LA SOCIETE COLINA SA devenue COLINA COTE D`IVOIRE puis

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LA SOCIETE COLINA SA devenue COLINA COTE D`IVOIRE puis
DGSB/BIG
REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE
-------------------TRIBUNAL DE COMMERCE
D’ABIDJAN
-------------------RG numéro 3396/2015
__________
JUGEMENT CONTRADICTOIRE
DU 1er DECEMBRE 2015
-----------------Affaire :
LA SOCIETE COLINA SA devenue
COLINA COTE D’IVOIRE puis SAHAM
ASSURANCE COTE D’IVOIRE
(SCPA PARIS - VILLAGE)
Contre
LA COMPAGNIE AIR FRANCE
(Me MOHAMED LAMINE FAYE)
Décision :
4ème CHAMBRE
AUDIENCE PUBLIQUE DU MARDI 1er DECEMBRE 2015
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience publique
ordinaire du Mardi Premier Décembre de l’An Deux Mille
Quinze, tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient :
Monsieur DJEDJET-GOLLY Séraphin Bogard, Vice-Président
du Tribunal, Président ;
Messieurs DOSSO IBRAHIMA, AKPATOU KOUAME SERGE
et Madame TANON épouse ASSEMIAN Aimée, Assesseurs ;
Avec l’assistance de Maître IRIE Bi Goué Boguinard,
Greffier ;
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause
entre :
Statuant
publiquement,
contradictoirement, en premier et
dernier ressort ;
Déclare l’action de la société COLINA
SA devenue COLINA COTE D’IVOIRE
puis SAHAM ASSURANCE COTE
D’IVOIRE irrecevable pour défaut de
qualité à agir en ce qui concerne la
part d’assurance réglée par la société
LMAI devenue SUNU ASSURANCE
IARD-COTE D’IVOIRE ;
La société COLINA SA devenue COLINA COTE D’IVOIRE
SA puis devenue SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE
SA, au capital de 3.000.000.000 F CFA, inscrite au RCCM
sous le n° 41598 dont le siège social est à AbidjanPlateau, 3 Boulevard Roume, 01 BP 3832 Abidjan 01, tél
20 25 36 00 ;
Demanderesse, ayant conclu par le biais de son conseil, la
SCPA « PARIS-VILLAGE » ;
Déclare recevable son action pour
son propre compte ;
D’une part ;
Constate la non conciliation des
parties ;
Dit la société SAHAM ASSURANCE
COTE D’IVOIRE partiellement fondée
en son action ;
Condamne la Compagnie AIR
FRANCE à lui payer la somme de
698.093 F CFA au titre de sa part
d’assurance ;
La déboute pour le surplus ;
Condamne
la Compagnie AIR
FRANCE aux dépens de l’instance.
Et
La compagnie AIR- FRANCE,
transporteur aérien, parti de ROISSY en Françe le 16
juillet 2013, sous LTA N° 057-8408 2283, SA sise 45 rue de
Paris, Roissy 95 747 (VALDOISE France) prise en sa
représentation régionale à Abidjan, ayant ses bureaux à
Abidjan-Plateau, Avenue Noguès, Immeuble Kharrat 1er
étage,01 BP 1527 Abidjan 01 ;
Défenderesse, ayant conclu par le biais de son Conseil
Maître MOHAMED LAMINE FAYE;
D’autre part
Enrôlé le Lundi 14 septembre 2015, pour l’audience du
Mardi 13 octobre 2015, le dossier de la procédure RG numéro
3396/2015 a été appelé et renvoyé au Mardi 03 Novembre 2015
pour la tentative de conciliation ;
A cette date, le Tribunal après avoir constaté la nonconciliation des parties, a ordonné une instruction confiée au
Juge FALLE TCHEYA ; la mise en état achevée selon
l’ordonnance de clôture numéro 1321/2015 en date du
Vendredi 20 Novembre 2015, l’affaire est revenue à l’Audience
Publique du Mardi 24 Novembre 2015 ; la cause en état de
recevoir jugement a alors été mise en délibéré pour le Mardi
1er Décembre 2015 ;
Advenue ladite audience, le Tribunal a vidé le délibéré en
rendant la décision dont la teneur suit :
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Ouï les parties en leurs prétentions et moyens ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit en date du 15 juillet 2015, de Maître ADJO
Pierre, Huissier de justice à Abidjan, la société COLINA SA
devenue COLINA COTE D’IVOIRE puis SAHAM ASSURANCE
COTE D’IVOIRE a assigné la Compagnie AIR FRANCE à
comparaître le 13 octobre 2015, devant le Tribunal de
Commerce d’Abidjan en paiement de la somme de neuf
millions vingt-cinq mille neuf cent cinquante-cinq (9.025.955)
francs CFA ;
Au soutien de son action, la société SAHAM ASSURANCE COTE
D’IVOIRE expose qu’elle a coassuré, avec la société LMAI
devenue SUNU ASSURANCE, des matériels de communication
achetés à Paris par la société COTE D’IVOIRE TELECOM ; Que
lesdits matériels ont été embarqués, le 16 juillet 2013, sur un
vol de la Compagnie AIR FRANCE à destination d’Abidjan,
sans la moindre réserve de la part de celle-ci ; Que cependant,
à l’arrivée du vol à Abidjan, la Compagnie AIR FRANCE n’a pas
livré le colis de la société COTE D’IVOIRE TELECOM ; Qu’un
certificat de non livraison mentionnant que le colis a été égaré
en cours de transport a été délivré à cette société ; Que le
préjudice financier résultant de cette perte s’élève à la somme
de 9.025.955 F CFA, soit la valeur assurance de la
marchandise ;
La société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE soutient
ensuite que le règlement du préjudice a été effectué par les
deux coassureurs, chacune pour moitié ; Que par suite, la
société COTE D’IVOIRE TELECOM l’a subrogé, en tant
qu’assureur apériteur, dans tous ses droits, actions et recours
contre les responsables de son dommage ; Qu’ainsi, la
Compagnie AIR FRANCE ayant manqué à son obligation de
livraison de la marchandise confiée et, sur la base de l’article
18.1 de la Convention de Montréal du 28 mai 1999 pour
l’unification de certaines règles relatives au Transport aérien
international, elle sollicite sa condamnation au paiement de la
somme de 9.025.955 F CFA, outre les frais et intérêts de droit
à compter de la demande en justice ;
La Compagnie AIR FRANCE résiste à l’action dirigée contre elle
en en soulevant l’irrecevabilité, motifs tirés de ce que la
société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE ne dispose pas
d’un mandat spécial ou d’un acte de subrogation dans les
droits et actions de la société LMAI devenue SUNU
ASSURANCE pour agir en son nom et pour son compte et
poursuivre le paiement de la totalité de la valeur d’assurance ;
Subsidiairement au fond, elle fait valoir que ses relations avec
la société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE, subrogée dans
les droits de la société COTE D’IVOIRE TELECOM, sont régies
par la convention de Montréal qui pose le principe de la
limitation de l’indemnisation due par le transporteur aérien ;
Qu’ainsi, pour le cas où le tribunal recevrait l’action de la
société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE, il ne pourrait que
la condamner au paiement de la somme de 1.705.192 F CFA
Dans ses conclusions en réplique en date du 11 novembre 2015,
la société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE, d’une part,
soutient qu’elle détient un mandat de représentation donné
par son coassureur et, d’autre part, que la Compagnie AIR
France ne peut se prévaloir des dispositions de l’article 22 de
la Convention de Montréal, en présence de la lettre de
transport aérien qui comporte les conditions du transport
aérien ;
En réplique, la Compagnie AIR FRANCE expose, dans ses
écritures datées du 18 novembre 2015, que mandat de
représentation versé au dossier par la société SAHAM
ASSURANCE COTE D’IVOIRE pour justifier de sa qualité de
représentante de la société LMAI devenue SUNU ASSURANCE
n’est pas conforme à l’article 20.3 du code de procédure civile,
commerciale et administrative sur la représentation des
personnes morales devant les juridictions ;
Par ailleurs, elle explique que le verso de la lettre de transport
aérien est intitulé “AVIS CONCERNANT LA LIMITE DE
RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR“ et qu’un DTS valant
1,16 euros, soit 655,56 F CFA, l’indemnisation légale de la
société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE ne saurait
excéder la somme de 1.203.608 F CFA.
SUR CE
La forme
Sur le caractère de la décision
La défenderesse a conclu ;
Il y a lieu de statuer contradictoirement.
Sur le ressort
Aux termes de l’article 8 alinéa 2 de la Loi n° 2014-424 du 14
Juillet 2014 portant création, organisation et fonctionnement
des Juridictions de commerce, « Les tribunaux de commerce
statuent :
[]
- en premier et dernier ressort sur les demandes dont l’intérêt
du litige n’excède pas un milliard » ;
En l’espèce, le montant de la demande en paiement est de
9.025.955 F CFA ;
Il sied, en conséquence, de statuer en premier et dernier
ressort.
Sur la recevabilité de l’action
-
Sur la recevabilité de l’action de la société SAHAM
ASSURANCE COTE D’IVOIRE pour le compte de la société
LMAI devenue SUNU ASSURANCE IARD-COTE D’IVOIRE
A la faveur de son action, la société SAHAM ASSURANCE COTE
D’IVOIRE sollicite également le paiement, à son profit, de la
part de la valeur d’assurance que la société LMAI devenue
SUNU ASSURANCE IARD-COTE D’IVOIRE a réglé à la société
COTE D’IVOIRE TELECOM ;
Cependant, le mandat de représentation donné par la société
LMAI devenue SUNU ASSURANCE IARD-COTE D’IVOIRE et
dont elle se prévaut ne peut pas l’habiliter à agir comme elle le
fait ;
En effet, en initiant l’action en seul nom, la demanderesse,
pour prétendre aux droits de la société LMAI devenue SUNU
ASSURANCE IARD-COTE D’IVOIRE, devait exciper d’un acte de
subrogation dans les droits de celle-ci ou, si cela est prévue,
de la disposition légale qui permet, dans le cas d’une
coassurance, à l’assureur apériteur d’agir ainsi ;
En dehors de ces deux circonstances, il s’impose de déclarer la
société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE irrecevable en
son action en paiement qui concerne la part d’assurance
réglée par la société LMAI devenue SUNU ASSURANCE IARDCOTE D’IVOIRE.
-
Sur la recevabilité de l’action de la société SAHAM
ASSURANCE COTE D’IVOIRE pour son propre compte
Pour justifier sa demande en paiement, la société SAHAM
ASSURANCE COTE D’IVOIRE soutient avoir été subrogée par la
société COTE D’IVOIRE TELECOM dans tous ses droits, actions
et recours contre les responsables de son dommage ;
L’article 1250 du code civil qui régit la subrogation
conventionnelle dispose que : « Lorsque le créancier recevant
son payement d’une tierce personne la subroge dans ses droits,
actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur, cette
subrogation doit être expresse et faite en même temps que le
payement… » ;
Il résulte de ce texte que les conditions posées pour la
régularité de la subrogation conventionnelle concernent son
caractère exprès et sa concomitance avec le paiement ;
En l’espèce, la société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE
verse au dossier la copie d’un chèque UBA, émis le 1er août
2014 à l’ordre de la société COTE D’IVOIRE TELECOM, d’un
montant de 4.512.978 F CFA et acte intitulé “ACTE DE
SUBROGATION “ daté du même jour et d’où il ressort que
cette société la subroge dans tous ses droits et recours contre
toutes personnes responsables de son dommage ;
Dans la mesure où le montant du chèque représente la part de
valeur d’assurance que la demanderesse devait à son assuré,
la subrogation intervenue est régulière pour ledit montant ;
Il y a donc lieu de déclarer l’action recevable sur cette base.
Le fond
Sur la demande en paiement
La société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE sollicite la
condamnation de la Compagnie AIR FRANCE au paiement de
la somme de 4.512.978 F CFA correspondant à la valeur du
préjudice qu’elle a règle à son assurée, la société COTE
D’IVOIRE TELECOM ;
La défenderesse ne conteste pas sa responsabilité dans la
perte du colis de la société COTE D’IVOIRE TELECOM ;
Elle conteste seulement le montant réclamé et invoque la
limitation de l’indemnisation due par le transporteur aérien
prévue par la Convention de Montréal du 28 mai 1999 pour
l’unification de certaines règles relatives au Transport aérien
international ;
Aux termes de l’article 22 point 3 de cette Convention, « Dans
le transport de marchandise, la responsabilité du transporteur,
en cas de destruction, de perte, d’avarie ou de retard, est
limitée à la somme de 17 droits de tirage spéciaux par
kilogramme, sauf déclaration spéciale d’intérêt à la livraison
faite par l’expéditeur au moment de la remise du colis au
transporteur et moyennant le paiement d’une somme
supplémentaire éventuelle. Dans ce cas, le transporteur sera
tenu de payer jusqu’à la somme déclarée, à moins qu’il ne
prouve qu’elle est supérieure à l’intérêt réel de l’expéditeur à la
livraison » ;
En l’espèce, la société COTE D’IVOIRE TELECOM n’a pas fait de
déclaration spéciale d’intérêt au moment de la remise de son
colis à la Compagnie AIR FRANCE ;
Il en résulte que son préjudice doit être réparé dans la limite
de 17 droits de tirage spéciaux par kilogramme, tel que prévu
par l’article 22 point 3 de cette Convention de Montréal
suscité ;
Sur cette base, l’indemnisation totale due par la défenderesse
pour la perte du colis dont s’agit est de : 17 DTS x 108 kg = 1836
DTS x 760,45 F CFA (1 DTS = 1,16 euros = 760,45) = 1.396.186 F
CFA ;
Ainsi, la société SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE qui a
assuré la marchandise pour moitié est admise à poursuivre le
paiement de la somme de : 1.396.186 F CFA / 2 = 698.093 F
CFA ;
Il y a donc lieu de dire la société SAHAM ASSURANCE COTE
D’IVOIRE partiellement fondée en son action et de condamner
la Compagnie AIR FRANCE à lui payer la somme de 698.093 F
CFA.
Sur les dépens
La Compagnie AIR FRANCE succombe à titre princiipal ;
Il y a lieu de la condamner aux dépens de l’instance.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et
dernier ressort ;
Déclare l’action de la société COLINA SA devenue COLINA
COTE D’IVOIRE puis SAHAM ASSURANCE COTE D’IVOIRE
irrecevable pour défaut de qualité à agir en ce qui concerne la
part d’assurance réglée par la société LMAI devenue SUNU
ASSURANCE IARD-COTE D’IVOIRE ;
Déclare recevable son action pour son propre compte ;
Constate la non conciliation des parties ;
Dit la société SAHAM ASSURANCE
partiellement fondée en son action ;
COTE
D’IVOIRE
Condamne la Compagnie AIR FRANCE à lui payer la somme de
698.093 F CFA au titre de sa part d’assurance ;
La déboute pour le surplus ;
Condamne
l’instance.
la Compagnie AIR FRANCE aux dépens de
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.