Institut de formation Saint Michel de Malestroit Module 5

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Institut de formation Saint Michel de Malestroit Module 5
Promotion DC 2015-2016
Institut de formation Saint Michel de Malestroit
Module 5
«Situation de communication centrée sur le patient et son entourage »
par Justine Deshayes
Introduction :
Je suis actuellement en formation initiale d'aide-soignante à l'institut de formation Saint Michel de Malestroit
depuis septembre 2015. Dans ce cadre, je dois valider le Module 5 « Relation et Communication » en décrivant et en
analysant une situation relationnelle qui m'a interpellée en stage.
La situation que j'ai choisie de vous présenter, s'est passée lors de mon deuxième stage dans la période de
novembre, décembre, en EHPAD1. Elle m'a interpellée et posée question car elle concerne aussi bien la personne
soignée que moi même, ma position en tant que future professionnelle aide-soignante. C'est pour cela que j'ai
décidé de vous la proposer et de l'approfondir en effectuant ce travail.
Je vais commencer cet écrit en vous présentant la structure où ma situation s'est passée. Puis dans un second
temps, je présenterais la personne soignée dans ses aspects physiques mais aussi psychologiques. Je continuerais en
vous décrivant ma situation puis en l'analysant.
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Établissement d'hébergement pour personne âgées dépendantes
Présentation de la structure :
Ma situation se passe dans un EHPAD, plus précisément dans la chambre de la personne soignée. La chambre
de la personne est toute neuve, avec des belles couleurs, ses affaires personnelles, les volets sont ouverts, il ne fait
pas très beau mais il ne pleut pas.
Présentation de la personne soignée dans ses aspects Physiques et Psychologiques :
Par souci de confidentialité et par respect du secret professionnel, je l'appellerai Madame X.
Madame X est née le 18/03/1925, elle a donc 91 ans. Madame X est née à Lanneanou dans le Finistère. Elle
est donc française. Madame X, a eu 4 enfants avec son mari. Aujourd'hui celle-ci est veuve, elle a également perdu 3
de ses enfants, le premier dans un accident de voiture, le deuxième et le troisième d'un cancer. Il lui reste une fille.
Elle a travaillé de 45 à 65 ans en tant que cuisinière dans une cuisine centrale. Madame X vivait à Ploufragan, elle
vivait seule avant de rentrer à l'EHPAD, elle est entrée à l'EHPAD car son maintien à domicile était difficile, manque
d'autonomie, problème de vision, chutes, grande fatigue, difficulté à se relever, moral moyen. Cela fait un an qu'elle
est à l'EHPAD. Madame X mesure 156 cm et pèse 84,6 kg, son indice de masse corporelle est de 34,76 kg/m², elle est
donc en obésité modérée. C'est une dame qui est un peu désorientée, qui a des troubles cognitifs, un état dépressif.
Madame X, a beaucoup d'antécédents tels que des troubles cognitifs, syndrome dépressif, hypertension artérielle,
fracture, névrose chronique, tassement vertébraux, gastrite chronique... Madame X, avait une bronchite chronique
lors de mon stage, elle toussait beaucoup.
Description :
C'était le deuxième jour de mon stage, il est à peu près 9h, je ne connais pas vraiment l'établissement, les
résidents. Je suis avec une aide-soignante qui a appris que j'avais ma MSP lors de ce stage. Donc elle me propose de
commencer à effectuer un accompagnement auprès d'une résidente. Elle me présente la résidente en me donnant la
fiche de soins de celle-ci avec ses antécédents, sa pathologie, son aspect physique, son GIR1... Alors je lis sa fiche, un
peu étonnée de voir tous ses antécédents, sa pathologie dont sa bronchite chronique, je me sens un peu nerveuse.
L'aide-soignante m'explique que Madame X est quelques fois ailleurs mais très gentille même si avant c'était une
dame qui était un peu agressive et agitée. Je tiens compte de tout ce qu'elle me dit et en particulier que la toilette se
fera au lavabo avec toilette intime et jambes au lit. Je prépare mes affaires et frappe à la porte, elle me dit d'entrer,
ce que je fais.
Premier abord très courtois, je me présente, j'explique qui je suis, d'où je viens, je lui demande comment elle
s'appelle, d'où elle vient, mais je ne suis pas totalement rassurée car elle me regarde sans me prêter tellement
attention. Elle a un regard triste, je la sens plutôt, on va dire ailleurs et en plus de ça, elle tousse beaucoup. Une
quinte de toux commence, donc je me mets en face d'elle, la regarde dans les yeux et au bout d'un moment, je lui
prends les mains, lui dis de bien respirer et surtout de se calmer, après un petit moment la quinte de toux cesse.
J’attends qu'elle reprenne ses esprits et lui demande, si ça lui arrive souvent, elle me répond que oui et que ça en
devient même fatiguant. Je l'observe et je vois que Madame X est ailleurs, elle regarde par la fenêtre avec un regard
triste. Je demande si ça ne dérange pas, si je lui lave les jambes ainsi que les pieds, elle me dit que non et que
justement ça lui fera du bien. Donc je prépare mes affaires et commence à lui laver les jambes. Et je lance une
discussion en lui demandant comment elle trouve l'EHPAD depuis qu'elle est arrivée, d'où elle vient, ce qu'elle faisait
auparavant. En voyant qu'elle me regarde, que nous sommes face à face, qu'elle me répond, qu'elle me prête
attention, qu'elle me sourit, je me sens tout à coup plus rassurée et je la sens plus détendue aussi, prête à parler avec
moi.
Mais pendant l'accompagnement à la toilette, Madame X me parle beaucoup de sa sœur, en me disant
qu'elle était là hier, qu'elle avait dormi chez elle, qu'elle ne savait pas si elle était partie tôt ce matin ou non en me
demandant. Je l'écoute attentivement et lui demande si sa sœur vient souvent, si elle n'est pas loin. Elle m'explique
que celle-ci est une religieuse et qu'elle habite donc juste à côté, à la communauté des sœurs et qu'elle essaye de
venir un jour sur deux, qu'elle passe régulièrement et qu'elle est contente quand elle vient car les journées sont
longues. Et puis tout d'un coup elle me parle de son histoire de vie, ce qu'elle faisait avant, où elle vivait et puis de
ses enfants en me disant qu'elle a perdu trois de ses enfants sur quatre. Elle m'explique leurs morts, je l'écoute et la
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Groupe Iso-Ressource
regarde dans les yeux mais il est vrai qu'en la voyant comme ceci, je me sens mal pour elle. Elle me tend la main je la
saisis instantanément, elle est assise dans son lit, je suis à côté debout à sa hauteur, elle me regarde, on se regarde,
j'ai de l'empathie pour cette dame. Elle me sourit et me dit que c'est la vie mais qu'elle ne souhaite cela à personne.
Je ne réponds pas, j’acquiesce simplement.
L'accompagnement se poursuit je l'accompagne à la salle de bain pour qu'elle fasse son torse et son visage.
Je remarque qu'elle prend vraiment soin d'elle, avec de la crème pour son visage, ses mains. Elle me regarde dans le
miroir et me dit : ''de toute façon maintenant, je plairais à qui ? '', je lui réponds simplement : '' à vous '', avec un
sourire. Elle me répond avec un sourire.
Je l'installe dans son fauteuil et lui dis que ça a été un plaisir de la rencontrer et que j'espère que je la
reverrai, elle me sourit et me dit : '' Bah oui ! On se reverra c'est sûr, vous êtes là pour un mois ''. Et nous rigolons
toutes les deux. Je lui dis à plus tard et je sors de la chambre.
Analyse de la situation :
En sortant de la chambre, un plein d'émotions me submerge, de la tristesse pour l'histoire de ses enfants, de
la joie, du questionnement sur mon comportement, ma position professionnelle.
Revenons au début de la situation, premiers abords, il est vrai que je ne suis pas rassurée car elle ne me prête
pas vraiment attention mais c'est à moi d'engager la conversation pour que nous soyons toutes les deux à l'aise et
que nous puissions profiter de l'accompagnement à la toilette. Mais je n'ai pas vraiment le temps de me poser la
question car une quinte de toux arrive, je me positionne en face d'elle, la regarde dans les yeux, je lui prends les
mains et lui dis de respirer doucement et de se calmer, on ne se connaît pas et je lui prends les mains, je ne sais pas
si cela à été la bonne manière de procéder mais je la voyais de plus en plus angoissée et le fait de lui prendre les
mains même si nous nous connaissions pas l'a rassuré. Le toucher, le regard et le fait de parler doucement1 en lui
disant de se calmer l'ont rassurée et la quinte de toux a cessé. C'était une bonne attitude face à ce genre de situation
je pense, car je suis là avec elle, elle n'est pas seule, je la soutiens. En faisant ceci j'ai également compris que pour
cette personne, le toucher était important et le regard aussi ce qui m'a donné les clés pour que l'accompagnement se
poursuive dans de bonnes conditions. Et cette quinte de toux a fait que d'une part et d'autre nous nous sommes
rapprochées et prouve à la personne que je suis là pour elle.
La question ouverte2 (est directe et permet au patient de faire partager son point de vue ou son ressenti. Ex :
comment s’est passé votre nuit ? ) que je lui pose a été peut être une erreur de ma part car je la ramène au mauvais
souvenir de ses quintes de toux. Je n'aurais pas dû lui demander ceci mais plutôt je pense continuer sur une
discussion positive. Ou alors tout simplement en lui proposant de commencer l'accompagnement à la toilette
comme je l'ai fait après cette question. Car à cause de cette question Madame X s'est de nouveau ''évadé dans ses
pensées'' ce qui du coup m'a mise en difficulté.
Je lui propose de lui laver les jambes, je réutilise le toucher pour capter son attention. Ce qui est bénéfique
car non seulement elle accepte mais de plus, je lance une conversation et de suite elle est réceptive, elle me répond
ce qui de part me rassure mais je vois que ça la rassure également. Le toucher l’a mise à l'aise mais je vois que cela
également lui fait du bien, je prends alors mon temps pour lui laver les jambes et je pense lui faire plaisir car elle a
toujours un sourire quand elle parle. J'utilise donc la communication non verbale et verbale3. La communication
verbale utilise des mots, écrits ou oraux ; ce langage doit s’adapter à l’interlocuteur, à la teneur du message et à la
situation. Le vocabulaire doit être simple pour être compris par le récepteur. Le ton aura son importance pour
accompagner le message ainsi que les formules de politesse. La communication non verbale permet de transmettre
un message par des gestes, des postures, des mimiques, des attitudes, et des regards. “La plupart de nous, vivons
dans notre tête, ressassant soucis, échecs passés et catastrophes futures. Le toucher d’une main bienveillante nous
ramène dans le monde présent et nous aide à être de nouveau en phase avec la réalité.” 4
L'observation5 est aussi importante ainsi que l'écoute active et la reformulation6. En effet Madame X parle
beaucoup de sa sœur, elle parle qu'elle était là hier, qu'elle avait dormi avec elle. Je l'écoute, l'observe, elle me pose
1
Cours « Communication, principe de base » Catherine Courtois
Synthèse du Module 5, Soeur Marylène
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Synthèse du Module 5, Soeur Marylène ; Cours « Communication », Catherine Courtois
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Citation anonyme : http://evene.lefigaro.fr/citations/mot.php?mot=toucher&p=4 , evene, le figaro
5
Synthèse du Module 5, Soeur Marylène
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Synthèse du Module 5, Soeur Marylène et cours « Type d'attitude habituelle face à face » Catherine Courtois
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alors la question si sa sœur est partie tôt ce matin ou non, à ce moment précis je me dis que je ne dois pas répondre
car ça lui rappellerait qu'elle est désorientée. Donc je reformule en lui demandant ce que fait sa sœur, si elle vient
souvent. Madame X répond de suite et m'explique d'où elle vient, ce que sa sœur fait. La reformulation : est une
intervention qui consiste à redire en d’autres termes, ou d’une manière plus concise ce que le patient vient
d’exprimer et ainsi s’assurer de la bonne compréhension de ces propos. Il peut s’agir de faits, d’idées, de sentiments.
Ex : « si j’ai bien compris,…c’est bien cela » ?
L’écoutant expose le problème de l’autre sans interprétation et sans jugements.
Vient alors le moment de son histoire de vie, au début elle me parle de son ancien travail de sa vie d'avant.
Mais d'un coup de ses enfants, sachant que je ne connais pas tellement son histoire de vie. Ça me fait de la peine et
je vois que le fait d'en parler lui fait de la peine. Elle me tend la main je la saisis instantanément mais je me sens mal,
j'ai de l'empathie7. A ce moment je ne sais pas comment être avec elle, comment repartir sur du positif je suis
coincée et submergée par la tristesse. Je la regarde tout simplement, un silence8 (parfois les mots sont inutiles ou
trop difficiles à prononcer. Le soignant se doit de respecter ce silence). Je ne sais pas si c'est le meilleur moyen mais
je ne peux pas relancer sur quelque chose d'autre sachant que c'est, je pense important pour elle d'en parler et donc
je préfère me taire. Elle finit par me dire qu'elle ne souhaite ça à personne, je suis d'accord sur ce fait. Donc
j'acquiesce tout simplement car le silence est la meilleure réponse je pense dans ses circonstances pour respect de la
personne. « Comprendre le point de vue de l’autre sans chercher à le modifier est le secret de la relation d’aide »9
L'accompagnement se poursuit, Madame X repart dans le négatif en disant qu'elle plaira à qui maintenant.
C'est une question à laquelle je dois répondre, cela est sûr et je lui dis tout simplement ''à vous''. Elle me sourit, elle
est contente je lui rends tout naturellement son sourire. Elle repart alors dans le positif. L'honnêteté, le sourire, être
moi même est ce qui fait que Madame X était contente et qu'elle soit repartie dans le positif10.
Conclusion :
Lors de cette situation je suis passée par plusieurs phases, de la nervosité, à la tristesse, à l'empathie, à la
joie. Je me suis demandée en sortant si j'avais bien fait, si je ne m'étais pas trompée, si je n'avais pas fait de faux pas,
de bêtises, si ma posture professionnelle était la bonne. Et je pense aujourd'hui avec du recul que j'ai bien fait, car j'ai
été tout simplement moi même. J'ai ressenti ce que je voulais faire et je l'ai fait. J'en ai bien sûr parlé par la suite à
l'aide-soignante qui était avec moi ce matin là et aux infirmières pour avoir leurs opinions. Elles m'ont alors répondu
que j'avais été moi même et que c'est juste l'essentiel dans ce métier. Je rencontrerais beaucoup d'autres situations
qui me poseront questions, je ne ferais peut être pas l'analyse tout de suite mais en rentrant chez moi ou lors des
pauses. Mais une chose est sûre, ce que je retiens de cette situation, c'est que je me suis laissée guider par ce que je
ressentais et ce que je pensais. Je me connais, je connais mes valeurs et pour accompagner une personne soignée je
pense que c'est la base. La formation aussi nous apporte les clés pour une bonne communication, le travail d'équipe,
notre histoire de vie tout ce qui nous entoure. Dans ce métier j'en apprendrais tous les jours et j'ai hâte, car c'est
pour des situations comme celle que je vous ai décrite que j'ai voulu devenir aide-soignante.
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Rejoindre l'autre dans ce qu'il est, percevoir le monde ''comme si'' on était cette personne, capacité de ressentir avec justesse le sentiment de
celui qu'on écoute.
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Synthèse du module 5, Soeur Marylène
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Carl Rogers, Synthèse Module 5, Soeur Marylène, Page 6
10
Synthèse Module 5, Soeur Marylène