Summer 2016.indd - Canadian Oncology Nursing Journal

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FEATURES/Rubriques
CHRONIQUE SUR LE LEADERSHIP
Erreurs de médication et virage
vers une culture de grande
fiabilité et de sécurité des patients
par Janice Chobanuk
L
es erreurs de médication concernant les antinéoplasiques peuvent
être désastreuses pour les patients
en raison de la grande toxicité de ces
médicaments et des limites de leur
index thérapeutique. Les patients cancéreux ont souvent besoin de nombreuses thérapies complexes (et
souvent toxiques), et leur traitement
nécessite donc une coordination attentive des soins. À l’issue d’une étude de
6 607 ordonnances d’antinéoplasiques,
les chercheurs ont constaté un taux
d’erreur de 5,2 % (449). Il s’agissait surtout d’erreurs de prescription (91 %),
suivies
d’erreurs
pharmaceutiques (8 %) et d’administration (1 %).
D’après les chercheurs, environ 13,4 %
de ces erreurs auraient causé du tort
au patient, 2,6 % auraient entraîné
un dommage permanent et 2,6 %
auraient eu des conséquences sur le
pronostic du patient cancéreux. Au
chapitre de la chimiothérapie, Gandhi
et collègues (2005) ont observé un
taux d’erreur de 3 % sur 3 200 ordonnances de chimiothérapie pour adultes
ou enfants. Dans une étude dont les
sujets étaient des enfants ou des adultes atteints du cancer, les auteurs ont
constaté un taux d’erreurs liées à la chimiothérapie allant de 0,3 à 5,8 erreurs
pour 100 consultations (Walsh et al.,
2009).
Au sujet de l’auteure
Janice Chobanuk, B.Sc.inf., M.Sc.
inf., ICSP(C), CSIO(C), Directrice,
Ambulatory Care and Systemic
Therapy, Community Oncology,
Alberta Health Services,
CancerControl Alberta
Edmonton, Alberta
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Bon nombre de directeurs des soins
infirmiers de services d’oncologie reconnaissent l’importance de traiter la chimiothérapie comme une activité à
haut risque et militent pour un virage
vers une culture de grande fiabilité et
de sécurité des patients, souhaitant
ainsi améliorer la sécurité des patients
dans les services d’oncologie (Ranchon
et al., 2012). Ce changement de paradigme doit être soutenu par un leadership fort, s’appuyer sur des principes de
fiabilité élevée, privilégier les soins axés
sur le patient et miser sur des projets
d’amélioration constante de la qualité.
Les directeurs doivent donc se pencher
de manière stratégique sur des enjeux
comme les faiblesses inhérentes aux
façons de faire des services de cancérologie, la conception clinique des édifices,
l’effet des programmes informatiques,
la dotation en personnel, l’appareillage et d’autres facteurs qui influent
sur les conditions de travail dans ce
milieu. Pour mettre l’accent sur la sécurité, les chefs de file en oncologie devront faire plus que simplement réagir
aux signalements d’erreurs; ils devront
examiner chaque erreur et les comportements individuels l’ayant causée afin
d’aboutir à une démarche préventive
et proactive à l’échelle du système. Les
directeurs d’établissements de soins de
santé commencent un peu partout à
tenir compte de l’expertise et des leçons
des secteurs à risque élevé qui maintiennent un faible taux d’échec comme
l’aviation ou les centrales nucléaires,
dans leur stratégie en matière de sécurité (Ranchon et al., 2012). Ces milieux
ont en effet mis au point une gamme
d’outils pour évaluer les facteurs organisationnels qui ont le potentiel de mener
à une erreur ou à un échec. Ces outils s’appliquent à des enjeux comme la
supervision, la planification, la communication, la formation et l’entretien. Les
chefs de file peuvent ainsi adopter une
culture plus proactive en matière de
sécurité des patients et suivre en permanence les tendances en matière de la
sécurité dans leur organisation au lieu
de se contenter d’analyser après coup
les événements problématiques.
La prise en charge de la chimiothérapie est une procédure difficile et dangereuse qui doit être considérée comme
une activité à haut risque par les directeurs des services d’oncologie. Une
erreur peut se produire à tout moment
dans le processus, que ce soit à l’étape
de prescription, de la préparation, de
la distribution ou de l’administration
des médicaments. Le nombre croissant
d’agents chimiothérapeutiques administrés par voie orale ajoute un nouveau
défi aux services d’oncologie. Shah et
collègues (2016) ont relevé, au cours
d’une période de sept mois, 22 interventions (35 %) ayant été requises pour
prévenir des erreurs potentielles concernant 63 prescriptions de médicaments
administrés par voie orale au cours
d’une période de sept mois. La plupart
de ces erreurs se rapportaient au rajustement de la posologie, à l’identification
de médicaments sujets à des interactions, ainsi qu’à d’autres suivis de la
médication.
Les directeurs des soins infirmiers
des services d’oncologie sont bien placés
pour piloter le virage de culture vers la
sécurité des patients et une plus grande
fiabilité. Ce changement fait intervenir
des tactiques reposant notamment sur
l’éducation, les comités sur la sécurité,
les protocoles et procédures de sécurité, le recours à la technologie, une
atmosphère non punitive et une aspiration à une absence totale d’erreurs
Volume 26, Issue 3, Summer 2016 • Canadian Oncology Nursing Journal
Revue canadienne de soins infirmiers en oncologie
RÉFÉRENCES
Gandhi, T.K., Bartel, S.B., Shulman, L.N.,
Verrier, D., Burdick, E., Cleary, A., …
Bates, D.W. (2005). Medication safety in
the ambulatory chemotherapy setting.
Cancer, 104, 2477–2483. doi:10.1002/
cncr.21442
Ranchon, F., Salles, G., Späth, H.,
Schwiertz, V., Vantard, N., Parat, S., …
Rioufol, C. (2011). Chemotherapeutic
errors in hospitalised cancer patients:
Attributable
damage
and
extra
costs. BMC Cancer, 111(478), 2–10.
doi:10.1186/1471-2407-11-478
de saisie électronique des ordonnances
et d’aide aux prises de décisions, et
la technologie de la pompe à injection programmée. Les chefs de file des
soins infirmiers en oncologie doivent
s’engager activement à améliorer la
sécurité pour le plus grand bien des
patients, des employés, des médecins et
des autres cliniciens du milieu.
Ranchon, L., McEachan, R.C., Giles, S.J.,
Sirriyeh, R., Watt, I.S., & Wright, J.
(2012). Development of an evidencebased framework of factors contributing
to patient safety incidents in hospital
settings: A systematic review. BMJ
Quality and Safety, 21(5), 369–380.
doi:10.1136/bmjqs-2011-000443
Shah, N.N., Casella, E., Capozzi, D.,
McGettigan, S.,
Gangadhar, T.C.,
Schuchter, L., & Myers, J.S., (2016).
Improving
the
safety
of
oral
chemotherapy at an academic medical
center. Journal of Oncology Practice, 12(1),
71–76. doi:10.1200/JOP.2015.007260
Walsh, K.E., Dodd, K.S., Seetharaman, K.,
Roblin, D.W.,
Herrinton, L.J.,
Worley, A.V., … Gurwitz, J.H. (2009).
Medication
errors
among
adults
and children with cancer in the
outpatient setting. Journal of Clinical
Oncology, 27(6), 891–896. doi:10.1200/
JCO.2008.18.6072
Canadian Oncology Nursing Journal • Volume 26, Issue 3, Summer 2016
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FEATURES/Rubriques
de médication (Ranchon, McEachan,
Giles, Sirriyeh, Watt et Wright, 2012).
Nommons également en guise d’exemple la double vérification indépendante, le codage à barres, les systèmes