l`énergie dans les usines du futur : vision de fives et solutions
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l`énergie dans les usines du futur : vision de fives et solutions
L’ÉNERGIE DANS LES USINES DU FUTUR : VISION DE FIVES ET SOLUTIONS TECHNOLOGIQUES 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR Les clients de Fives étant des industriels très exposés aux défis énergétiques et environnementaux, le Groupe a toujours eu le souci de concevoir des équipements performants sur le plan environnemental. Pour aller encore plus loin, Fives a mis en place un programme d’éco-conception appelé Engineered Sustainability®, progressivement déployé dans l’ensemble de ses divisions. Dans le domaine de l’efficacité énergétique, Fives propose des technologies inédites, aussi bien pour la construction de nouvelles usines que pour la rénovation des installations existantes, par exemple : Ǧ ʬ´´´ǩ´Ǫ ƾ Ǧ 2ƾ Ǧ Ǐ´ƾ Ǧ Ǐ´´ƾ Ǧ ð´ ǩƽ´Ǫ ´´ǩ récupération, comme par exemple les gaz de haut-fourneau) permettant de minimiser l’achat de combustibles fossiles ; Ǧ ´ǩ´ƽƽǁǪ ʬ´ énergétique ; Ǧ ´Ǐʬ´´´ʭ´Ǐǀ Les enseignements tirés du développement de ces innovations ont nourri la réflexion de Fives concernant la manière dont les usines du futur pourront – et devront – relever le défi de l’efficacité énergétique. 84 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 L’USINE DU FUTUR À QUOI RESSEMBLERONT LES USINES DU FUTUR ? Connectée, flexible, propre, intelligente, l’usine du futur devra, en outre, fabriquer des produits finis à haute performance environnementale. Ces évolutions auront un impact sur la façon dont l’énergie est utilisée dans l’industrie. L’efficacité énergétique devra être recherchée à tous les niveaux, avec le souci de viser un optimum global et de tirer parti des industries situées à proximité. Le rapprochement de l’usine avec son environnement et les progrès techniques réalisés en termes d’utilisation de combustibles renouvelables, de récupération de l’énergie des fumées chaudes ouvriront des possibilités qui ne sont pas encore exploitées aujourd’hui. Par ailleurs, la demande pour des produits finis toujours plus performants, notamment sur le plan environnemental, stimulera l’innovation sur les procédés de fabrication. L’usine ne sera plus opérée de façon stable mais sera non seulement capable de délivrer différents produits mais aussi de moduler son niveau de charge en fonction des conditions de marché, des réglementations sur les gaz à effet de serre et des industries qui l’entourent. Le stockage de l’énergie et une utilisation accrue des technologies de l’information dans les usines rendront possibles des modes opératoires innovants et agiles. Les concepteurs d’équipements industriels deviendront de véritables partenaires des exploitants, intervenant tout au long de la vie de l’usine pour adapter l’outil de production aux évolutions et contraintes extérieures. climatique en diminuant, voire en supprimant ses consommations d’énergie fossile tout en fabriquant les matériaux nécessaires au développement des énergies renouvelables et des transports propres. Persuadé que l’usine du futur sera une usine « à visage humain », plus proche de l’homme et de son environnement (à la fois urbain et social), Fives l’imagine également plus « au service » de l’homme. Les opérateurs se verront confier des tâches plus qualifiantes puisque soulagés dans leur quotidien par des technologies nouvelles. Offrant une sécurité et une formation accrue, l’usine du futur deviendra ainsi un facteur l’élévation en termes de qualité de vie et d’ascension professionnelle. D’après les conclusions des travaux de l’Observatoire Fives des usines du futur menés en 2012 et 2013, et en se basant sur son expertise interne, Fives a imaginé ainsi l’impact de ces nouvelles caractéristiques sur l’organisation de l’usine de demain : L’usine du futur sera mieux acceptée socialement si d’une part elle s’ouvre sur l’extérieur et revalorise la place de l’homme dans l’usine, et si d’autre part les services qu’elle rend (élimination des déchets ultimes d’industries environnantes, services au réseau électrique…) sont visibles et valorisés. À une échelle moins locale, l’usine du futur jouera un rôle de premier plan dans la lutte contre le changement Observatoire Fives des usines du futur | 85 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR CONSÉQUENCES SUR LA CONCEPTION DE L’USINE Connectée Ǧǩʭ³ moyens de production d’énergie et des moyens logistiques) avec les usines voisines ǦǏ des plateformes multi-industries, des Ecoparks Flexible ǦǏ s’adapter à des conditions de marché imprévisibles ǦǏ´ Propre ǦǏ environnementales de plus en plus strictes Ǧµ´ temporairement sa production pour les respecter Intelligente : Ǧ³´ découle des trois autres, qui requièrent toutes un accroissement de l’intelligence de l’outil de production Ǧ´ matières premières de récupération, dont la nature et la quantité peuvent varier dans le temps Ǧǩ´ƽ visuel, transport) Ǧ´´³ Ǧǂƽ d’électricité et/ou de chaleur aux usines voisines Ǧ´ ƽ dégrader l’efficacité énergétique (optimisation du procédé pour plusieurs points de fonctionnement): arrêts et redémarrages aisés, formation des opérateurs, automatismes avancés Ǧ´ ´ de produits différents sur une même ligne (diversification du ‘mix produit’) ǦǏ Services au réseau électrique Ǧ´ d’utilisation de sources d’énergie thermiques alternatives Ǧ´ ƽ mix produit (modes « basse consommation ») Ǧʬ´´´ ƿ équipement, blocs procédé, usine et son écosystème Ǧ Ǐ Ǧʬ d’économie d’énergie et crédits carbone ǦǏ´´Ǡ chaleur ǦÙ´´ǩǏǂ diagnostique : permettant d’adopter le meilleur mode opératoire y compris en cas de panne prévisible, permettant ainsi d’anticiper la maintenance et les pertes de production potentielles) Ǧ´ǂ robot (cobotique industrielle) Cette typologie de l’impact des évolutions de demain sur les usines ne prend toutefois pas en compte le cas des « usines autonomes », en zones isolées, qui suivent une logique contraire à celle des usines connectées. Cela concerne les industries minières et pétrolières à la recherche de nouveaux gisements dans des zones extrêmes (comme dans l’Arctique et l’offshore profond) et d’autres industries, dont les choix d’implantation ne sont pas liés à la présence d’une matière première mais qui se développent dans des pays émergents où les réseaux électriques sont défaillants 86 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 SOURCES DE REVENUS COMPLÉMENTAIRE POUR L’USINE et/ou les approvisionnements en combustibles incertains pour raisons géopolitiques. Cellesci rechercheront logiquement à maximiser leur autonomie énergétique. L’industrie française (mis à part le cas des îles) n’en fait généralement pas partie. L’USINE DU FUTUR POURQUOI OPTIMISER LES PROCÉDÉS INDUSTRIELS POUR LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE ? L’INDUSTRIE EST RESPONSABLE DE 32 % DES ÉMISSIONS MONDIALES DE CO2 Les industries servies par Fives sont parmi les plus énergivores et les plus émettrices de CO2. L’industrie est responsable, d’après les dernières statistiques du Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) datant de 2005, de 32 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, soit environ 14 milliards de tonnes équivalent CO2 (en incluant les émissions indirectes dues à l’électricité consommée par l’industrie). LE DÉVELOPPEMENT DURABLE NÉCESSITE DES MATÉRIAUX DONT LA FABRICATION EST, ELLE-MÊME, POLLUANTE Paradoxalement, la lutte contre le changement climatique requiert de nouvelles installations, technologies et énergies qui, elles, sont produites grâce à des matériaux issus de ces industries fortement émettrices de gaz à effet de serre (ciment, acier, aluminium, verre…). L’aluminium sera davantage utilisé dans les véhicules et les avions afin de les alléger et de réduire leur consommation de carburant (la demande en aluminium augmentera de plus de 22 % pour le transport d’ici à 2050, selon le scénario BLUE Map de l’Agence Internationale de l’Énergie par rapport à une évolution « business as usual ») : Le développement des énergies éoliennes et photovoltaïques fera augmenter la demande en ciment et en acier, qui subira par ailleurs une baisse dans certaines applications en raison de sa concurrence avec l’aluminium - la résultante de ces deux tendances restant néanmoins positive. Dans l’automobile, des nuances d’acier toujours plus performantes seront recherchées. Simultanément, cette augmentation de la demande en acier nécessitera, pour atteindre les objectifs de lutte contre le changement climatique, Part des industries dans les émissions mondiales de gaz à effet de serre Source World Resources Institute, données 2005 Émission de gaz à effet de serre dans le monde par secteur Coal mining 4% Chemicals 13% Other (pulp & paper, food) 27% Oil & gas 20% Glass ?% Sugar 1% Machinery Cement 3% 16% Aluminium 4% Iron & steel 12% Total ~44 Gt CO2eq par an Émissions d’origine industrielle, incluant l’électricité Forestry 12% Industry 32% Agriculture 15% Waste 3% T&D losses 2% Unallocated fuel combustion 2% Transport 15% Buildings 17% Total ~14 Gt CO2eq par an de diviser par quatre son intensité carbone. La 1 /Source : Energy technology transitions for Industry, 2009, chapitre 8. Le scénario BLUE Map correspond à une division par deux des émissions de CO2 mondiales en 2050, et à une baisse de 21 % des émissions directes de l’industrie. Observatoire Fives des usines du futur | 87 IL EST INDISPENSABLE DE DÉVELOPPER LES ÉNERGIES RENOUVELABLES ET LES TRANSPORTS DÉCARBONÉS TOUT EN RÉDUISANT L’EMPREINTE CARBONE DE LEURS MATÉRIAUX CONSTITUTIFS Dans ce contexte, il est nécessaire de développer les énergies renouvelables et les transports décarbonés tout en travaillant, en parallèle, sur l’empreinte carbone des matériaux qu’ils utilisent. Ignorer cet impératif reviendrait, en effet, à exclure 19 % des émissions mondiales (émissions de l’industrie si l’on retire la part de la consommation d’électricité) et à occulter des gisements de progrès considérables. Ces secteurs consomment de plus en plus de matériaux dont les performances sont améliorées mais dont les procédés de fabrication sont de plus en plus énergivores. L’empreinte carbone des matériaux, si elle demeure à un niveau élevé, annihilera ou affaiblira les réductions d’émissions permises par le développement des énergies renouvelables et des transports décarbonés. Ainsi, l’optimisation des procédés industriels constitue un véritable défi dont la réussite, étant donné l’ampleur des progrès à réaliser, devra passer par des innovations de rupture et des investissements importants. Elle ne pourra se satisfaire d’améliorations à la marge (tels que des audits énergétiques, intéressants pour améliorer les pratiques quotidiennes dans une installation existante, mais insuffisants pour mettre l’usine au niveau des meilleures technologies disponibles). Dès aujourd’hui, il serait possible d’appliquer les meilleures technologies disponibles à l’ensemble du parc industriel existant et d’en retirer des gains considérables en matière de réduction des émissions. 88 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 Energy use 25 20 % 20 Ej / years demande en verre à haute performance augmentera également (de +30 à +50 % d’après la même source) dans le cadre de la rénovation et de la construction de bâtiments sobres en énergie et du développement de l’énergie photovoltaïque. Quant aux matériaux de spécialité, tels que le lithium et les semi-conducteurs, ils suivront ce mouvement avec une vitesse accrue. 15 29 % 10 13 % 5 0 iron and steel cement aluminium Saving potential CO2 emissions 2500 14 % 2000 Mt Co2 / year 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR 1500 23 % 1000 12 % 500 0 iron and steel cement aluminium Saving potential Gains atteignables en adoptant les meilleures technologies disponibles dans l’industrie, périmètre Monde (Fives, d’après des chiffres de l’Agence Internationale de l’Énergie) L’USINE DU FUTUR En plus de ces innovations existantes, les autres technologies qui arriveront à maturité au cours des prochaines décennies permettront de réduire encore les 10 milliards de tonnes équivalent CO2 émises par l’industrie lors de la combustion (de fioul, de gaz naturel et de charbon) ou par la mise en œuvre de certains procédés (électrolyse de l’alumine dans la production d’aluminium, réduction des oxydes de fer en sidérurgie, décarbonatation du calcaire dans la production de ciment). et valorisation de la chaleur perdue, substitution de combustibles fossiles par des combustibles plus vertueux ou renouvelables), le captage et le stockage de CO2 ou la réduction des émissions intrinsèques lors de la production des matériaux restent nombreux. L’Agence Internationale de l’Energie a estimé que chacun de ces chantiers de progrès pourrait contribuer, dans des proportions différentes, à la réduction des émissions globales de l’industrie au cours des quatre prochaines décennies. Les progrès à accomplir dans le recyclage (déjà bien développé dans les secteurs de l’acier et de l’aluminium, mais dont l’impact CO 2 reste important car les ferrailles doivent repasser dans une grande partie du procédé), l’efficacité énergétique (combustion plus efficace, récupération Technologies de réduction des émissions de CO2 industrielles (source : Agence Internationale de l’Energie, Energy technology transitions for Industry, 2009) Observatoire Fives des usines du futur | 89 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR EN QUOI LA RÉVOLUTION ÉNERGÉTIQUE CHANGERA-T-ELLE L’USINE ? LES USINES D’AUJOURD’HUI ONT RECOURS À DES SOURCES D’ÉNERGIE DIVERSES Aujourd’hui, les industries dans lesquelles le groupe Fives est actif font appel à plusieurs types d’énergie dans leurs cycles de production. L’électricité, d’abord, est requise pour les opérations mécaniques (laminoirs en sidérurgie, broyage cru et ciment dans les cimenteries, fabrication des anodes dans le secteur aluminium, machines-outils et systèmes robotisés dans l’automobile et l’aéronautique) et pour des procédés spécifiques (électrolyse de l’aluminium). Mais l’utilisation de combustibles est encore largement répandue : pour les fonctions thermiques (chauffage, séchage, traitement thermique), les usines consomment de grandes quantités de combustibles fossiles « haut de gamme » comme le gaz naturel, mais aussi des combustibles fossiles de basse qualité comme le petcoke en cimenterie et des combustibles dits « alternatifs » ou de récupération (soit provenant du procédé-même, dont ils sont des sous-produits, dans le cas du gaz de cokerie ou du gaz de haut-fourneau dans les usines sidérurgiques, soit provenant de l’extérieur, comme les combustibles alternatifs utilisés en cimenterie, par exemple des pneus usagés, des farines animales, des ordures ménagères, de la biomasse…). LA FEUILLE DE ROUTE EUROPÉENNE POUR LA RÉDUCTION DES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE MODIFIERA EN PROFONDEUR LE PAYSAGE ÉNERGÉTIQUE La Commission Européenne s’est fixé pour objectif de réduire de 80 à 95 % ses émissions de gaz à effet de serre, dans sa Feuille de route pour l’énergie à l’horizon 2050. Pour l’atteindre, des mutations profondes du paysage énergétique européen ne manqueront pas de se produire. Les quatre prochaines décennies, nous assisterons à une nette hausse de l’énergie éolienne (notamment 90 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 l’éolien offshore, plus coûteux mais mieux accepté par le public) et photovoltaïque dans la production d’électricité globale, en Europe. Les autres énergies renouvelables (hydroélectricité et biomasse électrique) devraient se développer dans une moindre mesure, car elles présentent de plus grandes contraintes d’implantation et de disponibilité de la ressource. Le système électrique évoluera vers une plus grande décentralisation et des solutions en matière de stockage de l’électricité se diffuseront. Les capacités de production thermiques (gaz, charbon) se maintiendront à leurs niveaux actuels mais elles devraient être utilisées de manière plus flexible, ce qui en réduira les facteurs de charge. Il est probable que l’énergie nucléaire contribuera toujours, dans des proportions importantes, à la production électrique des Etats membres de l’Union Européenne où elle sera toujours acceptée, notamment si les solutions de captage et de stockage de CO2 tardent à se développer. La biomasse renouvelable devrait faire l’objet d’une utilisation accrue, tout comme les déchets et combustibles alternatifs divers. Enfin, le rôle et l’importance du gaz dépendra des décisions qui seront prises concernant l’exploitation du gaz de schiste dans les Etats membres et, sur le plus long terme, de l’évolution des coûts du captage et stockage de CO2 et de celle des facteurs de charge des centrales thermiques. LES USINES DEVIENDRONT PLUS INTELLIGENTES ET AGILES Les évolutions du mix énergétique global auront inévitablement un impact visible sur l’industrie. On assistera à la création de filières de conception d’équipements répondant aux contraintes de la transition énergétique (par exemple pour le transport et le stockage d’énergie). L’usine rendra son organisation plus flexible et développera ses capacités d’effacement en consommation électrique en ajustant ses process. Elle utilisera de L’USINE DU FUTUR plus en plus de combustibles alternatifs et de gaz, lequel figure parmi les combustibles fossiles peu émetteurs de CO2. Evidemment, l’évolution du mix énergétique (aussi bien en termes d’électricité que de combustibles) devra être prise en compte au moment de la conception des usines. Les usines rechercheront à optimiser leur efficacité énergétique ainsi que leur flexibilité énergétique (dont le but recherché, contrairement à l’efficacité énergétique, n’est pas nécessairement une diminution des consommations mais plutôt une optimisation économique). Fives a mis au point de nombreuses innovations en cette matière, qu’elles soient encore en cours de développement ou déjà commercialisées. Observatoire Fives des usines du futur | 91 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR COMMENT AMÉLIORER L’EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE des usines du futur ? Il est possible de travailler sur trois niveaux distincts au sein de l’usine afin d’en optimiser l’efficacité énergétique : OPTIMISATION DES PROCÉDÉS CONVENTIONNELS Améliorer le système conventionnel pour réaliser la fonction L’usine et son environnement Blocs procédé Équipement OPTIMISER L’EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE AU NIVEAU D’UN ÉQUIPEMENT Un équipement assure une fonction (broyage, cuisson, séchage, décapage…) au sein de l’usine. Ses besoins énergétiques sont déterminés par les lois de la physique et de la chimie. À cette consommation dite « fatale », impossible à réduire, s’ajoutent des pertes et des inefficacités sur lesquelles il est possible de travailler. Fives a déterminé trois moyens de réduire ces pertes et de rendre plus efficaces les fonctions des équipements afin d’en améliorer l’efficacité énergétique : l’optimisation des procédés conventionnels en travaillant sur la fonction principale de l’équipement, l’optimisation des procédés conventionnels en travaillant sur ses fonctions auxiliaires et l’intégration d’innovations de rupture permettant de repenser intégralement et d’optimiser le mode de réalisation de la fonction. 92 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 Travail sur la fonction principale Travail sur la fonction principale Solution Fives : (secteur ciment) L’Horomill© de Fives, qui utilise un procédé de broyage par compression, permet d’économiser de 30 et 65 % d’énergie par rapport à un broyeur à boulets (technologie conventionnelle) Solution Fives : (secteur acier) Une bonne connaissance de la physique du laminage permet de réduire la quantité d’huile utilisée, donc de moins essorer la bande d’acier et de gagner sur la consommation d’électricité (-3 % sur la consommation totale du laminoir) INTÉGRATION D’INNOVATIONS DE RUPTURE Repenser le mode de réalisation de la fonction Intégration d’innovations de rupture Solution Fives : (multi-secteurs) Substitution des moyens de chauffage conventionnels par du chauffage par induction (chauffage de pièces conductrices en électricité en les soumettant à un champ magnétique) lorsque cela est pertinent2. Exemple : solution EcoTransFlux™ pour la sidérurgie L’USINE DU FUTUR À noter que les opportunités d’améliorer l’efficacité énergétique d’un équipement sont spécifiques à chaque fonction et peuvent difficilement être généralisées. Les solutions technologiques, elles, résultent de l’expertise du fabricant de l’équipement et peuvent être mises en œuvre au moment de la construction d’une usine neuve ou d’une rénovation avec remplacement complet d’un équipement, ainsi que, parfois, lors d’une rénovation « légère » (par exemple le remplacement des brûleurs d’un four). OPTIMISER L’EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE AU NIVEAU DES BLOCS PROCÉDÉS L’optimisation énergétique équipement par équipement ne garantit pas pour autant que le procédé soit optimisé dans sa globalité. Une révision du schéma de procédé peut conduire à des modifications radicales, comme sa mutualisation (par exemple lors du traitement commun de plusieurs gaz ou effluents), voire l’élimination de fonctions. Sur un schéma de procédé figé, des optimisations sont également possibles, par exemple en réalisant une intégration énergétique grâce à l’utilisation d’un flux chaud provenant d’un bloc procédé pour assurer une fonction de chauffage dans un autre bloc procédé, en utilisant des échangeurs de chaleur efficaces ou en abaissant la température de la source froide… Ces opportunités d’optimisation peuvent être identifiées grâce à la méthode d’intégration énergétique dite « méthode du pincement ». Analyse de l’utilisation de l’énergie dans le procédé, identification des inefficacités énergétiques 1 Mutualisation / élimination d’étapes du procédé Solution Fives : (secteur acier) Le procédé ‘I-BAL’ (Induction Bright Annealing Line) développé par Fives pour la production de l’acier inox présente les avantages suivants : Ǧ suppression de la phase de décapage en amont (une étape à fort impact environnemental) Ǧ équipement très compact 2 Optimisation des échanges thermiques Solution Fives : (secteur énergie) Fives commercialise des échangeurs compacts à plaques brasées en aluminium ou en acier inox, qui permettent des échanges thermiques 5 fois plus performants qu’avec des échangeurs à tubes traditionnels. 2/ Ǧ´³Ǐʬ´´´ƿ Ǧ´´ ´Ǐ´³´´ Ǧ´Ǐ¢ Ǐ´´ ³ Ǧ´´Ǐ´ Ǐ´³ Ǧ´ ´³´´´´ǀ De plus, la substitution d’un apport énergétique fossile par l’électricité peut être avantageuse en termes d’émissions de CO2 dans les zones géographiques où le contenu carbone de l’électricité est faible. Observatoire Fives des usines du futur | 93 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR OPTIMISER L’EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE AU NIVEAU DE L’USINE ENTIÈRE ET DE SON ENVIRONNEMENT Avec une usine connectée à son écosystème, certaines opportunités d’efficacité énergétique, qui sont aujourd’hui limitées par l’isolement des usines, seront alors possibles. Il arrive par exemple que des fumées chaudes émanant des procédés industriels ne soient pas valorisées, faute de débouché pour cette chaleur, alors que cela est techniquement possible. Par exemple, la chaleur peut aussi être associée avantageusement à une solution de stockage d’électricité qui en améliorerait le rendement intrinsèque. L’usine connectée pourra également mettre à profit son fonctionnement en réseau pour substituer à ses flux entrants (achats d’énergie et de matières premières) des sous-produits industriels, réduisant ainsi ses coûts finaux, ou pour mutualiser ses moyens de production d’énergie et ses moyens logistiques et, ainsi, bénéficier d’effets d’échelle. On parlera d’« écologie industrielle », ou « d’EcoPark » pour qualifier la mise en œuvre de ces idées (mutualisation de fonctions, substitution de flux, etc.) à une échelle locale. W Il est possible d’améliorer l’efficacité énergétique d’une usine soit en entrée du procédé, soit en sortie. Les opportunités d’améliorer la gestion de l’énergie et les solutions mises en œuvre par Fives à ces deux niveaux sont résumées dans les schémas suivants. Optimisation en entrée du procédé : utilisation de sous-produits comme combustibles alternatifs Utilisation de sous-produits comme combustibles alternatifs Solution Fives (secteur acier) La flexibilité des brûleurs AdvanTek® , développés par Fives, permet aux sidérurgistes de fonctionner avec 100 % de combustible de récupération (gaz de cokerie), et de repasser facilement au gaz naturel lorsque le gaz de récupération est indisponible. Solution Fives (secteur ciment) Un four de cimenterie est un équipement critique car la flamme y est en contact direct avec le produit (le clinker). Le brûleur NOVAFLAM® de Fives Pillard permet aux cimentiers d’utiliser une grande variété de combustibles alternatifs (plastiques, déchets de bois, déchets ménagers…) tout en maintenant une qualité clinker optimale. 94 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 L’utilisation de combustibles alternatifs ne pourra néanmoins se développer qu’au prix d’efforts importants pour améliorer la flexibilité des équipements. En effet, certains combustibles présentent une forte saisonnalité (comme la bagasse, sous-produit des sucreries, ou les pneus brûlés en cimenterie). Les brûleurs commercialisés par Fives Pillard sont caractérisés par une forte flexibilité par rapport au combustible, et ce sujet fait encore l’objet de travaux de recherche et développement importants. Par ailleurs, certains déchets utilisés comme combustibles risquent de devenir totalement indisponibles pour l’industrie si des progrès techniques rendent possible une valorisation matière. Les gaz de récupération, rejetés par une autre étape du procédé ou par un autre site, sont souvent des gaz pauvres, à faible contenu énergétique et parfois pollués par des composants toxiques. L’utilisation de tels gaz, dans un four par exemple, dégrade l’efficacité énergétique de ce four en raison de la mauvaise qualité de ce combustible. Cependant elle permet bien, en général, d’améliorer l’efficacité énergétique globale de l’usine, dans la mesure où le four ne nécessite plus d’achat d’énergie et où un combustible « fatal » est valorisé. Il n’existe pas de schéma optimal unique pour l’efficacité énergétique et des études comparatives doivent donc être menées au cas par cas, en prêtant attention au périmètre choisi et aux transferts d’impact (gain d’efficacité énergétique contre émissions toxiques résultant de la combustion d’un gaz de mauvaise qualité…). Cette recherche de l’efficacité énergétique globale pose des défis techniques aux concepteurs d’usines : les équipements doivent délivrer une même qualité de produit fini, malgré l’utilisation de combustibles moins nobles, et les équipements doivent être flexibles (changement aisé de combustible, utilisation simultanée de plusieurs combustibles…) pour garantir la continuité de l’opération face à des approvisionnements en combustible incertains. L’intégration d’énergies renouvelables électriques, comme l’éolien ou le solaire, aux procédés industriels posera moins de difficultés d’interférence avec le procédé mais sera limitée par l’intermittence de la production. Un système de stockage d’électricité permettra de lisser la production, surtout s’il est mutualisé au niveau d’une plateforme industrielle. W L’USINE DU FUTUR En sortie du procédé : valorisation des pertes d’énergie et de matière VALORISATION DES PERTES ÉNERGIE ET MATIÈRE Récupération Solution Fives : (secteur aluminium) Fives Solios a développé un échangeur adapté aux spécificités du secteur aluminium (gaz chargés en fluor), qui permet de récupérer l’énergie de ces gaz peu chauds mais produits en très grands volumes Transformation (optionnel) Solution Fives : (multi-secteurs) Adaptation de technologies « sur étagère » (cycles vapeur, ORC, thermoéléments) aux contraintes du procédé Stockage (optionnel) Solution Fives : (multi-secteurs) Solution NeriaLis de stockage d’énergie électrique (voir plus bas) Utilisation dans le procédé Utilisation à l’extérieur de l’usine Les industries utilisant des procédés à haute température (notamment acier, ciment, verre et aluminium) génèrent des fumées ou de l’air chaud, dont l’énergie est valorisée autant que possible dans le procédé même. Cette énergie disponible n’est aujourd’hui pas exploitée à son maximum, faute de solutions techniques s’intégrant à l’usine sans perturber la production ou présentant un temps de retour sur investissement acceptable, et faute de débouchés à proximité pour l’énergie récupérée. LES OPPORTUNITÉS DE VALORISER L’ÉNERGIE PERDUE DANS LES INDUSTRIES DE PROCÉDÉ SONT NOMBREUSES ET SOUS-EXPLOITÉES Pour ces opportunités de valoriser l’énergie perdue au cours des procédés, encore peu exploitées au sein des usines actuelles, la première étape qui consiste à récupérer la chaleur des fumées, pose plusieurs défis techniques, en particulier celui d’utiliser des échangeurs adaptés aux fumées difficiles et celui de perturber au minimum le procédé. La chaleur récupérée pourra ensuite être utilisée directement, sous forme de fluide thermique, ou transformée en électricité. Les techniques de conversion des fumées en électricité sont, en effet, connues : plusieurs technologies, plus ou moins matures, permettent d’atteindre cet objectif, comme les cycles Eau/Vapeur (le plus utilisé dans le monde actuellement y compris pour la récupération d’énergie), les cycles organiques de Rankine (ORC), Kalina, ou les thermoéléments (une technologie encore émergente). Il est également possible de produire du froid à partir de chaleur perdue, ou de dessaler l’eau de mer… De nombreuses sociétés, start-ups ou divisions de grands groupes proposent de mettre en œuvre ces solutions de récupération d’énergie dans toutes les industries. Mais la conception de ces équipements est spécifique à chaque secteur. Elle requiert un travail important d’intégration, qui doit être effectué par un spécialiste du secteur, pour adapter ces solutions aux contraintes opératoires du procédé et pour les fondre dans les équipements en place. Le groupe Fives est spécialiste de ce travail d’intégration des solutions au procédé, ainsi que de la conception d’échangeurs spécifiques, en collaboration avec les industriels. Fives apporte, en outre, un retour d’expérience précieux sur l’ensemble des secteurs d’activité qu’il couvre. En effet, Fives a élaboré des cycles hybrides pour sa solution NeriaLis permettant de récupérer ces énergies faibles dans une unité de stockage d’énergie, à des fins de meilleure flexibilité énergétique. Observatoire Fives des usines du futur | 95 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR VALORISATION D’ÉNERGIE PERDUE DANS LES SECTEURS INDUSTRIELS DE FIVES ACIER CIMENT SOURCES Fours de réchauffage et de traitement Préchauffeur, refroidisseur de clinker VERRE ALUMINIMUM Régénérateur, four de recuit Cuves d’électrolyse, centres de traitement des gaz TEMPÉRATURE DES FUMÉES (°C) Jusqu’à 800 °C ~300 ~500 Gaz en sortie de cuve : 150-200°C Paroi de cuve : ~400°C DÉBIT (Nm3/h) 50 000 à 200 000 ~200 000 ~30-40 000 plusieurs millions de Nm3/h Les fumées contiennent de la poussière de clinker abrasive Fumées sales (particules, soufre) Le procédé ne doit jamais être arrêté (durée d’opération ~15 ans) Les gaz contiennent de l’acide fluorhydrique DÉFIS TECHNIQUES 96 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 Fortes variations de débit, température et composition L’USINE DU FUTUR COMMENT AMÉLIORER LA FLEXIBILITÉ ÉNERGÉTIQUE DES USINES DU FUTUR ? La flexibilité, n’est pas, à strictement parler, équivalente à l’« efficacité énergétique ». La flexibilité temporelle consiste à décaler dans le temps la consommation d’énergie pour des raisons économiques. Il s’agit, en général, de consommation d’électricité - les autres sources d’énergie fossiles ayant une moindre volatilité des prix et se stockant plus aisément. La flexibilité « à l’entrée », par rapport à la nature du combustible, consiste à fonctionner avec des combustibles de récupération. Dans ce cas, le principe de la flexibilité se rapproche de l’efficacité énergétique vue sur le périmètre global de l’usine. Enfin, la flexibilité « à la sortie » concerne les produits finis et consiste à rendre l’usine capable de délivrer un « mix produit » divers. RENDRE PLUS FLEXIBLE LA CONSOMMATION ÉNERGÉTIQUE DES OPÉRATIONS Plusieurs signes laissent à penser que l’ère de l’usine opérée de façon constante, délivrant la même production pendant toute sa durée de vie, touche à sa fin. Les industriels de demain opèreront leurs usines de façon de plus en plus flexible, qu’ils y soient contraints (dans le cas où l’usine a des difficultés à écouler l’ensemble de sa production et doit baisser ses coûts énergétiques pour survivre ou pâtit d’un approvisionnement en énergie défaillant ou fluctuant) ou qu’ils décident d’adopter plus de flexibilité pour tirer parti des différences de prix entre plusieurs combustibles ou des variations de prix sur les marchés de l’électricité. Certains pourront également décider d’être rémunérés pour effacer leur consommation électrique du réseau à certaines périodes. Certains secteurs, tels que la chimie, la papeterie et la sucrerie, se sont déjà engagés dans cette voie. En cimenterie, la flexibilité est développée sous la forme de l’utilisation de combustibles alternatifs, et d’effacement vis-à-vis du réseau électrique. Dans la sidérurgie, l’effacement de certains équipements est déjà pratiqué et d’autres opportunités techniquement réalistes existent. Enfin, d’autres secteurs tels que l’aluminium et le verre (qui exigent une production extrêmement constante) n’ont recours à la flexibilité qu’à la marge3, ou développent une forme de flexibilité qui n’a pas d’incidence sur le procédé lui-même, comme l’ajout d’un système de stockage d’électricité. Cette nouvelle façon de gérer les consommations énergétiques de l’usine nécessitera une collaboration plus poussée entre son exploitant et son concepteur. L’ingénierie doit, en effet, travailler sur les bases d’un cahier des charges reflétant autant que possible les conditions réelles d’exploitation : elle prendra en compte les différents combustibles possibles, le mix produit et l’évolution possible de la production dans le temps. Elle optimisera les performances du procédé pour la production nominale ainsi que pour une production réduite. La flexibilité qui se développe aujourd’hui dans certaines usines tire parti des possibilités de flexibilité de la part d’équipements qui n’ont pas été conçus dans cette optique. Concevoir dès l’origine les usines de façon flexible libèrera un potentiel d’optimisation bien plus important. Plus tard, une fois l’usine en fonctionnement, le concepteur pourra intervenir à nouveau pour adapter les équipements qu’il a fournis aux nouvelles conditions d’opération, pour former les opérateurs à l’utilisation flexible et écologique des machines ou encore pour analyser les paramètres de production enregistrés informatiquement et en proposer des optimisations. Les automatismes et, de façon générale, l’intelligence mise en place autour de l’outil de production joueront un rôle crucial dans cette progression vers une plus grande flexibilité. C’est ainsi que l’usine deviendra une « Smarter Plant ». (cf paragraphe 6) 3 / Les gains peuvent toutefois être significatifs, si l’on en croit l’exemple de Trimet, qui a rendu rentable son aluminerie de Hambourg, en effectuant des modulations d’ampérage sur ses cuves d’électrolyse. Observatoire Fives des usines du futur | 97 W DÉVELOPPER LE STOCKAGE DE L’ÉNERGIE L’enjeu du stockage de l’électricité pour les usines Les usines ont intérêt à avoir recours à trois types de stockage afin d’accroître la flexibilité de leur gestion énergétique : le stockage d’un produit intermédiaire, le stockage de l’énergie thermique et le stockage de l’électricité. Le stockage d’un produit intermédiaire permet de découpler deux parties d’un procédé, afin de moduler la production d’une partie sans toucher à l’autre. Cela permet, par exemple, de faire de l’effacement de consommation tout en maintenant la production de l’usine. Ceci se prête particulièrement aux procédés en « batch » (par opposition aux procédés continus), comme le laminage à froid de l’acier. L’investissement requis est nul ou très faible. Le stockage de l’électricité est un enjeu crucial pour limiter l’empreinte énergétique de nos outils de production. Notre besoin en solutions de stockage d’énergie s’explique largement par l’importance croissante des énergies renouvelables intermittentes dans le mix de production de l’électricité, liée aux efforts pour ralentir le réchauffement climatique et pour faire face à la raréfaction des sources d’énergies fossiles. En Europe, tous les scénarios de décarbonation montrent que l’électricité sera amenée à jouer un rôle bien plus grand qu’aujourd’hui4, et que cette électricité supplémentaire sera essentiellement produite par les énergies renouvelables, notamment intermittentes. Ce développement fera nécessairement émerger des mécanismes d’équilibrage dans lesquels les solutions de stockage auront un grand rôle à jouer. Le stockage a vocation à permettre aux énergies renouvelables fluctuantes de garantir leur niveau de production afin qu’elles puissent prendre une part importante à la satisfaction des besoins de production d’électricité. L’Europe manque encore cruellement de solutions en cette matière. Le rapport final de l’initiative « European Wind Integration Study » (EWIS) en date du 31 mars 2010 prédit ainsi qu’il sera nécessaire de réduire la production des parcs éoliens en Espagne de 2,4 GW en raison de la congestion du réseau de transport de l’électricité, en particulier l’interconnexion entre l’Espagne et la France. Une solution de stockage de masse permettrait de valoriser pleinement la production des parcs éoliens et d’éviter le recours à des moyens de production de l’électricité à base d’énergie fossile, ainsi que de coûteux (et souvent problématiques) investissements pour augmenter la capacité de transport de l’électricité. C’est pour cette raison qu’il est impératif de développer des solutions de stockage de l’électricité produite par des sources renouvelables. D’ici à 2025, le besoin de solutions de compensation pour l’intégration des énergies renouvelables fluctuantes a été estimé à 5 100 GW de capacité et à l’équivalent de 150 TW-heures de production électrique (5 % de la demande annuelle d’électricité) pour l’Union Européenne. À titre d’exemple, la capacité de stockage existante en Allemagne est de 7 GW et il est prévu qu’elle augmente à 28 GW d’ici à 2025 (à un taux de croissance annuelle de 9 %). Pour les États-Unis, ce besoin atteint 170 GW, alors que la capacité de stockage existante y est de 25 GW (10 % de croissance annuelle). Ces besoins de compensation croissants s’expliquent en grande partie par le développement du parc éolien dans ces zones. En effet, en 2010, l’Europe possède 100 GW de puissance installée d’énergie éolienne. Cette puissance continuera de croître d’ici à 2020 pour atteindre les objectifs communautaires de 20 % d’énergies renouvelables. Les États-Unis ont, quant à eux, prévu de développer 100 GW additionnels d’ici à 2030, d’après le Electric Power Research Institute (EPRI). W 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR L’exemple de NeriaLis, solution développée par Fives Historiquement, le stockage a été réalisé grâce à du stockage de masse (STEP6). Ces solutions, si elles devaient être développées sur des terrains peu propices (bord de mer, plaine), représenteraient un enjeu environnemental certain et sont fortement limitées dans leur développement par la disponibilité de sites adaptés. Alors que le besoin de solutions de stockage de masse de l’électricité pour intégrer la part 4 / La part de l’électricité dans la demande énergétique finale devrait quasiment doubler pour atteindre 36 à 39 % en 2050 (source : Commission Européenne, Feuille de route pour l’énergie à l’horizon 2050). 98 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 L’USINE DU FUTUR Dans ce sens, Fives développe NeriaLis, une solution innovante qui stocke de l’air comprimé dans des tubes d’acier de façon optimale, permettant ainsi de surpasser les contraintes environnementales d’installation sur des sites isolés ou défaillants d’un point de vue électrique. Cette solution a fait l’objet d’accords de coopération avec des énergéticiens ayant pour objectif de réaliser des études de faisabilité de projets de stockage dans des zones insulaires ou couplés à des équipements dissipant de l’énergie fatale (énergie perdue au cours d’un procédé.) La solution de stockage contribue à équilibrer la production des systèmes électriques et la consommation d’énergie en assurant la sécurité du système et la qualité de l’énergie fournie. Elle permet de réduire les congestions et le report des investissements de renforcement du réseau électrique. Fives a conçu la solution NeriaLis pour offrir une capacité de transfert temporelle d’énergie électrique importante tout en permettant un temps de réponse rapide. Il s’agit d’une solution de stockage de masse de l’électricité, qui, sur le marché de gros de l’électricité et pour l’intégration des énergies renouvelables fluctuantes, aurait une puissance installée comprise entre 20 et 100 MW avec une capacité énergétique de plusieurs heures par jour. Très réactive, la solution sera également en mesure de contribuer à certains services systèmes, en fonction de la rémunération proposée. Ici sont présentés les services pouvant être réalisés par la solution NeriaLis proposée par Fives. Pour qu’elle puisse donner lieu à un modèle économique viable, il faudra pouvoir valoriser ces services auprès de leurs différents bénéficiaires. W croissante des énergies renouvelables fluctuantes dans le mix énergétique est aujourd’hui clairement démontré, il semble crucial de faire émerger de nouvelles solutions plus polyvalentes (de plus petite taille) à impact environnemental faible et sans contraintes de sites. En se substituant largement à la génération d’électricité par des centrales thermiques de pointe, ces solutions permettront également de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les perspectives industrielles ouvertes par le stockage de l’électricité Le déploiement des solutions de stockage de l’électricité devra s’appuyer sur l’émergence de nouveaux modèles économiques permettant de 5 / source : Boston Consulting Group « Electricity Storage: Making Large-Scale Adoption of Wind and Solar Energies a Reality » - mars 2010 6 / STEP : Station de Transfer d’Energie par Pompage : le pompage-turbinage consiste à produire de l’électricité avec une centrale hydroélectrique ayant la particularité d’être réversible. L’énergie potentielle de l’eau est soit utilisée (turbinage), soit stockée (pompage). Observatoire Fives des usines du futur | 99 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR valoriser les services apportés par la solution de stockage. Leurs bénéfices seront importants dans les Zones Non Interconnectées (ZNI), où le transporteur, le distributeur et le producteur d’électricité peuvent être issus de la même structure et où la part des énergies renouvelables intermittentes pourra croître en utilisant mieux les unités de productions actuelles (thermiques, nucléaire) au détriment des unités de production de pointe (turbines à gaz essentiellement) utilisées quelques heures par an. Dans les territoires fragiles vis-à-vis du système électrique (tels que la Bretagne ou la région PACA en France), ces systèmes permettront de sécuriser l’approvisionnement électrique du territoire. Dans les zones de très forte et rapide pénétration des énergies renouvelables intermittentes éolienne et photovoltaïque (comme le Nord de l’Allemagne), ils constitueront une solution d’équilibrage du réseau plus rapide et plus facilement déployable que les solutions de stockage existantes ou que ne le permettrait un renforcement des infrastructures de transport de l’électricité. Ces nouveaux modèles économiques s’appuieront sur des évolutions du cadre réglementaire et du marché de l’électricité, dont certaines sont déjà en cours. Le régulateur californien a donné l’instruction aux trois principaux gestionnaires de réseau, par une décision votée en octobre 2013, de se procurer 1,3 GW de capacité de stockage d’ici à 2020. À un stade moins avancé, l’Assemblée Nationale française avait adopté, le 7 décembre 2012, un amendement à la loi de finance ouvrant la voie à la rémunération d’installations de stockage dans les Départements et Collectivités d’Outre-Mer par le mécanisme de la contribution au service public de l’électricité (CSPE). De même, la création d’un marché de capacité proposé dans le cadre du marché européen de l’électricité a été validée par la France dans un décret en date du 20 décembre 2012. En Allemagne, les moyens de stockage allemands bénéficient, depuis le German Energy Industry Act adopté fin 2011, d’une exemption de soutirage des tarifs d’accès au réseau pour une durée de 20 ans. 100 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 RENDRE L’USINE PLUS FLEXIBLE VIS-À-VIS DE SON ENVIRONNEMENT ÉNERGÉTIQUE GRÂCE À LA MODULATION, L’EFFACEMENT ET LES SMART GRIDS Les procédés industriels présentent de nombreuses opportunités d’optimiser leur flexibilité énergétique. L’effacement industriel est particulièrement intéressant dans les zones géographiques confrontées au problème de la pointe électrique. Etant donné son faible coût et ses émissions de gaz à effet de serre nulles, cette opportunité devrait être envisagée en priorité, avant même la construction de moyens de production électrique de pointe (souvent à fort contenu en CO2) et le développement d’énergies renouvelables couplées à des capacités de stockage (coûteuses). Le gisement est cependant difficile à évaluer, car les possibilités techniques varient selon le secteur. De plus, les installations existantes n’ont pas été conçues dans cette optique et les exploitants montrent souvent une certaine frilosité à perturber le fonctionnement de leur outil industriel. Fives a effectué une évaluation qualitative de ces opportunités dans les secteurs acier, ciment, aluminium, sucre et verre et inscrit de plus en plus systématiquement la flexibilité dans le cahier des charges de ses nouveaux produits. La flexibilité des gros consommateurs industriels changera la donne pour les gestionnaires de réseau électrique, qui pourront en tirer parti dans le cadre du développement des « smart grids ». L’usine devenue, ponctuellement ou en permanence, productrice d’énergie (électricité provenant de la récupération et de la conversion de chaleur perdue, énergie stockée en excès par un système type NeriaLis…) pourra alimenter les usines ou les villes voisines. Son action sera bénéfique au réseau électrique global car il contribuera à la stabilité de la distribution d’électricité. W L’USINE DU FUTUR Les opportunités de valoriser l’énergie perdue dans les industries de procédé sont nombreuses et sous-exploitées DESCRIPTION BAISSE DE LA PRODUCTION COÛT SUPPLÉMENTAIRE EFFACEMENT Arrêt d’un équipement, d’un bloc procédé ou de l’usine entière Non si stockage d’un produit intermédiaire Non si absence de perte de production SURDIMENSIONNEMENT Surdimensionnement d’un équipement ou d’un bloc procédé, pour être capable de produire plus en période de prix faibles de l’énergie Non Oui, coût du surdimensionnement et des stockages MODE BASSE CONSOMMATION / MODIFICATION DU MIX PRODUIT Lorsque les prix de l’énergie sont élevés, l’exploitant privilégie le produit requérant le moins de consommation d’énergie Pas nécessairement Non UTILISATION D’ÉNERGIE DE RÉCUPÉRATION Utilisation de combustible alternatif ou d’énergie récupérée lorsque le prix de l’énergie est élevé Non, si la conception de l’usine permet ce changement sans arrêt Surcoût éventuel de l’adaptation aux combustibles alternatifs ou du système de récupération d’énergie STOCKAGE D’UN PRODUIT INTERMÉDIAIRE Découplage de deux parties du procédé en stockant un produit Non Oui si surdimensionnement du stockage par rapport au cas de base STOCKAGE D’ÉNERGIE Utilisation d’un stockage sur le site ou à proximité, sans incidence sur le procédé Non Coût du stockage Observatoire Fives des usines du futur | 101 2014 L’OBSERVATOIRE FIVES DES USINES DU FUTUR COMMENT RENDRE L’USINE PLUS INTELLIGENTE ? : le programme « Smarter Plant » de Fives 102 | Cahier N°2Ǧ Édition 2014 W temps réel d’indicateurs environnementaux, alertes en cas de dépassement de seuils, etc). Enfin, l’usine est connectée de près à son environnement et pleinement intégrée aux réseaux électriques (réseau national ou micro-grids). Fives a ainsi développé des solutions spécifiques à chaque secteur industriel qui permettent d’optimiser la gestion de ses besoins et de sa consommation d’énergie. Exemple 1 : Solution Digit@l Furnace AdvanTek® développée par Fives pour le secteur de l’acier Le Digit@l Furnace AdvanTek® est un four de réchauffage de produits semi-finis pour la sidérurgie, équipé d’un système de contrôle innovant (le Digit@l Furnace Control System) qui pilote l’allumage des brûleurs (un tel four en compte des dizaines). Ce système assure un ordonnancement intelligent au niveau de la séquence d’allumage des brûleurs, ce qui permet de stabiliser la pression du four et de minimiser ainsi les entrées d’air pour réduire les émissions de NOx, soumises à des normes de plus en plus drastiques. Grâce à ce système, les émissions de NOx du four sont réduites de 10 % par rapport à la concurrence. W L’usine du futur sera plus connectée, plus flexible et plus propre. Pour cela, elle devra aussi devenir plus intelligente – une intelligence aussi bien artificielle qu’humaine indispensable pour améliorer les capacités opérationnelles du système de l’usine, améliorer la sécurité et l’efficacité des interventions humaines ainsi que la robustesse et la fiabilité des opérations réalisées dans un contexte environnemental dynamique et incertain. Plus complexe à opérer, l’usine du futur bénéficiera des apports des nouvelles technologies de l’information ainsi que de la revalorisation du rôle de l’homme dans l’usine. Elle intègrera ainsi des machines intelligentes et un contrôle de procédés intelligent. Une nouvelle coopération entre l’homme et le robot (la « cobotique » industrielle) verra le jour : les robots démultiplieront la force de l’opérateur humain et le déchargeront des tâches pénibles, mais resteront dépendants de l’intention, du geste ou du comportement de l’utilisateur. Fives a créé un programme, baptisé « Smarter Plant », pour travailler sur le contrôle de procédés intelligents dans l’ensemble des secteurs industriels dans lesquels le groupe est actif. L’un des axes majeurs de ce programme est le « Manufacturing Intelligence », qui consiste à collecter, analyser, propager et visualiser les informations issues des procédés complexes par des logiciels de surveillance des équipements. Ces innovations permettent d’ores et déjà de réaliser des progrès important en termes de gestion de l’énergie dans l’usine, puisqu’un pilotage fin de l’installation permet de le régler au plus près des besoins et, donc, d’optimiser ses consommations énergétiques. Il en va de même pour la flexibilité énergétique de l’usine, pilotée lorsque l’exploitant a recours à la modulation ou l’effacement de consommation, lorsqu’il programme des modes d’opération automatiques (par exemple le mode « basse consommation ») et lorsqu’il recueille et analyse les paramètres de production (affichage en Exemple 2 : Solution CAMEIO développée par Fives pour le secteur du sucre Fort d’une connaissance bicentenaire des procédés sucriers, Fives a développé CAMEIO, un logiciel de pilotage et d’optimisation du mix-produit des sucreries (sucre, éthanol, mais aussi électricité produite par cogénération). Cet outil permet non seulement de maximiser le rendement de ces usines mais aussi, grâce à sa capacité à estimer et anticiper le rendement énergétique du procédé et, donc, la production électrique de l’usine, de mieux intégrer l’usine sur le réseau de distribution de l’électricité.