L`ABCDaire du candidat éleveur ovin Si détenir une vache "au fond

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L`ABCDaire du candidat éleveur ovin Si détenir une vache "au fond
L'ABCDaire du candidat éleveur ovin
Si détenir une vache "au fond de son jardin" est une chose souvent rédhibitoire, y détenir un
mouton est généralement bien plus accessible, que ce soit en termes de superficie,
d’installations nécessaires, de manipulation des animaux, d’investissements, etc. Le mouton ou ovin dans le jargon de l’éleveur ou du scientifique - est un animal "à la portée de tous", que
ce soit dans un but de loisir, de revenu complémentaire, voire à titre professionnel…
Christel Daniaux
---Le premier choix que devra poser le candidat éleveur est, outre la finalité de ses animaux production de viande, de lait ou de laine, entretien d’un terrain pauvre, participation aux
concours d’animaux… -, le type de conduite d’élevage qu’il désire mener. En fonction de ces
deux premières considérations, le candidat éleveur se tournera plutôt vers l’une ou l’autre
race… Ou inversement pour les amoureux d’une race particulière !
"Bergerie" ou "herbage" ?
La saisonnalité de la reproduction chez le mouton a conduit au développement de trois grands
types de conduite d’élevage. Comme dit dans les précédents articles, le déclenchement de
l’activité sexuelle des animaux dépend de la longueur du jour. Certaines races entrent en
activité sexuelle vers la mi-juillet, dès que les jours diminuent. D’autres sont plus tardives et
leur réveil sexuel ne se fait que vers la mi-septembre. D’autres encore, plus rares, ne sont en
repos sexuel - ou activité sexuelle moindre - que durant les mois à plus forte augmentation de
la longueur du jour - avril et mai ; dans le jargon, on parlera de races qui "dessaisonnent".
Après une période de gestation de cent quarante-cinq jours, en moyenne, les brebis agnèleront
donc à partir de mi-décembre pour certaines, à partir de mi-février pour d’autres et à contresaison pour d’autres encore : septembre pour une fécondation de fin mars. L’élevage des
agneaux se fera alors respectivement en bergerie, en prairie ou dans des conditions dépendant
du moment pour une production à contre-saison.
- Les agneaux de bergerie
Les races sexuellement précoces - Suffolk, Vendéen… - seront préférentiellement accouplées
entre juillet et août, bien qu’étant capables de se reproduire jusqu’en janvier. Les naissances ou agnelages - auront donc lieu entre décembre et janvier. A cette saison, mais également
pour des raisons de développement corporel, les agneaux seront élevés exclusivement à
l’intérieur, en bergerie. Ils seront abattus vers l’âge de nonante jours, à un poids de 35 à 38
kilos. Les brebis sortent alors en prairie sans leurs agneaux.
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Dans ce système d’élevage, la croissance des agneaux est rapide, atteignant souvent un gain
de poids de 350 grammes par jour. L’éleveur devra donc être technique et bien organiser ses
ventes, l’agneau "trop maigre" de 34 kilos pouvant devenir "trop gras" à 38… Soit en
seulement onze jours ! Toutes ces races précoces peuvent évidemment agneler plus tard dans
la saison et leurs agneaux peuvent alors être élevés à l’herbe.
- Les agneaux d’herbage
Quant aux races sexuellement moins précoces - Texel, Ardennais Roux… -, leur activité
sexuelle se limite entre septembre et janvier. Les accouplements sont généralement organisés
en octobre, de manière à ce que les agnelages aient lieu à partir de début mars. A cette
période, les brebis sont encore en bergerie et les naissances peuvent donc être surveillées.
Début avril, lorsque les agneaux ont un mois, ils commencent à vouloir manger. Le printemps
est là, l’herbe pousse et le berger ouvre les portes… pour produire des "agneaux d’herbage".
Vers l’âge de six mois, à un poids de 40 à 45 kilos, les premiers agneaux partent pour
l’abattoir. Quelques semaines avant leur abattage, les agneaux doivent être quelque peu
engraissés. Cette "finition" des agneaux pourra être réalisée soit avec de l’herbe - mais plus
difficilement sous nos latitudes - soit, plus couramment, en complémentant en prairie les
agneaux avec des aliments concentrés ou en les rentrant en bergerie et en leur distribuant des
aliments concentrés.
La production à l’herbe est l’apanage de nombreux éleveurs wallons… Environ les trois
quarts des agneaux sont produits de la sorte. C’est encore plus vrai pour les éleveurs amateurs
qui choisissent presqu’exclusivement ce type de conduite d’élevage, moins exigeant en terme
de travail pour l’éleveur.
- Les agneaux produits à contre-saison
Pour les races ayant une longue période d’activité sexuelle, de dix à douze mois par an, un
cycle de production plus intensif pourra être mené, du type "trois agnelages en deux ans" ou
"un agnelage effectif par an", les femelles non fertiles lors de la "première passe" ou ayant
avorté pouvant alors être remise à la reproduction au cours de la même année… Pour un
éleveur professionnel, seul type d’éleveur généralement friand de ce mode d’élevage,
l’objectif d’une telle production sera d’étaler les périodes de mises-bas au cours de l’année
afin d’étaler ses périodes de travail. Il sera également de produire lorsque les autres races sont
en repos sexuel.
Pour un éleveur amateur, ce type de production n’est pas forcément à balayer de la main.
Pensons, par exemple, aux enseignants pour qui il serait opportun de faire correspondre la
période des agnelages avec celle des vacances scolaires. En fonction du mois de naissance,
l’élevage des agneaux se fera soit intégralement en bergerie, soit en prairie suivi d’une finition
en bergerie à partir du sevrage effectué à l’âge de deux mois.
--Le mouton à viande en bref…
Des objectifs
- un agnelage par an
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- deux agneaux par an ou 40 kilos de carcasse par an
Des caractéristiques
- gestation : 5 mois
- prolificité moyenne : 1 à 2,6 agneaux selon la race
- reproduction saisonnière fonction de la race
Des besoins
- main-d’œuvre : un temps plein = minimum quatre cents brebis
- une brebis = six heures de travail par an
- bergerie : 3 mètres carrés par brebis
- prairie : 4 à 15 brebis par hectare, de la prairie pauvre ou réserve naturelle à la production en
bergerie
- aliments concentrés : 50 à 90 kilos par brebis et par an et 0 à 60 kilos par agneau, de la
production à l’herbe à la production en bergerie
--Ardennais Roux ou Texel culard ?
Une fois le type d’élevage déterminé, le choix de la race sera un compromis entre les goûts et
les objectifs. Lors de ce choix, il faudra également ne pas négliger la disponibilité en
reproducteurs dans sa région… Renouveler le sang de son troupeau avec des animaux
provenant de l’étranger n’étant pas toujours chose aisée.
Chaque race présentera l’avantage de l’une ou l’autre aptitude plus marquée : prolificité nombre d’agneaux par portée -, production laitière, sobriété alimentaire, etc. Passons en revue
quelques races courantes chez nous et présentant des caractéristiques marquées :
- Texel culard : la meilleure conformation bouchère et le maximum de viande sur la carcasse.
En contrepartie, les agnelages de cette race d’herbage de petit gabarit peuvent être difficiles et
demandent à être surveillés. Les animaux sont également assez sensibles.
- Swifter : la plus prolifique des races ovines. Pour cette race d’herbage présentant une
prolificité moyenne de 2,6 agneaux par portée, les portées de quatre agneaux par brebis ne
sont pas chose exceptionnelle ! Toutefois, les mères ne produisent pas toujours suffisamment
de lait que pour pouvoir allaiter toute leur progéniture.
- Bleu du Maine : la plus maternelle. Cette race d’herbage de grand gabarit est réputée pour sa
facilité d’agnelage, sa prolificité élevée - 2,2 agneaux de moyenne - et sa bonne production
laitière.
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- Hampshire : le meilleur rapport sobriété alimentaire / conformation bouchère. Cette race de
bergerie peut se suffire de peu - prairie pauvre- mais n’en est pas moins bien conformée.
- Mouton Vendéen : la plus précoce des races de bergerie - activité sexuelle dès la fin juin.
Cette race présente également de bonnes aptitudes bouchères.
- Ardennais Roux : le wallon rustique ! Cette race d’herbage d’origine locale conviendra
parfaitement aux terrains pentus et boisés. En contrepartie, ses aptitudes bouchères sont assez
mauvaises. Sa viande est, quant à elle, réputée sur le plan gustatif.
- Soay : le rustique à ne pas tondre. Ce mouton de très petit gabarit n’est pas élevé pour sa
viande mais uniquement pour l’entretien de terrains. Très rustique, il présente également
l’avantage de muer.
- Lacaune : la meilleure laitière. Cette race est élevée pour la production de son lait et la
fabrication fromagère.
- Ile-de-France : la race qui dessaisonne aux bonnes qualités bouchères.
- Romane : la race qui dessaisonne aux bonnes qualités maternelles.
D’autres races, également courantes chez nous, présentent des caractéristiques moins
tranchées mais n’en sont certainement pas moins intéressantes :
- Texel "français" : le bon compromis entre aptitudes bouchères et aptitudes d’élevage.
- Suffolk : de bonnes aptitudes bouchères et une vitesse de croissance des agneaux réputée
pour cette race de bergerie.
Les races locales menacées autres que l’Ardennais Roux ne doivent pas non plus être
passées sous silence :
- Entre-Sambre-et-Meuse : une race d’herbage de grand gabarit, à prolificité intéressante mais
aux aptitudes bouchères demandant à être resélectionnées.
- Mergelland : une race d’herbage sans grandes aptitudes bouchères mais bien adaptées aux
conditions environnementales difficiles : réserves naturelles…
- Laitier belge : une race élevée pour son lait et la transformation fromagère. Sa production de
lait est moindre que celle de la Lacaune.
Loin des standards raciaux, de nombreux éleveurs - à commencer par les professionnels préfèrent généralement travailler avec des animaux "croisés". Par exemple, typiquement, un
mâle Texel culard sera souvent utilisé pour améliorer la valeur bouchère des agneaux issus de
brebis choisies pour leurs aptitudes maternelles.
Un animal = des besoins
Une fois l’animal choisi, restent des considérations plus pratiques, à savoir les besoins de
l’animal auxquels l’éleveur devra subvenir. Un animal sans besoins et qui peut se contenter de
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rien, ça n’existe pas ! Même si l’animal en question est rustique, tel un Ardennais Roux…
Dans tous les cas, le futur éleveur devra penser à un aménagement intérieur - une bergerie ou,
tout du moins, un abri - et extérieur - des prairies... Il devra également planifier, entre autres,
l’alimentation de ses animaux et leur suivi sanitaire.
Pour la construction du bâtiment, des normes se doivent d’être respectées. Notamment, en
termes de surface au sol, il faut compter un mètre carré par brebis, un quart de mètre carré par
agneau de moins de deux mois et un demi-mètre carré par agneau de plus de deux mois. Il
faudra également compter quarante centimètres d’auge - ou mangeoire - par brebis, tous les
animaux devant pouvoir accéder, en même temps, à l’aliment distribué. Pour exemple, pour
une production d’agneaux de bergerie avec une prolificité de 1,65, la surface utile au sol sera
de 1,8 mètre carré par brebis, soit une largeur de quarante centimètres - place à l’auge - et une
profondeur de quatre mètres cinquante. A cette surface utile, il faudra ajouter la surface
occupée par l’auge, les couloirs… C’est pourquoi on peut usuellement compter trois mètres
carrés de bâtiment par brebis. Ces normes s’entendent pour des élevages d’une certaine taille,
les animaux étant maintenus ensemble. Elles devront être revues à la hausse s’il s’agit d’un
bâtiment prévu pour seulement deux ou trois animaux.
Pour ce qui est de l’extérieur - les prairies -, des normes peuvent également être citées. On
comptera huit à dix brebis par hectare pour une production d’agneaux d’herbage, ce nombre
pouvant se porter à douze à quinze brebis par hectare pour une production d’agneaux de
bergerie. Ces normes valent pour une "bonne" prairie et non pour un parcours semi-boisé.
Dans certains cas, on ne dépassera donc pas trois brebis par hectare. Ces prairies devront,
entre autre, être équipées de points d’eau et de clôtures. Le mouton étant vagabond, la clôture
sera soit une clôture grillagée - ou "ursus" idéalement "semi-lourd" - d’une hauteur de quatrevingt à cent dix centimètres, éventuellement complétée d’un rang de barbelés, soit une clôture
électrifiée de quatre fils allant de quinze centimètres à un mètre de hauteur.
Au-delà de ces besoins matériels de base, le mouton aura bien évidemment des besoins
alimentaires. L’alimentation des animaux pourra essentiellement être assurée par l’herbe, pour
autant que les prairies soient gérées correctement, à commencer par la charge animale par
hectare. Mais l’herbe, en qualité et en quantité, n’est pas disponible toute l’année. Elle ne
pourra pas non plus couvrir certains stades de la production : brebis allaitantes, agneaux en
finition… L’apport d’un complément alimentaire au fourrage sous forme d’aliments
concentrés sera donc nécessaire. Le plus souvent, l’éleveur aura recours à un aliment acheté
dans le commerce, cet aliment pouvant se décliner en plusieurs gammes selon le stade
physiologique de l’animal. En ce qui concerne les agneaux, ils seront exclusivement allaités
jusqu’à l’âge de trois semaines et sevrés vers l’âge de deux et demi à trois mois…
---L’alimentation du mouton : quelques précautions utiles
- Les aliments achetés dans le commerce doivent être libellés à l’intention du mouton. Le
mouton étant particulièrement sensible au cuivre, un aliment pour une autre espèce animale
peut lui être fatal !
- Si l’éleveur réalise lui-même son mélange d’aliments, il doit veiller au bon calibre de ses
constituants. Un animal ingérant massivement des aliments trop volumineux pourrait
s’étouffer. Attention donc aux pulpes sèches de betteraves, aux plaquettes de tourteau de lin…
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- Au début du printemps, l’herbe est suffisamment riche pour couvrir les besoins des brebis
allaitantes, tout au moins ses besoins protéiques. Elle ne fournira toutefois pas assez d’énergie
aux brebis affaiblies et un complément alimentaire sous forme de céréale sera utile pour
rétablir ces animaux.
- En fin d’automne, l’herbe est trop pauvre que pour subvenir aux besoins des brebis arrivées
en fin de gestation. C’est alors une source de toxémie de gestation ! Il est recommandé de
rentrer les brebis un mois avant l’agnelage et de les soigner avec un fourrage complémenté
par un aliment adéquat.
---Sur le plan sanitaire, le suivi routinier résidera principalement dans les traitements
antiparasitaires et le parage des onglons. Ce parage se fera généralement au moment de la
tonte annuelle.
---Les soins aux animaux…des notions élémentaires
- Tailler annuellement les onglons des animaux, éviter de leur faire pâturer des zones trop
humides et pailler régulièrement les bergeries permettent de lutter contre le piétin.
- Surveiller les diarrhées des jeunes agneaux permet de détecter les coccidioses.
- Eviter le pâturage trop ras des prairies et des zones trop humides et assurer la rotation des
zones pâturées permettent de lutter contre le parasitisme gastro-intestinal.
--L’installation en pratique
Vous êtes décidé de démarrer l’élevage du mouton ? Quelques formalités administratives
seront toutefois nécessaires avant de démarrer… A commencer par l’obtention d’un permis
d’environnement auprès de l’administration communale et d’un numéro de troupeau délivré
par l’ARSIA. Tous les animaux de plus de six mois devront être identifiés au moyen de
boucles auriculaires et devront être signalés dans un "registre de troupeau", même si l’éleveur
ne détient qu’un seul mouton. Une cotisation au Fonds Sanitaire devra être assumée dès la
détention de six adultes, et à l’AFSCA dès la détention de plus de dix femelles adultes. Un
recueil complet des législations pour qui s’installe en ovin est disponible sur le site Internet
www.ficow.be.
Pas encore convaincu à 100% ? Ajoutons que, contrairement à l’élevage bovin, l’élevage ovin
présente encore un autre atout de taille pour l’éleveur amateur : l’abattage à domicile !
Moyennant une simple déclaration auprès de son administration communale, l’éleveur pourra
abattre lui-même ses animaux pour les besoins exclusifs de son ménage.
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Et à plus grande échelle ?
Comme dit dans les précédents articles, si, en Wallonie, l’élevage du mouton en grosses
troupes n’est pas chose courante, il n’en est pourtant pas moins intéressant. Oui, vivre du
mouton en Wallonie est tout à fait réaliste ! Mais il faut garder à l’esprit que, pour assurer un
revenu décent, il faut compter un minimum de quatre cents brebis, ce qui est tout à fait
gérable pour une personne travaillant à temps plein sur l’exploitation. C’est, par contre,
parfois plus difficile sur le plan foncier… Quarante hectares étant parfois une gageure pour
qui désire s’installer !
Le guide de découpe de l’agneau en ligne :
http://idele.fr/domaines-techniques/publication/idelesolr/recommends/guide-de-decoupeagneau-presto.html
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