDNet
27 Boursier.com
Francebourse.com
28 Les Échos
Journal Chrétien
29 Vnunet.fr
Europe 1
30 Edicom
AgoraVox
31 Journal Chrétien
RTL.fr
32 01net
Sport365.fr
33 Radin Rue
La Tribune.fr
34 L’Orient-Le Jour
L’Orient-Le Jour
43
35
36
37
38
39
40
41
42
43
44
45
46
47
48
49
50
Rue89
RTL.fr
Boursorama
Goal.com
Football.fr
7sur7
Le Temps (Abonnement)
Tribune de Genève
Sport365.fr
Courrier International
La Croix
Sports.fr
l’Humanité
Liberté-Algérie
Le Matin.ma
ZDNet
Actualités News Environnement
RFI
Radin Rue
Sports.fr
Eurosport - TF1
XINHUA
Le Matin.ma
Tele News
Tribune de Genève
Football.fr
Le Soleil
Référencement Internet-Web
01net
Vnunet.fr
Aujourd’hui Le Maroc
Sport.fr
Le Top 50 des sites supports de publicité, souscripteurs du service
Tous lieux de connexion
Applications Internet exclues (2)
Source : Médiamétrie//NetRatings - Tous lieux de connexion - France – Juillet 2007 - Copyright
Médiamétrie//NetRatings - Tous droits réservés
Rang Marque (3)
Visiteurs Uniques
Tous Lieux de
Connexion (4)
1 Google 21 029 000
2 MSN/Windows Live 14 220 000
3 Orange 13 862 000
4 Yahoo! 10 661 000
5 PagesJaunes 10 480 000
6 Mappy 7 838 000
7 Voila 7 437 000
8 L Internaute Magazine 6 872 000
9 Skyrock Network (5) 5 829 000
10 aufeminin.com Network (5) 5 599 000
11 La Redoute 5 567 000
12 YouTube 5 511 000
13 01net. Network (5) 5 499 000
14 AOL Media Network (5) (*) 5 052 000
15 Groupe 3SI 5 043 000
16 Doctissimo Network (5) 4 811 000
17 Bestofmedia Network (5) 4 704 000
18 Dailymotion 4 584 000
19 Lycos Europe 4 547 000
20 M6 Network 4 322 000
21 AlloCine 4 242 000
22 Alice 4 154 000
23 France Televisions 3 985 000
24 commentcamarche.net 3 981 000
44
25 LeGuide.com Network (5) 3 007 000
26 SFR 2 809 000
27 Prisma Presse (G+J) Network (5) 2 594 000
28 Le Monde 2 580 000
29 Clubic.com 2 555 000
30 Le Journal du Net 2 221 000
31 Cityvox 2 145 000
32 lastminute.com Network (5) 2 099 000
33 Expedia 2 034 000
34 Caradisiac 2 018 000
35 Le Figaro 1 970 000
36 Boursorama Network (5) 1 953 000
37 Alapage 1 759 000
38 Shopping.com Network (5) 1 684 000
39 RATP 1 532 000
40 ZDNet 1 504 000
41 Groupe Express-Expansion Network (5) 1 461 000
42 CNET Networks (5) Entertainment 1 334 000
43 nouvelobs.com 1 311 000
44 seloger.com network (5) 1 307 000
45 RTL Network (5) 1 118 000
46 Le Guide du Routard 1 084 000
47 Evene.fr 1 074 000
48 achetezfacile.com 1 071 000
49 Magicmaman.com NetWork (5) 1 065 000
50 CNET~ 1 028 000
* Hors AOL Propriétaire
2/ Premier Observatoire de la convergence Media
L’internaute passe les contenus médias au mixeur
31 mai 2007 - Ipsos Media publie les résultats de la première vague de
l’Observatoire de la Convergence Media (OCM). Objectif de cette étude
barométrique inédite en France : mesurer, qualifier et comprendre les
nouveaux comportements de consommation des contenus médias en
dehors de leur support d’origine. Un quart des internautes se révèlent ainsi
être des consommateurs médias convergents réguliers, friands de
nouveauté sur des supports de plus en plus mobiles.
8 internautes sur 10 sont des consommateurs médias convergents
Pour cette première vague de résultats, Ipsos Media a interrogé 4 400 internautes de 15 ans et
plus, sur leurs nouvelles pratiques de consommation des médias en ligne. Sont concernés : les
programmes radio et TV en direct, les contenus différés en streaming (lecture d’un flux audio ou vidéo
à mesure qu’il est diffusé) ou après téléchargement (podcast), les vidéos en ligne issues de sites
généralistes ou spécialisés dans le partage, et enfin, la presse lue en version électronique (pdf).
45
Premier constat : 81% des usagers d’internet, soit 21,3 millions de personnes, ont pratiqué au moins
une fois la convergence au cours des trois derniers mois. Et parmi eux, 26% vivent la convergence
média « tous les jours ou presque ». Par rapport au profil de la population internaute, ces convergents
réguliers sont plus masculins (61% vs 53%) et plus jeunes (54% ont moins de 35 ans vs 48%). Ils se
connectent aussi plus fréquemment au Web (60% plusieurs fois par jour vs 50%) et se montrent très à
l’aise avec les nouvelles technologies (42% vs 27%).
La consommation convergente par contenu media, radio en tête
De part son antériorité et la diversité de l’offre, c’est la radio qui réunit le plus de « convergents »
internautes. Deux tiers d’entre eux (65%) ont ainsi consommé au moins un contenu radio de façon
convergente au cours des 3 derniers mois. Cela représente 17,3 millions de personnes tournées
principalement vers des programmes musicaux (75%) et l’actualité générale (45%). Cette
consommation concerne l’écoute de programmes numériques en direct pour 61% des sondés. 30%
d’auditeurs
internautes
passent
par
le
différé
en
streaming
et
13%
par
le
podcast.
37% des internautes sont des convergents TV. Le différé en streaming est le mode de consommation
le plus utilisé (27%), devant le direct (23%) pour lequel l’offre est moins abondante aujourd’hui. Le
podcasting est quant à lui relativement proche de celle de la radio (10%). Ces convergents TV sont
fortement équipés en haut débit (83% vs 75% pour la population internaute). Les types de
programmes consommés sont très diversifiés, dominés tout de même par les journaux télévisés (47%
des convergents TV) et les documentaires et reportages (34%). 10 millions d’internautes (37%) ont
par ailleurs visionné au moins une fois au cours des trois derniers mois des vidéos issues de sites
généralistes ou spécialisés dans le partage de vidéos en ligne. Ces jeunes convergents (61% ont
moins de 35 ans), familiers des nouvelles technologies (88% se disent très ou assez à l’aise), ont
visionné des « vidéos réalisées par des internautes » (49%), des bandes annonces (43%) mais aussi
des
programmes
de
divertissements/jeux
(25%)
ou
de
l’actualité
(24%).
Quant à la lecture d’éditions électroniques de titre de presse, elle a été le fait de 31% des internautes,
pour moitié CSP+ (48%), expérimentés sur le Web (58% l’utilisent depuis 5 ans ou plus) et lecteurs
quotidiens ou presque pour 23%.
Tout passe par l’ordinateur mais les supports mobiles arrivent
L’ordinateur est le support très majoritairement utilisé pour la consommation de contenu. 88% des
convergents radio ont ainsi écouté leurs programmes directement sur un ordinateur au cours des trois
derniers mois. 96% des internautes ont eu recours à cet outil de communication pour accéder au
contenu TV. 98% pour ce qui est du visionnage de vidéos issues de sites généralistes ou de sites de
partage. Mais l’ordinateur n’est plus seul. La consommation des médias en mobilité a en effet franchi
un cap significatif illustré notamment par l’usage du téléphone portable. Dans les trois derniers mois,
19% des convergents radio et 17% des convergents TV ont utilisé un mobile pour consommer les
46
contenus médias respectifs. La pratique de la convergence sur les baladeurs numériques restant
quant à elle moins répandue : 11% des convergents radio et 5% des convergents TV.
Obtenir des informations et des services disponibles nulle part ailleurs
Comment les internautes convergents envisagent-ils ces nouvelles pratiques de consommation
media ? En premier lieu, ils estiment qu’elles permettent « d’avoir des informations et des services
que l’on ne trouve pas ailleurs » (30% tout à fait d’accord). Ils jugent en outre qu’elles offrent la
possibilité de « choisir le moment de fréquentation des différents medias » (30%). Ils avancent
également la possibilité de renforcer le lien entretenu avec la marque-média en pouvant « être
connecté en permanence à sa station, sa chaîne ou son titre » (25%). La convergence leur permet
également d’explorer de nouveaux territoires. Le quart d’entre eux sont ainsi tout à fait d’accord avec
l’idée que la convergence permet de « découvrir de nouvelles stations, chaînes ou titres ».
3 / Blogging Between the Lines
From American Journalism Review, December 2006/January 2007
The mainstream media have fallen in love with blogs, launching them on everything from politics to life
in Las Vegas to bowling. But does the inherent tension between the blogosphere’s anything-goes
ethos and the standards of traditional journalism mean this relationship is doomed ?
By Dana Hull
Dana Hull ([email protected]) is a reporter at the San Jose Mercury News.
Traduction par Courrier international : http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=69508
The San Antonio Express-News has a bowling blog. The News Tribune in Tacoma, Washington, has a
fly-fishing blog. A pet blog is popular at the Commercial Appeal in Memphis. Several newspapers have
launched parenting blogs.
The Fourth Estate has fallen fast and furiously in love with blogs, from news-driven ones about
professional sports teams, real estate, crime, Hurricane Katrina, immigration and local and national
politics to zanier ones that dive deep into niche subcultures.
Most are written by staffers, particularly sportswriters and columnists. Some reporters at metropolitan
dailies have transformed blogging into a full-time beat, and rarely file anymore for the print edition.
Other papers have involved entire sections in online group diaries: At the Dallas Morning News, the
editorial board’s blog gives readers a behind-the-curtains look at how board members wrangle over
issues, argue with one another and reach critical decisions.
The appetite for blogs is so great that some newsrooms also are turning to local bloggers, freelancers
and special guests, or actively soliciting readers for proposals for new blogs. California’s Ventura
County Star hosts a blog written by a local soldier who recently returned from Iraq. The Houston
Chronicle is asking aspiring bloggers to send an e-mail to the paper describing what they want to
share with the world.
47
The Spokesman-Review in Spokane, Washington, links to an eclectic list of Inland Northwest blogs.
Among the local characters featured on spokesmanreview.com is Spokane Valley resident Bob
Salsbury, who enjoys "carving evil little trolls out of bars of soap" and writes The Unbearable Bobness
of Being. The Los Angeles Times has hired a freelancer to blog regularly about life in Las Vegas, while
the Concord Monitor in New Hampshire hosts a blog written by Katherine Rogers, a city councilor.
Blogs are supposed to be fun and freewheeling, filled with quick snippets written in a breezy,
conversational voice. They tackle subjects both serious and esoteric and encourage an ongoing
dialogue. The best newspaper blogs generate an avalanche of posts and comments from captivated
readers, get linked to by other blogs and, ideally, drive more traffic to newspaper Web sites.
But newspapers’ current passion for blogging is fueling a vigorous, industry-wide debate about
everything from staffing to sourcing, standards to liability. There’s an inevitable clash of values
between a newspaper, which has a journalistic reputation and brand name to protect, and a swiftly
changing medium that has grown in power and prestige precisely because it has flouted many of
journalism’s traditional rules.
Some newsrooms are proceeding quickly but cautiously, calling in lawyers, hammering out guidelines
and updating ethics codes to cover the uncharted world of blogging. Others are moving full-speed
ahead on the assumption that the blog train left the station long ago and, give or take a few mistakes
as the experiment unfolds, it’s all going to work out just fine.
"Blogging as it has evolved has been very different from conventional reporting," says Jane Kirtley, a
professor of media ethics and law at the University of Minnesota and a former AJR columnist, who
adds that reporters, trained to be objective, often struggle to adopt the right tone. "Blogs are not
intended to be objective. They are supposed to be opinionated, snarky and in your face — and that’s
not the way the mainstream media usually goes about reporting. The whole genre of blogging is very
different. It’s not fair for a news organization to say, ‘We want you to blog, but by the way don’t
express your real opinions.’"
Among the numerous thorny issues: Should blogs rise to the same reporting and sourcing standards
as content that appears in the print edition? What kind of tone and voice does a blog need to be
effective — just how snarky can it be? Where does libel law fit into the picture? Should reader
comments or user-generated content like photographs be edited or monitored? Should anonymous or
pseudonymous posts be allowed? What’s the newsroom’s policy about linking to other blogs? How do
newsrooms handle staffers who have personal blogs?
In late August, the Poynter Institute sponsored an invitation-only seminar on the topic of online
journalism standards, including blogging. About 25 journalists who spearhead their newsroom online
and convergence operations flew to St. Petersburg, Florida, for two-and-a-half days of intense
discussion. The group cobbled together a working draft of best practices for online journalism that is
being shared and revised; Poynter hopes to make them widely available in the next few months.
The spontaneous, rapid-fire pace of blogging has added another layer of complexity to the challenges
raised by online journalism. "There’s an inherent tension between the value of speed in an online
world and journalism’s obligation to do thorough, accurate work," says Kelly McBride, the ethics group
leader at Poynter, who helped facilitate the seminar. "And there’s this strong sense that the capacity of
the internet is limitless, but our resources are limited."
Many newsrooms are struggling to establish blog guidelines or some kind of best practices cheat
sheet. The San Francisco Chronicle recently named a blogging and interactive editor to, among other
duties, "contribute and edit content appearing on the blogs, making sure the content meets The
Chronicle’s blogging standards (which this person will help formulate)," as the job posting put it.
48
But media lawyers stress that blogs should not be viewed uniformly. Some attorneys are wary of
written guidelines because that could make it easier for a plaintiff in a libel suit to charge that the
newspaper violated its own rules. There’s also a strong sense that the handiwork of the typically
plodding task-force process of hammering out ethics codes will be horrendously outdated by the time it
emerges.
"One has to be careful about trying to establish hard and fast rules," says Sandra Baron, executive
director of the Media Law Resource Center in New York. "I don’t think the rules can keep up with the
changing technology. That said, it’s up to each newsroom to determine what their blogs are going to
look and read like, what process they follow and what editorial norms are appropriate."
In July 2003, after becoming convinced that blogging is not only fun but also of special appeal to
readers and the wave of the future, the Dallas Morning News launched the nation’s first editorial board
blog at dallasmorningviews.beloblog.com.
One month earlier, Editorial Page Editor Keven Ann Willey had outlined 10 reasons why the editorial
page should take such an unusual step. Reason No. 1: "It’s consistent with the newspaper’s overall
goals regarding increasing readership and profile in the community. Blogging provides a window into
the Editorial Board’s thinking on issues. The ability of readers to peer through this window will deepen
the Dallas Morning News’ appeal to heavy readers as well as help convert casual readers to heavy
readers."
Willey was anxious to get rolling but mindful of the risks. Tom Leatherbury, a key attorney for the
newspaper, was asked to share with her staff anything that made him nervous.
One of the biggest questions facing newsrooms is how libel law applies to blogs. Libel suits are
relatively rare — and blogging is so new that little case law exists. Still, many media attorneys stress
that if a blog is written by a newspaper staff writer, it is likely to be held to the same standard of liability
or malice as if it appeared in newsprint.
"It’s a developing landscape," says Leatherbury, a partner in the Dallas office of Vinson & Elkins who
has practiced media law for 25 years. "In dealing with mainstream publications that launch blogs, my
assumption is that they’ll be treated more like mainstream media for good and for bad if a legal issue
arises about a blog posting."
Leatherbury also warns that mainstream media blogs are likely to be more visible targets of libel
lawsuits. While an independent blogger may exert just as much influence, a newspaper blogger has
the potential to reach a wide audience — and works for a large media company that clearly has
assets.
"Until the courts adopt different standards, libel laws will translate to mainstream media blogs," says
Leatherbury. "That raises interesting issues about editing, prepublication review and the place of
comment and opinion. The cautious person should assume the same rules apply."
Michael Rothberg, a media law specialist with the Washington, D.C., firm of Dow Lohnes, says media
companies that have bloggers need to do a cost-benefit analysis. "One day we’ll have a libel suit
based on a newspaper’s blog that wasn’t edited. It just hasn’t happened yet," he says. "To think
there’s less risk just because it’s a blog is not a good strategy."
Morning News editorial staffers met several times to discuss the purpose of their blog. Leatherbury
shared his perspective over a brown bag lunch, and the staff then developed and distributed written
guidelines. To make sure writers had plenty of time to practice the art of blogging and iron out any
kinks, the editorial page blog had a soft internal launch before going public.
Editorial page writers regularly dwell in the realm of opinion and persuasion, and in some ways they —
like columnists — make natural bloggers. Willey has asked her dozen staffers to post to the blog about
three times a day. Though there was a lot of initial trepidation, it has caught on at the paper and
49
among readers. When former Texas Gov. Ann Richards died in September, a staffer revealed on the
blog that an angry reader wanted to know why the editorial board wasn’t blogging about Richards
more frequently.
Some staffers have taken to the new medium with gusto, blogging so madly that they began to slack
on other responsibilities, Willey says. Others have had to be guided into the habit, grumbling that they
don’t know how to fit blogging into an already heavy workload. But the experiment is considered a
success: The blog’s traffic is up, and the number of page views doubled from 2004 to 2005. The
editorial board now gets far more e-mail from readers. And all of this was accomplished without any
promotion or marketing effort.
Willey, the de facto Editorial Blog Boss, steps in when questions of tone or content arise. But most of
the guidelines she’s crafted (left) largely rely on common sense: Be brief and informal. Vary your
topics. Don’t write anything you wouldn’t want your mother to read in the paper. Incorporate
interesting, provocative reader e-mail. Be quick to correct yourself.
Other guidelines have been spelled out in far greater detail. "Exercise special care in blogging about
especially sensitive topics. Examples include religion, the Middle East, abortion, etc.," wrote Willey in
an October 2003 memo she asked staffers to keep handy near their computers. "Know that these
topics can be exceptionally personal and emotional, and that because of this, opinions about them are
prone to distortion and misunderstanding. If you believe that a particular string of commentary has
gone on long enough as to exhaust its positive benefit to readers, move the blog onto another subject.
If you have questions or concerns about a particular thread of commentary, discuss it directly with the
colleague involved or consult the editor in charge."
At one point, an editorial board member linked to a Ku Klux Klan Web site to illuminate a discussion.
When another board member strongly objected, the person who created the link voluntarily pulled it
down.
One of the most active bloggers on the site is Rod Dreher, who previously worked as a senior editor at
National Review. The conservative tone of his blog entries is far glibber than what you’d read in the
printed version of the newspaper. He recently referred to the president of Iran as "Mr. Death to
America" and went on a tirade when the Dallas County sheriff announced she had selected the
agency’s first liaison officer to the local gay and lesbian community.
"No 72 virgins, or raisins, or anything else for that fuzzy-faced scumbag," wrote Dreher about the June
death of Abu Musab al-Zarqawi in Iraq. "I say that with all due respect, naturally. Though I don’t
believe this happy news will have much discernible impact on the ongoing civil war there, it is good to
know that sometimes, there is justice in this world."
Fuzzy-faced scumbag? How do the taste police rule on that one?
"Re Rod’s post: I’ve decided not to take it down," Willey wrote in an e-mail to AJR. "The word
‘scumbag’ probably isn’t something we’d likely put in a family newspaper unless the editors felt it
necessary in a direct quote. But Rod’s usage of it on the blog — while a bit crass — is reflective of the
sort of spontaneous syntax that makes blogs so lively and fresh."
Willey says that readers love the blog because it demystifies the editorial board’s internal workings
and has made it more transparent and accessible. "Launching this blog has stimulated more positive
response than anything I’ve done in 25 years of journalism," says Willey, who has advice for other
newsrooms. "Determine up front what the purpose of the blog is. What is the blog trying to achieve?
Knowing the purpose will help determine the guidelines. Don’t be innovative for innovation’s sake. And
it’s a good idea to have a written set of guidelines — they don’t have to be overly legalistic or
deflating."
50
A few newspaper bloggers have run into trouble. One of the more notorious examples involved Ben
Domenech, who resigned in March after just 72 hours as a conservative blogger for
washingtonpost.com. As soon as his Red America opinion blog launched, the blogosphere kicked into
overdrive, proving that Domenech had plagiarized material in various publications long before his
washingtonpost.com contract began.
In late January, Matt Donegan, a newspaper reporter at the weekly Dover Post in Delaware, was fired
after his bosses found out about his personal blog on MySpace.com, which included controversial
comments about the assassination of Martin Luther King Jr. In May, Gina Vivinetto, an arts columnist
for the Tampa Bay Times, a free tabloid published by the St. Petersburg Times, was forced to resign
after admitting she mocked a Hillsborough County commissioner in a post on MySpace. "Sadly, Gina’s
actions irreparably compromised her credibility as a journalist for our company," St. Petersburg Times
Executive Editor Neil Brown said at the time.
In April, the Los Angeles Times suspended Michael Hiltzik’s Golden State blog because he used
pseudonyms to post comments.
"Employing pseudonyms constitutes deception and violates a central tenet of The Times’ ethics
guidelines: Staff members must not misrepresent themselves and must not conceal their affiliation with
The Times. This rule applies equally to the newspaper and the Web world," said an April 29 Editor’s
Note. "Over the past few days, some analysts have used this episode to portray the Web as a new
frontier for newspapers, saying that it raises fresh and compelling ethical questions. Times editors
don’t see it that way. The Web makes it easier to conceal one’s identity, and the tone of exchanges is
often harsh. But the Web doesn’t change the rules for Times journalists."
At the August Poynter session, participants debated questions of credibility and accuracy,
transparency and anonymity. Some issues, including the use of pseudonyms, produced easy
consensus. "There was a general sense that anonymity is frowned upon," Poynter’s McBride says.
"Journalists need to rise above the fray of clear, outright deception."
Other issues were less clear-cut. How should papers handle links to other Web sites and blogs? When
should editors intervene in blogs? What gets edited? In an era of dwindling resources, shrinking staffs
and buyouts, few newsrooms have the time or the bodies to edit the avalanche of online content. It’s a
constant struggle just to edit and copy edit Web versions of stories and captions of photo slide shows.
Editing blogs, with their constant updating and reader comments, adds another two-ton pile of work.
As a result, most newspaper blogs are self-edited — a phenomenon that offers writers more freedom
but fewer safeguards.
Amy Ginensky, a Philadelphia media lawyer, urges editors to make sure that the person blogging on
behalf of the paper has a working understanding of what is permissible and what is not. "They should
understand the general contours of defamation," says Ginensky. "And there should be an editor or
blog boss to go to when potential issues arise."
Daniel Rubin, a longtime staff writer at the Philadelphia Inquirer, is the paper’s only full-time blogger.
His primary job is steadily feeding observations about Philly and beyond to blogs.philly.com/blinq,
which he launched in May 2005.
"Nobody edits what I write before it goes online, and I don’t edit the comments," says Rubin, adding
that he is deliberately cautious in his reporting and extremely mindful that the institutional weight of the
Inquirer looms over everything he does. "It’s fabulous. But you have to completely trust the person
who is doing this."
Some newspapers try to edit at least some of their blogs. "We have staff-written blogs and freelance
blogs, and the level of editing depends on the blog," says Joel Sappell, executive editor of L.A. Times
Interactive and an assistant managing editor for the print edition. "If it’s a staff writer, sometimes we’ll
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allow them to post directly if we know what the item is going to be. If it’s complex or controversial, we’ll
edit it. The expectations for online content have soared without the accompanying resources, and
we’re trying to give everything the right attention."
Other thorny issues debated at the Poynter session involve how to handle community-generated
content, which raises ethical questions that are unique to an online environment. Besides the content
created specifically for the newspaper’s Web site, what are the rules when you hyperlink to blogs that
are published elsewhere? Do those blogs have to follow the same ethical standards as the
newspaper? Is the newspaper effectively endorsing another blog, or giving it tacit approval or
legitimacy, simply by linking to it?
Robert Cox, president of the Media Bloggers Association, stresses that the allure of blogs is their
willingness to venture where newspapers have hesitated to journey. While most mainstream media
blogs steered clear, many other blogs published or linked to high-profile material like the gruesome
video of Nick Berg’s beheading in Iraq, the infamous Paris Hilton sex video and exit polling data that’s
widely leaked on Election Day. It’s the stuff that people talk about — and there’s a good chance that
reporters who didn’t get the exit data directly are racing to the Drudge Report to see it. Cox notes that
the juicy content is readily available on blogs — and that content is what drives traffic.
"If you went to any newsroom Web site, you wouldn’t see the actual Nick Berg video," says Cox. "And
my question is: Why not? If you’re going to stand on your island, you run the risk of having your
business cut out from under you. You can retain your high ethical standards but not be in the business
anymore. There’s not a clear-cut option of doing it or not doing it. If you don’t do it, you may not have
an audience to have ethical standards for." Cox warns that blogs that simply mirror newspapers in
content and tone are missing the point.
Steven A. Smith, editor of the Spokesman-Review, also doesn’t believe in the tentative approach,
warning that newspapers "can be cautious to our complete demise."
His paper has several staff-written blogs that focus on life in eastern Washington and northern Idaho,
including blogs that cover the state legislatures in Olympia, Washington, and Boise, Idaho; prep
sports; and the joys of flea markets and secondhand stores. The most popular staff-written blog is
Huckleberries Online, written by columnist Dave Oliveria which includes breaking news such as
"fishing on Lake Coeur d’Alene was banned today by the Idaho Department of Fish and Game in an
effort to boost salmon population."
But the paper also links to myriad blogs written by local residents, including the owner of a bed-andbreakfast and an English and Spanish teacher who blogs about northern Idaho’s Priest Lake in As the
Lake Churns. The paper is careful not to link to blogs that promote hate speech and has passed on
linking to blogs written by members of the Aryan Nation and similar organizations.
But it does link to a blog by a young woman named Gemini Wench, and a few years ago, when
Gemini was a teenager, she regularly blogged about sex and drugs. That raised some red flags, but
the newspaper ultimately decided, hey — this is what blogging is all about. (Recently, Gemini’s been
blogging about bleaching her hair at geminiwench.livejournal.com.)
"In the end, we decided that it wasn’t up to us to be her parents," says Smith, who has teenagers
himself. "Her blog speaks to what’s happening in the Secret Life of Teenagers."
The Spokesman-Review is updating its newsroom code of ethics and soon will introduce guidelines for
staffers who blog. The trickiest topic is how the newsroom should handle staffers who have personal
blogs, which could embarrass the newspaper or express opinions about local officials or news
developments that present a conflict of interest for reporters. Another big challenge is time
management. Smith says his reporters who blog find the instant feedback addictive — so much so that
it’s tough to find the right balance between blogging and filling the print edition of the paper.
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Still, Smith feels that blogging is a medium that newspapers should embrace, not fear. And while
ethics discussions are healthy, the industry may be taking it all far too seriously.
"It’s easy to overthink all of this stuff," says Smith. "But we can’t get off the train and wait for lawyers
and ethics to catch up. We’ll make mistakes, and we might get sued, but this world is no more perilous
than print."
4/ D’un blog à l’autre
Après un an et demi de posts sur son blog hébergé par 20minutes.fr, l'éditeur et journaliste
«donne les clés à d'autres» pour prendre ses quartiers à Lepost.fr, dernier-né du Monde.
Par Cordélia Bonal
LIBERATION.FR : lundi 10 septembre 2007
Le 3 septembre, Guy Birenbaum faisait ses adieux aux internautes sans-préavis, après un an
et demi de posts quasi quotidiens sur son blog Domaine d'extension de la lutte (DEL pour les initiés),
hébergé par 20minutes.fr. Avec 235 000 visiteurs en avril pendant la campagne présidentielle, 40 000
en juillet, DEL était devenu un incontournable. A 20minutes.fr, on avoue être un peu surpris de ce
départ soudain : «Il ne nous a rien dit, est parti sans prévenir. Il a dû céder à d'autres sirènes...» Sur
son blog, on peut lire : «Le bref post dont vous débutez la lecture ce matin est le dernier du Domaine
d'Extension de la Lutte, écrit-t-il dans sa dernière note. (...) Il est temps pour moi de passer à la suite.
D'inventer autre chose.»
La suite, ce sera sur Lepost.fr, la nouvelle plate-forme interactive développée par le site du
journal Le Monde. «Cette plate-forme va m'offrir davantage de possibilités techniques. J'ai envie de
faire plus de photos, de vidéos... De plus d'interactivité aussi. Tout est ouvert», explique Guy
Birenbaum. Quant à savoir pourquoi il quitte Domaine de l'extension de la lutte : «Les luttes, je les ai
toutes perdues cette année : je n'ai plus de maison d'édition, je suis viré de RTL, je me suis planté
dans mon analyse de l'élection... Aujourd'hui je suis moins énervé, j'ai envie de faire quelquechose de
plus léger.»
A Lepost.fr, Benoît Raphaël confirme : «Il est venu parce que notre projet l'intéressait, qu'il y a
eu une rencontre.» Peut-être aussi parce que Lepost.fr, contrairement à 20minutes.fr, le rémunère
pour son blog ? «Ce n'est pas pour ça que je rejoins le Post, mais c'est vrai que j'ai un contrat avec
eux sur la pub», dit le journaliste.
Toujours est-il que les amateurs Domaine d'extension de la lutte ne restent pas totalement
orphelins : Birenbaum parti, son blog vit encore, par la voix de ses commentateurs les plus assidus.
Dans un post intitulé «Passation de pouvoirs», les dénommés Florence et José reprennent les
commandes du navire : «La cérémonie de passation de pouvoirs entre Guy et Florence/José a eu lieu
ce matin peu avant dix heures. Cette cérémonie fut sobre et sans aucun protocole. Ni femme, ni
enfants, ni journalistes.»
A noter : Online Journalism Review (OJR) a consacré plusieurs articles en août 2007 aux
« participatory journalism », considéré comme « l'émergence d'une nouvelle forme de
journalisme ».
Ce « journalisme collaboratif » se traduit par le succès populaire des blogs commentant - ou
faisant - l'actualité, mais aussi de sites d'information collaboratifs souvent plus réactifs que la presse
classique. Ces nouveaux médias semblent de plus en plus emprunter des techniques de journalistes,
comme l'interview ou la confrontation de sources, et la frontière semble de plus en plus ténue entre
eux et les médias en ligne traditionnels.
L'OJR fournit une définition argumentée du journalisme collaboratif, ainsi qu'un long article
agrémenté d'interviews de bloggers et d'hommes des médias, mettant en lumière ses caractéristiques.
L'article explique qu'on peut s'attendre à ce que « de plus en plus d'actualités proviennent de
citoyens-reporters, au fur et à mesure que les téléphones mobiles dotés de caméras vont se répandre
dans le monde ». Les organes de presse peuvent d'ailleurs tirer parti de cette nouvelle tendance,
comme cet exemple de la BBC, publiant les photos amateurs envoyées par ses lecteurs lors des
manifestations anti-guerre en février.
53
On apprend aussi que les fondateurs de Kuro5hin et Metafilter vont ouvrir prochainement un
site d'information collaboratif dédié à la campagne présidentielle US qui, on le sait, est déjà
« couverte » par de nombreux blogs, officiels ou non.
5/ Procès Yahoo!
Des barbelés dans la pensée
Par Marc Knobel et Antoine Peillon
Publié, en partie, dans Libération du 28 novembre 2000 et, en intégralité, dans Tribune juive du 7
décembre 2000
Lundi 20 novembre 2000, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, Jean-Jacques
Gomez, a ordonné à la société américaine Yahoo! Inc. d'interdire, dans un délai de trois mois, l'accès,
à partir de la France, à son site « Yahoo! Auction » qui met aux enchères des objets nazis et à tout
site contestant les crimes nazis. Passé ce délai, la société Yahoo! Inc. devra verser 100.000 francs
d'astreinte par jour de retard dans l’exécution de ce jugement.
«Nous regrettons d'avoir à mettre en œuvre des mesures (techniques) qui ne seront pas efficaces»,
s'est alors désolé Christophe Pecnard, avocat de Yahoo! Inc. «Il n'y a pas de débat technique, juste
un débat politique», a rétorqué Stéphane Lilti, avocat de l'Union des étudiants juifs de France (UEJF).
A cette occasion, le juge Jean-Jacques Gomez s'est étonné que Yahoo! Inc., qui refuse sur son
service la vente d'organes humains, de drogue, de cigarettes, d'ouvrages pédophiles ou encore
d'animaux, n'ait pas étendu cet interdit aux symboles du nazisme. «Une telle initiative aurait le mérite
de satisfaire une exigence éthique et morale que partagent toutes les sociétés démocratiques», a écrit
le juge, dans son ordonnance.
Pour nous, il s’agit là d’une grande victoire de la justice, de la raison et de la… liberté d’expression.
En effet, depuis le printemps dernier, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme
(Licra), l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) et le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié
entre les peuples (MRAP) poursuivent le géant américain de l’internet devant la justice française. Et
par trois fois (22 mai, 24 juillet et 11 août), déjà, le juge des référés du tribunal de grande instance de
Paris leur avait donné raison. Pourtant, les voix n’ont pas manqué, venues de cette autre rive du
monde qu’il est convenu d’appeler « cyberespace », pour accuser les organisations antiracistes de
vouloir censurer les « internautes », ces nouveaux chevaliers de la liberté d’expression absolue, et de
dresser des « barbelés »[1] (vous avez bien lu !) dans la « toile ». En témoignent, entre autres, les
injures adressées à Laurent Joffrin, du Nouvel Observateur, sur le site internet de son propre journal,
parce qu’il appelle au boycott de « Yahoo!, portail des nazis », et les menaces haineuses que les
responsables des associations citées reçoivent chaque jour.
Malgré cette infâme confusion, ou plutôt, à cause de cela, nous persistons dans la poursuite de tous
les propagateurs du mépris et de la haine. Y compris quand ils abusent du prestige technologique
dont profite encore l’internet. Les barbelés que nous connaissons, dont on nous a parlé ou que nous
avons vus de nos propres yeux, ne flottent pas dans le « cyberespace ». Ils témoignent de la
souffrance infinie de millions d’enfants, de femmes et d’hommes de tous âges. Ces barbelés
enfermaient, comme des « rats », des innocents triés, tatoués, frappés, affamés, torturés, fusillés,
pendus, gazés et réduits en cendres.
Les centaines d’objets nazis vendus aux enchères sur le grand « portail » internet américain Yahoo!,
ces tee-shirts et tapis de souris à l’effigie de Hitler, ces brassards à croix gammée, ces uniformes SS,
54
ces boîtes de Zyklon B mises à prix à 50 $, ces lambeaux de linges de déportés, bref, tous ces
« vestiges de la seconde guerre mondiale » proposés aux « collectionneurs » à grand renfort de
qualificatifs racoleurs et de points d’exclamation, symbolisent pour nous le crime contre l’Humanité,
l’assassinat méthodique, implacable, organisé jusque dans ses moindres détails, de millions d’enfants,
de femmes et d’hommes de tous âges.
Le procès qui nous est fait tient en peu de mot : « Vous clouez Yahoo! au pilori et, par là, vous
réveillez le spectre de l’édification de frontières sur internet ». Ici encore, stupéfaction. Le « pilori » que
nous connaissons, c’est le journal antisémite Au Pilori des années noires de l’Occupation. Les
journalistes de ce torchon, pour la plupart membres de l’Association des journalistes anti-juifs,
prospéraient grâce à une collaboration outrancière avec les nazis. De l’histoire ancienne, nous direzvous, sans doute au nom de ce « devoir d’oubli » qui séduit de plus en plus de consciences fatiguées
par la leçon d’Auschwitz, par la veille perpétuelle que nous impose la persévérance vertigineuse du
mal. Le génocide arménien ? Pas (officiellement) reconnu ! Les massacres de masse dans le
Cambodge de Pol Pot ? Si loin ! Le Rwanda ? Trop compliqué ! Le racisme qui s’étale largement,
démesurément, et pas seulement en Allemagne, le racisme qui agit impunément, avec son lot
d’insultes, de discriminations, de coups, de crimes ? Allons, le Front National a implosé, circulons,
l’inconscience tranquille…
C’est bien cela qui nous inquiète : cette insupportable faculté de détourner les yeux, cette si grande
facilité d’écarter d’un revers de la main, d’un sourire entendu ou d’un bon jeu de mots les idées qui
dérangent, qui engagent. Celles, par exemple, qui nous affirment que la mémoire est un support vital
de la pensée. Dans l’un de ses derniers écrits, Hannah Arendt revient sur le procès d’Eichmann :
« Aussi monstrueux qu’aient été les faits, l’agent n’était ni monstrueux ni démoniaque, et la seule
caractéristique décelable dans son passé comme dans son comportement durant le procès et
l’interrogatoire de police était un fait négatif : ce n’était pas de la stupidité mais une curieuse et
authentique inaptitude à penser. »[2] Celles, aussi, qui nous avertissent que la « banalité du mal », le
« mal radical », la « persévérance du mal »…, le mal tout simplement, se lovent si naturellement dans
la « raison instrumentale » pressentie par Rousseau et dénoncée, entre autres, par les penseurs de
l’école de Francfort (Adorno, Horckheimer…) qui n’ont pas fini d’inspirer les meilleurs philosophes
contemporains. La raison instrumentale ? Oui, cette logique de l’instrument qui s’impose à l’homme,
qui soumet l’humain à la technique, qui précipite, un jour, le destin de millions d’innocents vers
l’Anéantissement, sous les prétextes liés de l’espace vital (pas encore le « cyberespace ») et de
l’impératif logistique des chemins de fer.
Le débat technologique actuel sur le comment dérouler des « barbelés dans le cyberespace »[3] est
digne de l’anti-pensée d’un Eichmann et de tous ces « fils d’Eichmann »[4] que nous devenons si vite
lorsque l’outil, y compris l’ordinateur, devient maître et possesseur de notre volonté. A la différence
des « technos » (technocrates, technophiles…), le spectre qui nous hante est celui du racisme qui
fleurit sur internet, avec la complicité évidente des marchands d’oubli. Comme on oublie les victimes,
comme on s’écarte du chemin de l’assassin, on laisse faire et passer, par indifférence, voire par
corruption, toutes les saletés du monde. L’excellent sociologue Philippe Breton (CNRS) ne s’est pas
trompé sur « le culte de l’internet », ce « bon outil » qui, faute de loi et de raison, risque d’être « le
cheval de Troie de valeurs fondamentalement anti-humanistes »[5].
Il faut « surfer » sur le Net pour comprendre ce qu’il en est, pour voir les pages de ces sites suédois
ou allemands, entre autres, où sont publiées les listes nominatives de militants antiracistes,
journalistes, artistes et syndicalistes à assassiner, pour voir les images atroces de ces sites néonazis,
klanistes, satanistes qui s’illustrent par leurs appels incessants à la haine et à la violence. Yahoo!, par
la banalisation du nazisme dont il profite, ne vaut pas mieux. A qui reviendra la dernière honte d’y
55
vendre aux enchères des morceaux de barbelés aux appellations d’origine contrôlée « AuschwitzBirkenau », « Treblinka », « Chelmno », « Sobibor », « Belzec », « Maïdanek » ?
Faut-il alors réglementer l’internet ou laisser la « toile » (d’araignée) porter les pires horreurs ?
Toutes les images, tous les textes qui bafouent la dignité humaine ? Tous les commerces qui crachent
sur nos tombes, attisent la haine, foulent au pied les droits de l’homme, au nom d’une « liberté
d’expression » déchaînée, affranchie de toute responsabilité envers autrui ? Le vrai débat, moral et
politique, est là en vérité. Pas dans la faisabilité technique de « cyberfrontières » hérissées de
barbelés fantasmatiques. Quelle étrange défaite de la démocratie ce serait, encore, de laisser ses
ennemis les plus redoutables envahir peu à peu les écrans de nos ordinateurs, quel nouveau Munich !
Nous affirmons que défendre la liberté d’expression n’est pas tolérer que l’internet devienne un toutà-l’égout sans fond où tout peut s’écouler, les « vestiges » des génocides passés et les armes des
massacres à venir. Sur les étals virtuels, nous n’acceptons pas que l’on vende en vrac des livres pour
enfants et les machettes du Rwanda, Libération en ligne et les brûlots du Ku Klux Klan, les poèmes de
Primo Levi et les manuels de torture de la SS. Nul d’entre nous, militants antiracistes, journalistes,
syndicalistes, ne supportons les « censeurs ». Le prix que nous payons, chaque jour, pour certains de
nos combats, suffit à le prouver.
Nous demandons simplement une protection réelle des droits de l’homme et du citoyen, lesquels
sont l’inscription, dans la vie sociale, de l’harmonie subtile entre la liberté et la responsabilité de
chacun vis-à-vis de l’autre, de tous les autres. Cette exigence nous sépare probablement des
fanatiques du libéralisme total, donc totalitaire. Et puisque les frontières hérissent certains, nous les
invitons à méditer l’article 29 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948), en laquelle
nous trouvons, pour notre part, un fondement à la plupart de nos actions : « Dans l’exercice de ses
droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n’est soumis qu’aux limitations établies par la loi
exclusivement en vue d’assurer la reconnaissance et le respects des droits et libertés d’autrui et afin
de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l’ordre public et du bien-être général dans une
société démocratique. »
Enfin, la même Déclaration « sans frontières » stipule de façon limpide, dès son premier article, que
si « les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits », ils sont aussi « doués de
raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». Les
ventes aux enchères nazies de Yahoo! procèdent-elles de cet « esprit de fraternité », pour qu’elles
soient ainsi défendues au nom d’une liberté qui n’est que celle d’offenser ? Quant à nous, nous
mettons un point d’honneur à nous opposer à la complaisance actuelle vis-à-vis des
« cybermarchands » de haine et de mort, n’en déplaise à ceux qui tentent inlassablement d’enfermer
la pensée derrière des barbelés[6].
[1] Nous faisons allusion, ici, au titre pour le moins malheureux d’une "analyse" de Michel Alberganti,
parue en « Une » du journal Le Monde daté du 12 août 2000 : « Des barbelés dans le cyberespace ».
[2] « Thinking and Moral Considerations : A Lecture », in Social Research, 1971.
[3] Le 11 août, le juge des référés a été obligé d’ordonner une deuxième « expertise » pour savoir s’il
est techniquement possible d’interdire aux internautes français l’accès à un site américain…
[4] Günther Anders (premier mari de H. Arendt), Nous, fils d’Eichmann, Payot & Rivages, 1999.
[5] Philippe Breton, Le Culte de l’Internet ; Une menace pour le lien social, La Découverte, collection
« Sur le vif », 2000. Dans le même sens, lire aussi le décapant Cybermonde : la politique du pire, de
Paul Virilio (Textuel, 1996), ou le très récent Internet : petit manuel de survie, de Dominique Wolton
(Flammarion, 2000).
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[6] Olivier Razac, Histoire politique du barbelé, La Fabrique, 2000, p. 62 : « Le barbelé est donc
devenu un symbole quasi universel des camps et plus largement des violences fascistes ou
totalitaires… »
Dossier en ligne : http://www.franceradicale.org/cybermarchands.htm
6/ Glossaire du web
Blog, Blogue, Carnet : Page perso mis à jour régulièrement sous forme d’actualités datées,
signées avec possibilité d’adjoindre un commentaire pour les visiteurs. C’est une sorte de journal
de bord qui va de la confession intime à une analyse de l’actualité. Les articles sont présentés par
ordre dé-chronologique.
Blog : Journal personnel en ligne. Les blogs sont des “sites perso” de deuxième génération.
Contrairement aux “pages perso” qui nécessitaient des compétences techniques (HTML, FTP,
etc.) et étaient donc réservées aux informaticiens, les blogs sont très simples à utiliser. N’importe
quel internaute peut donc en créer un. Les blogs possèdent des mécanismes avancés de
syndication qui permettent à plusieurs blogs complémentaires de se relier les uns aux autres
(blogroll) pour maximiser leur trafic. Les blogs possèdent également un système de commentaires
qui permet aux lecteurs de faire des remarques sur un article.
Blogroll : Le blogroll est une collection de liens hypertextes, généralement regroupés sur la page
d’accueil d’un blog, qui pointent vers d’autres blogs.
Crowdsourcing : Pratique qui consiste à encourager les internautes à créer du contenu sur un
site en leur donnant des moyens : trafic important, outil adapté aux échanges entre internautes,
etc. C’est notamment l’une des stratégies qui a fait le succès de MySpace, YouTube et
DailyMotion. Voir aussi « UGC ».
Download (téléchargement) : Permet à l’utilisateur de rapatrier sur sa machine des fichiers
venant du serveur qu’il consulte.
FolkMind : FolkMind caractérise l’esprit planétaire qui émerge avec le web 2.0. Les blogs
exposent des données structurées : tags, blogroll (OPML) et flux RSS. En agrégeant l’ensemble
de ces flux, on peut calculer à un instant T les tags les plus utilisés et les blogs les plus influents.
Comme les blogs expriment souvent une opinion, les tags les plus utilisés reflètent “l’état d’esprit”
du web 2.0 et les idées fortes qui l’animent à un instant T.
Folksonomie / Folksonomy :Néologisme. Contraction de Folk (gens, peuple, social) et de
Taxinomie (science et théorie du classement). Système de classification collaborative de contenu
web (pages, images, favoris,...) réalisé par des internautes (regroupés ou non en communautés)
via des tags.
Folksonomy : Contraction de “folk” et de “taxonomy”, la folksonomy est le classement réalisé par
les internautes du monde entier lorsqu’ils “taguent” des pages et sites web sur des sites de
référence comme del.icio.us. C’est en quelque sorte un nouveau “Google” constitué
manuellement par et pour les internautes. Voir aussi « tags ».
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Forums de discussion/ Newsgroups : Service du net qui permet à un groupe de personnes
d’échanger opinions ou idées autour d’une thématique, en direct ou en différé. Chaque internaute
peut lire les messages des autres membres et apporter sa contribution. Les forums ont les plus
connus sont ceux de Usenet. Les forums de discussion sont accessibles via un logiciel de
messagerie (fonction "News") ou via le web (ex : les Googlegroups).
Gadget : Terme inventé par Microsoft pour désigner les modules s’exécutant sur le bureau de
Windows Vista. Par extension, un gadget désigne aujourd’hui n’importe quel composant logiciel
destiné à un webOS ou un webtop. Voir aussi « module », « webOS », « webtop ».
Identity 2.0 : Concept qui sous-tend que le web est une gigantesque carte de visite sur laquelle
sont exposés de nombreux aspects d’un même individu : photos en ligne sur Flickr, tags sur
del.icio.us, e-mails sur GMail, vidéos sur YouTube, etc. Pour les défenseurs de cette vision, le
web est un formidable outil de promotion pour chaque individu, mais c’est également un endroit
où l’on risque de laisser des traces qui intéresseront les recruteurs et employeurs potentiels.
Voir aussi « OpenID ».
Module : Appelé aussi gadget, extension ou widget. Un module est un composant logiciel qui
s’installe directement sur une plate-forme hébergée, un webOS ou un webtop. Netvibes en
comptait déjà 671 au début de l’année. Exemple : Ecosystème Netvibes. Voir aussi « webOS »,
« webtop », « SaaS ».
Newsletter (lettre d’informations) : Bulletin d’information envoyé périodiquement sous la forme
d’un courrier électronique vers des utilisateurs abonnés.
OpenID : Système d’identification décentralisé qui permet aux utilisateurs de ne s’identifier qu’une
seule fois auprès de différents services, étrangers les uns aux autres, au sein d’une même
session de leur navigateur. OpenID a été développé par LiveJournal, VeriSign, JanRain et Sxip,
rejoints plus tard par Microsoft et AOL. Exemple : MyOpenID
OPML : Outline Processor Markup Language : Format XML permettant d’échanger des listes
de fils ou flux (ou feed) RSS. Le format OPML définit la façon de classer hiérarchiquement une
liste d’éléments. On l’utilise aussi, par exemple, pour partager des playlists, des albums photos,
etc. Voir aussi « RSS ».
PAP : Page avec publicité : bandeau, fenêtre pop-up, logo…
Permalink : Une nouvelle façon de désigner les URL (Unique Resource Locator). Un permalink
est une URL stable dans le temps qui permet d’accéder à tout moment, et avec la certitude que le
lien n’est pas cassé, à une ressource sur le web. On les utilise notamment pour les articles
publiés sur les blogs. Voir aussi « Trackback ».
Podcast : Fichier audio (MP3) présenté dans un fil XML (RSS le plus souvent) permettant de s’y
abonner. L’internaute est averti à chaque fois qu’une nouvelle émission, chanson, etc. est ajoutée
à la liste. La plupart des logiciels de gestion de musique associés aux baladeurs MP3 récupèrent
automatiquement les fichiers MP3 grâce au podcast. Par extension, le principe des podcasts
s’applique aujourd’hui aux films ou séquences vidéo. On parle alors de “vidéocast”.
Programmable web : Avec le web 2.0 émerge la notion d’une plate-forme de développement à
l’échelle de la planète. Comme les sites web 2.0 exposent tous leurs méthodes et données grâce
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à des APIs, il devient plus facile d’assembler plusieurs services (Google Maps et Yahoo ! Search
par exemple) pour créer une nouvelle application web 2.0. On appelle ces agrégats de services
des mash-ups. Pour faciliter l’émergence de mash-ups, le site programmableweb.com donne la
liste de toutes les APIs publiques du web 2.0. Voir aussi « Web As a Platform ».
Read/Write web : La notion de read/write web est née du constat que le web 1.0 était
essentiellement tourné vers la publication en ligne de documents statiques impossibles à modifier
(read) par ses lecteurs. Les Wiki et les blogs (via leurs mécanismes de commentaires) facilitent la
collaboration à plusieurs (write) autour d’un document ou d’un article. Par extension, toutes les
applications “web 2.0″ favorisent une forte collaboration entre leurs utilisateurs. Une nouvelle Toile
émerge donc où chaque internaute peut lire, mais aussi écrire des données. Exemple :
Wikipedia.org.
Réseau social : Appelé aussi “service de réseautage d’affaires” ou “social networking”, ces sites
proposent de laisser son CV et de recréer en ligne son réseau social (privé ou professionnel) pour
faciliter les échanges entres les membres du réseau. Exemples : LinkedIn et 6nergies. Voir aussi
« Identity 2.0 ».
RSS : Really Simple Syndication : Ce format XML permet d’échanger très simplement des
données entre deux sites web. D’abord conçus pour faciliter la syndication de contenus, les
standards Rich Site Summary (RSS 0.91), RDF Site Summary (RSS 0.9 and 1.0) et Really Simple
Syndication (RSS 2.0.0) deviennent peu à peu LE protocole de transport de données du web 2.0.
Il ne faut donc plus voir les flux (feed, en anglais) RSS comme de simples fils d’actualité. RSS est
au web 2.0 ce que HTTP est au web 1.0. Exemple : Flux RSS d’Indexel.net.
RSS (RDF Site Summary ou Rich Site Summary ou Real Simple Syndication) : Un fichier
RSS est un fichier XML qui permet de publier des titres de nouvelles ou d’articles formatés donc
récupérables et exploitables dynamiquement par d’autres sites (syndication de contenu) via des
agrégateurs de contenu. Cete technologie est destinée à produire automatiquement des flux (fils)
de "billets" ou d’actualités publiés avec leur texte, titre, date, l’auteur (sans mise en forme). On
trouve ce format pour les blogs, les portails d’actualités (BBC, CNN, Yahoo!,…), les sites qui
proposent des actualités régulièrement mises à jour (sites d’entreprises, de presse). Ces fils
(feed) sont repérables via des icônes(ci-dessous) ou les termes : "syndiquez ce contenu",
"syndication", "version XML".
SaaS : Software as a Service : Principe consistant à transformer un logiciel que l’on installe sur
une machine en un service en ligne qui s’exécute dans un navigateur internet. De nombreux
éditeurs comme Salesforce.com (AppExchange), Microsoft (Live.com), webEx (Connect), et
d’autres proposent déjà des plates-formes hébergées permettant d’y déployer un service métier. A
terme, ces plates-formes pourraient devenir l’équivalent de progiciels de gestion intégrés (ERP)
en ligne ou même de système d’exploitation en ligne. SAP et Microsoft n’ont qu’à bien se tenir !
Exemple : AppExchange. Voir aussi : webOS.
Scrolling : Défilement d’une page avec les flèches du clavier ou avec l’ascenseur (horizontal ou
vertical).
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Social web (social computing) : On a trop souvent tendance à résumer le web 2.0 par
l’acronyme AJAX. Le web 2.0 est avant tout une évolution sociale. Alors que les internautes du
web 1.0 se contentaient de trouver et lire de l’information en ligne, le web 2.0 fait une très large
place à la collaboration entre internautes. Ce sont d’abord les internautes qui créent le web 2.0
grâce à leurs tags del.icio.us, leurs blogs, etc. Ce partage est aussi particulièrement bien illustré
par le site Agoravox. L’acronyme “social web” synthétise cet esprit de partage et de collaboration
qui est la base philosophique du web 2.0. L’emblème de cette dimension sociale est
l’encyclopédie en ligne Wikipedia.org.
Social Networking : Voir « réseau social ».
Streaming : Technologies de diffusion du son ou de vidéo en flux continu sur le Web. Permet de
lire les fichiers au fur et à mesure du transfert sans avoir à attendre la fin de leur téléchargement.
Tag : Etiquettes. Choisies et attribuées librement par les internautes, ce sont des mots clés qui
permettent de définir, classer puis rechercher des documents, des favoris, des images. Approche
subjective sans organisation, hiérarchie et terminologies préétablis comme sur les systèmes
documentaires. Exemple : les tags définissant les favoris sur del.icio.us (partage de favoris)
Nuage de Tags : affichage d’un groupe de tags permettant de visualiser les plus fréquemment
employés. La taille des mots est proportionnelle à leur fréquence d’utilisation. Plus un mot est
gros, plus il est employé. Les tags sont employés dans le cadre de la Folksonomie.
Tag : Le tag est le mot-clé de l’internaute. Un tag est un mot-clé utilisé par un internaute pour
décrire n’importe quel objet accessible en ligne : morceau de musique, page web, site, etc. C’est
la base de la “folksonomy” et l’un des principes fondateurs du web 2.0. Les tags sont notamment
utilisés par les services de “social bookmarking” tels que del.icio.us et Yahoo ! My Web 2.0 afin de
catégoriser des bookmarks. Par extension, les tags sont utilisés par tous les sites web 2.0 pour
décrire des personnes (sur les communautés telles que TagWorld, My Space, etc.), des
événements (upcoming.org), etc. Exemple : del.icio.us
Tag Cloud : Un “nuage de tags” est une représentation visuelle basée sur la densité des tags les
uns par rapport aux autres. Si un internaute décrit par exemple 25 sites web (sur del.icio.us) à
l’aide du tag “web 2.0″, dix autres sites avec “AJAX” et cinq autres avec “mash-up”, le tag “web
2.0″ sera affiché avec une police de caractère de plus grande taille. Cette représentation visuelle
permet de faire ressortir en un clin d’oeil les tags les plus “importants”. Exemple : TagCloud.com.
Trackback : Mécanisme qui permet de poster, dans les commentaires d’un article publié sur un
blog, un lien vers d’autres articles abordant le même sujet. C’est une façon “normalisée” d’enrichir
un article à l’aide d’un simple lien hypertexte.
UGC : User Generated Content : Cet acronyme désigne le contenu d’un site ou d’un service en
ligne produit directement par les internautes, en opposition avec le contenu produit par une
entreprise ou une institution. C’est le cas notamment des blogs. Voir aussi : crowdsourcing, blog.
Web : World Wild Web (Toile d’araignée) : Composante de l’internet. Structure de navigation sur
un réseau de pages via des liens hypertextes, mots sur lesquels il suffit de cliquer pour accéder à
un autre document.
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Web 2.0 : Nouvelle génération des applications web. Une génération qui offre des outils pour
partager de l’information sur le net d’une façon à la fois communautaire et personnalisée. Là où
l’internaute était passif et statique avec le Web 1.0, il est devenu actif, participatif et socialisant
avec ce Web 2.0. L’internaute crée du contenu, le partage, l’organise, le personnalise.
- Applications et principes types : bookmarks sociaux, pages d’accueil personnalisables, partage
d’images, moteur de recherche à périmètre personnalisable, réseaux sociaux, blogs, RSS,
mashups, bureautique en ligne, moteurs de tags, folksonomie…
Les tags permettent d’étiquetter et rechercher le contenu.
-
Technologies associées : XML, Ajax, DHTML, Soap…
Cartographie sensible du web 2.0, selon WikiPédia
Webtop : Un webtop est une page d’accueil que l’internaute peut personnaliser avec des modules
- appelés aussi gadgets et widgets selon les webtops. Parmi les modules proposés, certains
permettent d’afficher une information : flux RSS, cours de bourse, météo, sondage, programme
télé, etc. D’autres, plus interactifs, permettent d’écouter une radio en ligne comme Last.fm ou
Pandora, d’afficher des photos en fonction d’une recherche par mot clé, etc. webOS et webtop
fusionnent actuellement (mi 2007). Et des initiatives de standardisation de leurs composants sont
en cours. Exemple : Netvibes.
Wiki : Site communautaire dont toutes les pages peuvent être modifiées en permanence par ses
membres. Exemple : L’encyclopédie en ligne Wikipedia.org repose sur une architecture de wiki.
Créé en 1995 par Ward Cunningham, le Wiki tire son nom du mot hawaïen "WikiWiki", qui signifie
"vite". Aujourd’hui utilisé par des communautés professionnelles ou non, pour collaborer sur des
projets collectifs.
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XML (eXtensible Markup Language) : Langage qui permet à un créateur de pages HTML de
définir ses propres marqueurs (tags) et donc de personnaliser la structure et l’organisation des
données qu’il présente. Cela permet une meilleure définition, transmission, validation et
interprétation des données entre applications et organisations. Les blogs sont développés en
XML.
7/ L’internet contemporain (définition par Joël Ronez, [Cup Of
Tea] Blog, 10 septembre 2007)
« J’ai récemment refondu mes introductions de séminaires et conférences. Là où j’expliquais pour
amener les usages actuels qu’Internet avait modifié le rapport au temps, à l’espace, les modes
d’indexation et d’archivage et le rapport à l’information, j’entre maintenant dans le vif du sujet.
En clair : plutôt que “qu’est-ce qu’Internet a changé ?“, “Internet, c’est quoi ?“…
Voici donc ma définition d’Internet en 6 points, chacun relié à une thématique 2.0, sur laquelle on
peut ensuite bâtir une explication ou une illustration.
Internet est un média…
- de flux : modification du rapport au temps, primat de l’immédiateté. Le rythme
périodique n’est plus adapté.
- hypertexte : le lien est une composante essentielle des contenus éditoriaux, qui leur
permet d’exister sur le réseau. Il façonne la culture du fragment
- structuré : les articles ne se lisent plus sur des pages, mais dans des flux RSS. Le
XML a sublimé le web (champ sémantique de la chimie : sublimer = directement de
l’état solide à l’état gazeux).
- indexé par ses utilisateurs : les rédacteurs, en choisissant les bons mots-clés,
mais aussi les lecteurs, en taguant les contenus, permettent de baliser les contenus.
- Multi-média : les internautes ne se contentent plus de texte, ils veulent de l’image et
de la vidéo (Dailymotion, Youtube, etc.)
- social : Internet permet de connecter des hommes et pas uniquement des contenus
(succès de Facebook, Myspace, etc.). Internet est un média humain, dont les
contenus s’organisent autour d’individus, et non uniquement de nomenclatures. »