Cocktail CNC – Bilan 2006 – 22 mai 2007 – Majestic Intervention de

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Cocktail CNC – Bilan 2006 – 22 mai 2007 – Majestic Intervention de
Cocktail CNC – Bilan 2006 – 22 mai 2007 – Majestic
Intervention de Véronique Cayla
Monsieur le Président, Cher Gilles,
Chers amis,
Tout d’abord, merci à vous d’être venus aussi nombreux
à ce cocktail rituel du CNC à Cannes. Je sais que vous
avez tous des agendas chargés ici. Je vais donc être
brève.
Cette année est particulière pour plusieurs raisons. En
premier lieu, le Président de la République a manifesté
son engagement en faveur de la création en consacrant
le Ministère de la culture et de la communication comme
l’un des ministères fondateurs d’un gouvernement
particulièrement
resserré.
Ainsi
la
France
pourra
conforter son rôle de leader culturel au niveau
international, comme le démontre amplement, et depuis
longtemps, le Festival de Cannes. Et en nommant à sa
tête une femme de caractère, profondément éprise de
culture, le Premier Ministre et le Président de la
République renforcent la signification de ce choix.
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Et puis, cette année, le Festival fête son 60e
anniversaire quelques mois après le CNC. Le Festival
n’a pas pris une ride. Il se remet continuellement en
question sous l’impulsion de Gilles Jacob, Catherine
Démier et Thierry Frémaux. Bien sûr, il y a de la
permanence dans le Festival : si le rituel demeure, avec
les Marches, les fêtes, les Prix, il y a aussi beaucoup de
renouvellement. La soirée anniversaire de dimanche soir
a montré à quel point c’est ici, à Cannes, autour de
Gilles Jacob, que tous les ans la famille mondiale du
cinéma se réunit avec bonheur. C’est ce qui fait de cette
manifestation un modèle pour toutes les autres et la
référence pour les amoureux de cinéma.
Ces soixante années ont aussi été pour le CNC celles
de l’action. Avec vous, nous pouvons nous féliciter
aujourd’hui d’avoir permis le développement du cinéma
français dans toute sa diversité. Ses résultats en 2006 le
démontrent clairement.
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Je me réjouis, en particulier, que sa part de marché ait
atteint un niveau record. 2006 a en effet permis aux films
français de dépasser le nombre d’entrées des films
américains : ce n’était pas arrivé depuis plus de 20 ans.
Quels sont les faits marquants de l’année écoulée ?
Vous pourrez consulter le Bilan de l’année 2006 qui
vous sera distribué tout à l’heure. Je vais juste souligner
quelques
éléments
significatifs
de
cette
année
cinématographique.
La fréquentation a progressé de 7,6 % en frôlant les 190
millions d’entrées. Les films français atteignent quant à
eux une fréquentation de près de 84 millions d’entrées,
qui est leur meilleure performance depuis 1984.
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Il y a indéniablement aujourd’hui une adhésion des
publics à l’offre cinématographique française. Alors, bien
sûr, il y a quelques films très porteurs qui font beaucoup
d’entrées. Et c’est tout à fait souhaitable. C’est grâce à
eux que nous pouvons aider les films les plus fragiles.
En terme de concentration de la fréquentation, il faut
savoir
que
celle-ci
a
tendance
à
diminuer
progressivement, notamment pour les films français. En
1997, les 10 premiers films français réalisaient 54 % des
entrées des films français, et en 2006 ils n’en absorbent
plus que 47 %.
À côté des films les plus porteurs, il y a aussi beaucoup
de films d’auteurs qui ont rencontré leur public. Le
nombre de films qui dépassent les 100 000 entrées
progresse de manière régulière : en 10 ans, il est passé
de 162 à 223 films (en 2006).
Après une année 2005 exceptionnelle, la production
française s’est stabilisée. En 2006, ce sont 203 films qui
ont été agréés, dont 170 films d’initiative française. Ces
chiffres montrent de manière éloquente le dynamisme
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de la production française, dont plus du tiers fait l’objet
de coproduction avec des pays étrangers.
Mais je sais bien que si le bilan global est bon, il y a
encore des points de fragilité dans le cinéma français,
qui doivent retenir toute notre attention.
Pour
un
certain
nombre
de
films,
l’accès
aux
financements reste difficile. Ces financements font
parfois défaut non seulement pour la production, mais
aussi pour la distribution des films. Leurs chances de
succès en sont d’autant plus réduites.
Le CNC se doit dès lors d’accentuer sa politique
redistributive
C’est le propre de notre système que de permettre une
solidarité entre les films. Il convient donc que le fonds de
soutien joue pleinement son rôle de correctif du marché,
pour encourager la création, l’innovation, la prise de
risque.
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Il faut le faire pour la production elle-même, mais aussi
en amont et en aval de celle-ci : mieux accompagner le
travail d’écriture des auteurs, c’est créer un climat
favorable à l’audace créative et à la nouveauté.
Je suis convaincue en effet que c’est en soutenant les
créateurs, par nos aides à l’amont de la production, que
nous remplirons le premier volet de cet objectif. En
2007, nous avons considérablement augmenté le budget
de ces aides notamment en doublant l’enveloppe
consacrée à l’écriture et à la réécriture de scénarios. En
accord avec les organisations professionnelles d’auteurs
et de producteurs, nous allons, dès le mois de juin, faire
évoluer ce dispositif pour, je l’espère, le rendre plus
efficace : revalorisation des aides, mais aussi meilleur
travail d’accompagnement des auteurs.
Et avec Claude Durand, Président de l’Avance sur
recettes, nous étudions comment mieux accompagner
les jeunes réalisateurs vers leur deuxième film. Ils sont
en effet trop nombreux, ceux qui après leur 1er film
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n’arrivent pas à s’inscrire durablement dans cette
profession.
En outre, s’agissant de la production, le développement
constant des financements publics ces quatre dernières
années, par la création du crédit d’impôt, les sommes
affectées au développement des fonds régionaux par le
CNC et la rénovation des Sofica devraient commencer à
porter leurs fruits.
Pour ce qui est des mesures qui concernent l’aval, nous
avons mené un long travail d’évaluation des aides à l’art
et essai, dans l’objectif de rendre ces aides plus
incitatives à l’accompagnement et à la promotion des
films les plus ambitieux. Il nous faut en effet conforter la
légitimité du label « art et essai », qui est une des
marques d'excellence de la conception française du
cinéma.
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Droit d'auteur, droit à la diversité et droit de la
concurrence
Enfin, le CNC souhaite lancer une réflexion approfondie
sur une problématique qui prend de plus en plus
d'importance : celle des collisions possibles entre le droit
d'auteur et le droit de la concurrence. Tous deux guident
la juste régulation des rapports économiques très
spécifiques qui caractérisent le cinéma comme art et
comme industrie. Il convient de trouver le bon équilibre
pour que l’objectif de pluralisme et de diversité sorte
conforté de ce nécessaire dialogue.
Cela couvre, entre autres, les problèmes liés à la
diffusion des films en salles, et des régulations qui
peuvent être envisagées dans ce domaine, dans l'intérêt
tant des ayants droits que des spectateurs.
Cela concerne aussi la question du prix des places et de
la tarification qui a été l'objet de débats lors des
renouvellements de l'agrément des cartes illimitées.
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Nous allons approfondir ces questions dans les
semaines qui viennent avec les autorités de la
concurrence.
La projection numérique en salle
Les professions du cinéma et le système d'aides qui les
soutient ont déjà su s'adapter dans le passé à plusieurs
révolutions : l’arrivée de la télévision, celle de la vidéo.
Aujourd'hui, nous devons relever ensemble le défi
numérique pour que ces nouvelles technologies soient
un atout au service de la création et non une menace
pour la diversité.
L'été dernier le rapport de Daniel Goudineau sur la
projection numérique en salles a parfaitement identifié
les problématiques que l'arrivée de celle-ci soulève et a
permis que le débat s'engage. Le CNC va maintenant
proposer à la concertation avec les professionnels ses
réflexions sur les principales questions posées par la
projection numérique, que je résume ici très brièvement.
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Notre volonté est d'accompagner cette mutation dans le
respect de la liberté de choix des exploitants et de veiller
à ce que la technologie ne bouleverse pas le partage
actuel des responsabilités entre distributeurs, exploitants
et
prestataires
techniques.
L'indépendance
et
la
diversité de la programmation doivent être garanties,
tout comme la liberté d'accès aux salles et aux films.
La première priorité c’est, bien sûr, que les films français
et européens soient disponibles sur support numérique.
C’est une condition sine qua non.
La question des normes ne me semble plus vraiment se
poser.
Nous
préconisons
l'adoption
de
normes
équivalentes à celles des recommandations du DCI
américain et bien sûr l'interopérabilité des matériels. Une
plateforme
d'informations
et
de
tests,
sous
la
responsabilité du CNC et de la CST, permettra
d'approfondir ces questions de normes, de sécurité et de
certifications.
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En ce qui concerne les processus d'équipement des
salles, une voie médiane, confortant la responsabilité de
l'exploitant et apportant des garanties par des éléments
de régulation devrait être privilégiée.
Enfin, pour résoudre de manière adaptée à la situation
française la question centrale du financement, il nous
semble que toute une palette de moyens devrait être
conçue et une réflexion collective conduite, pour trouver
les solutions appropriées, particulièrement pour la petite
et la moyenne exploitation.
2 mots sur les nouveaux diffuseurs
Les
technologies
numériques
transforment
profondément la façon de fabriquer des films de cinéma
et des programmes de télévision. Grâce aux nouvelles
plates-formes, elles offrent désormais des moyens de
diffusion à grande échelle de ces mêmes œuvres et de
nouveaux espaces de création.
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Pour l’instant, il s’agit le plus souvent de décliner des
œuvres créées ou produites pour la salle ou la
télévision, plus rarement de développer des projets
intégrant dès l’amont les possibilités offertes par ces
plates-formes. Je crois essentiel pour l’ensemble de la
profession que ce mouvement s’accentue et que les
passerelles entre le cinéma, l’audiovisuel, l’internet et le
mobile – sans oublier le jeu vidéo – se multiplient.
C’est pour vous un enjeu de création. C’est également
un enjeu économique. C’est enfin pour nous tous un défi
majeur pour la diversité culturelle ; il est fondamental
que nous réussissions dans le monde numérique ce que
nous avons réussi d’abord en salles de cinéma, puis à la
télévision, à savoir une présence forte voire dominante
des œuvres françaises et européennes.
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En élargissant à l’ensemble des distributeurs de services
de télévision la contribution au financement du compte
de soutien, la réforme votée en début d’année par le
Parlement non seulement répond à un souci de
neutralité technologique et fiscale, mais pose les
fondements d’un cercle vertueux de régulation de ces
nouveaux médias, en faveur de la diversité culturelle. Le
projet de directive « services de médias audiovisuels
sans frontières » qui devrait être adopté prochainement
par le Parlement et le Conseil européens, donne une
assise juridique et politique à cette régulation.
Les
ressources
additionnelles
que
cette
réforme
apportera progressivement au compte de soutien
permettront d’accentuer les efforts du CNC en faveur
des nouveaux formats, dans le respect des équilibres
actuels du système d’aide.
Parallèlement, le CNC sera attentif aux préoccupations
des détenteurs de droit soucieux de favoriser la diffusion
de leurs œuvres en vidéo à la demande, ainsi qu’aux
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contraintes des opérateurs de VOD porteurs d’une
exigence éditoriale forte.
Le CNC recueillera l’avis de l’ensemble des acteurs
concernés par ces évolutions dans les mois qui
viennent.
A titre d’expérimentation, et pour nourrir ces échanges,
le Centre envisage également de lancer un premier
appel
à
projets,
pour
soutenir
l’écriture
et
le
développement d’œuvres conçues dès l’amont pour une
diffusion sur plusieurs plates formes. Les modalités de
cet appel à projets seront précisées avec vous dans les
semaines qui viennent.
Enfin, si cette révolution numérique est une chance pour
la démocratisation culturelle, elle est aussi, et pour
l’instant surtout, une porte grande ouverte au piratage.
Le Président de la République nous a assuré de son
soutien vigilant, en précisant que « chacun doit prendre
sa part dans la lutte pour la protection des droits ». Nous
nous en réjouissons.
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Conclusion
Je conclurai sur un sujet qui me tient à cœur : le
développement des cinémas du monde. Cannes est un
lieu formidable pour découvrir ces cinématographies.
Elles sont programmées dans toutes les sélections :
c’est l’une des grandes qualités de ce rendez-vous
cannois. Cette ouverture sur le monde, nous en avons
besoin. Le CNC développe depuis longtemps une
politique de coopération qui a porté ses fruits. Je suis
très heureuse de retrouver ici les films européens,
africains,
asiatiques,
sud-américains
qui
ont
été
soutenus par le Centre. Leur découverte permet de
prendre conscience non seulement de la pluralité du
cinéma, des regards sur le cinéma, mais aussi de la
diversité du monde dans lequel nous vivons. Ces films
sont essentiels à la vigueur de notre vie culturelle.
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En France, nous considérons le cinéma comme un art
au même titre que la peinture ou la musique. C’est ici
qu’est née la Nouvelle vague, le cinéma d’auteur, l’art et
essai. Ils sont des signaux très forts à destination des
pays qui ont eux aussi ce désir de cinéma, d’un cinéma
qui se développe en dehors des sentiers battus de
l’industrie du divertissement. Le Festival de Cannes, la
plus grande manifestation cinématographique mondiale,
s’est donc tout naturellement développé ici, en France,
le pays du cinéma. Son immense prestige rappelle
chaque année au monde entier qu’il est un pays qui
soutiendra toujours les artistes : c’est la France. Je
voudrais donc adresser en conclusion mes plus vives
félicitations à Gilles Jacob, à Catherine Démier et à
Thierry Frémaux pour la qualité du Festival qu’ils
organisent et les remercier de nous faire partager cette
aventure si passionnante.
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