Des polonais métayers dans le sud ouest

Transcription

Des polonais métayers dans le sud ouest
Les Amis
de la
Pologne
Association loi 1901
N° 43 – Décembre 2014
Editorial
L’année 2014 laissera bien des souvenirs à nos
adhérents et à nos sympathisants, souvenirs de fêtes
traditionnelles, de concerts, de spectacles et de
conférences. Aux plus volontaires, elle aura permis
l’apprentissage de la langue polonaise, pour retrouver
leurs racines ou simplement réaliser un rêve.
Le 11 novembre 2014 aura marqué le 123eme
anniversaire de l’Indépendance retrouvée de la
Pologne après une très longue période durant laquelle
le pays a été rayé de la carte.
Que de souffrances, que de combats menés par
des générations de Polonais pour redonner la
souveraineté à leur pays. Quel tribut payé à l’Histoire.
Mais quelle magnifique contribution de la Pologne à
l’Europe dans les années qui ont suivi. C’est ce que
Dariusz Winiewski a rappelé le 13 novembre, Salle
des Illustres du Capitole, lors de la réception
rassemblant la communauté franco-polonaise, sur
l’invitation du Maire de Toulouse et du Consul Général
de Pologne à Lyon.
L’année se termine dans l’émerveillement avec
“ Szopka ” l’exposition des crèches de Cracovie à
l’Institut Catholique de Toulouse.
Il est temps de fermer les fenêtres, de laisser
arriver la douce nuit de Noël puis la dernière nuit de
l’année. Je veux vous souhaiter, à vous toutes et à
vous tous, Chers Amis de la Pologne, un Noël illuminé
de millions d’étoiles, une nouvelle année 2015 jalonnée
de bonheurs petits et grands, faite de joie de vivre et
de santé.
Jean-Noël Dragon
Illuminations 2014 Place du Château à Varsovie et Place du Capitole à Toulouse
Sommaire n°43
Politique ……………………………………………...………………………………………...
Commémoration du 11 novembre …………………………………………………………..
Assemblée générale …………………………………………………………………………..
Evènements vus ……………………………………………………………………………….
Evènements à voir…………………………………..…………………………………………
Evènements culturels en Pologne en 2014 …………………………………………………
Un peu d ’histoire : l'honneur d'un général…………………………………………………..
Un peu d ’histoire : des polonais métayers dans le sud-ouest …………………………...
Notez bien ……………………………………………………………………………………...
p. 2
p. 2/3
p. 4
p. 5
p. 6
p. 7
p. 9
p. 11
p. 12
Politique
Donald Tusk, nouveau président
de l'Union Européenne
Ewa Kopacz, nouveau Premier
ministre de Pologne
Donald Tusk a pris ses fonctions de Président du
Conseil Européen le 1er décembre 2014, succédant à
Herman Van Rompuy, pour un mandat de deux ans et
demi renouvelable une fois.
Donald Tusk, faisant ses valises pour Bruxelles, a
soigneusement organisé son remplacement au poste
de Premier ministre de la Pologne.
Le Conseil Européen réunit les 28
chefs d'état et de gouvernement de
l'Union Européenne. C'est la première fois
qu'un homme politique polonais occupe
une fonction internationale aussi élevée.
Trois grands défis attendent Donald
Tusk : la croissance, la place du Royaume
Uni dans l'UE et la crise ukrainienne.
Très proche d'Angela Merkel –il parle
parfaitement l'allemand– Donald Tusk
veut occuper une place prépondérante en
matière de politique étrangère. Bon
communiquant, il en a les moyens.
En politique intérieure, alors qu'il
présidera les sommets de la zone euro, il
risque d'être handicapé par le fait que son pays n'a pas
encore adopté la monnaie unique.
Né le 22 avril 1957, à Gdañsk, d'origine cachoube,
ancien membre de Solidarnoæ et fidèle de Lech
Wa³ęsa, Donald Tusk, européen convaincu, est
indiscutablement un président légitime pour l'Union
Européenne.
Commémoration
Trois candidats étaient en
lice. Le Président Komorowski a
entériné le choix de Ewa Kopacz,
56 ans, Présidente de la Diète, la
chambre basse du pays Il l'a
chargée de former un nouveau
gouvernement.
Entrée au parlement en
2001, Ewa Kopacz a connu une
ascension rapide dans les pas de
Donald Tusk. Sa tâche ne sera
néanmoins pas de tout repos, la
Plateforme Civique, parti libéral au
pouvoir, connaît l'usure du
pouvoir.
Après le chaos informatique
du premier tour des élections
municipales et régionales en novembre 2014, le
deuxième tour a fait élire des candidats de la
Plateforme civique dans les principales villes. Mais les
Polonais seront à nouveau appelés aux urnes à l'été
2015 pour la présidentielle puis à l'automne pour les
législatives.
Jean-Noël Dragon
Réception à la Mairie de Toulouse le 13 novembre 2014
En ce 13 novembre, et en l'absence d'Antoine
Jankowski, c'est le Consul Général, Dariusz
Winiewski, qui nous a fait l'honneur de sa présence
pour cette réception.
elle peut se comparer à l'Espagne. Mais avec son
histoire unique, qui en fait sa grandeur et sa spécificité,
longtemps isolée entre les poussées des impérialismes
allemand et russe, mais aussi toujours proche de la
France, on ne peut véritablement comparer la Pologne
avec aucun autre pays. Puis-je me risquer au surplus à
dire que votre histoire illustre un peu “ l'histoire de
l'Europe ”
Pour sa part, le Maire de Toulouse, Monsieur
Moudenc, étant absent ses deux conseillers délégués
aux Affaires Internationales, Messieurs Jean-Claude
Dardelet et Aviv Zonabend ont accueilli les invités.
Monsieur le Consul, vous qui êtes diplômé de la
Faculté d'Histoire de l'Université de Varsovie, je ne
m'aventurerai pas à détailler l'extraordinaire destin de
votre pays.
C'est Jean-Claude Dardelet qui, le premier, a fait
un discours dont la simple introduction était déjà un
hommage au peuple polonais .
Mais ce qui nous a fortement marqués, ici, depuis
Toulouse, ville de tolérance et d'ouverture, c'est que
votre nation a cessé d'exister en 1793.
“ Oui la Pologne est un grand pays d'Europe
avec sa superficie, la Pologne peut se comparer au
Royaume Uni, à l'Italie ou encore à l'Allemagne. Avec
sa démographie, de près de 40 millions d'habitants,
Elle a été recréée en 1918. Ses souffrances, de
1939 à 1945, furent extrêmes. Staline décalant son
centre de gravité vers l'ouest, Hitler exterminant sa
population juive, déplaçant
toute la population
germanophone.
Depuis plusieurs années, le Maire de Toulouse
invite avec le Consul honoraire, la communauté franco
polonaise à fêter l'Indépendance retrouvée de la
Pologne.
2
Les Amis de la Pologne n° 43
Puis, c'est l'élection d'un pape polonais, Karol
Wojty³a, les coups de boutoir du syndicat Solidarnoæ,
et enfin l'effondrement du Mur de Berlin qui ont
contribué à sa “ libération ”.
Membre de l'OTAN en 1999, vous avez rejoint
l'Union européenne en 2004, il y a juste 10 ans. Vous
l'avez enrichie de votre immense culture.
Vous êtes aussi, comme moi-même, parmi les
plus “ euro-enthousiastes ” …….
Aujourd'hui, l'Europe a besoin de la Pologne. De
sa foi inébranlable dans des lendemains meilleurs, de
sa persévérance.
Sachez que dans Toulouse, vous trouverez
toujours votre alliée, votre amie, votre sœur.
Vive l'amitié franco-polonaise ! ”
Sibérie, les soldats de la Légion Polonaise dirigés par
Józef Pi³sudski, ceux de l'Armée Bleue du Général
Haller, les membres de l'Organisation militaire
clandestine polonaise (POW) ainsi que d'autres
organisations militaires, paramilitaires ou mouvements
de résistance. Qui se souviendra d'eux, si nous ne le
faisons pas ?
En ce jour nous adressons aussi notre profonde
gratitude à tous ceux, qui dans les années 1918-1921,
ont contribué à façonner les frontières de la Pologne
libre : les résistants de l'Insurrection de la GrandePologne (Powstanie Wielkopolskie), de Silésie
(Powstania ląskie), les Aiglons de Lviv (Orlęta
Lwowskie) et tous ceux qui ont sécurisé la frontière
orientale contre la “peste rouge”.
La bataille victorieuse qui s'est déroulée aux
abords de Varsovie en août 1920 a sauvegardé la
souveraineté du pays mais aussi l'avenir de l'Europe.
Cette année, nous célébrons le 25ème
anniversaire de la chute des régimes communistes en
Europe et le recouvrement de la pleine souveraineté de
la Pologne. Sans la révolution pacifique de 1989 en
Pologne, les importantes transformations en Europe
Centrale et Orientale n'auraient pas eu lieu et par
conséquent, elles n'auraient pas entraîné l'unification
de l'Europe.
Réception du 13 novembre salle des Illustres
A ce discours chaleureux, Dariusz Winiewski a
répondu :
“ En France le jour du 11 novembre représente
l'anniversaire de l'armistice, la fin de la Première
guerre mondiale. Pour les Polonais, ce jour représente
aussi, ou peut-être avant tout, l'anniversaire du retour
de la Pologne sur la carte d'Europe. C'est la fête
nationale qui commémore l'indépendance regagnée
après une période de 123 ans de partages.
En 1918 les rêves de tout un peuple ont été
réalisés. La Pologne souveraine et indépendante était
née.
Mais nous honorons aussi la mémoire de
plusieurs générations de combattants qui n'ont jamais
abandonné l'espoir de voir leur pays libre. En servant
une cause sacrée, l'indépendance, ils ont souvent dû
payer un prix très élevé : contraints à l'exil en
abandonnant leurs foyers, ou sacrifiant leurs vies.
Rappelons-nous les soldats de l'insurrection
polonaise de Novembre (1830-1831) et de celle de
Janvier (1863-1864), les insurgés polonais exilés en
Il y a encore quelques années, il semblait que la
Pologne, grâce à son ancrage dans l'OTAN et dans
l'Union européenne, était devenu un pays libre hors de
tout danger mais ceci ne reflète pas la réalité actuelle,
car en observant avec attention le conflit qui se déroule
à notre porte nous prenons conscience de la fragilité
de notre sentiment de sécurité. Derrière notre frontière
orientale, qui est maintenant celle de l'OTAN et de
l'Union européenne, nous réalisons que ce conflit armé
affecte aussi la Pologne et les autres pays. ….
La Pologne et toute l'Europe ont besoin d'une
politique commune en matière de sécurité, une
politique compréhensible par tous les citoyens et
surtout réactive face aux menaces potentielles,
actuelles et futures. …
Enfin, je voudrais vous remercier de votre
présence ici aujourd'hui. Je saisis cette occasion pour
féliciter publiquement toutes les personnes et toutes
les associations relevant de la circonscription du
Consulat de Pologne à Lyon, qui veillent à préserver
les traditions, la langue et la scolarisation des enfants
polonais en France et qui contribuent activement à la
promotion de la Pologne et au renforcement des liens
franco-polonais. ”
Le cocktail qui a suivi a permis aux nombreux
participants d'échanger souvenirs et projets, dont la
Pologne et la vie associative étaient les sujets
principaux.
Jean-Noël Dragon
Les Amis de la Pologne n° 43
3
Notre Assemblée Générale 2014
L’assemblée générale du 21 novembre 2014 a
réuni de nombreux adhérents et donné au président
Jean-Noël Dragon l’occasion de faire le point sur
l’année écoulée. Il a présenté l’activité du Conseil
d’Administration et les évènements qui en ont découlé.
Les bulletins semestriels sont un trait d’union
important entre adhérents, sympathisants et membres
des autres associations. Ainsi, celui de juin relatait les
concerts des 13 et 15 décembre 2013 avec les
étudiants de l’école de musique de Rybnik, reçus à
Mazamet et à Toulouse, la fête Kolędowanie en janvier
2014 et le spectacle du ballet national de Pologne,
“ląsk ” en mars.
La participation de notre association au Forom
des Langues en mai, nous a amené de nouveaux
élèves pour nos cours de langue polonaise et notre
contribution à la Semaine de l’Europe a laissé de jolis
souvenirs aux élèves d’une classe de CM1 ainsi qu’en
témoigne leur article dans ce numéro.
Le 24 septembre, l’association avait invité
Philippe Christol, généalogiste français marié à une
la communauté polonaise et les amis de la Pologne
pour fêter ce même événement. Il y avait environ 300
invités ce soir-là, à la Salle des Illustres du Capitole.
Le rapport moral du président ne serait pas
complet sans parler du succès rencontré par nos cours
de polonais depuis quatre années – un challenge
transformé en réussite – et notre site Internet inauguré
à l’assemblée générale de l’année dernière. Alexandra
Jaskiewicz, responsable du site, nous annonce plus de
8500 pages visitées à ce jour.
Pour autant, l’année
2014 n’est pas terminée.
En effet, le 26 novembre,
le Consulat Général de
Pologne a invité l’auteur
Zygmunt
Mi³oszewski.
Cette conférence à la
Maison de la Citoyenneté
Centre a pu se faire avec
l’appui logistique des
Amis de la Pologne.
Zygmunt Mi³oszewski
A partir du 5 décembre et jusqu’au 17 janvier
2015, vous pourrez admirer les crèches de Cracovie,
de vraies œuvres d’art, à l’exposition “ Szopka ” à
l’Espace Muséographique G. Baccrabère de l’Institut
Catholique de Toulouse.
Quitus sont donnés au rapport moral du président
Jean-Noël Dragon et au rapport financier de la
trésorière, Claire Jeanpierre.
Philippe Christol
polonaise et vivant à Varsovie. Il a passionné la
quarantaine de participants avec l’histoire de
l’immigration des Polonais dans le sud de la France.
Le 11 novembre, fête de l’Armistice de la guerre
14-18 et de l’Indépendance de la Pologne a été
commémoré, après la cérémonie officielle, par les
associations franco-polonaises de Toulouse qui se
sont retrouvées au Monument aux Morts de Toulouse
pour déposer une gerbe en l’honneur des anciens
combattants polonais en France.
Le 13 novembre, le Maire de Toulouse et le
Consul Général de Pologne à Lyon avaient invité toute
Le Conseil d’Administration est réélu, avec
quelques changements. Claire Jeanpierre laisse les
“ clefs du trésor ” à Gérard Calmel, nouveau trésorier.
Claire, discrète et tellement efficace pendant plus de
vingt années, a décidé de consacrer plus de temps à
sa famille et à ses autres activités.
Aurélie Grignard a décidé, de son côté, de donner
tout le temps que lui laissent ses activités
professionnelles à son petit garçon de quelques mois,
Baptiste.
Toutes les deux sont ici grandement et
sincèrement remerciées. Elles nous ont assurés
qu’elles restent fidèles aux Amis de la Pologne.
Nous les reverrons !
Enfin, saluons l’arrivée de
Monique Ratajczak au sein du conseil.
Monique est nouvelle adhérente et
élève du cours de polonais.
Avec Monique et Gérard, l'action
de notre Conseil d’Administration se
poursuivra avec l’enthousiasme et le
dynamisme que nous lui connaissons.
11 novembre au Monument aux Morts
4
13 novembre salle des Illustres
Dany Dragon
Les Amis de la Pologne n° 43
Evènements vus...
Ecole des Ursulines
Le vendredi 23 mai 2014, l'école et le collège Sainte Marie des Ursulines ont
organisé "la Journée de l'Europe". Chaque classe a été tirée au sort pour
représenter un pays européen. Nous avons eu la Pologne !
On a eu de la chance car dans notre classe, il y avait des parents polonais
qui nous ont aidé à préparer cette journée. Une mamie a fait des gâteaux et a
amené de la charcuterie polonaise, une maman a amené des posters et des DVD.
En classe, un après-midi, nous avons tous fabriqué des jeux sur les noms des
villes, sur les plats, sur les mots en polonais et sur les personnages célèbres du
pays comme le pape Jean-Paul II, Chopin, Marie Curie ou Copernic. On avait
préparé des exposés avec des affiches sur eux.
La maîtresse et la maman d'Emma s'étaient habillées avec des
costumes polonais et une couronne dans les cheveux...Nous sommes
tous arrivés le matin en rouge et blanc aux couleurs du drapeau de la
Pologne !
On a mis de la musique traditionnelle polonaise et toutes les
classes sont passées pour venir voir notre stand. Et, nous aussi, on a
vu tous les autres stands de tous les pays.
Puis à la fin de la journée, tous les élèves ont voté... On n'a pas
gagné, on est arrivé 4ème ! Mais c'était une chouette journée !... Vive la
Pologne !
Tous les élèves de CM1
et leur maîtresse, Caroline Jakubiak
NDLR – Pour l'occasion, Les Amis de la Pologne, à la demande de Caroline Jakubiak,
avaient prêté drapeaux, costumes, musiques et documentation polonais.
To i Hola : un jubilé d'exception
Le 20 juillet 2014 marquait une date importante à
Cagnac-Les-Mines : c’est le jour où les Ballets
Polonais To i Hola ont fêté leur cinquantième
anniversaire.
Pour cette occasion, Daniel Curylo et tous les
danseurs du groupe avaient organisé une fête qui
comptera dans la mémoire des Cagnacois.
Après la cérémonie au Monument aux Morts, en
présence du Consul Général de Pologne, Dariusz
Winiewski, de représentants de la Région et du
Département et de l’équipe municipale au grand
complet, un hommage fut rendu à Tadeusz Miszczak,
mineur à Cagnac, fondateur, en 1964, de l'ensemble
folklorique.
A la fin du défilé dans la grande rue de Cagnac,
une messe franco-polonaise a été célébrée dans la
Salle des Fêtes par le Père Kopacz, Curé Polonais à
Lourdes. Elle a été suivie par un très grand nombre de
Polonais et de leurs descendants.
Dans cette même salle une exposition de photos
illustrait la rétrospective des 50 ans du groupe.
Les Amis de la Pologne n° 43
Sous un immense chapiteau, plus de 600
convives ont partagé un repas typiquement polonais
avec des produits venus tout droit de Pologne.
Chants et danses ont animé ce repas, avec la
chorale La Joie de vivre de Cagnac, l’ensemble
folklorique Tomaszów Lubelski " Roztocze " et leurs
musiciens (Kapela), l'orchestre de variété " Soko³y " et
les musiciens de l'Orkiestra Dęta de Cieszanów
(orchestre de rue). Et, bien sûr, les Ballets To i Hola.
Les anciens danseurs présents ont même rejoint
le groupe sur scène pour danser une Polonez, le cœur
rempli d’émotion et de joie.
La fête s’est clôturée avec l'évocation de la nuit de
la St Jean " Noc Kupa³y " prévue au bord du lac mais
faite sous le chapiteau en raison de la pluie.
Cette journée exceptionnelle restera marquée
dans la mémoire des participants et sera gravée dans
les annales de Cagnac-les-mines, berceau du Groupe
folklorique To i Hola qui s’est produit dans tout Midi
Pyrénées et aussi en Pologne.
Daniel Curylo
5
Człowiek z nadziei - L'homme du peuple
Le 10 novembre, nous étions conviés, par l'association Apolina, à
l'avant-première du film L'homme du peuple, incroyable saga d'un ouvrier
devenu président (Obs), qui retrace un instant de vie de Lech Wałęsa.
Je ne vous parlerai pas du film, Anna Masson vous en a tout dit dans
notre n° 42, le réalisateur, le scénariste, le chef opérateur…
Je ne vous parlerai pas de la vie de Wałęsa, tout a été dit par ses
partisans et ses détracteurs et tout le monde a lu les biographies de Lech
et Danuta : Un chemin d'espoir chez Fayard, Les chemins de la vérité chez
L'Archipel et Rêves et secrets chez Buchet-Chastel.
Je veux simplement vous dire combien cet acteur, Robert
Więckiewicz, plus Wałęsa que Wałęsa dans ses attitudes, sa façon de
parler et ses regards, nous rappelle l'électricien des années 80 avec sa
"grande gueule", ses entêtements et cette impression d'avoir une mission
sacrée qui l'ont rendu tellement populaire et attachant aux yeux du monde
entier, tout ce qui a fait sa force mais aussi sa faiblesse.
Ce film ne s'adresse pas tant aux plus de 50 ans qu'aux plus jeunes
qui ne connaissent de Wałęsa que le président avec l'effigie de la Vierge
de Częstochowa au revers de sa veste et qui ont peut-être oublié le
syndicaliste prix Nobel de la Paix.
Chantal Bordenave-Mankowska
… et à voir
24ème Semaine polonaise
du 13 au 17 avril 2015
K A N T O R - portrait multiple
Polyphonies, inspirations, re-naissances
La 24ème édition des Semaines polonaises sera consacrée à Tadeusz
Kantor (1915 – 1990), un des plus grands artistes polonais, figure de proue
des avant-gardes théâtrales et plastiques, lié avec la France tout au long de
sa carrière. La troupe de Kantor – le Théâtre Cricot 2 (anagramme de "to
cyrk" qui signifie "voilà le cirque") – a acquis une renommée internationale et
son œuvre a suscité un enthousiasme peu commun la situant parmi les
œuvres essentielles du XXème siècle.
Réformateur du théâtre, Kantor a
bouleversé les codes traditionnels de
représentation scénique proposant un
théâtre à la fois poétique, plastique et
philosophique. Son célèbre Théâtre de la mort, théâtre qui échappe à toute
convention, consistait à illustrer de façon plastique les mécanismes de la mémoire ;
fragments de souvenirs, bribes de conversations, séquences d’images
chimériques, situations absurdes, scènes obsédantes, désirs inavoués…, qui se
concrétisent et prennent corps sur scène. Kantor a créé un espace fascinant où se
mêlent morts et vivants, guerre et amour, crime et passion, rire et souffrance.
Vingt-cinq ans se sont écoulés depuis la mort du Maître et les admirateurs de
son art, théoriciens et praticiens du théâtre, œuvrent pour sauvegarder l'héritage
qu'il a laissé. Aujourd’hui, pour le centième anniversaire de sa naissance, il est
naturel que les universitaires et ses compagnons de route du Théâtre Garonne de
Toulouse, où il a travaillé sur son dernier spectacle, lui rendent hommage.
Cette nouvelle édition des Semaines polonaises, associant – comme à l’accoutumée – la partie scientifique
(colloque, table ronde) à la partie illustrative (exposition, films, spectacles théâtraux, performances et concerts),
propose de découvrir comment Kantor, à partir de son histoire individuelle, est parvenu à évoquer l’histoire
collective de toute une nation et à devenir un maître à penser de plusieurs générations d’artistes.
Kinga JOUKAVIEL
6
Les Amis de la Pologne n° 43
Les crèches de Cracovie à Toulouse
La rencontre avec les Szopkas, véritables œuvres
d’art, est de l’ordre de l’étonnement et de
l’émerveillement.
Etonnement de voir comment la szopka propose
un dialogue entre tradition et créativité. De son rapport
au passé, elle garde les formes architecturées des
monuments les plus forts de l’histoire de Cracovie,
cachant en son cœur une nativité, posée comme un
point d’orgue.
Emerveillement devant tant d’élégance produite
par des mains expertes et des esprits passionnés, aux
bois et papiers, matières diaphanes, devenant l’âme
des szopkas. A cela s’ajoutent les jeux de couleurs, de
lumière et de transparence transformant l’œuvre de
bois-papier en monument de rêve.
C’est cette fascination si particulière que
l’exposition propose de faire découvrir avec cet
ensemble de szopkas provenant du Musée
Ethnographique de Cracovie.
C’est grâce à son directeur, Antoni Bartosz, et à
son équipe, totalement investis dans la préservation et
la transmission du patrimoine, qu’il nous est permis
d’admirer, aujourd’hui, cet aspect de l’art cracovien.
Pascale de Lajartre
Marian D³u¿niewski 2008
Directrice de l’Espace Muséographique Georges Baccrabère
NDLR : Jusqu’au 17 janvier 2015 à l'Institut Catholique de Toulouse- 31, rue de la Fonderie
Les évènements culturels en Pologne en 2014
L'année 2014 a été en Pologne celle de nombreuses commémorations. Une foule d'évènements culturels les
ont accompagnées.
25 ans de liberté€:
Le 4 juin 2014 était la date du vingt-cinquième anniversaire des premières élections libres en Pologne. En
1989, les Polonais ont élu 460 députés et 100 sénateurs, apportant la victoire à l'opposition et la défaite au pouvoir
communiste en place. Tadeusz Mazowiecki est devenu le premier ministre du nouveau gouvernement. Les
élections, fruit de la Table Ronde des pourparlers, ont été un événement charnière dans l'histoire récente du pays et
la pierre angulaire de la nouvelle démocratie. Les célébrations de cet anniversaire ont commencé le 3 juin. De
nombreux chefs d'états y ont participé, à commencer par Barack Obama. Nombre de conférences, d'expositions, de
débats ont jalonné les festivités.
Le lien entre ces commémorations et le résultat du vote du Comité
du prestigieux prix littéraire Nike s'impose de lui-même. Le Nike a été
décerné cette année à Karol Modzelewski, historien et dissident politique,
pour son autobiographie Zajeździmy kobyłę historii. Le livre raconte
l'histoire de la famille de l'auteur, des années 40 jusqu'à ce jour. Avec un
grand souci de détails, Modzelewski montre les différentes attitudes des
dissidents polonais dans les années 60, au temps de Solidarność
et pendant la période des grands bouleversements systémiques. Il met en lumière une multitude de conceptions et
de chemins qui ont mené à la démocratisation de la vie politique en Pologne : de la tentative de “ réparation ” du
communisme jusqu'à l'abandon total des idées qu'il véhiculait. Ecrit dans une langue claire et accessible, ce livre
est un document d'une grande valeur historique. Il permet de mieux comprendre l'histoire polonaise de la deuxième
moitié du XXème siècle. Karol Modzelewski “ a réussi à rester fidèle aux hommes et aux idées. C'est ce qui donne
à son autobiographie un ton si clair et si pur ” - a résumé un autre dissident de l'époque, Seweryn Blumsztajn.
Les Amis de la Pologne n° 43
7
Insurrection de Varsovie
Les commémorations du 70ème anniversaire de
l'Insurrection de Varsovie ont aussi grandement
marqué le paysage culturel en 2014. De nombreux
spectacles, expositions, concerts et projections ont
ponctué l'année. Deux films ont été tournés pour
l'occasion : Powstanie Warszawskie (Insurrection de
Varsovie), premier film de guerre non fictionnel au
monde, et Miasto 44 (Ville 44) de Jan Komasa.
Powstanie Warszawskie est un film de 85 minutes,
entièrement monté à partir d'images d'archives,
reconstruites, numérisées, colorisées, auxquelles a été
ajouté une bande son. Le réalisme ainsi obtenu est
saisissant. Le film raconte l'histoire de l'Insurrection
de 1944 à travers les yeux de deux
frères reporters, cameramen pour le
Bureau d'Information et de Propagande
de l'Armée de l'Intérieur et témoins
directs des combats des insurgés.
Documentaire par le support utilisé,
fiction par le montage, le film échappe à
toute classification. Sur le site Internet de
cette production étonnante on peut lire :
“ Six heures d'images d'actualités de
l'Insurrection de Varsovie de 1944, six
mois de travail, une équipe de
consultants en armes, en vêtements et
en architecture, des urbanistes, des
experts de Varsovie et des historiens,
1000 heures de concertation pour la colorisation, 1200
plans, 1440 heures de colorisation et de reconstruction,
112000 photogrammes choisis, 648000 minutes de
reconstruction, 22 971 520 Mo de données – ce ne sont
que quelques chiffres qui aident à saisir l'énormité du
travail accompli et des moyens consacrés au film ”.
Miasto 44 : la 2ème production consacrée à
l'Insurrection, est un film de fiction. L'Histoire, violente
et sanglante, s'y mêle à une histoire d'amour. Le film,
projeté le 30 juillet au Stade National de Varsovie
devant 10 000 personnes, a eu un accueil mitigé. De
nombreux commentaires enthousiastes se mêlaient à
des voix plus critiques. Les derniers survivants de
l'Insurrection, qui avaient à l'époque l'âge
des héros du film, l'ont trouvé beaucoup
trop “ pop ” et trop “ glamour ”. Certains
ont critiqué les scènes érotiques du film
en disant que, pendant les combats, ils
n'avaient ni envie ni force pour le sexe.
D'autres ont été choqués par l'extrême
violence de certains plans. Le réalisateur
du film, a défendu son projet artistique en
disant : “ Je suis né en 1981 et j'ai été
bercé par le cinéma d'action américain.
J'ai vu Terminator II au moins cent fois.
Alors oui, ce style “ pop ” a dû rejaillir sur
Miasto 44. Ce film est peut-être “ pop ”
mais c'est mon “ pop à moi ”.
Autre film
Un autre film primé par Les Lions d'Or au Festival
de Gdynia, est l'œuvre de £ukasz Palkowski intitulé
Bogowie (Les dieux). Le film parle du célèbre
chirurgien Zbigniew Religa, décédé en 2009, auteur de
la première transplantation cardiaque en Pologne. Le
professeur Religa, incarné avec brio par Tomasz Kot,
était un personnage haut en couleurs. Très médiatique,
passionné et entier, il était très aimé des Polonais.
Après avoir découvert la transplantation cardiaque aux
Etats-Unis, il a introduit cette technique en Pologne.
Pour y parvenir, il a quitté Varsovie et sa famille pour
construire un centre de cardiologie ultra moderne à
Zabrze, où il a procédé à la première transplantation en
1985. C'est donc à Zabrze, qu'a eu lieu la première du
film. "C'était un type de chair et d'os. Il se fichait pas
mal des apparences. Peu lui importait quelle veste qu'il
portait, dans quelle voiture il roulait... L'important pour
lui, c'était l'idée, comment préparer chaque
transplantation... Je pense que Tomasz Kot joue ce
rôle à la perfection. En le regardant, j'ai l'impression de
voir le Professeur lui-même ” – a dit un de ses anciens
collaborateurs après la projection du film.
manifestations bruyantes pendant les représentations
de la pièce Le chemin de Damas d'August Strinberg
mise en scène par Jan Klata, le Théâtre Stary de
Cracovie est devenu la scène de tous les
débordements… Pour compléter ce tableau, le
spectacle Golgota Picnic de l'Argentin Rodrigo Garcia
a été annulé à Poznañ.
Heureusement, le paysage théâtral polonais s'est
enrichi d'un nouveau lieu de rencontre et de discussion.
En septembre a été inaugurée à Cracovie, dans un
bâtiment imposant par son architecture innovante, la
nouvelle “ Cricothèque ” - le Centre de documentation
de l'art de Tadeusz Kantor. Bordant la Vistule, située
à deux pas de la Fabrique de Schindler, la bâtisse
moderne épouse parfaitement la vieille centrale
électrique datant du XIXème siècle. “ Cricoteka ”,
fondée en 1980 par Kantor lui-même, s'installe dans un
lieu digne de l'héritage de cet immense homme de
théâtre, metteur en scène et théoricien de l'art.
Théâtre
Plusieurs scandales ont éclaté en Pologne autour
de spectacles controversés. C'est à croire que la scène
polonaise concentre toutes les passions et attise les
polémiques idéologiques. Entre la suspension des
répétitions, puis de la première de la pièce La comédie
non divine mise en scène par Oliver Frljiæ et les
Cricoteka
Anna Wodniecka-Masson
8
Les Amis de la Pologne n° 43
Un peu d'histoire
L'honneur d'un général
C'était le 31 mai 2006 à La Haye, en Hollande, alors
que le ciel était gris et pluvieux. Ce jour-là, le
gouvernement hollandais décidait de réparer une
injustice criante vieille de plus de soixante ans. Lors
d'une cérémonie présidée par la Reine Béatrice et le
ministre de la Défense des Pays-Bas, les vétérans de
la 1ère Brigade Indépendante de Parachutistes
Polonais, dont les plus jeunes étaient octogénaires,
recevaient la médaille de l'Ordre du Lion de Bronze et
la médaille de l'Ordre militaire du Roi William, en
récompense de leur conduite héroïque pendant la
libération de la Hollande en 1944. Durant soixante ans,
alors que les citoyens de Hollande se souvenaient avec
émotion de leurs libérateurs slaves, certaines
municipalités nommant des rues et des squares en leur
honneur, leur gouvernement avait refusé de rendre
hommage aux parachutistes polonais, acteurs pourtant
majeurs de la libération du pays. Pour raconter leur
histoire, il faut remonter un peu plus tôt dans le courant
de la guerre.
Le souvenir de la 1ère Brigade Indépendante de
Parachutistes Polonais (BIPP) ne saurait être dissocié
de celui de son fondateur, le général Stanislas
Sosabowski. Comme nous le décrivions dans les
articles précédents, des soldats polonais réussirent à
fuir la Pologne en 1939 et la France en 1940 (comme le
général Maczek de la 1ère DB) et à se regrouper en
Grande-Bretagne pour former l'Armée Polonaise de
l'Ouest, égalant en nombre les FFL du général De
Gaulle et se plaçant sous le commandement du général
Sikorski. Né en 1892, Stanisław Sikorski, fils d'ouvrier,
ancien chef scout et fervent catholique, est mobilisé
comme sous-officier dans l'armée austro-hongroise.
Combattant contre les russes pendant la Première
Guerre Mondiale, il est nommé lieutenant pendant la
guerre russo-polonaise de 1920 (où il sera d'ailleurs
blessé) puis colonel en 1928. Commandant le 21e
régiment d'infanterie “ Warszawski ” en 1939 et titulaire
de la Virtuti Militari, Sosabowski réussit lui aussi, au
terme d'une évasion rocambolesque, à quitter la
Pologne et à rallier Londres en 1940 où il est nommé
général. Son esprit novateur et sa lecture des manuels
d'instruction allemands (il était germaniste) le
conduisent à proposer à Sikorski une idée folle : la
création d'une unité parachutiste polonaise. Les crédits
financiers et militaires accordés par les britanniques
aux polonais étant limités, il fera des ronds de jambe au
siège du gouvernement polonais en exil pendant
presque un an pour que son projet soit finalement
accepté. En 1941, la 1ère BIPP voyait le jour à Upper
Largo.
Il semble important de signaler que la 1ère BIPP fut
la première unité parachutiste alliée formée pendant la
Les Amis de la Pologne n° 43
Le général Sosabowski salue ses hommes avant le saut sur la
Hollande, septembre 1944.
guerre, avant les américains et les anglais qui
formèrent les leurs en 1942. Sosabowski écrivit un
manuel d'instruction où il décrivait l'entraînement
nécessaire à la formation de tout bon parachutiste (tir,
combat au corps à corps, topographie, rudiments
d'allemand…) et le comportement exemplaire que
devaient avoir les officiers pour emmener leurs
hommes derrière eux. De nos jours, ce manuel est
encore lu par les élèves officiers britanniques à
l'Académie Militaire de Sandhurst. La qualité de
l'entraînement de l'unité de Sosabowski fut tellement
prisé que les britanniques et les FFL reprirent son
manuel pour entraîner leurs propres parachutistes. La
1ère DIPP forma également en son sein 244 Français,
168 Britanniques et 64 Belges, ainsi que les fameux
“ cichociemni ”, commandos polonais destinés à être
parachutés sur la Pologne occupée pour organiser et
diriger les actions militaires de l'AK. Le temps paraissait
long pour les paras polonais qui n'attendaient qu'une
chose : entrer en scène et, pourquoi pas, sauter sur la
Pologne pour la délivrer. Sosabowski avait un
tempérament bien trempé et une certaine vision de
l'utilisation des troupes aéroportées. Des divergences
de vues avec l'état-major britannique privèrent les
polonais de saut sur la Normandie le 6 juin 1944…
En septembre 1944, après de longues négociations,
les britanniques acceptèrent la participation de la 1ère
BIPP à l'opération Market-Garden, la plus grande
opération aéroportée de l'Histoire. L'idée était de
larguer deux divisions parachutistes américaines, une
britannique et la brigade polonaise sur la Hollande pour
prendre le contrôle de ponts, le 30e corps blindé
britannique devant remonter à travers le pays avec ses
chars, rallier les paras, consolider leurs positions et
libérer la Hollande, voire, pourquoi pas, pénétrer en
Allemagne. Les anglo-américains furent largués sur les
Pays-Bas le 17 septembre, mais rencontrèrent
rapidement des difficultés. Les britanniques furent
quasiment encerclés et le contact radio fut coupé, alors
qu'ils devaient guider les polonais pour leur largage…
9
Le 21 septembre, la 1ère BIPP fut donc larguée à
l'aveuglette sur Driel. Les britanniques n'ayant pas
dégagé leur zone de saut, les paras polonais sautèrent
sous le feu ennemi, retrouvant des conditions de saut
proches de celles de la Normandie. Ils établirent des
fortifications autour de leur position le 22, repoussèrent
plusieurs attaques allemandes et construisirent des
canots pour traverser le Rhin afin de soulager les
britanniques, encerclés et au bord de la rupture à
Oosterbeek. Les journées du 23 et 24 virent de
nombreuses tentatives des polonais pour traverser le
Rhin et secourir leurs camarades britanniques, sous le
feu nourri de l'ennemi, et ce ne sont finalement que 200
parachutistes qui parvinrent à venir renforcer les
positions anglaises et à couvrir leur repli. MarketGarden tournait "au vinaigre" sur tous les fronts,
américain, britannique et polonais. La 1ère BIPP avait
perdu un quart de ses effectifs, soit environ 590
morts… Le 26 septembre 1944 les paras polonais
reçurent l'ordre de se replier sur Nimègue, comme
toutes les autres unités parachutistes alliées.
L'opération était un échec.
Les britanniques qui avaient pris le commandement
interallié de l'opération cherchèrent bien sûr
immédiatement des responsables de cet échec. Ils ne
pouvaient, bien sûr, s'accuser eux-mêmes, ni porter le
discrédit sur les puissants alliés américains… Les
polonais servirent donc de bouc émissaire. Le général
Montgomerry accusa Sosabowski d'être allé au combat
à reculons, de n'avoir pas pu traverser le Rhin assez
rapidement pour secourir les paras britanniques.
Stanislas Sosabowski fut donc démis de son
commandement et nommé à un obscur poste
d'inspecteur militaire auprès du gouvernement.
Aujourd'hui, les faits sont clairs. Les hommes de
Market-Garden, américains, britanniques ou polonais
n'ont pas manqué de courage ni de bravoure.
Sosabowski a effectivement sauté sur la Hollande à
reculons, mais pour une bonne raison : une fois de plus
en avance sur ses contemporains, il avait compris
avant tous que le plan de l'état-major britannique était
mal bâti et voué à l'échec. Le général polonais a été
sacrifié pour sauver l'état-major britannique.
La 1ère BIPP fut rattachée à la 1ère DB de Maczek,
libéra finalement la Hollande, entra en Allemagne et
finit la guerre à Wilhelmshaven. Aucune des deux
unités ne fut invitée au défilé interallié de la victoire en
1946 à Londres… La plupart des vétérans polonais
refusèrent de retourner en Pologne devenue
communiste et décidèrent de rester en GrandeBretagne. Ce fut le cas du général Sosabowski qui
devint ouvrier, partageant les conditions de vie de son
ami le général Maczek qui devint serveur. Situation
terriblement schizophrénique pour les deux hommes
qui étaient simples employés la semaine et revêtaient
leurs uniformes de généraux le week-end pour les
réunions d'anciens combattants. Sosabowski fut rejoint
par sa femme et son fils en Angleterre, où il s'est éteint
10
en 1967 après avoir écrit ses mémoires, publiées en
1982, “ J'ai servi librement ”. Il y répond aux
accusations lancées à son encontre par les
britanniques. Malgré les pétitions de milliers de
citoyens hollandais et les démarches entreprises par
les vétérans polonais, le gouvernement hollandais
refusa, pendant plusieurs décennies, de décorer les
soldats polonais et de leur rendre hommage. Le
journaliste hollandais Geertjan Lassche écrivit des
dizaines d'articles dans la presse pour sensibiliser le
grand public à la cause des polonais. Lors de son
interview du Prince Bernhard, ce dernier déclarera “ J'ai
déjà demandé plusieurs fois au ministre de la Défense
d'entreprendre les démarches nécessaires pour les
polonais. Je soupçonne fortement le gouvernement
britannique de faire pression sur le nôtre pour freiner au
maximum l'avancée du dossier ”. La famille royale
hollandaise réussit finalement à faire plier les
parlementaires et à décorer les polonais, vivants ou
décédés, de la 1ère BIPP lors d'une cérémonie diffusée
en direct sur les chaînes nationales. La Pologne
envoya une délégation de soldats en uniforme de
parade, et la cérémonie se tint en présence de la
Reine, du ministre de la Défense, des vétérans
polonais et du petit-fils de Sosabowski. La Hollande a
réussi à effacer plus de soixante ans d'injustice, et c'est
tout à son honneur. Espérons que les britanniques
seront, eux aussi, capables d'effectuer une telle remise
en question…
Pièce commémorative en argent
Geertjan Lassche tourna un documentaire sur la
1ère BIPP qu'il intitula “ L'Honneur d'un Général ”. La
place principale de Driel, zone de saut de la 1ère BIPP
en 1944, comporte un monument à la mémoire et à la
gloire des paras polonais. Au cours de la cérémonie du
31 mai 2006, le capitaine Alan Mackowiak, vétéran de
la 1ère BIPP déclara, la larme à l'œil, à propos de
Sosabowski : “ Je sens l'émotion monter, veuillez m'en
excuser, mais je l'aimais beaucoup, et je pense qu'il
m'aimait aussi. Il a fait de moi un parachutiste et un
commando. J'ai servi sous ses ordres pendant cinq
ans, et cela fait quarante ans qu'il me manque. ”.
NB : le film de Richard Attenborough “ Un pont trop
loin ” (1977) met en scène la 1ère BIPP en Hollande, le
Général Sosabowski est joué par Gene Hackman.
Nils Jacquin-Tkaczuk
Les Amis de la Pologne n° 43
Des polonais métayers dans le sud ouest
L'immigration polonaise en France est surtout
connue par ses mineurs du Nord ; dans le Sud-ouest,
une immigration plus inattendue ( 20 000 Polonais sur
Midi-Pyrénées et Aquitaine en 1946 ) présente la
particularité d'être essentiellement agricole, avec une
proportion exceptionnelle de métayers et fermiers.
Dans un article de 1923, le Journal agricole du
Sud-ouest estime à cent mille personnes le manque de
main-d'œuvre en région. De 1920 à 1935, en MidiPyrénées, on fera appel à 50 000 ouvriers agricoles,
espagnols, italiens et polonais
Dès mars 1924 se crée à Toulouse un Comité
régional de la Main d'Oeuvre Agricole du Sud-ouest,
de la Gironde aux Pyrénées, dont l'objectif avoué est
de diversifier les implantations étrangères.
Bien
considérés
dans
le
Nord,
venant
majoritairement de régions agricoles, les Polonais,
malgré leur caractère un peu exotique, sont des
candidats tout désignés.
Au niveau national, leur arrivée massive résulte
d'une politique volontariste : une convention
d'immigration a été signée en 1919 ; la France
comptera un demi million de Polonais en 1931. À partir
de 1924, la Société Générale d'Immigration (SGI)
centralise les recrutements des immigrants qui passent
par un centre unique à Toul (Meurthe-et-Moselle).
Un premier convoi de 570 travailleurs agricoles part
pour Nancy en 1907-1908 ; 10 000 Polonais seraient
ainsi venus en France jusqu'en 1914.
Après 1920, les travailleurs agricoles polonais
seront les plus nombreux en Aveyron, Cher, Drôme,
Indre, Aude, Loire, Haute-Garonne, Lot, Gers, Gironde,
Lot-et-Garonne et Isère. La crise industrielle des
années 1930 voit le Sud agricole continuer à recruter
alors que les mines du Nord renvoient leurs Polonais
chez eux par wagons ; une circulaire de 1935 aux
préfets précise que le “ rapatriement gratuit ” ne
s'applique pas à l'agriculture.
L'accroissement du nombre de Polonais dans le
Sud-ouest est spectaculaire :
- en Dordogne, on passe de 7 Polonais en 1918 (!) à
2533 en décembre 1939
- en Quercy, de 1926 à 1936, leur nombre est multiplié
par 40 ; on les retrouve à Calès, Cazillac, Rignac,
Castelnau Montratier, Rocamadour, Gignac... Le Lot et
le Tarn-et-Garonne comptent 1075 Polonais en 1937
- ils sont environ 2000 en Gironde et Lot-et-Garonne
en 1936
- dans le Gers, on passe de 100 Polonais en 1930 à
1440 en 1939
- dans le Tarn, en 1936, 2632 Polonais travaillent
surtout aux mines
- inversement en Aveyron, en 1937 le bassin houiller
emploie moins de 50% des 2500 Polonais
En 1946, on retrouve en Hautes-Pyrénées et en
Ariège 349 et 242 Polonais On rencontre aussi des
polonais ouvriers agricoles à Hautefort (Dordogne) ; ils
sont employés comme bineurs de betterave, vachers,
bouviers, bergers, servantes de ferme...
Des recruteurs parcouraient les communautés
minières du Nord, faisant de la publicité aux ouvriers.
Les Amis de la Pologne n° 43
En 1926, sur 300 000 Polonais en France, 30 000
sont ouvriers agricoles. La SGI initie alors un projet
surprenant : organiser l'installation de familles sur des
propriétés en Gascogne, en tant que métayers puis si
possible comme propriétaires. Un programme prévoit
de créer une dizaine de centres de rayonnement. En
1928, celui de 400 ha au domaine de La Forêt à
Villemur près de Toulouse accueille, pendant une
année et sous la supervision d'un intendant, une
vingtaine de foyers qui se familiarisent avec les
conditions de culture et de climat. Le Bulletin de
l'émigration polonaise en France d'avril 1928 rend
compte de cette expérience originale.
Moisson au domaine du Roc au Change près de Périgueux
Cette transplantation va se heurter aux réalités
économiques : manque de moyens pour créer des
centres, et évidemment manque de fonds des
candidats. Au travers d'une filiale créée pour ce projet,
l'Agricolon, la SGI mobilise les caisses françaises de
crédit agricole et des banques polonaises ; le
gouvernement polonais est censé garantir l'opération
dans son ensemble. La “ Protection Polonaise ”
(Opieka Polska, organisme d'aide) ouvre une section à
Toulouse en 1927-1929. En Midi-Pyrénées, on
dénombre, en 1928, 1450 Slaves placés dans 85
exploitations, en majorité des Polonais. En 1930, dans
le Gers, le Lot et la Haute-Garonne, 250 familles de
Polonais sont fermiers, métayers ou propriétaires, et
71 en Dordogne. L'Agricolon fait faillite en 1929 et le
projet s'arrête là.
En 1936 la Société Anonyme d'Exploitation
Agricole, avec des fonds de la Banque Polonaise pour
l'Agriculture, installe son siège à Périgueux, achète le
château du Roc, commune du Change et y engage en
fermage des familles polonaises.
Le Sud-ouest compte 3 000 propriétaires ou
fermiers polonais en 1938, cas unique sur le territoire.
Quelques exemples de parcours individuels se
trouvent dans mon livre Les Polonais au Sud de la
Loire ( ©Archives & Culture, 2013 )
"Polonais de France" comme "mineur dans le Nord"
? Ces exemples tordent le cou à cette image d'Epinal.
Dispersée, l'immigration agricole est restée méconnue,
mais représente un Polonais de France sur quatre en
1939, soit une centaine de milliers de personnes.
Philippe Christol
Une version plus développée de cet article est publiée par le Cercle
Généalogique de Languedoc, dans son numéro 145 ( 4e Trimestre
2014 )
11
Notez bien
Jusqu’au 17 janvier 2015 (sauf du 23 décembre au 2 janvier)
“€Szopka€” de Cracovie
Exposition de crèches polonaises
Institut Catholique de Toulouse
Espace muséographique Georges Baccrabère - 31, rue de la Fonderie à Toulouse
Le 9 janvier 2015
Soirée Koledowanie Galette des Rois
Lieu à définir (Salle St Pierre et St Paul ou Salle Saint André)
Organisée par Les Amis de la Pologne membre du collectif des associations franco- polonaises de Toulouse
Du 26 au 31 janvier 2015
Festival Kinopolska –7e édition
Organisé par Apolina
Du 13 au 17 avril 2015
24e édition des Semaines Polonaises : Kantor – Portrait multiple
Information www.semainepolonaise.fr
Mai 2015 – dates non communiquées
Semaine de l’Europe
Forom des Langues
Organisés par la Mairie de Toulouse
Les Amis de la Pologne N°43
Directeur de la publication : Jean-Noël Dragon
Maquette : Georges Mańkowski
ISSN 1639-21191
Les Amis de la Pologne
Association loi 1901 - 57, rue Bayard, 31000 Toulouse.
Adresse postale : 271 Route de Narbonne, 31400 Toulouse
Président : Jean-Noël Dragon
Président d’honneur : Jacques Arlet
Secrétaire générale : Dany Dragon
Trésorier : Gérard Calmel
Conseillers : Pierrette Calmel, Alexandra Jaskiewicz, Kinga
Joucaviel, Anna Masson, Véronique Olifirenko, Monique
Ratajczak, Leszek Tabis
www.lesamisdelapologne.net
12
Les Amis de la Pologne n° 43