La Vague Todd Strasser

Transcription

La Vague Todd Strasser
Histoire des arts
La Vague
Todd Strasser
Présentation de l'œuvre
1. Qu'est-ce que c'est ?
2. Par qui cette œuvre at-elle été réalisée ?
4. Dans quel contexte
s'inscrit-elle ?
3. De quand date-t-elle ?
1. C'est un roman.
1. C'est un roman.
2. Todd Strasser,
écrivain américain.
1. C'est un roman.
2. Todd Strasser,
écrivain américain.
Première
parution en
1981.
1. C'est un roman.
Inspiré de faits
réels qui se sont
déroulés au lycée
Cubberley, à Palo
Alto en Californie,
en 1967.
2. Todd Strasser,
écrivain américain.
Première
parution en
1981.
Todd Strasser
romancier et nouvelliste américain
●
D'origine new-yorkaise, Todd Strasser (né en 1950), a
voyagé en Europe avant de retourner aux Etats-Unis
pour étudier la littérature. Il entame sa carrière
d'écrivain en rédigeant des articles et des nouvelles
pour les journaux The New Yorker et New York Times.
En 1978, il publie son premier roman Angel Dust
Blues. Ses livres s'adressent à un public jeune et
abordent des thèmes comme la violence et les
problèmes des adolescents ainsi que les enjeux de
société. Il adapte également plusieurs histoires au
cinéma comme Home alone, Jumanji ou Sauvez Willy.
Mondialement reconnu depuis La Vague, il a connu un
grand succès avec sa série d'ouvrages Piégé dans...
(1993-2001).
L'expérience
En automne 1967, Ron Jones, un professeur d'histoire du lycée Cubberley à
Palo Alto (Californie), conduit une expérience avec sa classe. À l'occasion d'un
cours sur le nazisme, un de ses élèves lui pose une question à laquelle il est
incapable de répondre : "Comment le peuple allemand pouvait-il ignorer le
génocide des juifs ? Comment les citadins, les cheminots, les enseignants, le
corps médical, comment tout ce monde-là a-t-il pu revendiquer ne rien savoir
des camps de concentration ? Comment des gens qui étaient les voisins, et
peut-être les amis des citoyens juifs, ont-il pu prétendre qu'ils n'avaient rien vu ?”
Ron Jones décide alors, sur un coup de tête, de mener une expérience. Il
instaure dans la classe un régime de stricte discipline, restreignant la liberté de
ses élèves et transformant la masse en un seul corps. Le mouvement est appelé
"La troisième vague". À la grande surprise du professeur, la classe réagit plutôt
bien à la contrainte d'obéissance qui lui est imposée. L'expérience, qui ne devait
durer qu'une seule journée, va répandre son emprise sur l'école toute entière.
Les membres du mouvement commencent à s'espionner les uns les autres, et
les réfractaires se retrouvent stigmatisés et même tabassés. Au bout du
cinquième jour, Ron Jones est contraint de mettre un terme à l'expérience.
Résumé et analyse
« Cela ne pourrait pas se reproduire chez nous ».
C’est par cette réponse qu’est souvent évacué le
débat sur l’origine du totalitarisme et son possible
retour au sein de nos sociétés modernes. Cela ne
pourrait pas se reproduire ? Pas si sûr. C’est à cette
question, que le roman La Vague de Todd Strasser se
propose de donner une piste de réflexion. Le roman
montre comment un simple jeu peut donner lieu à un
microcosme totalitaire.
Pourquoi la vague ?
Professeur atypique et audacieux, Ben Ross s’est souvent distingué
au sein du tranquille Lycée Gordon par ses méthodes
d’enseignement peu orthodoxes et originales. Très apprécié de ses
élèves, Ben Ross est décidément doué pour capter l’attention et
rendre passionnant un cours qui semblait rasoir de prime abord.
Lorsqu’il doit traiter le sujet de la seconde guerre mondiale, Ben
décide de projeter à ses élèves un film – que l’on devine être Nuit et
Brouillard - afin de leur montrer ce que fut l’horreur de la Shoah. Au
terme de cette projection, Laurie Sanders, jeune et brillante lycéenne,
pose cette question au professeur :
« Comment les Allemands ont-ils pu laisser les nazis assassiner des
gens presque sous leurs yeux pour ensuite affirmer qu’ils n’en
savaient rien ? Comment ont-ils pu faire une chose pareille ?
Comment ont-ils pu dire une chose pareille. »
Et ses camarades d’ajouter en parlant des nazis : « Moi en tout cas,
je ne laisserais jamais une minorité de ce genre gouverner la majorité
», « Oui, ce n’est pas un ou deux nazis qui me forceraient à dire que
je n’ai rien vu ni entendu ».
Les autres personnages
Laurie Saunders : C'est la très populaire rédactrice en chef du journal de
l'école. Elle fait partie de la classe de Ben Ross en histoire, où elle excelle.
Elle sort avec David Collins, membre de l'équipe de football. Alors que ce
dernier, à l'instar de toute la classe d'histoire, se laisse entraîner par « La
Vague », elle reste lucide et comprend la première que Ben Ross n'a plus
aucun contrôle sur son expérience.
Robert Billings : Elève de Ben Ross, Robert Billings est exclu de la
communauté lycéenne, jusqu'à ce que « La Vague » soit mise en place. Il
sera ensuite le plus fervent partisan de l'expérience, en grande partie car
elle lui a permis de s'intégrer. Par conséquent, il sera le premier à prendre
tout cela au sérieux, donc à basculer dans le fanatisme. Son zèle ira jusqu'à
s'imposer comme garde du corps à Ben Ross. Après la chute de « La Vague
», il sera brisé, et se renfermera d'autant plus sur lui-même (Ben Ross
l'aidera cependant à sortir de sa dépression).
L'équipe de football : Une grande partie des joueurs sont dans la classe de
Ben Ross. L'émulation et l'individualisme font partie intégrante de l'équipe,
ce qui l'empêche de gagner. Mais avec « La Vague », ils apprendront la
force de la communauté, et en deviendront tous partisans, sauf un.
La force par la discipline
Quelques jours passent. Ben Ross reste tourmenté par ces questions
auxquelles il n’a pu donner de réponse. Germe alors en lui une idée simple :
pour comprendre il faut vivre. Il conçoit bientôt une sorte de jeu dans le but
de faire ressentir à ses élèves ce que fut le nazisme. Il entre un matin dans
la salle de classe et, sans un mot, écrit sur le tableau : LA FORCE PAR LA
DISCIPLINE. A ses élèves interloqués, il décrit la force que peut procurer la
discipline et leur propose d’instaurer quelques règles simples de
fonctionnement : se tenir parfaitement droit sur sa chaise, entamer chaque
question posée au professeur par « Monsieur Ross », se lever pour parler et
se rassoir aussitôt. Rapidement, les colonnes vertébrales se redressent, le
professeur enchaîne les questions à la classe qui doit répondre de plus en
plus rapidement, mécaniquement, toujours selon le schéma convenu :
l’élève se lève pour répondre, commence sa phrase par « Monsieur Ross »
et se rassoit le plus rapidement possible. Chaque élève qui se trompe, ne se
lève pas ou oublie de dire « Monsieur Ross », doit impérativement
recommencer, encore et encore, jusqu’à ce qu’il se corrige. Après une
matinée d’entraînement, toute la classe marche au même rythme. Loin de
refuser le jeu, elle y prend goût. Tout se passe comme si les élèves aimaient
être dirigés.
La force par la communauté et par l'action
Le deuxième jour de l’expérience, Ben Ross écrit au tableau : LA FORCE
PAR LA COMMUNAUTÉ. Comme la veille, il propose quelques principes
simples à la classe. Un nom : La Vague en tant que ce qui symbolise le
mouvement vers un destin commun, un salut que les membres se doivent
faire dès qu’ils se croisent et enfin, un uniforme que tous doivent porter.
Le dernier slogan qui est écrit au tableau est LA FORCE PAR L’ACTION.
Les membres de la Vague reçoivent l’injonction d’inviter d’autres élèves à
rejoindre le mouvement, d’en parler autour d’eux et de faire la promotion des
slogans. En quelques jours, l’auditoire du professeur Ross a doublé en
effectif et un certain nombre d’élèves se mettent à sécher les cours pour
venir se joindre aux réunions du mouvement. La Vague ne tarde pas à
prendre une allure bien menaçante et broyante pour qui s’oppose à sa
marche. Intimidations, pressions et agressions viennent bientôt troubler le
quotidien paisible du Lycée Gordon.
La vague prend vie
●
Il est intéressant de noter que pendant toute la durée du jeu, le professeur
n’impose jamais aux élèves. Il propose des règles, les unes après les autres,
sans jamais recourir à la contrainte et sans jamais que ces règles ne
rencontre la moindre critique de la part des élèves. La classe joue le jeu de
l’expérience, en toute connaissance de cause et rien ne semble empêcher
celui ou celle qui veut se retirer de le faire. Les lycéens prennent conscience
petit à petit de la force que leur procure – ou semble leur procurer – cet
exercice de groupe. Loin de se solder par un retard sur les autres classes, le
jeu permet aux élèves d’être en avance sur le programme scolaire, chaque
élève sachant impeccablement sa leçon d’une semaine à l’autre.
Cependant, Ben Ross remarque que si le contenu du cours est parfaitement
su, mieux qu’auparavant, les capacités d’analyses des élèves ont décru et il
devient difficile de leur demander de faire le commentaire critique de tel ou
tel sujet. En outre, à mesure que le nombre de membres augmente, les
incidents éclatent : lors des matchs de football, seuls les membres peuvent
s’asseoir sur certains gradins. Certains élèves méfiants vis-à-vis de la
Vague sont victimes de pressions et sont invités de plus en plus brutalement
à adhérer. Le professeur est désormais accompagné d’un « garde du corps
» et fait figure de leader. Tout bascule lorsqu’un élève juif est agressé par
des membres de la vague.
Peu à peu, les règles du mouvement se font toujours plus nombreuses et
contraignantes. Obligation de se saluer en dehors de la salle de classe,
obligation de recruter au moins deux nouveaux membres par semaine,
obligation de porter l’uniforme du mouvement en dehors du lycée. Chaque
nouvelle règle est immédiatement acceptée et partagée par les membres.
Qui a décrété ces nouvelles règles ? Ben Ross probablement, mais qui peut
en être vraiment sûr ? La Vague devient vivante et prend son autonomie,
elle s’entretient et s’accroit naturellement, échappant à tout contrôle. Seule
certitude : nul n’envisage de transgresser ses règles.
Laurie commence à prendre peur de l’évolution de la vague, notamment à
cause des saluts effectués et des slogans scandés à l’unisson par ses
camarades ; ainsi que l’absence totale de remise en cause des propos
avancés par M. Ross. Elle souhaite alors s’en éloigner petit à petit, si bien
qu’elle finit par perdre son petit ami, David, et sa meilleure amie, Amy, qui
restent fervents défenseurs du mouvement. En effet, elle a tenté de les
prévenir que le groupe n’avait pas que des actions positives : si la vague est
un groupe uni, elle rejette violemment les personnes qui ne souhaitent pas
l’intégrer ou qui émettent des réserves vis-à-vis d’elle. Laurie en possède la
preuve par une lettre anonyme adressée au journal, décrivant comment un
jeune a été intimidé pour rejoindre le groupe ; et par l’expérience du rejet,
quand lors d’un match auquel elle veut assister, elle se retrouve interdite de
gradin puisqu’elle refuse de faire le salut officiel. Cette « résistance », elle va
la rendre publique en publiant un numéro spécial du Gordon Grapevine sur «
La Vague ». David, en tant qu’ex-petit ami, est alors désigné comme le plus
susceptible de la faire changer d’opinion. Or, leur discussion devient
houleuse et David la pousse soudain à terre. Prenant conscience de ce qu’il
était prêt à faire à la fille qu’il aime toujours, au nom de la Vague, il prend
peur. Ensemble, ils décident d’aller voir Ben Ross, afin de le supplier de
mettre un terme au groupe. Le professeur accepte, et met fin à son «
expérience » le lendemain de façon particulièrement théâtrale, pour que les
jeunes lycéens puissent en tirer eux-mêmes la « leçon ».
Pourquoi la vague séduit-elle ?
Le roman insiste sur le sentiment d’égalité entre les élèves, sur l’intégration de
Robert, qui avant la vague était rejeté, et sur l’équipe de foot qui devient une
véritable équipe et non une somme d'individualités. Le roman nous montre
surtout que le totalitarisme tient moins d’une maladie de l’âme des individus
qu’à une organisation rationnelle du groupe et l’apathie des membres qui le
compose. Il est une tendance chez l’Homme à se complaire dans le confort de la
non-décision. En effet, l’appartenance au groupe est un confort absolu. Une fois
entré, on ne peut pas se tromper, car on ne fait qu’obéir aux règles édictées. Le
principe du risque est définitivement évacué. Personne ne prend jamais
d’initiative, ou s’il le fait, c’est parce qu’il anticipe ce que souhaite le leader. Il
applique donc un ordre une fois de plus, par anticipation. De fait, personne n’est
responsable puisque personne n’ordonne. Personne ne prend de décision,
personne n’édicte de règles. C’est le mouvement qui ordonne. Chacun se
contente d’appliquer fidèlement. C’est la leçon que nous inspire Todd Strasser.
Le totalitarisme ne vit pas grâce à l’initiative des individus, mais plutôt à leur
soumission au groupe et leur confiance aveugle dans ses principes. Le groupe
ne peut et ne doit pas se tromper. D’où la vigueur qu’on mit tous les régimes
totalitaires à éliminer de façon systématique les opposants.
La vague : un système totalitaire
Les cartes de membres, les affiches, la gestuelle (bras levé), les moniteurs, le
leader, les slogans, le logo, tout fait penser au nazisme, à un système totalitaire
qui anéantit la réflexion individuelle. Ce sont les bases nécessaires au succès
du régime totalitaire : un symbole caractéristique du mouvement (la croix
gammée chez les nazis), des signes distinctifs (uniforme, salut),
l'endoctrinement et le sentiment d'appartenance. Le totalitarisme selon "La
Vague" est caractérisé par un mouvement qui prône l’effet de masse, de groupe.
Il rassemble tous les gens adhérant à une même idée, dans le but d’être libres,
de permettre une grande égalité entre les hommes. A sa tête se trouve un
leader, un chef qui les dirige, leur montre le chemin. La formation d’un régime
autoritaire partirait d’une bonne intention, d’un mieux pour la société. Du moins,
c’est l’impression que les adhérents perçoivent. Peu à peu, quand celle-ci prend
de l’ampleur, elle exclut les non-adhérents. Pour son développement, celui-ci se
base sur trois piliers : La Discipline, la Communauté, l’Action. L'enseignement
fondamental que cette expérience a apporté aux élèves est qu'ils doivent rester
vigilants à toute menace d’embrigadement. Ils doivent toujours garder et
entretenir leur esprit critique.
Ben Ross conclut l'expérience en ces termes : "Vous vous croyiez si
spéciaux ! Meilleurs que tous ceux qui ne sont pas dans cette salle. Vous
avez échangé votre liberté contre une pseudo-égalité. Mais cette égalité,
vous l’avez transformée en supériorité sur les non-membres. Vous avez
accepté la volonté du groupe face à vos propres convictions, sans vous
soucier de ceux qui en souffraient. Oh, certains d’entre vous pensaient se
contenter de suivre les autres, se disant qu’ils pouvaient rebrousser chemin
s’ils le voulaient. Mais l’avez-vous fait ? L’un d’entre vous a-t-il seulement
essayé ?"
"Eh oui, vous auriez tous fait de bons petits Nazis. Vous auriez porté
l’uniforme, détourné le regard et permis que l’on persécute et que l’on
massacre vos amis et voisins. Vous disiez que cela ne pourrait plus arriver,
mais regardez à quel point vous vous en êtes approchés. A menacer ceux
qui refusaient de vous rejoindre, à empêcher les non-membres de s’asseoir
avec vous aux matchs de foot. Le fascisme ne se retrouve pas seulement
chez ces gens-là. Il est ici, en chacun de nous. Vous m’avez demandé
comment les Allemands ont pu laisser des millions d’êtres humains
innocents se faire assassiner. Comment ils ont pu prétendre qu’ils n’y étaient
pour rien. A votre avis, qu’est-ce qui peut pousser les gens à renier leur
propre histoire ?"
"Si l’histoire n’est plus condamnée à se répéter, alors vous aussi, vous
voudrez tous nier ce qui vous est arrivé dans la Vague. En revanche, si notre
expérience est réussie, et vous admettrez que c’est bien le cas, vous aurez
appris que nous sommes tous responsables de nos propres actes et que
nous devons toujours réfléchir sur ce que nous faisons plutôt que de suivre
un chef aveuglément ; et pour le restant de vos jours, jamais, au grand
jamais, vous ne permettrez à un groupe de vous déposséder de vos libertés
individuelles."

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