mon histoire du france

Transcription

mon histoire du france
présente
MON HISTOIRE DU FRANCE
‘‘ le souvenir d’une certaine image n’est que le regret d’un certain instant ’’
Marcel Proust
Jean-François Pahun
proposé par Sundeck Films
un projet de film de
22 rue du Port
56570 Locmiquélic
[email protected]
2
LANCEMENT
Le paquebot « France » a été lancé le 11 mai 1960 à Saint-Nazaire.
Il est actuellement en cours de démolition à Alang en Inde.
En Octobre 1966, j’avais 6 ans et j’embarquais à son bord :
destination New York.
Il fut le lieu de mes premiers émerveillements et je ne peux le voir
disparaître sans éprouver une immense tristesse.
Je vais partir en Inde, sur cette plage d’Alang où il termine sa vie.
Le saluer une denière fois et laisser remonter les images…
*
*
* «lancement» : «pitch» en anglais
*
*
3
ce dossier contient :
3
mon histoire du France (note d’intention)
page
page 10
construction
page 17
traitement
page 20
Sundeck Films (présentation)
page 21
cv du réalisateur
page 23
l’histoire du «France» (annexe)
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mon histoire du
« France »
Tout le monde sait que le mercredi 11 mai 1960 « France a épousé
la mer ». La formule est du Général de Gaulle dont la femme Yvonne
était la marraine du bateau. Cela se passait à Saint Nazaire, la ville
qui construit les plus beaux paquebots du monde. Tout le monde sait également que le « France » fut pendant très
longtemps, avec ses 315,66 mètres, le plus grand paquebot du
monde et pratiquement l’un des plus rapides. Certains vous diront
également que ce fut le plus beau paquebot du monde et je partage
totalement leur avis.
Tout le monde sait aussi que de 1962 à 1969, le « France » fut
ce trait d’union prestigieux entre l’Europe et les Etats-Unis. Mais
la concurrence de l’avion et, il faut bien l’avouer, une gestion
hasardeuse le conduisirent droit à la faillite seulement 12 ans après
sa mise en service.
Tout le monde sait enfin que le « France » fut rebaptisé « Norway » en
1980. Repeint en bleu, il rejoignit Miami, son nouveau port d'attache
et croisa dans les eaux caraïbes. En 2003, suite à l’explosion d’une
chaudière, le navire est remorqué en Allemagne où il ne sera pas
réparé. Il partira d’abord en Malaisie, avant de gagner l’Inde, sa
destination finale et fatale. Son démantèlement commencé en
janvier 2008, devrait se poursuivre durant plus d’une année.
Ce que tout le monde ne sait pas, c’est que j’ai embarqué à bord du
« France » le 21 octobre 1966. J’avais 6 ans…
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le «France»
moi
Sur cette photo, prise au Havre le 21 octobre 1966, j’ai 6 ans tout
comme le « France ». Je pose ici en compagnie de mon grand-père,
de mon frère Jimmy et de ma toute petite sœur Anne. Dans quelques
instants, nous allons embarquer à bord du paquebot « France » à
destination de New York. Si les autres passagers arrivent de Paris
en Rolls, en « belle américaine » ou en DS, nous, nous sommes
arrivés la veille de Locmiquélic, petite bourgade pas très connue de
Bretagne sud , à bord du grand autocar des transports Le Neillon,
normalement réservé au transport scolaire, mais pour l’occasion
entièrement réservé à notre usage.
La route était longue alors de Bretagne au Havre, mais il y avait déjà
le pont de Tancarville qui restera toujours pour moi le « père de tous
les ponts ». Lorsque je le franchis aujourd’hui, je reste émerveillé
par l’élégance de sa forme, il fut mis en service en 1959, l’année où
l’on achevait la construction du « France » à Saint Nazaire, l’année
de ma naissance...
Passé Tancarville, il y avait cette route pas du tout comme en
Bretagne avec ses falaises crayeuses surgies de nulle part et les
raffineries dont les torchères inquiétaient mon âme d’enfant.
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J’avais beau avoir 6 ans, je connaissais déjà bien le port du Havre
pour y être souvent allé rechercher mon père. Il était marin et même
capitaine au long cours. Originaire de Locmiquélic, sa jeunesse
n’avait pas été très heureuse, coincé entre une mère acharnée à
tenir son café, le « Café de la Marine », et un père gazé lors de la
première guerre mondiale. Doué pour les études, particulièrement
en Anglais, il avait opté, comme bien des jeunes bretons, pour
la navigation au commerce. C’était très certainement pour lui la
meilleure façon d’échapper à la pesanteur familiale. Juste après
la guerre, il était entré à la Compagnie Générale Transatlantique,
parce qu’il voulait faire la ligne sur l’Amérique du Nord. L’océan
Atlantique des années 50 était un océan aussi riche de bateaux
que de promesses : le curseur de l’expansion économique était
bloqué en position haute.
Parce qu’il présentait bien et qu’il parlait parfaitement l’anglais,
il embarqua jeune lieutenant à bord des paquebots « Flandre »
et « Ile de France ». C’est d’ailleurs à bord de ce paquebot qu’il
rencontra une jeune passagère. Elle avait 22 ans, elle était
parisienne et partait prendre un poste de jeune fille au pair dans
le Connecticut.
Je dois mon existence aux paquebots sur l’Atlantique et plus
particulèrement au paquebot “Ile de France”.
mon père
ma mère
Ils se sont mariés en mars 1959 et je suis né en décembre 1959.
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Ils s’aimaient passionnément. Ma maman a quitté son XVIIème
arrondissement pour venir vivre à Locmiquélic qui n’était pas
précisément un endroit de rêve au début des années 1960.
Chaque départ de mon père était un déchirement, chaque retour
une fête. Mon frère est né en 1962 et ma sœur en 1965.
La vie de marin et son cortège de séparations et de retrouvailles
pesait maintenant très lourdement sur la vie de famille , aussi mon
père fit une demande pour un poste à terre. Il était second capitaine,
lorsque la Transat lui proposa un poste à New York comme
responsable des arrivées et des départs du « France ». Mes
parents n’ont pas dû hésiter très longuement et nous avons quitté
le petit appartement de Locmiquélic pour l’Amérique.
le billet pour l’Amérique
Dans son extrême générosité, la Compagnie Générale
Transatlantique nous faisait voyager en première classe à
bord du « France ». Même la 404 familiale était dans la cale !
Rétrospectivement, j’avoue une part de responsabilité dans le
désastre financier de Compagnie Générale Transatlantique.
Cette première traversée (qui sera suivie par deux autres) marque
profondément mon existence. Je suis à l’âge des émerveillements
absolus ; absolus en ce sens qu’ils sont à la fois pleinement
recevables – à 6 ans, vous commencez à appréhender le monde
dans sa complexité- et à la fois ils ne sont troublés par aucun des
jugements de l’expérience. Rien ne vient corrompre la puissance
de ces moments de bonheur encore entouré de la présence
aimante et rassurante de mes parents.
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Le cadre de ce bonheur total, de cet éveil au monde, est un
paquebot, le « France ». Il est alors tout neuf. C’est à l’époque le
plus long paquebot du monde : plus long que la Tour Eiffel !... Il est
taillé pour l’éternité des monuments...
C’est à bord du « France » qu’un matin ma mère nous réveilla à
la hâte. Il y avait un peu de brume et le navire avançait lentement
sur une mer calme. Nous sommes passés sous un pont, beaucoup
moins beau que le pont de Tancarville, mais il paraît que c’était le
plus grand pont du monde : “the Verrazano bridge”. Et puis, peu de
temps après, ce fut Manhattan. Ma mère me montra alors la statue
de la Liberté. J’étais à New-York, j’allais y vivre deux ans et c’est le
plus beau bateau du monde qui m’y avait emmené.
l’arrivée à New York
Je fis deux autres traversées à bord du « France » en août et en
octobre 1967. Mais j’en conserve beaucoup moins de souvenirs si
ce n’est que durant celle d’octobre, l’Atlantique Nord était en furie et
je découvris les effets désastreux du mal de mer.
1968 fut l’année de tous les bouleversements. Le petit garçon que
j’étais commençait un peu à comprendre qu’il y a un monde au-delà
de son monde. Il y eut deux assassinats : celui de Bob Kennedy et
celui de Martin Luther King. Mon père roula toute une journée avec
les phares allumés afin de montrer son opposition à la guerre du
Vietnam.
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Mais je restais un petit garçon heureux, parfaitement à l’aise dans
cette Amérique de cocagne : des été chauds et des hivers de neige.
Au bout de deux ans, je finissais par perdre mes notions de français
surtout du côté de la grammaire et de l’orthographe. Nous étions en
août 68 et il fallut me renvoyer au pays un peu avant le reste de
la famille afin que je puisse faire la rentrée des classes dans une
école française.
Je pris l’avion pour la première fois de ma vie. C’était un boeing 707
d’Air France qui s’appelait « Château de Chambord ». L’hôtesse
était gentille, mais c’était moins bien que sur le « France ». Je suis
arrivé en France alors que les chars soviétiques entraient dans les
rues de Prague, Colette Besson emportait sa médaille d’or au JO
de Mexico.
Mes parents sont rentrés par le « France » en décembre, je les ai
retrouvés à Paris et nous sommes tous repartis à Locmiquélic…
J’habite encore aujourd’hui à Locmiquélic, la rue du port, celle-là
même d’où partit mon autocar de gloire, un matin, pour le Havre.
Je réalise des films documentaires et la société de production que
j’ai fondée avec mon épouse s’appelle « Sundeck Films ». Le choix
de ce nom ne doit rien au hasard...
Apprenant la nouvelle de sa fin prochaine, tous les souvenirs du
« France » sont remontés en moi. L’image de ce bateau conserve
à mes yeux une netteté incroyable et je lui suis redevable de mon
ouverture au monde. Alors, je lui dois bien un film.
Un film qui raconterait l’histoire de ce bateau d’une manière subjective
et affective. Un film qui serait un hommage autant au bateau, qu’ à
ses constructeurs et ses équipages. Un film qui inscrirait ce bateau
dans les époques qu’il traversa avec plus ou moins de bonheur.
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Joseph Conrad, qui s’y connaisait en matière de navires, a écrit :
« le navire a ses droits, comme s’il pouvait respirer et parler : et, en
vérité, il y a des navires auxquels, pour l’homme qui les comprend,
il ne manque,-comme on dit-, que la parole ». Si mon intention n’est
pas de faire parler le “France”, il me semble en revanche être en
mesure de comprendre et ainsi ne pas trahir son histoire qui est la
mienne, qui est la nôtre...
*
*
*
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CONSTRUCTION
ALANG
Le film se construit à partir de la vision initiale du « Blue Lady » (-c’est
le nom actuel du « France »-) en cours de dépeçage à Alang : je
me rends sur le chantier de démolition. Il n’est pas accessible aux
touristes, a fortiori ceux munis d’une caméra. Je ruse, je tente de
me faire passer pour un antiquaire, mais rien n’y fait. Et puis, dans
la campagne qui se trouve juste derrière le site des chantiers, je
trouve un chemin qui me conduit sur une petite butte et je me
retrouve face au bateau agonisant. Cette vision libère la parole et
l’émotion, je prends une photo. Puis, je salue le bateau avant de lui
tourner le dos.
Nous passons sur des images d’archives du bateau au temps de sa
splendeur. C’est alors que j’explique les raisons de mon attachement
à ce bateau et mon intention de lui rendre hommage en partant à
la recherche de mes souvenirs, des lieux et des personnes qui ont
jalonné son histoire de Saint-Nazaire à Alang.
SAINT NAZAIRE
Saint-Nazaire, berceau du « France ». Aux « Chantiers de
l’Atlantique » je pars à la recherche des ingénieurs et des
ouvriers qui donnèrent vie à ce bateau. Le fonds photographique
de la construction du navire est absolument fabuleux tout comme
le documentaire d’Etienne Lallier tourné en technicolor. C’est aussi
à Saint-Nazaire que je revois dans l’écomusée, les panneaux
décoratifs du salon de musique devant lesquels fut photographiée
une bien gentille « petite famille », la mienne.
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le salon de musique,
août 1967
LOCMIQUÉLIC
Cette photo du salon de musique m’entraîne à Locmiquélic, où je vis
toujours. Je raconte l’histoire de mon père, le café de ses parents
qui aujourd’hui s’appelle le « Cargo Sentimental ». Je parle de sa
carrière de marin, évoquant à l’aide d’archives amateurs cet âge
d’or de la marine de commerce française durant les années 50 et
60. J’interroge ma mère sur notre départ aux Etats-Unis et sur le
bateau qui nous y emmena. Je demande à mon frère, Jimmy, s’il
a des souvenirs de ces traversées.
LE HAVRE
La route qui mène au Havre, le pont de Tancarville, les raffineries de
Gonfreville l’Orcher : tout ce décor est resté en place. Le Havre Port
2000 n’a plus rien a voir avec le port de mon enfance. Des dockers,
un élu communiste me parlent de l’histoire d’amour entre la ville et
le “France”. L’ancienne gare maritime de la Transat, quai Johannes
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Couvert, sert aujourd’hui de boulodrome à l’association des anciens
dockers du port du Havre. Gérard Oury en fit un décor plein de vie
et de majorettes pour son film le « Cerveau ». Tourné en 68, ce film
contient la quintessence d’une époque dans laquelle le « France »,
qui est un des décors du film, s’inscrit parfaitement. Pour parler de
ce film et du “France”, je rencontre Danièle Thomson qui en fut la
co-scénariste…
Mais le Havre c’est aussi
l’abandon du navire, le quai
de l’oubli et l’affreuse chanson
le «France»
de Michel Sardou (qui ne sera
même pas fredonnée dans le
film).
Au Havre alternent donc
les images de splendeur et
de décadence d’un bateau
véritablement marié à la ville.
Forcément
les
questions
surgissent.... Comment a-t-on
pu en arriver là ?
un bidon
EN AVION SUR L’ATLANTIQUE
Une des raisons de l’abandon du “France”, c’est la concurrence
de l’avion. Je prends l’avion pour New York. Différences de
voyage, différence de taille de planète : le monde est bien plus
vaste lorsqu’on le découvre à une vitesse d’un navire de croisière.
Montage parrallèle d’images d’archives entre le transport aérien et
transport à bord du « France ». Dans l’avion, je songe à l’entretien
que j’ai eu avant de partir avec Yves Guillermou, ancien maître
d’hôtel du « France ». Je filme mon plateau repas dans l’avion.
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NEW YORK
Il fallait 5 jours pour gagner New York. Toujours les images du
« Cerveau » : Bourvil, Belmondo et David Niven arrivent à New
York : un magnifique plan d’hélicoptère qui démarre serré sur les
personnages avant de découvrir le bateau dans sa majesté.
.
le cerveau (David Niven)
le «France»
Bourvil
Jean-Paul Belmondo
Pier 88, c’est là que le bateau accostait, c’est aussi là que travaillait
mon père. À New York je retrouve mon ami le photographe Tony
Vaccaro. Dans sa longue et magnifique carrière il a photographié
pour « Life Magazine » la première étape du premier tour du monde
du « France ». Dans son petit appartement de Long Island City, nous
retrouvons les planches-contact de ce reportage qui le conduisit
de New York à Rio de Janeiro. Des images d’archive évoquent les
croisières du France, notamment “le tour du monde en 80 jours” et
la “Croisière Impériale” .
Toujours à New-York, je ne peux m’empêcher de revenir en pèlerinage
voir la maison que j’habitais avec mes parents. Je me souviens
des assassinats de Martin Luther King et de Robert Kennedy. Je
me souviens aussi que la télévision américaine montrait les images
d’une révolte à Paris. Des images de mai 68 qui me ramènent à
Paris...
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PARIS
....à Paris, je contemple la Tour Eiffel. Elle est toujours en place, elle
symbolise la France à la fois dans son expression artistique et dans
son expression technique. Le paquebot « France » était lui aussi un
symbole parfait de cette double expression, pourquoi dès lors n’a-til pas survécu ? Je cherche à rencontrer Jacques Chirac afin qu’il
m’explique la raison de certaines décisions prises autour du navire.
Comment ce bateau qui portait le nom de notre pays en est-il arrivé
à porter le nom d’un autre pays : la Norvège.
NORVÈGE Oslo, Bergen, Askim
Oslo : le musée des drakkars : c’est bien connu depuis les vikings,
les Norvégiens sont de grands marins. Cela me coûte d’en parler et
j’aurai bien aimé faire l’impasse sur la question mais je dois quand
même parler du « Norway ».
Près de Bergen, je retrouve Haakon Gangdal, il fut le dernier
commandant du navire. Il me parle des transformations du
« France » en « Norway », il me confirme le caractère exceptionnel
de ce navire qu’il a énormément aimé.
Un peu plus tard Knut Kloster, l’homme qui racheta le « France »
pour le compte de sa compagnie la Norwegian Cruise Line nous
explique les méthodes qu’il a employées pour prolonger la vie
du navire : équipage philippin, pavillon des Bahamas, clientèle
américaine . Était-ce encore le « France » ?
Je prends la voiture pour me rendre à Askim, dans la banlieue
d’Oslo, un navigateur GPS me guide. Evocation durant ce trajet
de l’explosion de la chaudière à Miami et de la fin du bateau entre
Bremerhaven, la Malaisie et finalement Alang.
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Je découvre un entrepôt d’apparence très banale. Andrew Shaw
m’accueille, c’est lui qui a racheté les derniers objets encore sur le
bateau avant sa démolition. Il se défend d’être un pilleur d’épave et
avoue même être fasciné par ce bateau. Dans son bric à brac, je ne
retrouve rien de très convaincant, le style “Norway” est décidémment
trop “la croisière s’amuse”... Et puis voilà que je retrouve un morceau
très endommagé d’un bout de panneau décoratif de la salle de jeu.
Je montre à Andrew Shaw une photographie qui représente ma
famille posant devant ce même panneau. Je rachète à Andrew un
bout de mon passé.
la photo dans la salle de jeux,
octobre 1966
LOCMIQUÉLIC
Retour à Locmiquélic, c’est là que je vis et que je travaille. Je suis en
train de dérusher mon film, les images que j’ai tournées au Havre,
à Saint-Nazaire, à Oslo , à Alang et à New-York.
À côté de mon ordinateur, il y a la fameuse petite maquette dinky
toys du paquebot France. Face à moi, il y a ce bout de panneau
endommagé de la salle de jeu du « France », celui que j’ai ramené
de Norvège.
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Est-ce que le bateau continue à vivre parce que j’en possède un
morceau ? Je ne le crois pas : le bateau ne vit plus que dans mon
souvenir, il appartient à la “grande” histoire des hommes et à la
“petite” histoire de tous ceux qui l’ont approché un jour ou l’autre.
Je fais ce film pour mélanger les histoires : celle du bateau, la
mienne, celle d’une époque. Je fais ce film pour que les choses que
j’ai aimées ne partent pas tout de suite, pour retenir un peu de ce
qu’André Breton avait si joliment appelé : « l’or du temps ».
*
*
*
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TRAITEMENT
Jusqu’à présent, j’ai toujours conçu mes films documentaires de
manière très “classique” : avant tout je raconte des histoires et je
suis un adepte convaincu de la forme au service du fond.
Les choses sont tout à fait différentes en ce qui concerne ce film
puisque je fais complètement partie de l’histoire que je raconte.
Alors que j’avais pris l’habitude de m’effacer derrière mes témoins
et mes images d’archive, cette fois je me retrouve en première
ligne avec l’ardente obligation d’adopter un traitement personnel et
subjectif. Ce sera pour moi une toute nouvelle expérience que de
me retrouver face à la caméra dans le rôle du fil conducteur.
LE RÉCIT
Le principe de récit est simple : je vais de lieux en lieux, je retrouve
des images, des souvenirs, des paysages qui me ramènent à mon
enfance, et je rencontre des gens qui me racontent non seulement
la vie de ce bateau, mais également les époques successives qu’il
traversa de la fin des « Trente Glorieuses » à la Mondialisation en
passant par 1968 et le premier choc pétrolier.
La cohérence géographique est plus importante que la cohérence
chronologique.
Le caractère intime et subjectif de cette narration, nous conduit tout
naturellement à filmer de manière intime et subjective : caméra légère
et mobile, fluidité et rapidité de montage. Le récit n’adopte aucune
rigidité. Il construit et déconstruit : tantôt je parle en voix off, tantôt
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je suis “in”. Même souplesse en ce qui concerne les interviews :
parfois hors champ, parfois dans le champ. Constamment, le film
doit surprendre et déstabiliser mais jamais il ne perd de vue son
intention première qui est de mélanger l’histoire intime à l’histoire
générale, c’est pour cela que le récit tricote sans cesse d’une
histoire à l’autre.
LE COMMENTAIRE
Le ton et la teneur du commentaire aspireront aussi à de la légèreté
et de la distanciation : il ne s’agit en aucun cas de servir un bouillon
nostalgique assaisonné au poivre du regret. L’émotion sera
forcément présente car on ne revisite pas impunément le monde de
ses souvenirs d’enfance, mais il faut que cela se fasse de manière
gracieuse et si possible aussi élégante que le sujet traité. Quand
bien même j’ai choisi en exergue une phrase de Proust, je me sens
beaucoup plus influencé par Jean-Jacques Sempé dans l’approche
de mon sujet : une gravité toute en finesse.
LES IMAGES ACTUELLES ET LES IMAGES D’ARCHIVE
Aux images actuelles tournées avec une caméra légère et très
mobile, s’opposeront les images d’archives parfaitement hiératiques
et somptueuses du paquebot. Il suffit de regarder les images
d’Etienne Lallier, de François Reichenbach et de Gérard Oury
pour se rendre compte que ce bateau a été admirablement filmé.
Nous aurons beaucoup recours au fond de l’association French
Line au Havre et c’est, depuis un certain nombre de films, une
des cararctéristiques majeure de mon travail que de choisir mes
archives avec le plus grand soin. Cette volonté de mélanger les
styles d’image correspond tout à fait au propos du film : nous vivons
une époque numérique alors que le “France” s’inscrivait dans une
époque analogique.
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LA BANDE SON
À l’exception de l’Inde, où les conditions de tournage ne nous
permettent pas d’emmener un ingénieur du son, tout le reste du
tournage se fera avec un ingénieur du son. Un montage son est
prévu en studio avant le mixage.
La musique aura enfin une importance toute particulière. Il s’agira
d’une musique originale, constante passerelle entre les différentes
époques du film. Elle sera confiée à Rafaël Ibanez qui avait déjà
collaboré avec nous sur le “Beau Combat”.
LE SUPPORT
Le film sera tourné avec une caméra canon XH GI en haute définition.
Le signal vidéo enregistré en 50i progressif sera retranscrit en
codec Apple Pro Res 422 permettant la gravure de dvd en haute
définition et la conformation sur bande beta numérique SD ainsi
que sur bande hdcam.
TOURNAGE ET MONTAGE
Le tournage aura lieu entre le mois de mai et le mois de juin. L’objectif
étant de réunir tout le matériel image pour la mi-juillet.
Dérushage et pré-montage sont prévus en septembre et le film
pourrait être PAD pour le mois de décembre.
*
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SUNDECK FILMS
C’est en juillet 2005 que Myriam Haquin et Jean-François Pahun
ont fondé « Sundeck Films ». Cette société de production audiovisuelle est basée en Bretagne avec des fenêtres qui donnent
sur la mer. Le nom même de « Sundeck » évoque le monde des
paquebots et des traversées océaniques.
En 2006 « Sundeck Films » a produit son premier
documentaire unitaire de 52 minutes intitulé le
« Beau Combat » et qui retrace les 14 années de
lutte des « petits » élus bretons face au géant Amoco
après la catastrophe provoquée par la marée noire
de l’Amoco Cadiz survenue le 18 mars 1978. Ce film
a été co-produit avec France 3 Ouest, Public Sénat
et l’Ina.
En 2007, « La Barre » est le deuxième opus de « Sundeck Films ».
Il s’agit d’un 52 minutes évoquant le drame de la Barre d’Etel du
3 octobre 1958 qui fit neuf victimes et impliqua le docteur Alain
Bombard. Co-produit avec France 3 Ouest, ce documentaire a été
tourné en haute définition (HDCAM) et diffusé pour la première fois
le 29 mars 2008.
En 2008 « Sundeck Films » prépare “Mon histoire du France” » un
documentaire consacré à une évocation intime et émotionnelle du
paquebot « France » ainsi qu’un triptyque consacré à 3 hommes
d’image : le dessinateur Jean-Jacques Sempé et les photographes
Tony Vaccaro et Ikko Narahara.
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22
Jean–François
pahun@ sundeckfilms.com
22 rue du Port
56570 Locmiquélic
06 72 70 31 48 PA H U N
Depuis 1989, auteur - réalisateur de films documentaires pour la télévision.
REALISER
Documentaires unitaires
« Chaba d’entra » in « les clefs de la ville » 52minutes Image et compagnie pour France 3 (1993)
« Rendez-vous à la Plage » in « Les Libérations de la France » 52 minutes MFP pour France 3
(1994)
« La Carte des Kerguelen » 52 minutes System TV pour France 3 Ouest (1995)
« Sylvanès l’enchantée » 26 minutes pour France 5 collection « Les Authentiques » (1997)
« Rue Roger Vercel » 52 minutes . C’est à Voir pour France 3 Ouest (2003)
« Les Liberty ships » 2 x 52 minutes pour France 3 National et Inter- Régional. (2004)
« Le Beau Combat » 52 minutes. Sundeck Films pour France 3 et Public Sénat. (2006)
« La Barre» 52 minutes. Sundeck Films pour France 3 (régional et national) (2007)
en préparation: « Mon histoire du France » 52 minutes. Sundeck Films (2008)
« Bonjour Monsieur Sempé » 52 minutes. Sundeck Films (2008)
Pour le magazine « Thalassa » de France 3
« Les Oubliés de Saint-Paul » 26 Minutes (1991)
« Lumières Australes » 26 Minutes (1990)
Pour le magazine « Littoral » de France 3 Ouest
« Tony Vaccaro, le retour du GI » 13 minutes (1994)
« Les Forteresses de mer » 26 minutes (1995)
« Les Pilotes de Charente » 13 minutes (1995)
« 5 Tableaux pour l’Ile d’Aix » 26 minutes (1995)
« La pointe des Blagueurs» 26 minutes (1996)
« Quai Malbert » 26 minutes (2002)
« La plage qui Bouge» 8 minutes (2003)
« L’ultime Congrès des Cap Horniers » 13 minutes (2003)
« Les crèches Maritimes » 13 minutes (2006)
«Les 3 vies du Patron Emile Daniel » 12 minutes (2007)
« Des vedettes Première Classe » 9 minutes (2007)
Le « Dessous des Cartes » Arte
De 1996 à 1999, membre de l’équipe des réalisateurs de l’émission de Jean-Christophe
Victor le « Dessous des Cartes » . Réalisation d’une trentaine d’émissions.
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PRODUIRE
ET
DIFFUSER
Films en Bretagne
1999 Membre fondateur et vice-président de l’Association Films en Bretagne,
association regroupant les professionnels de l’audio-visuel en Bretagne (Réalisateurs,
Producteurs et Techniciens) .
TV BREIZH
2000-2001 Directeur adjoint de TV BREIZH, à ce titre chargé :
•
de la mise en place de la grille des programmes définie par la directrice
générale.
•
de l’habillage visuel et sonore de la chaîne.
•
des relations avec les producteurs.
•
de la direction du service acquisition
SUNDECK FILMS
Juillet 2005 : fondation avec Myriam Haquin de la société de production « Sundeck
Films » dont la première production « Le Beau Combat » est lancée en août 2005.
Diffusion France 3 et Public Sénat avril et juin 2006. Deuxième production « La Barre »,
52 minutes, diffusée en mars 2008 sur France 3.
ECRIRE
1986 Ecriture en collaboration avec Pascale Breton et Thierry Bourcy d’une série de
quinze comédies de 26 minutes pour FR3 “AVEC DES FLEURS”. Diffusion Nationale
en Janvier 1989.
1987 Dans le cadre d’une co-production franco-canadienne, préadaptation des six
romans de Bernard Clavel appartenant au cycle “LE ROYAUME DU NORD”. Vamp
Production.
1989-1993
Collaboration régulière pour le magazine“GEO”. Articles sur :Les Terres
Australes Françaises - Les Nouvelles Images -Le quatre mâts Barque “Kruzenshtern”
(croisière de Odessa aux îles Canaries) - Le Canal de Nantes à Brest en VTT -La
Voiture Electrique - L’île de Gorée - Les Liberty Ships
2004 Ecriture d’un livre sur le Commandant Malbert et les journaux de mer du
remorqueur « Iroise ». Parution septembre 2004 aux Éditions Larivière. (Prix du Livre
de l’Académie de Marine 2005)
F O R M AT I O N
1978/81 Hyppokhâgne et Khâgne (Paris et Rennes)
1984 Maîtrise de Lettres Moderne (Brest) “L’Encyclopédie et la mer” (Mention très
bien)
1985 CELSA 3° cycle de Communication option Relations Publiques (Paris IV
Sorbonne)
Anglais lu et parlé couramment à la suite d’un séjour de deux ans aux Etats-Unis .
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l’histoire du France
L’histoire du « France » épouse l’histoire
de France.
Une histoire qui commence en septembre
1952 lorsque la Compagnie Générale
Transatlantique demande aux Chantiers
de l’Atlantique d’étudier la réalisation
d’un paquebot océanique tout aussi
prestigieux que le « Normandie » déjà
lancé 20 ans plus tôt dans ces mêmes
chantiers.
Les fées qui se penchent sur le berceau du « France » n’y vont
pas avec le dos de la baguette : le « France » est conçu pour être
le plus long paquebot du monde et doit être capable d’atteindre
une vitesse commerciale de 31 nœuds puisqu’au moment de son
lancement, il espère toujours rivaliser avec l’avion. Le 7 octobre
1957 c’est la pose de la première tôle sur la cale n°1 de Penhoët,
1300 ouvriers sont affectés à ce gigantesque chantier supervisé par
l’ingénieur général Alfred Lafont.
Le lancement a lieu le mercredi 11 mai 1960 en présence du Général
De Gaulle et de son épouse, Yvonne, marraine du bateau.
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Pratiquement deux années seront encore nécessaires pour achever
les finitions du navire et le 19 novembre 1961 à 14 heures, le France
appareille de Saint-Nazaire pour le Havre, son port d’attache, qu’il
touche le 23 novembre 1961. Entre la ville du Havre et son paquebot
se tisse un véritable lien passionnel.
Après une croisière inaugurale aux Canaries, la première «vraie»
traversée du « France » a lieu le 3 février 1962 à destination de
New-York qui sera atteint le 8 février. Marcel Achard et Juliette
Greco sont du voyage qui sera intégralement filmé par François
Reichenbach.
De 1962 à 1969, le « France » est ce trait d’union prestigieux entre
l’Europe et les Etats-Unis, mais dès 1965 l’exploitation commerciale
du navire se révèle être déficitaire. Selon la formule consacrée : le
« France » n’est pas taillé pour naviguer sur l’océan des réalités
économiques, mais par-delà cette formule bien commode parce
qu’elle incrimine le bateau, il faudrait peut-être aller regarder, déjà,
du côté de ses gestionnaires voire de ses promoteurs... Toujours
est-il que, seulement 7 ans après sa première traversée atlantique,
le « France » interromp sa carrière de « liner » et commence une
carrière de « croiseur » sur les traces de Napoléon et de Jules
Verne. Le « France » accomplira ainsi deux tours du monde. Mais
ces croisières ne parviennent pas à renflouer les caisses de la
« Transat » maintenant entièrement dépendante des fonds publics
sans pour autant avoir le statut d’une entreprise nationalisée.
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Parce qu’il en est le navire amiral, le « France », après avoir
été le symbole de notre orgueil national, devient le symbole du
gouffre financier de
la « Transat ». Avril
1974, Valéry Giscard
d’Estaing,
candidat
à
la
présidence,
promet
cependant
de vouloir maintenir
le navire en service.
1er juillet : le nouveau
gouvernement
de
Jacques Chirac déclare
mettre fin à la prise en charge du déficit de la Compagnie Générale
Transatlantique qui annonce dès le 8 juillet que le « France » doit
être désarmé. Les réactions sont innombrables y compris celles
des passagers qui, solidaires de l’équipage, occupent le navire à
plusieurs reprises.
La mutinerie désespérée du 11
septembre 1974, n’y changera rien
et le 9 octobre avec 540 hommes
encore à bord le « France »
s’amarre quai Joannès Couvert. Et
puis c’est le « Quai de l’oubli ».
À peine 12 ans après sa mise en
service, notre symbole national
y croupira durant plus de quatre
ans.
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Octobre 77, le marchand d’armes saoudien Akram Ojjeh, rachète
le « France » pour 80 millions de francs ( il avait coûté 404 millions
dont 314 provenaient, sous diverses formes, de fonds publics).
Deux ans plus tard le norvégien Knut Ulstein Kolster, rachète le
« France » pour 77 millions de francs. Le navire sera renommé
« Norway », il sera entièrement transformé en paquebot de loisirs
à Bremerhaven. À l’issue de ces travaux qui l’empâteront un peu
sans parvenir à briser la beauté de ses lignes, il peut accueillir mille
passagers supplémentaires servi par un équipage philippin stylé et
bon marché.
Repeint en bleu, le Norway appareille enfin le 15 avril 1980 pour
des essais en mer puis rejoint Miami, son nouveau port d’attache.
De là il croisera dans les eaux caraïbes où il connaîtra une carrière
tout à fait honorable.
Le 10 septembre 1996, le Norway qui bat désormais pavillon des
Bahamas revient, le temps d’une escale, au Havre. Le navire et la
ville ne se sont pas vus depuis 17 ans. Mais ce n’est plus vraiment
le même bateau et pas seulement à cause de la couleur des
cheminées.
Et puis survient un drame, prévisible après quarante-trois ans
d’exploitation des machines : une des 4 chaudières du paquebot
explose le 25 mai 2003 à Miami. Cette explosion fera sept victimes.
Remorqué en Allemagne, il n’y sera finalement pas réparé malgré
son bon état général et déjà les ferrailleurs ont sorti leurs carnets
de chèques.
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Le 10 août 2005 le « Norway » est remorqué de Bremerhaven au
large de Port Klang, en Malaisie où il attend d’être fixé sur son
sort. Racheté par la société de démolition indienne PriyaBlue, il
change de nom fin janvier 2006 et devient la « Blue lady ». Ultimes
rebondissements, mobilisations diverses, offres de reprises, en
France, en Europe, en Amérique et dans les riches émirats du Golfe
Persique. Des manœuvres juridiques sont également entreprises
parce que le navire contient de l’amiante et cela retarde le processus
de démolition. Mais chaque mouvement du navire le rapproche
de sa fin. En Août 2006 la « Blue Lady » s’échoue sur une plage
d’Alang et le 11 septembre 2007, la Cour Suprême indienne autorise
la démolition du navire... En janvier 2008, le démantèlement est
commencé, il devrait durer plus d’un an.
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