salle 17 coup de peinture coup de jeunesse.qxp

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salle 17 coup de peinture coup de jeunesse.qxp
EXPOSITION CHROMAMIX 2 / 9 AVRIL - 15 NOVEMBRE 2009
MUSÉE D’ART MODERNE ET CONTEMPORAIN - 1, place Hans-Jean Arp
Dossier de préparation / exploitation de la visite
SALLE 17 : COUP DE PEINTURE...
COUP DE JEUNESSE !
PRÉSENTATION DE LA SALLE (TEXTE MURAL)
Coup de peinture... Coup de jeunesse !
Depuis toujours, nous nous servons des couleurs pour transformer nos vies.
Chaque fois que l’on s’habille, que l’on décore sa maison, la couleur nous aide à
embellir, cacher, modifier ou mettre en valeur le monde qui nous entoure. Les
artistes prolongent ce geste ancestral, et lui accordent ainsi une dimension artistique…
« LA ROUTE DES ROMAINS À KOENIGSHOFFEN IL Y A 2000 ANS ! »
Un ensemble de monuments funéraires gallo-romains du 2e siècle à
Kœnigshoffen
La grande voie gallo-romaine, l’actuelle route des Romains, qui reliait le camp
militaire d'Argentoratum (Strasbourg) à Metz était bordée par un grand nombre
de tombes à incinération. Sur certaines d’entre elles s'élevaient de beaux monuments funéraires. À partir de la fin du 2e siècle, suite à l’extension du quartier
d’habitations civiles voisin, le vicus, une partie de la nécropole (cimetière) a été
détruite pour laisser place à de nouvelles constructions.
Le mausolée de Marcus Valerius Rufus est le seul monument funéraire de
Strasbourg attestant de traces de polychromie. Cependant, il ne fait plus de
doute aujourd’hui que grand nombre de sculptures en pierre de l’Antiquité
devaient être recouvertes de peinture.
Au Musée Archéologique de Strasbourg sont présentés les monuments funéraires authentiques ainsi que la reconstitution polychrome du grand relief mithriaque de Kœnigshoffen.
À L’ÉPOQUE ROMAINE : BÂTIMENTS, SCULPTURES ET TOMBES RECOUVERTS
DE COULEURS !
L’Antiquité avait-elle « mauvais goût » ?
Difficile de le croire et pourtant il en est ainsi : les sites antiques, que nous imaginons d’une pureté toute « classique », étaient en réalité bariolés de couleurs !
SERVICE ÉDUCATIF, 2009
MUSÉE D’ART MODERNE ET CONTEMPORAIN, 1 PLACE HANS-JEAN ARP
RÉSERVATIONS : 03 88 88 50 50 DU LUNDI AU VENDREDI DE 8H30 À 12H30
RENSEIGNEMENTS L’APRÈS-MIDI : 03 88 23 31 15
Photos : Mathieu Bertola - Musées de la Ville de Starsbourg
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Celles-ci étaient partout ! À l’extérieur et à l’intérieur des maisons - les magnifiques
fresques de Pompéi en sont un bon exemple -, sur les sculptures et jusqu’aux pierres tombales des cimetières, des couleurs partout !
Sans doute « maquiller » le matériau d’origine faisait-il plus « riche » ?
Archéologues et historiens le savent depuis longtemps, par des découvertes comme
celle de la frise du mausolée d’Halicarnasse* ou par des textes antiques, comme
ceux de Pline l’Ancien*, précisant les pigments utilisés par les peintres antiques.
Ce n’est cependant que depuis quelques dizaines d’années, grâce aux progrès de la
science, que certains laboratoires ont les moyens d’analyser très finement les
œuvres antiques en pierre. Et ce qu’ils découvrent est stupéfiant ! Le goût immodéré
de l’Antiquité pour les couleurs vives nous paraîtrait sans doute aujourd’hui assez
choquant !
Si de nombreux vestiges de peintures murales ont été retrouvés en Alsace, la polychromie des sculptures n’est assurée que dans deux cas :
- le mausolée funéraire de Marcus Valerius Rufus, découvert et étudié récemment,
sur lequel ont été relevées des traces de couleurs (plus d’informations p. 3)
- le grand relief du sanctuaire de Mithra de Kœnigshoffen, présenté au Musée
Archéologique, et dont une inscription bien conservée nous apprend qu’il avait été
repeint aux frais d’un légionnaire à la retraite.
Difficile donc de dire à quoi ressemblait précisément chaque monument funéraire.
Il est cependant possible d’imaginer, sans grand risque d’erreur, l’aspect que pouvait avoir un cimetière à cette époque-là. C’est le but du panoramique ci-dessus.
Non, les Romains n’avaient pas mauvais goût, ils avaient un goût différent du nôtre.
D’ailleurs un proverbe le dit bien : « Des goûts et des couleurs, on ne discute pas ».
La mode en effet était différente. Les Romaines par exemple se maquillaient beaucoup plus que les dames d’aujourd’hui et les auteurs satiriques se moquaient volontiers d’elles : « Sur son front baigné par la sueur coulaient des ruisseaux de fard, et
dans les rides de ses joues il y avait une telle quantité de craie qu’on eût dit un vieux
mur décrépi sillonné par la pluie », écrit Pétrone dans l’une de ses œuvres.
*Mausolée d’Halicarnasse : construit au 4e siècle avant J.-C., ce tombeau du roi Mausole (d’où vient
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le nom de « mausolée ») s’élevait dans le Sud de la Turquie actuelle.
*Pline l’Ancien : auteur littéraire et savant romain né en 23 après J.-C. et mort en 79 lors de l’éruption du Vésuve. Il a écrit l’Histoire Naturelle, une mine d’informations sur son époque.
LES PIGMENTS MINÉRAUX UTILISÉS À L’ÉPOQUE ROMAINE
Les terres colorées par les sels minéraux ont été beaucoup utilisées par les Romains
pour la peinture. On les appelle des « pigments minéraux ». Les sels minéraux les
plus couramment utilisés étaient les oxydes métalliques (métal + oxygène) ou les
carbonates (minéral + oxygène). Les pigments étaient pulvérisés (réduits en poudre)
puis mélangés à un liant.
Jaune : ocre jaune (oxydes de fer jaunes)
Rouge : ocre rouge (oxydes de fer rouges)
Blanc : craie (carbonate de calcium)
Brun : ocre foncée (oxydes de fer bruns)
Vert : malachite (carbonate de cuivre)
Violet : terres violettes (oxydes de fer ou de manganèse violets)
Noir : terres sombres (oxydes de fer noirs) ou charbon de bois
Certains pigments étaient considérés comme exotiques et coûtaient très cher :
Rouge de mercure
Rouge de réalgar
Bleu d'Alexandrie dit « bleu égyptien »
La laque était un mélange de poudre minérale blanche (par exemple de l'argile) avec
des colorants d'origine animale ou végétale.
LE MAUSOLÉE DE
MARCUS VALERIUS RUFUS
Un puzzle et des traces certaines de
peinture !
Le plus grand monument funéraire
gallo-romain retrouvé à Strasbourg a
été édifié dans la première moitié du
Ier siècle après J.-C. Il s’élevait non loin
de la grande voie qui traversait le faubourg romain de Kœnigshoffen, l’actuelle route des Romains. Il avait été
consacré à la mémoire de trois
défunts (morts) : Marcus Valerius
Rufus représenté en toge - donc en
vêtement civil, car il avait terminé son
temps de service militaire - et ses deux
demi-frères ou compagnons d’armes,
vêtus de leur équipement militaire car
encore engagés dans l’armée. Tous
trois apparaissent dans une haute
niche bordée de pilastres (piliers adossés au mur) et encadrée de panneaux
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sculptés sur lesquels sont figurées des Ménades dansantes (compagnes du dieu du
vin, Bacchus).
Un siècle plus tard, ce magnifique mausolée a été démonté et brisé volontairement
en des centaines de fragments qui ont été stockés dans une fosse où les archéologues les ont retrouvés il y a quelques années. Sans doute cette destruction est-elle
à mettre en lien avec la construction de nouvelles maisons à la place de l’ancienne
nécropole (cimetière). C’est lors de l’étude de ces centaines de fragments que les
restaurateurs et les archéologues ont fait une découverte importante : les restes de
ce monument conservaient encore de nombreuses traces de peinture ancienne !
La réalité archéologique
Sur la façade du monument ont été relevées les couleurs suivantes :
rouge vif pour :
- les corbeilles de chapiteau
- le fourreau du poignard et des épées des deux légionnaires
- les lèvres des personnages.
ocre jaune pour :
- la tige centrale d’une palmette de chapiteau.
Les personnages latéraux (qui n’apparaissent pas sur le monument du panoramique) portent également des traces de couleurs.
La reconstitution archéologique
Certains vestiges archéologiques sont en très mauvais état. Il est difficile pour un
non-spécialiste de comprendre leur intérêt. L’archéologue décide alors de procéder
à une reconstitution : celle-ci « redonne vie » aux œuvres archéologiques et permet
de les imaginer dans leur cadre d’autrefois. Ainsi, sur le mausolée de Marcus
Valerius Rufus ont été portées les couleurs relevées par les archéologues, complétées par des couleurs reconstituées.
LA COULEUR POUR CONTAMINER LA VIE MODERNE
Sandy Skoglund (1946), Germs are everywhere, 1984
Cibachrome, Musée d’Art moderne et contemporain
Qu’est-ce qui est vert, uniforme et parsemé de tâches roses irrégulières ?
L’intérieur d’un appartement soigneusement aménagé, repeint, puis photographié
par l’artiste américaine Sandy Skoglund.
Entre la mise en scène et le moment de la
photographie, des chewing-gums se sont
incrustés. Dans cet environnement malsain et figé, la couleur joue un rôle ironique. Les murs, le sol, les tableaux, les
luminaires, le téléviseur, jusqu’à la coupelle de fruits, tous ces objets ont été
contaminés par ce virus coloré. Seule la
plante, privée de lumière et de chloro4/7
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phylle, dépérit, tandis que la femme en bigoudis semble au contraire s’épanouir
dans ce décor irréel.
LA COULEUR POUR CACHER ET RÉVÉLER
Bertrand Lavier (1949), Westinghouse, 1981
Réfrigérateur peint à l’acrylique, Dépôt Jean Brolly, Musée d’Art moderne et
contemporain
Bertrand Lavier a utilisé une peinture très empâtée pour
repeindre ce réfrigérateur. On le voit bien, car le geste est
très grossier, indiscipliné. Mais si l’objet est devenu invisible derrière cette épaisse couche picturale, cela n’empêche pas l’artiste de respecter très précisément ses couleurs d’origine : la surface blanche est peinte en blanc, la
poignée grise en gris, etc. Ainsi, Lavier cache et révèle à la
fois l’objet. Mais l’œuvre reste au final aussi froide qu’un
frigo ordinaire…
LA COULEUR POUR PROUVER SON AMOUR
Trois coffrets de courtoisie, 1640 / 17e siècle / milieu 19e siècle
Bois polychrome, fer, Musée Alsacien
Le coffret de courtoisie ou Minnekästchen était autrefois
offert par le fiancé à sa bien-aimée ou par le marié à sa
jeune épouse. Elle y gardait ses rubans, ses bijoux, les
objets qui lui étaient précieux et sans doute ses petits
secrets… Leurs formes, des plus simples aux plus complexes, imitent les coffres grandeur nature. Ces petites
boîtes en bois de hêtre étaient recouvertes de décors
peints pour les rendre plus belles. On y voit beaucoup de
fleurs, surtout rouges et blanches ainsi que des personnages habillés à la mode du temps. Pétale en forme de
cœur, mains enlacées… nous disent que ce sont des
« coffrets d’amour ».
LA COULEUR POUR CRÉER UN CHEZ-SOI
Maurice Dufrêne, Un intérieur Moderne, 1905
Paris, Librairie des Arts Décoratifs, Bibliothèque des Musées
La couleur est un des ingrédients essentiels pour créer des lieux de vie en harmonie avec nos goûts et nos personnalités. Qui n’a pas pris plaisir à choisir parmi un
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nombre infini de teintes, la nuance, la couleur parfaite, sa couleur préférée, pour les
murs de sa maison ou de celle dont on rêve ?
En Europe, au début du 20e siècle, on publiait
des albums de planches évoquant des intérieurs d’ici et d’ailleurs, d’hier et aujourd’hui,
où les harmonies colorées aidaient à imaginer un chez-soi. La bibliothèque des musées
regorge de tels albums d’où est extraite cette
série de planches. Et vous, dans quel intérieur auriez-vous aimé habiter ?
LA COULEUR POUR EMBELLIR LA TABLE
Joseph Hannong
Terrine de forme Duplessis en biscuit de faïence
Terrine en faïence émaillée blanc
Terrine de forme Duplessis à décor de petit feu en qualité fine
Strasbourg, 1774-1781, Musée des Arts décoratifs
Que d’étapes pour embellir la table ! La 1ère terrine a subi une cuisson de dégourdi
(500°C - 600°C) destinée à la sécher, sa couleur est encore celle de sa matière,
l’argile. Puis un émaillage et une cuisson de grand feu (750°C - 950°C) la rendent
d’un blanc brillant, elle est prête à être peinte (2ème terrine). Les couleurs qui ornent
les faïences de bouquets, feuillages et autres décors subissent une cuisson de
petit feu qui ne dépasse pas 700°C. Chaque couleur a sa température de cuisson
propre. On compte souvent autant de cuissons que de couleurs (3ème terrine).
LA COULEUR POUR FAIRE DÉCOUVRIR
Atelier Beato, Deux jeunes femmes préparant un bouquet de fleurs, vers 1880
Photographie sur papier albuminé colorié, Musée d’Art moderne et contemporain
Comment partager avec d’autres la richesse colorée de pays lointains avant l’invention de la photographie couleur ?
En colorant les photographies noir et blanc et en transformant les gris et les
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sépias subtils en autant de nuances colorées.
C’est ainsi que l’atelier photographique
Beato, installé au Japon à partir de 1863, a
pu léguer à la postérité de magnifiques
albums remplis de photographies rehaussées. Dans ces trésors laqués, nous pouvons
encore savourer la finesse et la diversité des
intérieurs, des costumes et des tatouages
d’un pays haut en couleurs, plein de mystère
en cette fin de 19e siècle.
LA COULEUR POUR « PIXÉLISER » LA VIE QUOTIDIENNE
Marcus Kreiss (1961), Camping, 2000
Vidéo (en boucle), FRAC Alsace, Sélestat
Marcus Kreiss remplace pinceaux et pigments
par des caméras et des pixels. Il utilise la vidéo
pour cadrer autrement des situations ordinaires et dévoiler des aspects insoupçonnés de la
vie quotidienne. Dans Camping, les couleurs
pixélisées sont particulièrement saturées
créant ainsi une fresque presque abstraite où
couleurs et lumières prennent la vedette sur les
campeurs. Sous le regard de Marcus Kreiss,
une bouteille de ketchup, une simple gourde en plastique, se transforment sous
nos yeux en éclatants points de couleurs, vifs et lumineux, d’une beauté inattendue, pleine de fraîcheur.
LA COULEUR POUR PRENDRE POSITION
Bruce Naumann (1941), Flesh to White to Black to Flesh, 1968
Vidéo sonore (en boucle), Musée d’Art moderne et contemporain
Né en 1941 aux Etats-Unis, Bruce Nauman est un artiste pluridisciplinaire. Dès la fin
des années soixante, il travaille sur le thème de son corps et de ses déplacements
à travers des films, des sculptures et des enregistrements vidéos. Dans cette vidéo
en noir et blanc, l’artiste se badigeonne progressivement
de peinture blanche jusqu’à se recouvrir entièrement, puis
de peinture noire avant de faire disparaitre ces couches.
C’est comme si, en changeant de couleur, il changeait
d’identité. Quand il réalise cette vidéo, les conflits raciaux
sont encore très présents aux États-Unis.
Choisir la couleur de sa peau est alors un acte politique.
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