SAINT-JULIEN-MONT-DENIS dans l`Histoire des communes

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SAINT-JULIEN-MONT-DENIS dans l`Histoire des communes
Usine d'aluminium Pechiney (cuves de 175.000 ampères) - (Document aimablement communiqué par l'usine).
loppent les P .M.E. : de ce fait la structure socio-professionnelle de la population de Saint-Jean fait ressortir une
nette prédominance du secteur secondaire, ain si qu ' une forte proportion
d ' étrangers (I8,3 OJo en 1976), parmi lesquels une majorité d ' Italiens, puis
d 'Africains du Nord . Le travail féminin
est par contre un problème: le nombre
d 'emplois est inférieur à la moyenne
nationale.
Une au tre mutation affecte indirectement Saint-Jean: l'essor du tourisme,
timide entre les deux guerres, plus
rapide après les années 50. Certes, l'or
blanc est moins exploité en Maurienne
que dans les grandes vallées de la Taren-
336
taise voisine, mais de nombreuses station s s'y sont développées, dont SaintJean est la plaque tournante, d'où
l'accroissement récent du secteur tertiaire .
Au milieu d'une Maurienne qui se
dépeuple la population de Saint-Jean a
augmenté jusqu'à ces dernières années.
Aujourd ' hui, par suite de la pénurie des
terrains à bâtir et de leur coût, on assiste
à un tassement et l'expansion se fait
désormais au profit des communes
immédiatement voisines : Jarrier, Saint
Pancrace , Villargondran. Quoiqu 'il en
soit Saint-Jean continue d'être un pôle
de développement pour la vallée, conservant ainsi son rôle de capitale de la
Maurienne.
SAINT -JULIEN -MO NTDENIS
Appel/ations anciennes: 1143 : Sanctus Julinus; 1540 : Saint Jul/in ; 1555 :
Saint Jelin (Nœlz de Nicolas Martin), en
patois: Saint Delin; 1557 : Saint
Julien. Montdenis : 1225 : (Jacobus de)
Monte Lineto; 1533 : (Parrochia)
Montis Ligneti ; 1546: Montdenis.
Habitants: Saint-Delenins (Montdeniens).
Population: Saint-Julien: En 1561 :
952 habitants soit 213 feux dont 23 pauvres. En 1732: 215 feux; en 1801 : 789
h. ; 1860: 900; 1901 : 1492 habitants
(grâce à l'essor des ardoisières). Montdenis : 1732 : 102 feux soit environ 350
habitants; 1789: 390; 1858: 387;
1901: 488 (grâce aux ardoisières).
Après 1921, déc/in: 224 habitants en
1936; 193 en 1941. En 1954, St-JulienMontdenis totalisait 1628 habitants, en
1962 : 1644; en 1968: 1678; en 1975 :
1623; en 1982: 1612.
Altitude: 660 mètres à Saint-Julien,
1370 mètres au vil/age de l'église à
Montdenis . Etagement de 544 à 2885 m
au Grand Perron.
Superficie: 3304 hectares.
A 6 km de Saint-Jean-de-Maurienne.
Quartiers et hameaux: La Gare, Les
Plantées, Plan-d'Arc, le Poutet, La
Ruaz, Le Bourg, St Pierre, Costerg, Le
Claret, La Bourbandière, Serpolière,
Villard-Clément, Tourmentier (1300
mètres d'altitude), Grenis (1200 ml.
Montdenis comprend trois hameaux:
L'Eglise (1370 ml, Les Rieux (1450 ml,
les Villes (1500 ml.
Localisation: Commune formée en
février 1965 par l'associatinll de
St-Julien de Maurienne et de .Wontdenis. Située sur la rive droite de l'Arc, la
commune est limitée à l'est par le Rieu
Sec, la Croix des Tê/es (2492 ml, le
signal du Génie (2510 ml, le Petit Perron (2699 ml, le Grand Perron des
Encombres (2825 ml, Cime Noire (2626
ml. Au Nord-Ouest par la Cime de Lancheton (2419 ml, à l'ouest par la Combe
des Fourneaux et au sud - sud-ouest par
l'Arc.
Historique
Une lointaine origine
L'origine de la commune est très
ancienne comme le prouvent de nombreuses trouvailles archéologiques, mais
elle est assez confuse.
L'auteur de la monographie de Montdenis, dans "La Maurienne par les Instituteurs" citait une tradition selon
laquelle le village aurait été fondé par
des habitants venus de Tarentaise, sous
la direction d'un certain Denis . Ils se
seraient fixés d'abord sur la rive droite
du torrent de St-Julien, au lieu-dit "Les
Côtes" et ne se seraient installés
qu'ensuite sur la rive gauche. Ils
auraient également créé le village de
St-Julien avec lequel ils n'auraient
formé qu'une seule commune jusqu'au
XVI' siècle . Ils se seraient alors séparés,
Grenis (où était l'église commune) restant avec St-Julien; les forêts du Solliers et de Tourmentier, des pâturages,
des broussailles et des ravins demeurant
indivis . Malheureusement, mise à part
cette indivision, tout cela est en contradiction avec les quelques données que
nous fournissent l'archéologie ou l'histoire.
Montdenis possède un mégalithe,
"La Pei rra do Carro" ou "Pierre du
coin", roche à cupules qui se trouve à
l'est du village des Rieux et c'est non
loin de là, à Champ-Cortiou, qu'ont été
découvertes des sépultures de l'Age du
Fer. Un transfert de l'habitat d 'une rive
à l'autre serait donc fort ancien et la
Tradition aurait bonne mémoire ! De
même à St-Julien ont été trouvés des
bracelets et des fibules de l'Age du Fer.
Quant à la séparation des deux paroisses, elle est bien antérieure au XVlème
siècle puisqu'il est fait mention de celle
337
de St-Julien dans un texte de la fin du
XIIème siècle.
Le nom même de Denis n'apparaît
pas dans les premières mentions de la
commune dans nos chartes. En effet
jusqu'en 1546 on trouve Mont Linet,
qui était sans doute le nom officiel,
Montdenis étant une appellation populaire qui finit par supplanter la première.
cinq chefs-lieux de mestralie . Nous
n'avons pas de renseignement sur les
rapports des deux vi llages avec leur seigneur jusqu'au début du XIV' siècle:
l'anarchie du Haut Moyen Age leur
avait sans doute laissé la bride sur le
cou. Mais au début du XIV' le comte
tendit à renforcer son pouvoir et ses
droits sur les communes, en même
temps qu'il s'efforçait d'empiéter sur les
1\taufllcnne
St-.Jl!LIEN (Savoie)
La Meipie
L a Rue Pilli n clpale
. r.oll . 1.. f;riHlal ,
n, . ul h ~ r y
La rue du bourg autrefois.
Pour Saint-Julien, Mabillon pensait
l'avoir identifié sous le nom de "Nanosces" dans le testament d'Abbon (739).
Mais il ne donnait aucune raison à cette
identification qui semble un peu fantaisiste. La paroisse apparait sous le nom
. de son Saint Patron dès 1143 : "in Mauriana Locus qui vocatur Sanctus Julinus" .
La châtellenie de Maurienne
Au Mo yen Age Saint-Julien et Montdenis appartenaient à la Chatellenie de
Maurienne, et St-Julien était l'un des
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juridictions des petits seigneurs et
notamment des évêques. Une charte de
1315 concernant les hommes de la comm unauté de Montdenis est particulièrement explicite à cet égard. On y apprend
que, depuis un temps immémorial, ils
jouissaient des forêt s, pâturages et comm unaux et en disposaient à leur gré
pour la construction de leurs maisons,
l'affouage, la pâture de leur bétail.
L 'empereur ayant rendu au comte Amédée V le droit de régale que , selon la
charte, il possédait déjà de droit ancien,
son châtelain Humbert de Sala saisit
tous ces communaux, contraignant tous
les habitants à supplier le comte de leur
céder en albergement l'usage de ce qu'ils
avaient jusque là librement: ils payèrent pour cela 40 sous forts neufs
d 'introge et s'engagèrent à payer un servis annuel de 10 sous forts neufs. Selon
le même processus les Montdeniens
obtinrent, en 1319, l'albergement de
forêts et de pâturages situés sur le territoire d'Hermillon, dont ils partageaient
l' usage avec les communiers de cette
paroisse, et à la fin de la même année un
partage fut fait entre ces deux communes. En 1314, le châtelain Hugonet Barral autorisait Montdenis à al berger une
partie des communaux à divers habitants, à distribuer bois, eau et pâturage
sous le contrôle de quatre prud'hommes
dont l'élection devait être approuvée
par lui. Pour les eaux elle devrait payer
un servi s de douze deniers forts.
Comme on le voit, le comte recherchait tous les moyens d'accroître ses
droits. Mais les communiers ne perdaient aucune occasion de bien préciser
les leurs, en obtenant des franchises.
Pour St-Julien, on ne sait depuis quelle
date existaient ces franchises, mais il en
est question dans un texte du 10 novembre 1314 que rapportent les "Récits
Mauriennais" du chanoine Truchet :
"Plusieurs hommes et bourgeois de
Saint-Julien se sont plaints à nous que
quelques-uns de vous et de vos
officiers .... attentent à leur franchise et
liberté, saisissent les biens des défunts,
mettent les scellés sur leur porte et causent divers autres dommages aux dit
bourgeois. Nous ordonnons et commandons ... que vous mainteniez, défendiez et observiez fidèlement leurs franchises et libertés ... ". Un autre texte
nous apprend de quelle manière étaient
obtenues ces franchises: ce n'était pas
gratuit! Le 10 août 1391, le comte
Rouge connaissant des problèmes financiers se trouva dans l'obligation d'obtenir rapidement de l'argent, ce qu'il fit
en octroyant, en échange d'une contribution exceptionnelle, de nouvelles
franchises et en confirmant les anciennes . Dans ce texte il reconnaissait que
ses officiers ne pouvaient qu'en pressurant le peuple, récupérer les sommes
qu'ils lui avaient fournies ; il remplaçait
donc pour sept ans les autres impôts par
une contribution d'un florin d'or (ou 15
deniers gros) par feu, sauf les feux pauvres, payable chaque année à Noël. Il
était bien précisé que cette contribution
n'était pas un dû, renouvelable dans
l'avenir, mais un "don par grâce spéciale" en échange duquel étaient accordées les franchises. Les attributions des
officiers du comte y étaient bien précisées, pour tenter d 'éviter les abus de
pouvoir et préserver les libertés individuelles.
Si les communiers tenaient à faire
préciser leurs droits, le comte ne manquait pas de faire reconnaître les siens.
Ces reconnaissances étaient faites entre
les mains du commissaire des extentes ;
le 7 mars 1396 c'était Maître Jean Ballay, bourgeois de St-Julien qui recevait
celles de la population amassée dans la
galerie et la place devant sa maison (près
de la mairie actuelle) . Soixante douze
chefs de familles se reconnurent homme
lige du comte; trente deux autres se joignirent à eux pour reconnaître qu'ils
tenaient en albergement : tous les communaux, contre un servis de 20 sols
forts 1 denier par sétorée de forêt; le
droit de prendre du bois dans la forêt
d'Orelle pour piquets de vigne, tonneaux, cuves (sans pouvoir les vendre)
contre 10 sols forts de servis. Sur la
vente des maisons on payait le trézain
(un treizième du prix de vente). Les maisons du Bourg devraient le droit de
toise: 2 deniers forts par toise de
façade. Enfin chaque propriétaire énumérait les redevances auxquelles il était
astreint pour les propriétés qu'il exploitait.
Un droit était généralement réservé
au seigneur: le droit de chasse. En fait,
chez nous ce monopole de seigneur se
limitait à l'ours et à l'épervier, les habitants pouvaient chasser "les bêtes ravis339
santes" (c'est-à-dire qui "ravissaient",
enlevaient les enfants) mais pas les
dimanches et jours de fête. A St-Julien
ils s'étaient fait reconnaître ce droit , en
donnant un motif religieux à leur
chasse: la vente des produits en était
affectée à l'entretien du luminaire et des
ornements de l'église. Le 13 juillet 1557,
le roi de France Henri II, alors maître de
la Savoie, confirmait ces droits. Les
St-Delenains pouvaient chasser "chamois, ours, cerveys (loups cerviers),
loups et autres "bêtes ravissantes" . Le
texte semble classer les chamois parmi
les "bêtes ravissantes " ! Ce droit
s'étendait aux dimanches et fêtes, dans
les limites de la commune et avec interdiction aux étrangers de chasser dans ce
territoire. La seule limitation était
l' interdiction des "hacquebuttes et
autres semblables bastons intimidant les
dictes bestes" . Les "hacquebuttes"
étaient des arquebuses et les "bastons"
désignent évidemment des "bâtons à
feu", arquebuses ou mousquets.
Le chapitre et les familles nobles
Le comte n'était pas le seul seigneur à
posséder des fiefs à St-Julien. Le chapître de la cathédrale de St-Jean y possédait la cure, le fief de la "Traverse" et
en 1620 il avait acquis le prieuré fondé
avant 1184. Ce prieuré fut affermé à un
vice-prieur qui percevait une quarte de
blé par 16 quartelées de terre en plaine
et par 32 en montagne, un pot de vin par
fossorée de vigne des habitants de
St-Julien et de Montdenis, trois pots de
moût par fo ssorée pour les étrangers,
etc ...
Parmi les familles nobles, on peut
citer les Manuel, De Bavoz (Urbain de
Bavoz fut châtelain de Maurienne en
1519), d'Albert, Du Pont (qui furent
peut-être les propriétaires de la Tour
octogonale qui passa ensuite à la famille
Christin). Un petit détail sur la vie quotidienne de ces nobles nous est fourni
par le contrat de mariage d'Iolande de
Bavoz et d'Etienne Michaëlis, le 29 août
340
1540. La dot de l'épouse se montait à
400 fl orins donnés par son père, 800 par
sa mère, 200 par ses frères qui fournirent en outre des vêtements. Pour le
mariage: une robe de damas doublée de
velours et une cotte de satin à bandes de
velours, une robe de bon drap doublée
de satin et une cotte d'estamet rouge à
bande de velours; un an après Noël, en
payant le reste de la dot : une robe de
camelot doublée de fourrure noire de
Roumanie, une cotte de bon drap, à
bandes de velours, de la couleur qu 'il
plaira à lolande de choisir, des manches
de damas et d'autres manches de satin et
de soie .
Hôpital, maladière et confréries
Si ces nobles de village pouvaient se
permettre un certain luxe ce n'était pas
le cas de toute la population. En 1561,
sur 213 feux, il y avait 23 feux
"pauvres", ce qui n'est pas négligeable,
surtout si l'on considère que les critères
de pauvreté de cette époque n'étaient
pas les mêmes que les nôtres et que nous
ferions entrer sans doute plus de foyers
d ans cette catégorie. Pour leur venir en
aide, il n 'y avait que les aumônes. Par
exemple, le prieur devait donner, depuis
le l' lundi du carême jusqu 'à la veille
des Rameaux, sauf les jours de fête, le
samedi et le dimanche, quatre onces de
pain d'orge et d'avoine à tous les pauvres qui se présentaient. Le jeudi saint
c'était une assiette de fèves, une demielivre de pain et un peu de vin. A Montdenis, en 1635, Etienne Julien léguait
une pi èce de vigne pour que soit servis , à
la sortie de la messe de Pâques huit pots
de vin rouge.
Pour les pauvres de passage, St-Julien
possédait un hôpital, à côté du pont. On
ignore sa date de fondation, mais en
1385 , sans doute à cause d 'un caprice du
torrent , il n'avait pas de maison . C'est
alors que Jacques Melin acheta de Guillaume Didier , un bâtiment d' un étage
dont il fit don pour "y recevoir les pau-
vres passants". En 1708, monseigneur
de Masin le décrivait ainsi : une cuisine,
trois chambres, quatre lits pour les pauvres de passage à qui l'on donnait un
quart de vin, pour un sou de pain et la
soupe. Pour assurer ses dépenses l'hôpital disposait des rentes de quelques terres et vignes. Il fut détruit par le ruisseau en 1824 ou 1826 et ses rentes allèrent au bureau de bienfaisance.
Une maladière construite à l'est du
village, près de la route de St-Michel,
accueillait les gens atteints de maladie
contagieuse, comme on peut le lire dans
une visite pastorale de Monseigneur de
Masin. On ignore sa date de construction, mais en 1504, Monseigneur de
Gorrevod cite la "chapelle de SteMadeleine, proche de la maison où
habitent les pauvres lépreux de ce lieu" .
Elle accueillait aussi des lépreux
d'autres communes, ainsi en 1509, Jean
Varrocti de Termignon. Le cardinal de
Gorrevod afin que "des aumônes plus
abondantes affluent et soient distribuées aux pauvres atteints de la lèpre
qui habitent cette maison" accordait
des indulgences à ceux qui visiteraient la
chapelle aux principales fêtes de
l'année. De cette maladière, il reste le
nom et quelques ruines près desquelles a
été érigée une croix.
Comme on le voit, une grande part de
la vie sociale était réglée sur la vie religieuse. De nombreuses confréries assuraient la solidarité entre leurs membres.
La plantation d'une croix était un
petit évènement et chaque quartier se la
disputait. Ainsi, en 1623, les habitants
ayant fait faire une croix et se querellant sur son emplacement, ils firent
appel au prince Thomas, qui décida de
la faire mettre à la "Croix Blanche",
celle-ci (qui existait déjà en 1393 si l'on
en croit un texte signé Jean Balay
notaire) étant transportée au cimetière.
Cette décision ne satisfaisant pas tous
les habitants, ils firent appel, en 1624, à
l'arbitrage d'un capucin, le père Loys. Il
semble que, malgré la volonté de se plier
à cet arbitrage, il y eut encore des difficultés puisque "La Croix Blanche'"
actuelle porte sur son socle la date de
1636.
Procès contre les amblevins
Qu'un ennui se présente, on faisait
appel à l'intervention divine: si des charençons s'attaquaient aux vignes, on
faisait une procession, et si cela ne suffisait pas, on demandait l'excommunication des coupables. Ceci fut à l'origine
d'un curieux procès.
Des insectes, que les textes décrivent
ainsi: "des animaux brutes, volants, de
couleur verte, semblables à des mouches, vulgairement appelés verpillons ou
amblevins", s'en prirent en grand nombre à l'une des principales richesses de
St-Julien: les vignes. En 1545, les St
Delenins leur intentèrent un procès. Les
amblevins furent représentés par un
procureur, Pierre Falcon, et défendus
par l'avocat Claude Morel. Une première comparution conciliatrice n'ayant
pas eu de résultat, les syndics se pourvurent à l'official de St-Jean (c'est à dire
au juge de l'évêque) ils avaient pour
avocat Pierre Ducal. Lettres monitoires,
interlocutoire, visites d'experts, plaidoyers se succédèrent et le 18 mai 1546,
l'official écartant la demande d'excommunication contre les amblevins, se
contenta de prescrire des prières publiques . Celles-ci durent avoir une certaine
efficacité, puisqu'on ne parle plus
d'amblevins jusqu'en 1587, date à
laquelle les syndics voulurent renouveler
l'instance commencée en 1545 car,
depuis deux ans, les insectes étaient
revenus en nombre si effroyable qu'ils
avaient détruit tout espoir de récolte en
dévorant feuilles et pampres. Les
syndics reconnaissaient que la cause en
était peut-être "les péchés des hommes,
moins assidus à la prière et au culte
divin et moins exacts à s'acquitter de
leurs vœux et obligations". Ils adressèrent donc, le 13 avril 1587, une requête,
signée François Fay, à l'official pour
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que les insectes aient un nouveau procureur, l'ancien étant mort, pour que l'on
fasse une expertise et que les animaux
soient expulsés par la censure écclésiastique. Le co-syndic François Amevet
choisit comme procureur Pétremond
Bertrand. Les insectes reçurent comme
procureur Antoine Filliol et comme
avocat Pierre Rambaud. Le curé de St
Julien fut commis pour faire exécuter à
nouveau l'ordonnance de 1546 : inviter
les fidèles à vivre chrétiennement à
payer les dimes, à faire trois processi~ns
dans les vignobles, avec grand messe,
chant de psaumes et aspersion d'eau
bénite. Ce qui fut fait les 20, 21 et 22
mai 1587, le curé Romanet en .signa
l'attestation. Suivent de nouvelles comparutions, des renvois, etc .... Le procureur des animaux fait ressortir le fait
que ses clients, bêtes brutes, ne pouvaient être raisonnablement cités en justice, condamnés par contumace, ni
frappés d'excommunication. Créés par
Dieu afin de croître et de se multiplier,
Ils le faisaient en mangeant les végétaux
qui étaient aussi bien leur nourriture
que celle de l'homme. A quoi l'avocat
Fay répliqua que les animaux avaient été
créés pour l'utilité que 1'homme pouvait
en retirer.
Les parties avaient déjà comparu à
neuf reprises: les syndics décidérent
alors de recourir à un moyen terme. Le
29 juin, à l'issue de la messe tous les
manants furent convoqués par le métrai
Guillaume Morard, pour se rendre,
l'après-midi, au Parloir-d'Amont, la
place publique, afin d'assister à une
assemblée générale sous la présidence
du vice-châtelain Jean Depupet. On
proposa alors de donner "aux dits animaux place et lieu de souffisante pâture
hors des vignobles de St-Julien".
L'assemblée décida d'offrir une terre
connue sous le nom de la Grand 'Feisse
au-dessus du Claret, où ils trouveron;
herbe, buissons, et toutes sortes de bois.
Après quelques renvois, l'avocat des
amblevins finit par refuser la proposition, la terre étant stérile. Une expertise
342
fut décidée, mais la suite du procès n'est
pas connue, à cause de la détérioration
du manuscrit.
Léon Ménabréa, qui a été le premier à
rapporter cette affaire, pense que les
procès contre les animaux étaient
symboliques et avaient pour but d'inculquer au peuple l'idée de la justice universelle. Mais ajoutons que cela n'était
pas gratuit et que la crédulité des uns
faisait vivre les autres.
En tout cas, le procès fut peu efficace : les amblevins étaient toujours là.
On préféra alors faire appel à la miséricorde divine en multipliant pèlerinages
et processions. Ce n'est qu'au XVIII'
siècle que l'on pensa à recourir à des
moyens de lutte naturels. En 1751 on
demanda à l'intendant d'obliger les particuliers à ramasser les amblevins dès
leur apparition; on y ajoutait exorcismes et processions. Après 1756, plus
d'intervention religieuse, mais en 1767,
en 1788, en l'an IX, et 1847 encore, des
injonctions à ramasser et brûler les
amblevins et les feuilles où ils ont
déposé leurs œufs. Aujourd'hui, si l'on
ne parle plus d'amblevins, ce n'est pas à
cause de leur disparition, mais de la
raréfaction des vignes, raréfaction dont
les causes n'ont pas suscité la même
haine que ces petits insectes volants.
La commune ne fut pas épargnée,
non plus, par la guerre. En 1597, pour
empêcher ou du moins retarder la marche de Lesdiguières, Don Sanche de
Salinas avait massé son armée de 600
chevaux et 1000 hommes de pied sur le
plateau de Villarclément. Mais, sans
tenter le combat, cette troupe battit en
retraite en désordre vers le Mont Cenis
et le 26 juin 1597, Lesdiguières prenait
St-Julien. Les réquisitions égalèrent
bien la dime prélevée par les amblevins.
Affranchissement et Révolution
La fin du XVIII' siècle vit l'affranchissement des droits seigneuriaux.
Nous avons vu qu'après la Maison de
Savoie, l' un des principaux détenteurs
d e fief était le chapitre de la Cat hédrale.
Le curé de Montdenis, sans attendre
l' acte d'affranchissement de 1771 ,
racheta de ses deniers des droits que le
chapitre possédait sur la cure depuis
1297. Il lui en coûta "400 pièces de cinq
sous, comptés, dénombrés, vérifiés,
retirés et portés ensu ite au dépôt du chapitre en présence du notaire et de
témoins" .
A St-Julien le chapitre possédait
essentiellement les fiefs du prieuré et de
la Traverse. Après l'édit de 1771 , la
commune discuta avec le chapitre et
finit par s'entendre le 27 janvier 1789.
Le fief de la Traverse fut affranch i pour
48 livres, celui du prieuré pour 1 328
livres 9 sols, 8 deniers. Même si cela
avait pris du temps, à la veille de la
Révo lu tion les droits seigneuriaux
étaient abolis.
Sous la Révolution, nous trouvons
peu d'événements marquants. St-Julien
semble se soumettre de bonne grâce aux
ordres de l'administration du district:
a in si durant l'été de l'An II elle fut l'une
des quatre communes qui répondirent
seules à la demande d'ouvriers pour
fauc her et rentrer le foin dans les magasins militaires du Mont-Cenis. En l'An
III, elle fournit dix livres d'ocre pour la
peinture de la guillotine. Mais tous les
habitants n'étaient pas unanimes: en
1793, le citoyen Dalbanne fut arrêté
pour avoir tenu des propos antirévolutionnaires, il fut finalement relâché, à la condition de fréquenter les
sociétés révolutionnaires et d'assister au
moins deux fois par semaine aux séances
de l'administration du district. De
même on essaya de ne pas obéir à
l'ordre d'abattre le clocher, sous le prétexte que personne n 'était assez hardi
pour s' introduire entre les bois très serrés de la charpente. Il fallut cependant
s 'exécuter; en 1807 la municipalité
demanda d 'affecter des fonds de la
fabriq ue à la réfection de la flèche.
Montdenis également semble avo ir
ap p orté quelque résistance en
n'envoyant l'inventaire des biens de
l'église que lorsqu' il ne fut plus possible
d'éluder les ordres; de plus, on avait
bien du mal à y trouver des agents,
comme le montre le procès verbal de la
séance de l'administration du canton de
St Jean, le 17 plu viose An VI (5 février
1798) que cite le chanoine Gros: "consi dérant que les citoyens Buttard
Richard agent, et Coutaz Jean-Claude
adjoint ... de même que les citoyens Jean
Bochet , Maurice Coutaz, J .B. Joubert
et Jean-Maurice Coutaz ... ont successivement tous refusé de correspondre à la
confiance de ces mêmes autorités; considérant que cette administration ne
connaît dans ladite commune aucun
républicain ... en état de rempli r les
fonction s d'administrateurs municipaux . .. " elle demandait à l'administration du département de prendre des
mesures pour faire cesser ces actes
d ' incivisme.
Sous l'Empire, en 1806, Montdenis
reçut l'u n des neuf postes du télégraphe
à signaux Chappe qui traversait la Mau rienne.
La population au XIXème siècle
En fait, la Révolution, avec ses nombreux passages de troupes et ses réquisitions avait épuisé le pays . Sa situation
est connue par les réponses faites à un
questionnaire du 22 fév rier 1800 par le
secrétaire de mairie Pierre-François
d ' Albanne. En voici les extraits les plus
signi ficat i fs.
Esprit public: "Bon, mais le peuple
désire ardemment de pouvoir exercer en
liberté le culte de la religion" .. . lui
redonner son pasteur rendrait le peuple
"plus dévoué pour le gouvernement de
la République, quoique fatigué par la
guerre , logement et contribution".
Ecoles: " il n'y a qu'un petit revenu
qui peut à peine satisfaire le traitement
d'un petit maître pendant deux mois,
qui ne fait pas seulement bien li re, ni
écrire, ni parler françai s, et les enfants
343
oublient pendant le reste de l'année ce
qu'ils ont appris".
Contributions : "... plusieurs sont
dan s l'imp oss ibilité d ' y sati sfaire
jusqu'à la récolte du vin, leur unique
ressource ... " .
Commerce: "il ne se fait aucun commerce. L'agriculture est leur unique
occupation. Les pauvres font des ardoises pour se procurer ce qui est nécessaire
pour la vie".
L'année 1816, succédant aux occupations autrichiennes de 1814 et de 1815
où, non contents des réquisitions les soldats se livrèrent au pillage, fracturant
les celliers et maltraitant les habitants,
fut celle d'une grande misère. Selon
J .M. Féaz : "II est beaucoup de monde
qui souffre de la faim. Une quantité ne
mange que de la " polente" ... Ceux qui
avaient encore de l'avoine la faisaient
moudre et, avec la farine , le son non
retiré, ils faisaient du pain. Ce pain se
brisait dans le four; il fallait se servir du
racle pour le sortir. Tout le monde allait
par les champs ... arracher les herbes
supposées mangeables ... Dans les bonnes maisons on tuait le bétail...". Mais
ce bétail, tué avant d 'être à point, faisait
défaut ensuite pour la reconstitution du
cheptel.
Ces privations devaient avoir de
fâcheuses conséquences sur l'état sanitaire de la population . En 1836, Victor
d 'Albanne, fils de Pierre-François, et à
son tour secrétaire de mairie, établissait
un rapport alarmant : "Sur une population de 824 individus, un fort tiers se
trouve atteint de crétinisme plus ou
moins prononcé, un autre tiers de goître, et c'est à peine si le dernier tiers,
réputé sain, n'a pas encore quelques
symptômes ou propension à ces deux
genres de maladies ... ". Il voyait pour
causes le manque de vent du Nord, purificateur, les logements insalubres et "le
manque d'eau potable" . Une enquête,
réalisée en 1845 , reconnaît elle aussi que
deux tiers de la population étaient
atteints de goître ou de crétinisme, mais,
en s'en tenant seulement aux " cas les
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plus apparents" elle n'en citait en fait
que 54, ce qui n'était pas supérieur à la
moyenne des communes du fond de la
vallée. On pourrait même supposer que
les rapports noircissent le tableau aux
yeux de l'administration, pour limiter la
conscription. Quoiqu'il en soit, les
tableaux des conscrits nous permettent
de constater les progrès réalisés au cours
du XIXème siècle . En l'An IX (1801), la
commune n'a eu que deux conscrits
"dont l'un renvoyé à cause d'infirmités
et l'autre reconnu trop court " ; en l'An
X elle en a fourni 6, réformés "pour
n'être pas de taille et par rapport à des
infirmités habituelles, une grosse partie
de la population étant atteinte de crétinisme ou de goître les affligeant plus ou
moins ... ". Sur les 80 conscrits recensés
de 1852 à 1861 , nous trouvons 23 réformés pour goître ; 4 pour crétinisme; 23
pour défaut de taille (dont l ,3D m, 1,31
m, 1,37 m: avaient-ils envoyé leurs
petits frères à leur place ?) , 9 pour autre
motif : 7 exemptés pour motifs divers, 2
ajournés. Il en restait 8 aptes au service
et 4 déclarés rénitents pour ne s'être pas
présentés. On pense alors à cette
réflexion d ' Isaïe-Marcellin Thomasset,
conscrit de Valmeinier à la même époque , au sujet des réformés de Valloire :
"comment se fait-il qu'il n'y ait de myopes que dans cette commune et cela
depuis un temps immémorial ?". En
tout cas, les chiffres des années suivantes montrent une nette régression du
phénomène. Il est vrai que cette
deuxième moitié du XIXème siècle correspond à une élévation du niveau de
vie, grâce à l'essor des ardoisières.
Voies de communications et torrents
Autre fait du XIXème siècle, on avait
vu disparaître le rôle d'étape de
St-Julien, avec la construction de la
route nationale décid ée par Napoléon
en 1812, à 600 mètres en aval du bourg,
au bord de l'Arc. Dès le 22 juin 1817
d'ailleurs, l'Arc vengeait les St Delenins
de cet abandon en emportant plusieurs
centaines de mètres de chaussée: on
reconstruisit plus solidement en exhaussant la route d'un mètre. L'Arc recommença en 1824. La même année, le 18
juillet, le ruisseau de St Julien débordait
également, recouvrant une trentaine de
maisons du Bourg, tuant deux femmes,
recouvrant de boue les deux tiers des
terres cultivables. Ce torrent devait
encore déborder en 1834, ainsi que
l'Arc . En 1837, la route était coupée par
le torrent du Claret, en 1848 par l'Arc ,
ainsi qu'en 1856, 1859. Entre 1815 et
1860 le Claret coupa onze fois la route.
En 1862, la voie ferrée St-Jean-StMichel était ouverte à la circulation: les
torrents avaient avec elle une cible supplémentaire. Le 20 juillet 1871, les eaux
ont pour quelques instants envahi le
Bourg, s 'élevant à plus de deux mètres,
comblant les caves, les écuries, les rezde-chaussée . La circulation fut interrompue quinze jours. Même alerte en
1872 avec dix neuf jours d'interruption.
La compagnie P.L.M. protégea alors la
voie ferrée, en face de St-Julien, en prolongeant un tunnel de cent quatre
vingts-mètres.
Si la voie ferrée était à l'abri, il n'en
était pas de même de St-Julien, toujours
menacé par son torrent, et cette menace
était encore accrue par un glissement de
terrain latent, au-dessous de Montdenis.
En 1895-1896, l'administration des
Eaux et Forêts fit percer un tunnel de
202 mètres pour canaliser le ruisseau en
cet endroit. Il était temps, le 6 avril
1897, après une chute de neige et des
averses de pluie chaude, le terrain gorgé
d'eau glisse, remplissant le lit du torrent
et l'exhaussant parfois de 30 mètres.
Sans le tunnel, ces matériaux auraient
constitué un barrage entraînant la formation d'un lac qui aurait fini par forcer le passage, au risque de détruire
St-Julien. Précisons que ce tunnel avait
été calculé pour livrer passage, sans problème, aux plus grandes crues: il permet un débit de 1 442 mètres cubes
secondes . Ce travail fut complété par un
barrage sur voûte servant de pied à
l'éboulement. Le terrain fut asséché par
11 693 mètres de drains en éventail. Le
lit du torrent fut aménagé par la construction de cinq barrages dans la partie
supérieure, ainsi que de vingt six seuils;
dans la partie inférieure un canal de
1 196 mètres de long coupé par des
seuils de 1,20 m de chute.
En 1906 la gare de St Julien entrait en
service : jusque là les trains passaient
sans s'arrêter. Cela fit se développer un
nouveau quartier.
St-Julien et Montdenis
Enfin le principal événement du
XXème siècle fut la réunion de St-Julien
et de Montdenis en février 1965, mettant ainsi fin à quatre siècles de querelles
dues aux forêts et communaux indivis .
Dès 1530 des difficultés avaient surgi.
En 1531, six notables de St Jean, appelés en arbitres, ne trancheront rien, en
déclarant que les deux communes
devaient en user et en jouir en commun.
Même type d'arbitrage en 1613, puis en
1729. Le cadastre de 1732 avait jeté
l 'huile sur le feu: St-Julien avait 215
feux, Montdenis 102, le verbal d'estimation attribua à St-Julien les deux tiers de
la valeur estimative des communaux.
Mais au cadastre de Montdenis les biens
indivis étaient portés à une valeur double de celle de St-Julien: elle a donc
payé une part d'impôt double. Chacun
gênant l'autre, il y eut des procès. Entre
1854 et 1858 aucune coupe ne fut possible. C'est finalement la fusion en une
seule commune qui a pu seule résoudre
le problème .
Archéologie
La "Peira do Carro" ou "Pierre du
Coin", à l'est du village des Rieux est
une grande dalle horizontale entaillée
d'une quinzaine de cupules.
Montdenis est surtout riche en découvertes de l'Age du Fer. Au siècle dernier
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Eglise de Montdeni s : vocable SaintMaurice.
Chapelles rurales: Montdenis:
Notre Dame de Pitié au village des Villes; Notre Dame des Neiges au-dessus
du village.
St-Julien: St Roch. A l'intérieur un
tableau sur ardoise représentant la Visitation. Il porte dans un angle: "Claude
Exartier F.F. (Fecit Fieri) 1710" et dans
l'autre angle: "Laurentius Dufour Pingebat 1710" .
A côté, la Croix Blanche porte:
"D.O.M. communitas errexit 1636" .
Villard-Clément: une chapelle.
Le Claret: St Roch, Notre Dame des
Neiges, Saint Antoine, Sainte Trinité,
Saint Bernard, Saint François, Sainte
Anne.
Châteaux et maisons fortes
La tour octogonale (cliché P. Dompnier).
au Crêt du Saut (ou du Sureau ?) plusieurs sépultures du Hallstatt Final et de
la Tène Ancienne ont été découvertes,
ainsi que diverses tombes dispersées. La
plupart des objets avaient été rassemblés dans la collection Vuillermet.
Aujourd'hui un certain nombre se
trouve aux musées de Chambéry,
d'Annecy ou à St-Germain-en-Laye.
Principaux objets: bracelets de jayet,
chainettes de bronze, bracelets de
bronze.
Eglises
Eglise de St-Julien: entièrement
reconstruite en 1850 surtout grâce à la
générosité de son curé Martin Dussuel
(qui paya 4000 livres sur les 12500 !).
Maître-autel des Gilardi: 1857 (3276
francs 50 dont 1 900 du chanoine Gravier, 960 du chanoine d'Humbert,
416,50 du curé Dussuel). Chaire des
Gilardi : (1852) 700 francs par la fabrique.
Il dut y en avoir quatre.
- La Maison Forte de Costerg (ou
Cotard, en latin : in costa), aux nobles
Manuel, existait déjà au XIllème siècle,
elle a disparue au XVIllème.
- La Maison Forte de Ballay exista
dès le XIVème siècle, passa ensuite aux
Bavoz (début XVlème), puis aux
d 'Albert (1693).
- Maison Forte Du Pont, aux nobles
Du Pont du Villaret, ils avaient au
XVlème siècle une mai son à St-Julien,
peut-être celle de la Tour Octogonale,
qui existe toujours, magnifiquement
restaurée. Vers 1730 elle appartenait à
Joseph-François Christin, juge temporel de l'évêché.
- Au XVlème siècle, une famille est
nommée Voutier de la Tour de SaintJulien.
Activités
Montdenis était avant tout une commune rurale. Les forêts y ont été très tôt
défrichées pour faire des champs et des
pâturages, ce qui a entraîné souvent le
ravinement. On pratiquait l'élevage, la
culture des céréales, du chanvre , plus
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-1iII' __
récemment de la pomme de terre, qui
était d'un bon rapport.
St-Julien fut aussi une commune agricole. Un recensement de 1561 y signale
452 bovins et 767 ovins, ce qui paraît
être un chiffre élevé et en contradiction
avec ce qu'on lit par ailleurs. Ainsi en
1624 on citait le vignoble comme principale ressource "à cause de la pénurie
d'autres moyens". De même, dans une
enquête de 1800 on peut lire: "Ils n'ont
que très peu de bestiaux, n'ayant que
très peu de foin dont il faut aller prendre la majeure partie ... au sommet des
rocs, où on ne peut aller qu'avec des
grappes (crampons) aux pieds". La
vigne était donc la culture principale et
produisait un "picolo" chanté au
XVlème siècle par le poète Nicolas Martin. La plupart des terres étaient en
vignes, qui escaladaient la pente par des
terrasses soutenues par des murs de
pierre sèche. Elles alimentaient une
vingtaine de communes. De nombreux
propriétaires, habitants d'autres villages, avaient une vigne et une petite maison où ils descendaient pour les travaux
et les vendanges. L'importance du
vignoble nous fait mieux comprendre
l'ardeur des habitants à combattre les
amblevins.
En fait, le bon ensoleillement de la
commune permettait bien d'autres cultures, comme celle du safran, qui entre
dans de nombreuses recettes de la cuisine mauriennaise d'autrefois. Si
aucune trace ne reste de cette culture, les
textes en ont gardé de nombreux témoignages. Ainsi en 1535 la commune
albergeait des propriétés appartenant à
1'hôpital, près du safranier du noble
Richard de Manuel. Le 3 mai 1555,
Messire Jacques Voutier lègue une partie de ses biens à la chapelle de Jésus et
de Marie, entre autre deux safraniers
situés à Côte Rousse . En 1617, un texte
cite le safranier de la cure; en 1624 le
safranier de Michel Voutier ; en 1625 un
safranier au lieu-dit la Buffardière.
Mais à côté de ces activités agricoles,
St-Julien fut animé par diverses indus-
tries.
Un acte de donation entre vifs (dont
le donateur se nomme Michel Cheys) du
9 février 1326, cite au Plan d'Arc: un
moulin avec ses fers, meules, roues, carraux, aqueducs, biefs, vases, places et
cours d'eau ... des artifices de forge,
pressoir à huile .. .
On exploitait également des carrières
d'ocre. Dans la donation faite aux
amblevins d'une pièce de terre au-dessus
du Claret, en 1587, les habitants se
réservaient le droit de passage pour
l'exploitation de "mines de colleur".
On a vu que sous la Révolution
St-Julien avait fourni 10 livres d'ocre
pour la peinture de la guillotine. Selon
M . Barbier en 1858 les mines étaient
encore exploitées: "on en envoyait de
grandes quantités en Piémont et un chimiste habile de Chambéry, M. Genin, le
préparait et en obtenait de forts beaux
produits, excellents pour la peinture".
Mais la principale production était
celle des ardoises, dont le commerce
semble fort ancien: en 1430, Amédée
VIII faisant restaurer le château
d'Annecy, envoya chercher des ardoises
à St-Julien; en 1650, les syndics de
Chambéry écrivaient à ceux de St-Jean
pour "traicter avec quelques muletiers
pour le port des ardoises nécessaires
pour le couvert de l'église de Sainct
Légier". En fait cette exploitation était
encore peu importante, comme on l'a
vu dans l'enquête de 1800, les pauvres y
trouvaient seulement un complément de
ressources . La gare de St Jean, puis la
suppression des douanes avec
l'annexion en 1860 allaient provoquer
un rapide essor. De un million d'ardoises en 1860, la production passait à 3,6
millions en 1869, 5,7 millions en 1876
puis, après un fléchissement, 7,1 millions en 1885 et plus de Il millions en
1895 . Montdenis passait de 300 000 en
1882 à 900 000 en 1894, mais la production baissait ensuite à cause des difficultés de transports. La fi ssibilité des schistes facilitait la tâche du fendeur et permettait d'obtenir le meilleur rendement
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