A Q U IT A IN E M U S IQ U E S A C T U E L L E S : p r a t iq

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3 3 0 7 7 B ORDEAU X C e d e x
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com@cesr-aquitaine
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h t t p : // c e s r - a q u i t a i n e . f r
aquitaine musiques actuelles : pratiques porteuses de valeurs sociales, économiques et d’innovations pour l’aquitaine - rapport - octobre 2010
© CESER Aquitaine 2010 - Impression : PG Edition - Design visuel : KYMZO
14 rue François de Sourdis
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Sommaire
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Avis
adopté au cours de sa séance plénière du 10 juillet 2010..................................................................5
Rapport .....................................................................................................................................13
1 - Introduction : des héritages en perspective................................................................15
1.1. La culture en chantier .........................................................................................................16
1.2. Éléments de méthode.........................................................................................................17
1.3. « Musiques actuelles » : une expression à « contretemps » ? ..............................................17
1.4. Des héritages en perspective ..............................................................................................19
2 - Des pratiques populaires et plurielles,
expressions de réalités sociales et actrices du lien social ........................................25
2.1. Des pratiques en mutation .................................................................................................26
2.1.1. Des supports d’écoute de plus en plus variés...........................................................27
2.1.2. Sorties et concerts : pratiques sociales et de socialisation.........................................36
2.2. De l’écoute à la pratique : quand le spectateur s’engage dans la pratique amateur............43
2.2.1. Dis-moi de quel instrument tu joues........................................................................43
2.2.2. Apprentissage et transmission : des voies diversifiées d’accès aux pratiques.............45
2.2.3. De l’apprentissage au projet artistique :
le rôle-clé de l’accompagnement des groupes et artistes .........................................56
3 - « Ouvrez le son », des pratiques et des projets générateurs d’activités
et d’innovations...................................................................................................................67
3.1. De la passion au métier ou la pratique à l’épreuve de la précarité ......................................70
3.1.1. Un marché de l’emploi dynamique mais atypique et instable ..................................70
3.1.2. Gestion de l’emploi et des compétences : une partition en cours d’écriture ............75
3.1.3. Auteurs, compositeurs et interprètes :
le poids des relations contractuelles sur fond de révolution numérique ...................81
3.2. Entre l’artiste et le public :
l’indispensable travail de valorisation par les activités-supports ...........................................85
3.2.1. Des producteurs et éditeurs phonographiques confrontés à la crise
de l’économie du disque .........................................................................................86
3.2.2. L’écrasante domination de la grande distribution
face aux disquaires indépendants ...........................................................................92
3.2.3. Outils et usages numériques : opportunité ou menace pour la création
et pour la diffusion des musiques actuelles ? ...........................................................97
3.2.4. Opérateurs du spectacle vivant : l’affirmation de démarches citoyennes
face à la surenchère économique...........................................................................106
3.2.5. Les musiques actuelles, terrain d’innovations
et de nouvelles pratiques artistiques .....................................................................129
4 - Des territoires lieux d’émergences et preneurs de sons
ou quelles dynamiques locales ? ...................................................................................135
4.1 Territoires, espaces de pratiques sociales, d’expressions culturelles et de lien social ..........138
4.2 Territoires, espaces de structuration des activités et de développement .............................146
4.3 Pour quels « territoires créatifs » ? ou la « mise en musiques » des territoires ....................150
4.4 Politiques publiques en région, territoires et musiques actuelles :
un autre terrain pour l’innovation......................................................................................158
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5 - Pour un plan régional d’initiatives, d’innovations
et de soutien en faveur des musiques actuelles (PRISMA) ...................................167
5.1 Répondre à la demande sociale, libérer les pratiques
et la création artistiques des Aquitains ...............................................................................171
5.2 Mieux accompagner les artistes ou groupes en renforçant les activités
et emplois supports ...........................................................................................................173
5.3 Face à la mutation numérique, renforcer les capacités d’adaptation,
d’anticipation et d’innovation du secteur...........................................................................176
5.4 Conforter la structuration en réseau des acteurs
et les démarches d’organisation collectives ........................................................................178
5.5 Poser les bases d’une nouvelle « démocratie culturelle »
ou d’un contrat citoyen par les musiques actuelles ............................................................180
5.6 Expérimenter un nouveau mode d’intervention publique ..................................................181
Conclusion .................................................................................................................................183
Annexes......................................................................................................................................185
• Paysage des musiques actuelles et de leur évolution .............................................................186
• Cartographie des musiques actuelles en Aquitaine................................................................195
Glossaire ....................................................................................................................................203
Bibliographie ............................................................................................................................206
Liens Internet ...........................................................................................................................211
Remerciements et liste des personnalités ........................................................................215
Composition de la Commission ..........................................................................................217
Déclarations ..............................................................................................................................219
3
Musiques actuelles :
Pratiques porteuses de valeurs sociales,
économiques et d’innovations
pour l’Aquitaine
Avis
Adopté en Séance plénière le 9 juillet 2010
Sur le rapport
Présenté par le rapporteur général : Christian SAUVAGE
Au nom de la Commission
« Cadre de vie et Solidarités »
Présidée par : Mme Muriel BOULMIER
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Pour un plan
régional
d’initiatives,
d’innovations
et de soutien
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Avis
En préambule, le CESR d’Aquitaine estime que l’approche des pratiques artistiques et
culturelles liées aux musiques actuelles en Aquitaine appelle un éclairage sur la désignation
même de l’objet de ces pratiques. Celles-ci recouvrent en réalité, et par défaut, l’ensemble
des musiques populaires échappant à la définition des musiques dites « savantes » (classique
et contemporaine). Elle englobe donc toutes les formes d’expressions et de créations
musicales qui, des musiques traditionnelles aux musiques amplifiées1, se sont succédé
depuis la fin du 19ème siècle au moins jusqu’à aujourd’hui. De fait, les musiques dites
actuelles sont des héritages et des héritages en devenir. Par leurs origines et leur essence
populaire, ces pratiques furent d’emblée en prise directe avec les réalités sociales et
ancrées dans les territoires.
Des pratiques largement répandues
L’écoute et la pratique musicale concernent une part de plus en plus large de la population2.
Difficile à vrai dire d’échapper au flot continu diffusé par les médias (radios en particulier).
Les supports d’écoute se sont en outre diversifiés, la diffusion des musiques actuelles
étant fortement corrélée à l’évolution des technologies (du disque vinyle, au CD audio
puis, de plus en plus, aux lecteurs ou supports numériques3). Les sorties en concert et la
participation à des festivals intéressent également une part non négligeable des Français
et des Aquitains4. Les pratiques d’écoute de ces derniers font apparaître quelques
préférences (musiques traditionnelles, rock français et indépendant, reggae, rap,
musique électronique, jazz, musique africaine…), liées à certains héritages, mais aussi à
la vitalité de la production et de certaines scènes et festivals en région.
Cette popularisation touche également la pratique musicale. Plusieurs milliers
d’Aquitains fréquentent les écoles de musiques et « rock schools », qui peinent à satisfaire à une demande accrue d’apprentissage et de répétition. On peut estimer à près de
2 000 au moins le nombre de groupes actifs de musiques actuelles en Aquitaine et à plus
de 4 000 le nombre d’auteurs-compositeurs-interprètes. L’analyse de ces pratiques fait
néanmoins apparaître des disparités sociales (liées au revenu disponible et au niveau
d’étude) et territoriales.
Elles constituent cependant un véritable phénomène social, qui traverse toutes les couches
de la société, toutes les générations5 mais encore dominé par une pratique majoritairement
masculine même si le taux de féminisation progresse.
Elles favorisent l’épanouissement des individus (ou leur individuation) et, par la dynamique
collective qu’elles entretiennent, le lien social et les échanges interculturels ainsi qu’en
attestent de nombreuses expériences conduites à l’échelle des territoires en Aquitaine.
(1) Blues, jazz, folk, rock, soul, funk,
reggae, punk, disco, électro, house, techno
et leurs multiples dérivés.
(2) 87 % des Français de 15 ans et plus
écoutent de la musique (les deux tiers
tous les jours ou presque)
et 95 % des moins de 15 ans,
près d’un cinquième de la population
jouerait au moins
d’un instrument de musique.
Des pratiques à la source d’un véritable secteur
d’activités, dynamique mais en profonde mutation
La valorisation de ces pratiques et des œuvres produites par des artistes ou des groupes
en Aquitaine mobilise tout un réseau d’acteurs, que ce soit dans le domaine de la
musique enregistrée ou encore dans celui du spectacle vivant. Cela représenterait au
minimum 500 à 600 opérateurs en région, à la fois producteurs et éditeurs phonographiques, organisateurs de spectacles, développeurs d’artistes, structures de formation
ou d’apprentissage artistique, gestionnaires de lieux de diffusion, distributeurs d’œuvres
musicales… soit un système très diversifié d’intervenants. Ce système est dominé par de
petites structures, associatives essentiellement, agissant dans le champ de l’économie
(3) Ainsi qu’en témoignent
certaines enquêtes menées
auprès des jeunes aquitains.
(4) Environ 1 250 représentations
pour au moins 510 000 spectateurs
en 2008 en Aquitaine
selon les données recueillies par le CNV,
plus de 5 000 spectacles et concerts donnés
en Aquitaine en 2009 d’après la Sacem.
(5) On constate en effet une demande
croissante émanant de jeunes retraités.
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sociale et solidaire et dans un schéma économique hybride ou « ternaire », combinant
économie marchande, économie non marchande et économie publique. En ce sens,
il offre un terrain d’expérimentations d’une économie contributive, dans laquelle la
part de l’engagement bénévole est parfois déterminante, et « coopétitive »6, comme
en témoignent les formules de mutualisation de ressources mises en œuvre. Ce profil
sectoriel souligne l’importance de l’organisation et de la structuration collectives des
opérateurs, engagées depuis quelques années (Réseau Aquitain des Musiques Actuelles,
Fédération des Éditeurs et Producteurs Phonographiques Indépendants d’Aquitaine).
L’activité de ces divers opérateurs contribue de manière essentielle à la valorisation et à
la promotion de la diversité culturelle en région. Or, ce secteur est aujourd’hui confronté
à une profonde mutation, dont la crise du disque n’est que l’une des expressions les plus
visibles7. L’un des facteurs majeurs de l’évolution du marché, dominé par quelques gros
opérateurs ou « majors », est lié au développement rapide des usages et des technologies
numériques. En deux ans à peine, le marché de la musique numérique a progressé de
83 %. Même s’il ne représente encore qu’une part limitée de l’ensemble, ce marché est
appelé à se développer car l’évolution constatée marque une transformation structurelle,
une véritable rupture, par rapport au schéma existant.
Cette rupture touche aussi bien les pratiques d’écoute, que la création musicale et
l’ensemble des activités de promotion et de diffusion des œuvres. Non encore stabilisé,
le nouveau schéma économique qui se dessine a tendance à provoquer un mouvement
de concentration et une moindre prise de risques chez les principaux opérateurs, au
détriment de la diversité artistique et de la plupart des artistes eux-mêmes. On assiste
donc à la fragilisation d’un secteur, parallèlement menacé par la réduction des budgets
publics dans un contexte de crise économique, et des emplois qui lui sont associés.
Or, ces emplois, souvent qualifiés, se caractérisent par une certaine précarité, qui ne se
limite pas à la population des artistes et musiciens. La relative fragilité des structures
employeurs explique en partie cette situation. En outre, le parcours des artistes/
musiciens est particulièrement atypique, fortement dominé par des pratiques amateurs
qui n’excluent pas, loin s’en faut, l’exigence de professionnalisme. Car ce qui domine
chez la plupart des acteurs de ce secteur, tant artistes ou musiciens que salariés des
activités-supports, c’est la passion partagée, l’engagement dans l’acte de création et sa
valorisation, l’esprit d’initiative et une grande capacité d’adaptation.
Toutefois, cette phase de rupture ouvre parallèlement, pour peu d’être accompagnée,
de nouvelles perspectives et un large champ d’innovations pour les petits opérateurs
indépendants et pour les artistes eux-mêmes : développement de l’autoproduction,
mise en place de nouveaux services favorisant l’accès aux œuvres et les relations
entre artistes ou groupes et leurs publics, recherche-développement et innovations
technologiques8…
(6) C’est-à-dire mobilisant une stratégie
de coopération
dans un environnement concurrentiel.
Des territoires « preneurs de sons »
ou l’ancrage territorial des pratiques
(7) Le marché du CD audio a ainsi chuté
de plus de moitié entre 2003 et 2009.
Cet ancrage territorial se manifeste à la fois par l’expression d’une demande sociale
(des quartiers urbains ou agglomérations jusqu’aux territoires ruraux les plus isolés) et
par l’émergence d’initiatives multiples (créations de lieux de pratiques ou de diffusion,
organisation de concerts ou manifestations) à travers tout l’espace aquitain. Si le cœur
des activités de valorisation et d’accompagnement se concentre dans les villes
(Bordeaux et son agglomération notamment), les festivals les plus importants à l’échelle
régionale ont pris corps dans certaines villes moyennes9 ou dans des territoires ruraux10.
(8) Cf. l’expérience de la société
Stantum/Jazz-Mutant avec son Lémur
ou celle de Musique Libre !
(9) Garorock à Marmande,
Nuits Atypiques à Langon.
(10) Exemples : Musicalarue à Luxey,
Reggae Sun Ska dans le Médoc, Euskal
Herria Zuzenean au Pays Basque,
le Grand Souk à Ribérac
ou Musik à Pile à Saint-Denis-de-Pile…
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Ces diverses initiatives et projets contribuent parfois de manière remarquable à l’animation
et au développement de ces territoires, au plus près des populations. Elles offrent des
modèles variés de démarches combinant promotion de la diversité artistique et culturelle,
lien social, retombées économiques, emploi et plus largement développement durable
(plusieurs manifestations et lieux étant engagés dans des actions éco-responsables).
Certaines d’entre elles donnent lieu à des expériences d’échanges ou de dialogue
interculturel associant, par les coopérations établies, d’autres villes, régions ou pays.
La concentration de ressources créatives, de compétences et le maillage des acteurs
confèrent à certains territoires un véritable potentiel de valorisation, d’attractivité et
d’image qui reste malheureusement insuffisamment pris en compte.
En dépit de ces réalités, les pratiques liées aux musiques actuelles souffrent en effet
d’un manque de reconnaissance de la part des pouvoirs publics, traduisant depuis un
demi-siècle une conception figée mais tenace de la politique culturelle, l’ayant conduit
à une marginalisation des pratiques ordinaires des citoyens ordinaires.11
L’Aquitaine, par la mobilisation ponctuelle de certains élus et collectivités (notamment
du Conseil régional d’Aquitaine), à une époque avec l’appui éclairé de l’Etat (DRAC), a
fait figure de région pilote sinon d’avant-garde en la matière : création de la première
salle labellisée de musiques actuelles12, charte de développement des SMAc, lancement
des premières concertations territoriales des musiques actuelles et mise en place d’une
démarche de co-construction de politique publique. Le CESR considère opportun de
prolonger cette dynamique de mobilisation autour des musiques actuelles.
Face au constat établi, il insiste sur plusieurs enjeux :
- L’émergence d’une création artistique entendue dans toute sa diversité et comme
un droit accessible à chaque individu, en référence à la Déclaration universelle sur
la diversité culturelle de novembre 2001 et aux conventions qui lui sont associées13.
Cet enjeu suppose une adaptation de la réponse apportée à une demande et à des
pratiques sociales et artistiques diversifiées.
- La consolidation de l’accompagnement des groupes ou artistes et des activitéssupports participant à leur valorisation.
- Le renforcement des capacités d’adaptation et d’anticipation des changements,
notamment ceux liés aux usages numériques.
- L’élargissement des réseaux et des démarches d’organisation collective.
- Enfin la gouvernance et l’adaptation des modalités d’intervention des partenaires
publics, notamment ici du Conseil régional.
En conséquence, le CESR d’Aquitaine propose l’établissement et la mise en œuvre d’un
« PLAN REGIONAL D’INITIATIVES, D’INNOVATIONS ET DE SOUTIEN EN FAVEUR DES
MUSIQUES ACTUELLES EN AQUITAINE » (PRISMA). Ce plan s’inscrit dans le prolongement
des objectifs affichés en 2006 au niveau national14. Il apporte une réponse sensible aux
attentes récemment exprimées par les acteurs de cette filière, au moment où s’achève
un cycle de concertations territoriales sur les musiques actuelles en Aquitaine. Sa vocation
est d’inciter à la mise en place d’un cadre transversal, multisectoriel et pluri-partenarial
à l’action publique au niveau régional, facilitateur d’initiatives en veillant à leur
« encastrement » social et territorial. Il s’agit de faciliter la mise en œuvre d’un processus
permettant de satisfaire tout autant à une exigence de diversité des pratiques culturelles
et à une ambition. Cette ambition est de créer des conditions favorables à l’affirmation
de l’Aquitaine comme « région créative », par intégration de la culture dans les
politiques de développement local et régional, dans l’esprit de la stratégie européenne
« UE 2020 ».
(11) Cf. rapport sur le soutien de l’État aux
musiques actuelles – Michel BERTHOD,
Anita WEBER, juin 2006.
(12) Le Florida à Agen en 1993.
(13) En particulier la Convention sur la
protection et la promotion de la diversité
des expressions culturelles d’octobre 2005.
(14) « Plan pour une politique nationale
et territoriale des musiques actuelles »,
juin 2006
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Le CESR propose de structurer ce Plan autour de 6 axes ou objectifs :
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Répondre à la demande sociale, libérer les pratiques
et la création artistiques des Aquitains
Cet axe recouvre notamment :
• Accroître l’offre en matière d’apprentissage et de répétition, sur la base d’une
approche territorialisée des besoins qui pourrait s’inscrire dans le cadre de l’élaboration
en cours des schémas d’orientation et de développement des lieux de musiques
actuelles et être pris en compte dans les politiques régionales de développement
local.
• Développer les transferts d’expériences sur les démarches pédagogiques et sur la
formation de formateurs.
• Prendre en compte les nouvelles pratiques numériques (dont musique assistée
par ordinateur, découverte de nouvelles interfaces technologiques) dans les actions
d’apprentissage.
• Étendre le dispositif « Coup d’Pouce » aux jeunes (lycéens, apprentis) issus de familles
modestes pour accéder aux services existants (apprentissage, répétition).
• Organiser un tremplin régional ouvert aux lycéens, apprentis et élèves de centres
de formation.
• Sensibiliser sur les origines et héritages des musiques actuelles (contenus pédagogiques,
animation culturelle), en lien avec les associations de jeunesse et d’éducation populaire
et le réseau des médiathèques.
Mieux accompagner les artistes et groupes en renforçant
les activités et les emplois supports
Compte-tenu du rôle-clé de ces activités, notamment en termes de stabilisation des
emplois artistiques, il est proposé de :
• Renforcer le soutien apporté à la filière de la musique enregistrée (production et
édition phonographique, plus de 70 opérateurs), combinant innovation (nouveaux
supports, nouveaux services), appui aux entreprises (aide au conseil, au recrutement, à la création d’emploi), formation des salariés, GPEC15 et démarches collectives (mutualisation, création de SCIC16).
• Les aider à la diffusion et à la commercialisation, via des réseaux de distribution
indépendants.
• Accompagner le réseau de distribution (disquaires, librairies indépendantes,
bibliothèques-médiathèques), intégrant l’information et la formation.
• Appuyer la filière du spectacle vivant, en associant les salles de musiques actuelles
ou SMAc (co-construction d’un cahier des charges, conventions pluriannuelles,
politique de diffusion, circulation des groupes, accueil de résidences ou master-classes,
coopérations entre salles, GPEC…) et les autres lieux de diffusion (lieux dédiés à
certaines esthétiques musicales, cafés-concerts dont développement en Aquitaine
du collectif Culture Bar-Bars).
Il est également préconisé dans ce cadre de décliner au niveau régional les schémas
d’orientation et développement des lieux de musiques actuelles (SOLIMA) et la mise
en place d’instances de médiation au niveau local. Un autre volet concerne ici la prise
en compte de la dynamique et des difficultés particulières des festivals. Enfin, le CESR
suggère de favoriser la captation de spectacle vivant dans le cadre des conventions
établies avec certains opérateurs audiovisuels (chaînes de TV, producteurs audiovisuels).
(15) Gestion Prévisionnelle de l’Emploi
et des Compétences.
(16) Société Coopérative d’Intérêt Collectif.
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Face à la mutation numérique, renforcer les capacités
d’adaptation, d’anticipation et d’innovation du secteur
Dans ce domaine, que le CESR considère comme stratégique pour la filière, il est proposé :
• Accompagner les opérateurs en leur permettant d’exploiter les opportunités de
valorisation multimédia des œuvres et groupes ou artistes, en mobilisant divers
dispositifs (aide au conseil, assistance technique, recours à un personnel qualifié,
formation…).
• Aider au développement commercial des entreprises / structures ayant développé
des technologies spécifiques.
• Renforcer le potentiel de recherche-développement régional, en s’appuyant sur
les équipes existantes (Labri, Scrime, ENSEIRB…).
• Développer des actions de sensibilisation et d’apprentissage sur les usages des
nouvelles technologies et nouveaux services auprès des artistes et des publics, en
lien avec certains pôles ressources (SMAc, Médias-Cité…) et entreprises.
• Promouvoir et déployer certaines technologies et services innovants dans des lieux
publics (SMAc, médiathèques).
• Mettre en place une mission de veille et d’animation sur ces questions, en lien
avec le RAMA et l’agence régionale AEC.
Conforter la structuration en réseau des acteurs et les démarches
d’organisation collectives
Cet axe répond à la diversité et à la fragilité des opérateurs composant ce système des
musiques actuelles en Aquitaine. Cela concerne :
• Accroître et élargir le Réseau Aquitain des Musiques Actuelles, dont le travail doit
être souligné, ce qui appelle un effort spécifique au niveau régional.
• Soutenir la Fédération des Éditeurs et Producteurs Phonographiques Indépendants
d’Aquitaine (FEPPIA) dans plusieurs domaines (en direction des bibliothèquesmédiathèques, le développement et l’expérimentation de solutions et services numériques mutualisés, le développement de supports audio/vidéo, la communication).
• Gérer de manière prévisionnelle l’emploi et les compétences, par le soutien au
groupement d’employeurs AGEC, l’organisation de sessions de formation, la mise à
l’étude d’un Accord régional de Développement de l’Emploi et des Compétences,
tout en soulignant l’intérêt d’approches territorialisées.
• Aider à la définition de véritables projets territoriaux autour des musiques actuelles
(dont SOLIMA, projets collectifs mobilisant les activités créatives ou innovantes,
coopérations territoriales).
Poser les bases d’une nouvelle « démocratie culturelle »
ou d’un contrat citoyen par les musiques actuelles
L’objectif de cet axe est d’approfondir la démarche des concertations territoriales, en
appliquant les principes de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle et les
droits associés, qui placent l’usager ou le citoyen au centre de la démarche de création
artistique et culturelle.
Cela porte par conséquent sur :
• Élargir les concertations territoriales sur les musiques actuelles en direction des Aquitains.
• Les déployer sur les territoires, notamment ceux couverts par des SOLIMA.
• Favoriser le transfert d’expériences à l’échelle des structures gestionnaires de lieux.
• Lancer un thème de recherche en sciences sociales sur la contribution des pratiques
et activités liées aux musiques actuelles à la citoyenneté et à l’apprentissage d’un
vivre-ensemble.
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Expérimenter un nouveau mode d’intervention publique
Ce Plan Régional d’Initiatives, d’innovations et de Soutien en faveur des Musiques
actuelles en Aquitaine n’a pas la prétention d’une politique culturelle régionale mais
d’une prise en compte, dans la politique régionale, des conditions favorables à l’exercice
de pratiques artistiques ou culturelles et à leur valorisation. Cela suppose donc une
approche nécessairement transversale tenant compte de la nature des besoins et des
opérateurs.
Cette approche amène le CESR à proposer de :
• Mobiliser par le Conseil régional d’Aquitaine son droit à l’expérimentation,
conformément aux dispositions constitutionnelles et à la loi organique du 1er août
2003.
• Développer des services de e-administration.
• Rééquilibrer, au niveau national, le système de péréquation ou de répartition
des contributions au sein de la filière et étudier au niveau régional la création d’une
fondation ou d’un fonds alimenté(e) par contribution volontaire des acteurs privés.
En conclusion, le CESR d’Aquitaine souligne la diversité, les enjeux et les potentialités des
pratiques et activités associées aux musiques actuelles en Aquitaine. Les propositions
formulées visent à offrir des pistes d’accompagnement de ce secteur, en s’appuyant
sur ses capacités d’initiative et d’innovation. Elles appellent à privilégier le dialogue et
la nécessaire mise en débat public sur un enjeu de portée plus générale : la place de
la culture dans le développement régional.
AVIS ADOPTÉ A L’UNANIMITÉ.
Le Président,
Luc PABŒUF
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Musiques actuelles :
Pratiques porteuses de valeurs sociales,
économiques et d’innovations
pour l’Aquitaine
Rapport de la Commission
« Cadre de vie et Solidarités »
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1 - Introduction
Des héritages en perspective
Pour le CESR d’Aquitaine, la prise en compte des enjeux sociaux et économiques des
pratiques liées aux musiques actuelles s’inscrit dans le prolongement d’un chantier
ouvert en 2002 sur les pratiques culturelles des Aquitains. Cette mobilisation de l’assemblée
socio-professionnelle traduit une prise de conscience et une attention particulière sur
l’intégration de la dimension culturelle dans le développement régional.
L’approche des enjeux soulevés par les musiques actuelles correspond à une nouvelle
étape de ce processus de mobilisation, dans un contexte marqué par de profonds
bouleversements. Ces derniers sont autant de facteurs d’incertitude et d’inquiétude
pour les opérateurs culturels : développement et transformation des pratiques, crise
de l’économie du disque, développement des supports et des services numériques.
Ils interrogent aussi sur la place de la culture dans l’économie des territoires ou plus
largement dans la société et dans les politiques publiques sur fond de révision générale
des politiques publiques et de réforme territoriale.
Dans ce contexte, ce nouveau rapport donne au CESR d’Aquitaine l’occasion d’une mise
en perspective de sa réflexion autour de la question culturelle à l’échelle régionale,
à partir de la problématique large des musiques actuelles.
Il offre aussi l’opportunité d’une reconnaissance d’un champ particulièrement dynamique
de la vie culturelle en région, qui appelle d’ailleurs un nécessaire effort de clarification
sur la définition et la réalité que recouvre cette expression de « musiques actuelles ».
La mise en perspective s’applique donc également à la nature même des pratiques dont
il est question dans ce rapport, sur le plan artistique ou esthétique, sur le plan social
et sur le plan économique.
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1.1 La culture en chantier
Quelle est la place de la culture dans le développement de l’Aquitaine… et dans la vie
des Aquitains ? Quelle place occupe-t-elle dans les politiques publiques de développement
conduites en région ?
Ce sont ces questions qui avaient précédé la mobilisation du Conseil Économique et
Social Régional sur « les pratiques culturelles des Aquitains ». Alors que le CESR ouvrait
ce chantier, il fut saisi par le Conseil régional d’Aquitaine successivement de deux sujets
portant sur la question culturelle.
Après avoir remis ses conclusions sur l’évaluation des impacts de la politique régionale
en faveur du cinéma et de l’audiovisuel (2004)17 et sur les langues régionales (2005)18,
un premier bilan d’étape du chantier ainsi engagé fut présenté en Bureau au terme de
la mandature 2001-2007. Ce bilan appelait l’attention sur quatre points de constat :
- un manque de connaissance sur les pratiques culturelles en région et sur leurs incidences
en termes de développement régional,
- la très grande diversité et le dynamisme perceptibles des pratiques culturelles qui, par
la valorisation des patrimoines matériels et immatériels, participent pleinement à un
développement durable de l’Aquitaine, notamment dans l’esprit des Conventions
internationales de l’UNESCO19,
- la rapide évolution de ces pratiques, induite à la fois par les changements dans les modes
de vie, par les transformations de la société – incluant le rôle croissant des médias - et par
les avancées technologiques, dont les mutations générées par les supports numériques,
- enfin, au-delà des évolutions constatées, la portée sociale de cet ensemble de pratiques
pour les territoires à l’animation desquels elles contribuent.
C’est notamment sur la base de ce constat que le Bureau de la nouvelle Assemblée élu
en 2007 a choisi de maintenir ce chantier et examiné favorablement la proposition de
travail déposée par la Commission « Cadre de vie et solidarités » sur le thème des musiques
actuelles.
L’objectif de ce travail vise à mieux cerner la réalité des pratiques liées aux musiques
actuelles en Aquitaine et d’en identifier les multiples enjeux, culturels, sociaux, économiques,
d’innovation. Sur le plan culturel, il s’agit de mesurer l’importance de ces pratiques, qui
couvrent une grande diversité d’esthétiques, dans le champ de l’expression et de la création
musicales. L’un des enjeux essentiels reste celui de cette diversité des expressions culturelles,
des conditions dans lesquelles elle s’entretient et se régénère.
La dimension sociale de ces pratiques est un autre aspect important de ce travail, aussi
bien dans leur portée individuelle que collective, dans ce qu’elles recouvrent de pratiquants,
de modes de vie, de publics que d’implication au sens large dans la vie de la cité.
Derrière cet ensemble de pratiques, ce sont autant de langages, autant de lectures et de
révélateurs de la société qui s’expriment et font sens commun, autant d’univers symboliques qui prennent corps dans un espace social très large qui traverse les générations,
les genres et les couches sociales.
Enfin, le travail présenté aborde l’univers des musiques actuelles sous l’angle de ses
réalités économiques. Il s’agit bien là d’une réalité plurielle, car cet univers se caractérise
par une multitude d’acteurs dont la plupart en région sont confrontés à la précarité de
leur situation face au poids des « industries » culturelles que représentent les « majors ».
Réalité plurielle encore, dans la mesure où coexistent une économie de marché de
masse et une économie sociale largement dépendante de soutiens publics. Réalité
plurielle enfin, car l’essor récent et très rapide des technologies et des nouveaux services
numériques bouscule le paysage et la structure même du système économique de cette
filière.
(17) Avis sur « L’évaluation des impacts
de la politique régionale de soutien
au cinéma et à l’audiovisuel »
adopté le 12 juillet 2004.
(18) Avis sur « Langues et cultures
d’Aquitaine : pour une dynamique
d’ouverture et d’intégration Parloc, Bai ! »
adopté le 14 décembre 2005.
(19) Convention universelle sur le droit
d’auteur de juillet 1971
(ratifiée par la France en septembre 1972),
Convention pour la sauvegarde
du patrimoine culturel immatériel
adoptée en octobre 2003
(approuvée par la France en juillet 2006),
Convention sur la protection
et la promotion de la diversité
des expressions culturelles adoptée
en octobre 2005 et entrée en application
en mars 2007 (adhésion par la France
en décembre 2006).
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Toutes ces réalités prennent plus ou moins consistance à l’échelle de territoires. Cette
dimension territoriale s’est révélée, au gré des travaux de la Commission, comme un
aspect déterminant, notamment dans la manière dont les acteurs publics et opérateurs
privés organisent (ou non) leur réponse face à la demande sociale, dans la manière aussi
de concevoir (ou non) une forme d’économie ternaire contributive, « coopétitive »20,
associant le privé non marchand (dont ce que l’on désigne sous les notions de bénévolat
et pratiques amateurs), l’économie publique et le privé marchand.
Ce travail sur les enjeux des pratiques culturelles liées aux musiques actuelles rend donc
compte d’une réalité culturelle, sociale, économique et géographique très diverse, très
mouvante et instable, parfois insaisissable ou difficilement perceptible.
Elle est pourtant bien au cœur de la création culturelle contemporaine, de la vie sociale
des jeunes aquitains mais aussi des moins jeunes. Elle interroge sur les possibilités
d’émergence d’une forme d’économie alternative née des pratiques culturelles, qui ne
saurait se restreindre à la seule adaptation à un format de développement « industriel »
des activités créatives.
Par conséquent, ce travail sur les musiques actuelles offre un terrain particulièrement
propice de réflexion, de mobilisation et d’expérimentation sur la place et le rôle de la
culture dans le développement de la société régionale, du moins est-ce dans cet esprit
que la Commission a réalisé ce rapport, prolongeant l’héritage du travail déjà engagé
par le CESR d’Aquitaine sur les questions culturelles.
1.2 Éléments de méthode
Pour traiter ce sujet, la Commission s’est largement appuyée sur certains réseaux ressources,
en particulier le Réseau Aquitain des Musiques Actuelles (RAMA), co-auteur de la proposition à l’origine de ce travail et partie prenante de sa réalisation.
Elle a essentiellement procédé par des séries d’auditions qui ont porté sur divers aspects :
- Les principes et les bases historiques.
- Les pratiques et les publics.
- Les activités et l’économie de la filière.
- Les emplois et la formation.
- Les dynamiques territoriales.
Au total, la Commission a tenu une quarantaine de réunions dont une trentaine consacrée à
des auditions réparties entre décembre 2008 et mai 2010, complétées par quelques entretiens.
Ce sont dans l’ensemble près d’une centaine d’acteurs qui ont, par leurs témoignages et
contributions, alimenté le travail de la Commission (cf. liste complète en annexe).
Ce travail d’auditions a été complété par la consultation d’études, d’analyses et de
statistiques réalisées par diverses organisations institutionnelles et professionnelles (cf.
récapitulatif en annexe).
Cette introduction méthodologique n’aurait pas été complète sans un éclairage sur l’objet
et le champ de ce travail, à savoir sur ce que recouvre exactement l’expression « musiques
actuelles » et sur le sens donné à « l’actualité » des pratiques qui lui sont liées.
(20) En référence aux travaux
de Adam M. BRANDENBURGER
et de Barry J. NALEBUFF
publiés au milieu des années 1990,
mettant en évidence les intérêts
de stratégies de coopération
dans un environnement concurrentiel
(ou de compétition).
Ce concept, issu de la théorie des jeux
et d’abord appliqué dans le domaine
de l’informatique (ex : Novell).
1.3 « Musiques actuelles » :
une expression à « contretemps » ?
La prise en compte des pratiques culturelles liées aux musiques actuelles suppose en
préalable que soit bien défini l’objet même de ces pratiques.
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L’expression de « musiques actuelles » recouvre en réalité une très grande variété
d’esthétiques musicales dont on pourrait a priori s’interroger sur ce qui les rassemble,
tant par leurs origines, leurs styles, leurs pratiques ou leurs publics. Cette impression
première s’explique aussi par la genèse même de l’expression « musiques actuelles »,
apparue il y a une trentaine d’années dans le jargon des institutionnels de la culture. Elle
a été créée en réalité pour désigner le cadre de l’intervention publique dans un champ
culturel défini par défaut. Ainsi, sont qualifiées de « musiques actuelles », toutes les
formes d’expressions musicales à l’exception de la musique classique et de la musique
contemporaine, autrement dit celles échappant à une définition convenue des musiques
« savantes » que d’aucuns qualifieraient « d’élitistes ». On y retrouve ainsi :
- la chanson ou la variété, parfois considérée comme « art mineur » mais offrant pourtant
une part notable de l’expression culturelle en France (poétique, musicale) depuis les
caf’conc’ de la fin du 19ème siècle et tout au long du 20ème siècle (Edith Piaf, Yves Montand,
Léo Ferré, Georges Brassens, Jacques Brel…),
- le jazz et les musiques improvisées, déjà plus que centenaires, héritées de la culture
afro-américaine et matrices de tout un ensemble de genres musicaux plus contemporains,
- les musiques traditionnelles issues de toutes les régions de France et musiques du
monde, de traditions orales sans cesse revisitées et objets de nombreux métissages,
- les musiques amplifiées qui recouvrent notamment le rock et ses dérivés (déjà plus d’un
demi-siècle d’existence), les musiques électroniques, le hip-hop, fortement influencées
par les cultures anglo-américaines…21
Cette désignation a donc coïncidé avec l’apparition dans le champ de la politique
publique culturelle de tout un ensemble de pratiques jusqu’alors délaissées. Une impulsion décisive fut donnée en 1982 par le Ministère de la Culture, marquée notamment
par la création de la Fête de la Musique à l’initiative du Ministre de l’époque (Jack LANG)
et du Directeur de la musique et de la danse de ce ministère, Maurice FLEURET22. Cette
reconnaissance officielle survenait après une décennie d’expériences (sinon d’expérimentations) locales, par exemple à travers le rôle des Maisons des Jeunes et de la Culture
avec l’appui de certaines collectivités. Elle a marqué aussi une rupture, parfois considérée
comme une véritable « transgression » voire « régression », dans l’approche même de
la politique publique en matière culturelle23.
Par conséquent, cette désignation recouvre non pas une forme esthétique homogène
mais avant tout une conception technocratique propre à l’intervention publique dans le
champ de ces musiques. De fait, c’est aujourd’hui sous cette expression que les pouvoirs
publics qualifient leurs politiques en faveur de ces musiques, expression que les acteurs
culturels les plus directement concernés ont reprise à leur compte pour promouvoir l’ensemble des pratiques et des projets qui les caractérisent. Bien qu’appropriée par ces acteurs
et désormais identifiée dans le jargon institutionnel, cette expression de « musiques
actuelles » laisse néanmoins le citoyen sur sa faim. Celui-ci écoute du rock, du jazz, du
reggae, de l’électro, du rap… a-t-il jamais eu l’idée d’écouter de la « musique actuelle » ?
Cette expression porte d’ailleurs une première distorsion communicationnelle. On ne
peut contester le caractère « d’actualité » conféré à ces musiques par l’expression
convenue. Ces musiques participent indéniablement, dans leur ensemble, à des pratiques
bien vivantes et aux émergences de la créativité culturelle. S’en tenir à cela amènerait
trop facilement à oublier l’histoire de ces courants musicaux, le contexte dans lequel ils
sont apparus, la façon dont ils se sont influencés depuis au moins la fin du 19ème siècle !
Parler des « musiques actuelles », c’est donc se référer à des esthétiques dont l’héritage
est plus que centenaire. En cela, elles ne diffèrent donc pas de certains courants relevant
des musiques dites classiques ou contemporaines.
(21) Audition de M. André CAYOT,
conseiller auprès du Ministère de la Culture
et de la Communication,
le 15 décembre 2008.
(22) Cette initiative emblématique
ne doit pas masquer les autres mesures
plus structurelles prises dans la foulée,
avec adoption d’une loi instaurant
les droits voisins (1985),
création d’un Centre d’information du rock
et des variétés puis d’un fonds de soutien
aux variétés (1986),
mise en place d’un Plan Rock (1989)…
(23) Cf. à ce propos la déclaration de Jean
Rostand en 1962, qualifiant le rock’n’roll
de pratique régressive
et « contraire à la morale biologique ».
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Considérer cet aspect, c’est aussi déjà introduire une nuance quant à la diversité des
pratiques et des publics, que l’on ne saurait confiner au seul périmètre de la jeunesse.
Elles s’inscrivent donc dans un continuum historique et dans le prolongement de pratiques
héritées. Au demeurant, certains groupes ou musiciens pop-rock ont aussi puisé leur
inspiration chez des auteurs classiques ou de musique contemporaine (ex : Karlheinz
Stockhausen, Pierre Henri…).
Par leur histoire, ces musiques correspondent à un moment particulier de l’évolution des
sociétés industrielles du début du 20ème siècle, à savoir celle de l’électrification et des
techniques d’amplification du son. Cette évolution technologique a offert le support à
une désignation qui reflète plus exactement l’une des caractéristiques communes à cet
ensemble d’expressions musicales, à savoir celle de musiques électro-amplifiées ou de
musiques amplifiées24. D’une certaine manière, les musiques actuelles sont aussi les
reflets et acteurs des évolutions technologiques dans le domaine du son et de l’image
qui ont traversé les sociétés depuis les débuts du 20ème siècle. Celle de l’électrification
d’abord puis celle des médias et des technologies de communication (radio, télévision
et aujourd’hui internet). Même si ces musiques n’ont pas le monopole des médias,
leur présence y est beaucoup plus massive et systématique et le rôle de ces derniers
beaucoup plus affirmé.
Une autre caractéristique ou distinction que l’on peut opérer tient à leur mode de transmission et d’apprentissage. Là où les musiques classiques et contemporaines convoquent
la transmission par l’écrit, la partition, les musiques actuelles ont aussi hérité d’une tradition
de transmission orale encore largement privilégiée, notamment dans les écoles de
musique « rock ».
Par ailleurs, les musiques actuelles se distinguent aussi par leur assise sociale, dessinant
souvent au-delà des formes esthétiques de leurs expressions, des réalités et des formes
de mobilisation sociales parfois en décalage, alternatives, contestataires, anti-conformistes
sinon provocatrices, inscrivant l’acte artistique dans un mouvement en prise et en réaction
à certains faits de société. Là où la musique classique, qui fut à l’origine musique sacrée,
reste marquée par une certaine distance ou réserve entre artistes et publics, les musiques
actuelles offrent une relation plus « fusionnelle » avec leurs publics. Les études relatives
aux pratiques et aux publics des musiques actuelles révèlent aussi cette très large assise
sociale, qui traverse toutes les couches de la société, quels que soient les âges ou les
milieux sociaux. Par leurs pratiques et leurs expressions, les musiques actuelles livrent
aussi un regard critique, une matière à penser et à réfléchir les réalités du « vivreensemble ». Ce qu’il faut bien entendre à travers ces pratiques et leur émergence, ce
sont les résonances d’expression collectives, de communautés de pensée et de vie, qui
interrogent dans leur actualité sur l’époque, sur les valeurs sociales et pas uniquement
sur la seule portée des variations stylistiques ou des courants esthétiques.
Ces sons-là relèvent aussi d’un discours, d’un bruit, qui fait entendre le corps social dans
sa diversité, dans ses désirs, dans ses rêves, dans ses souffrances, parfois dans ses troubles
ou ses excès.
De ce fait, il apparaît que « l’actualité » de ces pratiques renvoie aussi à des formes d’expressions en prise directe ou immergées dans la réalité des sociétés contemporaines. Elles
ne se limitent pas au seul champ artistique, mais intègrent aussi des réalités ou dimensions
sociales (dont celle liée au brassage ou au métissage culturel), économiques, technologiques.
(24) Cf. audition de M. Marc TOUCHÉ
du 28 avril 2009 et travaux
de Philippe TEILLET – Définition citée
de Marc TOUCHÉ : « ensemble
des musiques utilisant l’électricité
et l’amplification sonore comme éléments
majeurs des créations musicales (…) créées,
jouées à partir de la chaîne technique
constituée (au minimum) par micro,
pré-amplification,
amplification et haut-parleurs. »
1.4 Des héritages en perspective
L’histoire des musiques « actuelles » trouve ses origines dès la fin du 19ème siècle, notamment
dans les régions rurales des Etats-Unis. Elle a été fortement marquée par le besoin
d’affirmation des populations afro-américaines. Ces musiques se sont aussi nourries de
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l’influence de musiques populaires traditionnelles importées du continent européen ou
bien encore des Caraïbes.
Le negro-spiritual, à l’origine du gospel et du blues, est apparu chez les esclaves noirs
aux Etats-Unis dès le 17ème siècle. Le blues est né dans les champs de coton du sud des
Etats-Unis (delta du Mississippi). La fusion du blues et d’autres musiques populaires
ou traditionnelles marquera au début du 20ème siècle la naissance du jazz mais aussi,
au même moment, de la musique country (métissage de blues et de musique « folk »).
A l’origine, ces musiques étaient jouées pour être dansées lors de rencontres ou fêtes
locales. Empruntant les nouvelles voies de transport (fluviales et ferrées), elles se sont
peu à peu diffusées dans les grandes villes. Dans cette ambiance urbaine, leur diffusion
sera favorisée à la fois par le développement des nouveaux médias de radiodiffusion,
l’apparition des premières maisons de disque (Paramount Records, Okeh Records…) et
d’agents artistiques (Léonard Chess, Alan Freed…), favorisant leur reconnaissance par
un public de plus en plus large. La période de la Première Guerre Mondiale, avec l’envoi
de troupes dans toute l’Europe, et les années qui suivirent favorisèrent la diffusion du
jazz sur le continent européen et en terres girondines (1917-1918)25.
En ce début de 20ème siècle, l’urbanisation s’accompagne d’une autre évolution technologique majeure, l’électrification. A la fin des années 1930, alors que le boogie-woogie
surgit de la confluence du blues et de la country, la guitare électrique fait son apparition
dans les formations de jazz (notamment la Gibson ES-150 utilisée par Charlie Christian).
La conjonction de ces innovations artistiques et techniques marque les débuts des
musiques électro-amplifiées.
Ces évolutions, conjuguées aux transformations de la société (sur fond de crise économique
en 1929 et de ségrégation raciale aux Etats-Unis), vont alimenter des métissages et un
vaste courant de création qui se révélera dans l’immédiat après-guerre, avec la naissance
du bebop, du rhythm and blues puis du rock’n’roll.
Ces nouveaux « sons » venus des Etats-Unis vont se répandre en Europe, empruntant
des canaux aussi divers que la présence des troupes américaines mais surtout la radio
(l’émission Salut les Copains à partir de la fin des années 1950), le cinéma (Bill Haley,
Elvis Presley, Chuck Berry…)26, les premiers magazines spécialisés, les cafés (avec l’apparition
des jukes-box) et les disquaires.
Au début des années 1950, deux innovations vont ainsi favoriser la popularité de ces
musiques : celle du disque 45 tours (format adapté au juke-box) puis celle du transistor
(et l’invention du « Top 50 »). Dès lors, l’essor de ces musiques va prendre une dimension
internationale et constituer la base de ce que certains sociologues ont qualifié de « marqueur
générationnel » ou de phénomène anthropologique. Cette période de l’après-guerre et
de l’émergence de la culture « rock » marque aussi une phase de l’industrialisation du
secteur musical (remise en question du monopole des grandes maisons de disques telles
RCA, CBS, MCA, rôle accru des médias), l’accès des premières vedettes du rock au « rêve
américain » qui les amènera à une forme de déclin (Elvis Presley, Little Richard, Jerry Lee
Lewis…). Alors que s’éteint la première vague du rock aux Etats-Unis, celle-ci déferle sur
les autres continents dans les années 1960 et de nouveaux styles musicaux s’affirment :
à la fois par un certain retour du rhythm’n’blues vers les origines du gospel et l’apparition
de la soul (Ray Charles), suivie durant les années soixante d’un métissage (soul, jazz,
rock, rhythm’n’blues) avec la funk music (James Brown), mais aussi d’un renouveau et
d’une radicalisation de la musique rock. Le renouveau viendra d’Angleterre, notamment
avec des groupes devenus légendaires (Beatles, Rolling Stones…). La radicalisation s’est
opérée avec l’apparition en Amérique du nord du rock « garage » (ou punk sixties) qui
précédera l’affirmation durant la décennie suivante de la mouvance punk. La montée en
puissance de ces musiques s’opère à plusieurs niveaux : à la fois sur le plan des sonorités
(25) Cf. à ce propos l’ouvrage
« Sud-Ouest, porte des outre-mers »
publié aux éditions Milan en 2006 :
« Bordeaux et ses habitants vivent
à l’heure américaine.
Ils retiendront le chewing-gum,
les cigarettes blondes […], le jazz »,
dont le concert de jazz
du 808ème régiment Stevedore en mai
1918.
(26) Bill Haley dans le film
« Rock around the clock » en 1956,
Elvis Presley dans “Love me tender”
en 1956, “Jailhouse rock” en 1957
et plusieurs autres jusqu’en 1969.
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et des volumes sonores, tout comme sur le plan du brassage entre les différents styles
ou genres musicaux et enfin sur celui de leur popularité (affirmation des courants « pop »
et « pop-rock »). La musique rock s’internationalise et s’associe aux sonorités et traditions
culturelles des divers continents (ex : le mbaqanga en Afrique du sud, l’anadolu rock en
Turquie…). Parallèlement, d’autres sons venus des Caraïbes, notamment de Jamaïque
(le ska puis le rocksteady et surtout le reggae), exprimant le désenchantement populaire
sur fond d’indépendance, trouvent un large écho international.
Cette période est marquée par l’engouement des jeunes générations qui se manifeste
aussi dans la pratique musicale, notamment par l’éclosion fulgurante de groupes à
guitares électriques27.
Le contexte socio-économique change au cours des années 1970 et les conditions de
vie se durcissent (choc pétrolier, chômage). Cette époque est aussi caractérisée par
l’affirmation de mouvements contestataires (par exemple contre la guerre du Viet-Nam),
expressions de la « contre-culture ».
Des rassemblements musicaux vont marquer les esprits : Woodstock en 1969 (450 000
spectateurs) et celui d’Amougie (80 000 spectateurs), Ile de Wight en 1970 (600 000
spectateurs)… L’émergence de nouveaux styles musicaux, avec une tendance plus
froide, plus sombre, d’acier (metal, heavy metal, punk) donne une résonance particulière
à cette évolution. C’est aussi à cette période qu’apparaissent le « 33 tours » (avec son
caractère patrimonial permettant la constitution d’albums ou collections) puis la cassette
audio et que se répandent de nouvelles technologies du son : systèmes d’amplification
plus puissants, claviers, synthétiseurs et boîtes à rythmes… De nouvelles sonorités
électroniques percent. Les vibrations des basses prennent peu à peu le dessus. Alors que
la musique disco rencontre le succès populaire, une nouvelle culture urbaine revendicative émerge dans le ghetto du Bronx new-yorkais, le hip-hop, associant l’expression verbale et musicale (le rap ou slam, parole scandée et saccadée ou Mcing, associée à un DJ,
le human beatboxing), la danse (b-boying, breakdancing), le graffiti et des règles de
comportement vestimentaire (street-fashion). La culture et la musique hip-hop ont
exercé une influence importante, notamment sur les styles musicaux apparus durant les
années suivantes (R&B, drum’n’bass, jazz-rap, miami bass, trip hop, électro, ragga…).
Là encore, un nouveau support de diffusion marque la période avec l’apparition des
radios-cassettes (« ghettoblasters »), très liée à la culture hip-hop.
Les années 1980 voient se déployer les nouveaux courants musicaux (Techno, Electro,
House…) combinant sonorités électroniques, amplification des basses et s’affirmer le
rôle de deux catégories d’acteurs dans les formations musicales : les sonorisateurs et les DJ’s
(disk jockeys). Ces nouveaux courants musicaux ont peu à peu investi les innovations
générées par les technologies de l’information et de la communication (CD et vidéos
puis supports numériques tels que le lecteur MP3, l’iPod…). La culture rock connaît aussi
un renouveau, marqué par des transformations qui empruntent aux nouvelles cultures
et tendances (post-punk, new wave, no wave, darkwave, math-rock, trash metal). Ce
mouvement va se confirmer dans les années récentes (trance, ghetto house, progressive
house, UK garage, trip hop, dirty south, crunk… mais aussi shoegazing, jungle, grunge,
britpop) multipliant les métissages et mobilisant les nouvelles technologies… tout en
réhabilitant les plus anciennes. A la faveur du développement des musiques électroniques et des pratiques de DJ’ing (dont le « scratching »), le disque vinyle retrouve
un regain d’intérêt. Les dernières innovations artistiques des années 2000 prolongent en
les enrichissant les styles existants depuis la fin des années 1980, non sans quelques
adaptations aux contextes culturels régionaux (glitch-hop, nu disco, grime, cumbia
digitale, kwaito…).
(27) cf. Marc TOUCHÉ
« Avis de tempête, musiques amplifiées
sur la planète, le virage électrique » Les Cahiers de l’ORCCA, n° 28, mai 2008.
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De ce rapide tableau28, on peut dégager plusieurs traits saillants et mises en perspectives :
- Tout d’abord, l’ancrage social de ces musiques et de leurs pratiques ou, pour le dire
autrement, le lien étroit qui les unit aux problèmes des sociétés au sein desquelles elles
ont émergé. « La musique, comme fait social, est enracinée dans la société. »29 Cet
ancrage s’est exprimé à la fois sous l’angle d’une affirmation d’identités, de communautés, autant révélatrices de souffrances collectives que de parcours personnels,
trouvant par la musique la possibilité d’une expression. Au fil des décennies, l’émergence
de nouveaux courants musicaux apparaît aussi comme une réaction au conformisme
de styles plus établis. Dès l’après-guerre, beaucoup d’artistes ou groupes se sont laissés
happer par les sirènes du succès populaire et médiatique, rentrant dans le moule d’une
société de consommation et sacrifiant l’authenticité d’un discours, sa dimension
altruiste ou engagée, à leur bien-être matériel. Selon certains observateurs, cette
édulcoration ou dilution du « discours » est de plus en plus manifeste, hormis sur le
continent africain30. Dans cette analyse, il ne faut pas occulter le rôle accru des médias
audiovisuels et des industries culturelles (les grandes maisons de disques), ce qu’ils
laissent aussi à entendre, maîtrisant la part de ce qui est le plus souvent audible par le
plus grand nombre.
Ceci étant, il serait abusif d’interpréter sociologiquement de manière homogène
l’ensemble de ces musiques actuelles, y compris parmi les nouveaux courants musicaux
apparus durant les toutes dernières décennies. Plusieurs travaux ont démontré à la fois
l’évolution dans le temps de certains courants musicaux31, d’abord jugés anti-conformistes
et provocateurs puis plus ou moins rapidement récupérés par les industries culturelles
comme simples produits marketing et popularisés. C’est le cas de la musique pop et,
plus récemment, celui de la techno. Là où le rap propose un discours provocateur et
révolté, le hard-rock revendique une posture plus moraliste sinon conservatrice. Issu à
l’origine des banlieues, il est devenu musique de classes populaires des petites villes et
des campagnes. Le rap lui a succédé en tant que musique des banlieues urbaines.
De leur côté, la pop et la techno, rattrapées par la culture de masse, correspondent
actuellement à des musiques plus caractéristiques des classes moyennes. Ces distinctions
se retrouvent parmi les pratiques musicales de la jeunesse, selon les niveaux d’études
et les environnements sociaux. Pour les jeunes, notamment parmi les adolescents dont
la personnalité sociale n’est pas encore cristallisée32, les nouveaux courants musicaux
constituent autant un moyen d’affirmation en tant qu’acteurs de la société qu’un support
de différenciation. Ces courants esthétiques se distinguent aussi par la place plus ou
moins grande de la maîtrise instrumentale (déterminante dans le jazz ou le hard-rock,
plus secondaire dans la techno qui est avant tout une nouvelle musique à danser).
Ainsi, les styles liés aux musiques actuelles sont pluriels à la fois dans leurs expressions
artistiques et dans leurs traductions sociales ou modes de vie associés.
- Ce premier aspect va de pair avec la popularité croissante des « musiques actuelles »
dans le grand public, qui s’explique en grande partie par la multiplication des genres
et par leur diffusion généralisée, notamment via les médias (presse, audiovisuel…)
conjugués aux politiques de marketing des industries du disque et aux innovations
technologiques. Cette popularité s’accompagne aujourd’hui d’une banalisation et d’un
nivellement de l’écoute musicale33. Avec les mutations technologiques, ces musiques
se sont affranchies des contraintes spatiales et temporelles. Elles sont omniprésentes
dans la vie de tous les jours, y compris dans les déplacements (autoradios, baladeurs
CD et MP3…). Notre univers est envahi de musiques et de sonorités plurielles. Par
conséquent, on n’a jamais autant écouté la musique, mais la qualité de cette écoute
a certainement perdu en intensité ou valeur symbolique. Selon les musicologues, elle
a aussi régressé du point de vue de la restitution du son avec les nouveaux supports :
(28) Pour approfondissements,
cf. sur cet aspect l’ouvrage
de Gérôme GUIBERT « Les nouveaux
courants musicaux : simples produits
des industries culturelles ? » publié
par l’IRMA et les éditions SETEUN, 1998.
(29) Cf. « Les nouveaux courants
musicaux : simples produits
des industries culturelles ? »
Gérôme GUIBERT – Coll. Musique
et Société – IRMA, Editions Seteun, 1998.
(30) Cf. audition de Florent MAZZOLENI
du 8 avril 2009
(31) Cf. l’analyse développée
notamment par Gérôme GUIBERT dans
« Les nouveaux courants musicaux :
simples produits des industries
culturelles ? » - IRMA,
Editions Seteun, 1998.
(32) Pour reprendre les termes
d’Edgard MORIN.
(33) Cf. Vincent TIFFON, musicologue,
directeur de la revue Demeter,
dans « Les valeurs de la musique, valeurs
sociale, esthétique et économique » Observatoire des usages
numériques culturels, 2007
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la qualité sonore du CD a marqué un recul par rapport au vinyle et celle des nouveaux
supports et formats numériques (type MP3) est aussi en retrait par rapport au CD. Ce
que les supports actuels ont permis de gagner en massification de l’écoute s’est opéré
parallèlement à une dévalorisation de la qualité de cette écoute.
- Ces nouvelles technologies ont modifié l’accès à la pratique musicale. Or, l’autre
conséquence de la popularité des musiques actuelles s’exprime par l’explosion des
pratiques, en particulier des pratiques « amateurs ». Au début des années 1980, des
propos officiels avançaient le chiffre de 25 000 groupes de musiques actuelles en
France (dont 90 % d’amateurs). Sur le seul périmètre de l’agglomération bordelaise,
certains témoins évoquent aujourd’hui la présence de 1 000 à 1 500 groupes34. Un
autre constat qui résulte de l’historicité de ces musiques, de la succession des genres
musicaux et de leurs pratiques, est que les jeunes générations ne sont plus les seules
concernées.
- Un troisième enseignement mérite d’être également mis en exergue, à savoir l’influence
déterminante du facteur technologique dans l’évolution des esthétiques et des
pratiques musicales. Outre leur influence incontestable sur l’audience et l’écoute, les
innovations technologiques ont participé et continué d’influer de manière importante
à la fois sur l’émergence de courants musicaux et sur les conditions d’accès aux
pratiques. Ainsi, l’avènement des musiques électroniques et l’utilisation des outils
numériques induisent de profondes transformations sur toute la chaîne allant de la création, à la diffusion et à la distribution des œuvres.
En amont, ces technologies ouvrent un espace de créativité beaucoup plus largement
accessible qui alimente le développement de l’autoproduction et qui étend de manière
considérable l’offre musicale. Pour les acteurs de la production et de la diffusion
musicale, ce phénomène comporte une difficulté et une exigence : celle de la sélection
et d’un regard critique permettant de différencier les œuvres ainsi créées, avec le risque
selon certains observateurs que l’originalité ou l’excentricité prime sur la musicalité.
Un autre phénomène induit par l’usage de ces nouveaux services numériques est qu’il
entretient de nouvelles formes d’écoute et de « consommation » musicale (téléchargement légal et illégal, streaming) qui dévalorisent l’acte de création dans la mesure
où l’accès gratuit tendrait à devenir la règle, notamment parmi les jeunes générations.
Pour Marc TOUCHÉ, sociologue spécialiste de ce secteur, « les musiques électro-amplifiées
sont entrées avec l’ordinateur dans une nouvelle aventure sociale et sonore dans laquelle
la question du musicien, en chair et en os, est à nouveau posée à travers cette nouvelle
évidence jeuniste : la musique doit être gratuite, à l’état de nature.»
La dimension technologique des pratiques liées aux musiques actuelles offre donc
actuellement un vrai paradoxe : à la fois outil permettant d’explorer de nouvelles
sources de création et facteur de dévalorisation.
- Enfin, il est un dernier enseignement à retirer à la lecture de l’évolution des musiques
actuelles et de leurs pratiques. Celles-ci, en se diversifiant et en se diffusant, ont généré
un véritable secteur économique. Elles ont ouvert un espace d’activités et d’emplois
(de conception, de production, d’édition, de diffusion, de distribution, de fabrication
de matériels et d’instruments…), parfois de développement à l’échelle de territoires
ayant su exploiter l’image et la popularité de ces musiques (Liverpool, Londres,
Manchester…) ou lieux d’accueil de grands festivals. Néanmoins, l’avènement des
technologies et nouveaux services numériques évoqué précédemment bouscule également l’équilibre de cette filière comme en témoigne la crise du disque physique (CD)
et l’émergence des nouveaux opérateurs du « Net » (ex : iTunes, Myspace, Believe…).
(34) Cf. audition de Florent MAZZOLENI
le 8 avril 2009, journaliste,
auteur de plusieurs ouvrages sur le rock.
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Cette évolution pourrait se traduire par de nouvelles alliances et formes d’intégration
horizontale entre opérateurs, à l’image de ce qui s’est produit au cours des dernières
décennies du 20ème siècle, avec pour conséquence une dilution et une marchandisation
accrues de la production musicale dans un vaste marché du divertissement.
C’est par conséquent à la lecture de ces évolutions et perspectives que l’approche des
pratiques liées aux musiques actuelles et leurs enjeux en Aquitaine mérite d’être
abordée.
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2 - Des pratiques
populaires
et plurielles
Expressions de réalités sociales
et actrices du lien social
Que recouvrent aujourd’hui plus précisément les pratiques liées aux musiques actuelles ?
Comment ces pratiques se manifestent-elles ? Quels sont les « publics » les plus directement
concernés ? Que peut-on en dire pour une région telle que l’Aquitaine ? Les enseignements
généraux issus de l’analyse des évolutions des genres musicaux liés aux musiques actuelles
ont mis en évidence leur popularité croissante et leur omniprésence dans la vie de tous
les jours. L’objet de ce chapitre est de cerner de manière plus précise les réalités sociales
perceptibles qui se rattachent à ces pratiques.
En 2005, une enquête réalisée par TNS Sofres et commanditée par la Société des
Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique (SACEM) sur le rapport des Français à la
musique révélait que celle-ci constituait la forme artistique la plus prisée, bien avant la
littérature ou le cinéma35. Ainsi, pour près des trois quarts des Français, la musique est
l’art dont ils pourraient le moins se passer, cette proportion étant plus élevée encore
parmi les jeunes et en fonction du niveau d’études. Ce « besoin » de musique est
d’abord étroitement lié au plaisir qu’il procure, plus accessoirement à une forme de
détente. Pour 16 % des personnes interrogées, il était même considéré comme « vital »
ou impossible de s’en passer. C’est dans cette dernière catégorie que l’on trouve
logiquement le plus de musiciens pratiquants (29 %).
D’après cette enquête, la chanson française était le style le plus populaire (66 %), devant
les musiques « pop&rock » (29 %) et la variété étrangère (22 %). Les musiques pop-rock
étaient plus en vogue parmi les jeunes (moins de 35 ans) et les actifs. Le reggae et la
techno apparaissaient selon cette même enquête davantage appréciés parmi les jeunes
hommes, alors que les jeunes femmes étaient les plus amatrices de musiques du monde.
Cette enquête révélait en outre que le support le plus utilisé pour écouter de la musique
était alors la chaîne hi-fi (66 %), juste devant la radio (61 %) et bien avant les concerts
et la TV. Cette hiérarchie a depuis lors été bousculée avec l’explosion de l’usage des
outils et supports numériques.
(35) « Votre vie en musique » - Enquête
sur le rapport des Français à la musique
– TNS Sofres / SACEM – Mai 2005.
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2.1 Des pratiques en mutation
Une première base de travail permettant de cerner cette réalité des pratiques est fournie
notamment par les enquêtes successives sur les pratiques culturelles des Français (de 15 ans
et plus), conduites à l’initiative du Département des Études, de la Prospective et des
Statistiques du Ministère de la Culture et de la Communication36. Ces enquêtes permettent
d’appréhender les pratiques musicales sous plusieurs angles : celui de l’écoute d’une
part, celui de la participation à des concerts ou spectacles musicaux d’autre part et enfin
celui de la pratique instrumentale. Selon cette enquête, 87 % des Français de 15 ans et
plus écoutent de la musique, les deux tiers tous les jours ou presque, quels que soient
le support et les conditions de cette écoute.
Selon les résultats d’une enquête publiés en 2004 sur les loisirs des enfants de 6-14 ans,
95 % de ces derniers ont écouté de la musique ou la radio au cours du trimestre écoulé
et 56 % tous les jours (notamment parmi les adolescents)37.
Les chansons ou variétés françaises sont le genre de musique le plus écouté (68 % de la
population de 15 ans et plus), notamment parmi les plus âgés (environ 80 % des
retraités, couples de 45 ans et plus notamment parmi les agriculteurs et les artisanscommerçants) et globalement davantage chez les femmes (plus des trois quarts d’entre
elles écoutent ce type de musique). L’autre genre le plus écouté est celui des variétés
internationales et du Rn’B (38 % de la population de 15 ans et plus). Ce sont les jeunes
(étudiants et jeunes ménages des professions intermédiaires, employés et ouvriers) qui,
proportionnellement, sont plus adeptes de ce style de musiques (pour plus de la moitié
d’entre eux). Là encore, les femmes sont relativement plus nombreuses que les hommes
dans l’écoute de ce genre musical. Le troisième style musical le plus écouté est celui des
musiques pop-rock (28 % de la population de 15 ans et plus).
L’assise sociale est plus large dans ce cas, puisqu’elle concerne une part importante
(environ 40 %) de la population de 15 à 44 ans, mais d’un niveau d’études plus élevé
et socialement plus aisé (étudiants, jeunes ménages des professions d’encadrement et
intermédiaires).
Part d’écoute dans la population française de 15 ans et plus (%)
Musique classique
27
Opéra
9
Jazz
17
Rock, pop
28
Métal, hard rock
7
Hip-hop, rap
14
Musiques électroniques, techno
15
Variétés internationales, Rn’B
38
Musiques du monde et traditionnelles
25
Chansons ou variété française
Source : DEPS, 2008
(36) Enquêtes réalisées en 1973, 1981,
1989, 1997 et 2008 – Résultats
accessibles à l’adresse suivante :
http://www.pratiquesculturelles.culture.
gouv.fr/index.php
68
0
10
20
30
40
50
60
70
80
Les étudiants et jeunes adultes (15-35 ans) sont plus spécifiquement adeptes des genres
plus récents tels que les musiques électroniques, la techno, le hip-hop et le rap. Alors
que 15 % de la population des 15 ans et plus écoutent ces genres musicaux, ce taux
atteint plus de 20 % chez les jeunes adultes et jusqu’à plus de 40 % parmi les étudiants.
(37) « Les loisirs des 6-14 ans » Développement Culturel n°144 – DEPS,
Mars 2004.
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Dans leurs pratiques d’écoute, ces genres sont plus urbains mais aussi plus masculins.
On retrouve ce type de profil pour les musiques métal-hard rock (7 % de la population
de plus de 15 ans mais 15 % à 20 % parmi les plus jeunes).
A l’inverse, le jazz (17 % de la population concernée) est plus écouté dans la tranche
de population des 45-65 ans, actifs (cadres et dans une moindre mesure professions
intermédiaires) ou retraités, se rapprochant en cela du profil des auditeurs de musique
classique ou de celui des musiques du monde ou traditionnelles (27 % et 25 % de la
population).
2.1.1 Des supports d’écoute de plus en plus variés
S’agissant de l’écoute, on a déjà évoqué le rôle particulier joué concomitamment par les
technologies et par les médias dans la diffusion et popularisation des musiques actuelles.
Taux d’équipement des ménages (%)
100
97
90
90
85
80
76
70
60
56
50
40
40
30
30
20
27
22
10
Source : DEPS, 2008
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La radio reste l’un des moyens d’accès privilégié à l’écoute musicale. La quasi-totalité
des foyers français (90 %) dispose d’un poste de radio et ce taux d’équipement est très
homogène dans la population, un peu plus élevé parmi les plus jeunes (15/19 ans)
et les plus âgés (retraités et plus de 65 ans). Il reste l’un des supports d’écoute les plus
facilement accessibles et l’un des plus économiques. En moyenne, un peu plus des deux
tiers des Français de 15 ans et plus écoutent la radio tous les jours ou presque et les
hommes un peu plus que les femmes. Depuis trente ans, ce taux est resté assez stable.
Parmi ceux qui écoutent de la musique de manière exclusive, c’est-à-dire sans autre
activité parallèle, la radio constitue le second support d’écoute derrière le CD.
Certaines radios à vocation musicale sont plus écoutées par les jeunes (étudiants,
lycéens, personnes et couples de moins de 35 ans), notamment NRJ, Skyrock ou encore
Europe2. Radio Nostalgie qui figure également dans les radios les plus écoutées est plus
prisée dans la tranche 45-65 ans. Selon Médiamétrie, 42,2 millions de Français de 13 ans
et plus écoutent chaque jour (en semaine) la radio (soit une part d’audience cumulée
de 81,6 % en 2008-2009), pour une durée quotidienne moyenne de 3 h 00. La radio
reste le premier média écouté en déplacement (49 % d’écoute hors domicile, notamment
parmi les actifs). Les stations musicales rassemblent 21,5 millions d’auditeurs quotidiens,
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pour une durée d’écoute proche de 2 h 00. De plus en plus, l’écoute de ces stations
mobilise les nouveaux supports numériques : 1,3 million d’auditeurs quotidiens de 13 ans
et plus les écoutent sur ordinateur (sachant que globalement un quart des auditeurs ont
écouté la radio sur internet en direct/live ou en différé/catch-up), développement de
l’écoute sur téléphone mobile (progression de la couverture de + 50 % en un an) et sur
baladeur multimédia…
D’après les données publiées par Yacast38, les radios ont globalement réalisé 3,68 millions
de diffusions musicales en 2009, pour un temps moyen d’antenne de 59 %39. Cette
année-là, plus de 74 000 titres ont été diffusés (dont 41 % de nouveaux titres et 44 %
de titres diffusés plus de 3 fois), intéressant près de 22 500 artistes (dont 21 % d’artistes
francophones) pour une audience cumulée de 259 milliards de contacts (en baisse
continue depuis 2002).
Ensemble des diffusions radio en 2009
Reggae (2 %)
Rap (5 %)
Autres (2 %)
Pop/rock
international (23 %)
Variété francophone (27 %)
Variété internationale (8 %)
Pop/rock
francophone (6 %)
Dance (11 %)
Groove/Rn’B (16 %)
Source : Muzicast/Yacast 2010
Les genres musicaux les plus diffusés en radio sont la variété et le pop-rock (respectivement
35 % et 29 %). Le genre pop-rock domine cependant dans la diffusion des seuls nouveaux
titres (28 %), devant la variété (22 %) et le groove/Rn’B (22 %). Les 100 premiers titres
diffusés en 2009 représentent à eux seuls près du quart du total des diffusions et les trois
quarts des diffusions radio reposent sur près de 1 600 titres. Si l’on se réfère au bilan de
la décennie écoulée (2000-2009), on note parmi les meilleures diffusions la présence du
groupe Noir Désir (2ème position sur la décennie, en tête du classement des diffusions de
Virgin radio, France Inter, radio Alouette et hit West).
Il existe au niveau national une fédération des radios associatives rock, la FÉRAROCK40,
qui rassemble une vingtaine de radios en France (et 4 autres en Belgique et au Canada),
dont une seule en Aquitaine (Radio 103 à Périgueux). Ces radios se distinguent par la
programmation de musiques actuelles (dans tous les genres) et d’artistes émergents,
notamment ceux issus de la scène française et francophone. Les stations participant
à cette fédération doivent répondre à certaines exigences de valeurs : libre expression
et participation des adhérents, attachement au tissu local culturel et social, diversité
musicale et culturelle. Outre l’objectif de représentation de ses adhérents vis-à-vis des
instances professionnelles et institutionnelles, la FÉRAROCK s’efforce de promouvoir
l’identité culturelle et artistique des radios associatives, de soutenir la scène des
musiques actuelles française en émergence ou peu médiatisée et de mutualiser les moyens
entre adhérents. Pour intégrer la fédération, les radios doivent également justifier d’au
(38) Enquête réalisée sur un panel
de 65 radios représentant 96 %
de l’audience totale des radios musicales
en France – « Bilan radio-TV-Clubs
de la programmation musicale » –
YACAST/MUZICAST, 2010 –
Une autre enquête portant sur un panel
de 31 radios est réalisée
par l’Observatoire de la Musique.
(39) Radio la plus musicale
et la plus éclectique : FIP (avec 89 %
du temps d’antenne consacré
à la musique et plus de 29 000 titres
différents). C’est aussi celle qui diffuse
le plus de musiques jazz-blues (27 %)
et de world music.
(40) http://www.ferarock.com/
?page=presentation
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moins 1 an d’existence, fournir un dossier témoignant du travail engagé avec les acteurs
locaux de musiques actuelles et être parrainées par une radio déjà membre. Leur économie repose essentiellement sur un financement du Fonds de Soutien à l’Expression
Radiophonique. Elle participe au soutien de certaines productions et festivals. Elle édite
deux classements spécifiques des diffusions réalisées sur le réseau. Ainsi, sur les derniers classements de la fédération de 2009 et 2010, quelques albums et artistes édités
par des labels aquitains apparaissent (Tender Forever, Mansfield TYA, Clelia Vega chez
Vicious Circle, Bikini Machine, Binary Audio Misfits, Président Chirac chez Platinum).
Radio 103 Périgueux est une radio associative gérée par l’Association pour le
Développement de la Communication en Périgord. Elle émet depuis 1982 et son activité
repose en grande partie sur le travail de bénévoles (80 adhérents, passionnés et
musiciens). Elle fut l’une des toutes premières radio locale de Périgueux. Elle est membre
de la FÉRAROCK depuis 2007. Elle propose 25 émissions sur les musiques actuelles
dans toutes les esthétiques (pop-rock, jazz, musiques extrêmes), privilégiant les
artistes émergents, la diversité des expressions et des éditions musicales (notamment
en lien avec la Fédération des Éditeurs et Producteurs Phonographiques Indépendants
d’Aquitaine, FEPPIA). Chaque jour, une centaine d’artistes sont programmés sur cette
station. Elle travaille par ailleurs en lien étroit avec quelques partenaires locaux (les
scènes de « Le Sans Réserve » à Périgueux et du « Rocksane » à Bergerac). Elle est aussi
partenaire depuis 2007 du festival « Le Grand Souk » de Ribérac. « Radio 103 »
occupe 4 salariés (+ 2 mobilisés pour Radio Plaizance en Périgord Noir). Le fonds de
Soutien à l’Expression Radiophonique apporte 60 % de son budget dont le montant
global atteint 180 k€. Son audience est surtout composée d’un jeune public et
représente environ 1 000 auditeurs/ jour41.
Plus globalement, 81 radios sont autorisées à émettre en mode analogique en Aquitaine
dont une quarantaine de radios locales ou associatives.
Hors radio, un tiers des Français de 15 ans et plus ont écouté de la musique tous les jours ou
presque et un cinquième jamais. Plus on est jeune, plus on écoute de la musique de manière
régulière.
Ecoute de la musique (hors radio)
Jamais (19 %)
Tous les jours ou presque (34 %)
Plus
rarement (10 %)
1 à 3 jours
par mois (8 %)
1 à 2 jours
par semaine (16 %)
3 ou 4 jours
par semaine (13 %)
Source : DEPS, 2008
Les jeunes (étudiants, jeunes adultes) sont ceux qui écoutent la musique le plus
fréquemment. Parmi ceux écoutant de la musique en dehors de la radio de manière
assez régulière (plus d’une fois par semaine) ou écoutant souvent la radio, plus de 60 %
pratiquent l’écoute exclusive, c’est-à-dire sans rien faire d’autre, de façon régulière ou
ponctuelle. Ils sont en moyenne 13 % à se livrer à ce type d’écoute tous les jours
ou presque (mais 25 % à 30 % parmi les étudiants ou les jeunes adultes). Certaines
(41) Cf. audition de M. Hervé LAJOINIE,
Radio 103, le 30 mars 2010.
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situations familiales (couples avec enfants) ou professionnelles (ex : agriculteurs)
constituent un frein à ce type d’écoute. En outre, plus on est jeune et plus on a fait
d’études longues, plus la part d’écoute est importante.
Plus des trois quarts des Français sont équipés d’un lecteur de CD et plus d’un cinquième
d’un baladeur CD42. Le CD (ou cassettes) reste le premier support de ceux ayant une
pratique d’écoute exclusive de la musique (sans rien faire d’autre), devant la radio.
En effet, le CD est utilisé par plus de la moitié des personnes concernées (notamment
au sein des couples de plus de 35 ans, avec une légère prédominance des femmes). Plus
de la moitié des Français de 15 ans et plus ont acheté un CD au cours de l’année
écoulée. Les plus gros acheteurs (12 CD et plus) qui représentent 8 % de la population
totale concernée par l’enquête du DEPS, se recrutent plutôt parmi les jeunes adultes (et
jeunes couples) ayant effectué des études supérieures, bénéficiant d’une bonne situation
professionnelle et résidant plutôt en région parisienne.
Ce profil témoigne de la dimension économique qui accompagne l’acte d’achat de CD.
Une grande partie des plus jeunes (45 % des moins de 25 ans) achète 1 à 5 disques par
an ou n’en achètent pas du tout (environ le tiers). C’est aussi parmi les couples avec
enfants (35-55 ans) que l’on trouve la plus forte proportion de personnes ayant
emprunté des CD dans une médiathèque (un tiers). Enfin, selon les résultats de
l’enquête sur les loisirs des enfants de 6-14 ans, 91 % d’entre eux disposent en propre
d’un équipement audio et 86 % ont des CD.
En 2009, 59,4 millions de CD audio ont été achetés en France (56,4 millions d’albums et
3 millions de titres uniques ou « single »)43. Le volume des achats de CD est en baisse constante
depuis plusieurs années (- 54 % depuis 2003), alors que celui des téléchargements est en
progression rapide (cf. plus loin). Cette baisse, bien que ralentie, s’est poursuivie en 2009.
Évolution des ventes de CD par format (en millions d'unités)
128,8
140
120
119,5
117,3
94,9
29,6
26,9
77,3
26
100
66,6
80 99,2
16,9
92,6
59,4
8,1
91,3
4,6
60
78,0
40
69,2
■ Singles
3,0
■ Albums
62,0
56,4
20
0
2003
2004
2005
Source : Observatoire de la Musique, 2010
2006
2007
2008
2009
Ce volume porte sur 300 000 références (98 % d’albums en progression, 2 % de titres
uniques en diminution du fait de la concurrence des téléchargements sur Internet).
La variété internationale (au sens large) est le genre qui génère le volume d’achats de
CD le plus conséquent (20,4 millions d’unités et 34,3 % du total en 2009). Sa part a
tendance à augmenter régulièrement par rapport à la variété française (18,5 millions
d’unités, 31,2 % du total) dont les volumes et la part sont en recul. Avec 2,9 millions
d’unités vendues, le genre jazz-blues progresse en 2009 et voit sa part consolidée
(4,9 %). Pour un même volume commercialisé, le genre « musique du monde » enregistre
une nouvelle baisse.
(42) Ce taux a progressé
pour les lecteurs de CD
(67 % lors de l’enquête DEPS de 1997)
mais a fortement diminué
pour les baladeurs CD de type walkman
ou discman (45 % en 1997).
(43) Source : Observatoire de la musique
2009 – Cf. également les statistiques
du Syndicat National des Éditeurs
Phonographiques (SNEP).
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Pour l’Aquitaine, on ne dispose pas de données consolidées à l’échelle régionale44.
Néanmoins, d’après les informations communiquées par certains distributeurs45,
on constate une sur-représentation de la musique régionale (Basque, Béarn), du rock
français et indépendant, du reggae, du rap français, de la musique électronique, de
la musique africaine et du jazz. Ce constat s’explique par le dynamisme local en matière
de découverte d’artistes, l’activité des lieux de diffusion, d’associations et festivals.
La télévision est l’équipement audiovisuel le plus largement répandu dans les ménages
(taux d’équipement de 98,5 % en 2009 selon Médiamétrie, soit 26,6 millions de
ménages et 47,9 millions de postes de télévision). Plus de la moitié des foyers équipés
possède au moins 2 téléviseurs (+ 10 points en 2 ans – chiffre 2008). Plus de la moitié
des téléspectateurs est également équipée d’une télévision à écran plat et 46 % d’un
téléviseur compatible haute définition. Chaque jour, plus de 45 millions de personnes
regardent la télévision et 87 % des Français de 15 ans et plus la regardent tous les jours
ou presque. En moyenne, chaque individu de 4 ans et plus regarde la télévision plus de
3 h 30 quotidiennement, les enfants, étudiants et jeunes adultes (4 à 35 ans) moins que
les adultes, et les plus âgés de manière plus prononcée (près de 4 h 30 par jour pour les
plus de 50 ans).
Malgré la puissance de ce média, il reste assez peu utilisé pour l’écoute de la musique
mais son impact peut être ponctuellement important. Seulement 5 % des Français de
15 ans et plus qui écoutent de la musique sans rien faire d’autre ont recours à la télévision. Ceci s’explique en partie du fait de la réduction des programmes musicaux sur les
chaînes hertziennes en clair. Ainsi, la part des variétés dans l’offre de programmes n’a
cessé de baisser au moins depuis les dix dernières années (moins de 6 % du temps
d’antenne en 2008) et leur part d’audience reste faible (4 % de la « consommation »
de programmes par les téléspectateurs), en dépit du succès de certaines émissions :
Les enfoirés font leur cinéma - Les restos du Cœur diffusée en « prime time » le 6 mars 2009
sur TF1 a réalisé 53 % de part d’audience avec 12,3 millions de téléspectateurs et
a d’ailleurs généré le plus gros volume de vente de disques en albums-CD
(506 000 unités) et en DVD (287 000 unités) en 2009 – Le concours de l’Eurovision
diffusé également en « prime time » le 16 mai 2009 sur France3 a obtenu une part d’audience de 32 % avec 5,7 millions de téléspectateurs en France. L’émission La Nouvelle
Star diffusée sur M6 est regardée par 22 % des téléspectateurs de 15 ans et plus,
notamment parmi les moins de 35 ans et les femmes.
Le développement rapide de la TNT a cependant permis un élargissement de l’offre avec
l’apparition des chaînes numériques. Actuellement, plus des deux tiers des Français sont
équipés d’un adaptateur TNT et près d’un cinquième des foyers reçoit la télévision par
ADSL. De manière plus précise, 11,5 millions de foyers bénéficient d’une réception en
mode hertzien numérique terrestre, 4,6 millions par ADSL, 3,9 millions par satellite
numérique sur abonnement et 1,7 million par câble numérique. Parmi les foyers
recevant la télévision numérique, ce sont surtout les ménages avec enfants (25-49 ans
de 3 à 4 personnes), parmi les professions d’encadrement et intermédiaires ou artisanscommerçants, habitant plutôt dans les zones urbaines. On assiste parallèlement à des
changements dans la façon de regarder la télévision : visualisation de programmes
en différé (programmes en rattrapage ou catch-up TV, pratique du « time-shifting » ou
léger différé grâce aux nouveaux matériels type lecteurs-enregistreurs à disque dur dont
disposent 5,6 millions de foyers), télévision sur ordinateur fixe ou portable, téléphone
mobile 3G ou Edge, baladeur multimédia (pour 14 % des plus de 15 ans et 30 % des
15-24 ans).
(44) A l’exception de la partie nord
du Pays Basque, dans le cadre
d’une étude réalisée par
le Gouvernement de la Communauté
Autonome du Pays Basque
sur les habitudes, les pratiques
et la consommation culturelles
au Pays Basque en 2007/2008.
(45) Cf. audition
de Mme VIGEZZI-RUZZI,
responsable des produits éditoriaux
de la FNAC Bordeaux, du 11 février 2010.
(46) Sources : DEPS, CNC, Médiamétrie.
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La part d’audience des chaînes de la TNT progresse rapidement (15 % en 2009 de
manière globale et, dans cet ensemble, 28 % pour les chaînes numériques hors chaînes
« historiques »). Fin 2009, l’offre de services de télévision numérique concernait 225
chaînes, dont 26 chaînes nationales (parmi lesquelles 9 payantes) et 199 chaînes déclarées ou conventionnées. Parmi les chaînes nationales de la TNT, Virgin 17 (groupe
MCM) est la seule chaîne véritablement axée sur l’offre de programmes musicaux. En
ce qui concerne les autres chaînes (câble, satellite, ADSL, Mobile, Internet), plusieurs
proposent une offre essentiellement musicale :
M6 Music Hits, M6 Music Black, M6 Music Club.
MCM.
MCM Pop (musiques années 1980 à aujourd’hui, cible 25-35 ans).
MCM Top (chaîne interactive multi-supports).
Mezzo (classique, jazz, musiques du monde).
MTV (MTV Base, MTV Hits, MTV Idol, MTV Pulse, MTV2).
Télé Melody (variété francophone des années 1960 à 1980).
Trace Tropical (musiques tropicales, latines, caribéennes, africaines, world…).
Trace TV (musiques et cultures urbaines)
et dans une moindre mesure :
France4 (Taratata).
Game One (musique et jeux vidéos).
E !Entertainment.
Pink TV.
La part d’audience de la musique sur les chaînes numériques reste limitée, avec une tendance à la baisse : 1,7 % pour les chaînes payantes (notamment MTV, NRJ Hits, MCM
et MCM Top)46. D’après les données publiées par Yacast, 1,4 million de vidéos-clips ont
été diffusés sur les chaînes thématiques musicales47, portant sur 12 100 références (dont
10 % en « play-list ») et près de 5 000 artistes.
Près des trois quarts des clips ont été diffusés au moins trois fois. Dans cet ensemble,
les diffusions francophones ont représenté 39 % des diffusions totales et 52 % de
l’audience. Parmi les artistes les plus diffusés : Lady GaGa, Madonna, Bisso Na Bisso. La
part des 50 premiers titres diffusés (42 artistes concernés) représente 22 % du total.
Part des genres musicaux dans la diffusion TV
(chaînes thématiques musicales)
Variété
internationale (3 %)
Variété
francophone (14 %)
Autres (1 %)
Dance (17 %)
Reggae/ragga (2 %)
Groove/Rn’B (25 %)
Rap (9 %)
Pop/rock
international (22 %)
(47) Panel de 14 chaînes : M6, Virgin
17, W9, Music Club, Music Hits, MCM,
MCM Pop, MCM Top, MTV, MTV Base,
MTV Idol, MTV Pulse, NRJ Hits, Trace TV.
Source : Yacast, 2010
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Pop/rock francophone (7 %)
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Part des genres musicaux dans l’audience TV
(chaînes thématiques)
Variété
internationale (3 %)
Autres (1 %)
Dance (11 %)
Variété francophone (25 %)
Groove/Rn’B (22 %)
Reggae/ragga (1 %)
Rap (5 %)
Pop/rock
international (20 %)
Pop/rock
francophone (12 %)
Source : Yacast, 2010
La variété francophone est le genre le plus écouté sur ces chaînes thématiques (un quart
de l’audience), devant le groove/Rn’B et le pop/rock international. Pour l’année 2009, le
classement des artistes les plus regardés fait apparaître Bisso Na Bisso (« Show ce soir »,
10 900 diffusions pour 114 millions de contacts), Pep’s (avec « Liberta »), Tom Frager &
Gwayav’ mais aussi Grégoire, Cœur de Pirate, Florent Mothe, Olivia Ruiz…
Certains opérateurs de la filière musicale déplorent la « ghettoïsation » de la diffusion de
la musique à la télévision48, marquée par la réduction des programmes qui lui sont
consacrés, notamment à la variété française, ou par une programmation plus tardive
(ex : M6 qui est passée de plus de 30 % de la programmation à 22 %, cette tendance
étant aussi observée chez certaines chaînes thématiques telles Virgin17 ou NRJ12…).
Au cours des dernières décennies, on a de fait assisté à la disparition de certaines
émissions emblématiques (ex : « Les enfants du rock » diffusée sur Antenne 2 dans les
années 1980).
En Aquitaine, la chaîne de service public France3 Aquitaine, désormais intégrée
au nouveau groupe France Télévisions, intègre la musique dans ses décrochages
régionaux, sans toutefois d’émission spécifiquement dédiée à la musique. Ainsi,
l’émission consacrée aux loisirs « Ça-me-dit », diffusée chaque samedi à 16 h 20,
propose des rendez-vous musicaux. Dans le cadre des éditions locales (Bordeaux et
agglomération, Périgueux, Pau-Béarn, Pays Basque), la culture fait partie intégrante
de l’information.
Pour la seule année 2009, France3 Aquitaine a diffusé 80 sujets relatifs aux musiques
actuelles (15 sujets sur le premier trimestre 2010), par exemple sous forme de portraits
d’artistes, en essayant autant que possible de privilégier les artistes ou groupes
émergents. D’autres sujets ont pu être traités rendant compte de l’actualité intéressant
ces musiques (création d’un Arena à Floirac, disparition de certaines salles de concert
indépendantes, anniversaire de la Rock School Barbey et du Krakatoa, couverture de
certains festivals…).
Au-delà des incertitudes nées de la ré-organisation du service public télévisuel, de
nouvelles possibilités apparaissent avec la mise en place de la web-TV.
Souvent associée à la télévision, la visualisation de vidéos intéresse aussi la pratique
d’écoute musicale. Environ 89 % des foyers sont équipés d’un lecteur de DVD (soit
22,7 millions de foyers, en hausse) et 54 % d’un magnétoscope (en baisse). En outre,
(48) « Auteurs, compositeurs et éditeurs
de musique : les oubliés de la crise » SACEM, novembre 2009.
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19 % des Français de 15 ans et plus disposent d’un lecteur-enregistreur DVD et 13 %
d’un lecteur de DVD portable. En 2009, plus des deux tiers des Français ont acheté
un DVD et 26 % en ont loué (pratique en baisse). Parmi les publics fréquentant les
médiathèques, ce sont surtout les étudiants et les couples avec enfants (de 35 à 55 ans)
qui empruntent ou consultent le plus les DVD (28 %). En 2009, les Français ont acheté
plus de 135 millions de supports vidéo. Dans cet ensemble, la part des DVD musicaux
reste modeste (3,9 millions d’unités vendues en 2009). Ce volume de vente portait en
2009 sur un total de 13 410 références.
La variété internationale est un genre très apprécié en DVD musical et sa part ne cesse
d’augmenter. Les DVD musicaux de variété française restent encore en tête, mais leur
part a plutôt tendance à diminuer.
Les autres genres sont plus anecdotiques (hors les DVD de musique classique, ceux de
karaoké, de jazz-blues et de musiques du monde réalisent des scores beaucoup plus
modestes).
Répartition des ventes de DVD musicaux
par genres
Musique
du monde (1 %)
Autres (2 %)
Classique (10,7 %)
Jazz-blues (1 %)
Karaoké (6 %)
Variété
internationale (38,9 %)
Variété française (40,3 %)
Source : Observatoire de la musique, 2010
Parmi les principaux artistes ayant réalisé les meilleures ventes sur ce support en 2009,
on peut citer Michael Jackson (5 titres dans le « top10 »), les Enfoirés (plus grosse vente
en 2009), Johnny Halliday, Metallica et Céline Dion. Les dix premiers titres vendus en
2009 représentent à eux seuls le quart des volumes de DVD écoulés cette année-là. Le
cumul des titres de Michael Jackson en DVD musicaux a représenté le quart des volumes
vendus.
Les pratiques d’écoute musicale liées à tous ces supports audiovisuels sont aujourd’hui
profondément transformées par la diffusion rapide des supports et des usages numériques liés à la convergence des technologies de l’information et de la communication.
Ces nouvelles pratiques d’écoute liées aux technologies numériques soulèvent quelques
interrogations en raison d’une dégradation constatée de la qualité d’écoute musicale
(ex : sur lecteurs MP3) et d’une modification des comportements d’écoute, notamment
chez les plus jeunes, qui se traduit par des pratiques de « zapping » et une recherche de
gratuité d’accès, dévalorisantes pour l’acte de création.
Les deux tiers des ménages français possèdent au moins un ordinateur (24 % deux
ordinateurs ou plus) et 63 % ont accès à internet. Cet accès s’opère essentiellement via
l’ordinateur personnel (61 %), mais aussi sur le lieu de travail (27 %), par téléphone
mobile (12 %) ou via le téléviseur (4 %). Plus de la moitié des Français (56 %) utilisent
leur ordinateur quotidiennement et les deux tiers ont eu en moyenne au moins une fois
accès à internet dans la semaine. Selon les enquêtes Médiamétrie au cours des derniers
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mois (novembre 2009 à février 2010), le nombre d’internautes de 11 ans et plus est
supérieur à 35 millions (soit 66 % des Français de plus de 11 ans) et près de 20 millions
d’internautes se connectent tous les jours.
On enregistre par ailleurs 11,4 millions de mobinautes en France49. En moyenne, le
temps passé devant l’ordinateur est de 12 heures par semaine et plus de 20 heures pour
19 % des Français de 15 ans et plus. D’après l’enquête sur les pratiques culturelles des
Français conduite par le DEPS, l’ordinateur et internet deviennent des supports d’écoute
musicale privilégiés :
• 51 % des Français de 15 ans et plus ont utilisé l’ordinateur au cours du mois écoulé
pour écouter des CD, cette pratique intéressant surtout les jeunes de moins de 25 ans
(70 % à 75 % d’entre eux).
• 43 % l’ont utilisé pour écouter de la musique téléchargée enregistrée sur disque dur
(environ 70 % des moins de 25 ans).
• 31 % l’ont utilisé pour écouter la radio en direct (notamment jeunes et cadres).
• 16 % des Français de 15 ans et plus écoutent de la musique en ligne sans rien faire
d’autre (un tiers des jeunes de moins de 25 ans).
• 40 % ont eu accès à internet pour télécharger des logiciels, des programmes ou de la
musique50.
• un tiers a accédé à internet pour acheter de la musique ou des instruments de musique
et autant pour aller sur des sites de partage de fichiers (Dailymotion, Youtube, Emule).
• 30 % ont mis des photos, des vidéos ou de la musique en ligne et 28 % ont acheté
des places de cinéma, de théâtre ou de concert.
Selon l’enquête sur les pratiques culturelles des Français, la catégorie de sites ou de
blogs la plus fréquentée par les internautes concerne les sites et blogs musicaux (53 %
des personnes de 15 ans et plus), notamment parmi les moins de 25 ans (lycéens et
étudiants). Les observations de Médiamétrie sur la fréquentation des sites Internet
français au cours du premier trimestre 2010 fournissent d’autres informations. Ainsi, on
trouve parmi les principaux sites français visités : le site Skyrock (133 à 150 millions de
visites selon les mois), le site d’écoute et de téléchargement Musicme (4,7 à 5,3 millions
de visites), celui de Virgin Radio (1,2 à 2 millions de visites par mois), le site des
Inrockuptibles (1 à 1,3 million de visites), celui de Homixradio (555 000 à 690 000
visites) ou encore celui de la chaîne Virgin 17 (275 000 à 290 000 visites). Si l’on élargit
l’approche, les sites à vocation musicale les plus visités en France chaque mois sont
YouTube (15 à 16 millions de visiteurs uniques), Amazon (10 à 12 millions de visiteurs
uniques), Dailymotion (9 à 10 millions de visiteurs uniques) et Blogmusik/Deezer (6 à 7
millions de visiteurs uniques).
En 2009, le volume vendu par téléchargement a atteint 41 millions d’unités (à
comparer aux 63,3 millions de supports physiques CD et DVD), dont 37 millions de
titres ou singles et 3,9 millions d’albums. En deux ans, la progression est de 29 % pour
les titres uniques et de 147 % pour les albums. L’essentiel de ces ventes a été effectué à
partir du web (31,7 millions d’unités, en hausse de 114 % depuis 2007) complété du
mobile (9,3 millions d’unités, uniquement en singles, en baisse de 40 % en deux ans).
Un indice de la diversité des œuvres téléchargées est fourni par le poids des 100 premiers
titres vendus, lesquels totalisent 18 % de l’ensemble51. Certains artistes parmi le « top 50 »
ont réalisé la plus grosse part de leurs ventes par ce canal numérique52.
L’écoute de la radio sur internet est aussi en progression constante. Ainsi, un quart des
personnes de 11 ans et plus a déjà écouté la radio en direct ou en différé (« catch-up »)
et, de plus en plus, sur téléphone mobile. Sur le seul mois de mars 2010, le nombre de
téléchargements de musique à la radio a atteint 225 000. De nouveaux services de
(49) Source :
TSM-MCI-Médiamétrie-Nielsen.
(50) Selon une enquête rendue publique
en décembre 2009 par le Conseil
Général de l’Industrie de l’Energie
et des Télécommunications (CGIET),
l’Autorité de Régulation
des Communications Electroniques
et des Postes (ARCEP) et le CREDOC,
on assisterait en 2009 à un tassement
des pratiques de téléchargement
de musique : stabilisation à 56 % chez
les moins de 18 ans, légère diminution
chez les 18 ans et plus (à 18 %).
(51) : Parmi les principaux artistes
ou groupes concernés Helmut Fritz,
David Guetta, Black Eyed Peas,
Lady GaGa et Charlie Winston, mais
aussi Muse, Mika, U2, « M »
ou Grégoire.
(52) La Fouine (plus de 70 %),
Pitbull (plus de 70 %), Diam’s (69 %),
Britney Spears (67 %), Lily Allen (65 %),
Helmuth Fritz (63 %), Katy Perry (63 %),
Pussycats Dolls (60 %)
ou Eminem (59 %).
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webradio interactive ont vu le jour, permettant aux « audionautes » de naviguer au gré
de leurs affinités musicales (Musicovery, Pandora…). A noter qu’il existe depuis 2007 au
plan national un Syndicat des radios on-line (le SYROL) qui regroupe à ce jour 35 radios
à majorité musicale. Parmi les offres télévisuelles proposées par les distributeurs ADSL,
SFR est le seul opérateur à proposer à ses abonnés l’accès illimité au téléchargement de
plus de 250 000 titres de musique et 3 000 vidéo-clips. Concernant les offres disponibles
sur le téléphone mobile, Bouygues Telecom propose un bouquet thématique d’accès à
6 chaînes musicales (dont MTV, Trace TV, MCM Top).
En Aquitaine, le diagnostic fourni par l’AEC53 révèle que 69 % des foyers aquitains
possèdent un ordinateur et que 59 % disposent d’une connexion à internet (53 % en
internet à haut débit). Par ailleurs, 80 % des Aquitains sont équipés d’un téléphone
portable.
D’ici à 2011, il est prévu que soient installés au total 74 émetteurs TNT. En mars 2009,
49 % des Aquitains déclaraient être équipés pour recevoir la TNT. Quelques TV locales
diffusent sur la TNT (TV7, TVPi). Des tests ont également été réalisés de télévision
mobile personnelle (TMP) sur plusieurs villes (Bordeaux, Bayonne, Arcachon, Agen).
Le passage au numérique pour les radios diffusant en Aquitaine (rappel : 81 dont
40 locales ou associatives) est prévu à partir de février 2012, non sans inquiétudes
compte-tenu des coûts induits d’accès au réseau pour les petites radios associatives
(à l’image de Radio 103 membre de la Férarock). Près des deux tiers des Aquitains
font des achats en ligne. Cette pratique est plus utilisée en Dordogne (75 %) et moins
en Lot-et-Garonne (57 %). Elle a même baissé dans les Landes et le Lot-et-Garonne
entre 2008 et 2009.
Une étude publiée en 2008 par l’AEC sur la « génération internet » des jeunes aquitains
de 15-30 ans54 apporte quelques indications révélatrices sur les usages de cette population, qui est la plus férue des nouveaux outils numériques et de musiques actuelles.
Cette étude révèle que 97 % de ces jeunes aquitains sont équipés d’un téléphone
portable et que 46 % utilisent ce mobile pour écouter de la musique. De plus, 84 %
des jeunes aquitains de cette génération internet sont équipés d’un micro-ordinateur
et 65 % bénéficient d’une connexion internet. Ils utilisent internet autant comme
instrument de communication que de socialisation. Un tiers d’entre eux pratique le
téléchargement de musique (contre 19 % pour l’ensemble de la population) et 44 %
achètent des vidéos et de la musique en ligne. Près des deux tiers disposent d’un
lecteur MP3.
Les jeunes internautes masculins sont plus utilisateurs de musique en ligne que les
filles (50 % contre 42 % pour l’écoute de musique en ligne, 39 % contre 26 % pour
le téléchargement de musique). Cependant, les filles effectuent proportionnellement
davantage d’achats de vidéos et musiques en ligne (45 % contre 42 %).
Au chapitre des webradios musicales en Aquitaine, on peut citer l’exemple de Radio
Blagon, radio associative créée en 2004, qui s’affiche comme radio alternative spécialisée
sur la diffusion de musiques actuelles de la scène française.
2.1.2 Sorties et concerts : pratiques sociales et de socialisation
(53) « Le diagnostic 2009
de l’Aquitaine numérique » Aquitaine Europe Communication,
Octobre 2009.
Dans le champ des pratiques liées aux musiques actuelles, la participation à des spectacles
ou concerts représente une forme de pratique moins individualisée. L’écoute musicale
sur différents supports traduit une démarche essentiellement personnelle, même si à la
faveur des usages numériques celle-ci tend vers des pratiques d’échange ou de partage,
par exemple à travers des blogs ou sites communautaires. Depuis le début du 20ème siècle,
(54) « La génération Internet
en Aquitaine : équipée, connectée,
accessible » - Analytic n° 4, AEC,
Juin 2008.
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l’essor des technologies de communication (de la radio à internet) a amené les musiques
au cœur même des foyers, favorisant leur popularité.
Les sorties et concerts constituent une forme plus traditionnelle et collective d’accès à la
musique. L’enquête sur les pratiques culturelles du DEPS indique que 20 % des Français
de 15 ans et plus sortent le soir pour aller au spectacle, soit environ 10 millions de
personnes. Cette pratique est plus répandue parmi les jeunes adultes (20-24 ans, personnes
seules ou couples sans enfant) et les jeunes retraités (55-65 ans). Elle est conditionnée
par deux facteurs déterminants : le niveau d’études (35 % à 45 % des personnes ayant
effectué des études supérieures vont au spectacle) et par le niveau de ressources (41 %
des cadres, 26 % des professions intermédiaires et seulement 11 % des ouvriers).
De manière générale, les sorties se font essentiellement en couple (36 %), entre amis
(28 %) ou en famille (26 %) et la fréquence des sorties est la plus importante parmi
les moins de 35 ans.
Les sorties dans l’année (%)
Festival rock, variétés et autres genres
33
Festival musiques du monde, trad.
25
Discothèque
24
Festival classique, opéra, jazz
14
Concert autres musiques actuelles
13
Soirée karaoké
12
Music hall, variétés
11
Concert de rock
10
Concert de jazz
6
Rave party
Source : DEPS, 2008
1
0
5
10
15
20
25
30
35
Quelle place occupent les musiques actuelles dans les sorties des Français au cours de
l’année écoulée ? Quels sont les publics les plus concernés ?
Il ressort des résultats de cette enquête que les Français privilégient les sorties à l’occasion
de festivals au cours desquels ils peuvent avoir accès à une offre élargie de concerts
plutôt que les représentations plus ponctuelles dans l’année. L’une des raisons tient
probablement pour partie à des arbitrages économiques.
Un tiers des Français qui sont sortis au cours des douze derniers mois est allé à un festival
de rock, de variétés et autres musiques. Ce type de festival est le plus apprécié par les
moins de 35 ans, les étudiants (entre 40 % et 50 %), les couples d’ouvriers sans enfant
(plus de la moitié) ou d’actifs des professions intermédiaires (plus de 40 %). Les hommes
sont plus adeptes que les femmes pour ce type de sortie (37 % contre 29 %).
Un quart des Français s’est rendu à un festival de musiques du monde et traditionnelles.
Ici, le public est relativement plus important parmi les plus de 55 ans (33 % à 40 %),
anciens employés ou cadres, et parmi les agriculteurs (un tiers d’entre eux) en zones
rurales et dans les villes moyennes.
On trouve proportionnellement autant de Français de 15 ans et plus à être sortis en
discothèque au cours de l’année écoulée. Cette pratique intéresse plutôt les jeunes de
moins de 30 ans (les deux tiers des 20-24 ans), surtout parmi les étudiants ou jeunes
couples sans enfant habitant plutôt dans les grandes villes.
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Les festivals de musique classique, opéra et de jazz ont accueilli 14 % des Français de
15 ans et plus dans les douze derniers mois au moment de l’enquête. C’est parmi les cadres
ou anciens cadres ou retraités des professions intermédiaires de plus de 55 ans que se
recrute la plus forte proportion de spectateurs pour ce type de festival (environ le quart).
Presque autant de Français (13 %) sont sortis pour assister à un concert de musique
actuelle (autre que rock, jazz ou variété) durant la même période. Là encore, les moins de
35 ans des zones urbaines ou agglomérations et ayant effectué des études supérieures
(ou en cours d’études) sont proportionnellement plus nombreux (20 % à 25 %), étudiants
mais aussi jeunes couples sans enfant cadres ou de professions intermédiaires.
Une autre pratique de sortie appréciée par 12 % des personnes de 15 ans et plus
concerne les soirées karaoké, notamment parmi les jeunes générations (20 % à 25 %
parmi les moins de 30 ans).
Les spectacles de music-hall et variétés ont attiré 11 % des Français de 15 ans et plus,
avec ici un profil de public plus âgé, plutôt parmi les cadres et dans une moindre mesure
les professions intermédiaires ou les jeunes retraités.
Si les festivals de rock drainent la plus forte proportion de français de 15 ans et plus, les
concerts de rock ont accueilli 10 % de cette population au cours des douze derniers
mois. Cette proportion est restée assez stable depuis 20 ans. Un point remarquable à
noter tient à une moindre spécificité générationnelle, puisque l’on constate une surreprésentation de publics parmi les 15 à 45 ans (15 à 20 %, la plus forte proportion se
situant dans la tranche des 20-25 ans). Un autre trait remarquable est un relatif brassage
social, avec une nette sur-représentation pour ce type de sortie parmi les cadres, les étudiants (dont lycéens) et les professions intermédiaires. Enfin, les concerts de rock sont
plus prisés par les hommes (12 %) que par les femmes (8 %).
Le public des concerts de jazz (fréquentés par 6 % des Français de 15 ans et plus au
cours de l’année écoulée) est relativement plus âgé, avec un assez net marquage en
fonction du niveau d’études (études supérieures) et un plus fort marquage social (17 %
parmi les cadres et professions intellectuelles supérieures), même si l’on peut noter une
proportion non négligeable parmi les professions intermédiaires et les étudiants (11 %).
Enfin, l’effet générationnel est encore plus marqué pour les sorties en « rave party » (1 %
de la population de 15 ans et plus mais 7 % parmi les 20-24 ans).
Selon une étude conduite en 1998 dans plusieurs salles de musiques actuelles, le public
des concerts de musiques amplifiées est composé aux trois quarts de spectateurs de
20 à 30 ans. Néanmoins, la part des publics adultes, qui viennent parfois en famille, est
loin d’être négligeable.
Outre les étudiants, les spectateurs de ces concerts comprennent une part importante
de personnes issues des classes moyennes (employés, professions intermédiaires). C’est
un public majoritairement masculin (aux deux tiers). Ces caractéristiques témoignent
cependant d’une tendance au brassage social et à la féminisation des publics des
concerts de musiques amplifiées.
D’après les éléments recueillis par le Centre National des Variétés pour l’année 200855,
plus de 40 300 représentations de variétés et de musiques actuelles ont été organisées
cette année-là en France, dont au moins 11 % dans le cadre d’un festival (pourcentage
considéré comme sous-estimé selon le CNV) et 15 % gratuites. Ces représentations
ont totalisé plus de 16 millions d’entrées payantes (pour 34 094 représentations, hors
représentations gratuites).
(55) « Eléments statistiques
sur la diffusion des spectacles de variétés
et de musiques actuelles en 2008 » CNV, juillet 2009.
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Lieux des représentations payantes
Autres
bâtiments (1 %)
Chapiteaux,
structures mobiles (1 %)
Plein air (3 %)
Etablissements
de loisirs (3 %)
Salles de spectacles spécialisées
musqiques actuelles et variété (43 %)
Equipements
polyvalents (13 %)
Parcs expo (3 %)
Salles
pluridisciplinaires (21 %)
Salles de spectacle
spécialisées autres (12 %)
Source : CNV, 2009
Si la plus grosse part des spectacles de variétés et musiques actuelles se déroule dans des
salles spécialisées (39 %), cette réalité correspond surtout aux représentations payantes.
Les spectacles gratuits se tiennent plutôt en plein air ou dans des établissements moins
spécialisés (bars, hôtels-restaurants, équipements polyvalents).
Lieux des représentations gratuites
Indéterminé (15 %)
Salles de spectacles spécialisées
musiques actuelles et variété (13 %)
Salles pluridisciplinaires (3 %)
Parcs expo
(1 %)
Plein air (19 %)
Equipements
polyvalents (16 %)
Chapiteaux,
structures mobiles
(1 %)
Autres bâtiments (14 %)
Etablissements de loisirs (18 %)
Source : CNV, 2009
Sur les 40 300 représentations enregistrées en 2008, près des trois quarts portent
exclusivement sur la chanson et les musiques actuelles, soit plus de 29 000 dont près
de 24 000 payantes56. Celles-ci ont totalisé 12,9 millions de spectateurs, soit près de
540 spectateurs par représentation. Environ 16 % des représentations (chansons et
musiques actuelles seulement) se déroulent dans le cadre de festivals, qui drainent plus
du quart (27 %) des spectateurs, soit près de 3,5 millions d’entrées.
C’est la chanson qui enregistre le plus de représentations (près de 8 000) et le plus
grand nombre de spectateurs (4,6 millions), soit un peu plus du tiers des spectacles de
variétés et musiques actuelles (hors humour et autres spectacles).
(56) Les autres catégories
de représentations concernent
d’autres types de spectacles
(humour musical et non musical,
sketches, one man show,
spectacles sur glace, illusionnistes…).
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Représentations par genres musicaux
Musiques du monde (11 %)
Musiques
électroniques (3 %)
Chanson (34 %)
Rap, hip-hop,
reggae (6 %)
Pop-rock
et dérivés (21 %)
Comédie musicale (5 %)
Jazz et musiques impro (20 %)
Répartition des entrées par genres musicaux
Musiques du monde (8 %)
Musiques électroniques (3 %)
Chanson (36 %)
Rap, hip-hop,
reggae (9 %)
Pop-rock et dérivés (27 %)
Comédie musicale (6 %)
Jazz et musiques impro (11 %)
Source : CNV, 2009
Pour la chanson, 14 % des représentations et 21 % des entrées totales sont effectuées
dans le cadre de festivals. La moyenne d’entrées par spectacle pour ce genre musical est
de 580 par spectacle (870 en festival).
Le second genre qui génère le plus de spectacles et de publics concerne le pop-rock et
les musiques dérivées. Ce genre totalise plus de 5 000 représentations et 3,5 millions
d’entrées. 13 % des spectacles et 30 % des entrées sont réalisés dans le cadre de festivals.
La fréquentation moyenne pour cette catégorie est de 690 spectateurs (près de 1 600
lors des festivals).
Le jazz et les musiques improvisées font l’objet d’un nombre relativement important de
spectacles (20 % du total soit 4 700 dont un quart dans le cadre de festivals), mais drainent un public relativement moins important (11 % des entrées totales soit 1,39 million
dont près de la moitié au cours de festivals). La jauge moyenne par représentation est
de l’ordre de 300 entrées (540 à l’occasion de festivals).
Le même constat, bien que plus atténué, peut être opéré pour le genre musiques du
monde : 11 % du total des représentations (soit environ 2 700) dont un tiers dans le cadre
de festivals et 9 % des entrées (près de 1,1 million dont 39 % lors de festivals). Le nombre
moyen d’entrées est de l’ordre de 400 spectateurs (790 en configuration festivalière).
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Le genre rap – hip-hop, reggae et assimilés a généré en 2008 un peu plus de 1 400
représentations (soit 6 % du total dont 11 % dans le cadre de festivals) et 1,1 million
d’entrées (9 % du total, dont un cinquième lors de festivals). Ces représentations accueillent
en moyenne un public assez nombreux (790 entrées et 1 400 en format festival).
Avec un peu plus de 1 200 représentations en 2008 et 750 000 entrées, les comédies
musicales ne représentent que 5 % des spectacles à caractère musical et 6 % des entrées
(moyenne de 600 entrées environ par représentation). Il n’existe quasiment pas de
festival dans ce genre musical.
Enfin, près de 390 000 spectateurs (dont plus du tiers en tant que festivaliers) ont participé en 2008 à près de 800 concerts de musiques électroniques (un tiers dans le cadre
de festivals) selon la base du CNV. Cela équivaut à une jauge moyenne de 490 entrées
par spectacle (près de 1 500 en festival).
L’enquête DEPS révèle en outre que 60 % des festivaliers (tous genres confondus)
participent à des événements à proximité de leur domicile (commune ou région).
Un tiers se rend à des événements en France mais hors de leur région de résidence et
15 % se déplacent à l’étranger.
On ne dispose pas de données détaillées ou exploitables sur les habitudes de sorties
des Aquitains intéressant les musiques actuelles. Une extrapolation à partir des
résultats de l’enquête nationale conduite par le DEPS reste délicate à opérer, compte
tenu des caractéristiques sociologiques à prendre en compte (en fonction de l’âge,
du poids respectif des catégories sociales, des zones d’habitat…).
Néanmoins, la base de données du Centre National des Variétés donne de précieuses
indications à partir des informations recueillies auprès des organisateurs de spectacles
disposant d’une licence.
Ainsi, selon cette source, 1 250 représentations (dont 16 % gratuites) portant sur la
chanson et les musiques actuelles ont été organisées en Aquitaine dans le courant de
l’année 2008 (hors humour et autres spectacles)57. Ces représentations ont accueilli
plus de 510 000 entrées (uniquement spectacles payants, dont 8 % d’entrées exonérées).
L’Aquitaine représente 4,35 % du nombre total de représentations en France et 4 %
du nombre total d’entrées.
Par rapport à l’année 2007, on constate un accroissement du nombre de spectacles
de chanson et musiques actuelles en Aquitaine (+ 9 %) mais un tassement des entrées
(moins 10,5 %), à l’image des résultats enregistrés au plan national. L’une des explications
possibles tient au contexte de crise économique, accompagné d’un accroissement du
chômage, et aux réductions probablement consenties par les ménages aquitains sur
les sorties et sur leurs dépenses de loisirs.
Nombre de représentations en Aquitaine par genres
Jazz, musiques impro
385
Chanson
360
Pop-rock et assimilés
259
Musiques du monde
Rap, hip-hop, reggae
(57) Au total, 202 représentations
dont 126 dans le registre « humour »
et 76 dans le registre « autres »
(spectacles sur glace, spectacles
aquatiques, attractions visuelles,
illusionnistes…) pour un nombre total
d’entrées de 108 026.
■ Représentations
gratuites
63
Musiques électroniques
20
Comédie musicale
14
0
41
■ Représentations
payantes
149
50
100
150
200
250
300
350
400
Source :
CNV, 2009
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Le genre musical qui donne lieu à la programmation en Aquitaine du plus grand
nombre de représentations est celui du jazz et des musiques improvisées (30 % du
nombre total de représentations, un quart des seules représentations payantes). Ce
constat éclaire sous un autre angle celui déjà opéré à propos des achats de CD.
Toutefois, ces concerts n’ont attiré que 9 % de l’ensemble du public ayant participé à
des spectacles de musiques actuelles (dont chanson) en Aquitaine, soit environ 46 000
entrées aux représentations payantes en 2008. Environ 160 spectateurs en moyenne
ont assisté à ce type de concert.
C’est aussi le genre pour lequel on observe le plus grand nombre de représentations gratuites (près de 50 % de l’ensemble des représentations gratuites données en Aquitaine
cette année-là et le quart du nombre de spectacles de jazz et musiques improvisées).
La chanson ou variété est le genre le plus prisé. Il représente 38 % des entrées
payantes, avec près de 200 000 entrées, pour 300 représentations (29 %) sur la base
du CNV en 2008 (soit environ 650 spectateurs par spectacle).
Représentations par genres en Aquitaine
Musiques du monde (12 %)
Musiques
électroniques (2 %)
Chanson (29 %)
Rap, hip-hop,
reggae (5 %)
Comédie musicale (1 %)
Pop/rock
et assimilés (21 %)
Jazz, musiques impro. (30 %)
Source : CNV, 2009
Entrées par genres en Aquitaine
Musiques du monde (7 %)
Musiques électroniques (1 %)
Chanson (38 %)
Rap, hip-hop,
reggae (13 %)
Pop/rock et assimilés (28 %)
Source : CNV, 2009
Comédie musicale (4 %)
Jazz, musiques impro. (9 %)
Les concerts ou spectacles de rock-pop et genres assimilés constituent le second
genre musical drainant plus d’un quart du public (28 % des entrées payantes, soit
142 000 entrées en 2008) et générant un cinquième des représentations (21 %).
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Chaque concert ou représentation a accueilli 580 spectateurs en moyenne (ceci masquant
probablement de fortes différences entre festivals, comme celui de Garorock58, et les
concerts donnés dans des salles). Même s’ils génèrent assez peu de représentations
(5 %) du total, les concerts de rap, hip-hop, reggae et assimilés ont généré 13 %
des entrées (65 000 spectateurs en 2008). Au regard du nombre de spectacles,
la moyenne des entrées est élevée (près de 1 200 entrées par spectacle payant),
certainement en raison du poids du festival Reggae Sun Ska en Gironde (16 000
spectateurs en 200859). Cette même année, les musiques du monde ont généré près
de 150 représentations (soit 12 % du total) et plus de 36 000 entrées payantes (7 %),
ce qui représente une moyenne de fréquentation d’un peu moins de 300 spectateurs
par représentation. Cette moyenne est identique pour les concerts de musiques
électroniques, qui pèsent encore assez peu dans cet ensemble (2 % des représentations
et 1 % des entrées soit 5 700 en 2008).
L’Aquitaine se distingue ainsi par l’importance relative du nombre de représentations
dans certains genres musicaux (jazz et musiques improvisées, pop-rock et assimilés et
dans une moindre mesure musiques du monde), au regard des résultats nationaux.
Toutefois, le constat est tout autre du point de vue des publics. A l’éclairage du poids
relatif de l’Aquitaine pour le nombre d’entrées, la région se démarque dans le genre
« rap, hip-hop, reggae et assimilés » (5,8 % des entrées totales au plan national pour
ce genre en 2008). Ceci s’explique sûrement en raison de l’impact de certains événements ou festivals (Reggae Sun Ska). Les deux genres musicaux qui suivent sur la base
de ce critère des entrées se situent légèrement au-delà de 4 % du total national
(chanson, pop-rock et genres assimilés), soit dans la moyenne globale de la place
de l’Aquitaine. L’approche du poids des festivals dans cette analyse régionalisée des
données du CNV n’est pas disponible. Toutefois, ces informations apportent des indications
précieuses sur les habitudes de sorties des Aquitains (mais pas exclusivement compte-tenu
de la notoriété et de la période de programmation de certains événements durant l’été,
attirant aussi des visiteurs extérieurs à l’Aquitaine). Par ailleurs, ces résultats dépendent
aussi de la structure de l’offre, tant du point de vue des équipements (nombre de
lieux de diffusion, capacités), que des initiatives liées à l’organisation d’événements
ou festivals dont on peut mesurer indirectement l’impact sur le nombre d’entrées, ou
encore de la programmation. Enfin, ils reposent aussi sur les capacités des Aquitains
à exercer ces pratiques de sortie, qui sont étroitement liées aux caractéristiques
socio-démographiques (niveau d’étude, sensibilité à l’écoute et à la pratique musicale,
âge, structure du foyer…) et économiques (revenus disponibles) de la population.
2.2 De l’écoute à la pratique artistique :
quand le spectateur s’engage dans la pratique amateur
L’analyse des pratiques liées aux musiques actuelles inclut, outre l’écoute à partir de
différents supports ou à l’occasion de sorties, la pratique instrumentale seule ou en
groupe. Elle concerne également les différents modes d’apprentissage et de transmission
de la pratique musicale/instrumentale au regard des spécificités des musiques actuelles.
2.2.1 Dis-moi de quel instrument tu joues…
L’enquête nationale sur les pratiques culturelles des Français révèle que 23 % de la population de 15 ans et plus déclare savoir jouer (au moins un peu) d’un instrument de
musique et que 12 % ont joué au cours des douze derniers mois. Depuis vingt ans, cette
pratique instrumentale est assez constante, bien que l’on perçoive une légère régression,
notamment parmi les plus jeunes (chez les 15-19 ans, le taux est passé de 60 % en 1997
(58) L’édition 2010 a drainé
plus de 56 000 spectateurs.
(59) Près de 30 000 spectateurs
en 2009.
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à 46 % en 2008) et certaines catégories de la population (ex : parmi les employés,
ce taux est passé pour la même période de 29 % à 18 % - pour les titulaires d’un BEPC,
de 36 % à 22 %). Peut-être faut-il voir dans ce constat pour partie les effets d’une réduction
des enseignements artistiques à l’école mais surtout la concurrence exercée par d’autres
types de pratiques ou de loisirs (celles liées aux écrans et notamment aux pratiques
numériques). Si l’on considère la part de la population de 15 ans et plus ayant pratiqué
un instrument de musique traditionnel et ceux ayant également ou exclusivement
exercé cette pratique à partir de l’ordinateur, ce sont 18 % des Français de 15 ans et
plus qui sont désormais concernés par la pratique musicale.
Ce sont les moins de 25 ans (lycéens, étudiants pour 30 % à 40 %) et dans une moindre
mesure les jeunes adultes (20 % à 25 %) qui ont proportionnellement le plus pratiqué
d’un instrument au cours des douze mois écoulés au moment de l’enquête du DEPS. Les
garçons sont plus musiciens que les filles (27 % des hommes et 21 % des femmes de
15 à 30 ans), cette sur-représentation masculine s’observant globalement à tous les
âges. Le taux de pratique a progressé depuis 1997 parmi les 35-44 ans (passant de 9 %
à 13 %) et parmi les 55-64 ans (de 4 % à 7 %). Le fait de résider en zone urbaine
(plus de 20 000 habitants) accroît sensiblement le taux de pratique instrumentale.
Environ 8 % des Français de plus de 15 ans ayant joué d’un instrument durant l’année
écoulée ont exercé en groupe (chant ou musique). Là encore, l’effet générationnel est
flagrant : ce taux passe à 12 % pour les 20-24 ans et à 20 % pour les 15-19 ans. Il faut
cependant noter que ces taux ont évolué de manière assez inégale par rapport à la précédente enquête de 1997. Ainsi, le taux de pratique en groupe a subi un affaissement
chez les plus jeunes (pour les 14-19 ans, il est passé de 26 % à 20 % et de 14 % à 12 %
pour la tranche d’âge 20-24 ans). Il progresse très légèrement parmi les 35-44 ans et chez
les plus de 65 ans. L’exploitation des données issues de l’enquête n’a pas permis d’affiner
la nature des groupes concernés (rock, jazz, musique classique, chorale, fanfare…).
Enfin, la création musicale sur ordinateur (avec logiciels adaptés) est une pratique émergente
qui a intéressé 5 % des Français de 15 ans et plus. C’est essentiellement une pratique
de jeunes (de 16 % à 17 % parmi les lycéens et étudiants, 9 % pour les 25-34 ans) et
essentiellement masculine (22 % des hommes de 15 à 30 ans contre 6 % pour les
femmes dans la même classe d’âge).
Selon une étude réalisée par la Chambre Syndicale de la Facture Instrumentale en
2006/200760, plus de 560 000 instruments de musique sont vendus chaque année (hors
marché d’occasion), volume qui semble en progression. Les instruments les plus vendus
sont les guitares (les deux tiers du volume total, 23 % pour les guitares et basses
électriques dont la part s’accroît). On mesure là aussi l’influence des nouvelles pratiques
musicales, avec une hausse très sensible des ventes d’instruments numériques (pianos
numériques, batteries électroniques et claviers numériques portables), alors que le
volume des ventes d’instruments acoustiques est en baisse. La part des instruments à
vent et des instruments à cordes frottées reste assez stable.
Par conséquent, derrière une apparente stabilité des pratiques musicales ou instrumentales
dans la population, on assiste à une profonde transformation qui s’exprime notamment
par des phénomènes de comportements générationnels (nouvelles formes de pratiques
parmi les jeunes liées aux outils numériques, signes de pratique accrue parmi les adultes).
Même si l’on ne dispose pas d’éléments d’analyse approfondis sur les comportements
de la population régionale dans ce domaine, nul doute que l’Aquitaine n’échappe guère
à cette tendance à quelques nuances près tenant à la structure socio-démographique de
sa population, c’est-à-dire à la structure par âge, aux revenus, au niveau de formation…
(60) « Le marché français des
instruments de musique et accessoires –
Synthèse et tendances » Chambre Syndicale
de la Facture Instrumentale,
Septembre 2008.
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D’autres indices de cette transformation des pratiques sont toutefois perceptibles à
travers l’approche des publics concernés par les différentes formes de transmission et
d’apprentissage de la pratique instrumentale, que ce soit dans le cadre des écoles de
musique reconnues par l’Etat ou des structures associatives d’apprentissage de musiques
actuelles en région.
2.2.2 Apprentissage et transmission :
des voies diversifiées d’accès aux pratiques
Parmi les enseignements artistiques reconnus par l’Etat (36 Conservatoires de Rayonnement
Régional et 101 Conservatoires de Rayonnement Départemental), l’enseignement musical
est de loin celui qui génère le plus d’adeptes, même si les effectifs des Conservatoires et écoles
de musique peuvent paraître modestes au regard du nombre de pratiquants révélé par
les enquêtes du DEPS. Si l’on considère le nombre de personnes ayant joué d’un instrument de musique au cours des douze derniers mois, cela concernerait 1,27 million de
jeunes de 15 à 19 ans et plus de 990 000 jeunes de 20 à 24 ans.
Au total, ce seraient environ 6,4 millions de Français de 15 ans et plus qui déclarent avoir
joué d’un instrument au cours de l’année écoulée, d’après les résultats de l’enquête
du DEPS, dont un tiers de 15 à 25 ans. Il faut en outre considérer que les élèves en
formation dans les écoles de musique (dont Conservatoires à rayonnement régional
ou départemental) accueillent des enfants dès l’âge de 5 ans (environ 45 % à 50 % de
moins de 12 ans), population non prise en compte dans cette enquête.
Ainsi, près de 140 000 élèves fréquentent les 137 établissements concernés en
2007/2008, soit 87 % du nombre total d’élèves suivant des enseignements artistiques dans
les conservatoires. En dix ans, cet effectif a progressé de 6 %. Le public des Conservatoires
de rayonnement régional et départemental se décompose de la façon suivante :
Répartition des effectifs “musique” en CRR et CRD en France Métropolitaine (2006-2007)
25 ans et plus (16 %)
Moins de 8 ans (15 %)
18 ans à 24 ans (11 %)
8 ans à 11 ans (29 %)
12 ans à 17 ans (29 %)
Source : CNV, 2009
L’effectif moyen par établissement est de l’ordre du millier d’élèves. Environ 13 % des
effectifs sont des élèves bénéficiant d’horaires aménagés dans le cadre du cursus scolaire.
Au vu de ces chiffres, on peut en déduire qu’une part significative de l’apprentissage
musical s’opère en dehors de ces écoles nationales et conservatoires, à savoir dans le
cadre des multiples écoles municipales et associatives (ou plus largement privées) existantes en France. Or, les données sur l’activité de ces écoles ou structures sont très
éparses et délicates à rassembler. Il est par conséquent difficile de mesurer la population
en apprentissage musical.
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L’annuaire officiel de la musique 2010 publié par l’IRMA recense un peu plus de 400
structures de formation musicale au plan national dont une partie des Conservatoires à
rayonnement régional et de ceux à rayonnement départemental, auxquels s’ajoutent
plus de 260 autres structures (écoles municipales et associatives). Ainsi, la Fédération
Nationale des Ecoles d’Influence Jazz et Musiques Actuelles (FNEIJMA) regroupe 35
structures de formation au plan national, intéressant plus de 9 000 élèves et 600 artistesenseignants. La Fédération Nationale des Centres Musicaux Ruraux (CMR) et des
Carrefours d’Animation et d’Expression Musicale (CAEM) rassemble une quarantaine de
structures réparties sur le territoire national (12 associations départementales, 23 CAEM
et 4 centres « musique et découverte »). Les activités de cette fédération touchent
environ 130 000 personnes et mobilisent quelque 400 musiciens.
À la distinction structurelle des établissements d’enseignement se greffe une distinction
de nature pédagogique, sinon culturelle, propre à l’apprentissage des musiques
actuelles : celle du mode de transmission, lequel alimente quelques débats. En effet, les
conservatoires de rayonnement régional et départemental ou les écoles de musique
municipales sont essentiellement axés sur l’apprentissage de la musique au sens classique
et patrimonial du terme. Ils privilégient un mode d’apprentissage théorique et pratique
basé sur une culture écrite, celle du solfège et de la partition, et un mode de transmission
qui repose avant tout sur l’apprentissage individuel susceptible d’être sanctionné par un
diplôme (Certificat d’Etudes Musicales et Diplôme d’Etudes Musicales), y compris pour
certains établissements dispensant un enseignement en musiques actuelles. La FNEIJMA
a également depuis 1997 mis en place un certificat de « musicien interprète des
musiques actuelles »61.
Une autre approche est représentée notamment par le réseau des « rock schools » créées
à partir de la fin des années 1980, pour lequel la délivrance d’un diplôme spécifique
de musiques actuelles est une forme de non-sens, à la fois compte-tenu de la réalité
des pratiques (essentiellement une pratique amateur de loisirs) et du marché de l’emploi
des artistes-musiciens. Force est de constater que le parcours vers la scène et vers une
éventuelle notoriété dépend certes de plusieurs facteurs mais aucunement de la possession
d’un quelconque « diplôme ». La plupart des acteurs entendus dans le cadre de ce travail
sur le thème de l’apprentissage musical62 sont au moins d’accord sur ce fait. La détention
de l’un de ces diplômes présente néanmoins un réel intérêt pour ceux des musiciens qui
souhaitent tirer pour partie revenu de leur pratique (sinon passion) musicale en devenant
eux-mêmes professeur de musique ou formateur. C’est peut-être actuellement le
débouché le plus fiable, compte tenu de la demande sociale. Il faut néanmoins relever
que la création des diplômes d’Etat ne s’est pas accompagnée de l’ouverture parallèle
de postes d’enseignants dans les conservatoires et écoles concernés.
L’autre point de divergence porte sur les méthodes pédagogiques. Dans les « rock
schools », l’apprentissage passe avant tout par la pratique instrumentale, sans nécessité
de maîtrise du solfège ou de lecture de partition, et essentiellement par une pratique en
groupe. Cette forme d’apprentissage, qui s’apparente à la méthode Freinet, répond plus
directement à la nature de la demande sociale, aussi bien celle de publics n’ayant pu
accéder à la voie traditionnelle des conservatoires et celle qui s’exprime spontanément
chez beaucoup de jeunes, enfants et adolescents : apprendre vite, avec peu de contraintes,
entre copains ou de « pair à pair ».
Face à cette demande, l’apprentissage en vigueur dans le cursus classique semblait mal
adapté. Même si la formation dispensée dans les « rock schools » s’appuie sur les acquis
de la culture musicale classique, elle tient aussi compte de l’évolution des technologies
qui caractérisent l’univers des musiques amplifiées. La part de l’écrit dans cette forme
d’apprentissage reste très limitée, lequel n’est pas sanctionné par un diplôme. Le niveau
(61) Depuis 2004,
le nombre de certifiés
n’a cessé de diminuer,
passant de 117 à 69 en 2008.
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de pratique des élèves est évalué à leur entrée en formation et les pratiques de groupes
mêlent plusieurs niveaux. Les principes de mise en place de ce dispositif d’apprentissage
ont été les suivants :
- la simplicité en s’inspirant de la culture orale propre aux musiques populaires (en
s’appuyant sur l’écoute mais aussi sur des grilles d’accords, des tablatures),
- l’urgence en réponse au désir d’immédiateté, l’apprentissage collectif (cours collectifs
par instrument), le rythme (chanté, parlé, frappé),
- la création, plutôt que la reproduction systématique d’un répertoire du passé,
- le regroupement (ateliers de jeu en groupe).
Par conséquent, les défenseurs de cette approche estiment que les enseignements
dispensés dans les établissements de culture « classique » ne correspondent ni aux
besoins ni aux attentes des élèves dans ce registre esthétique. Or, jusqu’à la création des
« rock schools », la demande sociale d’apprentissage d’un instrument se réalisait soit
dans le cadre très structuré des conservatoires ou écoles de musique dites classiques, soit
par le biais de cours particuliers, soit encore « sur le tas ».
Une démarche d’organisation de l’enseignement des musiques rock a été engagée qui
s’est notamment concrétisée par la mise en place d’une charte du réseau « rock school ».
Du point de vue des pratiques sociales, il importe de placer ce débat face à une réalité :
celle d’une demande sociale (parfois fantasmée), alimentée par les pratiques d’écoute,
attisée par certains grands médias et par l’impact publicitaire des industries culturelles.
Face à cette réalité, le débat quelquefois polémique entre les tenants de chacune des
méthodes pédagogiques semble secondaire. Les élèves entrant dans les conservatoires
et autres écoles de musique classique expriment une demande croissante de pratique de
musiques actuelles, demande face à laquelle les établissements essaient parfois de répondre.
Sur 137 établissements, 81 offrent une formation instrumentale individuelle aux instruments
jazz (plus de 3 000 élèves), 20 aux instruments de musique électroacoustique (333 élèves),
40 aux instruments de musiques actuelles amplifiées (1 650 élèves), 105 une formation
collective en ensemble jazz (3 700 élèves), 50 une formation collective aux musiques
traditionnelles (près de 1 300 élèves) et 33 une formation collective aux musiques
actuelles amplifiées (900 élèves)63. Pour cette dernière catégorie, cela ne concerne que
0,6 % des effectifs en enseignement musical et 1,2 % si l’on prend en compte les élèves
en pratique individuelle de musiques actuelles amplifiées. Pour l’ensemble du champ
intéressant les musiques actuelles (jazz, musiques actuelles amplifiées, musiques
traditionnelles), l’effectif concerné n’atteint pas 5 % du total. Même si la tendance de ces
effectifs est à la hausse, en partie dans le prolongement de la création d’un diplôme
d’études musicales sur les musiques actuelles (désormais complété par un diplôme
d’enseignement supérieur d’instrumentiste de groupe en musiques amplifiées), la
marge de progression reste donc encore importante. Ceci explique qu’une partie de ces
élèves passe ensuite dans le réseau des écoles associatives du type « rock school » qui
ont d’ailleurs du mal à répondre à l’importance de la demande.
De leur côté, les publics accueillis dans ces écoles associatives peuvent, par le biais d’un
apprentissage réalisé sur la base de méthodes alternatives, être tentés d’approfondir
leurs connaissances musicales (solfège, lecture de partitions). En outre, nombre de professeurs
enseignant dans ces écoles sont passés par un enseignement musical plus classique.
Sans pour autant minimiser la dimension pédagogique, le débat semble plus fondamentalement tenir à des considérations d’une autre nature : celles liées à la dimension
économique. Pour les musiciens débutants, l’accès aux conservatoires et écoles municipales
présente un avantage majeur : du fait de l’aide importante apportée par les collectivités
gestionnaires et les autres partenaires publics64, les frais d’inscription à la charge des
(62) Audition de MM. ALAUX (CIAM),
FONTANILLE (Rock et Chanson), GACHIS
(Conservatoire de musique des Landes)
et MARROUAT (Rock School Barbey)
des 1er octobre 2009 et 25 février 2010
– Entretien avec MM. Jules DUBOIS
et Jean-Luc PORTELLI
(Conservatoire National de Région).
(63) « Données sur l’enseignement
de la musique dans les CRR
et les CRD de métropole –
Année 2006-2007 » - DEPS.
(64) Pour les seuls CRR et CRD :
92 % d’aides publiques
pour l’année 2006-2007
sur un budget total de 448,1 M€,
investissement compris.
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intéressés ou de leurs familles restent somme toute modestes. Il n’en va pas de même
pour les écoles associatives pour lesquelles, malgré quelques aides, l’exigence d’équilibre
économique se traduit par des frais d’inscription souvent supérieurs à ceux pratiqués
dans les conservatoires et écoles municipales de musique.
Cette dichotomie traduit un paradoxe : une forte demande sociale de pratique musicale
autour des musiques actuelles peu prise en compte et peu adaptée dans les structures
d’enseignement musical classiques largement financées sur fonds publics d’une part,
d’autre part une réponse mieux adaptée à la demande sociale et répondant tout autant
à un intérêt de portée générale mais peu soutenu, dont l’accès à un plus large public est
de ce fait limité pour raisons économiques.
Ce constat, qui n’est pas réductible au seul objet de la formation, soulève de fait la question
du déséquilibre de l’intervention publique au regard de la réponse apportée à la demande
sociale de pratique et d’apprentissage des musiques actuelles.
L’analyse de la situation en Aquitaine illustre bien ce constat national.
En Aquitaine, il existe 2 Conservatoires de rayonnement régional (Bordeaux et
Bayonne) et 4 Conservatoires de rayonnement départemental. Ces établissements
accueillent environ 7 600 élèves (année 2006-2007). Les effectifs se répartissent de
la manière suivante :
Répartition des effectifs “musique” en CRR et CRD
en Aquitaine (2006-2007)
25 ans et plus (13 %)
Moins de 8 ans (18 %)
18 ans à 24 ans (9 %)
8 ans à 11 ans (31 %)
12 ans à 17 ans (29 %)
Source : MCC-DEPS
La population des établissements aquitains fait apparaître un profil légèrement plus
jeune que la moyenne nationale (un peu plus d’enfants de moins de 8 ans et une plus
faible proportion de 25 ans et plus). L’effectif moyen par établissement est également
plus élevé : près de 1 300 élèves en moyenne. Les CRR et CRD aquitains mobilisent
un peu plus de 400 enseignants. On compte une part d’enseignants titulaires plus
forte en moyenne en Aquitaine (77 %) qu’au plan national (70 %). Enfin, le
nombre d’enseignants titulaires d’un certificat d’aptitude ou d’un diplôme d’Etat est
par contre moins élevé (53 % contre 65 %).
La part des effectifs suivant des enseignements sur les musiques actuelles et assimilées
est également faible. Pour l’année 2006-2007, 2 établissements proposaient une
formation à la pratique musicale collective en musiques actuelles amplifiées
(25 élèves), 3 établissements une formation à la pratique en ensemble jazz (94 élèves)
et 2 établissements pour la pratique musicale collective en musique traditionnelle
(63 élèves). Pour les enseignements en pratique instrumentale individuelle, 4 établis48
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sements offraient une formation en instruments jazz (40 élèves), 3 établissements en
instruments de musique traditionnelle (90 élèves) et 1 établissement en instruments
de musiques actuelles amplifiées (114 élèves). Dans l’ensemble, environ 180 élèves
ont suivi un enseignement en pratique musicale collective dans le domaine des
musiques actuelles (dont jazz et musiques traditionnelles) pour l’année 2006-2007,
soit 2,3 % des effectifs totaux et moins de 8 % des effectifs en pratique collective.
Leur part est encore plus faible parmi les effectifs en formation instrumentale individuelle (moins de 4 % avec près de 250 élèves). Si l’on ne considère que le seul domaine
des musiques actuelles amplifiées, cela ne représente qu’un peu plus de 1 % des
élèves en pratique collective et moins de 2 % en pratique instrumentale individuelle.
Le Conservatoire de rayonnement régional de Bordeaux accueille près de 2 000
élèves65. Il propose une formule d’enseignement théorique et pratique consacrée au
jazz et aux musiques actuelles amplifiées qui mobilise une équipe pédagogique de
7 personnes. Cet enseignement est destiné aussi bien à des groupes de musiciens
(accompagnement de projet) ou à des adolescents (10-16 ans), sous forme de cours
individuels et de pratique collective. Le Conservatoire de Bordeaux a également
intégré dans le cadre de son enseignement une formation de musique assistée par
ordinateur et des ateliers d’improvisation. Les coûts annuels d’inscription varient de
180 € pour les résidents bordelais à 340 € pour les habitants extérieurs à la commune
(une formule gratuite est proposée sous certaines conditions aux familles bordelaises
non imposables). Un diplôme d’études musicales en jazz et un autre en musiques
amplifiées (dont tronc commun avec possibilité d’obtention d’un double diplôme)
ont été lancés pour la rentrée 2009-2010. Une quinzaine d’élèves se sont inscrits
(majoritairement en jazz) pour un effectif total d’une centaine d’élèves concernés par
les apprentissages jazz et musiques actuelles. Sur le plan pédagogique, le renforcement de certains cours (guitare électrique notamment), l’élargissement des enseignements (basse, saxophone, chant) font partie des projets destinés à conforter ce
département jazz-musiques actuelles. Par ailleurs, un autre écueil concerne les possibilités d’utilisation d’une salle de répétition (L’Atelier), actuellement trop limitées.
Le Conservatoire de musique des Landes est l’établissement le plus résolument
engagé dans cette voie classique d’enseignement de la pratique des musiques actuelles
amplifiées66. Il accueille un peu plus de 2 000 élèves au total, dont 10 % fréquentant
les cours théoriques et pratiques consacrés aux musiques actuelles (140 adolescents et
60 adultes). Il mobilise 18 professeurs auxquels s’ajoutent des enseignants contractuels
ou vacataires. L’implication de cet établissement dans les musiques actuelles depuis
le début des années 1990 résulte de plusieurs constats :
- une perte d’élèves inscrits dans les disciplines classiques, malgré un intérêt pour la musique,
- un choix d’apprentissage instrumental « d’attente » (le piano avant les claviers
modernes, la guitare avant la guitare basse ou électrique, la percussion avant la batterie…),
- un manque d’intérêt des élèves attirés par les musiques actuelles pour le répertoire
et les textes proposés en formation,
- un intérêt plus général des jeunes pour les ateliers ou formations collectives abordant
des répertoires dédiés aux musiques actuelles.
Le cursus propose un tronc commun d’enseignement classique en cycle 1 avant
spécialisation (jazz, musiques actuelles ou musique traditionnelle). Toutefois, afin de
mieux répondre aux attentes du public adolescent et à la faiblesse du tissu d’écoles
associatives sur le territoire, un cycle 1 spécifique a été instauré depuis 2005.
Les instruments les plus demandés par les élèves concernés sont la guitare, la batterie,
la basse et les claviers.
(65) Entretien du 10 mai 2010
avec MM. DUBOIS.
(66) Audition de M. GACHIS
du 25 février 2010.
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Le Conservatoire des Landes intègre également dans ses cours la pratique de la
Musique Assistée par Ordinateur, mais aussi des enseignements plus théoriques
(culture générale, analyse des formes et techniques musicales…) ou liés à l’environnement du musicien (droits d’auteurs ou risques auditifs par exemple). Les publics
adultes (une soixantaine, de 20 à 25 ans en majorité) viennent souvent pour
compléter un apprentissage très personnel ou autodidacte de la pratique musicale.
A l’issue des formations, la plupart des élèves se dirigent vers la pratique amateur et,
pour certains, professionnelle. Ils poursuivent en ce cas leur projet en travaillant sur
des aspects complémentaires (travail de studio, d’arrangement, édition de partitions…)
ou se consacrent à l’enseignement souvent dans des structures associatives (Rock
School de Mont-de-Marsan, Lanetik Egina à Hendaye, l’Atabal à Bayonne) et en écoles
municipales (Tarnos, Langon, Mauléon…). Le Conservatoire des Landes travaille en étroite
relation avec d’autres structures impliquées dans les musiques actuelles sur le territoire.
En ce sens, il a établi des conventions avec plusieurs associations, permettant l’échange
de services (Rock School de Mont-de-Marsan, CAEM La Cale à Musique du Boucau,
école de musique de Tarnos et école de musique Saubriguaise). Il entretient des
partenariats spécifiques avec le CEFEDEM d’Aquitaine et certains conservatoires. Par
ses activités, le Conservatoire des Landes participe à l’animation culturelle du territoire.
Il dispose d’une dizaine d’antennes réparties sur le département. Il est géré par un
syndicat mixte qui rassemble une soixantaine de collectivités landaises.
Source :
Rock School
Barbey
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Cette caractéristique a une conséquence directe pour les publics potentiellement
intéressés, à savoir que les habitants de ce département ne peuvent avoir un égal
accès aux enseignements. En effet, pour l’habitant d’une commune adhérente, les
tarifs annuels varient de 100 € (éveil) à 500 € (adultes), alors que pour un Landais
résidant dans une commune non adhérente les tarifs peuvent être de 4 à 5 fois plus
élevés. C’est une des limites à l’activité de ce Conservatoire. A partir de 2011, le
Conservatoire des Landes devrait intégrer le tout nouveau centre de musique de
Saint-Vincent-de-Tyrosse, qui accueillera également l’association Landes Musiques
Amplifiées et un CAEM, avec plusieurs salles et studios dédiés aux musiques actuelles
et un auditorium de 150 places. Enfin, ce conservatoire est membre associé de la
Fédération Nationale des Écoles d’Influence Jazz et Musiques Actuelles (FNEIJMA).
Le réseau « Rock School » rassemble 11 structures associatives dont 8 en Aquitaine :
La Rock School Barbey à Bordeaux propose depuis une vingtaine d’années un
apprentissage des musiques actuelles67. Elle était alors un des rares lieux en France
(avec Lille, Villeurbanne…). A cette époque, la création d’une telle école n’allait pas
sans susciter quelque méfiance, certains parents assimilant la culture rock à des
formes de déviance (rock=drogue). En outre, les parents étaient peu informés de
l’offre proposée. Les craintes initiales se sont estompées et les choses ont bien changé
depuis. Aujourd’hui, la Rock School Barbey accueille 400 élèves dès l’âge de 6 ans,
dont un quart d’enfants, une moitié d’adolescents (12-18 ans) et jusqu’aux plus âgés.
Elle fonctionne à plein, étant amenée chaque année à refuser des inscriptions (150 à
200) faute de place. Elle propose un apprentissage de plusieurs instruments (guitare,
batterie, basse, chant, clavier, saxophone, percussions, deejaying). Ses gestionnaires
réfléchissent actuellement sur les perspectives d’une consolidation de cette activité,
qui dépend pour une large part aussi de la volonté des pouvoirs publics locaux.
Le coût d’inscription est variable : de 170 € pour les plus jeunes (6-7 ans) à 310 €
par an. La Rock School Barbey travaille en réseau avec d’autres écoles associatives
de l’agglomération (Rock et Chanson à Talence notamment). Elle est membre du
Réseau Aquitain des Musiques Actuelles (RAMA).
L’association AREMA-Rock et Chanson (Talence, Gironde67), créée il y a 25 ans, a
développé une activité de formation aux musiques actuelles (chant, guitare, basse,
batterie, clavier) qui mobilise actuellement 7 enseignants. Cette école accueille 280
élèves et propose un apprentissage qui privilégie la pratique collective, notamment
sous forme d’ateliers mêlant des élèves de plusieurs niveaux (débutant, avancé) et
âges. Cette démarche favorise la progression de la pratique. Les tarifs annuels varient
de 350 € à 700 €. Depuis 2007, Rock et Chanson a initié, avec l’appui de l’IDDAC,
une démarche de mutualisation associant des écoles de musiques actuelles (Rock et
Chanson, ABC, CIAM…) à plusieurs écoles de musique municipales de l’agglomération
bordelaise (Blanquefort, Gradignan, Saint-Médard-en-Jalles, Villenave d’Ornon).
Cette initiative, Projet d’Actions Culturelles et Artistiques Partagées (PACAP), est
organisée autour d’un système de master class. Elle offre un bon exemple de la
complémentarité entre les deux voies d’apprentissage et de mutualisation de
ressources. L’AREMA est également membre du RAMA.
En Dordogne, la rock school du Rocksane, située à Bergerac et animée par l’association
Overlook, participe au réseau « rock school » régional et au RAMA. Elle propose depuis
une dizaine d’années un apprentissage instrumental (guitare, basse, batterie, clavier)
et une pratique en groupe, mais aussi des master-classes. Elle compte 220 adhérents.
Dans les Landes, la rock school du Café Music68 à Mont-de-Marsan, gérée par l’Association
Montoise d’Animation Culturelle, accueille aujourd’hui plus de 300 élèves de 8 ans à
(67) Audition de MM. MARROUAT
et FONTANILLE
du 1er octobre 2009.
(68) Audition de M. VALDES
du 3 juin 2009.
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50 ans, voire plus. Elle propose des formules d’apprentissage en guitare, basse, batterie,
clavier et chant. Cette école, intégrée comme la plupart des rock schools à des lieux
de diffusion, présente la particularité de faire aussi office de maison des jeunes et de
la culture. A l’image de la rock school Barbey, elle est amenée à refuser du monde.
Son offre est accessible sur la base d’un tarif annuel unique de 290 €. Elle participe
au RAMA.
Bien que de taille plus modeste, l’ACMA située au Mas d’Agenais en Lot-et-Garonne
reçoit une cinquantaine d’élèves pour l’apprentissage en musiques actuelles (batterie,
clavier, guitare, basse), sur la base d’un tarif annuel de 270 €. Elle mobilise 4 professeurs. Cette association, qui existe depuis une vingtaine d’années, travaille actuellement à un projet plus ambitieux non limité au seul volet de l’enseignement mais
intégrant tout un volet d’accompagnement. Faute de locaux adaptés, elle est également
conduite à refuser du monde. A noter qu’il existe sur Marmande un conservatoire
municipal de musique et de danse qui propose depuis peu des cours instrumentaux
en musiques actuelles et jazz.
En Gironde la rock school « Rock’in Buch » de La Teste est une antenne de la Rock
school de Bordeaux. Elle propose un apprentissage de la batterie, de la guitare, de la
basse et du chant, dispensé par 4 professeurs, à des tarifs de 390 € à 490 € par an
(dont un forfait de 170 € pour 10 cours), complété par des formules d’accès à des
ateliers. Cette école a enregistré une forte progression du nombre d’élèves, signe
d’une demande sociale importante sur ce territoire.
Dans le sud de la région, l’association La Locomotive (Tarnos) et Ebaki Elkartea
(Bayonne) sont également membres du réseau régional des rock schools.
D’autres structures associatives interviennent dans ce segment de l’apprentissage des
musiques actuelles.
En Dordogne, il s’agit de l’école municipale de musique Britten (Périgueux), qui
offre une formation de perfectionnement dans le champ des musiques improvisées,
et de l’Institut des Musiques Rock. Cette association créée en 1998 propose des cours
individuels ou collectifs d’instruments assurés par une douzaine de professeurs
(chant, guitare électrique, guitare folk, guitare classique, basse, batterie, percussions,
claviers, saxophone, trompette, éveil musical et flûte traversière) pour plus de 200
élèves. Cette formule de cours est complétée de stages, ateliers de pratique collective
et master-classes. Les tarifs pratiqués oscillent de 200 € (cours collectifs enfants) à
600 € par an. Une formule tarifaire de 170 € est prévue sous condition pour des
personnes à très bas revenus (formule « Musique et Avenir » : 10 personnes au
maximum par an).
Dans l’agglomération bordelaise, le Centre d’Information et d’Activités
Musicales (CIAM, Bordeaux) propose un éventail de formations pour amateurs
dès l’âge de 7 ans (une centaine d’élèves) dans le champ des musiques rock,
sous forme de cours individuels (chant, guitare, basse, batterie, percussions, flûte,
saxophone…) et collectifs (une trentaine d’ensembles funk, blues, metal, rock, pop,
jazz, manouche, vocal…). Le CIAM, qui développe parallèlement un important
volet de formation professionnelle, mobilise une trentaine d’enseignants. En 2009,
dans un contexte de difficultés économiques, malgré la hausse d’un public
d’amateurs seniors, l’association a constaté une forte baisse des inscriptions sans
doute liée à un coût relativement élevé des formations (de 420 € à 1 300 €). Cette
association est membre de la FNEIJMA et du Réseau Aquitain des Musiques
Actuelles. L’Institut Régional d’Expression Musicale (IREM, Bordeaux) dispense
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également des cours particuliers (guitare, basse, piano, batterie, chant, saxophone,
DJ, musique assistée par ordinateur…) et des formules en ateliers (par genres
musicaux, hip hop et jazz notamment) à près de 250 élèves (pour la plupart issus
de l’agglomération, dont 24 en formation professionnelle), pour un coût variable
(de 220 € en éveil enfants à plus de 800 €, avec tarif réduit et facilités pour
étudiants et demandeurs d’emploi). Cette association, membre de la FNEIJMA,
s’affiche volontairement comme « école de pratiques actuelles de musique », avec
la volonté première de transmettre une passion tout en insistant sur la part
incontournable de travail ou de contrainte qu’exige l’apprentissage musical.
Afin de répondre à la demande (notamment en loisirs et locaux de répétition)
mais aussi à l’évolution des pratiques (technologies et pratiques numériques),
la direction de l’IREM prépare actuellement une relocalisation dans un espace plus
adapté mais surtout, avec plusieurs partenaires, la finalisation d’un nouveau concept
de centre de formation dans le centre de Bordeaux, très axé sur les nouvelles
technologies. Le cabinet musical du Docteur Larsène (« école des musiques
électriques ») implanté à Bègles depuis 1991, avant tout local de répétition,
propose également des cours d’instruments (batterie, guitare, basse, percussions,
chant, clavier, saxophone, MAO…) et de hip-hop, également basés sur le jeu de
groupe, pour 150 à 200 usagers et intervient également en milieu scolaire
(collèges et lycées), avec un tarif variable de 280 € à 700 € (tarif préférentiel pour
les habitants de la commune de Bègles).
A Blanquefort, l’ABC co-anime avec l’école municipale de musique et de danse
des actions de formation aux musiques amplifiées. Cette association accueille près
de 90 élèves (ateliers guitare, basse, hip-hop… d’autres ateliers ayant dû être
supprimés pour raisons budgétaires) pour un coût de 95 € par trimestre. Depuis le
début des années 1990, cette Maison des Jeunes et de la Culture a pris en compte
la demande aussi bien en matière d’apprentissage que de répétition (une vingtaine
de groupes) et de diffusion. Depuis 2001, une coopération étroite s’est instaurée
entre l’ABC et l’école de musique municipale (mutualisation des locaux, du matériel
ou équipements). L’ABC participe à ce titre au projet PACAP initié par AREMA Rock
et Chanson. Un projet d’extension de l’école de musique est envisagé qui devrait
intégrer notamment de nouveaux locaux de répétition pour les musiques actuelles
et ainsi permettre de faire face à l’accroissement de la demande. L’ABC organise
chaque année un tremplin rock junior, intégré au festival « Culture rock » de
Blanquefort. L’ABC est membre du RAMA. À Casseuil, le Centre Aquitain de
Recherches sur les Musiques Acoustiques (CARMA) offre une formule de stages
plus particulièrement consacrés aux instruments et musiques traditionnelles
(125 € pour 4 jours). A Libourne, l’association Rythm & Groove propose un
enseignement en batterie, guitare, basse et percussions (+ éveil musical) pour un
tarif variable selon la formule (loisir ou « passion », individuel ou collectif) compris
entre 450 € et 990 € par an (360 € pour les plus jeunes). Elle accueille environ
200 élèves. Le Centre d’Enseignement et Communication d’Activités Musicales
(CECAM), affilié à un distributeur d’instruments de musique (Music Audio Shop)
propose des formations musicales (piano, batterie, guitare, chant…), destinées
à des musiciens ayant déjà une pratique de base.
Dans le Lot-et-Garonne, l’Association pour le Développement de l’Expression
Musicale (ADEM) d’Agen, intégrée au Florida, scène labellisée de musiques
actuelles, accueille environ 200 élèves en apprentissage musical chaque année,
pour un tarif de moins de 300 €. Le projet pédagogique retenu vise à favoriser le
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jeu collectif et propose des formules d’ateliers. A Astaffort, l’association « Voix du
Sud » propose des stages de formations dans le registre de la chanson française
pour de jeunes artistes.
Dans les Pyrénées-Atlantiques, l’espace de formation et d’enseignement musical
de l’association Lanetik Egina d’Hendaye propose des formations individuelles
ou collectives (dont ateliers) dispensées par une douzaine de professeurs pour
150 élèves, à un tarif oscillant entre 250 € et 450 € par an. A Biarritz, la scène
de l’Atabal a mis en place depuis 3 ans une école « rock » (cours de guitare, basse,
batterie, chant, clavier), dont une classe d’éveil musical (pour les 5-10 ans)
accueillant 150 élèves et refuse du monde. Après un test infructueux durant deux
ans en partenariat avec l’école de musique, l’association l’Ampli à Pau-Billère, qui
gère principalement un lieu de diffusion, envisage de développer un département
d’enseignement musical dans l’hypothèse de poursuite de réhabilitation du site des
anciens abattoirs. D’autres associations locales (ex : L’Agora) proposent des
formules d’apprentissage musical individuel ou collectif (ensembles musicaux).
Il existe par ailleurs dans le sud Aquitaine deux associations départementales de
Centres Musicaux Ruraux (CMR) : celle des Landes basée à Ondres et celle des
Pyrénées-Atlantiques au Boucau. Cette dernière est aussi le siège du seul Centre
d’Animation et d’Expression Musicale, rattaché à la même fédération des CMR.
L’ADCMR des Pyrénées-Atlantiques intervient essentiellement sur la côte basque et
dans une moindre mesure dans le Pays Basque intérieur et en Béarn. Elle développe des
actions de sensibilisation aux musiques actuelles auprès d’un public très diversifié,
du plus jeune âge (dont petite enfance, scolaire et périscolaire) aux personnes
âgées et aux personnes handicapées. Le CAEM La Cale à Musique qui lui est associé
accueille chaque année 250 élèves en apprentissage collectif, très majoritairement
des adolescents (dont une part en difficultés scolaires, le CAEM étant localisé en
Zone d’Education Prioritaire) mais aussi de plus en plus d’adultes et jeunes retraités.
Les tarifs d’inscription oscillent entre 195 € (pour les habitants du Boucau) à 390 €
par an. Le travail réalisé depuis plusieurs années devrait déboucher sur la création
d’une nouvelle rock school à l’initiative de la municipalité d’Anglet. L’ADCMR des
Landes, qui intervient auprès de 70 collectivités et associations avec une quinzaine
de musiciens et au bénéfice de 10 000 Landais (scolaires, petite enfance, personnes
âgées et personnes handicapées), avait arrêté depuis quelques années de travailler
spécifiquement sur les musiques actuelles. Elle envisage aujourd’hui la création
d’un CAEM pour reprendre ses interventions dans ce domaine, notamment en
raison de l’interruption d’activité fin 2009 de l’association L’ASER de Biaudos, qui
accueillait 200 élèves.
Ces quelques exemples, qui ne sauraient prétendre à l’exhaustivité, témoignent
à la fois de la diversité des initiatives et de l’effectivité de la demande qui
s’exprime en matière d’apprentissage des musiques actuelles. L’ensemble de ces
structures, publiques et privées, contribue à la transmission des savoirs et des pratiques
instrumentales liées aux musiques actuelles pour au moins 4 000 Aquitains. Autant
dire d’emblée que le public réellement concerné est sans nul doute beaucoup plus
large, entre ceux de plus en plus nombreux parmi les élèves des conservatoires de
musique (régionaux, départementaux et municipaux) ayant acquis une formation
classique qui « bifurquent » vers la pratique des musiques actuelles ou amplifiées
d’une part et d’autre part ceux qui effectuent au moins une première partie de leur
apprentissage de manière autodidacte.
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Ce panorama régional dépeint donc en termes facilement identifiables un phénomène
plus général, qui traverse les catégories sociales et de plus en plus les générations.
Car au-delà de la pratique proprement instrumentale, c’est aussi un puissant
moteur de socialisation, de communication et d’expériences sinon d’affrontements sonores qui fait lien. Cela tient entre autre à la démarche pédagogique
collective, par le jeu en groupe (dont ateliers, ensemble, master-classes…) qui
caractérise la transmission et l’apprentissage dans les musiques actuelles. Derrière
les préférences stylistiques ou genres musicaux, des communautés sinon des
cultures (voire des contre-cultures) se forment. Pour autant c’est autour d’un
même plaisir, d’une même passion, celles de l’expression et de la pratique musicales, que se construit, au-delà des genres, des classes sociales voire des âges, un
« être » social, celui d’un vivre-ensemble à l’échelle du groupe, de l’école, de la
communauté formée par des musiciens (ou chanteurs) et un public. De fait, du
travail accompli il y a déjà 40 à 50 ans au sein des maisons de jeunes et de la
culture aux multiples initiatives associatives actuelles, cet ensemble de structures
d’apprentissage aux musiques actuelles s’inscrit à la fois dans l’héritage et la
re-construction permanente d’une éducation populaire.
Un autre aspect important à considérer est que l’apprentissage de ces musiques et
des pratiques collectives qui leur sont associées favorise les processus de construction de la personnalité69, ce que plus fondamentalement certains philosophes et
psychanalistes70 désignent sous le terme d’individuation.
Cet aspect doit être souligné alors que notre époque, à travers notamment les
nouvelles formes industrialisées de divertissement et de mise en spectacle ou de
consommation culturelle, aurait tendance à voir s’étendre des comportements
facteurs de désindividuation.
Toutefois, tous les Aquitains ne bénéficient pas des mêmes conditions d’accès à
cette pratique musicale. En effet, la couverture territoriale des structures proposant
un apprentissage des musiques actuelles n’est pas homogène. A cette disparité
territoriale se greffe un facteur économique. Les Aquitains qui résident dans des
communes dotées d’un conservatoire ou d’une école municipale subventionnée
bénéficient de tarifs plus attractifs et abordables par rapport à ceux proposés par
des structures privées ou associatives. Ceux ne pouvant accéder à cette offre pour des
contraintes de distance et de déplacement ou encore pour des motifs économiques
en sont réduits à l’auto-apprentissage… Entre les opérateurs concernés, la
recherche d’une économie de moyens ne se pose pas dans les mêmes termes
selon que l’on est subventionné à plus de 85 % (ce qui est le cas de la plupart des
conservatoires ou écoles municipales), à 50 % ou 30 % (cas de beaucoup de lieux
de musiques actuelles) ou pas du tout (pour certaines écoles associatives). Selon les
cas, cette disparité de traitement peut parfois être plus ou moins compensée par
la diversité des activités proposées (répétition, diffusion, organisation de concerts).
Dans tous les cas, elle modifie de manière plus ou moins sensible les conditions
d’accès aux apprentissages et aux pratiques.
Par ailleurs, des clivages ont été constatés entre certains établissements d’enseignement
traditionnel de type conservatoire et des structures associatives de type rock
school. Ils ne sont cependant pas systématiques et des exemples existent en région
de coopération entre les deux formules. Lorsqu’ils existent, ces clivages tiennent au
moins autant à des enjeux de répartition des moyens mobilisés par les collectivités
concernées qu’à des considérations pédagogiques. En outre, il s’avère que les
pratiques ou parcours d’apprentissage de certains publics les amènent à fréquenter
(69) On peut reprendre à ce sujet
les propos d’un rapport remis en 1971
par le Commissariat au plan (repris par
Augustin Girard puis Jean-Michel Lucas) :
« La nécessité du développement tient
aujourd’hui à la situation de l’individu
menacé par un monde contraignant.
Le travail rationalisé et impersonnel,
l’habitat grégaire, le déferlement
des informations, la sollicitation
d’une consommation toujours accrue
tendent à faire de lui un spectateur
ou un objet manipulé par des forces
qui lui échappent. Acquérir une culture
est pour l’homme d’aujourd’hui
le moyen de retrouver une autonomie,
c’est-à-dire la capacité de juger le monde
qui l’entoure, d’exprimer sa relation avec
les choses en même temps
de communiquer avec autrui.
Ainsi, la culture, moyen d’autonomie
devient aussi la condition de l’initiative
retrouvée, de la relation avec l’autre.
Elle est inséparable d’une tentative
pour maîtriser le destin individuel
et collectif et pour épanouir en chacun
sa capacité de créativité et de bonheur. »
(70) Depuis Socrate, puis au principium
individuationis d’Abd Allah Ibn Sina
ou Avicenne, Saint-Thomas, à Leibniz,
Shopenhauer, concept repris
par Carl Gustav Jung, Jean Piaget
et plus récemment par les philosophes
Gilbert Simondon et Bernard Stiegler.
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alternativement l’une et l’autre catégorie d’établissement (conservatoire / rock school).
On peut cependant souligner l’intérêt d’une coopération et d’une complémentarité accrues entre ces deux types de structure, tant du point de vue pédagogique
(dosage pratique/théorique, oral/écrit, diplôme ou pas), que de la mutualisation de
moyens (enseignants, infrastructures, équipements) ou des publics touchés.
En Aquitaine, comme dans d’autres régions, l’influence des médias (la « starisation »
également attestée par le succès d’émissions telle que Nouvelle Star ou Star
Academy), la notoriété et l’imaginaire construits autour de certains groupes ou
interprètes emblématiques de ces musiques, entretiennent un véritable engouement
pour ces pratiques, dont témoigne la difficulté de certaines écoles à répondre aux
demandes.
2.2.3 De l’apprentissage au projet artistique :
le rôle-clé de l’accompagnement des groupes et artistes
Si l’on ne devait retenir qu’un seul indicateur de l’engouement qui accompagne ces
pratiques, ce serait celui du foisonnement de groupes ou formations qui accompagne
très souvent l’apprentissage dans les écoles vouées à ces esthétiques musicales. A tel
point que toute tentative de recensement dans ce domaine s’avère une véritable
gageure tant le terrain d’observation est prolifique. Au milieu des années 1980, au
moment où les « musiques actuelles » apparaissaient dans le champ des politiques
publiques d’Etat, les discours officiels avançaient l’existence de 25 000 groupes en
France71. Certaines estimations donnent le ratio d’un groupe pour 2 000 habitants,
ce qui correspondrait aujourd’hui à 30 000 groupes.
Car passée la phase des apprentissages instrumentaux, les musiciens « amateurs » en
viennent assez naturellement à mettre leur savoir, leurs envies et leurs affinités artistiques
à l’épreuve de l’expérience de groupes et de la construction de projets. C’est à ce niveau
qu’intervient l’accompagnement, par la mise à disposition de locaux de répétition
et d’enregistrement, par le développement d’une offre de formation professionnelle
(ex : l’apprentissage de la scène, l’environnement de l’artiste) et plus largement par un
appui technique et administratif apporté aux musiciens et chanteurs désireux de mettre
leurs apprentissages en pratique jusqu’à la rencontre du public (accompagnement de
projet, organisation d’événements, gestion des risques sonores,…).
Une étude publiée en 2009 par la Fédurock et le Centre National des Variétés72 révèle
l’importance de cette question, au regard des besoins générés par les pratiques des
musiciens et leurs évolutions. Or, face à l’explosion des pratiques, un manque flagrant
de lieux adaptés (du point de vue technique et acoustique) persiste. Faute de lieux de
répétition adaptés, beaucoup de groupes répètent là où ils le peuvent et comme ils le
peuvent (dans la cave, le garage…)73. Plusieurs scènes de musiques actuelles, labellisées
ou non, et des structures de formation proposent certes des locaux adaptés, mais cette
offre reste pour beaucoup encore difficilement accessible, pour deux raisons essentielles :
la saturation de ces équipements ou services face à une demande qui devient
pléthorique et ne cesse de se diversifier socialement (des jeunes mais aussi de plus en
plus d’adultes et jeunes retraités) et les coûts de location. De manière plus concrète,
le besoin d’accompagnement porte d’abord sur un encadrement technique de base
pour les répétitions (matériel, studio, réglages…), ensuite sur l’enregistrement (création
d’une maquette, alimentation d’un site internet, pré-production…) et enfin sur d’autres
aspects techniques ou artistiques (conseils, ateliers, cours de perfectionnement,
répétitions sur scène, MAO…).
L’étude réalisée par la Fédurock et le CNV auprès d’un ensemble de structures indique
que le taux d’occupation moyen des studios de répétition est supérieur à 70 %
(71) Notamment lors de la mise en place
du Centre d’Information Rock, chanson,
hip-hop et musiques électroniques (CIR),
préfiguration de l’IRMA, en 1986,
à partir du réseau rock créé
par Bruno LION, qui deviendra chargé
de mission pour le rock et les variétés
du Ministère Jack LANG.
(72) « Les publics, services et métiers
de la répétition dans les lieux
de musiques amplifiées / actuelles »
Fédurok, CNV - 2009.
(73) Cf. audition de M. Marc TOUCHÉ
du 28 avril 2009.
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(plus important encore en soirée et le week-end). Cette activité de répétition est globalement en augmentation constante. Pour les structures de la Fédurock proposant ce service,
cela représente près de 4 000 groupes utilisateurs et 135 000 heures de répétition.
Le public utilisateur se situe majoritairement dans la tranche d’âge 20-30 ans, mais
l’écart entre les âges a tendance à s’élargir (de 6 ans minimum à 77 ans maximum ou
de 14 ans à 54 ans en moyennes d’âges).
Une autre caractéristique notable est la très faible présence des femmes dans ce public
(90 % d’hommes), ce qui accentue encore davantage l’écart constaté dans la pratique
d’un instrument de musique entre hommes et femmes. On relève cependant une
féminisation progressive de la pratique dans les structures d’accompagnement. Une
majorité des groupes ou artistes concernés sont des groupes de rock et dérivés
(métal/hard, punk, folk…). Le genre le moins bien représenté est celui des musiques
électroniques. Ceci s’explique en partie par la configuration technique des espaces et
matériels mis à disposition, sachant qu’il existe une demande croissante en locaux
équipés d’un système de musique assistée par ordinateur (musiques électroniques mais
aussi hip hop).
L’un des principaux enseignements de cette étude est que ce public en répétition est
composé à près de 90 % d’amateurs, c’est-à-dire de personnes jouant par plaisir sans
forcément en faire leur unique ou principale source de revenus. La même proportion
d’usagers n’envisage pas de vivre de la musique. Pour autant, et tout « amateur » soit-il,
cette posture n’empêche pas certains de ces groupes « amateurs » d’enregistrer des
disques, de participer à des concerts ou à des festivals, bref de se produire face à leur
public comme le ferait n’importe quel groupe considéré comme « professionnel ». Seule
la posture change sans forcément que le projet artistique ou que la qualité objective des
œuvres n’en soient amoindris. Ainsi, pour la moitié des groupes ou artistes accompagnés, c’est la pratique de loisir qui reste privilégiée, autrement dit la répétition constitue
la finalité de la pratique musicale. Pour cette catégorie de musiciens, le contact avec la
scène ou un public n’est pas la priorité. Selon le sociologue Marc TOUCHÉ, cette forme
de pratique serait en développement, notamment parmi les praticiens les plus âgés
(40 ans et plus).
Une autre catégorie est représentée par des musiciens pour qui la finalité de la répétition
est la diffusion sur scène et la rencontre d’un public (concerts, premières parties…), sans
pour autant s’inscrire dans une démarche de professionnalisation. Il ressort donc
de ce constat qu’une part croissante de musiciens soit moins dans la recherche d’une
professionnalisation de leur pratique. Bien que se déterminant dans une posture de
pratique « amateur », ces groupes ou artistes développent néanmoins une démarche
artistique qui, de la composition ou création à la diffusion implique la mise en œuvre de
tout un ensemble de ressources qui peut les conduire jusqu’aux portes d’une relative
reconnaissance professionnelle.
Enfin, 5 % à 10 % des groupes aspirent à un accompagnement plus poussé (programmation
de concerts, production, conseils…) avec finalisation d’un véritable projet artistique et
professionnel. Ce faible pourcentage ne signifie pas pour autant une baisse du volume de
demandes, notamment de demandes ponctuelles, compte-tenu du nombre de groupes
en activité. En outre, il ne faut pas exclure l’hypothèse d’une sous-représentation dans
l’échantillon enquêté, en fonction de la plus ou moins grande capacité des structures
concernées à répondre aux sollicitations d’accompagnement dont elles sont saisies.
Ainsi, cette fonction d’accompagnement qui prolonge souvent la phase d’apprentissage
des pratiques musicales / instrumentales, touche un public aux motivations diverses :
des amateurs débutants (aux ambitions parfois qualifiées de démesurées ou fantasmées),
des groupes amateurs diffusés avec un véritable projet artistique mais désireux de rester
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dans une démarche non lucrative (qu’on ne saurait qualifier de non « professionnelle »),
des amateurs diffusés en recherche de professionnalisation, des groupes ou artistes en
voie de professionnalisation (ou professionnels intermédiaires) et des groupes considérés
comme professionnels au plein sens du terme (ou « professionnels majors »).
Il convient d’insister sur les limites d’une distinction trop hâtive entre groupe (ou musicien
ou chanteur) « professionnel » et groupe « amateur ». Cette distinction ne peut être ici
interprétée a priori comme significative ni du point de vue de la qualité du projet artistique
mis en œuvre ni du point de vue de la qualité intrinsèque des œuvres produites. Si l’on
ne devait reconnaître comme « professionnels » que les seuls groupes ou artistes vivant
exclusivement des ressources tirées de leur activité artistique, il faudrait alors renoncer à
qualifier de « professionnels » des artistes ou groupes produisant des œuvres de qualité
mais ne bénéficiant pas d’une notoriété suffisante pour leur permettre d’en vivre de
manière décente. Il faudrait alors tirer un trait sur l’essentiel du vivier d’artistes qui
alimente pour une bonne part la création et la diversité artistiques en France. Pour des
groupes ou artistes, le fait d’avoir une activité artistique significative tout en affirmant la
volonté de rester « amateurs » peut être interprété de deux manières : à la fois comme
une posture de principe marquée par le refus de s’inscrire dans une démarche purement
commerciale ou économique mais aussi comme un principe de réalité en considérant le
volume de l’offre et la probabilité d’accéder à un statut professionnel. Peu d’artistes ou
de groupes vivent exclusivement de leur activité artistique mais ils sont de plus en plus
nombreux.
Cette dimension des pratiques liées aux musiques actuelles s’inscrit dans un contexte de
fortes interrogations relatives à la place des artistes dans la société, confrontés au mouvement de massification culturelle et aux profonds bouleversements sur les conditions
d’exercice de ces pratiques (dont impacts des technologies et usages numériques,
reconnaissance économique du travail de l’artiste…). Ces évolutions renforcent la nécessité
pour les artistes d’élargir leur champ de maîtrise ou de savoir-faire, dans des domaines
plus diversifiés que leurs seules aptitudes ou leurs savoir-faire artistiques : « On comprend
que l’acte créateur et le talent ne soient plus les seuls indicateurs pour définir un artiste. »74
Pour autant, il ne faut pas minimiser la part de plaisir ou de passion qui conditionne
et alimente ces pratiques.
Enfin, la prévention des risques auditifs fait partie de ce travail d’accompagnement en
direction des groupes et artistes.75 Depuis 2000, plusieurs fédérations du secteur des
musiques actuelles ont lancé une initiative en vue de lutter contre les risques auditifs
inhérents à l’amplification. Cette initiative, AGI-SON, s’est concrétisée par le lancement
de plusieurs campagnes et actions de sensibilisation en direction des publics et des
professionnels du monde de la musique (ex : protections auditives, formations…). La
question de la puissance sonore est en effet au cœur de la création des musiques
actuelles et des différentes esthétiques qu’elles recouvrent. La prise en compte du risque
auditif fait désormais partie intégrante du travail d’accompagnement auprès des
musiciens et groupes mais aussi auprès des publics dans les lieux de diffusion.
(74) Propos de Philippe OGOUZ,
Président de la société civile
pour l’Administration des Droits
des Artistes et Musiciens (ADAMI)
dans « Quels artistes demain ?
Artistes 2020, variations prospectives »
Collection ®Évolutic, IRMA, 2009.
(75) Fédération des syndicats CGT
du spectacle, FEDUROK,
l’Union du spectacle musical et
de variété PRODISS, la Société Française
d’Acoustique, l’union nationale
des syndicats d’artistes musiciens SNAM,
le Syndicat National des Petites
Structures de Spectacle SYNAPSS,
le Syndicat National des Prestataires
de l’Audiovisuel Scénique et Evénementiel
SYNPASE, le Syndicat National
des Professionnels du Théâtre
et des Activités Culturelles SYNPTAC.
En Aquitaine, l’approche de l’importance de cette demande d’accompagnement
repose essentiellement sur les informations transmises par différentes structures,
parmi lesquelles une grande partie de celles déjà identifiées dans le champ de
l’apprentissage (cf. 2.2.2).
Il est extrêmement difficile de cerner le nombre de groupes actifs de musiques
actuelles en région, compte-tenu du caractère très instable et prolifique de ce terrain
d’expressions et d’initiatives. Sur la seule agglomération bordelaise, leur nombre est
estimé entre 1 000 et 1 500. Si l’on applique le ratio national, il existerait en Aquitaine
(76) « Bordeaux Rock(s) » Denis FOUQUET –
Le Castor Astral, 2007.
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entre 1 600 et 2 000 groupes de musiques actuelles. D’après la bible du rock
bordelais76, 700 groupes se seraient formés en Gironde entre 1961 et 1984 et à peu
près autant dans les dix ans qui suivirent. Selon l’auteur, ce chiffre serait à multiplier
par trois depuis 1996 et en croissance exponentielle depuis 2001, soit 200 nouveaux
groupes par an dans ce seul département. Un autre indicateur du dynamisme des
musiques actuelles en Aquitaine est le nombre de groupes participants à certains
tremplins parmi les plus importants. Ainsi, chaque année environ 180 groupes
aquitains participent au tremplin des Découvertes mis en place par le réseau du
Printemps de Bourges. Depuis 2003, plus de 500 groupes aquitains ont participé au
tremplin international Emergenza (une soixantaine chaque année). Le webzine
bordelais Muzzart compte plus de 650 groupes et 140 artistes affiliés. Dans le sud de
la région, l’association Landes Musiques Amplifiées a recensé près de 80 groupes et
artistes locaux. De nouveaux groupes et collectifs ne cessent d’émerger (ex : fin 2009
l’association Dissidence Rock qui rassemble 13 groupes locaux)77.
En Gironde, l’association AREMA Rock et Chanson à Talence propose des services de
répétition, d’accompagnement technique, de résidences d’artistes avec technicien,
de diffusion et de promotion artistique puis d’enregistrement. Elle dispose de 8
studios de répétition, de 3 salles de prise de son et d’un studio d’enregistrement.
Cette structure offre le premier complexe de répétitions en Aquitaine. Chaque
année, plus de 10 000 heures de répétition sont ici réalisées par 2 500 musiciens,
plus de 350 groupes (dont 70 abonnés à l’année). Une centaine de groupes
émergents sont accueillis en résidence ou pour effectuer un travail scénique. Les
tarifs pratiqués en matière de répétition sont de 9 € à 11 € de l’heure (50 € par
jour avec technicien) et les formules proposées pour l’enregistrement varient selon
la durée et le niveau d’exigence technique (160 € à 200 € par jour, forfaits pour
10 et 15 jours). L’association fonctionne toute la semaine, week-ends compris, afin
de répondre à une demande de répétition qu’elle a cependant du mal à satisfaire
en totalité. L’association AREMA Rock et Chanson mutualise une partie de ses moyens
techniques (2 emplois partagés au travers d’un groupement d’employeurs,
l’AGEC) avec l’association Transrock, gestionnaire de la scène du Krakatoa à
Mérignac.
Ce lieu a mis en place depuis 1993 une activité spécifique d’accompagnement
d’artistes ou pépinière, par la mise à disposition d’un centre d’informationsressources, l’organisation de journées d’informations (les « Thématik »), des
rendez-vous conseils en appui aux projets artistiques portés par des groupes ou
musiciens. Elle assure dans ce cadre un portage administratif de certains projets.
L’accompagnement technique (placement scénique, réglage du son, arrangements
techniques, réalisation de maquettes et d’albums…) est assuré en coopération avec
l’association AREMA Rock et Chanson. Les publics accueillis dans ce cadre sont
des musiciens amateurs en voie de professionnalisation, essentiellement de l’agglomération bordelaise mais aussi du bassin d’Arcachon et des Landes. En 2008,
la pépinière a accueilli 183 groupes et porteurs de projet et réalisé 800 heures
d’accompagnement technique (résidences, répétitions sur scène, MAO…). La plupart
des demandes d’accompagnement technique vise la réalisation de concerts (en ou
hors région). En matière d’accompagnement administratif, la pépinière du Krakatoa
est à l’origine de la réalisation d’une mallette ou « Kit administratif de survie en
milieu culturel ». Cet outil d’accompagnement, conçu en 2003-2004, s’est rapidement
diffusé au niveau régional avec l’aide de plusieurs structures relais membre du
RAMA (outre le Krakatoa, Le Sans Réserve à Périgueux, le Café Music à Mont-de-Marsan,
(77) D’autres collectifs et associations
s’efforcent en région de promouvoir
la scène « rock » (au sens très large),
souvent en organisant ou programmant
des concerts : Aller Les Filles, Andromac,
Confédération Anarcho Dandys, Corner,
Do It Yourself, Fokonsactiv, Go.Act.Resist,
Hangar 5, Kulture Noir, Let’s Panic Later,
Nocturnal Motion, Oazik, Y’En A Mart…
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le Florida à Agen et L’Ampli à Pau). Il bénéficie aujourd’hui d’une diffusion nationale
et dispose d’un site internet dédié78. L’association Transrock est membre du RAMA
au niveau régional et de la FÉDUROK au plan national.
A Bordeaux, la Rock School Barbey met à disposition 8 locaux de répétition (dont
7 pour répétitions de groupes) et des services d’accompagnement (résidences
courtes en lien avec le Centre National de la Variété, suivi de projet pour 5 groupes
labellisés par an…).
Cette structure accueille environ 300 groupes par an en répétition soit un millier
d’utilisateurs environ (coût d’accès de 8 € / heure ou de 70 € pour 10 heures et
120 € pour 20 heures). Elle est également dotée d’un studio d’enregistrement et
d’une régie pour l’enregistrement (40 €/heure ou 140 € pour une demi-journée
et 250 € la journée, 400 € en pour un enregistrement de concert sur scène). Elle
porte au niveau régional pour le compte du RAMA la démarche de prévention des
risques auditifs (AGI-SON). La Rock School Barbey a mis en place un service de
répétition itinérant, le Bus Rock, qui permet de répondre aux besoins de groupes
implantés dans des communes rurales du département de la Gironde en lien
avec certaines associations culturelles et municipalités. Ce service qui bénéficie
d’un soutien du Conseil Général, permet de travailler avec les groupes sur les
techniques d’arrangement ou encore sur le son. Le bus est équipé d’un studio,
d’une régie et d’un système d’enregistrement.
La Rock School Barbey participe enfin à la découverte de groupes émergents, par
l’organisation de plusieurs tremplins : les Découvertes du Printemps de Bourges
(environ 180 groupes régionaux candidats chaque année), les Scènes croisées (en
coopération avec l’IDDAC et plusieurs communes du département de la
Gironde79), le Mozaïk Rock Challenge (ouvert aux groupes de Gironde, Landes et
Lot-et-Garonne) et la Rock School est partenaire du tremplin Musique de R.U.
(pour les universitaires).
Le CIAM propose de son côté 3 salles de répétition et un studio d’enregistrement
numérique. Cette association s’est spécialisée dans une offre de formation pour
musiciens en voie de professionnalisation et intervient à ce titre en tant qu’organisme
de formation professionnelle. Elle accueille dans ce cadre environ 120 stagiaires.
Le CIAM propose plusieurs formules : un cycle « prépa musique » (292 heures sur
30 semaines, une trentaine d’élèves – 2 500 € pour l’année, soit 8,5 €/h), un cycle
« intensif » (538 heures sur 30 semaines – 36 inscrits en 2008-2009 – 3 900 €
l’année soit 7,3 €/h) et un cycle « pro » (720 heures sur l’année – 16 inscrits en
2008-2009 – 5 600 € soit 7,9 €/h). Cette offre de formation vise à amener des
musiciens amateurs vers la professionnalisation par une meilleure maîtrise théorique
et technique de leur pratique puis par un développement de la pratique
collective et de leurs capacités d’adaptation. Ces formations intègrent aussi des
stages en entreprise, auprès de structures participant à la filière musicale (lieux de
diffusion, organismes de formation, organisateurs de festivals…). Une validation
des acquis est opérée toutes les 10 semaines puis au terme du parcours. A l’issue
d’une première année, il s’agit d’accompagner les stagiaires dans la concrétisation de
leur projet professionnel qui peut, pour certains d’entre eux, passer par l’obtention
du certificat de la FNEIJMA (Musicien Interprète de Musiques Actuelles).
Néanmoins, cette certification n’est pas une nécessité. L’une des principales
difficultés de ce type de cursus, qui fait aussi son intérêt, est de placer les stagiaires
face aux réalités d’un secteur à propos duquel ils ont souvent une idée trop
partielle, idéalisée sinon utopique. Ceci explique sans doute le taux relativement
(78) http://www.lamallette.org/
Section%5FPublique/default.aspx
(79) Ambarès-et-Lagrave, Casseuil,
La Teste, Martignas-sur-Jalle,
Villenave d’Ornon.
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élevé d’abandons constaté au cours du cycle « prépa musique » (72 % en 20082009 – 8 stagiaires sur 29 admis en cycle intensif). Le CIAM propose également
une formation de technicien son (600 heures à 960 heures selon la durée du stage
en entreprise – 5 000 €). Cette activité permet de réaliser des enregistrements
de groupes (une vingtaine par an, une centaine de musiciens concernés). Le CIAM
est aussi intervenu en formation de formateurs pour le Projet « PACAP » porté par
l’association AREMA Rock & Chanson (cf. 2.2.2). Pour ses activités de formation, le
CIAM perçoit des aides du Conseil Régional dans le cadre du programme régional
des formations (107 k€ en 2008-2009, soit 21 % du budget) et d’OPCA (14,5 %
du budget). Le CIAM organise en outre une vingtaine « d’ApéroCiam » par an,
offrant un apprentissage de la scène aux musiciens et techniciens en formation,
ainsi qu’un tremplin pour les groupes en création ayant développé leur projet dans
le cadre de cette structure (environ une dizaine de groupes). Il offre enfin une
formule de résidence.
L’IREM à Bordeaux propose également plusieurs formules de formation professionnelle
pour musiciens : une formation initiale de 403 heures sur 31 semaines pour 12
stagiaires au coût de 2 995 € soit 7,4 €/h, deux formules de formation intensive
de 620 heures et 930 heures sur 31 semaines, pour une dizaine de stagiaires
chacune, respectivement au coût de 4 464 € et 5 750 € soit 7,2 € et 6,2 €/h.
L’IREM a plus récemment lancé une formation professionnelle combinant musique et
techniques de production de 956 heures sur 31 semaines, destinée à 8 stagiaires,
pour un coût proche de 8 000 € (8,3 €/h). Cette formule rencontre un certain
succès malgré son coût. L’IREM prépare également dans ce cadre à l’obtention du
certificat de la FNEIJMA. Il a engagé une coopération avec le Conservatoire de
rayonnement régional de Bordeaux. Il délivre enfin une formation d’assistant son
studio (560 heures sur 16 semaines pour un coût de 5 144 € soit 9,2 €/h), qui
concerne 8 élèves. L’IREM dispose d’un studio de répétition et d’enregistrement,
avec possibilité de résidence.
De nouveaux locaux devraient prochainement permettre d’étendre l’offre de répétition.
À ce jour, cette association n’est pas inscrite dans le cadre du programme régional
des formations. Toujours à Bordeaux, l’association Musique au Pluriel propose un
cursus de formation pour musiciens et le CAT (Le Complexe) une formule de
résidences et de répétition scénique (15 € à 30 €/h.). Dans l’agglomération,
le cabinet du Docteur Larsène propose 6 salles de répétition (2 €/h et formule
de 40 € à 80 € par trimestre, une soixantaine de groupes par an) et un studio
d’enregistrement (de 10 €/h à 70 € /jour et formule à 320 €/3 jours). Cette
association offre par ailleurs une formule de master class (50 à 80 personnes par
session) et de résidence (3 à 5 groupes par an). Elle organise des soirées, concerts
et un petit festival (« Ah ! Quelle belle Odyssée »). À Libourne, l’association Lucane
Musique gère deux studios de répétition (9 €/h ou 80 €/10h. ou 140 € pour 20 h.
en groupe, 3 €/h. en individuel), utilisés par une dizaine de groupes locaux.
L’association Rock in Buch à La Teste offre un studio de répétition (10 €/h) avec
possibilité d’enregistrement (20 €/h ou 200 €/jour).
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En Dordogne, une offre d’accompagnement est proposée par la scène du « Sans
Réserve » de Périgueux, qui dispose de 3 studios de répétition sur le site du Silo et
de 3 studios dont une salle MAO sur le site de La Filature (de 1,5 € en individuel à
3 €/h en groupe). Ce dernier site est équipé d’un studio d’enregistrement. Les
tarifs pratiqués, relativement bas, traduisent une volonté d’accès au plus grand
nombre. En 2008, le Sans Réserve a ainsi accueilli près de 90 groupes de Dordogne,
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mais aussi d’autres départements et régions. De façon plus approfondie, l’association propose un accompagnement sur-mesure pour certains groupes « repérés »
(4 en 2008). Cette même année, 11 groupes ont utilisé de manière régulière les
modules de répétition (sur 60 concernés soit 200 musiciens) et 5 ont été accueillis en
résidence. Cette salle est également partenaire du réseau de diffusion de la mallette
(kit administratif de survie), mise au point par la pépinière du Krakatoa. L’offre
locale de répétition est complétée par les studios de l’Art Scène (à Razac-sur-l’Isle,
gérés par l’AEMC) et ceux du Ready dont un studio dédié au deejaying et aux
musiques électroniques (à Boulazac, géré par l’association Mosaïque). L’Institut des
Musiques Rock de Périgueux propose de son côté un accompagnement juridique et
administratif aux porteurs de projet. A Bergerac, l’association Overlook gestionnaire
de la salle du Rocksane, propose un accompagnement technique, administratif
et artistique par la mise à disposition de trois studios de répétition, un dispositif
d’enregistrement, un accès à la scène, un appui à la production et à la réalisation
de projets portés par des groupes locaux. Elle offre également une formule de
résidences et une formule « coup de pouce » de soutien à de jeunes groupes (accès
premières parties de concerts, résidences, aides techniques…). En 2008, elle a
accueilli 22 groupes en résidence et réalisé 12 enregistrements.
Dans les Landes, l’association Landes Musiques Amplifiées (LMA) a été créée
en 1995 à l’initiative du Conseil Général des Landes à partir d’un collectif d’associations locales et de musiciens. Cette association œuvre pour le développement de
la pratique amateur et pour l’insertion professionnelle des musiciens. Elle accompagne à ce titre une quinzaine de groupes par an, par l’aide à la formalisation de projets, la structuration administrative ou encore par l’appui aux productions
discographiques et par l’information. Elle intervient à la demande pour la mise
en place de répétitions, de séances studio accompagnées, de résidences ou d’aides
logistiques et par la mise en réseau avec d’autres opérateurs de la filière (organisateurs
de concerts, tourneurs, média, labels, distributeurs…). Elle assure également
un service de « booking » ou d’organisation de tournées. LMA édite un journal
d’information sur les musiques amplifiées dans le département (« Multiprises »)
et suit l’activité de 75 groupes et artistes locaux (Landes et côte basque). Elle
participe au réseau de distribution de la mallette (cf. Transrock/Krakatoa). Elle
devrait intégrer prochainement de nouveaux locaux dans le cadre du projet de
centre de musique de Saint-Vincent-de-Tyrosse.
Le Café Music de Mont-de-Marsan, parallèlement lieu d’apprentissage et de diffusion
à l’image de la Rock School Barbey de Bordeaux, offre un service d’accompagnement
et un soutien administratif pour les groupes locaux émergents. Il propose deux
studios de répétition (tarif horaire de 4,6 € /heure ou 23 € /6 heures), avec possibilité de conseils gratuits et d’enregistrement. Son centre d’information distribue
également le kit administratif de survie en milieu culturel (la Mallette). Ce lieu
accueille aussi des résidences d’artistes. Ses gestionnaires ont constaté l’affirmation
d’une demande de répétition par un public « seniors ». A Tarnos, l’association
La Locomotive offre deux studios de répétition destinés à des groupes locaux
(une quinzaine). Elle contribue également à l’accompagnement de ces groupes par
l’organisation de concerts et d’événements (Festi’Mai, Océaniques en saison estivale).
En Lot-et-Garonne, l’équipe du Florida d’Agen a développé un dispositif d’accompagnement des groupes et artistes amateurs, notamment ceux en voie de « professionnalisation », dans une logique de parcours. Cet accompagnement combine
des apprentissages instrumentaux (stages, ateliers) et des pratiques en répétition
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(250 groupes concernés). Elle dispose de 5 studios de répétition (4 à 5 €/heure pour
duo et 8 à 10 €/heure pour un groupe avec ou sans enregistrement, 5 €/heure
pour MAO). Face à l’importance de la demande, le Florida envisage la mise en
place d’un schéma départemental en lien avec les autres opérateurs du territoire.
L’offre d’accompagnement du Florida, qui est également un centre multimédia,
intègre la prise en compte des nouvelles technologies numériques, par une formule
de résidence particulière (les « Cyberspacefiesta »), développée en relation avec
l’association Médias-Cité de Saint-Médard-en-Jalles en Gironde. Cette approche de
création multimédias s’insère de plus en plus dans l’offre d’accompagnement.
L’accueil de résidences de création pour des groupes souhaitant préparer des
spectacles ou des enregistrements (les « résidences-résonances ») complète plus
globalement le dispositif d’accompagnement de cette association.
La formule de stages hebdomadaires et d’accompagnement mise au point depuis
1994 par l’association Voix du Sud à Astaffort témoigne aussi du rôle facilitateur
joué par la notoriété d’un artiste ayant ses attaches en région (en l’occurrence ici
Francis Cabrel). Cette association propose un accompagnement à des artistes
en voie de professionnalisation, venus de divers horizons, avec l’objectif
d’approfondissement et de finalisation d’un répertoire. Chaque session bénéficie
du parrainage d’une vedette de la chanson française (ex : Emilie Loizeau, Cali,
Maxime Le Forestier, San Severino…). Elle est associée à une formule de diffusion
scénique (scènes chansons, tournées en région, accès à des festivals…). Au terme
de chaque session, certains stagiaires se voient remettre un prix (prix « centre des
écritures » parrainé par La Poste, prix « Découverte Voix du Sud ») doté d’une
bourse et d’une aide à la diffusion80. Au Mas d’Agenais, le gestionnaire de l’ACMA
est également à la tête d’un studio d’enregistrement professionnel (Studio Airport,
35 €/heure et 250 €/jour). L’association After Before à Fumel gère deux studios
de répétition sur son nouveau site du Pavillon 108 (10 à 12 groupes locaux) à des
tarifs très accessibles (1,5 €/heure ou 25 €/10 heures).
En Pyrénées-Atlantiques, la scène de l’Ampli située dans l’agglomération paloise à
Billère dispose de 3 studios de répétition (tarifs de 4 € à 5 €/h.) et d’un studio d’enregistrement. L’Ampli accompagne une quarantaine de groupes et mobilise deux
permanents à cette fin, là encore dans une approche en terme de parcours. Elle
propose une formule de résidences (sur la demi-journée, la journée complète ou
sur plusieurs jours avec une durée maximale d’une semaine). L’Ampli dispose par
ailleurs d’un pôle ressources qui organise des journées d’information et participe au
réseau de distribution de la mallette élaborée par la pépinière du Krakatoa.
Sur la côte basque, la scène de l’Atabal à Biarritz met 3 studios de répétition
à disposition des groupes locaux (tarif : 15 €/heure ou 10 €/heure à partir de 10 heure
de location – environ 80 groupes concernés).
A Anglet, une expérience d’accompagnement développée depuis quelques années
durant les vacances scolaires a rencontré un certain succès. La rock school offre à
quelques groupes « de garage » (5 par an maximum) une formule d’accompagnement technique et artistique, sous forme de stages, qui a produit de bons résultats
(dont un groupe local sur le point de signer avec un label national). Les groupes
sont accompagnés sur une durée de 3 à 4 ans, jusqu’à la finalisation de leur projet
artistique. Le succès de cette expérience devrait prochainement déboucher sur
un projet pédagogique plus élaboré (les groupes pris en charge au début de leur
constitution n’ayant pas les mêmes besoins que ceux plus matures ayant déjà
plusieurs années de pratique commune) et sur la création d’un nouvel espace (avec
(80) Parmi les jeunes artistes aquitains
récemment récompensés :
Julien Loko, Zed Van Traumat.
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2 studios de répétition et espace multimédia). Sur cette même commune, on peut
signaler également le travail d’accompagnement d’artistes de l’association AMA
Prod, qui travaille sur quelques projets (festival Futurama, Music Contest…).
Un éclairage particulier de cette fonction d’accompagnement concerne en
Aquitaine les musiques dites traditionnelles, lesquelles participent pleinement à
la mouvance des musiques actuelles. Le CESR d’Aquitaine a déjà eu l’occasion d’apporter un éclairage à ce propos dans le cadre d’un précédent rapport81. Dans ce
genre de musiques, l’accent doit être mis sur tout le travail de sauvegarde, de
conservation et de valorisation de ce patrimoine culturel immatériel, qui reste un
patrimoine vivant et créatif, dans l’esprit de la Convention adoptée par l’UNESCO.
Il existe des formes contemporaines de musiques traditionnelles qui s’inscrivent
dans la réalité des musiques actuelles (par exemple le rock basque ou encore la
musique radicale gasconne de Familha Artus). Il faut souligner à ce niveau le rôle
particulier de l’Institut Culturel Basque et de l’Institut Occitan dans le travail de
recensement, de collecte, de valorisation des fonds culturels et de soutien aux
projets artistiques ou associatifs. Au Pays Basque, l’Institut Culturel a recensé près
de 250 groupes et artistes (dont une très forte majorité de chœurs, chants et
musiques traditionnelles). Une étude réalisée sous l’égide du Gouvernement
basque espagnol portant sur les habitudes, pratiques et la consommation
culturelle au Pays Basque a mis en évidence l’importance des pratiques musicales
dans ce territoire de l’Aquitaine, plus du tiers de la population affirmant un intérêt
très élevé pour la musique et la moitié de cette même population exprimant un vif
intérêt pour les concerts de musique actuelle. Le diagnostic établi par le Conseil de
développement et le Conseil des élus du Pays Basque français dans le cadre de la
démarche prospective « Pays Basque 2020 »82 confirme le caractère très populaire
de ces pratiques, en particulier des pratiques amateurs, mais aussi les mutations et
la créativité dont elles sont actuellement l’objet (nouvelles formes, nouvelles
technologies, métissages entre tradition et modernité à l’image du travail réalisé
par le collectif d’artistes Herri Soinulariak)83. De son côté, l’Institut Occitan œuvre
dans le même sens au niveau régional avec une approche axée davantage sur
le souci de préservation du patrimoine, concrétisé notamment par la création
d’un site Internet dédié (http://www.sondaqui.com - 1 600 œuvres répertoriées).
En application de la Convention de l’UNESCO, cet Institut culturel a été chargé
d’une mission de préfiguration d’un système d’inventaire du patrimoine oral
occitan. Ce travail a permis de mettre en évidence l’interdépendance entre ces
pratiques artistiques traditionnelles et le contexte ou les ressources sociales
(exemple : le rôle des lieux tels que les cafés ou « cercles » de village dans la
pratique de la polyphonie). Par ailleurs, cette approche souligne parallèlement la
contribution des nouvelles formes d’expression artistique issues des musiques
actuelles dans la valorisation du patrimoine immatériel hérité.
Le Carrefour Aquitain des Musiques et Danses Traditionnelles (CAMDT), relais
régional de la Fédération des Associations de Musiques et Danses Traditionnelles
(FAMDT), est un autre interlocuteur important dans ce domaine de l’accompagnement
lié aux musiques traditionnelles en région et à leur valorisation. Il intervient aussi
bien en matière d’aide à l’organisation d’événements, en relais d’information ou
en conseil technique auprès d’opérateurs (par exemple dans le cadre du dispositif
« Planète Musique » de la FAMDT).
A ce jour, on compte assez peu de musiciens titulaires d’un diplôme ou d’un certificat
de musique traditionnelle (une dizaine seulement). Le CAMDT contribue en outre à
(81) « Langues et cultures d’Aquitaine :
pour une dynamique d’ouverture
et d’intégration, Parloc, Baï ! » CESR d’Aquitaine –
Avis adopté le 14 décembre 2005.
(82) « Pays Basque 2020 – État des lieux
sur la culture » Conseil de
Développement et Conseil des Élus du
Pays Basque, mai 2007.
(83) Ce collectif rassemble des artistes
tels que Benat Achiary, Michel
Etchecopar, Pierre Haira…
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la valorisation des collectes (stages et master class) et à l’intégration, jugée prioritaire,
des musiques traditionnelles dans les domaines de l’apprentissage musical (écoles
et conservatoires notamment) et de la diffusion (ex : festivals, médias). Près de 300
artistes et groupes répartis en Aquitaine ont été recensés essentiellement dans les
secteurs de la musique et du chant, réalisant une quarantaine de créations par an.
Certains collectifs d’artistes participent directement à l’accompagnement de projets
artistiques et à leur valorisation. C’est par exemple le cas au Pays Basque de l’association Herri Soinulariak et dans le domaine occitan du collectif Ça’I, qui rassemble
plusieurs artistes (Familha Artus, Francis Mounier, Niou Bardophones, Xarnege,
Joan Francés Tisnèr…) et acteurs culturels. Ce collectif intervient notamment en
matière de transmission (master class), d’organisation d’événements tels que « Le
choc des électrons libres » et de valorisation ou d’animation sur le territoire. Il participe
au niveau national au réseau des musiques du monde Zone Franche84, à la FAMDT
et à la Fédération des Éditeurs et Producteurs Phonographiques Aquitains (FEPPIA).
Cette approche des actions d’accompagnement développées en région par différentes
associations appelle plusieurs constats :
- L’importance des besoins exprimés par des groupes et artistes, aussi bien en
termes de répétition que d’approfondissement d’un projet artistique ou professionnel. Cette demande a tendance à se développer et à se diversifier, comptetenu de l’évolution des pratiques (dont nouvelles pratiques numériques) et de la
population des groupes ou musiciens (dont seniors en pratique amateur). Pour
certains territoires ou agglomérations, il devient difficile de faire face à cette
demande qui représente pourtant l’une des étapes clés de l’appui à la création.
- La diversité des réponses apportées et parfois l’originalité des démarches
conduites par les opérateurs associatifs, lieux de diffusion et/ou d’apprentissage,
à la fois sur le contenu de l’accompagnement opéré (au-delà de l’offre de répétition,
le portage de projets artistiques sur la durée, l’aide au travail scénique et à la
diffusion, le soutien administratif, la mise en réseau…) et sur les outils mis en
œuvre (ex : la mallette, dispositifs multimédias et MAO…). L’originalité de ces
réponses trouve ses limites dans les moyens mobilisables par les structures et
dans les conditions d’accès proposées aux groupes (outre la possibilité d’accès
aux infrastructures et équipements, les conditions tarifaires très variables d’un lieu
à l’autre). Ce constat plaide en faveur de l’établissement d’un schéma régional
en concertation avec les acteurs et des collectivités intéressées, associé à une
démarche de mutualisation permettant un accès plus homogène à travers
l’espace régional, par exemple sous la forme d’un « pass’répétition » conçu à
l’échelle de territoires homogènes et destiné à des groupes ou artistes repérés
ou émergents.
- En tout état de cause, la plupart des exemples évoqués soulignent le caractère
déterminant de l’implication des collectivités, les associations concernées
agissant souvent dans le cadre de conventions de gestion d’équipements financés
par ces mêmes collectivités.
La pratique musicale ou instrumentale liée aux musiques actuelles reste avant tout un
facteur de plaisir ou de détente pour la très grande majorité de ceux qui s’y adonnent.
C’est d’abord un plaisir individuel et à ce titre un facteur non négligeable d’épanouissement,
de liberté, dans une société qui tend de plus en plus et de plus en plus tôt à confiner
les individus dans des rôles « d’agents sociaux » ou dans des catégories sociales qui
instrumentalisent plus qu’elles ne valorisent les capacités créatives individuelles. C’est ensuite
(84) Le réseau des musiques du monde
« Zone Franche »
rassemble 210 structures adhérentes
(dont une dizaine en Aquitaine)
et une soixantaine d’adhérents
personnes physiques
(dont 2 en Aquitaine).
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un plaisir collectivement entretenu par les pratiques en groupes, par les communautés
qui se créent à travers les affinités esthétiques des différents genres musicaux entre
musiciens ou artistes, puis entre musiciens et leurs publics. Des univers sociaux plus ou
moins formalisés, plus ou moins en marge se constituent et se prolongent. Les musiques
émergentes trouvent presque toujours leurs racines dans « l’underground », à la fois monde
incorporé et monde à part, peu visible car non installé. Les héritages se perpétuent dans
cette mouvance du corps social, aussi bien production que contestation des modèles
sociaux dominants. Le blues et le jazz issus des minorités afro-américaines ont interpellé
puis diverti la société blanche nord-américaine, tout en contribuant à l’affirmation du
mouvement de lutte contre la ségrégation raciale quelques décennies plus tard. Le rock
fut perçu à ses débuts aux Etats-Unis puis en Europe comme une musique de
« dégénérés » menaçant l’ordre social établi. Plus tard, les mouvements punk, métal
et le rap/hip-hop, avec leurs codes vestimentaires et leurs cultures de rue, ont participé
à la dénonciation des dégâts sociaux de nos sociétés contemporaines urbanisées et
post-industrielles, sur fond de crise économique et de chômage.
Parfois marginales, ces pratiques socio-culturelles liées aux musiques actuelles, par la
demande sociale et les énergies qu’elles mobilisent, sont pourtant bel et bien des
pratiques de plus en plus répandues qui favorisent quand elles ne le préservent pas ce
qui peut subsister du lien social. On peut sans doute partager de ce point de vue
l’analyse du sociologue Marc TOUCHÉ quand il parle de phénomène anthropologique.
Il y a sûrement une lecture à faire de ce que ces pratiques recouvrent en effet sous cet
angle anthropologique, de ce qu’elles expriment ou désignent des sociétés d’où elles
émergent. C’est hors de portée de ce travail mais une dimension à ne pas négliger dans
la construction d’une politique publique en faveur des musiques actuelles car elles
renvoient à un acte autant qu’à un concept : celui de civilisation.
Il y a donc cette part essentielle de plaisir qui n’est pas que simple divertissement, dans
la mesure où il contribue à la construction des individus, à leur individuation. Il participe
en outre à une forme de tissage social, à travers lequel les personnalités s’enrichissent
du contact aux autres et donc à une forme de transindividuation. Qu’est-ce qu’un
groupe de musique in fine si ce n’est recherche d’harmonie, d’un langage commun,
entre ceux qui le composent et dans la composition issue de ce collectif, cet « êtreensemble » créé puis partagé, parfois accessible au plus grand nombre ?
Ces pratiques ré-créatives, tant par les divers comportements d’écoute que par l’engouement qu’elles suscitent en particulier, mais de moins en moins exclusivement,
parmi les jeunes générations, constituent les supports de projets artistiques et professionnels, autrement dit d’une forme d’artisanat et d’activités multiples. Considérées
dans leur ensemble, celles-ci structurent une véritable chaîne ou système qui se caractérise
par la co-existence de multiples acteurs, pour la plupart représentatifs d’une économie
sociale et solidaire, à la fois héritiers et acteurs de l’éducation populaire, et d’entreprises
opérant dans l’univers très intégré et oligopolistique des industries culturelles, positionnées
sur un marché de masse, celui de la consommation de loisir.
Dans ce contexte, l’approche des activités induites par ces pratiques est sous-tendue par une
question qui interroge au premier plan la politique publique : comment agir sur les éléments
de cette chaîne et faire en sorte que le spectacle ne tue pas la pratique sociale ?85
(85) Audition de Jean-Jacques CASTERET,
Institut Occitan, le 12 janvier 2010.
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3 - Ouvrez le son
Pratiques et projets générateurs
d’activités et d’innovations
Les pratiques artistiques et sociales liées aux musiques actuelles, dans toute la diversité
déjà soulignée en introduction de ce rapport, ne peuvent être dissociées des contextes
socio-économiques dans lesquels elles sont apparues et continuent de s’exprimer
aujourd’hui.
Dès le début du 20ème siècle, ce contexte est celui de l’édification d’une société
consumériste dont les industries culturelles offrent une illustration, celle d’une économie
des loisirs de masse. Le chapitre précédent consacré aux pratiques offre déjà beaucoup
d’indices à la fois sur le poids de la dimension économique liée à ces pratiques, qui
détermine non seulement des conditions d’accès (à l’écoute, à la pratique) mais aussi la
façon dont les industries culturelles peuvent orienter les comportements du public,
considéré en tant que consommateur de produits culturels.
De nombreuse études86 ont en effet démontré le rôle central des « majors » ou des industries
du disque et des médias, dans leur capacité aussi bien à influencer les goûts du public
et à récupérer des courants musicaux émergents pour en faire des produits marketing
générateurs de profits en prenant le minimum de risque (cas de la pop, de la techno).
Il suffit pour s’en persuader de constater que 4 « majors » (Universal Music, Warner Music,
Sony Music, EMI) réalisent les trois quarts du chiffre d’affaires du marché physique en
France et que tous les artistes figurant dans le top « 50 » des ventes sont distribués par
l’une ou l’autre de ces majors. Celles-ci exercent un rôle également décisif en terme de
création, générant parfois des styles/produits créés de toutes pièces par leur direction
artistique, jouant sur les effets de mode et le « star system »87. Certains observateurs ou
spécialistes de sciences sociales ont même considéré que ces nouvelles formes musicales,
compte-tenu de leur dépendance voire aliénation aux lois du marché et aux industries
culturelles, ne pouvaient plus être considérées comme des formes d’expression artistique88.
Des travaux de recherche89, fortement influencés par le fonctionnalisme d’une certaine
sociologie nord-américaine, ont mis en évidence les particularités et les nouvelles
tendances des consommateurs de musiques actuelles. D’abord, il faut souligner la part
affective et irrationnelle des consommations liées à ces musiques, marquées par
une forte implication des publics/consommateurs. Ces comportements dépendent
de plusieurs variables : sensorielles, imaginaires (liés au fantasme ou à la nostalgie),
émotionnelles (joie, tristesse, colère…) et analytiques ou cognitives (liés à la connaissance
technique). Dans le cadre de concerts, on retrouve de la même façon ces éléments
comportementaux liés à l’émotion ou au plaisir, aux aspects cognitifs, à la surprise,
au sentiment de communion ou au statut social associé à tel ou tel type de concert, qui
renvoient tout autant à la perception subjective de l’œuvre artistique qu’à la perception
de soi vis-à-vis d’une communauté ou d’un environnement social.
La pression exercée par les médias (audiovisuels) et les stratégies marketing des grandes
maisons de disque jouent aussi beaucoup de la dimension festive et de plaisir comme
levier majeur des pratiques d’achat. Dans cet univers, la place des artistes et des acteurs
indépendants en région, qui restent au cœur de la vitalité et de la création des musiques
actuelles, n’est pas chose évidente. En dépit de la volonté et des efforts déployés pour
(86) Dont ceux de Gérôme GUIBERT
déjà cités.
(87) Ainsi en est-il de la dance
et du phénomène des « boys band »
(Worlds Apart, 2 be 3,
G-Squad, Boyzone…)
(88) C’est par exemple le cas
de Théodor W. ADORNO,
de Max HORKEIMER
ou d’Alain FIENKIELKRAUT.
(89) Cf. à ce sujet les travaux conduits
au sein de la chaire « Arts, Culture
et Management en Europe » (ACME)
de Bordeaux École de Management –
Audition du 19 mai 2010.
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échapper à la logique purement marchande (avec des slogans tels que le « Do it yourself »
porté par le mouvement punk, ou celui de « no profit »), il n’en demeure pas moins
que la plupart des acteurs et artistes indépendants s’inscrivent dans une démarche qui
participe à la fois d’une réalité sociale (des pratiques) et d’une réalité économique. Il faut
des ressources pour créer, pour former et accompagner, pour produire, pour enregistrer,
pour diffuser.
Parallèlement, le marché a besoin de création et d’innovation afin de se perpétuer.
Ensuite, toute la création musicale n’a pas vocation à devenir populaire au sens d’une
consommation de masse. Enfin, l’activité de l’ensemble des acteurs, indépendants en
région et des « majors », repose pour une large part sur les capacités créatives d’auteurs,
compositeurs et interprètes, à générer des œuvres et à rencontrer un public. Plusieurs
spécialistes du secteur ont ainsi démontré comment les acteurs indépendants étaient
devenus d’une certaine manière les départements « recherche-développement » des
industries culturelles. Participant activement à la découverte et à l’émergence de nouveaux
talents, ces acteurs jouent un rôle clé au risque de voir une partie de leur travail leur
échapper sans nécessairement retour sur investissement. Pour que le système s’entretienne, les « majors » n’ont pas intérêt à prendre directement le contrôle des acteurs
indépendants qui continuent à œuvrer dans une certaine marginalité. Ces derniers, pour
survivre, peuvent de leur côté trouver un intérêt à construire des liens avec les industries
du secteur.
Par ailleurs, l’approche des pratiques a mis en évidence le fait que celles-ci ne sont,
dans leur très large majorité, pas fondamentalement guidées par une démarche de
valorisation professionnelle ou économique. Elles participent d’abord à la satisfaction
d’envies personnelles motivées par le plaisir de jouer, de se retrouver entre amis. Ainsi,
la dimension hédoniste des pratiques vaut pour les publics comme pour les artistes,
amateurs ou professionnels. Pour beaucoup de groupes et d’artistes amateurs, la motivation
première est celle de la pratique ludique ou artistique et non celle d’un plan de carrière
ou la recherche d’une activité lucrative, voire plus simplement d’un « emploi » au sens
classique du terme, même si l’image diffusée par les médias à travers certains programmes
tend à alimenter le fantasme d’une carrière artistique chez certains jeunes. Il arrive certes que,
fort du succès rencontré auprès d’un public, cette pratique amène tel ou tel groupe ou
artiste à une forme de notoriété générant des revenus plus ou moins importants tirés de la
vente de disques, de tournées et de droits d’auteur. Cela reste pour beaucoup une relative
exception. Relative car l’absence d’une forte notoriété et la faiblesse de moyens n’empêchent
pas nombre de musiciens et chanteurs de produire des œuvres, de les faire éditer sous
forme de disques, de se produire en concerts et de rencontrer leur public. Une exception
aléatoire aussi car si succès artistique il y a, celui-ci est rarement linéaire et régulier.
Autrement dit, malgré la domination oligopolistique des industries culturelles, d’autant
plus écrasante que leur concentration est poussée, le poids de la stricte logique économique
dans le secteur des musiques actuelles doit être nuancé sans être loin de là négligé.
Dans ce secteur des musiques actuelles, on peut distinguer plusieurs approches qui
traduisent un rapport particulier à la logique économique :
- les producteurs privés tenants d’une régulation par les seules « lois » du marché,
- les héritiers d’une approche selon laquelle il ne peut exister de création culturelle sans
aide publique,
- les acteurs de « l’underground », marqués par une vision communautariste,
- les porteurs d’une économie « hybride », ancrés dans l’économie sociale (qui représenteraient 40 % à 60 % du secteur)90.
(90) Cf. audition de MM. ROUX
et TEULÉ, RAMA, le 26 janvier 2010.
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Ce secteur subit aujourd’hui de profondes remises en question. Il se trouve confronté
depuis quelques années à la chute des ventes de supports physiques, à la concurrence
des supports et des usages numériques, qui transforme l’équilibre général de la filière
musicale, mais également aux évolutions des comportements dans un contexte de crise
économique.
L’évolution de ces comportements est de plus en plus influencée par l’usage des nouveaux
outils numériques, dont les effets se font ressentir à plusieurs niveaux : habitudes d’accès
gratuit aux œuvres, développement de l’autoproduction et de la co-création, de
communautés et de rituels sociaux, nouvelles interactions entre les artistes et leurs
publics. Ces tendances comportementales s’expriment à travers de nouvelles formes de
relations commerciales : marketing viral (un artiste se fait repérer et connaître via un
buzz créé par ses fans sur Internet – cas du groupe anglais Arctic Monkeys), mécénat (les
internautes-contributeurs deviennent co-producteurs d’artistes sur des sites de réseaux
sociaux – exemple de Grégoire sur le site et label communautaire MyMajorCompany) ou
marketing relationnel (exemples de Janet Jackson ou de Cali qui ont développé à partir
de leur site propre des liens privilégiés avec leurs « fans »).
L’ensemble des acteurs de cette filière en région, des artistes aux lieux de diffusion en
passant par les éditeurs phonographiques, les producteurs, tourneurs, et distributeurs
sont touchés à divers titres par ces évolutions. Là encore, l’action des pouvoirs publics
n’est pas sans incidence sur la capacité de ces acteurs à anticiper et à maintenir des activités offrant la possibilité aux pratiques de s’exercer dans toute leur diversité.
L’objectif de cette partie vise à rendre compte de ces réalités abordées non plus sous
l’angle des pratiques sociales ou culturelles mais sous celui des activités et de leur dimension économique, en commençant par l’activité de l’artiste dès lors qu’elle s’inscrit dans
le registre d’une prestation artistique rémunérée.
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3.1 De la passion au métier
ou la pratique à l’épreuve de la précarité
Même si une très large majorité d’artistes et de groupes s’inscrivent dans une démarche
de pratique amateur, nombre d’entre eux bénéficient d’une diffusion, aussi minime
soit-elle, qui génère des ventes (de disques, d’entrées) et donc des revenus. Une partie
de ces artistes et groupes a acquis une reconnaissance professionnelle ou est en voie de
professionnalisation.
Etant donné la porosité déjà soulignée des frontières entre pratique amateur et pratique
professionnelle, il est difficile de connaître avec exactitude le nombre de musiciens en
activité percevant un revenu de leur pratique artistique, fut-il accessoire. Qui plus est, les
statistiques disponibles restent assez globales et ne permettent pas de distinguer parmi
les musiciens ceux exerçant dans le champ des musiques actuelles.
Par ailleurs, outre les artistes professionnels, la filière musicale rassemble une grande
diversité d’emplois permanents et occasionnels dans les domaines techniques (techniciens
du spectacle tel que les professionnels du son) et administratifs, répartis sur l’ensemble
du territoire auprès d’un grand nombre d’associations et sociétés, souvent de taille
modeste.
3.1.1 Un marché de l’emploi dynamique mais atypique et instable
Les statistiques officielles font état de 126 800 professionnels de l’audiovisuel et du spectacle vivant en France, dont 53 900 artistes des spectacles et 72 900 techniciens du
spectacle (source INSEE/DEPS, 2007). L’exploitation des déclarations annuelles des données sociales apporte des informations complémentaires. Ainsi, pour l’année 2007, plus
de 328 000 contrats-salariés ont été enregistrés (d’au moins 1 heure) dans le champ du
spectacle vivant (hors audiovisuel) pour 24 500 établissements employeurs. Ces
volumes doivent être comparés à ceux délivrés par Audiens, l’organisme de protection
sociale des métiers du spectacle et de l’audiovisuel. Celui-ci a recensé en 2007 près de
324 000 salariés ayant travaillé au moins 1 heure en 2007 dans le secteur culturel dont
178 000 dans le seul spectacle vivant pour près de 17 000 entreprises.
Ces données, qui ne concernent pas le seul secteur musical mais l’ensemble du spectacle
vivant, témoignent du caractère particulier de la structure des emplois dans ce vaste
domaine :
- une durée moyenne de travail dans l’année plus courte que l’ensemble des salariés
tous secteurs confondus,
- une part importante de contrats de courte durée (plus de 85 % des salariés du spectacle
vivant sont en CDD, ceci étant lié au poids de l’intermittence),
- une majorité des salariés travaillant pour plusieurs employeurs dans l’année, une part
relativement importante de pluri-actifs (travaillant dans le champ culturel ET hors du
champ culturel, tant du point de vue des emplois occupés que de la nature des métiers
exercés).
Le secteur du spectacle vivant se distingue aussi par l’importance des emplois non salariés (37 % des emplois).
Le DEPS du Ministère de la Culture a dressé une typologie des emplois salariés dans le
secteur culturel. Le groupe le plus important (27 % du total) est celui des intermittents
précaires exerçant en particulier dans le champ du spectacle vivant (dont artistes musiciens
et les assistants techniques de la réalisation de spectacles vivants). Parmi eux, certains
exercent parallèlement un métier non spécifique (profession intermédiaire administrative
ou commerciale, employés administratifs…) et 20 % travaillent à titre secondaire auprès
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d’employeurs hors champ culturel. Ces salariés intermittents à employeurs multiples
cumulent plusieurs contrats à durée déterminée dans l’année et se caractérisent aussi
par une assez forte mobilité professionnelle dans la nature des emplois occupés hors
spectacle. Cette catégorie de salariés est assez jeune (36 ans en moyenne, 53 % de
moins de 35 ans). Un groupe plus restreint est celui d’intermittents bien insérés (8 %),
cumulant souvent plusieurs postes dans plusieurs secteurs du spectacle. Parmi eux, on
trouve des salariés occupant des fonctions artistiques (dont musiciens) ou technicoadministratives (de direction, d’encadrement technique ou d’assistance). Ces derniers
présentent des temps de travail et des niveaux de rémunération relativement plus élevés
(plus des deux tiers percevant plus de 15 € nets par heure travaillée). Ils sont en moyenne
un peu plus âgés et expérimentés que la catégorie des intermittents précaires. Environ
20 % exercent en outre une activité secondaire mais à vocation artistique hors du champ
culturel (notamment pour des associations ou pour des collectivités). Un troisième
groupe dans cette typologie intéresse le secteur du spectacle vivant : celui des
« aspirants » (23 %). Ces derniers ont une activité principale hors champ culturel mais
interviennent ponctuellement dans le spectacle vivant. On retrouve dans cette population
une part importante de musiciens mais aussi des cadres technico-artistiques. Leur situation
en tant que salariés reste instable ou précaire, avec une majorité de CDD et de faibles
rémunérations. C’est la population la plus jeune des salariés du spectacle (60 % ont
moins de 35 ans et 34 ans de moyenne d’âge).91 Enfin, les emplois dans le spectacle
vivant sont très majoritairement occupés par des hommes (le taux de féminisation étant
particulièrement faible parmi les artistes de la musique et du chant – de l’ordre de
20 %92).
Une autre caractéristique des artistes et techniciens du spectacle est leur niveau d’études
générales, beaucoup plus élevé que la moyenne des actifs (les deux tiers de niveau
bac +2 et au-delà contre le tiers pour l’ensemble des actifs).
Une analyse plus détaillée des catégories professionnelles issues des DADS93 révèle qu’il
y aurait en France environ 28 000 artistes salariés de la musique et du chant (2007). Une
autre source déclarative officielle, l’enquête emploi, indique quant à elle un peu plus de
33 000 artistes musiciens et chanteurs, salariés et non-salariés, pour cette même année.
On peut donc estimer que le nombre d’emplois artistiques dans le secteur de la musique
et du chant est de l’ordre de 30 000 à 35 000, hors professions techniques ou administratives associées. Cela permet de constater que les musiciens et chanteurs représentent
en volume la population la plus importante des professions d’interprétation artistique.
Un rapport publié en 2003 par le DEPS sur les musiciens interprètes94 révélait que plus
des trois quarts des musiciens étaient instrumentistes et que plus de 70 % exerçaient
dans le domaine des musiques populaires, avec une activité marquée par la flexibilité
(85 % intermittents ou enseignants précaires).
L’instabilité des emplois dans les professions artistiques et techniques de la culture et du
spectacle se retrouve dans les statistiques du nombre de demandeurs d’emploi non
indemnisés enregistré par les services culture-spectacle du Pôle Emploi. Au 31 décembre
2008, plus de 156 000 demandeurs d’emploi relevant des métiers culturels étaient
inscrits sur les listes du Pôle Emploi, dont près de 33 000 artistes de la musique et du
chant (21 %) et plus de 10 000 professionnels du son. De son côté, la Caisse des Congés
Spectacles qui couvre les salariés intermittents (ou contrats à durée déterminée d’usage,
CDDU) a enregistré plus de 134 000 bénéficiaires en 2008, dont plus de 55 % d’artistes.
En dix ans, l’accroissement du nombre de bénéficiaires a été spectaculaire. Concernant
le public des intermittents (qui n’est pas un statut mais un régime d’indemnisation des
chômeurs du spectacle), le nombre total d’allocataires indemnisés au titre des annexes VIII
(techniciens) et X (artistes) de l’assurance chômage était de 82 000 artistes et techniciens
(91) « Une typologie de l’emploi salarié
dans le secteur culturel en 2007 » Marie GOUYON, DEPS –
Collection Chiffres n° 2010-3.
(92) Selon l’Enquête Emploi 2007
(INSEE).
(93) Déclarations Annuelles
des Données Sociales.
(94) « Étude sur les musiciens interprètes »
- Philippe COULANGEON,
DEPS-Ministère de la Culture, 2003.
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au 31 décembre 2008. En vingt ans, c’est pour les musiciens et pour les techniciens du
son que la progression des effectifs intermittents a été la plus forte (presque multipliée
par 595). Des travaux plus anciens de la DARES (2005) indiquaient que les deux tiers des
artistes de la musique demandeurs d’emploi (musiciens, artistes musiciens, artistes de
variétés, chanteurs, professeurs de musique) étaient indemnisables au titre de l’assurance
chômage et près de la moitié au titre de l’annexe X. Un tiers de ces artistes demandeurs
d’emploi étaient donc non indemnisés et, parmi eux, on comptait 16 % de bénéficiaires
du RMI ou d’une allocation de solidarité.
Au cours des années 1990, la situation des intermittents s’est fortement dégradée en
raison d’une part de l’accroissement très important du nombre d’artistes et techniciens
professionnels, qui n’a pas été accompagné d’une évolution aussi rapide de l’offre
d’emplois, produisant une sorte d’effet ciseau sur le marché de l’emploi du spectacle.
Cette dégradation a été particulièrement marquée pour les musiciens (avec un volume
de travail et une rémunération moyenne divisés par 2 durant la décennie).
La situation semble s’être stabilisée depuis le début des années 2000, grâce notamment
à une hausse du nombre de demandeurs d’emploi indemnisés au titre des annexes VIII
(techniciens) et X (artistes) de l’assurance chômage, mais aussi du fait d’un accroissement
de l’offre d’emplois, notamment dans le spectacle vivant. Au total, près de 94 000 offres
d’emploi dans les métiers de la culture et du spectacle ont été collectées par le Pôle
Emploi culture-spectacle en 2008. Cela s’explique par une augmentation très significative
du nombre d’entreprises du spectacle depuis le milieu des années 1990 (multiplication
par 3 pour les seules entreprises du spectacle vivant), avec une forte majorité d’associations,
témoignant de la vitalité de ce secteur.
Le poids du secteur associatif doit en effet être souligné à ce niveau. Une enquête
réalisée en 2007-2008 par l’association Opale96 révèle que la moitié des 31 400 associations
culturelles employeurs en France exercerait dans le spectacle vivant, dont 21 % dans le
secteur de la musique (création, diffusion, ateliers-cours…) et 10 % dans le seul champ
des musiques actuelles (soit environ 3 000). Parmi ces dernières, 45 % interviendraient
en matière de production-édition, un tiers dans l’organisation de festivals, 29 % dans la
fourniture de services et près du quart dans la gestion de lieux de diffusion. L’ensemble
de ces associations culturelles générerait au total près de 92 000 emplois à temps plein.
Notamment dans les associations ayant une activité de création, le noyau dur des emplois
est constitué de contrats à durée déterminée d’usage (intermittents). A l’opposé, les
structures associatives employeurs dans le champ de l’apprentissage (ateliers-cours)
sont essentiellement composées de CDI. La part du bénévolat y est également importante (estimation : plus de 430 000 bénévoles pour 4,8 millions d’adhérents), surtout
parmi les structures à faibles ressources (notamment celles œuvrant dans le domaine de
la diffusion). Le poids des employeurs associatifs dans les entreprises du spectacle vivant
de musiques actuelles et de variétés est confirmé par des enquêtes du Centre National
de la Variété97. Celles-ci révèlent que les deux tiers des structures exerçant dans ce
domaine (entreprises sans lieu fixe, salles, festivals) sont sous gestion associative (et près
de 90 % des festivals). La part des artistes/musiciens dans le nombre total de permanents est très variable : nulle dans les salles mais de 13 % dans les entreprises sans lieu
fixe. Celle des techniciens est relativement importante dans les salles (24 %). La part des
personnels administratifs et d’accueil représente plus des trois quarts des effectifs permanents de ces structures.
L’importance de l’emploi généré par des entreprises dont l’activité principale ne relève
pas du spectacle vivant98 est mesurable à travers les statistiques délivrées par le Guichet
Unique du Spectacle Occasionnel (GUSO).
(95) Passant de 5 500 en 1987
à 26 000 pour les musiciens
et de 1 400 à 6 000 pour les techniciens
du son – Cf. « Tendances de l’emploi
dans le spectacle » - Marie GOUYON,
Frédérique PATUREAU –
Culture Chiffres n° 2010-1, février 2010.
(96) « Vers une meilleure connaissance
des associations culturelles employeurs –
Rapport d’enquête » OPALE/CNAR, septembre 2008.
(97) « Enquête économique et sociale
auprès des entreprises du spectacle
vivant de musiques actuelles et de
variétés » - CNV, 2008.
(98) Aussi bien personnes physiques que
morales, particuliers, commerçants,
entreprises telles que les hôtels
ou restaurants, associations,
collectivités…
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En 2008, près de 90 000 employeurs actifs ont embauché temporairement des artistes
et techniciens du spectacle, générant quelque 605 000 déclarations d’embauche
ponctuelles.
L’analyse de ces quelques données de cadrage ne fait que renforcer le caractère atypique
des professions artistiques et techniques liées au spectacle vivant et plus particulièrement
aux musiques actuelles. Dans un tel système, on comprend plus facilement l’attitude de
nombre d’artistes ou groupes qui se revendiquent d’une pratique amateur, en dépit
d’un véritable professionnalisme : sans sous estimer la posture guidée par un choix
éthique et par une volonté d’indépendance à l’égard du système consumériste, cette
attitude s’impose par l’application d’un simple principe de réalité99. Cette réalité est
souvent celle d’une lutte contre la précarité, liée à l’instabilité et à la durée des contrats
de travail, à la relative faiblesse des cachets ou salaires versés et aux inquiétudes que
ce type de situation peut provoquer. Autant dire que la plupart des musiciens et
techniciens travaillant dans ce secteur ne s’engagent pas avec pour motivation essentielle
celle d’un avenir bien tracé et assuré. Notamment pour les artistes, cet investissement
personnel dans une activité artistique à titre professionnel est avant tout le prolongement
direct sinon logique d’une passion, d’un plaisir, d’un style de vie, et bien plus que la
simple résultante d’une formation. D’autant que ces statistiques ne font pas la distinction
entre musiciens amateurs diffusés et musiciens professionnels avérés, sachant que tout
employeur ayant à titre principal ou occasionnellement eu recours à un musicien ou
technicien du spectacle est supposé avoir établi un contrat.
Or, pour certaines catégories d’employeurs potentiels ou occasionnels une source
d’ambiguïté subsiste lors du recours à des groupes ou musiciens amateurs, débutants
notamment, souhaitant se produire en public. Est-il en ce cas nécessaire d’établir un
contrat ? Une rémunération s’impose-t-elle ou non ? Cette question est d’ailleurs à
l’origine de la création de certains collectifs, à l’image du collectif Culture Bar-Bars qui
rassemble des petits établissements, bars et bistrots, résolument engagés dans une
démarche de promotion et de diffusion de spectacles vivants, dans l’esprit des
Caf’Conc’. Ce collectif appelle à un assouplissement du cadre réglementaire ou à une
interprétation moins rigide de certains textes, notamment s’agissant de l’autorisation de
pratique amateur, sauf à courir le risque de travail dissimulé. Il est clair que ces lieux (cf.
chapitre 3.2.4) jouent un rôle spécifique de facilitateur pour des groupes ou artistes
débutants désirant se « frotter » à la scène et face à un public, aussi limité soit-il.
En Aquitaine, l’approche de l’emploi permanent dans le secteur des musiques
actuelles est d’autant plus difficile que les sources statistiques disponibles au niveau
national ne sont pas toujours exploitables au niveau régional et portent sur l’ensemble
du champ « spectacle vivant ».
Si l’on se réfère aux déclarations annuelles des données sociales, ce sont près de 13 500
salariés qui auraient travaillé au moins une heure dans le champ du spectacle
vivant en 2007, soit 4 % du total national, (pour un total de 4,85 millions d’heures),
dans 1 371 établissements.
La source Audiens mentionne quant à elle près de 8 900 salariés ayant travaillé au
moins une heure dans le spectacle vivant en Aquitaine (5 % du total national) pour
788 entreprises. L’enquête emploi de l’INSEE révèle, à titre indicatif, que plus de 4 000
Aquitains déclarent exercer la profession d’artiste de la musique et du chant (2007).
Les services du Pôle Emploi Culture-Spectacle au niveau régional100 enregistraient
2 800 bénéficiaires d’une allocation chômage au titre des annexes VIII (techniciens)
et X (artistes) au 31 décembre 2009 (soit 3 % du total national), dont un tiers
d’artistes musiciens (près de 900), 7 % techniciens du son (près de 200) et une
(99) Sans négliger ici l’effet
des interprétations du décret
du 19 décembre 1953 (n° 53-1253)
relatif à l’encadrement
des spectacles amateurs.
(100) Cf. audition
de Mme Laurie LEBLOND,
Pôle Emploi Culture-Spectacle BordeauxAquitaine du 4 mars 2010.
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faible part d’enseignants artistiques (1,7 % soit une cinquantaine). La moyenne d’âge
de ces bénéficiaires est de 39/40 ans. En 20 ans, le nombre total de bénéficiaires a été
multiplié par 3.
Les données « Congés spectacle » pour l’année 2008 indiquent que l’Aquitaine
représente 3,1 % des bénéficiaires (soit environ 4 100 salariés du spectacle). D’après
les informations transmises par le Pôle Emploi Culture-spectacle, près de 5 000
demandeurs d’emploi non indemnisés relevaient du secteur culture-spectacle en
Aquitaine (3,6 % du total national). Parmi ceux-ci, 2 300 étaient des professionnels
de la musique ou du son, dont 1 550 musiciens (près du tiers des demandeurs
d’emploi culture-spectacle), 425 techniciens du son et plus de 300 enseignants
artistiques (au sens large). Ce nombre de demandeurs d’emploi a progressé de 4,5 %
entre décembre 2008 et décembre 2009 (+ 16 % tous métiers confondus), sachant
que l’activité est fluctuante dans l’année.
Environ 80 % de ces demandeurs d’emploi sont dans la tranche 25-49 ans (les deux
tiers pour l’ensemble des demandeurs d’emploi), la part des jeunes étant relativement
plus faible, notamment parmi les artistes-musiciens. On peut supposer que l’inscription
au Pôle Emploi traduit une démarche de professionnalisation d’artistes ou musiciens
désirant vivre de leur pratique, démarche qui n’est pas systématique chez les moins
de 25 ans, pratiquant plutôt en amateurs. Hormis pour l’enseignement artistique où
elles sont majoritaires, les femmes sont très minoritaires parmi les artistes/musiciens
et techniciens du son demandeurs d’emploi (20 % des artistes, 5 % des techniciens
son). Ce profil de population correspond à celui constaté au niveau national pour
l’ensemble des actifs du spectacle. C’est parmi les artistes que l’on enregistre la plus
forte proportion de demandeurs d’emploi de longue durée (2 ans et plus d’inscription),
soit plus de la moitié d’entre eux (58 %) et parmi les enseignants artistiques que la
durée d’inscription est la plus courte (52 % inscrits depuis moins d’un an). Plus de la
moitié (54,5 %) des demandeurs d’emploi musiciens/techniciens du son/enseignants
artistiques résident en Gironde et 20 % dans les Pyrénées-Atlantiques. Près de 9,5 %
d’entre eux sont localisés dans les Landes et autant en Dordogne. Enfin, 7 % de ces
demandeurs d’emploi se situent en Lot-et-Garonne.
Les niveaux de formation sont élevés avec 50 % de niveau III et plus (bac +2 et plus)
ou 83 % de niveau bac minimum pour les enseignants artistiques, un tiers de niveau III
et plus ou les deux tiers de niveau bac et plus pour les musiciens et pour les techniciens
du son (moyenne pour l’ensemble des demandeurs d’emploi : 22 % de niveau III et
plus ou 42 % de niveau bac et plus).
Parallèlement, le volume des offres d’emploi enregistrées par le Pôle Emploi Culture
Spectacle en Aquitaine a atteint 300 en 2009, dont la moitié pour les artistes de la
musique et du chant, 45 % dans l’enseignement artistique et 5 % dans la prise de
son. Ce volume relativement faible ne doit pas masquer une autre réalité de ce
marché de l’emploi dans le spectacle : la part importante du marché dit « caché ».
Plus largement, et selon les sources DADS, il y aurait en Aquitaine 1 370 établissements
employeurs dans le spectacle vivant. D’après les statistiques dressées par la caisse
des Congés Spectacle et par Audiens, le nombre d’entreprises ayant employé
des salariés intermittents (Congés Spectacle) ou ayant eu recours à des salariés
permanents et intermittents durant au moins 1 heure (Audiens) dans le spectacle
vivant est légèrement inférieur à 800 en Aquitaine. A ceci, Audiens fait état de 180 autres
entreprises employeurs exerçant dans d’autres activités du spectacle, d’une vingtaine
d’entreprises hors spectacle mais ayant eu un recours régulier à des intermittents. Selon
les services déconcentrés du Ministère de la Culture (DRAC Aquitaine), environ 250
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entreprises exerceraient dans ce secteur au niveau régional, dans 70 métiers ou activités.
Enfin, le GUSO qui recueille les demandes d’entreprises ayant une activité hors
spectacle vivant mais ayant eu recours à des artistes ou techniciens du spectacle de
manière occasionnelle, a identifié près de 5 000 employeurs actifs. Ainsi, on peut
estimer au minimum à un millier le nombre d’entreprises employeurs exerçant dans
le secteur du spectacle vivant en Aquitaine et à 5 000 le nombre d’employeurs
occasionnels d’artistes et techniciens du spectacle.
Dans ce domaine, il faut souligner ici la présence prépondérante des entreprises
employeurs sous statut associatif. En effet, et sur la base de l’enquête nationale
conduite par l’association Opale, la part d’établissements employeurs du secteur
culturel de statut associatif (dont spectacle vivant) en Aquitaine représenterait 5,3 %
du total, soit 1 660 établissements. Cette estimation est cohérente avec les résultats
du traitement DADS. Cela revient à constater que la quasi-totalité des emplois
relevant du spectacle vivant en Aquitaine repose sur des employeurs associatifs,
participant en cela largement au mouvement de l’économie sociale et solidaire.
Les services de Pôle Emploi soulignent en Aquitaine la place importante des employeurs
de très petite taille (70 % parmi ceux identifiés par ce service ont moins de 10 salariés)
et la part encore non négligeable du travail dissimulé (ou considéré comme tel), en
raison de l’importance des pratiques en amateur ou semi-professionnelles. L’état des lieux
réalisé par l’Observatoire régional de la culture confirme le poids des micro-entreprises
employeurs (50 % des entreprises de moins de 5 salariés, plus des deux tiers d’entreprises
de moins de 10 salariés).
L’analyse plus approfondie des caractéristiques du marché de l’emploi dans le spectacle
vivant, et plus particulièrement dans le domaine des musiques actuelles, a mis en évidence
d’autres facteurs d’instabilité ou de précarité qui relèvent plus globalement des pratiques
de gestion de l’emploi et des compétences dans les entreprises du secteur.
3.1.2 Gestion de l’emploi et des compétences :
une partition en cours d’écriture
Dans ce domaine, plusieurs aspects doivent être pris en considération au regard des
spécificités des « métiers » ou professions relevant du champ des musiques actuelles :
- Tout d’abord la diversité des activités qui, de l’artiste au diffuseur en passant par les
producteurs et éditeurs, interviennent dans la valorisation des œuvres musicales et
mobilisent des compétences particulières : non seulement artistiques, mais aussi
techniques et administratives (direction, gestion, communication)… Autrement dit, la
valorisation des œuvres repose sur un ensemble de fonctions-supports plus ou moins
directement liées à la production artistique.
- Ensuite, la diversité des employeurs, marquée par une forte prédominance de petites
ou très petites structures sous statut associatif, avec des « cultures » de management
également diversifiées.
Les travaux conduits dans ce domaine101 mettent en évidence le poids relativement
important des CDI dans les structures ou activités supports (65 % à 70 % des emplois
soit un taux plus élevé que pour l’ensemble des emplois du spectacle vivant, moindre
cependant que pour l’ensemble de la population active) mais aussi des emplois aidés (le
tiers des emplois à 45 %, notamment en raison de la place prépondérante d’employeurs
associatifs).
Un autre facteur ou indicateur en matière de gestion de l’emploi et des compétences est
lié à la convention collective de rattachement des structures employeurs. Ces dernières
(101) Cf. études du Groupe de recherche
Angevin en Economie et Management
de l’Université d’Angers – UMR-MA
n° 49 et audition
de Mme Carole LE RENDU –
LIZEE le 4 mars 2010.
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ont la possibilité de se référer à différentes Conventions Collectives Nationales : CCN de
l’animation, CCN du Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles, CCN
des centres de formation, CCN chanson-jazz-variétés-musiques actuelles ou encore CCN
des travailleurs des médias (CSC)… Un projet de convention collective a été engagé à
l’initiative du Syndicat des Musiques Actuelles mais semble aujourd’hui au point mort.
Le choix repose ici sur un arbitrage qui dépend du poids des charges fixes de personnel
lui-même lié à plusieurs paramètres tels que l’activité dominante, le poids respectif
des différentes familles professionnelles dans l’entreprise, la taille des structures, la part
des CDI et des emplois aidés… Pour nombre d’acteurs associatifs, dont l’équilibre
économique reste relativement précaire et dépendant d’aides publiques, le choix
s’oriente le plus souvent vers la convention collective la moins coûteuse (notamment la
CCN de l’animation pour les emplois permanents).
Globalement, on constate en outre des carences en matière de politique de gestion des
emplois et des compétences, marquées par :
- un manque d’organisation (relative absence d’organigramme et de définition de postes),
- une faiblesse des politiques de recrutement (part importante de l’informel et de la
cooptation),
- la rareté des plans de formation ou, lorsqu’ils existent, la faiblesse des liens avec une
gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC)102,
- une faiblesse de l’évaluation (entretiens professionnels peu appliqués).
Pourtant, les employeurs de ce secteur peuvent utiliser les possibilités offertes par leurs
organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) respectifs, tels l’AFDAS ou UNIFORMATION
auprès desquels ils cotisent103. Les personnels artistiques, techniques et administratifs
des structures exerçant dans le champ des musiques actuelles disposent d’un droit et
de possibilités de formation (y compris les intermittents du spectacle). Depuis 1972,
les professionnels du spectacle ont désigné l’AFDAS pour mettre en œuvre la loi de 1971
sur la formation professionnelle continue, notamment en direction des intermittents.
L’AFDAS intervient dans ce domaine pour la mise en œuvre du congé individuel de
formation et gère par délégation la collecte des contributions (dont la taxe d’apprentissage).
Le secteur du spectacle vivant représente 43 % des entreprises cotisantes (sur un total
de 38 000 entreprises affiliées) et 21 % du volume des contributions perçues (157 M€ en
2008). Cette même année, elle a financé 121 000 stagiaires (dont 16 700 intermittents).
Le taux d’acceptation des demandes de formation dans le cadre du Congé Individuel de
Formation par l’AFDAS en 2009 a atteint globalement 60 % au niveau national (70 %
pour les salariés en CDD et les intermittents). En mars 2009, cet organisme a signé un
Accord pour le Développement de l’Emploi et des Compétences (ADEC) dans le secteur
du spectacle vivant, qui devrait être peu à peu décliné dans l’ensemble des régions,
permettant la mise en place d’une GPEC dans les entreprises concernées. Une « boîte à
outils » pour la GPEC dans le secteur est en cours d’élaboration dans le cadre d’une
expérimentation actuellement conduite en région Rhône-Alpes. Enfin, l’AFDAS et le Pôle
Emploi ont signé une convention portant sur la sécurisation des parcours professionnels
dans le secteur culture-spectacle.
Uniformation est l’organisme paritaire collecteur agréé pour l’économie sociale et couvre
17 branches d’activité. En 2008, cet organisme a collecté 170 M€ auprès de ses 41 000
adhérents (dont 89 % de très petites entreprises). Ses priorités actuelles concernent la
promotion des parcours de formation qualifiant et diplômant notamment par la validation
des acquis de l’expérience, les actions de promotion et de mise en œuvre de la GPEC.
D’autres organismes peuvent intervenir dans ce domaine de la formation professionnelle
continue, à l’image de CAGEC gestion104 (Centre d’Aide à la Gestion des Entreprises
(102) À quelques rares exceptions près
(cf. RAMA, CIAM, AGEC ci-après).
(103) Cf. audition
de Mme Béatrice de FOURNOUX,
directrice de l’AFDAS Sud-Ouest
et de Mme Mylène COUTURIER,
directrice d’Uniformation Sud-Ouest
du 8 mars 2010.
Les taux de cotisation varient de 1,3 %
(entreprises < 20 salariés) à 1,6 %
de la masse salariale (plus de 20 salariés)
pour l’AFDAS et à 1,82 %
de la masse salariale pour les entreprises
affiliées à Uniformation.
(104) Cf. audition
de Mme Gaëlle AUDEON,
directrice-gérante de CAGEC Gestion,
le 8 mars 2010.
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Culturelles). Initialement créée sous le Ministère Lang avec une vocation d’agence
destinée à la professionnalisation du secteur culturel, cette structure est devenue une
société privée, basée à Nantes, spécialisée dans la formation professionnelle. Elle
développe son activité autour de trois métiers : la formation, la paye (300 clients, dont les
Folles Journées et le Zénith de Nantes) et l’édition (avec des revues et sites spécialisés105).
Les formations proposées sont des formations de courte durée et ciblées, adaptées aux
contraintes des opérateurs du secteur (1 à 2 jours et stages sur 5 jours maximum). Les
formations les plus demandées par ces derniers portent sur certains thèmes précis,
notamment sur les questions de nature juridique ou en lien avec la diffusion (ex : le droit
d’image, les interventions d’artistes hors spectacles, la réglementation sur le temps de
travail, la diffusion, le management d’équipe, la gestion des conflits, la recherche de
financements privés…). Les stagiaires de CAGEC Gestion en formation (environ 800 par
an) bénéficient pour la plupart de financement de l’AFDAS et de Conseils régionaux.
La réforme des OPCA ne devrait pas modifier substantiellement le paysage des interlocuteurs. L’AFDAS devrait être reconnue comme OPCA représentatif du secteur mais
Uniformation pourrait se regrouper avec un autre OPCA d’ici à 2012. Après extension
des accords relatifs à la formation professionnelle continue dans le spectacle vivant,
toutes les structures dont l’activité principale s’exerce dans ce secteur relèvent de ces
accords, quelle que soit la convention collective appliquée.
Par ailleurs, les services proposés par le Pôle Emploi Culture-Spectacle peuvent contribuer
à répondre à certains besoins des employeurs et salariés du spectacle (dont intermittents).
Cela se traduit notamment par la mobilisation de dispositifs d’emplois aidés (contrats
uniques d’insertion - contrats d’aide à l’emploi), notamment pour les emplois liés à
l’enseignement et aux métiers des fonctions-supports (booking, diffusion, comptabilité…)
mais pas directement pour les emplois artistiques. Toutefois, la durée des emplois aidés
dans ce cadre est limitée (1 an désormais, exceptionnellement 2 ans) Le Pôle Emploi
Culture Spectacle propose également les Dispositifs Locaux d’Accompagnement destinés
aux opérateurs de l’économie sociale et solidaire, avec une formule spécifique adaptée
au secteur culturel.
Enfin, plusieurs interlocuteurs ont mis en évidence l’intérêt de démarches de mutualisation
de l’emploi et des compétences, susceptibles de répondre aux besoins de structuration
et à une meilleure stabilisation des emplois, notamment par le biais de la formule des
groupements d’employeurs. L’un des obstacles actuels à l’application de ce type de
formule au secteur culturel tient aux modalités d’assujettissement fiscal. Il suffit qu’un
seul adhérent soit assujetti à la TVA pour que ce régime s’applique à l’ensemble du
groupement106. La réussite de ce type de démarche doit tenir compte de plusieurs facteurs environnementaux ou géographiques (ex : l’effet de distance ou de mobilité),
organisationnels (technico-économiques et socio-politiques), individuels (ex : conditions
familiales et financières) et des impacts potentiels (charge physique et psychique,
autonomie, soutien social). De manière générale, il apparaît une relative carence du
dialogue social entre employeurs (dont administrateurs d’associations) et syndicats de
salariés sur cet ensemble de questions dans le secteur du spectacle vivant et plus
spécifiquement des musiques actuelles. Ce sont souvent les salariés des structures euxmêmes qui sont porteurs de projets ou d’initiatives.
En résumé, les principaux enjeux à la mise en place d’une véritable politique de gestion
de l’emploi et des compétences dans le secteur des musiques actuelles intéressent :
- d’abord la nécessaire professionnalisation des structures dans ce domaine (accompagnement des plans de formation, compétences entrepreneuriales et stratégiques,
formation des bénévoles),
(105) Une revue
(la « Lettre de l’entreprise culturelle »),
des outils internet
(http://www.legiculture.fr,
« artistes-etrangers.eu »).
(106) Un accord serait intervenu
avec le Ministère des Finances,
permettant aux groupements
d’employeurs de conserver l’exonération
de TVA quel que soit le régime fiscal
de leurs adhérents.
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- celui de l’ouverture sectorielle (sensibilisation, accompagnement et formations en lien
avec d’autres opérateurs des industries culturelles),
- celui de l’ouverture au territoire (mutualisation, renforcement du rôle de « médiateurs »),
- l’ingénierie de formation, par la création de modules plus souples et intersectoriels, pas
nécessairement qualifiants, en direction des publics salariés mais aussi des bénévoles,
- le développement et la mutualisation d’outils de gestion de l’emploi (ex : fiches de poste,
grilles d’entretien d’évaluation, politique de rémunération, gestion des temps…),
- enfin, l’enjeu de l’adaptation en conséquence des politiques publiques.
En Aquitaine, cette problématique de la gestion de l’emploi et des compétences trouve
diverses illustrations.
(107) « Etat des lieux de l’emploi,
des métiers et des qualifications dans
le champ du spectacle vivant
en Aquitaine » - Observatoire
de la culture en Aquitaine – Avril 2008 –
Etude réalisée par l’ObsTer sur la base
de 925 opérateurs actifs avec un taux
de réponse de 27,5 % - Cf. audition de
M. Alain HERMAN le 24 mars 2010.
(108) La répartition des emplois parmi
les adhérents du RAMA : 30 %
administratifs, 22 % communication,
19 % formation, 12,5 % artistiques,
11 % accompagnement de projet,
10 % technique, 10 % accompagnement
de musiciens ou groupes.
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L’état des lieux de l’emploi, des métiers et des qualifications dans le champ du
spectacle vivant réalisé en 2008 par l’Observatoire régional de la culture107, même
s’il ne permet pas de mesurer le volume des emplois permanents concernés,
apporte quelques éléments sur leur caractérisation. Ainsi, pour les entreprises
concernées dans le spectacle vivant, cette étude fait apparaître à la fois l’importance
de l’intermittence et celle du bénévolat. A peine plus du quart des salariés du
spectacle vivant (28 %) occupait un CDI et la moitié était en CDD d’usage (intermittents). Cette étude a confirmé la précarité des emplois pour trois quarts des
salariés, plus marquée chez les moins de 40 ans. Cette précarité est également flagrante à l’analyse des salaires selon la nature de l’emploi occupé, parfois accentuée
par des écarts de salaire entre hommes et femmes (notamment pour les postes permanents et de direction). La part des CDD et de l’intermittence est caractéristique des
activités artistiques, les emplois permanents étant plus nombreux dans les activités
supports (notamment celles d’administration et de gestion générale). L’approche
par genre révèle la prédominance des emplois masculins, notamment parmi les
activités techniques (85 %) et artistiques (62 %). Cet état des lieux a mis en évidence
la méconnaissance des besoins en matière de qualification et l’importance accordée
à l’expérience plutôt qu’à la qualification. Si ce constat peut être relativisé pour les
métiers artistiques, il est plus gênant pour certains métiers liés aux fonctions support,
même si l’on sait par ailleurs que le niveau de formation initiale est globalement
plus élevé dans les professions concernées.
Les travaux conduits par le GRANEM auprès de plusieurs réseaux en région en
2007, dont le Réseau Aquitain des Musiques Actuelles, apportent un éclairage sur
cette réalité du secteur. Plus des deux tiers des salariés des structures adhérentes au
RAMA sont en CDI, 32 % sont en CDD et la part des emplois aidés est de 40 %108.
Plus de 85 % des salariés étaient âgés de moins de 45 ans au moment de cette
enquête et plus des deux tiers avaient moins de 7 ans d’ancienneté. Plus des trois
quarts des structures du réseau relèvent de la convention collective de l’animation. La
rémunération mensuelle moyenne par salarié était de 1 460 € bruts (1 710 € en ETP),
mais avec un constat assez général de sous-rémunération relative, en particulier
pour les salariés ayant un niveau élevé de formation (bac +5, notamment pour les
postes de communication). La moitié des structures présentait un organigramme et
seulement un tiers une définition des postes. Moins d’un quart déclare avoir une
politique de recrutement et à peine 8 % un plan de formation.
La politique de formation des adhérents au RAMA portait sur les aspects techniques
et la sécurité d’une part et d’autre part sur le projet culturel. Seulement 10 % des
salariés étaient concernés par un véritable parcours de « carrière ».
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Les OPCA tels que l’AFDAS et Uniformation interviennent au bénéfice de salariés
et/ou intermittents du spectacle en Aquitaine. Dans la région, 745 entreprises ont
cotisé à l’AFDAS Sud-Ouest en 2008, dont 98 % de moins de 10 salariés. Il s’agit
donc surtout de TPE dont beaucoup ne disposent d’aucun salarié permanent (intermittents surtout). L’AFDAS a ici mis en place plusieurs actions d’information et un
partenariat a été établi avec les pouvoirs publics en région (Conseil Régional,
DIRECCTE) afin de faciliter l’accès à la formation des intermittents du spectacle. En
2008, 420 accès à la formation ont été conclus pour des salariés permanents (dont
plan de formation et DIF) et 4 000 intermittents du spectacle aquitains ont suivi un
stage, parmi lesquels 1 163 musiciens et 628 techniciens du spectacle. L’un des
objectifs de l’AFDAS Sud-Ouest à court terme est de décliner en Aquitaine l’accord
national de développement de l’emploi et des compétences et le dispositif de GPEC
auprès de 10 à 20 entreprises. D’après l’analyse des demandes réalisée par la délégation interrégionale de l’AFDAS, un besoin accru de formation s’exprime en
matière de diffusion et de recherche de nouvelles sources de financement.
Uniformation couvre plus de 2 200 cotisants de l’économie sociale et solidaire
en Aquitaine. Dans cet ensemble, elle touche une quinzaine de structures relevant
du secteur des musiques actuelles (dont Rock School Barbey, AREMA Rock et
Chanson…). A ce titre, Uniformation a contribué à la mise en œuvre d’opérations
groupées ou collectives (ex : avec le RAMA sur la sécurité des lieux et les risques,
réalisation d’un catalogue de formations gratuites pour les adhérents). En 2009, cet
organisme a aussi mobilisé 3 M€ sur des actions de formation intéressant la
branche « animation » en Aquitaine dont une partie en faveur des opérateurs de
musiques actuelles (ex : propriété artistique, prévention des accidents de travail et
des agressions sonores, arrangements musicaux, GPEC, élaboration de plans de formation, fonction tutorale…). Pour l’avenir, Uniformation envisage de développer
plusieurs actions prioritaires : accès à la validation des acquis de l’expérience,
information et formation pour TPE, accès pour tous à la formation, mise en place
de réunions d’information collectives en lien avec plusieurs partenaires
(Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire, Dispositifs Locaux
d’Accompagnement). Uniformation a contribué à la réalisation de l’étude du GRANEM
portant sur la GPEC dans le secteur des musiques actuelles, qui a révélé des besoins
spécifiques en matière de management, de coopération entre structures et de gestion
des ressources humaines.
Le Pôle Emploi Culture-Spectacle de Bordeaux anime un réseau régional (6,5
équivalents temps complet), en partenariat avec plusieurs partenaires dont
l’AFDAS. Il s’est mobilisé en Aquitaine sur la sécurisation des parcours professionnels
(accompagnement au retour à l’emploi, insertion, réorientation, offres de formation)
et organise des rencontres (ex : A la Rencontre des Rues d’Aquitaine, rencontres du
spectacle vivant et de l’audiovisuel…). Il participe à la commission de licence
d’entrepreneurs de spectacle, Commission Régionale du Spectacle Vivant… Des
partenariats ont été établis en relation avec certaines collectivités (ainsi avec le
Conseil Général de la Gironde : consolidation du parcours professionnel artistique
et culturel pour des bénéficiaires du Revenu de Solidarité Active, dispositif local
d’accompagnement…) et opérateurs (dont le Réseau Aquitain des Musiques
Amplifiées, l’association Bordeaux Chanson, l’association régionale ECLA, DRAC
Aquitaine…). L’utilisation des Dispositifs Locaux d’Accompagnement spécifiques
ou collectifs pour les associations impliquées dans le spectacle vivant peut présenter
un certain intérêt109.
(109) En Aquitaine, plusieurs structures
portent ces dispositifs :
la Chambre Régionale de l’Économie
Sociale et Solidaire en tant que
centre régional de ressources et d’appui,
l’IFAID en Gironde, Périgord Initiative
en Dordogne,
Tec Ge Coop dans les Landes,
la boutique de gestion CREER AILE
et Lot-et-Garonne
et le centre Nelson Paillou à Pau.
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(110) Cf. audition
de M. Patrice DUGORNAY,
Président de l’AGEC, du 4 mars 2010.
(111) Notamment
via un projet accompagné
par le Conseil Général de la Gironde
et en partie financé
par les fonds européens (FSE) :
« Relancer un Environnement Local pour
l’Emploi Culturel en Réseau » (RELIER).
(112) Ainsi les opérateurs locaux
de jeux vidéo,
l’association des Librairies Atlantiques,
l’Association des Cinémas de proximité.
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Des démarches de mutualisation de l’emploi ont parallèlement vu le jour dans la
région, notamment avec la mise en place d’un groupement d’employeurs entre
certains membres du Réseau Aquitain des Musiques Amplifiées et la création du
RAMAGE en 2007110. Ce groupement d’employeurs est le résultat de partenariats
déjà existants depuis 2002 en matière d’accompagnement artistique et de diffusion
entre l’association AREMA Rock et Chanson (Talence, Gironde) et l’association
Transrock qui exploite la salle du Krakatoa à Mérignac (Gironde). Ce projet de
groupement d’employeurs a pu voir le jour grâce à l’appui de la Chambre Régionale
de l’Économie Sociale et Solidaire111. Il a été précédé de la mise en place d’un référentiel de bonnes pratiques, du fait de la diversité des structures potentiellement
concernées (disparité des contrats de travail, des conventions collectives, des
niveaux de rémunération…). Deux emplois ont ainsi été mutualisés à partir de
l’année 2008. Une approche du potentiel de développement du RAMAGE a mis en
évidence des besoins de remise à niveau des structures dans le sens d’une meilleure
harmonisation des politiques de gestion de l’emploi. Deux nouvelles structures ont
rejoint le groupement (la Rock School Barbey et le CIAM). Deux nouveaux emplois
pédagogiques ont pu ainsi être mutualisés. Une étude réalisée en 2007 avec l’appui
de la DRTEFP, du Conseil Régional d’Aquitaine et du Conseil Général de la Gironde
a aussi conclu à l’opportunité d’ouverture du groupement vers d’autres acteurs du
champ culturel afin de stabiliser son schéma économique. Une directrice a été
recrutée en 2008 et en 2009 le RAMAGE est devenu AGEC (Aquitaine Groupement
d’Employeurs Culture). D’autres opérateurs des industries créatives en région ont
manifesté leur intérêt à l’égard de cette initiative112. Les aides octroyées par les
collectivités ont permis de lisser le surcoût lié aux charges de gestion pour les
associations adhérentes.
Pour les opérateurs, cette formule du groupement d’employeurs présente plusieurs
intérêts. Elle permet de limiter le recours aux emplois aidés (de plus en plus incertains
et facteurs de précarité) et d’anticiper certaines évolutions / risques (ex : évolution
du régime d’indemnisation des intermittents du spectacle, application de la directive
européenne sur les services).
Ce type de formule de gestion de l’emploi dans le domaine culturel est appelé à se
développer et dispose d’un réel potentiel. Elle permet également de travailler sur
la construction de véritables parcours en mobilisant de multiples acteurs. Le poids
des mentalités et des habitudes constitue le principal obstacle à la mutualisation de
l’emploi (certaines fonctions transversales de communication, de diffusion ou de
gestion étant a priori considérées plus difficilement mutualisables), devant les
considérations de portée financière (notamment pour les plus petites structures).
Pour 2010, l’AGEC prévoit de mutualiser une demi-douzaine d’emplois (régisseur
développement durable, techniciens son et lumière, intervenant pédagogique,
chargé de communication, gestionnaire de réseau informatique). La mise en place
d’un fonds de soutien à la mutualisation est également envisagée. Il a participé
en 2009 à la création d’un centre de ressource des groupements d’employeurs de
la Gironde.
Par ailleurs, l’utilisation de la Validation des Acquis de l’Expérience suscite plus de
réserves en dépit d’un certain intérêt (notamment dans le cadre de la construction
d’un parcours), cela pour deux raisons essentielles : pratiques de recrutement dans
le domaine des musiques actuelles assez peu assises sur la détention d’un diplôme
(à la nuance des enseignants artistiques) et la complexité de mise en œuvre.
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Les caractéristiques de l’emploi dans le secteur des musiques actuelles confèrent un
enjeu tout particulier à cette question de la gestion de l’emploi et des compétences,
dont la pratique reste encore trop peu répandue parmi les entreprises ou structures
employeuses. Si le travail dans ce secteur offre un contenu social et symbolique valorisant,
il demeure bien souvent assez peu rémunérateur. Ce constat se vérifie tout particulièrement
pour les emplois artistiques.
3.1.3 Auteurs, compositeurs et interprètes : le poids des relations
contractuelles sur fonds de révolution numérique.
Il est en effet un autre aspect à ne pas négliger en la matière qui intéresse plus spécifiquement les artistes / musiciens professionnels, lié aux caractéristiques de leurs modes de
rémunération autrement dit à la façon dont ils peuvent tirer un revenu de leurs créations
et activités artistiques.
Pour ceux vivant ou essayant de vivre de leur activité, un autre élément de contexte est
venu s’ajouter aux préoccupations avec le développement rapide des usages et des
modes d’écoute numérique de la musique (qui percute, on le verra plus loin, l’ensemble
des acteurs de la chaîne musicale).
Outre le recul des ventes de disques physiques, ces usages (écoute en ligne, téléchargements
légaux et illégaux) ont développé des habitudes d’accès gratuit avec des conséquences sur
le modèle économique au détriment des ayant-droits, c’est-à-dire des auteurs-compositeurs
et des artistes-interprètes (baisse des droits exclusifs et des droits de licence, accentuation
du déséquilibre dans la répartition des revenus liés à cette nouvelle économie)113.
Les revenus des artistes / musiciens proviennent en effet de plusieurs sources et s’inscrivent
dans des cadres contractuels qui régissent les relations entre les différents acteurs de la filière :
Interprète
FILIÈRE
DISQUE
FILIÈRE
SPECTACLE
VIVANT
Mandat d’agent ou de manager
Agent / manager
Contrat d’enregistrement ou contrat d’artiste
ou contrat d’exclusivité (cachets et royautés)
Contrat de travail
Producteur
de disques
Entrepreneur /
tourneur
Contrat de licence
Editeur
phonographique
Contrat de distribution ou contrat commercial (BIEM)
Accord
de co-production
ou de cession
Salle / Festival /
Spectacle vivant
Distributeur
Contrat commercial
Détaillant
Source : ADAMI
Les auteurs, compositeurs et interprètes peuvent potentiellement bénéficier de plusieurs
sources de revenus liées :
- au droit du travail (cachets d’enregistrement, cachets spectacle vivant ou concerts),
- aux droits exclusifs (royalties sur les ventes de supports physiques et utilisations secondaires),
(113) Cf. « Auteurs, compositeurs
et éditeurs de musique :
les oubliés de la crise » SACEM, novembre 2009.
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- aux licences légales (revenus de la copie privée et de la rémunération équitable,
redistribués par des sociétés civiles114),
- aux revenus complémentaires (assurance chômage, enseignement…),
- et aux revenus commerciaux (utilisation du nom, sponsoring, présence payée, vente
de produits dérivés…). Du moins cela concerne-t-il ceux qui ont réussi à bénéficier
d’une diffusion.
D’après le Syndicat National des Editeurs Phonographiques (SNEP)115, la part « artiste »
dans le coût de production d’un CD serait de 20 % (pour un prix de gros catalogue hors
taxe – PGHT - de 7 € à 9 €). Toutefois, cette part reste théorique. Elle dépend de la
nature du contrat, soit un contrat de licence dans le cadre duquel l’artiste assume une
part des frais de production, soit un contrat d’exclusivité ou contrat d’artiste. Cette dernière
formule est plus favorable mais ce sont les contrats de licence qui ont tendance à se
développer, notamment pour les genres musicaux à faible diffusion (ex : jazz, musiques
traditionnelles, musiques du monde…). Dans le cas d’un contrat d’artiste ou d’exclusivité,
la part revenant à ce dernier est de 8 % du PGHT (parfois plus en fonction du volume
des ventes, mais inférieure – 4 % à 6 % - pour les genres musicaux les moins diffusés),
à laquelle s’ajoute un cachet d’enregistrement. En moyenne, selon les données de
l’ADAMI, la part « artiste » serait en réalité de 6,5 % du PGHT après certains abattements
(frais de pochette, remises sur facture consenties aux détaillants), soit 4 % du prix de
vente au détail (0,6 € pour un disque vendu 15 €). Cette part artiste est encore plus
faible sur la vente d’un support DVD (4 % du PGHT et 2 % du prix de vente au détail
soit 0,4 € pour un prix de vente de 20 €). Et encore, ces taux ne valent-ils que pour
les artistes interprètes principaux et non pour les artistes d’accompagnement, qui ne
perçoivent souvent que le seul cachet d’enregistrement. En outre, plus l’artiste / le
groupe vend de disques, plus il bénéficie d’une notoriété, plus il lui est facile de
négocier sa part. Autant dire que cette capacité de négociation n’intéresse qu’un
nombre très limité de ceux parmi les plus célèbres. Certains d’entre eux, malgré des
revenus très confortables, n’hésitent pas à faire valoir leurs droits aux allocations
chômage du régime de l’intermittence : attitude hélas choquante eu égard à la situation
de la très grande majorité des musiciens et interprètes ! Pour ces derniers, l’intermittence
constitue la base de leur revenu. Qui plus est, ces barèmes de rémunération relatifs
aux royalties peuvent être minorés en fonction des situations de vente des supports
physiques116.
L’explosion des nouveaux modes d’écoute (ou de consommation) numériques tend à
accentuer le déséquilibre dans la répartition des revenus tirés de l’exploitation des
œuvres au détriment des artistes. Ainsi, sur un morceau de musique en ligne vendu
0,99 €, l’artiste perçoit en moyenne 0,035 €117 (0,66 € revenant au producteur). Sur le
téléchargement d’une sonnerie de portable vendue au prix public de 3 € (hors frais de
transmission via SMS ou d’appel), l’artiste perçoit l’équivalent de 0,12 € (4 %), alors
que l’opérateur de téléphonie mobile capte un peu plus du tiers du produit de cette
vente, le quart allant au producteur.
Sur la base du chiffre d’affaires réalisé par téléchargement Internet et mobile en 2008
(76 M€), la Société de Perception et de Distribution des Droits des Artistes-Interprètes
(SPEDIDAM)118 a estimé le manque à gagner pour ces derniers entre 3,8 M€ et 7,6 M€,
en s’appuyant sur un taux de rémunération relevant de la licence légale de 5 %
minimum à 10 % maximum119. A cela, il faut ajouter les autres droits (attentes téléphoniques,
sonorisations, services en ligne, bornes interactives, télévisions etc.), pour un manque
à gagner estimé à 17 M€ pour la seule année 2008. Par ailleurs, la rémunération sur les
(114) SACEM, SACD et SCAM
pour les auteurs, SPPF, SCPP et Procirep
pour les producteurs,
ADAMI et SPEDIDAM pour les interprètes.
(115) « Filière de la musique enregistrée :
quels sont les véritables revenus
des artistes interprètes ? » ADAMI,
avril 2006.
(116) Royautés réelles de 3,25 %
du PGHT pour les ventes hors France,
pour les ventes club (ex : Dial, France
Loisirs) ou à l’occasion de campagnes
promotionnelles, 2,45 % sur les coffrets
avec pub, 1 % sur les prix réduits
et rien sur les ventes soldées.
(117) Entre 0,028 € et 0,042 €
selon que la maison de disque passe
par un distributeur en ligne (plateformes
de téléchargement payantes)
ou dispose de sa propre plateforme
(118) « Etude économique 2009 des
manques à gagner des artistes
interprètes de la musique », SPEDIDAM,
2010.
(119) Sur la période 2003-2008,
le manque à gagner a été estimé
entre 10 M€ et 20 M €.
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services en ligne de vidéo à la demande (VOD) et de webradios aurait pu rapporter entre
1 M€ et 2 M€ supplémentaires de droits d’artistes. Enfin, le produit estimé d’une
licence globale auprès des fournisseurs d’accès Internet établi sur la base d’un montant
mensuel de 4 % (hypothèse redevance musique) ou de 9,5 % (hypothèse redevance
musique+vidéo) payé par tous les foyers abonnés au haut débit aurait pu rapporter selon
la SPEDIDAM entre 715 M€ et 1,7 Mds €.
Ainsi, entre 2002 et 2008, les droits perçus par la Sacem sur les ventes phonographiques et
numériques ont chuté de 44 % et ne représentaient en 2008 que 1 % des perceptions
globales120. De fait, « ces marges nouvelles ne sont pas équitablement répercutées sur
l’ensemble des ayants droit »121, la part relative des revenus pour les auteurs-compositeurs-interprètes ayant eu tendance à se dégrader. Des réflexions sont en cours parmi
plusieurs sociétés de perception et de redistribution des droits afin d’étudier les nouveaux
schémas économiques liés aux usages numériques.
Outre les droits perçus sur la vente des supports physiques et issus de la diffusion par les
médias, il faut également prendre en compte ceux issus du spectacle vivant (concerts
dont festivals, cafés concerts et autres spectacles), qui représentent 10 % du montant
total des perceptions de la SACEM.
Depuis ces dernières années, on assiste à un accroissement significatif de ce poste de
ressources (78,5 M€ pour 153 900 séances de spectacle vivant en 2009, soit un accroissement
de 50 % des perceptions et de 23 % du nombre de séances depuis 2003). On peut
mettre cette évolution en parallèle de la nette baisse des ventes de supports physiques.
Les concerts représentent 90 % du nombre total de séances. Dans cet ensemble, les
concerts liés à des tournées représentent un volume restreint (5 000 soit 4 %) mais une
part prépondérante des produits perçus (39 %).
Cette photographie serait incomplète si l’on ne précisait pas que 10 tournées (soit
0,01 % des concerts) ont représenté à elles seules 20 % de l’ensemble des revenus
totaux du spectacle vivant et plus de la moitié du revenu total des tournées122. Pour le
dire autrement, seuls quelques rares artistes ont réussi à profiter de leur notoriété pour
compenser la baisse des ventes de disques par les revenus issus de tournées, avec une
augmentation parfois substantielle des cachets (et donc une hausse du prix des places
de concerts). Cette situation a parallèlement tendance à favoriser quelques gros
organisateurs de tournées (ex : Live Nation) au détriment des structures associatives
organisatrices de concerts ou festivals.
Par conséquent, le contexte de crise de l’économie du disque et de mutation dans les
pratiques d’écoute liées aux outils et services numériques tend à fragiliser encore davantage
la situation économique des artistes, à l’exception de quelques stars. Ce constat ne doit
cependant pas minimiser les nouvelles et réelles opportunités offertes par ces outils tant
en matière de diffusion que de distribution et d’interrelations entre artistes et publics
(via les blogs, plateformes, réseaux sociaux et via les webTV et webradios), en particulier
pour les artistes moins repérés ou émergents de la scène des musiques actuelles ou pour
ceux qui les produisent et les éditent (labels indépendants notamment). Ces mêmes
outils ouvrent en outre de nouveaux espaces de création et d’innovation artistiques
dans le champ des musiques actuelles.
Ce même constat ne fait que souligner par ailleurs l’importance du régime d’indemnisation
des artistes et techniciens intermittents, lequel contribue de ce fait au maintien de la diversité
des expressions culturelles en région. De ce point de vue, il importe d’insister sur le fait
que le régime de l’intermittence ne constitue pas un « statut » en tant que tel mais
simplement un moyen pour nombre d’artistes de préserver leurs liberté et capacité de
création dans les musiques actuelles, tout en bénéficiant d’une protection sociale.
(120) Cette tendance est également
perceptible au niveau international au
plan européen et international selon les
données établies par la Confédération
Internationale des Sociétés d’Auteurs et
de Compositeurs (cf. étude économique
mondiale sur l’année 2008).
(121) « Auteurs, compositeurs et éditeurs
de musique : les oubliés de la crise » SACEM, novembre 2009.
(122) Il s’agit en 2009 des tournées
de Johnny Halliday, de Mylène Farmer,
de Cléopâtre, du groupe U2,
d’Age Tendre et Tête de Bois,
de Mozart l’Opéra Rock, d’AC/DC,
de Bénabar et du groupe Tryo.
En 2008, le top 10 des tournées
n’avait représenté « que » 10 %
des revenus du spectacle vivant.
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L’artiste n’a pas vocation à devenir chômeur professionnel. Plus largement, c’est bien la
question de la reconnaissance d’un statut de l’artiste qui est au cœur de ce débat.
Comment ce contexte particulier d’exercice de leurs pratiques est-il perçu par les
artistes en Aquitaine ?
Les témoignages recueillis auprès de certains d’entre eux123 conduisent à insister sur
plusieurs aspects. Le plaisir éprouvé dans la pratique artistique et dans l’acte de
création rencontré chez ces artistes, à l’instar de celui motivant les comportements
des publics, est une dimension essentielle, le vrai moteur, de leur activité.
Cela ne doit pas masquer les difficultés d’accès à la diffusion pour la plupart des
groupes professionnels ou en voie de professionnalisation. Malgré leur expérience
de la scène, le succès rencontré en concert ou en tournée auprès du public et la
diffusion de plusieurs disques, malgré le soutien apporté par des producteurs (tels 3C
pour le groupe Eiffel ou After Before pour le groupe Basement) et labels locaux (ex :
Vicious Circle pour Calc et Julien Pras), la notoriété et l’accès aux grands médias
restent difficiles à conquérir.
Les groupes et artistes entendus ont tous plus d’une dizaine d’années d’expérience
professionnelle, même si les membres d’un groupe tel que Basement revendiquent
pleinement leur statut d’amateur (13 albums à leur actif) et ont fait le choix de se
passer du recours au régime de l’intermittence du spectacle. Pour autant, leur
démarche est dans l’ensemble celle de groupes professionnels, tant par leur pratique
de création, de répétition et de diffusion (concerts, disques), souvent en lien avec
plusieurs opérateurs en région.
Pour la plupart, leur parcours se caractérise par l’alternance entre activité artistique
et emplois « alimentaires » (petits boulots, enseignement, certains d’entre eux
exerçant un emploi hors champ artistique). Les revenus issus d’une activité artistique
pourtant significative restent encore relativement modestes. Le succès du groupe
Eiffel avec son dernier disque124 permet tout au plus à chacun des membres du groupe
de percevoir un cachet de 150 € nets par concert (après un parcours d’une dizaine
d’années, 4 disques enregistrés et 130 concerts par an). Dans ce contexte, le régime
de l’intermittence constitue un réel soutien, à la condition de pouvoir y accéder125
ce qui est loin d’être le cas pour l’ensemble des artistes / musiciens concernés et même
si aucun d’entre eux n’ambitionne devenir « chômeur professionnel ». Faute de
mieux, ou de véritable statut de l’artiste, ce système garantit pour nombre
d’auteurs-compositeurs la possibilité de survivre en phase d’écriture ou de création,
laquelle exige de la disponibilité et du temps.
Le schéma décrit précédemment concernant la perception de droits d’artistes ou
d’auteurs permet pour les plus diffusés (cas d’Eiffel avec 25 000 disques vendus)
d’espérer 10 % du PGHT (soit 1 € pour le groupe sur un disque vendu au prix public
d’une vingtaine d’euros !). Encore faut-il être suffisamment diffusé, ce qui est loin d’être
le cas de la grande majorité des groupes. Le travail qualifié parfois de remarquable
des structures associatives de soutien (ex : Rock School Barbey, Krakatoa, Sans
Réserve,…) auxquelles les membres de ces groupes ont eu affaire leur a aussi permis
de percer et de persister dans cette voie artistique. Pour certains de ces artistes, la
crise de l’économie du disque n’est que partiellement compensée par les recettes liées
aux concerts et tournées. La hausse constatée des cachets d’artistes lors de concerts
(tournées, festivals) ne concerne véritablement que les têtes d’affiche à forte notoriété.
Malgré le relatif succès rencontré auprès de leur public, l’accroissement des pratiques
de téléchargement constitue encore une vraie préoccupation pour des artistes dans
le « circuit » professionnel.
(123) Cf. audition
de Julien PRAS (groupe Calc et solo),
Romain HUMEAU (groupe Eiffel)
et Sabine AGGOUN (groupe Basement)
le 4 mai 2010.
(124) « A tout moment »,
sorti en 2009, également marqué
par la présence de Bertrand Cantat
et de Serge Teyssot-Gay
du groupe Noir Désir.
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Néanmoins, même assez éloigné de la notoriété médiatique, chacun de ces
groupes a réussi à trouver une place, fut-elle relativement marginale, et surtout un
public. Après une période difficile, « passionné et insoumis, défiant les modes pour
mieux revendiquer sa singularité »126, le groupe Eiffel s’est produit à l’Olympia en 2007
(alors lâché en pleine tournée par leur label de l’époque, la maison de disque EMI), a
créé son propre studio d’enregistrement, est désormais diffusé par le label PIAS (celui
d’Oasis, de Placebo, de Tom Waits…). Basement est sur le point d’entamer une
tournée aux Etats-Unis, par envie et par choix de vie (la musique, les voyages, les rencontres) autant que par choix artistique. Julien Pras vient de sortir un bel album solo.
Le point commun à ces expériences : l’aventure le plus souvent collective, celle d’un
engagement dans la création artistique, un combat autant qu’un plaisir, celui de
moments uniques partagés avec ses amis, ceux du groupe et autour, avec son (ses)
public(s). Cela pour dire que le « business », même s’il n’est jamais totalement absent,
n’est ni le moteur ni la visée essentielle du parcours de ces artistes ou groupes. Autant
d’éléments qui échappent au simplisme des descriptions statistiques.
L’aventure collective est aussi, encore rarement mais nouvellement, celle pour certains
de l’engagement dans la vie publique (cas de Sabine Aggoun du groupe Basement,
conseillère municipale en charge de la jeunesse à Libourne), une autre manière de
créer et de participer à la promotion des musiques actuelles (avec le projet de création
d’un lieu de diffusion à taille humaine de 180 à 200 places).
Enfin pour tous ces auteurs, musiciens, interprètes, l’expérience collective de leur parcours
artistique ne se limite pas au groupe, mais aussi au soutien obtenu auprès de l’entourage
professionnel et/ou amical, à travers des lieux de diffusion, des producteurs ou tourneurs,
des éditeurs et labels voire avec certains organisateurs de festivals.
3.2 Entre l’artiste et le public :
l’indispensable travail de valorisation
par les activités-supports
La valorisation du travail de création artistique réalisé par les auteurs-compositeurs et
interprètes (musiciens, chanteurs) s’appuie sur tout un ensemble d’activités et d’opérateurs
(cf. graphique p. 84), le plus souvent des micro-entreprises, sans oublier la présence
très marquée des industries du divertissement (grandes maisons de disques, tourneurs
internationaux). Entre ces deux univers, il existe finalement assez peu de structures de
taille intermédiaire.
Face à l’essor des pratiques et au dynamisme du milieu artistique, il faut souligner le rôle
particulier de ces multiples acteurs intermédiaires qui en région, entre l’artiste et le
public, participent de manière essentielle au travail de découverte et de diffusion,
acteurs que certains désignent comme « développeurs d’artistes »127.
Par souci de clarté du propos, deux grands ensembles seront considérés : celui de la
production, de l’édition et de la distribution de disques d’une part (le segment de la
musique enregistrée), d’autre part celui des tournées, concerts et festivals (le segment
du spectacle vivant).
Aussi pratique soit-il, ce découpage présente néanmoins quelques limites, dans la
mesure où l’évolution du marché musical conduit certains de ces opérateurs à diversifier
leurs activités et à opérer dans l’un et l’autre de ces segments. De plus, les bouleversements
provoqués par les usages numériques sont à l’origine d’un intérêt croissant pour la
diffusion par le spectacle vivant face à la chute des ventes de disque.
(125) Ne peuvent bénéficier
de ce régime que les artistes/ musiciens
ayant travaillé au moins 507 heures
au cours des 10,5 mois passés
(soit l’équivalent de 43 cachets
de 12 heures).
(126) Extrait de la présentation
du groupe sur leur site.
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3.2.1 Des producteurs et éditeurs phonographiques confrontés
à la crise de l’économie du disque
Pour quelque 3 000 entreprises d’édition d’enregistrement sonore en France128, cette crise
de l’économie du disque s’exprime en quelques chiffres : entre 2003 et 2009, le marché
physique (CD et DVD) est passé de 1,1 milliard € hors taxes (1,95 milliard € TTC) à
512 M€ hors taxes (887 M€ TTC), soit une baisse en valeur de plus de moitié sur la
période. Dans le même temps, le volume d’unités vendues est passé de 134,3 millions
à 63,3 millions.
Évolution du marché physique du disque
(en millions d'euros)
2000 138,4
133,9
141,1
1 814,9
1500
1 652,2
133
1 503,4
1 287
110,5
74,1
1000
72,3
1 065,9
913,5
814,8
■ DVD
■ CD
500
0
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Source : Observatoire de la musique (Rapport annuel 2009)
Le recul a été encore plus marqué pour le marché des « singles » (titres uniques) avec
une baisse des ventes de - 90 % entre 2003 et 2009, en raison de la forte concurrence
exercée par les téléchargements numériques. La chute du marché physique se poursuit
en 2010, les résultats du premier trimestre faisant apparaître un nouveau tassement du
marché par rapport à l’exercice antérieur (- 0,8 % en volume avec 15,5 millions d’unités
mais avec une hausse du volume des ventes de DVD musical et - 6,8 % en valeur à
197,7 M€). Les ventes de titres uniques ou singles sur ce premier trimestre ont continué
de décrocher (- 28 % en volume et - 30 % en valeur). La baisse globale des ventes s’est
accompagnée d’une baisse relative du prix moyen de vente au détail (légèrement
inférieur à 14 € l’unité en 2009).
En termes de genres, c’est la variété française qui a enregistré la baisse la plus importante
(- 63 % depuis 2003), accusant un recul de part de marché de 6,5 points en valeur. Ce
segment représente 32,2 % du chiffre d’affaires du CD audio en France129. Désormais,
c’est la variété internationale qui domine le marché national des ventes de CD audio
(plus du tiers du chiffre d’affaires global).
Le classique (7,5 %), la jazz/blues (4,9 %), les musiques du monde (4,7 %) et les autres
genres (ambiance, enfants, bandes originales de film…16,8 %) complètent la
répartition des ventes en 2009. Il faut noter dans ce contexte le relatif regain en 2009
du genre « jazz/blues ».
Ces évolutions doivent être analysées également au regard de l’accroissement du
nombre de références (près de 318 000 en 2009 soit + 15,5 % entre 2003 et 2009, dont
96 % en CD), en partie alimenté par la multiplication d’éditions commerciales (dont
rééditions) pour des productions identiques, aux fins d’un meilleur ciblage de clientèles.
(128) Source :
« Statistiques d’entreprises
des industries culturelles » - DEPS,
Culture-Chiffres, 2008-4 – La principale
organisation du secteur, la Société civile
des Producteurs de Phonogrammes
Français (SPPF) regroupe environ
un millier d’associés.
(129) Les statistiques établies
par le SNEP diffèrent du fait
d’un éclatement différent par genre.
Pour cette organisation, la part
de marché de la variété francophone
était de 25,4 % en 2009, soit un recul
de plus de 12 points par rapport
à 2003. Ce segment est devancé
par la variété internationale dont la part
de marché atteignait 27,6 % en 2009.
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Environ 20 % des CD commercialisés en 2009 correspondaient à des nouveautés
(soit près de 62 000). Néanmoins, le nombre de nouveautés mis en vente a eu tendance
à régresser depuis 2003 (- 11,5 % en albums et - 82 % en singles).
Evolution du marché CD audio par genres (2003-2008) en %
- 12,1
Musique du monde
- 57,8
- 54,7
Jazz/Blues
18,6
- 41,3
- 33,4
■ En nombre de références
■ En valeur
Variétés françaises
16,8
■ En volume
- 62,7
- 63,2
Variétés internationales
13,5
- 45,5
- 46,6
- 80
- 60
- 40
- 20
0
20
40
Source : Observatoire de la musique (Rapport annuel 2009)
Cela s’accompagne d’une moindre prise de risque des compagnies « majors ». Alors que
celles-ci détenaient plus de 85 % des parts de marché en 2003, elles représentent en
2009 les trois quarts du chiffre d’affaires. Cela s’explique entre autre par la réduction du
nombre d’albums commercialisés, qui a diminué de 70 % depuis 2003 (soit 973 albums
commercialisés par les 4 principaux leaders du marché que sont EMI Music France, Sony
Music Entertainment, Universal Music France et Warner Music France, contre 3 314
encore en 2003). Ces sociétés ont enregistré 70 nouvelles signatures d’artistes pour 88
contrats rendus en 2009, soit un déficit de 18 artistes après celui déjà enregistré en 2008
(- 15 artistes).
Les investissements marketing de ces « majors » ont également « fondu » (- 44 % en dix
ans)130. Ces compagnies ont donc de plus en plus tendance à concentrer leurs efforts sur
des « valeurs sûres », à savoir sur les groupes ou artistes les plus rentables. Leur part dans
le « top 100 » des CD albums est de fait écrasante (43,7 % pour Universal, 22,7 % pour
Warner, 20 % pour Sony, 9,2 % pour EMI… suivis de deux « indépendants », à savoir
Wagram et Pias). Mais la part des indépendants n’a cessé de s’accroître durant ces
dernières années, leur position étant particulièrement importante sur certains marchés
« de niche », jugés moins rentables par les « majors » : plus de 60 % du marché sur le
segment des musiques du monde, plus de 36 % sur le segment « jazz-blues ».
Cette tendance est également confirmée par les résultats de diffusion radiophonique
de nouveautés : les productions issues des labels indépendants représentaient en 2009
le cinquième de la diffusion (+ 10 points depuis 2003).
L’Union des Producteurs phonographiques Français Indépendants (UPFI)131 estime que
plus de 80 % de la production (en nombre de références disponibles) relève des labels
indépendants. La Société civile des Producteurs de Phonogrammes Français (SPPF),
créée par des producteurs indépendants pour la répartition des droits, rassemble au
plan national plus de 1 100 producteurs, parmi lesquels une vingtaine d’Aquitains.
De son côté, la Société Civile des Producteurs Phonographiques (SCPP), autre société
de perception et de répartition des droits, regroupe à ce jour plus de 1 300 producteurs,
(130) Une étude récente du Worldwide
Independant Music et de l’IFPI
(Fédération internationale des industries
phonographiques) révèle
que les industries du disque investiraient
16 % de leur chiffre d’affaires
dans la découverte d’artistes et le
renouvellement de leur répertoire
chaque année soit environ 5 milliards
de dollars (taux France : 12 % en 2009).
Le catalogue des « majors »
de la musique enregistrée rassemblerait
4 000 artistes et celui des indépendants
plusieurs dizaines de milliers.
La part des nouveaux contrats
représenterait le quart de ce catalogue.
Au plan international, les industries
du disque occuperaient 2 millions
d’emplois (« Investing music » - WIN,
IFPI – Mars 2010).
(131) L’UPFI rassemble
près de 80 labels indépendants,
dont Naïve et Wagram.
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à la fois indépendants mais aussi les principales majors du secteur, dont près d’une
trentaine de structures en Aquitaine.
Il existe également une fédération européenne (Independent Music Companies
Association, IMPALA) mais qui ne rassemble que des labels indépendants de taille
importante, à savoir pour la France les labels Wagram, Naïve et l’UPFI. Cette fédération
est à l’origine d’une procédure visant à empêcher un contrôle accru du marché par les
majors (affaire de la fusion Sony-BMG) qui a donné lieu à une bataille juridique de
plusieurs années.
Les petits éditeurs de disques indépendants se sont récemment organisés au plan
national avec la création d’une fédération (Fédération nationale des Editeurs et Labels
Indépendants, FELIN), notamment sous l’impulsion d’acteurs aquitains sous la présidence
de Philippe COUDERC, également président de la Fédération des Editeurs et Producteurs
Phonographiques Indépendants d’Aquitaine (FEPPIA) et dirigeant du label aquitain
Vicious Circle. La FELIN rassemble plusieurs fédérations régionales de labels indépendants
(Aquitaine, Pays-de-la-Loire, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côted’Azur)132, la fédération
des labels spécialisés dans le jazz (Les Allumés du Jazz) et la plateforme numérique CD1D
qui regroupe l’offre de près de 170 labels indépendants.
En Aquitaine, le croisement de plusieurs sources d’information (Société Civile des
Producteurs Phonographiques, Société Civile des Producteurs de Phonogrammes
Français, FEPPIA…) permet d’identifier plus de 70 structures (sociétés et associations)
œuvrant dans le domaine de la production et de l’édition phonographique (Voir
tableau page suivante).
La plupart de ces labels sont de très petites structures et environ le quart d’entre elles
ne présentent qu’un seul artiste ou groupe dans leur catalogue (autoproduction).
Les plus importantes sur la base de ce critère sont AGORILA, AMANITA, CAROLINE
PRODUCTIONS, MK LABEL, DV’S RECORDS, PLATINUM RECORDS, TALITRES, V
MUSIC et VICIOUS CIRCLE.
L’un des labels aquitains les plus importants en volume de production est AGORILA,
société implantée à Bayonne, essentiellement orienté sur le registre des productions
musicales régionales (chants et musiques du Pays Basque et du Béarn notamment) et
qui propose un catalogue de plus de 500 titres (dont une vingtaine de rock basque
et une dizaine en jazz). Deux titres de ce label figurent dans le « top 100 » des CD
Musiques du monde de l’année 2009.
Plus d’une trentaine de labels et producteurs régionaux sont membres de la
Fédération des Éditeurs et Producteurs Phonographiques Aquitains (FEPPIA).
Cette jeune fédération a vu le jour en 2007, alors à l’initiative d’une quinzaine
de labels/structures. Aujourd’hui, elle rassemble 24 labels ayant une activité
significative de production de disques (d’autres encore en attente), mais également
quelques tourneurs et organisateurs de festival ayant une activité occasionnelle
de production. Le Réseau Aquitain des Musiques Actuelles est également membre
de la FEPPIA. La démarche qui anime ces petits labels indépendants est avant tout
une démarche artistique (basée sur l’objectif de découverte et de valorisation de
nouveaux talents) avant d’être une démarche industrielle ou strictement commerciale,
même si les sociétés concernées sont par convention classées parmi les « industries »
culturelles. L’ensemble de l’offre de la FEPPIA représente un volume de 400 à 500
références, sachant qu’environ 60 % des artistes édités par les labels concernés
sont des artistes (ou groupes) aquitains (mais avec de fortes variations selon les
éditeurs).
(132) Il s’agit de la FEPPIA
pour l’Aquitaine, de la FEPPAL
pour la région des Pays-de-la-Loire,
de la FEPPRA pour la région Rhône-Alpes
et de PHONOPACA pour la région
Provence-Alpes-Côte d’Azur.
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PRODUCTEURS ET EDITEURS
PHONOGRAPHIQUES AQUITAINS
AGORILA
A-HAEON
ALBA MUSICA / CARMA*
AMANITA
AMOR FATI*
AQUI LABEL MUSIC
A TANT REVER DU ROI
BANZAI LAB*
BI BIP PRODUCTION
BORDEAUX ROCK*
BOXON RECORDS
CARMA (cf. ALBA MUSICA)
CAROLINE PRODUCTIONS
CIP AUDIO*
CLAC! RECORDS*
COLLECTIF ÇA’I*
COMPOSIT MUSIC*
CORNFLAKES ZOO (cf. PLATINUM)
CRISTAL MUSIC*
DAQUI*
DEFECTED RECORDS
DV’S RECORDS
EDITIONS ND MUSIQUE
EDITIONS GABRIEL
EL RANCHO PRODUCTION
ENERGIE NATURE PRODUCTION
EXIL MUSIQUE
EXPAUZ TON ART EX.T.A.
EXUTOIRE RECORDS
FEPPIA*
GHAT PRODUCTIONS
GREGOIRE BARUQUE
HORS DE PORTEE*
HORS NORMES PRODUCTIONS*
IMPULSE-PRODUCTION*
JABA*
JDC MUSIC
JAZZ AUX REMPARTS
JEAN DUCASSE
C
Dept
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33
33
64
33
33
64
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PRODUCTEURS ET EDITEURS
PHONOGRAPHIQUES AQUITAINS
LABELUZ
LA CAD
LA CERVELLE
LAGUNA STUDIOS
LES 2 SINGES
LOBELIA MUSIC
LUNATIK MUSIC
MADAME LEO
M-ALLIANS PROD
MENESTRERS GASCONS*
MICHEL PEPE
MILK PACK RECORDS
MK LABEL
MUSIC ACTION PROD. (cf. SOULBEATS)
MUSIC PLUS PRODUCTION
MUSIQUE EN CHANTIERS - VIVA VOCE
ODETTE REC.
PLATINUM RECORDS / ALIENOR*
PRODUCTIONS ET ED. BA ET SON
RADAR SWARM
RATBONE RECORDS
RAGAMUFFIN REGGAE BAND
SARL ERIC MOUQUET MUSIC
SABOR DISCOS
SL WORKS
SONORIS
SOULBEATS Rec.* (Cf MUSIC ACTION)
STUDIO ROBY
TALITRES*
TELEPHERIQUE
TER A TERRE*
THEO PRODUCTIONS
TRAHISON RECORDS
TROIS QUATRE !*
TUTA MUSIC INC
VICIOUS CIRCLE*
V MUSIC PRODUCTIONS
WWILKO
ZONE LIBRE (cf. HORS NORMES PROD.)
S
Dept
33
64
33
64
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64
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33
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Sources : SPPF, SCPP, FEPPIA
*Adhérents FEPPIA
Les moyens mobilisés par la FEPPIA (bureaux, personnels) sont mutualisés avec
certaines des sociétés éditrices (Aliénor/Platinum Records, Talitres, Vicious Circle).
Les membres de la FEPPIA emploient une quarantaine de salariés permanents.
Le volume d’affaires consolidé des sociétés membres les plus importantes est
d’environ 1,2 M€ par an. La FEPPIA travaille sur plusieurs chantiers, notamment sur
la diffusion et la distribution des œuvres, dans le contexte évoqué de crise du
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marché du disque mais aussi en réponse au rétrécissement de l’offre dans les
grandes surfaces spécialisées. Au cours des deux années d’activité passées,
la FEPPIA a ainsi porté son action en direction des petits points de vente (dont
expérience avec le réseau Harmonia Mundi) et de la création d’un secteur de vente
de disques en librairies (en relation avec l’agence régionale ECLA, le réseau des
Librairies Atlantiques et le Club Action des Labels Indépendants Français133). Cette
initiative s’explique en partie en raison des seuils d’exigence fixés par les grands
distributeurs (2 000 ventes minimum), qui limitent l’accès de la plupart des labels
et éditeurs indépendants à ces réseaux de distribution. Une autre raison est la
restriction de la diffusion sur les grands médias audiovisuels.
Conscients des évolutions générées par les usages numériques, les adhérents de
la FEPPIA ont récemment inauguré une plate-forme Internet des labels aquitains
(1d-Aquitaine : http://1d-aquitaine.com). Cette initiative s’inscrit dans le prolongement
de la création en 2004 d’une plate-forme lancée à l’initiative de 7 labels indépendants
français (dont Vicious Circle en Aquitaine) : CD1D. Cette plate-forme a pour
ambition de favoriser la diversité de l’offre musicale dans des conditions économiquement équitables aussi bien pour les éditeurs que pour les artistes et les auditeurs.
A ce jour la plate-forme CD1D rassemble la production de 111 labels et 913
artistes, pour une offre catalogue de plus de 1 700 disques et près de 15 000 titres.
La plate-forme « 1d-Aquitaine » fait partie des trois plates-formes régionales (avec
celles de Rhône-Alpes et de Provence-Alpes-Côte d’Azur). Son catalogue concerne
à ce jour 210 artistes édités par les labels membres de la FEPPIA.
Pour ces labels, le passage au numérique est un complément devenu nécessaire
aux supports physiques, 80 % des ventes étant encore réalisées dans ce format et
l’offre numérique étant utilisée avant tout comme moyen de promotion d’artistes
ou groupes. Le choix d’une plate-forme collective s’est imposé compte-tenu des
contraintes particulières de maintenance de sites spécifiques pour les plus petites
entreprises.
Parmi les sociétés membres de la FEPPIA, on peut mentionner les expériences
particulières de certains labels tels que Aliénor/Platinum Records et Talitres.
D’abord créée en 1992 sous forme associative dans une démarche plus ludique que
professionnelle, Aliénor/Platinum Records est passée sous statut de société en
1996. Elle réalise un volume d’affaires de 250 000 €/an et occupe 3 salariés. Son
catalogue comprend environ une trentaine d’artistes et une centaine de
références (notamment électronique, pop rock et groupe étrangers non exploités
en France). La société s’est rapidement tournée vers le développement d’une
activité de production de disques et d’édition ou d’exploitation des œuvres éditées
à travers les labels Platinum et Cornfalkes Zoo. Face aux difficultés générées par
la crise du disque, la société a également développé une activité de publishing
(gestion de droits éditoriaux et de diffusion sur les médias, diffusion des œuvres
pour des publicités, films, habillages sonores…). Les contrats de licence pratiqués
par Platinum Records sont d’une durée de 3 ans pour 2 disques (avec option pour
un disque supplémentaire – taux de reversement à l’artiste de 15 % à 20 % et jusqu’à
50 % pour les ventes numériques). Depuis 1999, Aliénor/Platinum Records partage
ses locaux et mutualise certains services avec d’autres sociétés (Vicious Circle,
Talitres les ayant rejoints en 2004).
L’adaptation au format numérique s’est assez vite opérée, avec la mise en place
d’une plate-forme (http://www.platinumrds.com/) afin de développer la production
(133) L’association CALIF a été créée
à l’initiative de plusieurs labels
et distributeurs indépendants
afin de favoriser le maintien
d’une création et d’une production
diversifiées en favorisant leur diffusion
dans des lieux de distribution
indépendants. Une trentaine
de disquaires sont affiliés à ce réseau
en France, dont la Démothèque
à Périgueux, Total Heaven à Bordeaux
et le disquaire mobile Super Love Disc &
More. La FEPPIA et le label V MUSIC sont
les autres membres aquitains du CALIF,
auquel est également associé
le Conseil Régional d’Aquitaine.
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et d’éviter l’intermédiation des chaînes de distribution et par la participation à des
plates-formes plus généralistes. La distribution des œuvres éditées par la société est
réalisée via un réseau spécifique à la FNAC, par des réseaux plus spécialisés (une
quinzaine de points) et par distribution numérique, à quoi s’ajoutent des accords
de distribution avec une demi-douzaine de distributeurs au plan international.
La société Talitres Records a été créée en 2000. cette société est spécialisée dans
l’édition de groupes anglo-saxons (américains et britanniques), à travers un système
de licence par acquisition de droits de reproduction des masters. Les productions
de Talitres Records bénéficient d’une distribution internationale (Europe et Asie).
Depuis 2004, Talitres Records est référencée sur le site de musique en ligne Believe.
Le catalogue de Talitres Records comporte une cinquantaine de références, dont
80 % de groupes anglo-saxons. Talitres a également diversifié ses activités qui,
outre l’édition, conjuguent une activité de tourneur pour des artistes sous licence
(contrats de 5 ans et valables pour des zones de diffusion précises - 17 % à 20 %
du PGHT reversés à l’artiste), en lien avec des lieux de diffusion, et une activité de
publishing, comparable à celle développée par Aliénor/Platinum Records.
Plus ancienne, la société Vicious Circle a été créée en 1997 (après avoir démarré sous
forme associative en 1993) par les fondateurs d’un fanzine (« Abus Dangereux ») et
compte une centaine de productions à son actif. Son catalogue actuel compte une
cinquantaine d’artistes/groupes et près de 70 références, dont une cinquantaine
accessibles sur son site Internet et sur la plate-forme « 1d-Aquitaine ». Cette société
a également déployé ses activités dans le domaine du pressage de disques (CD,
DVD, vinyles, mais aussi cartes de téléchargement, accessoires divers) à travers sa
marque « Réverbération », qui alimente aussi bien des artistes en auto-production
que des maisons de disques. Par ailleurs, Vicious Circle anime une association qui
publie un fanzine « Abus Dangereux » (plus d’une centaine de numéros) accessible
sur Internet et sur plusieurs points de vente en France. Vicious Circle dispose de
deux espaces de vente indépendants à Toulouse et Paris (partagé avec un autre
label, Ici d’Ailleurs).
En association avec d’autres éditeurs (Platinum Records, Talitres notamment), les
dirigeants de Vicious Circle ont en projet la réalisation d’un nouvel espace à
Bordeaux-Bastide (« Music Institute Bazar, MIB »), qui devrait comprendre, outre
les locaux administratifs des sociétés concernées, un espace de vente, une librairie
spécialisée, un disquaire, un bar-club et une salle de concerts de plus de 300 places.
Le label bordelais Amor Fati travaille sur un registre plus étroit, celui du jazz improvisé
et des musiques improvisées. Il a édité une vingtaine de disques produits avec
autant d’artistes, chaque pochette de disque faisant l’objet d’une création unique
par un plasticien. L’association éditrice de ce label est membre des plusieurs
réseaux ou collectifs : les « Allumés du Jazz », la Fédération des Scènes de jazz et
musiques improvisées (FSJ), la Fédération des Editeurs et Producteurs
Phonographiques Indépendants d’Aquitaine, la fabrique POLA. Amor Fati a également
développé un travail pédagogique avec certains conservatoires et écoles de
musique. L’une des principales difficultés rencontrées par ce label est l’absence de
lieu de diffusion approprié à ce type d’esthétique, après la disparition de plusieurs
acteurs locaux et malgré l’intérêt d’un projet qui n’a encore pu aboutir à ce jour.
Pour l’ensemble de ces opérateurs indépendants en région, les enjeux d’adaptation
sont multiples, dans une période qu’ils considèrent eux-mêmes comme une phase
de transition et pour certains de rupture :
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- Le premier enjeu est d’abord celui de leur capacité à maintenir sinon à étendre
leur rôle de découverte et de valorisation de la diversité culturelle et artistique,
face à la concurrence des grandes maisons de disque et des « majors » dans le
contexte décrit de crise de l’économie du disque et de mutation liée aux nouveaux
supports et usages numériques. Cet enjeu est d’autant plus important que les
nouveaux modes de « consommation » ou d’écoute induisent des comportements
moins sensibles à la qualité artistique des œuvres, notamment parmi les jeunes
générations, les auditeurs ayant de plus en plus de mal à faire la différence entre
des « produits » marchandisés de type Star Ac’ et des productions artisanales
engagées dans une vraie démarche artistique. De plus, ces nouveaux usages
favorisent l’explosion d’une offre autoproduite qui rend de plus en plus difficile le
travail de filtrage artistique dans la diffusion musicale. Enfin, ils appellent une
adaptation ou un glissement dans la conception même du support-produit (le
CD audio) vers un support-service (accès à des clips vidéo, à des blogs ou forums,
à des informations enrichies…).
- A ce premier enjeu est associé celui de la diffusion et de la distribution des
œuvres produites, si possible en s’affranchissant des grands distributeurs qui
tendent à commercialiser les œuvres présentant les meilleures garanties de vente.
De ce point de vue, le travail entamé en lien avec certains réseaux de libraires et
de disquaires indépendants mérite d’être poursuivi et développé, de même qu’en
direction de l’ensemble du réseau des bibliothèques et médiathèques publiques
(cf. chapitre suivant). Enfin, le développement de plates-formes ou plus largement
de dispositifs numériques, dont ceux liées aux communautés d’internautes,
réseaux sociaux et blogs spécialisés offre de ce point de vue de réelles opportunités.
- Pour répondre à ces enjeux, compte-tenu de la taille et des moyens souvent
limités des producteurs et éditeurs phonographiques indépendants en région, la
question de la mutualisation de ressources reste ouverte. Les expériences déjà
éprouvées ou en cours (Vicious Circle/Platinum/Talitres, 1d-Aquitaine) témoignent
de l’intérêt de consolider ce type de démarche. Pour certaines fonctions, l’hypothèse
du recours à un groupement d’employeurs a été évoquée mais se heurte aux
différences de statuts entre structures (soumises ou non au régime de la TVA).
- Enfin, l’organisation de cet ensemble d’acteurs indépendants de la filière du
disque, engagés quel que soit leur statut dans une démarche de valorisation et de
promotion de la création artistique en région, appelle à être encouragée. Ces activités
de production et d’édition sont des rouages essentiels de mise en œuvre des
principes de promotion de la diversité culturelle, parfois au risque pour les petits
opérateurs indépendants d’en être dépossédés par les grandes industries du secteur.
Ce travail doit être mieux connu et reconnu. En cela, la création de la FEPPIA au
niveau régional, mais aussi de la FELIN et du CALIF au plan national répondent à
un réel besoin de structuration de ce secteur et de réponse à des enjeux de portée
collective.
3.2.2 L’écrasante domination de la grande distribution
face aux disquaires indépendants
Sur le marché physique, les grandes surfaces (alimentaires et spécialisées) dominent très
largement la distribution de détail avec plus de 88 % de parts de marché en 2009, dont
54 % pour les grandes surfaces spécialisées (FNAC, Virgin, Cultura…) et 34 % pour les
grandes surfaces alimentaires (ex : Carrefour, Auchan, Leclerc…).
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Répartition des ventes de CD audio par canaux de distribution
(en valeur %)
100
8,2
6,5
7,6
6,8
2,9
2,5
2,2
3,9
6,2
4,6
6,1
5,8
5,7
6,7
47,5
50,4
55,7
80
38,9
40,0
41,6
45,7
■ Autres
60
■ Internet
■ GSS
40
■ GSA
50,8
49,9
49,0
43,6
41,8
20
37,7
31,9
0
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Source : Observatoire de la musique (Rapport annuel 2009)
Face à la crise du disque, les grandes surfaces alimentaires ont eu tendance à se désengager de ce marché ainsi que l’atteste l’évolution de leur part de marché sur la période
2003-2009 (recul de 72 % des ventes en GSA depuis 2003). Leur recul est encore plus
marqué sur certains marchés (jazz/blues, musiques du monde).
La part des grandes surfaces spécialisées s’est quant à elle renforcée, gagnant près de 17
points depuis 2003. Ce gain ne doit cependant pas masquer la baisse en valeur absolue
de leurs ventes sur cette période (- 36 % en valeur).
Avec moins de 6 % de part de marché, la rubrique « autres » rassemble notamment les
disquaires indépendants (mais aussi les petites librairies, la vente par correspondance).
C’est le canal de distribution qui a enregistré la plus forte baisse de son volume d’affaires
sur la période 2003-2009 (- 69 %). Avec le classique, c’est dans les genres musicaux les
plus exigeants et/ou les moins diffusés (musiques du monde, jazz-blues) que ce canal
réalise ses meilleurs scores de vente.
Outre le Club Action des Labels Indépendants Français (CALIF) déjà mentionné qui
rassemble une trentaine de disquaires en France, il existe un autre réseau national de
disquaires indépendants, le réseau Starter, créé en 1994 et basé à Brest, qui rassemble
actuellement plus d’une centaine de points de vente dont certaines chaînes spécialisées
(Cultura). Ce réseau édite également un magazine (Start-Up).
Un autre canal de diffusion/distribution des œuvres musicales mérite ici attention,
à savoir celui des librairies. Le nombre total de points de vente est estimé à 25 000
en France (hors grandes surfaces culturelles, hypermarchés et supermarchés), soit l’un
des plus denses au monde134. Sur cet ensemble, 15 000 auraient une activité régulière
et près de 3 000 seraient considérées comme des « librairies professionnelles ». Les
1 000 premiers points de vente représenteraient 60 % à 75 % du chiffre d’affaires total.
Les ventes de supports audiovisuels (CD, DVD) correspondraient à moins de 6 % du
volume d’affaires total (environ 100 M€).
Afin d’améliorer la situation des acteurs de la chaîne du disque et notamment des petits
distributeurs, l’une des revendications pour l’instant restée lettre morte serait d’imposer
un prix unique du disque, à l’instar des dispositions prises pour le livre. Faute d’avoir saisi
en son temps les opportunités, la perspective reste ouverte pour les acteurs concernés
mais son aboutissement reste incertain.
(134) Source :
Syndicat de la Librairie Française, 2008.
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Enfin, il convient de prendre en compte dans le même esprit le rôle joué par le réseau
des bibliothèques et médiathèques. Il existe en France 2 800 bibliothèques et/ou
médiathèques municipales, dont près de la moitié prêtant des phonogrammes et
vidéogrammes. En 2008, le nombre de phonogrammes empruntés a représenté 13 %
du total des prêts (soit 25 millions d’unités) et 12 % des collections (soit 8,5 millions
d’unités). Rappelons ici que 7 % des Français de 15 ans et plus auraient emprunté
(ou écouté) des disques dans les bibliothèques et médiathèques en 2008.
Une étude de l’Observatoire de la musique réalisée en 2003-2004 (non réactualisée
depuis) faisait état de 171 points de distribution de disques en Aquitaine, dont une
centaine d’hypermarchés et supermarchés (GSA), plus d’une quarantaine de grandes
surfaces spécialisées (ou GSS, telles que FNAC, Virgin, Cultura, Alice Médiastore…)
et une vingtaine d’indépendants.135
L’une des principales grandes enseignes spécialisées dans le domaine culturel est la
FNAC. Celle-ci dispose de 4 sites en Aquitaine (Bordeaux-Centre, Bordeaux-Lac,
Pau, Bayonne). Le site de Bordeaux-Centre propose une surface disque de 800 m2
(sur une surface totale de 5 000 m2), complétée d’un espace forum permettant
d’organiser des rencontres entre public et artistes. Ce rayon disques mobilise 7
disquaires (sur 90 salariés).
L’offre de ce magasin comporte 45 000 références. Pour sa direction136, la place
dédiée à ce rayon est importante car elle génère un flux de clientèle. La vente des
œuvres musicales représente 12 % de l’activité de ce magasin. Plus de la moitié des
ventes de disques de musiques actuelles de FNAC Bordeaux-Centre est réalisée
dans le genre « variété internationale » (53 %), suivi de la variété française (26 %),
du jazz-blues (9 %, en progression) et des musiques du monde (7 %). Entre 2008
et 2009, les ventes de disques ont reculé de 5 % environ, soit une baisse contenue
par rapport aux résultats globaux de la FNAC sur le rayon disques (mais plus
importante dans certains segments tels que la variété française ou pour des styles
tels que le métal ou le rap-groove français). La part des œuvres produites par
des artistes régionaux est estimée à moins de 10 % du chiffre d’affaires. Pour ce
distributeur, la concurrence exercée par le téléchargement (légal ou non) est une
réalité, aussi bien pour les ventes en magasin que pour celles effectuées sur le site
internet de l’enseigne. Depuis 2002/2003, la baisse cumulée des ventes atteint
40 % pour le seul magasin bordelais.
La politique de prix pratiquée durant cette période (prix élevés sur des nouveautés,
forte décote au bout de quelques semaines) a sûrement entretenu ce recul des
ventes. Un autre facteur identifié est le rétrécissement de l’offre, dû en grande
partie à l’absence de prise de risque des maisons de disque en matière de découverte
d’artistes en devenir.
Dans ce contexte, la FNAC a développé une politique jouant sur le concept de
« magasin-média » (la complémentarité entre magasins et Internet), sur celui de
« mass média » (affichage en magasin, relations presse et audiovisuel), sur la relation
personnalisée avec les adhérents (magazine « Contact », e-mailing, invitations…)
et sur la présence numérique (sites spécialisés). Le magasin de Bordeaux participe
également à des actions de promotion et événements : opérations mini-concerts,
Découvertes du Printemps de Bourges, Indétendances, Attention Talents, soutien à des
labels et autoproductions, partenariats avec des salles (Rock School Barbey, 4Sans,
Comptoir du Jazz, espace Tatry, patinoire et casino à Bordeaux, Olympia d’Arcachon),
partenariats avec des associations (Allez-Les-Filles, Base Productions, Musique de
Nuits, festivals Reggae Sun Ska, Rendez-Vous des Terres Neuves, Musiques à Pile…).
(135) GSS en Aquitaine : FNAC (4),
Cultura (3), Alice Médiastore (2).
(136) Cf. audition
de Mme VIGEZZI-RUZZI,
responsable des produits éditoriaux
de FNAC Bordeaux-centre,
du 11 février 2010.
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Plusieurs initiatives sont parallèlement envisagées. Celles-ci visent d’une part à
développer les interactions entre les magasins et la toile numérique (« Clic et
magasin », système multi-canal permettant la mise à disposition en magasin ou à
domicile sous 24 h 00 d’un produit commandé, diversification des systèmes de
vente associant CD, DVD, téléchargement légal, vente de billets de spectacles).
D’autre part, il s’agit de développer l’offre catalogue et de proposer un large
assortiment, en s’appuyant sur un élément-clé : la compétence des vendeurs pour
le travail de repérage (notamment à Bordeaux avec des vendeurs référents au plan
national), ce qui suppose aussi le maintien d’un nombre suffisant de vendeurs.
Ce travail d’assortiment et de repérage est important car il permet de fidéliser une
clientèle. Enfin, la FNAC teste un dispositif d’Espaces-Passion, soit des espaces de
référence par genres musicaux, (par exemple rock indépendant, jazz). Par ailleurs,
le maintien et le développement des relations avec des partenaires locaux sont
deux autres aspects non négligeables, limités cependant par le budget de communication dont dispose chaque magasin (d’autant que l’organisation par la FNAC
des« forums-dédicaces » dans ses magasins mobilise des moyens). Ce sont des
choix budgétaires nationaux qui ont contraint la FNAC Bordeaux à interrompre
son partenariat avec la Rock School Barbey dans le cadre de l’opération « AvantScène ». Concernant la distribution des labels régionaux, la FNAC Bordeaux-centre
déclare que sa politique n’est pas conditionnée par un volume de ventes minimal.
La mise en rayons des albums des éditeurs est d’une période minimale de 3 mois
(6 mois pour les petits labels) et jusqu’à 12 mois maximum. Le rôle des vendeurs
est également important à ce niveau (choix de facing, écoutes audio…).
Il subsiste peu de petits disquaires indépendants en Aquitaine (maximum une
quarantaine, en disques neufs ou occasion). Trois d’entre eux sont affiliés au Club
Action des Labels Indépendants Français (La Démothèque/Megastaff à Périgueux,
Total Heaven à Bordeaux et le disquaire itinérant Super Love Disc & More lié à
l’association bordelaise « Allez-les-Filles »).
L’agence régionale ECLA a identifié en Aquitaine près de 250 librairies indépendantes, dont une quarantaine impliquée dans l’association régionale des Librairies
Atlantiques. Parmi elles, l’Entre Deux Noirs, située dans une ville moyenne girondine
(Langon), créée il y a une dizaine d’années. La distribution de disques s’est
naturellement imposée en raison des relations de partenariats établies avec le
festival des Nuits Atypiques et son label Daqui. Depuis, cette librairie s’est également
rapprochée des labels indépendants aquitains (FEPPIA) et d’autres partenaires
(association Musicalarue de Luxey, Centre Culturel des Carmes de Langon, Fifres de
la Rue, Trio Joubran…). La vente des disques génère néanmoins une part modeste
du chiffre d’affaires (3,5 %), malgré le travail de mise en écoute effectué en direction
de la clientèle. Il existe en région d’autres librairies qui réalisent un travail similaire
(ex : « La Colline aux Livres » de Bergerac). ECLA a entamé un travail de rapprochement
entre le réseau des Librairies Atlantiques et la FEPPIA, afin d’inciter les libraires à la
distribution d’œuvres musicales. Toutefois, cette démarche se heurte à une certaine
frilosité des libraires (qui invoquent un manque de compétence) mais aussi à la
fragilité structurelle de ces petites librairies. Dans ce domaine, ECLA envisage
d’accompagner plus étroitement les libraires et les éditeurs phonographiques
indépendants, que ce soit à travers des actions de formation, de communication
ou encore par l’établissement d’un catalogue actualisé des libraires (dont libraires
itinérants tels L’Hirondelle) distribuant des labels régionaux.
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(137) Les musiques turques à
la Bibliothèque des Capucins à Bordeaux
(33), les musiques tziganes puis Doudou
Cissoko à la Médiathèque de Camponac
à Pessac (33), le label Talitres à la
Bibliothèque Mériadek de Bordeaux (33),
les Années Rock à la Médiathèque
de Cestas (33), les musiques du monde,
la chanson française puis les Années
Rock en sono-conférence
à la Bibliothèque du Haillan (33),
les audiofilms de Winter & Winter
à la Bibliothèque de Nérac (47)
puis celle d’Anglet (64).
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Dans ce domaine, ECLA travaille également en relation avec le réseau des bibliothèques/médiathèques publiques, au sein desquelles un collectif de discothécaires
a commencé à se structurer. Il y a en Aquitaine environ 150 bibliothèques et/ou
médiathèques municipales. D’après les informations du Ministère de la Culture et
de la Communication, près des deux tiers de ces bibliothèques disposent d’un
fonds phonographique en Aquitaine. Celui-ci dépassait 355 000 unités en 2008.
Les bibliothèques-médiathèques concernées ont acquis près de 40 000 disques en
2008 et le volume prêté a dépassé 900 000 prêts cette même année. Plusieurs
bibliothécaires musicaux se sont récemment regroupés en collectif (Bibliothécaires
Musicaux d’Aquitaine – BIMUDAQ - à ce jour essentiellement des discothécaires de
Bordeaux et Gironde). Ces acteurs ont encore du mal à se faire reconnaître en tant
que parties prenantes de la filière du disque. Pourtant, au vu des chiffres avancés
précédemment, ils apparaissent comme des relais évidents de valorisation de la
diversité et de la production phonographiques. Le prêt de CD est l’un des segments
les plus dynamiques de l’activité des bibliothèques de ce collectif (forte rotation des
œuvres). A elles seules, elles représentent un véritable marché. Vis-à-vis de leur
public, elles assurent pour certaines d’entre elles un vrai rôle d’éducation du public
et d’animation autour de la musique (cf. opérations conduites à la Bibliothèque
Municipale de Bordeaux en relation avec certains acteurs locaux tels Total Heaven,
FEPPIA, Musique de Nuit, Bordeaux Saxo… goûters sonores avec les enfants ou
adolescents). Leur intention est aussi de développer les fonds musicaux, contribuant
à la constitution d’un fonds patrimonial d’œuvres musicales et d’expérimenter
certaines solutions d’écoute en ligne (ex : à partir de bornes telles Automazik
de l’association Musique Libre !, expérience également en cours avec CD1D à
Gradignan…).
Il y a donc potentiellement de vraies passerelles exploitables entre ces structures
publiques et les opérateurs de musiques actuelles en région. Certains obstacles
subsistent cependant : capacité des petits labels indépendants à répondre aux
appels d’offres publics pour l’acquisition de phonogrammes (travail d’ECLA en
cours), vide juridique concernant la capacité des bibliothèques à numériser des
œuvres pour constitution de fonds sonores (et question des droits), formation
des discothécaires… Autant de motifs qui soulignent l’intérêt ou l’actualité d’un
rapprochement et de coopérations entre les acteurs concernés. L’initiative de
découverte des musiques et cultures du monde développée en ce sens courant
2010 dans certains quartiers de l’agglomération bordelaise par l’association
Musiques de Nuit Diffusion intitulée la « Sonomondiale » en collaboration avec
un réseau de bibliothèques et médiathèques137 en offre une intéressante illustration.
Cet éclairage sur la diffusion/distribution des œuvres révèle des opportunités de
développement en Aquitaine d’un système contributif ou collaboratif entre
distributeurs et producteurs/éditeurs phonographiques. Face au rétrécissement
de l’offre disponible dans les grandes surfaces et à l’appauvrissement du tissu des
disquaires indépendants, les solutions de diversification des canaux de distribution
privés (via les librairies) et publics (via les bibliothèques et médiathèques) offrent
un réel potentiel. Celui-ci suppose la mise en place, encore embryonnaire, d’une
démarche collective associant les différentes catégories d’opérateurs et un accompagnement spécifique (RAMA, ECLA). Selon les informations recueillies, il semble
qu’une réelle volonté d’avancer en ce sens existe. En outre, la valorisation de ce
réseau serait de nature à contribuer à un vrai travail de sensibilisation et d’éducation
des publics aux musiques actuelles, y compris en s’appuyant sur les nouvelles
technologies numériques.
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Qu’il s’agisse en amont des artistes, producteurs et éditeurs phonographiques ou en aval
des acteurs du commerce de détail, tous ont subi les effets en cascade des mutations
rapides provoquées par les technologies numériques et de leurs effets sur les comportements d’écoute musicale. C’est à une véritable rupture ou révolution que doit répondre
l’ensemble de ces acteurs et à laquelle ils sont tenus de s’adapter. Elle est vécue par
certains, notamment parmi ceux qui se sentaient exclus du système très intégré des
industries culturelles, comme une réelle opportunité ou alternative. Pour d’autres, parmi
les moins mal installés dans ce système, elle correspond à une vraie menace. Qu’en est-il
au juste ?
3.2.3 Outils et usages numériques : opportunité ou menace
pour la création et pour la diffusion des musiques actuelles ?
En 2009, le marché français de la musique numérique a atteint 73,5 M€, soit une
progression de 20 % en un an et de 83 % en deux ans. En 2009, 82 % de ces ventes
ont été réalisées sur le web et 17 % sur mobile. La part du marché numérique dans le
marché de la musique enregistrée représentait donc 7,7 % des ventes en 2009. Le ralentissement constaté cette même année semble tout à fait conjoncturel. Les ventes réalisées
ont concerné 37 millions de titres et 3,9 millions d’albums en 2009.
Les ventes en téléchargement sur mobile sont en forte baisse, en partie en raison de
l’évolution des matériels (accès au web sur mobile)138. Sur le premier trimestre 2010, la
progression enregistrée a atteint + 30 % (à 21,3 M€ dont 91 % sur le web - 9,7 % du
marché total). Le prix moyen d’un titre téléchargé sur le web était de 1,03 € en 2009
(en hausse) et celui d’un album téléchargé de 8,4 € (en baisse). Le prix moyen de
téléchargement d’un titre sur mobile était en 2009 de 1,26 € (en hausse très sensible)
et celui d’un album de 9,96 € (en hausse également).
Ces tendances d’évolution des prix moyens semblent identiques sur la période du premier
trimestre 2010. La dispersion des ventes numériques est beaucoup plus marquée que
celle du marché physique. Ainsi, le « top 100 » des titres téléchargés (web et mobile)
ne représente « que » 16 % des ventes (29 % pour le CD audio).
Au plan international, le volume des ventes numériques de musique s’est accru de
940 % durant la décennie écoulée… mais cette progression n’a pas suffi à compenser
totalement la chute des ventes de supports physiques139.
Selon une étude conduite par la SPEDIDAM et Médiamétrie en 2007, deux tiers des
internautes achètent leur CD (ou DVD) dans des points de vente traditionnels, 27 % sur
des sites commerciaux de vente de supports physiques en ligne, 25 % sur des réseaux
peer-to-peer (pair à pair ou P2P – système d’échange et de partage de fichiers), 17 %
sur des sites de téléchargement commerciaux et 8 % sur des sites web et blogs140. Bien
que déjà relativement ancienne, cette étude révèle que ce sont les fichiers musicaux qui
sont le plus téléchargés gratuitement (47 % des internautes), essentiellement à des fins
de découverte ou de test, mais aussi par simplicité ou facilité d’usage. Seulement 22 %
des internautes téléchargeraient gratuitement ces fichiers pour éviter de payer, sachant
néanmoins que l’offre sur internet est accessible à un moindre coût. Plus de 40 %
déclaraient télécharger de moins en moins à partir de sources dont ils doutaient de la
légalité.
Plus de la moitié des internautes seraient d’accord selon cette enquête pour payer un
forfait inclus dans le prix d’abonnement internet.
Ces nouveaux modes de distribution de la musique constituent un terrain d’innovations,
à la fois technologiques et de services141. Plusieurs types d’offres nouvelles de diffusion
ou de distribution sont ainsi apparus :
(138) Source :
Observatoire de la musique.
(139) Source : IFPI
(140) « Enquête SPEDIDAM
sur la consommation
et les échanges d’œuvres numériques
par les internautes français » SPEDIDAM/Médiamétrie, février 2007
(141) Cf. Synthèse du cycle
de rencontres sur les nouveaux modèles
économiques de l’offre légale de musique
en ligne « Internet pour la création
musicale », Centre d’Analyse
Stratégique, novembre 2009.
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- La musique en flux (écoute en ligne ou streaming), qui inclut désormais les webradios,
les sites communautaires de musique en ligne, avec de plus en plus souvent des systèmes
collaboratifs de partage ou de recommandation. Ce système d’offre gratuite essentiellement financé par les recettes publicitaires a encore du mal à trouver son point
d’équilibre économique. C’est aussi pourquoi de nouvelles offres payantes ont vu le jour
(les services « premiums », permettant l’accès à une offre de meilleure qualité sonore
ou à un catalogue étendu ou à des fonctionnalités complémentaires).
- La musique en stock, c’est-à-dire le téléchargement de titres, service le plus souvent
payant (à l’acte ou plus rarement par abonnement, cette dernière solution semblant
pourtant préférée par les internautes).
- L’échange et le partage de fichiers, qui peut être légal dès lors qu’il utilise une plateforme s’acquittant de ses obligations (cas de Wormee par exemple).
- Les offres couplées ou packagées, associant par exemple musique enregistrée et
spectacle vivant (enregistrement ou diffusion en live de concerts) ou achat de titres
en téléchargement et accès à des places gratuites de concerts.
- Le développement d’une offre en autoproduction, avec l’apparition de sites de
production collaborative (ex : mymajorcompany) et webradios, utilisant des licences
libres (« creative commons »).
De nombreux sites de téléchargement en ligne sont accessibles, proposant différents
services aux « musiconautes » :
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SITES DE TELECHARGEMENTS
DE MUSIQUE
SERVICES PROPOSÉS
Airtist
Téléchargement gratuit
Communautaire
Soutien à des associations
AlloMusic
Billetterie, téléchargement, écoute en ligne
Amazon
Téléchargement
Beezik
Téléchargement gratuit
> 2 millions de titres
Système de points de réduction
Carrefour
Billetterie, téléchargement payant
Cd1d
Vente en ligne de supports physiques
15 000 titres labels indépendants
Cultura
Téléchargement payant
> 1 million de titres
e-compil
Téléchargement payant
(abonnement ou à l’unité)
EMusic
Abonnement téléchargement
> 6 millions de titres labels indépendants
EZic
Téléchargement
Soutien aux artistes (70 % à 90 % reversés)
Fnac Music
Billetterie, téléchargement
(dont abonnement)
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SITES DE TELECHARGEMENTS
DE MUSIQUE (suite)
SERVICES PROPOSÉS
Gkoot
Téléchargement gratuit
Musiques électroniques - 2 300 titres
I Tunes
Téléchargement payant
> 4 millions de titres
(70 % du marché de téléchargement
en ligne ?)
Jamendo
Téléchargement gratuit sur licence ouverte
Jazz en Ligne
Téléchargement
Spécialité jazz
Lazy Live
Téléchargement
Artistes de scène indépendants
Mondomix
Magasin numérique téléchargement
Musiques du monde
MusicMe
Téléchargement par abonnement
Ecoute gratuite
> 3,5 millions de titres
Nuloop
Téléchargement
Musiques électroniques et avant-gardistes
Qobuz
Téléchargement + écoute en ligne +TV
Qualité format « lossless » (⇔ CD)
SFR
Starzik
Billetterie, téléchargements,
concerts « live », mobile > 500 000 titres
Téléchargement interopérabilité totale
> 2,2 millions de titres
Virgin Mega
Billetterie, téléchargement
Majors + gros labels indépendants
Virgin Radio
Magasin musical radio
ZaOza
Téléchargement env. 400 titres
+ jeux, films…
121 Musicstore
Téléchargement artistes
et labels indépendants
7 Digital
Téléchargements + services BtoB
Source : Tous pour la Musique (site web) + Observatoire de la Musique.
Une autre pratique numérique en développement est celle de l’écoute en ligne (streaming)
sans téléchargement, qui s’est aussi imposée comme alternative au P2P (capacités de partage
de fichiers). Plusieurs fournisseurs proposent également ce type de service sur la toile :
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SITES D’ÉCOUTE
EN LIGNE DE MUSIQUE
SERVICES PROPOSÉS
AlloMusic
Billetterie, téléchargement, écoute en ligne
Deezer (ex Blogmusik)
Ecoute en ligne gratuite
Abonnements (formules premium)
> 6,5 millions de titres + 30 webradios
Téléchargement gratuit
Musiques électroniques - 2 300 titres
Ecoute en ligne
Ecoute en ligne + radios
Ecoute en ligne - Recommandation, partage
Téléchargement par abonnement
Ecoute gratuite / > 3,5 millions de titres
Ecoute en ligne gratuite
Abonnement + formule téléchargement
Téléchargement + écoute en ligne +TV
Qualité format « lossless » (⇔ CD)
Billetterie, téléchargements, concerts
« live », mobile / > 500 000 titres
Moteur de recherche de musique en ligne
Ecoute en ligne gratuite
Formule abonnement - Accès limité
Gkoot
iLike
Jiwa
Last FM
MusicMe
Orange
Qobuz
SFR
Songza
Spotify
WorMee (Orange)
Source : Tous pour la Musique
142
Ecoute en ligne gratuite - Réseau social
(site web)+Observatoire de la Musique143.
Force est de constater la très forte progression de ces pratiques d’écoute, favorisées par
l’évolution des technologies et services. La diversité des modèles économiques et des
modes de distribution est révélatrice des difficultés encore rencontrées de stabilisation et
d’équilibre économique de cette offre de services. Plusieurs raisons ont pu être identifiées :
dispersion des catalogues, limitations techniques imposées aux internautes (les « DRM »),
problème d’acquisition des droits liés à la multiplicité des interlocuteurs, coûts (ex : frais de
stockage, bande passante…), instabilité juridique (webradios, sites d’écoute en ligne…),
qualité d’écoute. De nouveaux opérateurs, notamment ceux des télécommunications
ou fournisseurs d’accès Internet, se sont parfois lourdement engagés sur ce marché
(cas d’Orange et SFR).
La qualité d’écoute de ces nouveaux supports numériques (ex : format MP3) est souvent
dénoncée. Toutefois, ce problème a d’ores et déjà trouvé des réponses avec le déploiement de solutions dites « lossless », c’est-à-dire sans perte de qualité d’écoute et parfois
comparables en qualité à celle des platines vinyles144.
La diffusion des technologies numériques a parallèlement favorisé le développement
d’un phénomène : celui de l’autoproduction par des artistes n’ayant pu/voulu trouver
une maison de disque ou bien l’ayant quitté. Les artistes autoproduits sont propriétaires
de leurs enregistrements originaux. Selon une étude conduite en 2008 pour le compte
de l’ADAMI145, plus de 6 000 phonogrammes auraient été pressés en autoproduction en
France dans le courant de l’année 2007, concernant 45 % environ des artistes musiciens
associés à l’ADAMI (soit environ 4 000). Néanmoins, ce phénomène est en train de
(142) « Tous pour la Musique »
est une fédération qui rassemble
l’ADAMI, le CNV, la CSDEM, le FCM,
l’IRMA, le MMF, la PRODISS, la SACEM,
la SCPP, le SDLC, le SFA, le SNAC,
le SNEP, la SPPF, l’UNAC et l’UPFI.
(143) « Les sites de streaming musical »
- Observatoire de la Musique,
Cité de la Musique - 2009.
(144) Exemples : Meridian LossLess
Packing (ou MLP, utilisé
par les professionnels), Monckey’s Audio,
WavPack, FLAC,
MPEG-4 AudioLossLess ou ALS…
(145) « L’artiste-producteur en France
en 2008 » - Aymeric PICHEVIN,
M.A.N. Media / ADAMI, 2009
et audition du 13 novembre 2009.
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s’amplifier avec l’arrivée des pratiques numériques. Ainsi, environ 10 000 artistes ont
présenté une œuvre autoproduite sur le site Jamendo (2005 à 2008) et environ 20 000
maquettes en autoproduction ont été proposées au distributeur numérique Believe.
La crise du support physique a entretenu ce phénomène d’autoproduction, qui intéresse
notamment les artistes sans producteur en début de carrière, les artistes de musiques
de niche à faible diffusion mais aussi certains artistes à forte notoriété. De plus en plus
d’artistes professionnels « à potentiel » utilisent cette solution, étant donné les difficultés
accrues de signature d’un contrat avec des maisons de disques mais aussi par volonté
d’indépendance. Cette pratique de l’autoproduction via les supports numériques n’est
toutefois pas synonyme de renoncement à la réalisation d’un disque sur support physique, qui reste encore un moyen incontournable pour assurer une diffusion nationale
ou pour exister dans les circuits de diffusion (média, tournées, obtention d’aides ou
prêts…). Une très faible part d’artistes a fait l’impasse totale sur le disque. Cela intervient
cependant dans une période de durcissement des conditions imposées par les maisons
de disque ou par les distributeurs. Les artistes autoproduits doivent dès lors assumer les
coûts de fabrication et de promotion de leurs disques.
Des formules de coopération ont commencé à voir le jour, avec des formes de contrat
adaptées à l’initiative de certains distributeurs (ex : L’Autre Distribution, PIAS) ou éditeurs.
Ainsi, le déploiement des services numériques favorise de nouvelles pratiques d’autoproduction parmi un nombre croissant d’artistes-musiciens. Aujourd’hui, plusieurs centaines
de milliers d’œuvres sont directement accessibles sur Internet.
Ce mouvement explique aussi la multiplication de sites spécialisés de téléchargement ou
d’écoute en ligne. Le catalogue du distributeur en ligne Believe est quasi-exclusivement
composé d’œuvres d’artistes autoproduits, auxquels sont reversés 60 % à 70 % des
revenus. Certains sites contributifs invitent les internautes à participer au financement
des œuvres (ex : Mymajorcompany, Nomajormusik/BuzzMyBand, Spidart…) mais les
modèles économiques de ces sites contributifs restent encore aléatoires (cf. disparition
de Spidart). Ces supports offrent donc de nouvelles possibilités de diffusion pour des
artistes amateurs ou en voie de professionnalisation mais le volume des ventes reste
encore modeste (80 % des références vendues à moins de 5 000 exemplaires) même si
le volume global des ventes en autoproduction serait très significatif (comparable à celui
des ventes de supports physiques).
Ces supports sont avant tout considérés comme des outils de promotion. Certains
Conseils régionaux soutiennent le développement de plateformes favorisant l’autoproduction et, face à la rapidité de ces évolutions, la nécessité d’un accompagnement
des acteurs de la filière, notamment des petits opérateurs indépendants, apparaît avec
évidence (information, formation, adaptation des dispositifs d’aide, communication
et marketing…).
Ces mutations provoquent donc de profonds bouleversements dans le modèle économique
de fonctionnement et de répartition des revenus au sein de la filière musicale, au détriment
le plus souvent des artistes et ayants droit (cf. chapitre 3.1.3). Les conclusions du rapport
de la mission Zelnik début 2010146 (qualifié aussi rapport Hadopi3) ont suscité beaucoup
de commentaires parmi les opérateurs de la filière, notamment à propos de l’éventualité
de création d’une gestion collective des droits pour le streaming et le téléchargement
Internet et de la création d’une carte « Musique en ligne » pour soutenir l’achat par les
jeunes internautes. Le lancement de cette dernière mesure, initialement prévue pour
juin 2010 (le jour de la Fête de la Musique) a dû être reporté, compte tenu de plusieurs
obstacles liés à son financement. C’est aussi ce même jour que l’Etat a choisi pour
engager les premiers « avertissements » liés aux pratiques illégales en application de
(146) « Création et internet, Rapport au
Ministre de la Culture et de la
Communication », Janvier 2010, Mission
confiée à M. Patrick ZELNIK (Président
du label Naïve), Jacques TOUBON et
Guillaume CERUTTI.
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la loi Hadopi2. Sur ce point, le développement des pratiques P2P qui constitue selon
certains acteurs un véritable phénomène de société ne peut être assimilé à celui d’une
forme de délinquance ou de « piratage ». Il ne fait que traduire l’engouement envers les
musiques populaires et le développement de nouvelles pratiques sociales hors marché,
face auxquelles les réponses répressives sont inadaptées et leur efficacité discutable147.
Le principe dit de « riposte graduée » visant à contrer les pratiques jugées illégales a
surtout pour effet sinon pour but d’organiser la rareté et le contrôle de l’offre sur
Internet par quelques majors. La pratique du P2P n’est pas en soi illégale et certains
opérateurs ont démontré que les échanges d’œuvres musicales en P2P ne nuisaient pas
aux ventes de disques ou aux téléchargements payants, notamment à partir d’études
conduites dans plusieurs pays étrangers. On peut légitimement s’interroger sur ce qui
pourrait fonder le caractère répréhensible de la mise à disposition ou de la transmission
désintéressée d’œuvres artistiques, hormis pour protéger les intérêts économiques de
quelques grands opérateurs.
« L’officialisation de la légitimité des pratiques d’échanges élargirait l’attention portée aux
œuvres et la reconnaissance de leurs auteurs. La diversité de celles qui peuvent atteindre un
public significatif serait grandement augmentée. La qualité des représentations numériques
des œuvres échangées serait bien meilleure. »148
Des sociétés de perception et de répartition des droits, telle la SPEDIDAM, ont préconisé
l’instauration d’une licence globale et une formule de gestion collective obligatoire.
D’autres préconisent la mise en place de licences collectives étendues (à l’instar de
certains pays d’Europe du nord) associée à la mise en place d’un système de redevance
obligatoire149 établi sur la base des usages des œuvres. De son côté, la SACEM a jugé
décevantes les conclusions de la mission « Zelnik » du point de vue des auteurscompositeurs et éditeurs de musique, suggérant l’application d’un prélèvement sur le
chiffre d’affaires des fournisseurs d’accès internet.
C’est le sens de la disposition relative à la mise en place d’une gestion collective des
droits, laquelle vise à rééquilibrer la répartition des revenus issus des ventes réalisées sur
Internet. Dans un contexte encore marqué par la fragilité économique des nouveaux
modèles de distribution des œuvres sur Internet, cette proposition a suscité l’opposition
des plus importants producteurs phonographiques, dans l’hypothèse avancée d’une
gestion collective obligatoire faute d’accord entre ayants droit. Ces majors ont pour la
plupart déjà négocié des avances et des contrats d’exclusivité avec certaines plateformes, voire pris des participations dans les sociétés de service Internet150, contribuant
ainsi à verrouiller les conditions d’accès à l’offre musicale sur Internet.
Ce qui est en question derrière ces grandes manœuvres et les énormes enjeux économiques,
c’est la capacité pour les artistes et les internautes d’accéder pour les uns à des moyens
de diffusion de leurs œuvres moyennant une rémunération équitable et pour les autres
à une offre culturelle diversifiée.
Pour les opérateurs des activités-supports, une étude prospective du DEPS conclut à
« l’urgence d’une évolution des modèles d’affaires, des habitudes de gestion et des contraintes
juridiques…pour mettre à profit les opportunités offertes par les techniques numériques
plutôt que de n’en subir que les menaces. » Ses rédacteurs soulignent le déplacement
du centre de gravité de la création de valeur, des contenus vers la méta-information
nécessaire à leur consommation, en insistant sur les possibilités offertes à partir des
plates-formes d’interaction du web 2.0.151
Cette étude met en évidence le rôle clé de la méta-information dans la relation entre
l’offre musicale et la demande. Cette relation s’appuie sur un système de prescription
qui fait intervenir deux variables : la sélection des œuvres et leur promotion. Dans ce
travail de prospective, le DEPS a identifié quatre structures méta-informationnelles :
(147) Notamment en raison du
développement qu’elles suscitent de
pratiques de cryptage.
(148) « Internet et création : comment
reconnaître les échanges hors marché sur
internet en finançant et rémunérant la
création ? » - Philippe AIGRAIN – In
Libro Veritas, 2008.
(149) Cf. Philippe AIGRAIN.
(150) Cf. à ce propos la stratégie opérée
par Sony : accords avec Google puis
YouTube en 2006, avec Last.Fm en 2007
puis avec Deezer, Yahoo !,
RadioBlogClub, MSN Vidéo,
MySpace…Sony a également développé
une offre spécifique : lancement d’une
carte de téléchargement d’albums sans
DRM (Platinum Music Pass), alliance
avec Nokia pour son « Comes with
Music » puis via Sony-Erissson d’un
kiosque de téléchargement PlayNow…
(151) « Musique enregistrée et
numérique : quels scénarios d’évolution
de la filière ? » Marc BOURREAU, Michel
GENSOLLEN, François MOREAU – DEPS
– Culture Prospective n° 2007-1
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Mode de promotion
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Mode de sélection
Par des professionnels
Pas de sélection
Promotion centralisée
Modèle « Star system »
Modèle « Push »
Promotion décentralisée
Modèle « Pull structuré »
Modèle « Pull libre »
Source : DEPS, 2007
Le modèle « Star system » est celui qui prévaut actuellement, caractérisé par une promotion
centralisée par des médias de masse et une sélection par des labels indépendants. Ce
modèle garantit une certaine qualité et diversité des œuvres proposées, mais il tend à
évoluer vers le modèle « Push ». Celui-ci se distingue par une baisse de qualité générale
faute de sélection, un formatage et une uniformisation de l’offre. A l’opposé, le modèle
« Pull structuré » se traduit par une promotion décentralisée proche du modèle actuel
des labels indépendants. Il se caractérise par la fourniture de services et de contenus plus
personnalisés et la constitution d’un système de communautés (ex : blogs, réseaux
sociaux). Le modèle « pull libre » permet aux artistes un contact direct avec leur public,
sans intermédiaire. Il représente une opportunité d’accès à une offre plus diversifiée.
C’est par exemple sur ce créneau que de nouveaux acteurs, tels la société Opendisc
(agence conseil en marketing relationnel), ont choisi de miser.
Comment les opérateurs en région s’adaptent-ils à ces évolutions ?
La plupart des acteurs aquitains impliqués dans la valorisation et la diffusion des
œuvres (producteurs, éditeurs, labels, lieux de diffusion, festivals…) et groupes
d’artistes professionnels ont déjà pris en compte cette mutation de l’écoute musicale
numérique sur Internet152. Ils disposent le plus souvent de sites propres sur lesquels
ils proposent l’écoute en ligne d’extraits ou titres, la distribution de disques sur support physique (mais peu le téléchargement), des annonces de concerts etc.
La plate-forme déployée récemment par la FEPPIA (1d-Aquitaine) propose l’achat
de CD et l’écoute en ligne des œuvres d’artistes produites par les labels aquitains.
Cette plateforme est présente sur les réseaux sociaux Facebook et Myspace.
Le déploiement de l’offre de services sur ce type de plate-forme pourrait accroître
l’attractivité et améliorer la promotion des artistes, groupes et producteurs régionaux : liens entre auditeurs et artistes, création de communautés ou forums par
genres musicaux, formules de téléchargements à l’unité ou par abonnement, recommandation et possibilités de partage sur certains titres, systèmes d’offre « premium »
en fonction de la qualité d’écoute musicale ou d’accès à d’autres services complémentaires tels que des réductions sur des places de concerts ou des places offertes,
liens avec des webradios diffusant ces labels…
Une association bordelaise, Musique Libre !, a développé la première plate-forme
française de téléchargement de musique en ligne en licence ouverte. Le principe
des licences ouvertes est que les auteurs concèdent au public un droit d’usage,
dans la mesure où celui-ci s’exerce dans un cadre non commercial153. Les licences
libres doivent ainsi répondre à certaines exigences.
Il existe plusieurs types de licences libres ou ouvertes, dont les caractéristiques
varient en matière de droits de diffusion, de distribution des œuvres ou de modification pour une utilisation commerciale ou non. L’avantage de cette formule est
qu’elle s’affranchit de certains intermédiaires en comparaison des circuits classiques
de distribution des œuvres musicales, permettant l’acquisition à des coûts réduits
(6 à 10 € contre 15 à 25 €). Les objectifs de l’association Musique Libre ! sont de
(152) Cf. à titre indicatif le site
du portail web de la vie culturelle
à Bordeaux « Happen ».
(153) Certaines licences permettent
l’usage commercial, à condition
de redistribuer les dérivations
de l’œuvre sous la même licence
(Art Libre, CC by-sa, CC by-nd).
Il existe même un contrat qui permet
cette utilisation sans aucune restriction
(CC by).
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soutenir et promouvoir la création et l’exploitation musicale indépendante dans le
cadre des licences libres, de militer pour la gestion individuelle des droits d’auteur
auprès des sociétés civiles, organisateurs de spectacles, labels et diffuseurs.
Elle œuvre aussi dans le sens d’une meilleure information des artistes et du public
sur les modes émergents de diffusion et d’exploitation des œuvres musicales à l’ère
du numérique et sur l’économie qui en découle.
La première licence de musique libre fut lancée en 2000 (free music licence) et
cette offre s’est rapidement répandue au niveau international dans la mouvance du
développement des pratiques sur logiciels libres. L’association Musique Libre !,
créée en 2004, a mis en ligne en 2006 un site d’écoute et de téléchargement
musical « Dogmazic », alimenté par des auteurs, compositeurs et labels indépendants du monde entier. En mai 2010, ce site propose près de 42 500 morceaux de
musique (dont 2 500 albums complets) produits par plus de 3 800 artistes ou
groupes et 280 labels. Depuis l’ouverture de ce site, le nombre d’écoutes et/ou de
téléchargements réalisés a dépassé les 122 millions.
En 2007, l’association a créé Pragmazic, une SARL de distribution en ligne de labels
en libre diffusion (creative commons, copyleft), à partir du catalogue Dogmazic,
qui reverse 65 % des recettes aux ayant-droits et 17,5 % destinés à un fonds de
soutien à la musique libre. Pragmazic propose une offre d’albums accessibles en
ligne sous plusieurs formats (MP3, WAV ou FLAC) au prix de 6 € (10 € pour le
disque « physique »).
Cette société a parallèlement développé depuis 2007 des solutions technologiques
d’écoute sur bornes (des « juke-boxes » numériques en quelque sorte), essentiellement pour des lieux ou espaces publics type bibliothèques ou médiathèques154 :
Automazic et sa formule plus économique lancée en 2009 Minimazic (moins
encombrant mais accès limité à une sélection de 10 000 titres du catalogue + sélection
régionale).155
Il faut également signaler le travail remarquable accompli par l’association MédiasCité de Saint-Médard-en-Jalles, créée en 1998. Il s’agit d’une plate-forme de
mutualisation numérique destinée d’une part à favoriser l’expression, la diffusion
et la formation des artistes, acteurs éducatifs, culturels et socio-culturels et d’autre
part à accompagner les collectivités dans la mise en œuvre de projets de démocratisation des usages d’internet. L’objectif de Médias-Cité est d’offrir une alternative
citoyenne de promotion de la diversité culturelle face à la logique de maintien ou
de renforcement de monopole dans le domaine du numérique. Aujourd’hui,
Médias-Cité rassemble une soixantaine de structures adhérentes, dont la moitié
en Aquitaine. En matière de pratiques musicales, Médias-Cité a ainsi travaillé en
collaboration avec l’ADEM Florida à Agen ou encore avec l’association Transrock
gestionnaire de la salle du Krakatoa.
Elle a aussi développé plusieurs initiatives telles que les « Jeudis Multimédias »,
permettant à des artistes de présenter leurs créations culturelles issues de ces
technologies (arts numériques, créations digitales, Net Art, installations multimédias,
à l’instar de la « méta-mallette » développée par la société Puce-Muse), en lien avec
les espaces culture-multimédias. Autre outil mis en place par Médias-Cité, la
« Couveuse » est un espace d’incubation de projets de développement d’intérêt
collectif dans le cadre duquel une collaboration a été établie avec la FEDUROK,
visant à explorer les utilisations possibles des technologies numériques dans une
démarche de coopération et d’observation partagée (Observation Participative et
Partagée156). Elle a débouché sur la mise en place d’outils (Coopalis, Localis), issus
(154) C’est le cas en Aquitaine
pour les médiathèques de Gradignan
et d’Anglet… mais aussi Belfort,
Toulouse, Montpellier, Chambéry,
Vendée…
(155) cf. audition de M. AOUANES,
Musique Libre ! du 8 septembre 2009.
(156) Système auquel contribuent
le « Sans Réserve » à Périgueux,
le « Roscksane » à Bergerac,
le « Florida » d’Agen et le « Krakatoa »
à Mérignac.
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d’un travail préalable accompli dans le cadre de deux chantiers (« Espaces Multimédias
en Aquitaine » et « Tour de France de la Fédurok »). Dans le prolongement de cette
activité d’incubation, Médias-Cité a initié des « Parcours interactifs » afin de faciliter
la circulation de contenus.
Cette association a parallèlement développé une activité de veille et de repérage en
ligne de projets à la croisée de l’art et de l’innovation (le « Stud-I/O ») ainsi qu’un
blog dédié à l’innovation dans l’économie créative associé au wiki157 « ArtLabO ».
Médias-Cité a identifié plusieurs obstacles au déploiement des technologies et usages
numériques dans les pratiques culturelles :
- d’abord la difficulté d’anticipation des usages (ex : succès du SMS ou du web 2.0),
- ensuite la prééminence d’un modèle de développement industriel classique (ou
« fordiste » et pyramidal) qui va à l’encontre d’une démarche visant à favoriser la
« capillarité créative » pourtant permise par ces nouvelles technologies,
- cette approche industrielle est associée à la tentation permanente de créer de la
rareté, ce qui va aussi à l’encontre de la diversité,
- enfin le dogme de l’équipement individuel auquel est rattachée cette approche
industrielle, négligeant les espaces de pratique collective. De fait, le simple équipement
en ordinateur ne résout pas la question des usages et de leur accompagnement.
L’approche privilégiée par Médias-Cité est celle d’une économie dite contributive,
caractérisée par la création d’espaces de « biens communs »158, et dans l’esprit des
théories développées par certains groupes de pensée (ex : Ars Industrialis, créée à
l’initiative du philosophe Bernard STIEGLER). Dans le domaine musical, Médias-Cité
insiste sur les ouvertures accrues en matière de création musicale par le développement
des jeux vidéo en ligne et sur les possibilités offertes par les nouveaux supports
numériques « augmentés ».
Pour cet opérateur, les tentatives de régulation des accès et des usages constituent
autant de risques d’enterrement des pratiques, alors même que les nouvelles générations, celles des « digital natives », sont totalement ancrées dans ces nouveaux usages
numériques et modes de consommation associés (ex : on ne paie pas les œuvres mais
les supports ou services de diffusion).159
Quelques lieux de diffusion (ex : Rock School Barbey à Bordeaux, Florida à Agen)
disposent également d’un Espace Culture Multimédia, labellisé par le Ministère de la
Culture jusqu’en 2009, offrant des outils de démocratisation aux supports numériques
et aux contenus culturels, avec mise à disposition de plateformes d’aide à la création
artistique et initiation à la Musique Assistée par Ordinateur.
Au cours des dix dernières années, le développement des solutions d’écoute numériques et des pratiques qui leur sont associées a profondément modifié les équilibres
existants au sein de la filière musicale. De nouveaux opérateurs ont investi le marché
(fournisseurs d’accès Internet, fournisseurs de contenus numériques…), obligeant les
acteurs « historiques » à des adaptations et à de nouvelles alliances.
En Aquitaine, les producteurs et éditeurs phonographiques indépendants tout
particulièrement ont dû s’adapter, se structurer et élaborer des réponses collectives à
l’image de la mise en place de la plate-forme 1d-Aquitaine. Ce type d’initiative
collective est d’autant plus nécessaire que le déploiement de services numériques
exige des moyens techniques, humains et financiers souvent difficiles à mobiliser à
l’échelle de très petites entreprises ou associations et que les volumes d’affaires générés
restent encore relativement modestes. D’où l’intérêt de solutions mutualisées. Pour
cette catégorie d’opérateurs, il s’agit désormais de s’adapter en saisissant autant que
(157) Système de gestion
de contenus de sites web.
(158) Ainsi en est-il des licences
de type « creative commons ».
(159) Cf. audition de M. ELBAZE,
Médias-Cité, du 13 novembre 2009.
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possible les opportunités ouvertes par le développement des usages numériques et
notamment du web 2.0 et de se projeter dans les scénarios du « Happy few », du
« Netlabel » voire du « Consumartist » identifiés dans l’étude prospective du DEPS.160,
même si certains relativisent la portée de ces changements jugée parfois utopique161.
Véritable phénomène de société, cette révolution numérique en matière d’écoute
et de pratique musicale touche l’ensemble des acteurs de la filière, au-delà des seuls
opérateurs directement concernés par la filière du disque. Elle constitue un terrain
propice d’innovations sociales mais aussi technologiques et de services (ex : quelles
applications de la réalité augmentée pour la valorisation de la création musicale ?).
La mobilisation et la coopération des différents acteurs professionnels de la filière
(dont les réseaux tels que le RAMA ou la FEPPIA) et des outils régionaux (ECLA, AEC)
sur cette question devraient être encouragées et étendues, notamment en matière
d’éducation populaire, de formation ou d’apprentissage, d’accompagnement, de
recherche-développement et d’expérimentation de solutions (cf.3.2.5).
(160) Scénario « Happy few » :
transposition du modèle « Pull structuré »
décrit p.106 utilisant l’efficacité
de la promotion décentralisée en ligne
sans passer par des médias centralisés ;
Scénario « Netlabel » : combinaison
de la promotion décentralisée en ligne
et d’une promotion par les internautes,
la recherche de talent étant au cœur de
l’activité de production musicale ;
Scénario « Consumartist » : dans ce
scénario plus radical, on assiste à une
disparition des différences entre
professionnels, producteurs occasionnels
et amateurs avec coexistence
d’un modèle ouvert de création collective
et du modèle dominant actuel,
dans lequel le bien musical devient
un bien culturel contributif. Dans ces
deux derniers scénarios, le système
production/diffusion/promotion est plus
favorable aux consommateurs
et aux artistes.
« Musique enregistrée et numérique :
quels scénarios d’évolution de la filière ? »
Marc BOURREAU, Michel GENSOLLEN,
François MOREAU – DEPS – Culture
Prospective n° 2007-1.
Le déploiement des services numériques n’est pas non plus neutre pour la filière du
spectacle vivant, la plupart des festivals d’envergure et des lieux de diffusion offrant
désormais leurs propres plateforme de services (dont billetterie ou réservations, blogs,
forums, échanges avec les artistes, liens avec réseaux sociaux…).
3.2.4 Opérateurs du spectacle vivant : l’affirmation
de démarches citoyennes face à la surenchère économique
D’après la SACEM162, le nombre de séances de spectacle vivant n’a cessé de croître au
cours de ces dernières années, frôlant en 2009 le nombre de 154 000 séances (soit
+ 23 % depuis 2003). Ces séances ont généré un peu plus de 10 % des perceptions
globales de la SACEM (78,5 M€), dont 90 % liés aux concerts (y compris les festivals).
En 2009, les concerts ont représenté selon cette source les trois quarts des séances de
spectacle vivant en France (soit 116 500), 84 % d’entre eux étant organisés par des
associations. Les tournées qui ne représentent que 4 % du nombre total de concerts
ont généré 39 % des recettes totales, ce qui traduit une très forte concentration
économique du secteur. Les 10 plus grosses tournées163 ont totalisé 20 % des revenus
du spectacle vivant.
Les informations recueillies par le CNV sur la base des structures assujetties à la taxe
fiscale sur les spectacles de variétés révèlent qu’en 2008 plus de 27 000 spectacles dans
le champ des musiques actuelles ont généré plus de 316 millions € de recettes pour plus
de 12 millions de spectateurs. La période récente dans ce secteur du spectacle vivant est
marquée par l’arrivée sur le marché français de nouveaux et puissants opérateurs, fournisseurs d’accès internet, organisateurs d’événements (ex : GL Events) et multinationales
du spectacle (ex : Live Nation), avec une tendance à la concentration. En outre, la crise
du disque a renforcé pour les opérateurs de la chaîne musicale l’intérêt et le caractère
irremplaçable de la scène et des tours-supports. Une autre tendance notable est
l’accroissement d’une offre gratuite de spectacles vivants (souvent à l’initiative de
fournisseurs d’accès internet, de média et de collectivités), qui préoccupe certains
professionnels du secteur.
Parmi les sujets d’inquiétude, il faut mentionner les incidences de la transposition de la
directive européenne sur les services164, qui remet en question la licence d’entrepreneur
de spectacle, obligatoire en France pour tout responsable de structure associative ou
commerciale dont l’activité habituelle est la production de spectacles165. Cette directive
permettra dès 2011 à tout producteur étranger, sur simple déclaration, d’organiser
(161) Cf. Franck REVILLARD, 2007.
(162) « Le spectacle vivant en France
en 2009 : bilan et perspectives » SACEM, avril 2010.
(163) Johnny Halliday, Mylène Farmer,
Cléopâtre, U2, Age Tendre et Tête de
Bois, Mozart L’Opéra Rock, AC/DC,
Bénabar, Tryo, Indochine… parmi les
artistes en tête de ce palmarès en 2009.
(164) Directive 2006/123/CE
du 12 décembre 2006 sur les services,
applicable aux services de loisir, même
s’il est précisé que cette directive
« ne porte pas atteinte aux mesures
prises au niveau communautaire ou au
niveau national, dans le respect du droit
communautaire, en vue de la protection
ou de la promotion de la diversité
culturelle ou linguistique, ou du
pluralisme des médias. » Son application
à certains domaines, dont le domaine
culturel, peut être limitée pour des
« raisons impérieuses d’intérêt général ».
Elle impose aussi un plafond
de 66 000 €/an d’aides publiques, sauf
pour les structures relevant d’un service
économique d’intérêt général (SIEG).
(165) Il existe 3 catégories de licence
d’entrepreneur de spectacle : celle pour
les exploitants de lieux de spectacles
aménagés pour des représentations
publiques (licence de catégorie 1),
celle destinée aux producteurs de
spectacles et entrepreneurs de tournées
(licence de catégorie 2) et celle
applicable aux diffuseurs de spectacles
(licence de catégorie 3).
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des spectacles en France sans être soumis à une obligation de redevance ou sans avoir
à s’adosser à un producteur national.
Dans cette affaire, la France a répondu au niveau européen avant de lancer la concertation
avec les acteurs culturels. Dans ce nouveau contexte, la question posée est celle du
risque de concurrence déloyale. La licence d’agent artistique est amenée à disparaître et
des ajustements devraient concerner celle d’entrepreneur de spectacle : modification de
la composition de la commission d’attribution des licences, suppression de la licence
temporaire pour les entreprises étrangères remplacée par une déclaration. Enfin, le taux
super-réduit de TVA appliqué dans les lieux où il est facultatif de consommer pendant
les spectacles (soit 2,1 %)166 est également dans le collimateur de la Commission
Européenne, ce qui suscite d’autres inquiétudes pour les gestionnaires de petites
structures de diffusion.
La diversité des lieux de diffusion de spectacle vivant est très large : des zéniths167 (17 en
activité à ce jour) et lieux de musiques actuelles (au nombre de 136 d’après les données
du DEPS) sans compter l’ensemble des lieux privés (dont discothèques, bars-concerts
etc.) et événements tels que les festivals. A ce propos, les travaux initiés par le Ministère
de la Culture et de la Communication dans le cadre des entretiens de Valois ont souligné
la nécessité d’un schéma directeur propre aux scènes de diffusion de musiques actuelles
face à l’hétérogénéité des lieux concernés168.
Au niveau national, il existe depuis 1996 un label des Scènes de Musiques Actuelles (ou
SMAc, près de 70 au total), lequel cependant ne dispose toujours pas d’un véritable
cahier des charges (en cours de finalisation)169, prenant en compte la diversité et l’évolution
des missions des SMAc depuis cette époque. Récemment, face au constat de fragilisation170
des lieux de musiques actuelles établi par plusieurs fédérations (Fédurok et FSJ
notamment), une attente s’est exprimée pour l’établissement d’un Schéma
d’Orientation de développement des Lieux de Musiques Actuelles (SOLIMA) et pour sa
déclinaison territoriale, dans le prolongement du Plan pour des politiques nationales et
territoriales concertées en faveur des musiques actuelles lancé en 2006171.
Une autre catégorie importante de lieux de diffusion est celles des bars / discothèques
à ambiance ou animation musicale, soit plusieurs milliers d’établissements en France. Il
faut ici souligner le rôle particulier joué par nombre de ces établissements, qui offrent
souvent l’occasion d’une première scène ou contact au public pour de jeunes artistes et
groupes amateurs de musiques actuelles, sans omettre le fait que ces lieux peuvent aussi
être des lieux de préservation de certaines pratiques traditionnelles (ex : polyphonies en
Gascogne et Béarn).
Ce rôle particulier des bars et bistrots en matière de soutien à la création et à la diffusion
culturelles est à l’origine de la création en 2004 d’un collectif, celui de Culture Bar-Bars,
dans le prolongement d’un festival créé en 1999 à Nantes. L’objet de cette fédération
est de promouvoir et défendre la liberté de diffusion des spectacles vivants dans de
petites structures non subventionnées, adossées à une éthique sociale, culturelle et
citoyenne des établissements concernés. La participation à ce collectif suppose aussi
l’adhésion aux principes d’une charte dont les valeurs reposent sur la liberté d’initiative
privée et de diffusion de cultures « alternatives », la contribution à l’animation du territoire
et à la vie économique locale, la défense d’une micro-économie basée sur de petites
initiatives privées indépendantes et la participation à l’éveil culturel des publics.
Actuellement, le collectif Culture Bar-Bars fédère près de 180 établissements, essentiellement
répartis dans l’Ouest et le Sud de la France. Les premières rencontres nationales des
cafés-cultures se sont tenues en 2008, dans le prolongement desquelles une plate-forme
nationale a vu le jour, associant le Collectif Culture Bar Bars, le Syndicat National des
(166) Pour les lieux où il est d’usage
de consommer durant les spectacles,
le taux appliqué à la billetterie est
de 19,6 %. Pour ceux dont cet usage
est facultatif le taux est de 5,5 %
et de 2,1 % pour les 140 premières
représentations d’un spectacle donné
(cf. article 279 du CGI).
(167) Les « Zénith » sont des salles de
grandes capacités (au moins 3 000
places) dont l’appellation correspond à
un label et à une marque commerciale
propriété de la société Coker,
qui a bénéficié d’un programme de
soutien des pouvoirs publics (via le CNV).
(168) Cf. rapport « Les entretiens de
Valois : pour une rénovation des
politiques publiques du spectacle vivant »
- Ministère de la Culture
et de la Communication, 2009.
(169) Toufefois, une circulaire datant
de 1998 co-rédigée avec les opérateurs,
définit les droits et devoirs des SMAC.
Sur l’ensemble des scènes labellisées,
une soixantaine seulement fonctionne
avec une convention d’objectifs.
(170) Dont l’affaire du Grenier
à Sons à Cavaillon.
(171) Ce plan a été co-signé en juin
2006 par l’Etat (Ministère de la Culture),
le Conseil Supérieur des Musiques
Actuelles (CSMA), l’Association des
Régions de France (ARF), l’Association
des Départements de France (ADF),
l’Association des Maires des Grandes
Villes de France, l’Association des Maires
de France, la Fédération Nationale des
Collectivités pour la Culture (FNCC),
l’association des directeurs culturels des
grandes villes de France, la Fédération
Nationale des Syndicats du Spectacle,
de l’Audiovisuel et de l’Action
Culturelle-CGT, le Syndicat National
des Producteurs Diffuseurs et Salles
de Spectacle (PRODISS), la Syndicat
National des Entreprises Artistiques
et Culturelles (SYNDEAC),
le Syndicat National des Petites Structures
de Spectacle (SYNAPSS), le Syndicat
National des Editeurs Phonographiques
(SNEP), l’Union des Producteurs
Phonographiques Indépendants (UPFI),
la Chambre Syndicale des Éditeurs
de Musique (CSEM), l’Association des
Festivals Innovants de Jazz et Musiques
Actuelles (AFIJMA), la Fédération des
Associations de Musiques et Danses
Traditionnelles (FAMDT), l’association
FÉDUROK, la Fédération des Radios
Associatives Rock (FÉRAROCK),
la Fédération Nationale des Écoles
d’Influence Jazz et Musiques Actuelles
(FNEIJMA), la Fédération des Scènes
de Jazz et Musiques Improvisées (FSJMI),
le réseau Chaînon, Technopol,
l’Association Zone Franche, Music
Manager Forum France – Cf. circulaire
ministérielle n° CC166914
du 2 novembre 2006.
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Artistes Musiciens CGT, l’Union des Métiers de l’Industrie Hôtelière, des collectivités
territoriales (dont le Conseil Régional d’Aquitaine), l’Etat (Ministère de la Culture et de
la Communication, Ministère de l’Intérieur), le Pôle de coopération des musiques
actuelles en Pays-de-la-Loire et le Réseau Aquitain des Musiques Actuelles.
Ces cafés-culture se définissent à la fois par leurs pratiques culturelles (occasionnelles ou
régulières dans différents modes d’expression ou esthétiques), par leur cadre réglementaire
(établissements commerciaux débits de boissons de moins de 200 places et considérés
en tant qu’établissements recevant du public N V).
L’activité de ces petits établissements se heurte à plusieurs difficultés, liées notamment
à l’interprétation de la licence d’entrepreneur de spectacle172, qui devrait être adaptée
ne serait-ce qu’en application de la directive communautaire sur les services. Un protocole
relatif aux bonnes pratiques devrait voir le jour courant 2010, selon qu’il s’agit de pratiques
amateurs ne donnant pas lieu à des recettes propres ou de pratiques générant une
recette spécifique. Dans ce cas de figure, le collectif travaille à la mise en place d’un système
de financement en faveur des artistes professionnels en relation avec le Guichet Unique
des organisateurs de Spectacles Occasionnels (GUSO) auquel les cafés-cultures peuvent
être affiliés. Un autre axe de mobilisation de ces établissements porte sur les questions
de santé (ex : dispositif d’accompagnement gratuit à domicile pour des festivaliers à
Nantes, avec mise à disposition d’éthylotests et de préservatifs).
Les festivals participent pleinement à la valorisation et à la diffusion des musiques
actuelles. Au niveau national, dans le contexte de crise du disque, on assiste semble-t-il
à un regain d’intérêt pour ce type de manifestations, ce dont témoigne l’accroissement
de fréquentation au cours des dernières années. Le festival des Vieilles Charrues à Carhaix
en Bretagne attire plus de 220 000 spectateurs sur 4 jours. Celui des Eurockéennes de
Belfort ou Indétendances à Paris plus de 100 000. Les Francofolies de La Rochelle (5 jours)
dépassent la barre des 80 000 spectateurs. Le festival Sziget à Budapest en Hongrie,
le plus important d’Europe dans le champ des musiques actuelles, a accueilli près de
400 000 spectateurs durant une semaine en 2009.
L’ensemble de ces activités mobilise de nombreux professionnels parmi lesquels des
entrepreneurs de spectacle (producteurs et organisateurs de tournées notamment,
programmateurs, organisateurs de festivals ou d’événements).
Le Syndicat National des Entrepreneurs de Spectacle rassemble 140 prestataires qui réalisent
chaque année 12 000 spectacles pour un volume d’affaires de 120 M€. De son côté,
l’Union du spectacle musical et de variété (PRODISS) regroupe environ 300 entrepreneurs
de spectacles réalisant un chiffre d’affaires global de 400 M€. Selon les informations
publiées par ce syndicat, environ 500 artistes ou groupes français (dont 60 % en
développement) effectueraient des tournées chaque année. Selon cette même source,
plus de 90 % des structures produisant des artistes sur scènes seraient des TPE ou associations
économiquement fragiles, dont la moitié pourrait être amenée à disparaître dans les dix
ans à venir, du fait de l’accroissement des coûts de production, d’une concentration de
l’activité de billetterie sur des événements majeurs, avec des conséquences en termes
de réduction du catalogue des artistes en devenir.
En Aquitaine, les éléments recueillis par la base CNV des redevables de la taxe fiscale
sur les spectacles de variété font apparaître qu’en 2008 plus d’un millier de représentations dans le secteur des musiques actuelles ont généré 10,6 M€ de recettes.
(172) Seulement 120 établissements
de type cafés-bars disposeraient
d’une licence d’entrepreneur
de spectacle en France.
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Plusieurs structures (sociétés, associations) exercent en Aquitaine une activité
d’entrepreneur de spectacles :
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Structures
Activités
Autres informations
3C
Entrepreneur de spectacles,
tourneur, accompagnement
d’artistes
Booking
Plus de 80 artistes/groupes dont
Eiffel, Calc, Romain Humeau,
Julien Pras parmi les Aquitains
Une vingtaine de groupes,
dont Basement, Machin-Chose,
Randy Mandys…
300 concerts en 8 ans
(Bordeaux, 33)
After Before
(Fumel, 47)
Alhambra Productions
(Bordeaux, 33)
Ariane Productions
(Pessac, 33)
Art Session
(Bordeaux, 33)
Artistes du Monde
(Bordeaux, 33)
Artistic Production
(Bordeaux, 33)
A Tant Rêver Du Roi
Entrepreneur de spectacles,
organisateur
Développement
Frères Brothers,
et accompagnement d’artistes Rue de la Muette,
Caumont et Costa, Sourigues
Tourneur, organisateur
MartinToutSeul, Naki,
Donaldo Flores…
Organisateur du festival
Musiques à Pile
Tourneur,
Doudou Cissoko, Langi, Moussa
promotion d’artistes
Diouf, Noumi’s Acoustic…
Production et administration
Spectacles jazz (Rhoda Scott,
de spectacles
Golden Gate Quartet…)
Tourneur, label
Booking pour 8 artistes
(Pau, 64)
Base Productions
(Bordeaux, 33)
Booking, production,
management
BCP Sarl
Promoteur de spectacles
Une trentaine d’artistes
ou groupes dont Gojira,
Rageous Gratoons…
(Bordeaux, 33)
Benjamin International
Productions
Entrepreneur de spectacles,
tourneur, management
(Marmande, 47)
Blue Fish-Art
(Bordeaux, 33)
Blue Up !
Tourneur, management,
promotion
Producteur de spectacles
Une quinzaine d’artistes
(Lacanau, 33)
Decibels Charter
(Marmande, 47)
Einstein On The Beach
(Bordeaux, 33)
Hors Normes Productions
(Agen, 47)
Josette
(Bordeaux, 33)
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Production et diffusion
de spectacles
Une vingtaine d’artistes
internationaux (jazz, blues,
musiques du monde)
Organisation de spectacles
Organisation du festival
« A Voix Haute »
(Bagnères-de-Bigorre)
Tourneur, secrétariat artistique, Oncle Strongle, Akeikoi,
développement d’artistes
Les Nez Buleux, Batignolles,
Adjololo System, SunSplash…
(Label)
Entrepreneur de spectacle,
Scarzello & Lys Slow Motion
tourneur
Orchestra, Olivier Gallis, OPA,
Dollar$…
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Latitude Productions
(Gamarde les Bains, 40)
Music’Action Prod
(Cissac Médoc, 33)
Nell Production
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Entrepreneur de spectacles,
promoteur
Organisation de spectacles,
management d’artistes
Booking, management
(Marcillac Saint Quentin, 24)
Parallèles Attitudes Diffusion Entrepreneur de spectacles,
organisateur
(Bordeaux, 33)
Sea of Flames
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Une trentaine d’artistes
Une demi-douzaine d’artistes
/groupe
Association gestionnaire d’une
scène de musiques actuelles
(RockSchool Barbey)
Booking
(Bordeaux, 33)
Some Produkt
Organisation de concerts
(Boulazac, 24)
Ter A Terre Concerts
(Bordeaux, 33)
TroisQuatre !
(Bordeaux, 33)
Zoobook
Tourneur
Une douzaine d’artistes sous
propre label et autant
d’artistes étrangers
en distribution
Entrepreneur de spectacles,
Une quinzaine d’artistes dont
tourneur, développement
Anne Etchegoyen, Xarnege…
d’artistes
Musiques du monde
Booking, tourneur, production Une vingtaine d’artistes
(Bordeaux, 33)
Zubikoa Management
(Saint-Pée sur Nivelle, 64)
Entrepreneur de spectacle,
tourneur, organisateur
Une douzaine d’artistes
Source : Officiel de la Musique, 2010
La société 3C créée en 1994 a développé une activité de tourneur/booking pour des
artistes ou groupes français (35) et étrangers (48). A ce titre, 3C assure la gestion de
carrière de plusieurs artistes ou groupes (dont Renan Luce, Bazbaz, Hurlements d’Léo,
La Grande Sophie, Lo’Jo, les groupes bordelais Eiffel, Calc, Kid Bombardos…).
L’activité de producteur-tourneur réside par ailleurs dans la programmation et la
revente de spectacles pour le compte d’artistes ou groupes, parfois marquée par un
investissement conséquent en amont (3C rémunère les artistes et loue des salles pour
les répétitions, résidences et pour la préparation des concerts). Elle organise aussi les
tournées pour les artistes dont la société s’occupe en exclusivité (1 à 10 dates par an
pour chaque artiste). Pour la seule année 2008, 3C a organisé 1 700 concerts dont 300
à 400 en production, principalement sur Paris et Bordeaux (dont 50 à 60 concerts pour
des artistes aquitains). Cette société occupe 9 salariés répartis entre Bordeaux et Angers.
Depuis 2009, 3C a mis en place une activité tournée vers les jeunes publics (3C Kids).
L’association TroisQuatre ! également créée en 1994 travaille dans une démarche de
« développeur d’artistes », c’est-à-dire d’accompagnement et de formalisation de
projets artistiques et leur intégration dans un projet économique à travers la diffusion,
pour des artistes n’ayant pour la plupart qu’une notoriété limitée ou peu diffusés.
Spécialisée sur le segment des musiques du monde et des nouvelles musiques
traditionnelles et animée par le souci de promotion de la diversité culturelle,
TroisQuatre ! gère la carrière de 16 artistes, pour certains depuis l’origine de l’association
et emploie 3 salariés. Elle travaille en relation étroite avec des lieux de diffusion
subventionnés (dont Rock School Barbey). Elle organise environ 150 concerts par an,
dont 3 à 4 avec des artistes aquitains.
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Il existe en Aquitaine relativement peu d’artistes en musiques traditionnelles et peu de
lieux de diffusion (hormis le festival des Nuits Atypiques de Langon et la programmation
offerte par l’association Musiques de Nuit). L’ouverture prochaine du Rocher de Palmer
à Cenon (proche banlieue de Bordeaux), espace dédié aux cultures du monde, devrait
en partie remédier à cette faiblesse.173
Il importe de souligner le rôle de ces opérateurs (tourneurs, entrepreneurs de spectacle) dans l’accompagnement et le développement d’artistes ou groupes et dans la
construction de leur parcours scénique et professionnel (concerts, tournées).
Cependant, la crise du disque a provoqué une tendance à la hausse des coûts d’organisation de spectacles (cachets, charges techniques), mais aussi une tendance de
certains tourneurs à privilégier les artistes à forte notoriété, précisément ceux pour
lesquels les cachets ont le plus augmenté, avec une concurrence accrue exercée par
quelques grandes sociétés internationales (cas déjà cité de Live Nation). Certains lieux
de diffusion qui s’adressaient auparavant aux tourneurs pour leur programmation
tendent donc à les éviter, leurs ressources n’ayant pas suivi l’évolution des coûts de
production ou d’organisation. Il n’en reste pas moins que la plupart des artistes ont
du mal à être diffusés et que dans un tel contexte certains entrepreneurs de spectacle
jouent un véritable rôle de développeurs d’artistes, en relation avec d’autres acteurs
de la chaîne musicale (éditeurs, lieux de répétition, salles, festivals).
Les éléments issus de l’activité de la SACEM apportent d’autres indications sur la
réalité des espaces et occasions de diffusion de musiques actuelles en Aquitaine. Pour
l’ensemble de la région SACEM (incluant ici le Gers et les Hautes-Pyrénées), cela représente
plus de 650 lieux de spectacles et discothèques, un nombre non négligeable (plus
de 300) de bars à ambiance ou animation musicale, 20 000 lieux sonorisés, plus de
6 000 spectacles et concerts de variétés, environ 10 000 autres événements (bals,
kermesses, fêtes…) lors desquels sont diffusés des morceaux de musique.
Activités
SACEM
ACI*
Lieux de spectacle
et discothèques
Spectacles
et concerts variété
Bars à ambiance
musicale
Lieux sonorisés**
Bals/repas avec
orchestre ou disques
Kermesses/fêtes
Médias AV locaux
DR Périgueux DR Bordeaux DR Biarritz DR Agen DR Pau
(24)
(33)
(40)
(47+32) (64+65)
350
1300
900
370
400
32
170
140
110
100
1 200
1 700
1 000
1 400
850
12
NR
90
29
70
2 200
6 600
5 200
3 200
4 000
1 600
1 000
1 800
2 700
2 600
140
13
2 700
31
NR
16
800
15
280
28
Source : SACEM
*ACI Auteurs-Compositeurs-Interprètes ; **Lieux sonorisés : cafés, restaurants, hôtels, commerces…
A ce niveau, le rôle des scènes ou lieux de diffusion dédiés aux musiques actuelles
nécessite un éclairage particulier.
En Dordogne, la salle du « Sans Réserve » est une scène de musiques actuelles
labellisée de 500 places. Elle est gérée par une association du même nom qui emploie
(173) Cf. audition
de MM. Christophe BOSQ (3C)
et Alexandre COL (TroisQuatre !)
du 7 janvier 2010.
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8 salariés (6 ETP). L’association du Sans Réserve rassemble des collectivités membres
de droit (municipalités de Périgueux, Boulazac, Coulounieix-Chamiers, Conseil
Général de la Dordogne, Conseil Régional d’Aquitaine), des représentants d’usagers
(public, musiciens, associations culturelles) et d’autres acteurs (Collectif 24, Etat,
Agence culturelle du département…). Son budget annuel est de 430 k€, dont 30 %
d’autofinancement. La politique de diffusion s’appuie sur un travail de concertation
avec les associations locales. Le programme est construit autour de 35 concerts ou
spectacles dans l’année, les deux-tiers étant le fruit d’une co-organisation avec d’autres
associations. Dans ce cas, le Sans Réserve prend en charge une partie des frais fixes,
la sécurité et la billetterie (voire jusqu’à 75 % du déficit), ce qui offre aux plus petites
associations organisatrices un appui appréciable.
La politique de diffusion s’attache autant que possible à la programmation de groupes
locaux (environ la moitié des groupes programmés, notamment en premières parties).
Le tarif moyen pratiqué est de l’ordre de 10 € l’entrée. Le public accueilli par le Sans
Réserve (près de 9 000 spectateurs en 2008) est surtout masculin (aux deux tiers)
et majoritairement jeune (près des deux tiers de moins de 25 ans), mais de plus en
plus intergénérationnel. Le profil sociologique fait apparaître une forte proportion
d’étudiants et lycéens ainsi que d’employés. Un tiers du public est essentiellement
originaire de Périgueux et plus largement du reste du département. Pour près de
la moitié, il s’agit d’un public de musiciens. Le Sans Réserve est aussi un lieu
d’apprentissage et d’accompagnement (cf. 2.2.2 et 2.2.3). Cette association est
membre de la Fédurok au niveau national et du RAMA au niveau régional.174 Dans ce
cadre, le Sans Réserve a reçu une délégation du RAMA pour l’action avec les Jeunesses
Musicales de France en milieu scolaire.
A Bergerac, l’association Overlook co-gère la salle de musiques amplifiées du Rocksane
créée en 2003, d’une capacité de 500 personnes. La programmation comporte une
trentaine de concerts par an, associant des artistes confirmés de notoriété nationale
ou internationale à des artistes en voie de professionnalisation, locaux ou régionaux.
Elle développe aussi des activités d’apprentissage et d’accompagnement d’artistes ou
groupes. L’association Overlook est également organisatrice d’un festival qui se tient
en novembre de chaque année et depuis peu d’un tremplin pour groupes amateurs
(« Aquil’Tour » ouvert aux groupes de Dordogne, Gironde et du Lot-et-Garonne).
Il existe d’autres salles ou lieux de diffusion en Dordogne, à l’image de la récente salle
du Palio à Boulazac (capacité de 1 000 à 6 500 personnes), avant tout dédiée à l’accueil de spectacles vivants (et événements sportifs) avec des artistes ou groupes de
dimension nationale ou internationale.
En Gironde, la salle de la Rock School Barbey, labellisée en 1996 salle de musiques
actuelles (SMAC), a ouvert en 1988. Elle est gérée par l’association Parallèles Attitudes
Diffusion, agréée d’éducation populaire, qui opère dans le cadre d’une convention de
mise à disposition par la collectivité (Ville de Bordeaux) moyennant paiement d’un
loyer et des charges afférentes. Ce lieu offre une salle d’une capacité de 700 places
et une formule club de 250 places. La Rock School Barbey programme une centaine
de concerts par an, dont environ la moitié en production propre, avec une double
exigence : artistique et culturelle (dont diffusion de groupes amateurs ou en devenir
locaux), économique (souci d’équilibre financier). Le public accueilli est estimé
globalement entre 35 000 et 40 000 personnes par an. L’autre partie de la programmation concerne des spectacles organisés par d’autres opérateurs (tourneurs, producteurs, associations) qui louent l’infrastructure (salle et services techniques associés).
Le budget de la Rock School Barbey est de 1,5 M€, couvert pour un peu plus de la
(174) Cf. audition de M. GARCIA,
directeur du Sans Réserve,
du 3 novembre 2009.
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moitié par un autofinancement, le reste sous forme de subventions de l’Etat
(Ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Sports, de la Santé, de la Ville) et des
collectivités (Ville de Bordeaux, Conseil Général de la Gironde, Conseil Régional
d’Aquitaine).
La Rock School Barbey emploie une quinzaine de salariés en CDI, une vingtaine de CDI
intermittents (professeurs de musique), des personnels occasionnels ou intermittents
(techniciens à la journée le plus souvent) et 8 jeunes en service civil volontaire.
Elle participe au groupement d’employeurs AGEC (cf.3.1.2). A cela, il faut souligner
l’implication particulière à certaines occasions d’une cinquantaine de bénévoles
membres de l’association. Elle organise plusieurs tremplins pour des groupes locaux
(dont les Découvertes du Printemps de Bourges, cf. 2.2.3). Elle propose également
des activités d’apprentissage et l’accompagnement d’artistes ou groupes (répétitions,
enregistrements – cf. 2.2.2 et 2.2.3).
La Rock School Barbey développe en outre plusieurs initiatives en direction du territoire
(notamment sur l’agglomération bordelaise) vers certains quartiers prioritaires175 et
de certains publics (milieux scolaire, carcéral176, hospitalier177). Enfin elle déploie en
direction de ses publics des actions de sensibilisation spécifique liées à certains
problèmes de santé (relais régional de l’association AGI-SON pour la prévention
des risques auditifs par délégation du RAMA, avec depuis 2009 mise en place d’une
action pédagogique particulière en direction des jeunes « Yes Ouïe Can », lutte contre
l’abus de consommation d’alcool dans le cadre de l’opération « Festiv’Attitude »,
participation à la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles dans le cadre
du Sidaction…). Elle a parallèlement adopté des mesures de « développement
durable » (dont tri sélectif de déchets).
À Mérignac dans l’agglomération bordelaise, l’association Transrock gère depuis 1990
la salle du Krakatoa, également labellisée scène de musiques actuelles. La création de
ce lieu, ancienne salle des fêtes municipale, fut guidée par la volonté de permettre
l’accompagnement et la diffusion de groupes locaux et d’accueillir un public le plus
large possible. Elle offre une capacité maximale de 1 200 places (fractionnable
en configuration 700 places ou en formule club de 250 places). L’association emploie
9 permanents et participe au groupement d’employeurs AGEC. Son activité mobilise
également 25 à 30 bénévoles actifs membres de l’association. Chaque année, le
Krakatoa organise une quarantaine de concerts et accueille environ 20 000 personnes
dans ce cadre. Le tarif moyen est de 12 € à 15 € selon les années. Elle développe
également des activités en matière d’accompagnement de groupes (pépinière
d’artistes, cf. 2.2.3). Le budget de l’association est proche de 750 000 €, dont 50 %
d’autofinancement (subvention de la municipalité de Mérignac, de la DRAC
Aquitaine, du Conseil Régional d’Aquitaine, du Conseil Général de la Gironde mais
aussi SACEM, CNV…). Le Krakatoa participe à plusieurs réseaux (Fédurok, RAMA,
réseau « ressources ») et partenariats (IRMA, AGI-SON, ANPE Spectacle…).
Des salles privées plus spécialisées en musiques actuelles ayant une activité de
programmation mais de moindre capacité complètent cette liste de lieux de diffusion.
Cela concerne notamment :
- Le 4Sans à Bordeaux (800 places) est un lieu spécialisé dans la diffusion des
musiques électroniques référent au plan national et européen (drum’n bass, électro,
techno, mais aussi plus accessoirement rock, blues…). Plus de 100 concerts sont
programmés chaque année. Outre une programmation spécifique, il travaille en
co-production de spectacles avec plusieurs associations locales (Allez-Les-Filles,
associations de hip’hop et de reggae) et avec quelques labels locaux spécialisés
(175) Notamment à travers le projet
« Musique et Quartiers » sur Bordeaux,
Pessac, Floirac, Sainte Eulalie – Exemple :
l’opération « Côté Rock School »
de soutien artistique
auprès de jeunes à Floirac.
(176) Maison d’arrêt
de Gradignan (33).
(177) Hôpital de jour
du Centre de santé mentale
de la MGEN (Bordeaux)
et Foyer d’accueil médicalisé
pour polyhandicapés « Le Mascaret »
à Bègles (33).
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sur les musiques électroniques (Banzaï Records, Boxon Records, par exemple à
l’occasion d’opérations telles que la Nuit des Labels organisée le 21 mai 2010 par
la FEPPIA). L’activité de ce lieu (qui participe aussi à la découverte de jeunes DJ’s178),
la présence de labels dynamiques et d’un public de plus en plus nombreux, ont
permis à la place de Bordeaux de disposer d’une vraie reconnaissance sur la scène
nationale et internationale des musiques électroniques, encore mal mesurée
localement. Situé sur une zone en cours de ré-urbanisation, le 4Sans est appelé à
fermer ses portes d’ici fin 2010, sans pour l’heure de solution de relocalisation faute
de disponibilité d’un lieu approprié.
Ses gestionnaires devraient, au moins dans un premier temps, mettre à profit leurs
compétences et leurs réseaux pour déployer une activité de tourneur-producteur
d’événements (dont un projet de festival, tel celui organisé à La Teste qui avait
accueilli 4 500 personnes mais aurait facilement pu atteindre 8 000 personnes si le
lieu s’y était prêté).
- L’espace Tatry à Bordeaux (600 places debout) ouvert en 2007, qui programme 120
dates par an, essentiellement en musiques actuelles (dont 60 % en programmation
propre et 40 % en location d’espace à prix adapté pour des associations locales
telles qu’Allez-Les-Filles, Eclipse, Bordeaux Rock…).
- Le BT59 à Bègles (salle de 600 places debout), bien qu’à vocation polyvalente
(polyvalence renforcée pour raisons économiques), offre également une programmation de concerts de musiques actuelles (une centaine par an, rock et de plus
en plus électro), en partenariat avec certaines associations (dont Dissidence Rock,
Allez-Les-Filles…).
- Le Complexe (ex CAT, mais l’association CAT subsiste) à Bordeaux offre une salle de
400 places et accueille une centaine de concerts par an, dont une partie en programmation. Lieu de diffusion, il propose aussi des activités d’accompagnement.
- L’Hérétic Club à Bordeaux s’affiche comme partie prenante de l’univers « de la scène
hardcore do it yourself » et revendique résolument son indépendance à l’écart de la
culture de masse et du formatage jugé trop institutionnel des « musiques actuelles ».
Ce lieu est l’un des plus représentatifs de la scène « underground » bordelaise.
Particulièrement actif, il a proposé en 2009 plus de 130 soirées et plus de 250
groupes. L’association qui gère ce lieu est également à l’initiative d’un petit label
(Exécutoire Records) et d’un fanzine (Sédition).
- Parmi les autres lieux associatifs bordelais, on peut également mentionner l’Antidote
géré par l’association ChapeauBas.
D’autres lieux de diffusion plus polyvalents existent sur l’agglomération bordelaise :
- La Patinoire de Bordeaux-Mériadek, propriété de la Ville de Bordeaux gérée par la
société Axel Vega (3 300 places assises, près de 7 000 debout).
- L’espace de la Médoquine à Talence (capacité maximale de 3 000 personnes debout
modulable – une centaine de spectacles par an dont une dizaine de concerts) géré
par une SEM179.
- Le Pin Galant (Mérignac, capacité de 1 400 places maximum – plus de 100 représentations
dans l’année dont une trentaine de concerts et variétés180) et l’Entrepôt (Le Haillan,
460 places), gérés par une même Société d’Économie Mixte181.
- La salle du Vigean à Eysines (800 places assises et jusqu’à 1 500 debout).
- La salle de La Coupole à Saint-Loubès (800 places assises, 2 400 debout), une vingtaine
de spectacles par an dont moins d’une dizaine en spectacles de variétés.
- La salle de Bellegrave à Pessac (jusqu’à 1 000 spectateurs).
(178) Ex : Tom Deluxx,
Tuff Wheelz, Finzy…
(179) Talence Gestion Équipement.
(180) Le Pin Galant accueille
plus de 100 000 spectateurs par an,
tous spectacles confondus.
(181) Mérignac Gestion Équipement SA.
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- L’Espace Culturel Treulon à Bruges (jusqu’à 800 places).
- Le Théâtre des Quatre Saisons à Gradignan (une quarantaine de spectacles par saison
dont quelques concerts de musiques actuelles).
- Le Casino de Bordeaux, équipement géré dans le cadre d’une concession par la
Société d’Animation Touristique182 de Bordeaux, accueille des concerts de musiques
actuelles dans une salle de 700 places.
- Enfin, il faut aussi mentionner à ce niveau la scène de l’Office Artistique de la Région
Aquitaine, qui accueille des artistes en résidence et organise quelques spectacles en
diffusion.
Trois nouveaux lieux devraient voir le jour sur l’agglomération à court-moyen terme :
- un Grand Arena situé sur Floirac, nouvel espace culturel multifonctionnel de l’agglomération, dont l’ouverture est prévue en 2012. Ce projet engagé par la Communauté
Urbaine de Bordeaux et la municipalité de Floirac sur la zone du projet Euratlantique,
combine une salle de spectacles de grande capacité (3 000 à 15 000 places maximum
pour des événements culturels et sportifs) associée à un espace commercial de
30 000 m2.
La réalisation de ce projet, aux normes HQE, est portée par la société SAS Montecristo
Développement (filiale de Rabobank) et la société Nouvelles Fonctions Urbaines pour
un montant d’investissement de 200 M€. Son exploitation devrait en être confiée à
la société espagnole Arena Events SL (membre du réseau European Arena Association,
réseau associé à Live Nation, 1er tourneur international,) et à Gilbert Coullier Productions.
Il est prévu dans ce cadre d’accueillir 600 000 spectateurs par an. Plusieurs opérateurs
locaux considèrent que ce type d’équipement de grande capacité faisait défaut
à Bordeaux, l’une des grandes agglomérations françaises à ne pas disposer d’une
salle de type Zénith. La solution Arena, plus polyvalente, adossée à un programme
commercial, lui a été préférée. D’autres estiment que la jauge (15 000 places
maximum mais 9 000 en configuration concert dont 1 000 à 1 500 places à visibilité réduite) et l’option scénique (une scène centrale que peu de groupes pratiqueraient) risquent en limiter l’intérêt pour certains tourneurs.
- Un pôle culturel « jazz musiques du monde », le Rocher de Palmer, situé à Cenon
devrait entrer en phase d’exploitation en septembre 2010. Ce lieu comporte deux
salles de spectacles (une salle de 650 places assises et une salle de 1 200 places
debout) et sera équipé d’une régie numérique pour un investissement de 19 M€.
Ce nouvel équipement devrait également abriter un « salon de musiques » (250
places), deux ateliers, un centre de ressources, un espace public d’animation
musicale, un bar et un restaurant. L’association Musiques de Nuit Diffusion est
associée à la gestion de ce lieu, en charge notamment de la programmation,
combinant musiques du monde, jazz, hip’hop, musiques électroniques (30 à 35
concerts / an prévus). Outre l’activité de diffusion, ce pôle à vocation régionale
devrait parallèlement développer des projets en matière d’apprentissage et
d’accompagnement artistique, en lien avec divers opérateurs locaux et régionaux.
- Nouvel espace privé axé sur la promotion et la diffusion des musiques actuelles, le
« Music Institute Bazar » est un nouveau lieu qui devrait être opérationnel en 2011
(Bordeaux Rive-Droite). Ce projet initié par la société Vicious Circle avec plusieurs
partenaires (Platinum Records, Talitres) est davantage un espace-concept qu’un
simple lieu de diffusion, associant une salle de concerts (environ 300 places), un
disquaire, une librairie, un bar-club, des locaux administratifs (FEPPIA, labels associés
au projet). Dans l’esprit de ses concepteurs, ce nouveau lieu devrait offrir un espace
(182) Filiale du groupe
Lucien Barrière.
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de diffusion d’artistes et groupes amateurs ou en voie de professionnalisation, dont
ceux produits par les labels indépendants aquitains.
Plus largement en Gironde, la plupart des villes du département sont dotées de salles
pouvant potentiellement accueillir des concerts ou représentations de spectacle
vivant (ex : Le Centre Culturel des Carmes à Langon avec une salle de 800 places en
configuration concert, le Liburnia à Libourne où un autre projet de salle de capacité
limitée - 180 à 200 places - pourrait voir le jour…).
Dans les Landes, la salle du Café Music’, membre du RAMA, existe depuis 1995. Elle
a vu le jour à l’initiative de la municipalité de Mont-de-Marsan afin de répondre à une
carence de l’offre culturelle destinée aux jeunes (lieu de rencontre, salle de spectacle,
répétitions…). Une association d’animation culturelle a été créée (AMAC) afin
d’assurer la gestion de ce lieu, labellisé scène de musiques actuelles (SMAc). Le Café
Music’ est à la fois un lieu de diffusion (salle de concerts de 500 places), un espace
de rencontres, d’apprentissage (cf. 2.2.2) et de répétition. Chaque année, 20 à 25
concerts sont programmés dans cette salle, avec un effort particulier sur la découverte
de nouveaux talents, dans un rôle médian entre celui des bars-concerts et des
grandes salles de type Zénith. La programmation se fait surtout en fin de semaine,
beaucoup de jeunes effectuant leurs études à Bordeaux. Les tarifs pratiqués ici varient
de 10 € à 15 € afin de permettre le plus large accès possible aux publics, ce qui
devient de plus en plus difficile.
Le Café Music’ mobilise une quinzaine de salariés (12 ETP) et dispose d’un budget de
460 k€. Les gestionnaires de ce lieu ont constaté une tendance à l’érosion du public
(moins de spectateurs par concert, 150 à 200 personnes en moyenne) en raison de
l’émiettement de l’offre, de la baisse relative du pouvoir d’achat et de l’évolution des
comportements (internet). Le Café Music’ publie un fanzine (« Cafzic »).
D’autres lieux publics du département proposent ponctuellement des programmes
de diffusion en musiques actuelles (Le Théâtre, le théâtre du Péglé, l’Espace François
Mitterrand et les Arènes à Mont-de-Marsan, Les Arènes et l’Atrium de Dax, le nouveau
Pôle culturel du Marsan à Saint-Pierre-du-Mont…).
En Lot-et-Garonne, le Florida à Agen fut la toute première scène de musiques amplifiées
créée en 1993 à l’initiative de la municipalité et labellisée depuis. Sa gestion a été confiée
à l’association ADEM Florida. Ce lieu offre une salle de 750 places et programme une
trentaine de concerts par an. Dans ce domaine, l’orientation du Florida vise à privilégier
autant que possible les créations émergentes ou en développement (notamment en
programmant des groupes locaux amateurs ou régionaux en premières parties de
concerts d’artistes ou groupes plus confirmés de notoriété nationale ou internationale).
Sa programmation intègre de plus en plus les nouvelles esthétiques musicales (dont
celles utilisant les nouvelles technologies sonores et visuelles). La programmation
dans le temps de certains groupes régionaux ou nationaux (ex : Gojira, Ezékiel, Les
Double Nelson…) s’inscrit dans une démarche de suivi des parcours artistiques qui
fait aussi partie des choix éditoriaux de ce lieu. Sa politique de diffusion est également
associée à une logique de création et d’expérimentation artistique. Le Florida est
membre du RAMA. Outre ses activités de diffusion, l’ADEM Florida est aussi un lieu
d’apprentissage, d’accompagnement des artistes ou groupes (cf. 2.2.2 et 2.2.3) et un
espace multimédia. Il travaille en appui aux structures associatives et collectivités
lot-et-garonnaises pour promouvoir les pratiques liées aux musiques actuelles.
Un autre lieu dédié en Lot-et-Garonne est le récent Pavillon 108 ouvert à Fumel en
2009, géré par l’association After-Before qui développe essentiellement une activité
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de tourneur (cf. plus haut). Ce lieu d’une capacité de 300 places propose une
programmation de concerts de musiques actuelles (une douzaine par an) à des tarifs
très accessibles (3 € à 7 €). Dans ce département, plusieurs collectivités gèrent des
équipements pouvant accueillir des concerts de musiques actuelles (ex : Salle de La
Diligente, Centre Culturel et La Manoque jusqu’à 1 200 spectateurs debout à Tonneins)
et certaines (Aiguillon, Fumel, Nérac, Villeneuve-sur-Lot) participent au réseau
Mixage, organisateur de l’opération « Régions en Scène », rattaché à la Fédération
des Nouveaux Territoires des Arts Vivants.
En Pyrénées-Atlantiques, l’association L’Ampli créée en 1983 gère depuis une dizaine
d’années un centre de musiques actuelles situé à Billère. Aménagé dans une friche
encore en devenir, ce lieu labellisé SMAc dispose d’une salle de concerts de 400
places. L’Ampli organise une trentaine de concerts sur site chaque année avec, dans
la plupart des cas, des premières parties locales (environ 60 % de groupes locaux).
Outre la diffusion, l’association l’Ampli réalise un travail d’accompagnement de
groupes (répétitions, résidences, enregistrement cf. 2.2.3). L’Ampli emploie 9 salariés
(dont 1 emploi aidé) et son budget est de 400 000 €, autofinancé à 30 %. En 2009,
la gestion de ce site s’est complexifiée, en raison de la décision des collectivités
(Communauté d’Agglomération) d’ouvrir l’occupation du lieu à d’autres associations
locales. Ainsi, l’Ampli dispose désormais de la salle 180 jours par an, quatre autres
associations pouvant programmer des concerts sans passer par l’Ampli pour une
vingtaine de dates par an. Une convention pluriannuelle était en cours de négociation
avec les partenaires publics (Communauté d’Agglomération de Pau-Pyrénées, Conseil
Général des Pyrénées-Atlantiques, Conseil Régional d’Aquitaine et Etat) lors de la
rédaction de ce rapport. L’Ampli développe plusieurs projets en direction du milieu
scolaire et en matière de relations transfrontalières (ex : Aragon et Euskadi, avec
échange de groupes, résidences, approche sur la prévention des risques auditifs).
A Pau, la salle de la Centrifugeuse (Maison de l’étudiant de l’Université de Pau et des
Pays de l’Adour) offre un autre lieu de diffusion dynamique sur l’agglomération
paloise.
Dans ce même département, le centre de musiques actuelles L’Atabal à Biarritz offre
un espace de diffusion comprenant une salle de concerts de 700 places et une formule
de cafés-concerts. Ce lieu ouvert en 2005 s’inscrit dans le cadre d’un programme
d’équipement de la municipalité dédié aux jeunes (dont centre de glisse, locaux
associatifs…). La gestion a été confiée à un Etablissement Public à caractère Industriel
et Commercial. L’Atabal programme une quarantaine de concerts chaque année,
avec des groupes locaux en premières parties. L’Atabal emploie 7 salariés permanents
et son budget de fonctionnement est de 600 000 €, autofinancé à près de 60 %.
Egalement à Biarritz, la nouvelle Halle d’Iraty offre un espace adapté pour l’accueil de
concerts d’une capacité maximale de 4 500 places.
On recense d’autres équipements susceptibles d’accueillir des concerts de musiques
actuelles dans les Pyrénées-Atlantiques. Ainsi le Zénith de Pau (le seul en Aquitaine)
offre un espace modulable pouvant accueillir 650 à 4 500 places assises et jusqu’à
6 500 places assis/debout. Ce site emploie 6 salariés permanents et jusqu’à 200
personnes lors de certains événements. Il accueille une quarantaine de spectacles par
an, productions nationales ou internationales (soit 100 000 spectateurs en moyenne
par an).
Dans les autres villes du département et à une autre échelle, on peut par exemple évoquer
L’Espace Jéliote à Oloron (660 places assis/debout) ou encore la programmation du
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cabaret La Luna Negra. Géré par un groupe de passionnés (l’association Quartier Latin)
à Bayonne, ce lieu programme 160 concerts par an de petits groupes locaux,
régionaux, nationaux voire internationaux avec une salle pouvant accueillir 145
personnes en format concert. La Luna Negra emploie 4 salariés permanents et son
activité mobilise une vingtaine de bénévoles.
Ce dernier exemple ne fait que souligner le rôle particulier des cafés-bars-discothèques
dans la diffusion des musiques actuelles et, pour une partie d’entre eux, leur
contribution au travail de « mise en scène » et de révélation de groupes et artistes
amateurs en devenir ou en voie de professionnalisation. On compte en Aquitaine
environ 3 000 cafés-bars et discothèques dont environ 10 % de boitesdiscothèques. Ce dernier type d’établissements de nuit s’adresse certes à un public
plutôt jeune (deux tiers de moins de 25 ans) mais pas exclusivement. De la diffusion
d’une musique de fond, ils sont passés de plus en plus aux DeeJaying et à la diffusion
de musiques électroniques.
De manière générale, une part croissante d’établissements de restauration
« branchés » fonctionne avec un DJ opérant en milieu de salle. Dans cette
catégorie (discothèques/boîtes), peu sont positionnés sur la diffusion d’artistes
émergents en raison du risque commercial, d’autant que la plupart de ces
établissements exercent sur une base précaire car soumis à un régime d’autorisation
particulier. Les discothèques sont en outre tenues de faire acquitter un droit
d’entrée ou de consommation, ce qui les rend moins accessibles que d’autres
établissements (ex : bars) pour les publics les plus modestes. S’agissant des bars-cafés,
ils conservent un rôle social de rencontre, de lien social et pas uniquement de
consommation. Moins courus aujourd’hui en raison de l’évolution des modes
de vie, ils demeurent des lieux dont la fréquentation repose en partie sur la qualité
de l’ambiance et notamment de l’ambiance musicale. A tel point qu’il semble
désormais difficile de concevoir ce type de lieu sans fond musical. On assiste actuellement au développement d’établissements à thèmes (BD, musique…) et de lieux
tests afin de répondre aux attentes nouvelles des publics183. Parmi ceux-ci, il existe
en Aquitaine des cafés-bars qui ont choisi de s’impliquer de manière volontariste
dans la promotion et la diffusion d’artistes ou groupes de musiques actuelles.
Dans la plupart des cas, ces établissements ont été créés par des passionnés de
musique quand ce n’est pas par des musiciens. En Dordogne, on peut citer le cas
du Lemb@rzique Café situé à Lembras à proximité de Bergerac qui développe
depuis 2001 un concept de bar musical ouvert à tous les groupes ou artistes de la
région souhaitant se produire sur une scène, dans une démarche de promotion de
la pratique musicale. Cet établissement met une sonorisation et des instruments à
disposition et offre même un système d’enregistrement (pour un prix de 300 € à
950 € selon le nombre de titres et la taille du groupe). Il programme une centaine
de concerts par an, avec une salle d’une capacité maximale de 230 personnes. En
partenariat avec la scène du Rocksane de Bergerac, il est à l’origine du tremplin
local « AquiL’Tour ».
Une demi-douzaine de bars-cafés de la région se sont engagés dans le Collectif
Culture Bar-Bars. Dans le centre de Bordeaux, le Saint-Ex’, racheté en 2006, s’est
spécialisé dans la diffusion de musiques actuelles, à un moment où s’opérait un
glissement dans la programmation des salles dédiées et où disparaissaient certains
lieux (ex : Le Jimmy). L’activité du Saint Ex a été fortement perturbée par des
exigences de mises aux normes en matière de sécurité et d’insonorisation
(arrêt après 1 mois d’activité et réouverture en mai 2008). Malgré ces difficultés
(183) Cf. audition
de MM. ERNANDORENA
et HELAND, UMIH,
du 3 novembre 2009.
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structurelles (dont une jauge limitée de 60 places), la programmation du Saint-Ex
reste fournie et éclectique (150 groupes accueillis sur l’année), en prise sur la création et la scène émergente à des tarifs très accessibles (5 € l’entrée). Le public du
Saint-Ex’ est composé d’amateurs éclairés, dont beaucoup de musiciens, ce qui
oblige à un travail de programmation assez exigeant. Faute d’une rentabilité
suffisante, les gestionnaires du Saint-Ex’ sont obligés d’exercer d’autres activités
professionnelles afin de maintenir la pérennité de ce lieu. Également situé dans
le centre de Bordeaux, La Dibiteri est un autre acteur local du Collectif Culture
Bar-Bars. Ce bar-concert offre un espace scénique sommaire mais malgré cette
limite fonctionne tous les soirs avec une programmation variée (du slam au jazz
improvisé) et se voit obligé de refuser des demandes (plus de 600 artistes ou
musiciens entre juin 2008 et juin 2009). C’est la motivation artistique qui a abouti
à l’existence de ce lieu, dont l’activité reste peu rémunératrice sachant que 20 %
du chiffre d’affaires est mobilisé pour l’accueil d’artistes. D’où le choix opéré par
son gestionnaire du statut de SARL (possibilité de revente du fonds en cas d’arrêt
d’activité).
Ces petits établissements ont beaucoup de mal à assumer financièrement les
exigences de certaines normes ou réglementations, à quoi peuvent s’ajouter des
problèmes de voisinage en raison de leur localisation, sans que les nuisances subies
ne relèvent ni directement ni systématiquement de leur activité (consommation
d’alcool sur la voie publique, nuisances sonores provoquées par les attroupements
sur l’espace public…). Les autres établissements aquitains membres du Collectif
Culture Bar-Bars sont Le Fiacre (à Bordeaux, qui met son espace à disposition
d’associations ou groupes locaux), le Frisco Café à Mimizan, La Croche à
Villeneuve-sur-Lot et le Grand Café de Casteljaloux. D’autres bars musicaux pourraient
certainement en région s’inscrire dans cette démarche du Collectif Culture Bar-Bars184.
La diffusion des musiques actuelles en Aquitaine passe également par l’organisation
d’événements ou festivals, dont certains ont atteint un vrai succès populaire. Une
grande partie de ces manifestations se déroule durant la saison estivale et contribue
de ce fait à l’attractivité touristique de la région pour les visiteurs en séjour ou de
passage. Dans certains cas, la présence d’un festival réputé est un motif en soi de
visite pour une partie des festivaliers venus d’autres régions ou pays. Durant cette
période, une étude de l’Observatoire régional de la culture réalisée en 2008185
révèle qu’un tiers des festivals de spectacle vivant concernerait les musiques
actuelles. Le rôle des associations souvent à l’origine de ces festivals est déterminant
(80 % des festivals étant organisés par des associations, les deux tiers si l’on exclut
les associations directement liées à des collectivités). La dynamique collective à
l’échelle de certains territoires est donc une caractéristique essentielle de ces manifestations et l’une des conditions de leur succès auprès des publics186.
Environ 40 % des manifestations se déroulent sur une période inférieure ou égale à 3
jours. En termes de budget, les festivals de musiques actuelles sont, proportionnellement, ceux dont la part d’autofinancement est la plus élevée. Ce sont aussi ceux pour
lesquels la part des coûts techniques est relativement la plus importante (il s’agit
souvent de manifestations en plein air qui exigent beaucoup d’installations et de
matériels), aspect amplifié ces dernières années par une tendance à la surenchère des
coûts artistiques et associés (pour les artistes ou groupes les plus cotés), conséquence
indirecte de la crise du disque.
De manière générale, ces manifestations mobilisent un personnel relativement
important autour d’un noyau de permanents (près de 4 salariés en moyenne) mais
surtout de bénévoles dont l’implication est essentielle dans la dynamique et dans
(184) Exemples de bars-concerts :
le Café des Jours Heureux,
le Café des Moines, le Congo Café,
Culture of Rock ex Cave Belge,
le Chat qui pêche, Le Chat Gourmand,
Le Lucifer, La Politique, le Zig Zag café,
le Zubu à Bordeaux,
le Poulailler à Bègles…
(185) « Les manifestations culturelles
d’été en Aquitaine – État des lieux » Observatoire régional de la culture
d’Aquitaine – La Lettre n° 2,
automne 2009 ; Cf. audition
de M. HERMAN,
directeur de l’Observatoire régional
de la culture, du 24 mars 2010.
(186) La plupart (73 %) des festivals
sont organisés à l’échelle
d’une commune et quelques-uns
sont itinérants (ex : le festival
« Ouvre la Voix »).
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l’équilibre économique de ces manifestations. Dans leur ensemble, ces festivals de
spectacle vivant privilégient le plus souvent la programmation d’artistes extérieurs à
la région (60 %) ou combinent à la fois des artistes extérieurs et régionaux (dans un
tiers des cas). Rares sont les festivals qui ne programment que des artistes locaux ou
régionaux (5 %).
A cet égard, le festival Garorock de Marmande en Lot-et-Garonne, créé en 1997 par
l’association MR Power, a acquis une vraie reconnaissance tant du public que des
artistes. Ce festival qui se déroule sur 3 jours en avril, a accueilli plus de 56 000
spectateurs pour sa 14ème édition en 2010. Il propose une programmation éclectique
(pas moins de 70 artistes dans différents styles et genres musicaux) jouant sur la
diversité, à la fois par la présence d’artistes confirmés et têtes d’affiche de dimension
nationale ou internationale et sur la promotion de nouveaux talents.
Ce festival est engagé dans une démarche de développement durable et d’écoresponsabilité (tri sélectif, gobelets renouvelables, transport collectif de festivaliers…).
Il a développé des coopérations avec plusieurs pays (Québec, Maroc avec le festival
L’Boulevard des jeunes musiciens de Casablanca…). Le budget de ce festival était
proche de 1,9 M€ en 2009 (autofinancé à 75 %).
Dans ce même département, on peut également signaler le petit festival After-Before,
organisé par l’association du même nom, gestionnaire à Fumel du Pavillon 108.
En Gironde, l’un des rendez-vous les plus fréquentés est le Reggae Sun Ska Festival
à Cissac-Médoc, organisé par l’association Music’Action. Ce festival qui se tient sur 2
jours au mois d’août existe depuis 1997 et a évolué sur plusieurs sites au gré de son
développement et des politiques foncières des collectivités (Montalivet, Cussac, Cissac).
En effet, par son organisation et son affluence (30 000 spectateurs), le Reggae Sun
Ska festival exige de disposer d’un espace approprié. Pour son édition 2010, il
occupera un site à Saint-Sauveur-de-Médoc mais de manière transitoire. L’association
organisatrice emploie 3 salariés (CDI à mi-temps) et une douzaine de techniciens.
A ceci, il faut ajouter l’implication de 400 bénévoles dont une trentaine originaires
d’autres pays européens (belges, suisses, espagnols, britanniques). Au fil des ans,
ce festival a acquis une position de référence dans le registre des musiques reggae
et assimilées (parmi les 5 premiers au niveau européen). La programmation associe
des artistes grand public et des artistes plus « pointus ». Les liens existant entre
l’association et la société de booking Music’Action Prod. facilitent la venue d’artistes
en exclusivité (ex : vétérans Jamaïcains). L’affluence générée par ce festival tient aussi
pour partie à la politique de communication retenue (dont techniques de « street
marketing »). Le budget total du Reggae Sun Ska est de 850 000 € (dont 10 % d’aides
publiques).
L’une des difficultés de ce type de manifestation, au moins au départ, reste dans certains
cas le manque de reconnaissance (sinon d’acceptation) par les collectivités locales,
alors que leur image est plutôt bonne aux plans régional, national et international.
Ceci a obligé l’association à un véritable travail de fond. L’un des principaux animateurs
du festival est depuis peu adjoint d’une municipalité, ce qui permet une meilleure
prise en compte par les élus et les autres associations locales des intérêts et enjeux de
ce festival.
Des liens de partenariats ont été établis avec la FEPPIA, présente sur le festival et associée
à un projet de compilation. Enfin, le Reggae Sun Ska est un festival référent en matière
de démarche éco-responsable. Un partenariat a été mis en place avec une association de
protection de l’environnement (Méduli Nature). Le travail réalisé187 a permis au festival
(187) Notamment un important travail
de sensibilisation en direction du public
à partir de diverses initiatives :
« éco-pack » (brochure, cendriers,
pochette de tri sélectif),
gobelets compostables, toilettes sèches,
communication par internet,
transports collectifs (partenariat
avec la société Citram,
le Conseil Général de la Gironde
et le Conseil Régional d’Aquitaine
pour le transport TER), hébergement
sur place afin de limiter les déplacements
des festivaliers (camping)…
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d’obtenir le « coup de cœur » de la Fondation Nicolas Hulot et d’être reconnu par
l’ADEME au niveau national. Un bilan carbone du festival devrait être réalisé pour la
première fois en 2010. Selon ses représentants, avec ses 30 000 spectateurs, le festival
Reggae Sun Ska a atteint aujourd’hui son rythme de croisière.
Pour l’avenir, l’association Music’Action travaille sur un projet d’aménagement d’un
lieu fixe qui permettrait de faire aboutir la démarche d’éco-responsabilité (limitation
du transport de matériel notamment) et de développement du mécénat afin de
compenser le tassement de certaines aides publiques188.
Dans l’agglomération bordelaise, le festival « Rendez-Vous des Terres Neuves » qui
se tient à Bègles et se déroule sur 2 jours en septembre189 offre une autre approche
de la dynamique que peut entretenir un festival. La création de cet événement en
2005 est l’héritage d’une opération conduite en 1997 par le groupe Noir Désir. Ce
festival est au carrefour de la démarche artistique et d’une démarche citoyenne ou
militante. Il s’inscrit dans une dynamique collective qui, des artistes aux techniciens,
s’appuie sur un pari, celui de l’implication bénévole des participants (80 % des artistes
interviennent gracieusement, l’organisation du festival reposant sur 3 salariés et de
nombreux bénévoles et partenaires, tous acteurs dans les musiques actuelles190). Cette
exigence de désintéressement fait aussi que les organisateurs du festival évitent
autant que possible le passage par des tourneurs pour faire appel aux artistes ou aux
groupes. Ceci explique aussi la faible part des dépenses purement artistiques dans le
budget de ce festival (15 000 € à 20 000 € sur un budget total de 120 000 €).
On est donc là fondamentalement sur une posture qui se démarque radicalement de
certains spectacles grand public qui n’ont pour d’autre vocation que de générer du
chiffre. Le choix artistique couvre l’ensemble des musiques actuelles et la politique
tarifaire vise à permettre la plus large accessibilité (14 € par soirée pour 5 à 6 spectacles).
La combinaison musique/citoyenneté se traduit par la présence d’un « village »
associatif, par l’organisation de rencontres-débats et d’ateliers. Progressivement, ce
festival tend à s’ouvrir à d’autres modes d’expression artistique, comme en témoigne
la programmation d’une soirée cinéma thématique à l’Utopia de Bordeaux, d’une
soirée spectacle vivant au Tout Nouveau Théâtre (TNT), d’expositions-rencontres dans
des bibliothèques de quartier, ou encore, durant la période estivale qui précède le
festival, le travail d’écriture sous forme d’ateliers ouverts à la population riveraine en
relation avec la Rock School Barbey. Ce festival participe également à la démarche
d’éco-responsabilité et de développement durable (restauration à partir de produits
locaux de saison, boissons « équitables », tri et recyclage des gobelets, toilettes sèches,
transport collectif en lien avec le réseau TBC de la Communauté Urbaine de Bordeaux).
A l’occasion de ce festival, des partenariats spécifiques ont été établis avec plusieurs
établissements scolaires du site (collège Pablo Néruda et lycée Emile Combes de
Bègles), avec certains prestataires de service, le groupe Noir Désir et la FEPPIA. Un
travail spécifique a également été entrepris en coopération avec des associations
d’handicapés (dont Centre d’Aide par le Travail) et de populations immigrées (foyer
Quancart).
Le « Rendez-Vous des Terres Neuves » accueille entre 1 500 et 2 000 personnes par
soirée et son édition 2010 (sur le thème de la « contre-culture ») devrait comporter
4 soirées de concerts. L’une des principales difficultés pour ce festival est de parvenir
à tenir les principes qui guident son organisation (engagement citoyen, schéma
économique et implication de ses partenaires) face au renchérissement des coûts
d’organisation191.
A Bordeaux, l’association Bordeaux Rock créée en 2004, d’abord pour célébrer
l’histoire de la scène rock bordelaise, organise chaque année le festival Bordeaux Rock
(188) Cf. audition
de M. Frédéric LACHAIZE,
directeur de Music’Action,
du 12 mars 2010.
(189) Mais les diverses animations
qui l’accompagnent se déroulent
sur une quinzaine de jours
entre mi-septembre et début octobre.
(190) Noir Désir, Rock School Barbey,
Krakatoa, RAMA…
(191) Cf. audition
de Mme Jeanette RUGGERI,
administratrice du groupe Noir Désir
et du festival Rendez-vous
des Terres Neuves, le 12 mars 2010.
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dédié aux groupes émergents (une douzaine en 2010), qui se tient en début d’année
dans plusieurs petits lieux de la ville. Cette activité de découverte s’exprime aussi
depuis 2007 à travers le festival Bordeaux Teenager Rock ouvert aux jeunes groupes
lycéens (une demi-douzaine sélectionnée chaque année) et qui offre à certains
d’entre eux la possibilité de jouer sur la scène parisienne de la Flèche d’Or.
L’association est aussi à l’origine d’un festival spécialisé sur les musiques électroniques
lancé en 2008 (Bordeaux électro, en relation avec la salle du 4Sans), confirmant le
dynamisme local de ce genre musical.
Dans la proche banlieue de l’agglomération bordelaise, à Eysines, se tient sur deux
jours le Festival « Eysines Goes Rock’n Soul » organisé par l’association Allez-les-Filles.
Tout près de là, à Blanquefort, le festival Culture Rock est organisé par l’ABC, fruit du
travail réalisé dans le cadre de la rock school et de la présence d’une trentaine de
groupes locaux. Ce festival, qui combine sur 3 jours concerts, rencontres-débats,
ateliers, tremplin junior, mobilise des dizaines de bénévoles et d’autres associations
locales. Enfin, à Cenon, le tout nouveau festival « Solid’Arts HipHop » exprime le
dynamisme de plusieurs associations de quartiers populaires de l’agglomération
bordelaise192, notamment d’associations de jeunes issus de l’immigration. Ce festival,
très centré sur la culture hip hop (slam, rap) est aussi une manifestation qui fait le pari
de l’échange interculturel et de la solidarité (partenariat avec l’Etablissement Français
du Sang). Il combine concerts (une douzaine de groupes ou artistes), ateliers, débats,
village associatif et mobilise un média local (O2Radio).
Deux autres festivals girondins ont su, dans la durée et non sans difficultés, imposer
leur marque dans le registre des manifestations à la fois artistiques et engagées. Le
festival Hestejada de los arts qui se tient courant août dans plusieurs villages du SudGironde et de Haute-Lande193 doit aussi beaucoup à l’implication et à la personnalité
du musicien Bernard Lubat. Il serait d’ailleurs réducteur de limiter cette manifestation
et le travail de la Compagnie « transartistique de divagation » Lubat Jazzcogne à la
simple organisation de cette manifestation, puisqu’elle développe une véritable
œuvre d’animation, de création, recherche, formation et d’éducation musicale au
cœur d’une zone rurale. Cette activité se concrétise à travers l’organisation tout au
long de l’année de concerts, performances, événements, stages ou master-classes,
de débats aussi tels ceux qui interrogent sur la place de la culture dans la société au
travers des conférences de « l’Université Uzestoise Perspicace, Perplexe et Prolifique
Culturellement ». Elle bénéficie d’un lieu permanent à Uzeste, récemment rénové
(« L’Estaminet »).
Sur ce même territoire du sud Gironde, le festival des Nuits Atypiques anime depuis
1995 les étés de la ville de Langon, à travers une manifestation qui combine
également démarche artistique, démarche citoyenne et ouverture au monde.
Organisé par l’association Nuits Atypiques, ce festival a connu des périodes fastes et
des périodes plus difficiles194. Ouvert sur les musiques du monde, les musiques
traditionnelles et promoteur de la diversité culturelle, ce festival combine concerts,
débats, projections de films, spectacle vivant. Cette association, membre du réseau
Zone Franche et du Forum Européen des Festivals de Musiques du monde (European
Forum of Worlwide Music Festivals), effectue un travail tout au long de l’année (débats,
concerts, interventions en milieu scolaire, coopération internationale). Elle anime un
lieu (L’Estanquet à Langon) et organise un festival d’automne consacré aux musiques
traditionnelles d’Aquitaine (Les Nuits d’Aquitaine). Elle gère un label phonographique,
Daqui, qui édite notamment des artistes produits lors du festival.
On peut également mentionner en Gironde le petit festival Musik à Pile qui se
déroule sur un week-end en juin à Saint-Denis-de-Pile, précédé de 2 jours d’animations
(192) Associations « Delprod »
de Floirac, « Qu’on pose » de Bassens,
« 2HPROD » d’Ambarès,
l’AJHAG (Hauts-de-Garonne),
« Oncatalyse »…
(193) Budget du festival :
près de 260 000 €
dont 26 % d’autofinancement
et 52 % d’aides publiques.
(194) Budget du festival
Nuits Atypiques :
307 000 €, autofinancé
à 31 %.
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gratuites chez l’habitant ou dans le village. Ce festival, organisé par l’association Art
Session, mobilise un budget de 170 000 € et développe également une démarche
de développement durable (impression des programmes sur papier recyclé avec label
« imprim’vert », tri des déchets, toilettes sèches, gobelets recyclables, alimentation bio
et de saison, travail en relation avec des handicapés…).
Enfin, le festival « Ouvre la Voix » se distingue par son caractère itinérant. Associant
musique (11 artistes ou groupes en 2009), sport (randonnée à vélo), patrimoine et
gastronomie, il se déroule sur un week-end en septembre le long d’une voie ferrée
reconvertie en piste cyclable au gré d’un itinéraire de 55 km entre Latresne (près de
Bordeaux) et Sauveterre-de-Guyenne. Engagé dans une démarche de manifestation
éco-responsable (« coup de cœur » de la Fondation Nicolas Hulot en 2010), il est
organisé par l’association Parallèles Attitudes Diffusion, par ailleurs gestionnaire de la
Rock School Barbey.
Plusieurs événements liés aux musiques actuelles rythment le territoire landais. Il s’agit
tout d’abord du festival Musicalarue organisé dans la petite commune de Luxey en
Haute-Lande (700 habitants) au cours du mois d’août. Ce festival est l’héritage
d’un besoin exprimé en 1968 par des jeunes du village de développer des activités.
Le travail entamé depuis cette époque en relation étroite avec les habitants (dont
l’organisation d’un défilé carnavalesque) a débouché en 1989 sur la création d’une
association et du festival. L’association Musicalarue compte aujourd’hui une centaine
d’adhérents actifs, emploie 3 salariés à temps plein et mobilise 450 bénévoles durant
le festival. Le projet artistique de ce festival associe concerts, chanson, théâtre de rue
répartis sur 13 sites dans le village.
Durant 3 jours mi-août, la programmation alterne artistes confirmés et découvertes
autour d’un projet à vocation pédagogique et intergénérationnelle (70 % de la population de Luxey a plus de 70 ans). Cet aspect est essentiel dans un souci de pérennité
du projet associatif qui associe étroitement la population locale, par exemple à travers
des ateliers musicaux pour enfants (6-12 ans, au tarif modique de 10 € la journée).
En 2009, le festival Musicalarue a attiré près de 32 000 spectateurs195. Son budget est
de 780 000 € (pour un budget total de l’association de 1,15 M€), dont 60 %
d’autofinancement. La pérennité de ce projet repose également sur un programme
d’activités à l’année, que ce soit en direction des jeunes publics (ateliers jeunes artistes
durant la vie scolaire) ou des adultes (les « Dimanches de Musicalarue », avec des
représentations d’artistes dans les salles des fêtes) et à domicile (opérations
« Musicalarue à domicile »). L’objet de ce type de projet est de favoriser les rapprochements entre artistes ou musiciens et habitants, en allant au plus près de ces derniers
et les amener à prendre le chemin des salles des fêtes ou des concerts. L’association a
également mis en place une opération permettant à des jeunes artistes de se produire
sur scène (« Sur un plateau ») et organise des résidences de création là encore en
favorisant les contacts entre les artistes et la population.
Le festival Musicalarue est donc, à l’image d’autres festivals déjà mentionnés, la partie
la plus visible d’un projet culturel plus large qui contribue à l’animation sociale et au
développement de territoires ruraux. Ceci explique aussi l’implication assez large des
collectivités (Communautés de Communes, Conseil Général des Landes, Conseil
Régional d’Aquitaine) sur ce projet. L’association Musicalarue est membre d’un
collectif des festivals de la chanson francophone avec une vingtaine d’autres festivals
et a été désignée comme pôle régional de ressources sur la chanson française. La
participation à ce réseau lui permet de promouvoir des artistes régionaux sur la scène
(195) L’accès au festival est gratuit
pour les habitants de Luxey
et pour les enfants de moins de 14 ans.
Un tarif dégressif est appliqué
(27 € pour une soirée,
40 € pour deux soirées
et 50 € pour tout le festival).
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parisienne des Trois Baudets. Elle est par ailleurs membre du RAMA et participe à un
collectif régional d’opérateurs culturels ruraux. Afin de pérenniser son projet, l’objectif
à plus long terme serait de disposer d’un lieu dédié, de développer les partenariats
privés ou le mécénat196, en respectant l’éthique et l’engagement du festival, et de
disposer en propre d’un parc de matériel scénique. Cette pérennité n’est pas
seulement un enjeu pour le festival en tant que tel et pour l’association qui le porte.
C’est aussi un enjeu pour l’économie locale, certains services et commerces tirant une
part non négligeable de leur volume d’affaires durant cette période du festival
(exemple du « cercle » du village). Enfin, ce festival participe à la démarche de développement durable et d’éco-responsabilité animée par le RAMA (toilettes sèches, tri
sélectif, prévention des feux de forêt, consignes des verres…). Elle développe aussi des
actions de prévention des risques durant le festival (dont participation à l’opération
du Conseil Général des Landes « Fête en Bus »).197
Toujours dans les Landes, on peut signaler le festival « Chantons sous les Pins »,
festival itinérant qui se tient durant le mois de mars. Ce festival particulier offre à de
jeunes artistes (une trentaine d’auteurs, compositeurs ou interprètes en 2010) l’occasion
de se produire dans 16 communes réparties sur le territoire départemental.
L’association déploie tout un ensemble d’activités en parallèle du festival, notamment
en direction des jeunes publics (action « Fréquence maxi-mômes », ateliers d’écriture
« Les mots qui chantent », la « Clé des chants », « Les mômes piaffent », « Bonjour l’artiste »,
« Ecris-moi une chanson »…) ou en faveur de publics spécifiques (« Chantons pour les
gens », concert acoustique à la Maison d’arrêt, « Au plus près des gens » en lien avec
EDF, « Chantons au milieu des mots » dans les médiathèques…).
Un autre événement estival consacré aux musiques actuelles et aux arts vivants est le
festival Océaniques, qui se tient sur deux jours en juillet à Tarnos. Ce festival est
organisé par l’association La Loco-motive et accueille environ 6 000 festivaliers198.
Equivalent en termes de fréquentation, on peut signaler également le petit festival
Atout Chœurs organisé à Benquet par un collectif d’associations et Benquet
Animation au mois de mai.
Autre particularité de ce territoire landais, le Festival Arte Flamenco de Mont-deMarsan, co-organisé par la municipalité et le Conseil Général des Landes durant 5 jours
début juillet, est axé sur la culture andalouse au sens large. Ce festival pluri-culturel
est une autre facette de l’offre de manifestations intéressant, au moins partiellement,
les musiques actuelles en Aquitaine. Il participe avec d’autres manifestations de
spectacle vivant à la démarche d’éco-responsabilité des festivals développée dans la
région. Dans un même esprit, on peut citer le festival Toros y Salsa de Dax.
En Dordogne, quelques festivals témoignent de la diversité des initiatives dans ce
domaine. A Ribérac, le festival Le Grand Souk, organisé par le Centre Culturel, en
apporte une illustration. Créé en 2007, il accueille 25 groupes sur 2 à 3 jours en juillet.
Participant à la démarche des « éco-festivals » (réduction sur les transports en TER et
incitation au co-voiturage, collecte et tri des déchets, gobelets consignés et recyclables…), il se caractérise aussi par sa démarche de valorisation du bénévolat. La programmation diversifiée s’appuie sur un partenariat avec plusieurs acteurs (dont les
sociétés 3C et Music’Action)199.
Le festival Overlook organisé en novembre à Bergerac par l’association du même nom,
par ailleurs gestionnaire de la SMAc du Rocksane en offre un autre exemple. L’un des
derniers nés est le festival reggae 1.Truzion Traine, qui a vu le jour en 2009, organisé
par une association début juin à Saint-Paul-de-Lizonne. Plus ancien et plus classique,
(196) Le festival bénéficie
déjà du soutien d’une entreprise locale,
la société Biolandes.
(197) Cf. audition de M. GARRAIN,
Président de l’association Musicalarue,
le 24 mars 2010.
(198) Budget : 215 000 €
dont plus de 80 % d’autofinancement.
(199) Budget :
environ 320 000 €.
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le festival Musique Nouvelle-Orléans de Périgueux anime la cité périgourdine
durant une semaine en août depuis une dizaine d’années. L’association organisatrice
propose aussi durant cette période plusieurs animations (ateliers pour les enfants des
centres de loisirs, musique dans les quartiers de la ville, cinés-concerts…). Dans le
même registre, l’association Jazz Pourpre dans le Bergeracois propose des concerts
en hiver et organise un festival du même nom durant 3 à 4 jours courant mai, qui
associe des artistes confirmés et depuis peu une scène de jeunes musiciens de jazz.
Dans les Pyrénées-Atlantiques, on relève plusieurs festivals de dimension régionale
consacrés au jazz et au jazz improvisé. Parmi ceux-ci, le festival de Jazz d’Oloron
(« Des Rives et des Notes ») créé en 1981, accueille durant toute une semaine une
dizaine de concerts et comprend également un tremplin ouvert à des musiciens ou
groupes amateurs. L’association « Jazz à Oloron » organise également des concerts
durant l’année. Elle est membre de l’Association des Festivals Innovants en Jazz et
Musiques Actuelles (AFIJMA)200 et d’un réseau de festivals béarnais, « Musicaban ! »
créé en 2008.201
Les musiques improvisées et le dialogue interculturel sont aussi au cœur du petit festival
Errobiko Festibala qui se tient chaque année depuis 1997 dans le village basque
d’Itxassou, durant 3 à 4 jours vers la mi-juillet. Ce festival associe concerts, stages,
conférences et expositions autour de diverses thématiques (le chant depuis 2008).
Dans un autre style, le festival des Transhumances Musicales de Laas, qui se tient sur
4 jours courant mai, organisé par l’association Pyrène Océan s’efforce de promouvoir
la culture des chants polyphoniques. Sa programmation comporte plus d’une vingtaine
de spectacles et 500 artistes. Il accueille plus de 7 000 spectateurs.
Consacré aux musiques traditionnelles, le festival Hestiv’Oc, festival des musiques
et cultures de l’Occitanie et du Sud, se déroule en août dans la ville de Pau durant
4 à 5 jours. Organisé par l’association Accents du Sud, il a accueilli en 2008 environ
60 000 spectateurs.
On retrouve cette revendication d’identité culturelle et d’ancrage territorial dans la
démarche qui a présidé à la création du festival Euskal Herria Zuzenean (EHZ), il y a
une quinzaine d’années. Cette revendication est ici portée par la jeunesse du pays
basque à partir de la mouvance du rock basque. L’association organisatrice (EHZ)
mobilise pour son organisation une cinquantaine de personnes durant l’année,
œuvrant dans diverses commissions de travail (programmation, restauration, sécurité,
circulation…) mais environ un millier de bénévoles lors du festival. Celui-ci se tient sur
3 jours début juillet dans le village d’Hélette. La programmation évolue chaque année
et combine différents genres musicaux, associant artistes ou groupes renommés et
groupes locaux ou régionaux, soit au total une cinquantaine de concerts sur la durée
du festival. Le festival accueille plus de 12 000 spectateurs et génère environ
130 000 € de retombées économiques sur le territoire202. Ce festival s’inscrit également dans la démarche d’éco-responsabilité et de développement durable (consigne
des verres, toilettes sèches, approvisionnement en produits locaux et biologiques,
politique tarifaire, travail avec certains prestataires…). L’association emploie deux
salariées et développe d’autres événements durant l’année, dont l’organisation
depuis 2008 d’une soirée consacrée aux musiques électroniques (« Elektrotasuna »,
1 500 spectateurs pour la soirée organisée en avril 2009) et d’un tremplin (EhrZ203)
dont la finale est programmée sur la scène de l’Atabal à Biarritz. L’une des inquiétudes
exprimées par les organisateurs de ce festival est, dans un contexte de surenchère sur
les coûts, la concurrence exercée par la multiplication de l’offre événementielle
durant la période estivale, notamment sur le littoral, sous forme de concerts gratuits
(200) L’AFIJMA rassemble
une trentaine de festivals
au plan national.
(201) « Musicaban ! » regroupe
les festivals Des Rives et des Notes
d’Oloron, Jazz naturel d’Orthez,
Les Transhumances musicales de Laas,
et Hestiv’Oc de Pau.
(202) Budget :
plus de 400 000 €
dont 60 % d’autofinancement
hors partenariats privés.
(203) La 3ème édition de ce tremplin
qui s’est tenu en 2010 a enregistré
la candidature d’une soixantaine
de groupes.
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organisés par des sociétés privées. A ceci s’ajoute depuis peu l’arrivée de nouveaux
organisateurs de festivals en été.
Depuis 2008, l’association Emmaüs de Pau organise son festival sur le site de Lescar
durant 2 jours fin juillet. Il propose une dizaine de concerts d’artistes ou groupes
de renom et une dizaine de groupes locaux sous forme de tremplin. Ce festival
s’accompagne de conférences-débat autour d’un thème de société.
A vocation beaucoup plus commerciale, le Biarritz International Groove festival
lancé en 2009 sur 3 à 4 jours vers la mi-juillet s’est fixé pour objectif d’accueillir
15 000 à 20 000 spectateurs dès sa première édition (7 000 enregistrés). Ce festival
dont la production exécutive est assurée en 2010 par le plus gros tourneur international, Live Nation, offre essentiellement une affiche d’une trentaine de groupes ou
artistes à forte notoriété. Plusieurs salles et lieux de la ville participent à cet événement
(l’Atabal, la nouvelle Halle d’Iraty, des clubs…). Les tarifs pratiqués sont ici plus élevés
que ceux proposés par la plupart des autres festivals de la région, affiche oblige
(40 € à 45 € par soir, pass de 30 € à 120 € selon les lieux).
Loin d’être exhaustif, cet état des lieux et des festivals de musiques actuelles exprime
assez clairement la diversité des initiatives et des démarches liées à la diffusion des
musiques actuelles en région. Qu’il s’agisse des lieux ou des manifestations, l’alternative
oppose d’une part le militantisme et la démarche d’appropriation par les acteurs et le
territoire, et d’autre part la culture-business, celle du « mainstream », par la commercialisation de produits de divertissement ou la rentabilisation d’espaces. Sans négliger
l’impact et la force de pénétration des grandes industries culturelles auprès des publics,
on ne peut que constater la faiblesse de leur proposition en termes de développement, y
compris d’un strict point de vue économique, par rapport à l’offre d’accompagnement,
au travail de repérage créatif, d’éducation artistique et de mobilisation collective
proposés par nombre d’acteurs souvent associatifs (mais pas exclusivement).
La tendance actuelle, accentuée par la crise du disque, est celle d’une concurrence
de plus en plus exacerbée pour la maîtrise de la diffusion des groupes ou artistes les
plus vendeurs ou à fort potentiel. Dans cette course, la quasi-totalité des acteurs
indépendants en région sont distancés ou placés hors jeu, même si certains des artistes
ou groupes concernés leur doivent parfois leur début dans un parcours professionnel.
L’attitude de ces derniers n’est pas neutre et sûrement faudrait-il travailler plus
systématiquement et largement ce lien entre artistes/groupes en devenir et structures
d’appui. Le constat est néanmoins réel d’une quasi-absence de retour au regard de
l’investissement réalisé en amont par les acteurs associatifs et autres « développeurs
d’artistes » et les retombées économiques dont ont su profiter les grandes maisons de
disque ou industries culturelles en aval. Il serait cependant bien réducteur d’analyser
ce travail de valorisation et de diffusion uniquement à l’aune des chiffres de vente ou
de fréquentation générés ou de la notoriété avérée de tel ou tel artiste/groupe. Il y a
toute une part de ce travail qui reste non monnayable et hors du raisonnement
marchand, qui permet à la fois à la création de s’opérer, aux groupes et artistes de se
produire, aux publics de se retrouver autour de sensibilités esthétiques, d’émotions et
de valeurs communes, et pour une part de prolonger ce travail créatif.
Plusieurs points méritent d’être ici mis en exergue de cette analyse :
- La diversité des lieux de diffusion et l’importance du travail accompli par des
acteurs dont le rôle ou l’activité ne saurait se limiter à une seule approche en termes
de pure diffusion.
Les salles de musiques actuelles labellisées correspondent bien évidemment à cette
description. Bien que dépendantes du soutien apporté par les collectivités, leurs
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contraintes de gestion les amènent à combiner valeurs sûres et prise de risque, à
concilier démarche militante et stratégie commerciale. Pour ces lieux, l’enjeu est
d’inscrire leur action et leurs missions d’intérêt public dans la durée. Or, la nature
des relations qui les lient aux collectivités locales, pour le compte desquelles elles
interviennent souvent en gestionnaires d’équipements, n’est pas toujours très
assurée.
L’établissement de conventions pluriannuelles sur la base d’objectifs co-construits
entre acteurs publics et acteurs associatifs (en matière d’apprentissage, d’accompagnement, de découverte et diffusion de groupes, ou encore d’accueil de résidences
par exemple) pourrait en partie répondre à cette interrogation. D’autres salles privées,
souvent gérées par des associations, réalisent un travail essentiel mais souvent dans
une plus ou moins grande précarité de moyens. Là encore, le rôle des collectivités
peut s’avérer déterminant en favorisant ou non les conditions d’exercice de ces
activités (dont mise à disposition de locaux, médiation avec les riverains…).
Parmi ces lieux de diffusion, la problématique particulière des bars-concerts (ou
cafés-culture) mérite attention. Encore rarement considérés dans les politiques
publiques relevant des musiques actuelles, ces établissements ont souvent à faire
face à des contraintes particulières d’exercice de leur activité qui ajoutent à leur
précarité économique. A ce niveau, il conviendrait d’étendre en Aquitaine l’application de la plate-forme nationale des cafés-culture en lien avec les autorités de tutelle
(Ministère de l’Intérieur) concernant les interprétations dans l’attribution des
licences d’entrepreneur de spectacle et leur incidence sur le classement des établissements concernés, notamment à un moment où ce régime de licence est appelé à
subir des adaptations suite à la transposition de la directive européenne sur les services. Dans le même esprit, il serait utile de mettre en place au niveau local (notamment dans les sites urbains) des instances de concertation ou de médiation relatives
à l’application de la réglementation sur les nuisances sonores, associant entre autre,
représentants de ces lieux de diffusion et collectivités locales, à l’image du travail
réalisé à Nantes204. Par ailleurs, une autre préoccupation porte sur les modalités de
rémunération ou non des artistes amateurs ou professionnels se produisant dans ces
établissements. La négociation en cours entre l’Etat, les partenaires sociaux (dont le
SNAM-CGT) et le collectif Culture Bar-Bars devrait permettre de déboucher sur un
prochain accord et clarifier la situation. Par ailleurs, face aux exigences de mise
aux normes, il apparaît enfin opportun d’étudier les possibilités de financement
mobilisables par ce type d’opérateurs (FISAC, CNV, autres aides territorialisées).
Sur cet ensemble de questions, l’intérêt d’une extension du collectif Culture Bar-Bars
en Aquitaine apparaît avec évidence, compte-tenu du nombre d’établissements
potentiellement concernés et des problématiques communes rencontrées. Cette
extension pourrait s’appuyer sur une action conjointe du RAMA et de l’UMIHRA
en termes d’information et d’organisation de sessions de sensibilisation.
- Un autre aspect qui mérite d’être mis en évidence et sur lequel il convient d’insister
est l’importance du rôle joué par cet ensemble de lieux (SMAc, petites salles indépendantes, cafés-concerts et festivals) pour la valorisation de la création artistique
émergente régionale en musiques actuelles, quel que soit le statut ou le niveau
de reconnaissance acquis. Ce rôle doit être plus largement reconnu et constitue un
élément fondamental de promotion de la diversité des expressions culturelles en
région. La passion exprimée, le plaisir de faire partager leurs découvertes et
l’engagement sont autant de caractéristiques communes à la plupart des acteurs
rencontrés et de la démarche qui les animent, bien avant les considérations
(204) Où une commission municipale
des débits de boisson
a été mise en place.
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économiques même si celles-ci ne sont jamais totalement absentes. Ce rôle doit être
l’un des critères essentiels de mobilisation des aides publiques en faveur des lieux
(ou des événements).
- A cet égard, on ne saurait trop souligner les interrogations persistantes de la plupart
des opérateurs indépendants dans le contexte de renchérissement des coûts
artistiques et techniques liés à l’organisation de concerts ou de spectacles. Cette
tendance porte essentiellement sur la diffusion d’artistes ayant acquis une certaine
notoriété. Il paraît de plus en plus difficile pour les lieux de diffusion de suivre la
surenchère parfois exagérée de ces coûts et tout autant problématique d’avoir à les
faire supporter par la puissance publique. A ce niveau, il pourrait être envisagé
autant que possible de favoriser des opérations ne se limitant pas à la diffusion
de certains groupes ou artistes mais intégrant ou bien l’accompagnement de
résidences ou l’organisation de master-classes, de telle sorte que l’aide apportée à la
diffusion puisse être assortie de contreparties bénéficiant à des groupes ou artistes
locaux. Bien que difficile à généraliser, ce principe pourrait être étendu.
- Par ailleurs, les expériences et initiatives mentionnées témoignent de l’ancrage social
et territorial de ces projets, tant du point de vue des structures concernées que de
l’impact de leurs activités. Au-delà des engagements personnels de leurs initiateurs,
ce sont dans la plupart des cas des démarches qui reposent sur la dynamique
collective qu’elles ont pu ou su impulser. L’importance du bénévolat dans un grand
nombre d’expériences (lieux ou festivals) en constitue l’un des témoignages les plus
manifestes. Ce lien au territoire (et la manière dont les pratiques et activités liées aux
musiques actuelles contribuent à l’animation et à l’attractivité des espaces aquitains)
est une donnée capitale, à laquelle est plus largement consacré le troisième chapitre de
ce rapport. Dans cette approche, on ne peut négliger ni la demande ni l’importance
de lieux adaptés (de répétition et de diffusion) aux pratiques intéressant les musiques
actuelles. Cette demande, qui concerne surtout des lieux de moyenne capacité
(150 à 400 places) pourrait être considérée dans les politiques d’aménagement et
de développement territorial, moyennant la définition d’un véritable projet culturel
intégrant multiples dimensions (apprentissage, accompagnement, diffusion, développement durable) et en cohérence avec les pôles de ressources dans les différents
départements.
- De façon plus transversale, les différentes structures gestionnaires de lieux ou organisatrices de spectacle, parmi lesquelles une grande part d’associations, se trouvent
confrontées à un environnement économique, réglementaire et social (en référence à la diversification des publics et à l’évolution des comportements) de plus en
plus complexe. Quels que soient leur statut et leur projet, elles doivent assumer des
responsabilités diverses (pérennité économique, emploi, développement durable…)
qui appellent la mobilisation de compétences accrues. Les besoins de qualification
(salariés et responsables bénévoles), de recours à des compétences spécifiques et de
structuration sont potentiellement importants. Dans ce contexte, et compte-tenu
de la taille de ces structures, il serait nécessaire de prévoir des dispositifs d’accompagnement adaptés (gestion de projet, organisation, techniques de marketing,
gestion des emplois et des compétences, questions juridiques) leur permettant de
remplir au mieux leur rôle d’interface entre l’artiste et les publics. Cela peut passer
par la structuration (par exemple via des formules telles que celles de la coopérative
d’activités et d’emplois ou de société coopérative d’intérêt collectif), la mutualisation
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d’emplois ou de moyens, la formation (sous forme de séminaires ou journées
thématiques).
- Enfin, qu’il s’agisse des lieux de diffusion ou de l’organisation de manifestations de
spectacle vivant, le lien au public passe de plus en plus par l’usage des technologies
et services numériques. La plupart des acteurs concernés ont entamé un travail en
ce sens (sites internet, liens avec des réseaux sociaux et gestion de communautés
virtuelles).
La mobilisation de ces outils de communication ne peut être déconnectée de l’analyse
du schéma économique du secteur, de la façon d’entretenir des échanges (marchands
et non marchands) avec les publics et des pistes de consolidation financière de
l’ensemble des activités-supports de la diffusion des musiques actuelles en région. Il
y a là un champ d’opportunités qui reste à explorer pour les opérateurs concernés.
La mise en évidence de ces différents points confère un relief et un intérêt particuliers
à la demande assez largement exprimée et réitérée lors des Biennales Internationales
du Spectacle de Nantes en janvier 2010, concernant la mise en place de Schémas
d’Orientation et de développement de Lieux de Musiques Actuelles (SOLIMA). Dans ce
contexte, la définition d’un schéma régional élaboré en étroite concertation avec les
acteurs de terrain (dont RAMA) et les autres collectivités territoriales concernées en
Aquitaine (Conseils Généraux, grandes villes…) constituerait une réelle avancée.
Tant du point de vue des démarches artistiques que des initiatives liées à leur valorisation
en direction des publics, le secteur des musiques actuelles se caractérise donc à la fois
par une grande diversité, par sa créativité ou son inventivité, par une assez grande capacité
à s’adapter et à expérimenter de nouveaux systèmes d’action et d’organisation, tantôt
en marge tantôt bénéficiant d’une certaine reconnaissance institutionnelle. Il offre un
terrain d’innovations sociales et économiques toujours en chantier qui devrait inciter les
acteurs publics à introduire une plus grande marge de souplesse dans leurs dispositifs
d’intervention, adossée à des objectifs clairs et à de nouvelles formes de contractualisation.
Il constitue aussi, de manière peut-être plus inattendue, un espace d’innovations
technologiques et d’appropriation de nouveaux usages, en particulier celles et ceux nés
de l’utilisation des technologies numériques.
3.2.5 Les musiques actuelles,
terrain d’innovations et de nouvelles pratiques artistiques
Les musiques actuelles sont dans leur très grande diversité nées avec le 20ème siècle, filles
de l’électricité et des nouveaux médias audiovisuels (la radio). Le développement de
leurs pratiques s’est toujours accompagné d’innovations, qu’il s’agisse des instruments
(ex : la guitare électrique dans les années 1930 et aujourd’hui des instruments numériques), des techniques d’amplification du son, des supports d’enregistrement (du
disque vinyle au CD puis aux supports numériques avec de nouvelles techniques de
compression du son comme MP3205 ou FLAC206) ou encore des supports d’écoute (du
gramophone au lecteur de disques vinyles, puis au lecteur de disque CD et aujourd’hui
aux lecteurs numériques, ordinateurs, baladeurs et téléphones portables).
Depuis une quinzaine d’années, l’essor des technologies numériques et de leurs usages
transforme en profondeur l’ensemble de la chaîne des musiques actuelles. Au niveau de
la création artistique tout d’abord, elles ont contribué à l’apparition de nouveaux styles
musicaux, dans le prolongement des musiques électroniques. C’est à partir de laboratoires de recherche et de laboratoires d’enregistrement de certaines radios que sont
apparues les premières musiques électroniques et électro-acoustiques dans les années
(205) Le format de compression audio
MP3 est l’abréviation de MPEG-1/2
Audio Layer 3 du Moving Picture Experts
Group. Il fut développé en Europe
dans le cadre d’un projet financé
par l’Union Européenne (Digital Audio
Broadcasting) au titre du programme
Eureka entre 1987 et 1994.
(206) FLAC pour Free Lossless Audio
Codec, codec libre de compression audio
sans perte de qualité sonore.
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1950207, influant tout d’abord sur la création dans les musiques dites « savantes » avant
de se diffuser dans les musiques populaires. Dans les années 1960, les premiers synthétiseurs ont fait leur apparition. L’une des premières utilisations en fut faite dans la
musique rock par Georges Harrison en 1969208. Plusieurs groupes de rock célèbres utiliseront ces synthétiseurs dans leurs compositions (Silver Apples, Pink Floyd). Ces technologies vont peu à peu donner naissance à de nouveaux courants musicaux sous
l’impulsion de plusieurs groupes (Kraftwerk créateur du rock dit « électronique », mais
aussi Tangerine Dreams qui introduit un style de musique « planante » auquel contribueront Klaus Shulze, Vangelis et Jean-Michel Jarre).
Les synthétiseurs numériques sont arrivés à la fin des années 1970, inspirant de nombreux groupes (Human League, Eurythmics, Art of Noise, Dépêche Mode…) et contribueront à l’émergence d’un genre de musique dite industrielle. Associées aux innovations
de la musique concrète et acousmatique209, ces technologies vont influencer un grand
nombre de courants musicaux au cours des années 1980 et 1990 (house, techno,
électro, acid-house, trance, trip-hop, ambient, jungle…).
Aujourd’hui, les technologies numériques participent pleinement à la création musicale
contemporaine et alimentent tout un courant d’autoproduction.
Parmi les dernières applications de ces technologies, on peut par exemple mentionner
les activités de création développées par la société parisienne Puce-Muse, autour de la
musique vivante visuelle et virtuelle. Depuis une vingtaine d’années, cette société met
au point des spectacles qui combinent musique, nouvelles technologies et images. Elle
a mis au point des outils spécifiques (le « méta-instrument » ou la « méta-mallette »),
à partir de systèmes de synthèse et de traitement audio et d’interfaces gestuelles. La
« méta-mallette » est un dispositif permettant de composer ou jouer de la musique et de
générer des images assistées par ordinateur en temps réel et à plusieurs. Puce-Muse a
acquis une réputation internationale et produit 30 à 40 spectacles par an. Ces technologies
ouvrent à de nouvelles pratiques qui traversent les champs de la création du spectacle
vivant (musique, vidéo, danse, théâtre…). Dans un domaine plus large, on peut également
signaler les développements d’un groupe tel que SmartSystem (« La Fabrique du Futur »),
entreprise atypique et collaborative qui se revendique dans le champ de « l’économie
créative » (cf 4.3).
L’autre grande révolution du numérique concerne les modes de diffusion des œuvres
musicales et la manière dont ces technologies et leurs usages transforment les comportements d’écoute (cf. 2.1.1) mais aussi d’achat (cf.3.2.3). A ce propos, si l’influence des
avancées technologiques sur les pratiques est incontestable, la question des modalités
d’appropriation ou de maîtrise de leurs usages par les opérateurs indépendants et les
publics en région reste ouverte. Cette question est loin d’être neutre si l’on considère
la nécessité de maintenir en amont une diversité de l’offre, de trouver des schémas
économiques susceptibles de rémunérer correctement les ayant-droits, et en aval
d’assurer une meilleure diffusion et accessibilité de cette offre auprès d’un public le plus
large possible. De ce point de vue, l’expérience de certains artistes internationaux est
assez édifiante (cf. « l’écosystème 2.0 de Lady Gaga)210.
(207) Ainsi l’œuvre de Karlheinz
Stockhausen Gesang der Jünglinge im
Feuerofen (Dritte Elektronische Studie).
(208) Dans l’album des Beatles intitulé
Abbey Road.
(209) Sous-genres des musiques
électroniques savantes,
avec des compositeurs tels Pierre Henry,
Olivier Messiaen, Pierre Boulez,
Pierre Schaeffer en France.
Par conséquent, l’innovation technologique, aujourd’hui largement liée à la société
numérique, et les conditions de son appropriation par les artistes, par les activitéssupports et par les publics sont aussi au centre des enjeux portés par les musiques
actuelles en région.
(210) http://www.aecom.org/
Vous-informer/Veille/Signauxnumeriques/webmarketing-lady-gaga
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En Aquitaine, plusieurs expériences et travaux de recherche alimentent l’innovation
dans le domaine des musiques actuelles.
L’université de Bordeaux 1 est ici la plus directement concernée, en particulier à travers
les activités du Laboratoire Bordelais de Recherche en Informatique (LaBRI), qui
coordonne par exemple un projet européen (ALICANTE) relatif aux réseaux médias
pour l’internet du futur, afin de rendre les contenus plus accessibles aux utilisateurs
et de permettre à ces derniers de devenir parallèlement fournisseurs de services. L’un
des axes de travail de ce laboratoire porte sur l’image et le son (une soixantaine de
chercheurs), dont la modélisation du son et de la musique ou plus précisément sur
la modélisation de diverses formes d’interactions avec des partitions de musique
interactive.
Ces travaux ont trouvé des applications dans le domaine de la création musicale à travers le Studio de Création et de Recherche en Informatique et Musique Électroacoustique
(SCRIME). Cette équipe rassemble des scientifiques et des musiciens. Elle associe le Labri,
l’Ecole Nationale Supérieure d’Électronique, d’Informatique et Radiocommunication
de Bordeaux (ENSEIRB) et le Conservatoire de Rayonnement Régional de Bordeaux.
Le thème central des travaux du SCRIME est la modélisation du son et de la musique en
vue du développement en temps différé et en temps réel de l´analyse, des traitements
et de la synthèse sonore et musicale. La recherche fondamentale est effectuée par des
chercheurs de l´équipe image et son du LaBRI. Le SCRIME travaille actuellement sur
plusieurs projets de recherche :
- Simbals (sur les similarités musicales, les méthodes de classification, d’indexation et
de recherche pour les signaux musicaux audio),
- 2PIM, plateforme de programmation interactive multimodale, utilisant le méta-instrument
élaboré par la société Puce-Muse,
- Virage, projet qui porte sur les interfaces de contrôle et d’écriture à destination des
professionnels de la création artistique et des industries culturelles,
- Gsharp, éditeur interactif de partitions musicales,
- Acousmoscribe, logiciel libre destiné à la notation et à la composition de la musique
électroacoustique,
- Interaction 3D, qui vise à utiliser la réalité virtuelle et l’interaction 3D pour construire
des interfaces utilisables en performance musicale en offrant des possibilités de
visualisation, de contrôle et d’immersion,
- Musique opportuniste, programme basé sur l’utilisation des objets de l’environnement
pour le contrôle et l’expression musicale, favorisant les interfaces entre le milieu
physique et l’instrument,
- Percussion aérienne, interface de contrôle tridimensionnelle et configurable, destinée
à capter les gestes d’un percussionniste.
Ces différents projets sont conduits avec de multiples partenaires du monde de la
recherche ou de l’entreprise (dont Puce-Muse). Ils alimentent une activité de création
musicale (une quarantaine de créations entre 2000 et 2009).
Une partie des travaux réalisés par ces équipes ont trouvé leur application en
Aquitaine et généré la création d’activités. L’un des exemples les plus remarquables
est celui de la société Stantum-Jazz Mutant. Les créateurs de cette société basée à
Bordeaux211 ont mis au point une interface multi-touches de contrôle d’instruments
(synthétiseurs, tables de mixage, applications multimédias dont V-jing), le LEMUR.
Développé entre 2001 et 2003, ce nouvel interface fut pour la première fois présenté
à l’Ircam en 2004 et commercialisé par la société Jazz Mutant (fondée en 2002) à
partir de l’année 2005.
(211) Guillaume LARGILLIER,
Pascal JOGUET, Julien OLIVIER.
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De nombreux artistes, musiciens, DJ’s dans le monde ont adopté cette technologie
(ex : Damian Taylor pour une tournée de l’artiste islandaise Björk). Depuis 2007, Jazz
Mutant est le département musiques-médias de la société Stantum créée en 2007,
afin de répondre aux perspectives de nouveaux marchés liées aux technologies
multi-touches. Le succès rencontré par ces innovations a conduit Stantum à ouvrir des
antennes à Paris, aux Etats-Unis (Berkeley) et au Japon (Tokyo). Elle a signé des
accords de partenariats avec d’autres sociétés spécialisées (ex : Gunze-USA).
Un autre exemple proche est celui de la société Blue Yéti basée à Royan. Cette jeune
société développe des dispositifs interactifs innovants à vocation artistique, culturelle
ou éducative. Elle a mis au point plusieurs produits212, dont une table interactive et
une mallette pédagogique destinées aux enfants et aux adolescents, leur permettant
une découverte sonore de l’image ou visuelle du son. Blue Yéti a travaillé sur des
spectacles rock multimédia (avec le groupe rock indépendant et expérimental marseillais Phosphène) et offre des dispositifs permettant de composer ou d’interpréter
des pièces musicales en temps réel (Demus, Etheraction). Blue Yéti participe à certains
travaux de recherche du SCRIME (projet Virage).
En matière de valorisation et de diffusion des musiques actuelles par l’ensemble des
activités support, on a déjà mentionné certaines initiatives d’opérateurs régionaux (ex :
Musique Libre !, Médias-Cité… cf. 3.2.3). De même, l’approche particulière de la filière
du disque et celle du spectacle vivant dans cette chaîne de valorisation des musiques
actuelles a mis en évidence, pour l’ensemble des acteurs concernés, les enjeux d’une
meilleure appropriation des outils et des usages liés aux technologies et services
numériques (cf. 3.2.4). Pour les opérateurs, l’une des difficultés vient de la rapidité
avec laquelle ces innovations technologiques ont pénétré leur activité. Il a fallu 38 ans
pour que la radio atteigne le seuil de 50 millions d’utilisateurs et 13 ans pour la télévision. Il n’a fallu que 4 ans pour internet et seulement 2 ans pour l’i-phone. En matière
d’usages, l’évolution est particulièrement perceptible parmi les jeunes générations,
qui composent aussi le plus large public, auditeur, spectateur ou adepte des musiques
actuelles.
Par ailleurs, la convergence croissante des technologies amène peu à peu vers une
convergence croissante des pratiques artistiques (à la fois la musique et l’image,
bientôt l’image en 3D…).
Cette évolution n’est pas non plus sans incidence sur l’approche des pratiques
culturelles ou artistiques et sur la conception de la politique culturelle « à la française »,
à savoir un domaine qui serait affaire de spécialistes et dans lequel la pratique culturelle
du citoyen « ordinaire » (ce « public » ou ce « consommateur ») qui ne s’inscrirait pas
dans la définition officielle de l’art ou de la culture serait ignorée. Elle offre donc aussi
un espace d’expérimentations en termes de démocratie culturelle (qui s’exprime au
nom de la culture ?), plus en conformité avec l’esprit de la Déclaration Universelle sur
la diversité culturelle adoptée par l’UNESCO en novembre 2001.213
Autant dire que les innovations technologiques qui leur sont associées offrent parallèlement un terrain d’expérimentation, d’innovation artistique, sociale et économique
encore largement inexploré. Plusieurs lieux dédiés aux musiques actuelles développent déjà des activités en ce sens (formation et accompagnement à la Musique
Assistée par Ordinateur, espaces multimédia) et certains commencent à développer
des coopérations avec les équipes de recherche (SCRIME) ou avec des structures
d’accompagnement (Médias-Cité). Certains lieux d’apprentissage aux musiques
actuelles envisagent également de développer leur offre dans ce domaine (ex : IREM).
(212) BYHand, Virtual Stage,
Livre d’or interactif, Virtual Tag…
(213) Cf. à ce sujet l’article
« La critique des politiques culturelles
à l’aune de la diversité culturelle » Doc Kasimir Bisou (Jean-Michel LUCAS),
janvier 2006.
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Au vu de cet éclairage complémentaire sur la réalité des pratiques liées aux musiques
actuelles en région, il importe de tirer trois conclusions essentielles :
- L’intérêt de favoriser les activités de recherche-développement relatives aux applications des nouvelles technologies et à l’innovation technologique intéressant les
musiques actuelles et le spectacle vivant en Aquitaine, en s’appuyant notamment
sur les équipes existantes et en y associant des entreprises innovantes du secteur
ou des utilisateurs potentiellement intéressés (gestionnaires de structures d’accompagnement, de lieux de diffusion, collectifs d’artistes, producteurs et éditeurs
phonographiques…). L’intérêt à ce niveau est d’une part de stimuler les activités
de recherche et de transfert de technologies et d’autre part de favoriser leur appropriation par des opérateurs (ou artistes) en région et hors région. Trois axes semblent
à ce niveau pertinents : la création musicale et plus largement artistique (interfaces
musique/image et vidéo/spectacle vivant) d’une part, le développement d’interfaces entre artistes ou structures-supports et publics (les communautés virtuelles)
d’autre part, enfin l’application aux musiques actuelles des technologies « transfictionnelles » et de réalité augmentée (du 2.0 au 3.0).
- Un autre axe d’innovation non moins important tient aux effets de ces évolutions
à la fois sur les modèles économiques dans ce secteur d’activités liées aux musiques
actuelles et sur les pratiques sociales (ex : les communautés virtuelles, les relations
entre artistes ou musiciens et leur public, les modes d’écoute musicale…). L’analyse
de ces effets et l’expérimentation de solutions alternatives aux schémas actuels,
qui semblent parfois largement dépassés, sont de nature à mobiliser d’autres
champs de la recherche relevant des sciences humaines (économie, sociologie,
anthropologie…).
C’est cette part d’innovation « lowtech » qui est la plus déterminante, à savoir celle
qui concerne les innovations de nature sociale, organisationnelle, commerciale ou
financière214 et qui doit s’appuyer sur des démarches participatives (de type « bottomup ») ou des communautés de pratiques.
- La nécessité d’anticiper et d’accompagner ces évolutions pour l’ensemble des
maillons de la chaîne des musiques actuelles, de l’artiste au diffuseur (lieu, événement)
en passant par l’éditeur (de disque aujourd’hui, demain de contenus interactifs ?).
Cela suppose de développer les échanges avec le monde de la recherche, d’ouvrir
des territoires d’expérimentation, de favoriser les espaces d’information ou de
sensibilisation, de développer les compétences, de permettre le recours à une expertise
ou à un conseil.
Cette approche ne fait que renforcer l’opportunité d’un travail en réseau ou mutualisé
qui, au-delà du secteur des musiques actuelles, intéresse potentiellement d’autres
acteurs du monde culturel.
L’ensemble de ces nouveaux usages et des nouvelles pratiques liées aux technologies
numériques appelle en parallèle un travail de sensibilisation et d’éducation des
publics, notamment des plus jeunes. Dans ce domaine, il semblerait utile de mobiliser
certaines catégories d’acteurs, dont les médiathèques, les espaces culture-multimédia,
les associations de jeunesse et d’éducation populaire.
L’analyse des pratiques, des activités et dans une certaine mesure des innovations
associées aux musiques actuelles en Aquitaine apporte en toile de fond un autre
enseignement : outre leur diversité et la richesse des initiatives, c’est leur très large
déploiement à travers l’espace régional.
(214) Il est désormais reconnu
que seuls 20 % des innovations
sont de source technique
ou technologique (« hightech »)
et 80 % de nature « lowtech ».
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L’importance de cette relation au territoire est particulièrement marquante. Comment
celle-ci s’exprime-t-elle en Aquitaine, quels en sont les leviers, en quoi les musiques
actuelles participent-elles à la dynamique d’animation et d’attractivité des territoires
aquitains ?
En quoi le mouvement d’innovations dont est porteur ce secteur constitue-t-il une base
d’innovations dans la construction de territoire « créatifs » et de nouveaux modes
d’intervention des collectivités ?
C’est sur cet ensemble de questions que la troisième et dernière partie de ce constat
tente d’apporter un regard.
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4 - Des territoires
lieux d’émergences
Preneurs de son :
quelles dynamiques locales ?
L’approche des pratiques et des activités liées aux musiques actuelles met en évidence
l’importance du lien au territoire et ce à plusieurs niveaux.
Celui des pratiques tout d’abord. En première analyse, les pratiques d’écoute de
musiques actuelles ou de sorties à des concerts ou de téléchargement de musique sont
beaucoup plus marquées dans les agglomérations que dans les zones rurales. Ce constat,
issu de l’analyse des statistiques du DEPS sur les pratiques culturelles des Français, ne
doit cependant pas laisser conclure à l’inexistence d’une demande y compris dans les
zones les moins densément peuplées ou à caractère rural. On l’a déjà souligné, les
pratiques liées aux musiques actuelles sont parmi les plus répandues dans la société,
avec une tendance à un élargissement du profil générationnel des publics et elles touchent peu ou prou toutes les catégories sociales, avec des variations parfois importantes
selon les styles musicaux concernés (cf. première partie).
Ces disparités territoriales en termes de pratiques s’expliquent par plusieurs raisons,
notamment celles tenant à la structure socio-démographique des territoires (présence
plus ou moins importante de populations jeunes) mais aussi à la présence, ou non, d’infrastructures ou d’activités facilitant ces pratiques (ex : lieux de diffusion, accès au haut
débit…). Ce dernier facteur d’explication vaut également pour le niveau de pratique
instrumentale ou musicale (existence ou non d’écoles et de lieux de répétition de
proximité). Par conséquent une partie au moins des pratiques liées aux musiques
actuelles dépend de l’existence ou non d’une offre en services ou structures de proximité,
dans de bonnes conditions d’accessibilité (physiques et économiques).
Cette distorsion territoriale, qui n’est pas spécifique aux musiques actuelles, se retrouve
à quelques nuances près au niveau de la répartition des emplois et des activités. Sans
surprise, c’est dans les territoires où se situe l’essentiel des équipements que se concentrent
près des trois quarts des emplois permanents et des demandeurs d’emploi dans le secteur
de la musique (cf. 3.1.1). Pour autant, cet éclairage sur la population « professionnelle »
ne doit pas masquer une autre réalité moins facilement saisissable : celle des musiciens
et groupes amateurs dont on peut considérer que la répartition territoriale résulte à la
fois de facteurs démographiques (densité de population215, structure par âges) et de
facteurs relevant de l’offre de services (ex : lieux de répétition). S’agissant des activités,
leur localisation est étroitement liée à la densité de groupes ou d’artistes, pour le dire
autrement à la densité ou au potentiel « créatif » des territoires : nombre d’artistes ou
de groupes, dynamisme des scènes, présence de festivals, présence d’un public.
En France, la question de la contribution des activités culturelles au développement des
territoires a longtemps été dominée par un objectif de démocratisation des pratiques
culturelles, notamment en favorisant l’accès des publics aux cultures dites « savantes »
ou liées au patrimoine historique, matériel et immatériel du pays.
Au cours des années récentes, certains observateurs, y compris au sein du Ministère de
la Culture, ont pu conclure à un relatif échec de cette démocratisation culturelle. Le
(215) Rappel : une estimation
donne le ratio de 1 groupe
pour 2 000 habitants.
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paradoxe est que ce constat tend à passer sous silence tout un ensemble de pratiques
dites « populaires », auxquelles se rattachent le plus souvent les musiques actuelles et
dont témoignent les résultats des enquêtes du DEPS. Ainsi que cela a été noté dans la
partie introductive de ce rapport, la politique publique en faveur des musiques actuelles
est récente (une vingtaine d’années tout au plus) et les premiers cadres de l’intervention
publique en ce domaine ont été posés plus récemment encore. Toutefois, leur reconnaissance au sein même du monde culturel fait encore débat, ainsi qu’en atteste la réaction
virulente de certains milieux culturels suite à l’annonce début juin 2010 par le Ministère
de la Culture de la liste des artistes accueillis en résidence à la Villa Médicis, parmi lesquels
des artistes issus des musiques actuelles216. Ainsi, pour les tenants de la Culture officielle,
les musiques populaires ne relèveraient pas du domaine artistique, mais seraient assimilables
à une forme de « sous-culture » régie davantage par les lois du marché que par un souci
de la qualité artistique. Cette conception héritée renvoie à une vision réductrice non
seulement des pratiques mais aussi de la place de la culture au sein de nos sociétés
contemporaines. Pour reprendre les propos d’un observateur vigilant des questions
culturelles « il devient inconcevable de fuir la discussion avec l’ordinaire des citoyens
ordinaires sur les enjeux des pratiques artistiques… C’est bien là l’enjeu du futur des arts : il
est politique, donc global, et non sectoriel. »217
L’un des aspects sur lesquels la réflexion et l’action publiques ont également eu du mal
à se structurer est le lien entre pratiques culturelles et développement économique des
territoires. L’objectif prioritaire de démocratisation assigné aux politiques publiques a eu
quelque peu tendance à évacuer cette dimension, dont la prise en considération semble
très récente. La crise liée au projet de réforme du régime de l’intermittence, qui a fortement
perturbé l’organisation de certains festivals courant 2003, a contribué à une mise en
relief des enjeux territoriaux associés aux activités culturelles. Depuis lors, plusieurs
travaux se sont efforcés de prendre en compte cette dimension, dont un rapport
conjoint du Centre d’Analyse Stratégique / Commissariat Général du plan en 2006218.
Depuis une dizaine d’années, on assiste à une nouvelle prise en compte de ces questions,
tant au niveau national qu’international, avec l’apparition de nouveaux concepts :
« économie créative », « industries créatives » que certains préfèrent désigner sous
l’expression de « nouvelle économie de la culture ». Plusieurs collectivités ont choisi de
s’engouffrer dans ce nouvel espace, sans toujours bien définir leurs attendus en la
matière.
Ce que révèle le présent travail sur les musiques actuelles en Aquitaine, c’est que de
véritables dynamiques territoriales accompagnent cet ensemble de pratiques, aussi bien
dans certaines agglomérations que dans des zones rurales en apparence les moins
dotées culturellement. Ce dynamisme n’est le plus souvent ni le résultat de l’initiative
publique ni celle d’un simple opportunisme ou calcul économique. C’est avant tout le
fruit de la mobilisation d’hommes et de femmes sur leur territoire, qui par leur passion, leur
force de conviction, leur capacité à faire partager un plaisir, sont parvenus à mobiliser
derrière un projet, à générer une envie et un mouvement collectifs. Cette passion,
cette envie, ce plaisir sont les véritables moteurs des initiatives. Cela commence à tous
les stades de la pratique jusqu’à celui des projets les plus complexes, parfois les plus fous
à l’échelle de certains territoires.
Pour les collectivités, cette ressource, cette énergie-là est incontestablement précieuse et
elle n’a pas de prix. C’est celle qui est à la base de la créativité et de l’innovation et le
champ des musiques actuelles offre à cet égard un terrain riche d’enseignements et
d’expérimentations, dont il serait inconcevable de ne pas tirer partie dans le contexte
social et économique actuel. A la condition que, pour paraphraser les conclusions d’un
rapport récent consacré à l’innovation et à la créativité dans les territoires219, « les politiques
(216) Il s’agit de la chanteuse pop
Claire Diterzi et du jazzman
Malik Mezzadri (Magic Malik).
Leur sélection a provoqué
une vive querelle, avec lancement
d’une pétition impliquant de nombreux
compositeurs de musique contemporaine
(700 signataires)
(217) « Diversité culturelle et politiques
publiques, la fausse conversion française ! »
- Docteur Kasimir Bisou lors
d’un colloque tenu en juin 2005
à Nantes sur le thème
« politiques publiques et économie
sociale et solidaire » dans le cadre
d’un atelier consacré à l’économie
de la culture (« Quelles politiques
pour quelle éthique ? Diversité culturelle
et droit à la culture pour tous »).
(218) « Envie de France :
rapport de prospective sur l’attractivité
culturelle de la France » - Gilles ARNAUD
– Centre d’Analyse Stratégique,
Commissariat Général du Plan,
mars 2006.
(219) « Créativité et innovation
dans les territoires »
Conseil d’Analyse Économique, DATAR,
Académie des technologies – Rapport
du groupe de travail présidé
par Michel GODET –
Rapporteurs Philippe DURANCE,
Marc MOUSLI, mai 2010.
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s’intéressent moins à l’arbre qui tombe qu’à la forêt qui pousse […] car ce sont bien les
hommes et leurs projets qui font la différence entre les territoires ! ».
De nombreux travaux réalisés au niveau international confirment l’intérêt de ces dynamiques
et le potentiel de développement des activités culturelles et « créatives ». Ce potentiel
doit désormais intégrer les nouvelles opportunités générées par les usages et outils
numériques, ces territoires virtuels qui prolongent les territoires physiques au-delà de
leurs limites comme autant de réalités possibles. Le secteur des musiques actuelles étant
l’un des plus impactés par cette vague numérique, la réflexion sur leur contribution aux
dynamiques territoriales (culturelles, sociales, économiques, organisationnelles) doit
nécessairement intégrer cette nouvelle dimension.
Dans un tel contexte, les réponses apportées par les politiques publiques en faveur des
musiques actuelles supposent aussi des adaptations, aussi bien sur leur objet que sur
leurs méthodes, car pour se matérialiser l’innovation (qui ici touche à la fois au social,
à l’économique, à la technologie, aux modes d’organisation) a besoin d’une certaine
souplesse et d’une approche qui s’affranchisse des simples cadres sectoriels.
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4.1 Territoires, espaces de pratiques sociales,
d’expressions culturelles et de lien social
Il y a une dizaine, d’années, un rapport de la Fédération Nationale des Collectivités pour
la Culture, qui rassemble des élus locaux de toutes tendances, dressait le constat suivant :
« l’essor des musiques amplifiées est au cœur du phénomène de « musicalisation de la
société »220. Ce phénomène touche aussi bien les espaces collectifs (surtout urbains et
commerciaux) que les sphères les plus intimes de la vie. Si ce phénomène est surtout urbain,
il atteint de plus en plus largement les zones rurales du fait de l’homogénéisation de
la demande et des consommations culturelles. Il est aussi favorisé par les nouvelles
technologies, qui alimentent parallèlement un développement de la production
individuelle de musique.
Depuis une dizaine d’années, de plus en plus d’initiatives, publiques (ex : les SMAc) et
privées (ex : écoles de musiques ou rock school, cafés-culture…) ont dans une certaine
mesure accompagné l’engouement envers les musiques actuelles. Néanmoins, malgré
de réels progrès, les témoignages recueillis tant au niveau national qu’en région révèlent
la difficulté de répondre à une demande sociale croissante qui se manifeste sur le terrain
depuis la fin des années 1970, y compris en zones rurales. En ville, les dispositifs mis en
œuvre à partir du début des années 1990 en faveur des musiques amplifiées répondaient
avant tout à des objectifs sociaux, à la fois par la reconnaissance de nouvelles pratiques
ou expressions culturelles de la jeunesse mais aussi en réponse aux phénomènes
d’exclusion rencontrés, notamment parmi les jeunes, dans certains quartiers « sensibles »,
non sans créer quelques amalgames221. Depuis une vingtaine d’années, ces pratiques se
sont élargies dans la population, avec l’émergence récente d’une demande d’adultes
jeunes retraités.
Par ailleurs, bien qu’essentiellement urbaines, ces pratiques et une demande s’expriment
aussi en milieu rural, ceci s’expliquant pour partie du fait d’un relatif regain démographique
dans les territoires ruraux mais également en lien avec le phénomène d’homogénéisation
de la demande sociale déjà évoqué. Cette demande n’est pas toujours facilement
perceptible, faute d’un maillage aussi dense de lieux de pratiques qu’en zone urbaine.
Ainsi, sur les 80 scènes de musiques amplifiées adhérentes à la Fédurok au plan national,
on en recense moins d’une dizaine en milieu rural (cf. carte page suivante).
L’analyse dressée par la Fédération Nationale des Foyers Ruraux222, qui représente 2 800
associations locales d’éducation populaire œuvrant en milieu rural, met en évidence la
persistance de certaines carences propres à ces territoires ruraux. D’abord, souvent faute
de moyens adaptés, la difficulté pour les plus petites collectivités de se doter d’une
véritable politique culturelle. Cet écueil est en partie atténué par le développement
des intercommunalités dont certaines se sont dotées d’une compétence en matière
culturelle. Une autre tendance observée est la propension de certaines collectivités à
privilégier l’effet d’image sans toujours tenir compte de la réalité des besoins des
populations ou acteurs locaux. Certaines misent ainsi sur l’organisation d’événements
d’envergure tournés vers des publics extérieurs, au détriment de la demande sociale
locale. Pour cette fédération, la priorité devrait être accordée à la satisfaction de cette
demande, qui s‘exprime à plusieurs niveaux :
- D’abord, une demande d’apprentissage pour laquelle les disparités entre monde rural
et milieu urbain sont parfois criantes. Des initiatives innovantes ont été conduites dans
certains territoires, les enseignants se déplaçant directement sur le terrain (ex : Lozère
et Picardie).
- Ensuite, une demande de pratique amateur, à laquelle s’efforcent de répondre le plus
souvent des associations locales. Celle-ci s’accompagne d’une demande en matière de
(220) « Rapport général
de la Commission « musiques amplifiées »
de la FNCC » - Marie-Thérèse
FRANÇOIS-PONCET, Présidente
de la Commission et adjointe au Maire
d’Agen, et Jean-Claude WALLACH,
ancien président du Groupe d’Études
sur les Musiques Amplifiées (GEMA),
1999.
La FNCC rassemble plus de 450
collectivités territoriales au plan national.
En Aquitaine, les communes de Bergerac
et Saint Barthélémy de Bussières
en Dordogne, d’Arcachon, Bordeaux,
La Rivière, Langon, Pessac, Pompignac,
Saint-Ciers sur Gironde et Saint-Médarden-Jalles en Gironde, de Dax dans les
Landes, d’Agen, Boé, Lacapelle Biron et
Penne d’Agenais en Lot-et-Garonne,
d’Anglet, Lescar et Urrugne dans les
Pyrénées-Atlantiques, le Conseil Général
de la Gironde et le Conseil Régional
d’Aquitaine (aucune intercommunalité).
(221) Cf. à ce sujet
« Éléments pour une histoire
des politiques publiques en faveur
des musiques amplifiées »
Philippe TEILLET, 2002.
(222) Cf. audition
de M. Jean-Damien TERREAUX, FNFR,
le 3 juin 2009.
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La Fédurok
55, rue des Olivettes
44000 Nantes
Tél. 02 40 48 08 85
Fax 09 55 21 77 28
[email protected]
www.la-fedurok.org
Légende
● Lieu Fédurok en activité
▲ Lieu Fédurok en préfiguration
■ Lieu Fédurok d’accompagnement
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répétition, difficile à satisfaire car elle exige non seulement des lieux adaptés mais aussi
un personnel compétent et qualifié. Des solutions itinérantes ont été testées par des
associations d’éducation populaire, mais l’action de ces dernières est de plus en plus
remise en question en raison du désengagement de l’Etat.
- Enfin, une demande de lieux de diffusion, faute de quoi une large partie de la population
intéressée se voit contrainte à des déplacements et donc à des dépenses supplémentaires
pour accéder à une offre de spectacles ou de concerts. De fait, ce sont souvent les
populations les plus aisées en milieu rural qui peuvent avoir accès à cette offre. A ce
niveau, des expériences intéressantes de scènes itinérantes ou mobiles ont été menées
dans plusieurs départements (ex : Saône-et-Loire) ou bien de scènes conventionnées
(ex : Lozère) ou bien encore de spectacles donnés par des artistes chez les habitants
(ex : en Pays-de-la-Loire, 110 lieux chez l’habitant accueillent plus de 8 000 personnes
par an).
Certaines fédérations, telles la Fédurok, intègrent dans leur charte d’adhésion, la dimension
territoriale et la prise en compte des différents types de pratiques des populations à
l’échelle locale.
En Aquitaine, de multiples initiatives s’inscrivent dans des démarches destinées à
permettre une meilleure accessibilité des populations locales à la pratique des musiques
actuelles et, par leur intermédiaire, à lutter contre les phénomènes de marginalisation
sociale en favorisant le dialogue interculturel et la diversité culturelle.
Dans l’agglomération bordelaise, l’association Musiques de Nuit Diffusion créée
en 1984223, a entrepris un travail remarquable dans plusieurs quartiers relevant de
la Politique de la Ville, notamment en direction de jeunes publics. Cette association
travaille essentiellement dans le domaine de la diffusion et de l’organisation de
concerts de jazz et de musiques du monde224. Ne gérant pas de lieu de diffusion,
elle opère en relation étroite avec d’autres opérateurs (scènes de la Rock School
Barbey à Bordeaux, du Krakatoa à Mérignac, salles Bellegrave à Pessac et de la
Médoquine à Talence).
Depuis le début des années 1990, elle a diversifié ses activités par un travail de
sensibilisation des publics, sous forme de stages ou d’ateliers (ex : stages de hip
hop et stages encadrés par des artistes de diverses origines), combinant pratiques
et discussions autour des musiques dans plusieurs quartiers « sensibles » de
l’agglomération (sur les communes de Bassens, Cenon, Floirac et Lormont). Ce
travail a fait l’objet d’une convention avec le Conseil Général de la Gironde. Cette
initiative est partie du constat d’inégalités d’accès à l’offre d’équipements et de
pratiques au sein de l’agglomération. Sur cette base, Musiques de Nuit Diffusion a
mobilisé les collectivités et plusieurs relais associatifs et socio-culturels des communes
concernées (centres sociaux, centres d’animation, bibliothèques). Cette mobilisation
a débouché au milieu des années 1990 sur la mise en place d’ateliers d’initiation
aux pratiques musicales dans les collèges et sur l’organisation de concerts dans des
gymnases (avec des artistes parfois réputés tels Youssou N’Dour ou Lucky Peterson).
Mais l’inadaptation des équipements a conduit en 1997 à l’abandon des concerts
tout en maintenant le travail de sensibilisation ou d’initiation et les autres actions
engagées. Parmi celles-ci, il faut mentionner l’organisation du Festival des Hauts de
Garonne durant la période estivale, qui offre des concerts gratuits aux habitants de
ces quartiers et de l’ensemble de l’agglomération. Ces concerts se déroulent dans
les parcs publics des communes de la rive droite, mais aussi dans des centres
sociaux, des appartements ou au pied d’immeubles. Ce festival est également
(223) L’association Musiques de Nuit
a succédé à l’association
« À travers Chants » en 1984,
avant de devenir Musiques de Nuit
Diffusion en 1987.
(224) Elle a organisé plusieurs festivals
(Jazz à Andernos, Jazz Fort Médoc).
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l’occasion de développer un travail de terrain en résidence. Les caractéristiques
sociologiques de ce territoire, marqué par la présence de 52 nationalités sur les
4 communes intéressées, donc par une forte présence de populations issues
notamment de l’immigration, ont permis de donner corps à une autre dimension
de ce festival, qui vise à favoriser la transmission d’héritages culturels également
révélateurs des « musiques du monde ». Depuis la création de ce festival en 1993
et la mise en place du travail de sensibilisation, l’image culturelle de ces communes
a nettement évolué. Plus du tiers des populations locales interrogées lors d’une
enquête conduite en 2008 avait une image de dynamique culturelle sur le territoire,
sachant que ce travail s’est construit dans une démarche plus générale de
revalorisation et d’ouverture des quartiers, permettant de maintenir une certaine
solidarité et un fort sentiment d’appartenance. Depuis quelques années, les municipalités
ont ainsi pu mesurer l’enjeu que pouvaient constituer l’action et l’innovation culturelles sur leur territoire, comme levier de développement social.
C’est dans ce même esprit que Musiques de Nuit Diffusion, associée à Parallèles
Attitudes Diffusion (gestionnaire de la Rock School Barbey) s’est impliqué dans le
projet de Carnaval des Deux Rives initié par l’État en 1995 et mis en œuvre par le
DRAC de l’époque, qui se déroule début mars. Au croisement de la politique de la
Ville et de la politique culturelle, ce projet fut conçu comme un événement festif
et populaire impliquant, outre les municipalités déjà mentionnées, celle de
Bordeaux, avec l’appui du Conseil Général de la Gironde et du Conseil Régional.
L’organisation de ce carnaval est précédée de tout un travail de préparation en
amont dans plusieurs quartiers sous forme d’ateliers de création. Des artistes se
sont impliqués dans l’animation des ateliers (tels le groupe brésilien Moleque de
Rua) et par des interventions dans les écoles de musique locales, les centres
sociaux, les marchés, les bibliothèques ou encore chez l’habitant.
Outre la musique, le Carnaval des Deux Rives mobilise les arts plastiques (pour la
réalisation des chars) ou encore la gastronomie, au plus près des habitants
habituellement tenus à l’écart des pratiques culturelles. Lors de la période de ce
carnaval, des repas sont ainsi organisés dans les quartiers, auxquels habitants,
artistes et jeunes en formation sont conviés. Il permet un réel brassage culturel,
intégrant des populations d’origines très diverses et donne lieu à une parade très
colorée. Son organisation a également offert un cadre pour l’insertion de jeunes
en difficulté, à travers la coopération établie avec une association de formation et
d’insertion (l’AFEPT) et les missions locales. Une douzaine de jeunes est ainsi
accueillie pour découvrir les métiers de la métallurgie en participant à la réalisation
d’engins déambulatoires. Ce travail est également encadré par des artistes plasticiens
de la Compagnie nantaise Royal de Luxe. Aujourd’hui, le caractère populaire de cet
événement est une réalité qui dépasse les limites de l’agglomération bordelaise.
Musiques de Nuit Diffusion réalise donc un véritable travail de médiation et de
sensibilisation culturelles, qui invite la population à s’emparer de la « chose » culturelle
autrement que par la simple activité de diffusion. Elle dispose d’un budget de
800 000 € (dont 130 000 € consacrés au Carnaval des Deux Rives) et emploie une
douzaine de salariés. Musiques de Nuit Diffusion organise une cinquantaine de
concerts par an, mène une trentaine d’actions de sensibilisation à l’échelle locale et
régionale dans les bibliothèques et médiathèques et une cinquantaine d’opérations
de proximité (ex : concerts chez l’habitant). Désignée par le Conseil Régional
d’Aquitaine en tant que « pôle ressources régional sur le jazz et les musiques du
monde », l’association Musiques de Nuit Diffusion est associée à la gestion du
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« Rocher de Palmer », nouveau lieu de diffusion créé à Cenon, dédié au jazz et aux
musiques du monde (cf. 3.2.4). A court terme, et au-delà de la nouvelle activité
que représente pour cette association la gestion d’un lieu, l’objectif est de trouver
une alternative à l’indisponibilité du site du Loret utilisé jusqu’alors pour la mise en
place des ateliers de préparation du Carnaval des Deux Rives.
Ce travail de sensibilisation, d’accompagnement et de médiation sociale autour des
musiques actuelles à l’échelle des territoires est également une mission des scènes
labellisées. Ainsi, l’association Parallèles Attitudes Diffusion (Rock School Barbey),
au-delà de son implication dans l’organisation du Carnaval des deux Rives, déploie
des activités aussi bien en milieu urbain qu’en direction des zones rurales du département de la Gironde. Dans le premier cas, elle intervient dans 7 quartiers prioritaires de la ville de Bordeaux225 et, plus récemment, d’autres communes
de l’agglomération (Floirac, Pessac, Sainte-Eulalie) au travers du projet Quartiers
Musique. Les objectifs de ce projet entamé en 1999 visent à permettre un meilleur
accès des jeunes de ces quartiers aux équipements, de favoriser les pratiques,
l’enregistrement et la diffusion des expressions artistiques propres à ces territoires
et d’appuyer les initiatives d’organisation d’événements qui s’y feraient jour. Dans
ce cadre, la Rock School Barbey intervient dans le repérage des groupes, par la mise
à disposition gracieuse de ses locaux de répétition avec un accompagnement spécifique (rap, raï, reggae, ragga, rock, R’nB), par l’organisation de concerts
(formule « Club » de la Rock School), par la mobilisation du matériel d’enregistrement
de son « Bus Rock » qui se déplace dans les quartiers et par le soutien technique
à des manifestations locales (Grand Parc en Fête, festival de l’été des Aubiers).
A Floirac, la Rock School mène depuis 2009 une action de soutien à de jeunes
groupes (« Côté Rock School »), avec le concours d’associations locales. Le « Bus
Rock » de la Rock School Barbey intervient plus largement sur l’ensemble de la
Gironde, dans le cadre d’une convention avec le Conseil Général de la Gironde
(soutien revu à la baisse en 2010 dans un contexte budgétaire tendu) et d’un
partenariat avec une société de transports (Citram). Cette initiative du « Bus Rock »
a fait l’objet d’une fiche-exemple du Ministère de la Culture et de la Communication.
En lien avec l’Institut Départemental de Développement Artistique et Culturel (IDDAC),
les services déconcentrés de Jeunesse et Sports et certaines Communautés de
communes, Parallèles Attitudes Diffusion organise le tremplin des Scènes Croisées,
qui permet d’accompagner de jeunes groupes du département vers la scène. Enfin,
la Rock School Barbey développe également des actions en direction de plusieurs
publics : les scolaires dont lycéens, le milieu carcéral depuis 1990 en relation avec
la Maison d’Arrêt de Gradignan, en milieu hospitalier auprès de l’hôpital de jour de
santé mentale de la MGEN à Bordeaux et auprès du Foyer d’Accueil Médicalisé
pour polyhandicapés de l’ADAPEI « Le Mascaret » à Bègles.
En Dordogne, l’association du « Sans Réserve » organise des concerts « hors les
murs » et a établi des partenariats avec d’autres lieux de diffusion du département
(dont le Rocksane à Bergerac). Son projet artistique et culturel 2009-2012 prévoit
le développement d’interventions en milieu carcéral et en milieu hospitalier. En
Lot-et-Garonne, l’équipe du Florida d’Agen travaille également dans cette même
démarche d’animation territoriale avec des opérations du type « Au Cœur des
Campagnes », « Des quartiers, des villages », « Batucada 2000 »… Elle accompagne
des projets culturels avec d’autres acteurs sur le territoire départemental226, avec
l’intention de fédérer les populations autour de projets artistiques et culturels
susceptibles de favoriser les liens intergénérationnels et interculturels. L’association
(225) Il s’agit des quartiers
de La Benauge, gare Saint-Jean,
la Victoire, Saint-Michel, Saint-Louis,
du Lac et de Bacalan.
(226) Tels que l’association
Garonna Show à Port-Sainte-Marie,
l’association Kesaco à Puymirol,
l’association Plein Vent à Trentels,
l’association + de Core à Marmande,
l’association After Before à Fumel,
l’association Staccato à Miramont
de Guyenne, la médiathèque d’Aiguillon,
le centre culturel de Tonneins,
la communauté de communes
du Val d’Albret
et celle des Deux Séounes…
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ADEM Florida conduit également plusieurs actions en direction des jeunes : projets
en milieu scolaire mais aussi péri et extra-scolaires (par exemple dans le cadre de
Contrats Éducatifs Locaux à Agen), projets territoriaux en direction de populations
défavorisées ou isolées par l’organisation d’ateliers de pratiques et de créations
musicales (ex : projet slam en partenariat avec un lycée et un centre hospitalier spécialisé), actions en milieu pénitentiaire (ex : fête de la musique à la Maison d’Arrêt
Montaigne). En Pyrénées-Atlantiques, l’Ampli intervient également en milieu
scolaire à l’échelle du grand Pau et du département. L’originalité de l’action de cette
association gestionnaire d’une scène tient aussi au développement de coopérations
transfrontalières avec l’Aragon (Saragosse) et la province basque d’Euskadi.
D’autres associations d’animation culturelles développent des activités particulières
intéressant les pratiques liées aux musiques actuelles sur le territoire aquitain, telles
que l’association Larural basée à Créon (à une trentaine de km de Bordeaux).
Ce village de 3 700 habitants compte 85 associations dont une quinzaine œuvrant
dans le domaine culturel. L’association Larural intervient depuis 2005 en matière de
programmation de l’espace culturel municipal et de coordination de la vie associative
culturelle locale. Son action concerne le domaine des musiques actuelles mais
couvre aussi l’ensemble du champ artistique (théâtre, danse, cirque…). Elle propose
diverses activités dans le champ des musiques actuelles (ex : ateliers hip hop, slam,
graf, Djying…) et travaille en lien avec des artistes locaux de l’Entre-Deux-Mers,
l’objectif de cette association consistant également à mettre le lieu dont elle assure
la gestion à disposition des artistes. Ses moyens restent cependant limités : un
budget de 150 000 € environ et 2 salariés (dont 1 en Contrat d’Accès à l’Emploi).
L’implication des bénévoles dans le travail de l’association (30 à 40 personnes
environ) est de ce fait soulignée, de même que l’intérêt de partenariats permettant
de mutualiser certaines ressources (ex : prêt de matériel avec Musiques de Nuit
Diffusion, le festival Musik à Pile, la Rock School Barbey…).
Dans les Landes, la mission de l’association départementale Landes Musiques
Amplifiées (LMA) créée en 1995 répond à un objectif de développement de ces
musiques à l’échelle du territoire départemental, par un appui aux acteurs associatifs
et aux musiciens, et en contribuant à l’aménagement culturel de ce territoire227 en
lien avec les « pays » et les Communautés de communes mais également avec le
réseau des bureaux d’information jeunesse. LMA intervient de plus en plus à la
demande de Communautés de communes qui se sont dotées d’une compétence
en matière culturelle, dans le cadre de conventions pour l’animation culturelle du
territoire, pour le développement et la sensibilisation des publics ou encore pour
l’organisation de concerts. LMA intervient surtout dans le sud du département
(agglomération dacquoise, Saint-Paul-les-Dax, Saint-Sever, Chalosse), sachant que
l’association Musicalarue, organisatrice du festival du même nom, conduit une action
particulière d’animation et de sensibilisation en haute Lande. LMA développe par
ailleurs une action particulière en direction des lycéens. Durant 5 ans, LMA a ainsi
assuré la coordination régionale des projets musicaux du festival des lycéens
organisé par le Conseil Régional d’Aquitaine. Aujourd’hui, l’association s’attache à
encourager les pratiques en milieu scolaire et à révéler le potentiel créatif de jeunes
musiciens. Actuellement localisée à Saint-Paul-les-Dax, LMA devrait prochainement
être hébergée dans le nouveau centre de musiques de Saint-Vincent de Tyrosse
(cf. également chapitre 2.2.3).
(227) Cf. audition
de MM. Xavier BONNOT, Président,
et Stéphane GRECO,
directeur de Landes Musiques Amplifiées.
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Certaines initiatives, au croisement des musiques actuelles et des cultures urbaines,
ont été impulsées par des collectivités. C’est le cas de la ville de Pessac dans
l’agglomération bordelaise, avec l’opération Vibrations Urbaines, lancée en 1997
par la municipalité. A l’origine centré sur les musiques actuelles, ce festival s’est
ouvert dès 1999 à d’autres cultures et esthétiques urbaines, aussi bien dans le
domaine musical (concerts de rap, électro, reggae, dub ou hip hop…), mais aussi
du sport (compétitions de skate, BMX, football et basket de rue, capoeira), du
multimédia, du graffiti, de la danse (break dance). Cette programmation contribue
à la promotion de pratiques amateurs et offre un espace d’expériences culturelles
et/ou sportives. Ses organisateurs décrivent l’événement comme un laboratoire de
pratiques émergentes, offrant à des jeunes issus de différents milieux une occasion
de rencontres et de mixité sociale, s’appuyant en cela sur le succès rencontré par
certaines activités (ex : 650 jeunes rassemblés sur 28 demi-journées lors de certaines
compétitions amateurs, ateliers de graffiti, de skate…)228. Il est vrai, cette opération
connaît un véritable succès public : 15 000 personnes en 2010, dont 86 % originaires
du département et 93 % d’Aquitaine, aux deux-tiers masculin et une très forte
proportion d’adolescents et jeunes adultes. L’intérêt de cette manifestation qui se
tient courant novembre est sa cohérence en terme de cultures urbaines et de mixité
des pratiques, compte-tenu des liens existants entre les pratiques des « riders » et d’autres activités telles la musique (hip hop, hard rock, reggae), les arts visuels et le graphisme. De ce fait, il représente une manifestation atypique par rapport aux autres
festivals existants en France. Il donne lieu à la mise en œuvre d’un travail de préparation en amont, accompli en lien avec des associations locales (via Pessac
Animations). Il génère une véritable dynamique plusieurs jours durant, offrant aux
jeunes des occasions de découverte de pratiques hors cadres institutionnalisés (type
« clubs »). Il constitue un espace de valorisation du travail éducatif mené durant
l’année au niveau local en matière de pratiques culturelles. Le budget de Vibrations
Urbaines est de 250 000 € pour l’ensemble de l’opération.
Enfin, il convient de rappeler en le soulignant le travail exemplaire d’animation, de lien
social et de développement territorial mené par diverses associations organisatrices
de festivals de musiques actuelles en Aquitaine : qu’il s’agisse de Musicalarue en
Haute Lande, de la compagnie Lubat Jazzcogne et de l’association des Nuits
Atypiques en sud Gironde, de l’association Music’Action en Médoc, d’Euskal Herria
Zuzenean ou d’Errobiko Festibala au pays basque, de l’association Overlook en
Dordogne, des associations MR Power et After Before en Lot-et-Garonne, ou encore
de l’association « Chantons sous les Pins » dans les Landes pour ne citer que ces
exemples-là. De même, l’activité déployée en milieu urbain dans le cadre du festival
des Rendez-vous des Terres Neuves à Bègles offre une autre figure de ce que peuvent
apporter les pratiques liées aux musiques actuelles en termes de valorisation et de
prise en compte des initiatives et des pratiques culturelles issues des territoires
(cf. également chapitre 3.2.4).
Cette approche régionale des territoires en tant qu’espaces de pratiques peut aussi
se décliner en termes de coopération, de brassage d’identités plurielles à travers des
héritages communs. Plusieurs opérateurs en région ont tissé des liens plus ou moins
étroits avec d’autres régions ou pays, afin de favoriser par les musiques actuelles un
dialogue interculturel. C’est le cas de Musiques de Nuit Diffusion (avec San
Sebastian, Dakar, Saint-Louis, Alger, Oran, Annaba, Sao Tomé…) et de la Rock
School Barbey (ex : avec Québec, Bilbao, Bristol, Casablanca). C’est aussi le cas de
l’Ampli à Pau (cf. ci-dessus, avec Saragosse et la province d’Euskadi) et de plusieurs
(228) Cf. audition
de MM. Frédéric ARNAUD
et Olivier MORINEAU,
le 8 septembre 2009.
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associations organisatrices de festivals (ex : Euskal Herria Zuzenean). Ce dernier
exemple renvoie aussi aux métissages artistiques opérés entre musiques traditionnelles
et musiques amplifiées, aux frottements entre les univers de la culture basque ou
occitane et ceux des différents autres courants esthétiques qui composent les
musiques actuelles. On peut faire référence ici au travail d’artistes tels que Beñat
Achiary ou à celui du groupe Familha Artus. Il y a enfin ces liens tangibles qui unissent,
par les épreuves souvent douloureuses de l’histoire, les continents des deux côtés de
l’Atlantique. Ce Triangle Noir autour duquel des projets artistiques s’échafaudent
(associant notamment la Rock School Barbey, le Krakatoa et Musiques de Nuit
Diffusion), reliant la ville de Bordeaux à des pays d’Afrique, aux Antilles et à certains
États de la côte est des Etats-Unis. Une manière de faire vivre cette sorte de « sentiment
océanique » ou de « spleen atlantique », ainsi que le décrit un observateur229.
Autrement dit, les musiques actuelles offrent aussi un terrain propice aux échanges
interculturels (créations croisées, métissages, résidences d’artistes, diffusion), qui
démarre parfois à l’échelle du territoire de proximité (ex : combien de nationalités
et d’expressions culturelles à l’échelle d’un territoire tel que la Communauté
Urbaine de Bordeaux ?) pour s’élargir à d’autres horizons et à d’autres sensibilités.
Les résultats d’un travail de recherche publié en 2005 à la Maison des Sciences de
l’Homme d’Aquitaine sur les territoires musicaux230 apportent un autre éclairage
sur cet ancrage territorial des musiques actuelles en région. Ils mettent en évidence
ici la stabilité de socles anciens de pratiques musicales dans le sud de la région,
à travers le phénomène des bandas d’une part et celui de la musique basque. Dans
les deux cas, ces « socles » musicaux se sont régénérés au contact des musiques
amplifiées (ex : le rock basque), mettant à profit les mobilités artistiques ou culturelles
des jeunes et contribuant à affirmer une réalité socio-territoriale héritée. En ce sens,
l’une des innovations soulignée dans cette recherche est la contribution des musiques
amplifiées à l’acceptation sociale de territorialités musicales plurielles dans
l’espace régional.
Un autre constat formulé est la territorialisation de cet espace par des manifestations
de spectacle vivant (fêtes, festivals) par lesquelles se construisent de nouvelles formes
de sociabilité.
Cet ensemble d’expériences témoigne de l’intérêt sinon de l’exigence qui devrait
accompagner toute définition de politique publique dans le domaine des musiques
actuelles et plus largement dans le champ culturel, dès lors que l’on considère que
le territoire constitue un terrain d’expressions et d’initiatives.
Car au-delà des lieux ou des équipements créés pour favoriser les pratiques ou la
diffusion d’œuvres ou productions musicales, ce dont il est question ici ce n’est
pas tant la manière dont ces pratiques répondent à des cadres pré-établis
d’exercice d’un point de vue « artistique », « culturel » ou relevant de l’action
publique à l’échelle territoriale (le « social », les « publics », le « plus grand
nombre »…), que la façon dont elles permettent l’expression des individus
dans toute leur diversité, l’implication des citoyens (bénévoles, musiciens…)
derrière ou par un projet culturel, dont elles participent à leur épanouissement
personnel autant qu’à leur sentiment d’appartenance collective et à leur ouverture
à l’autre…
Finalement, l’enjeu ici est autant celui d’une forme de « démocratie culturelle »
à réinventer, à expérimenter, en contrepoint d’une vision souvent hégémonique
du public/consommateur uniquement là pour prendre ce qu’on lui propose
ou n’être pas considéré.
(229) Cf. audition
de M. Florent MAZZOLENI,
journaliste, le 8 avril 2009.
(230) « Territoires musicaux en régions.
L’émergence des musiques amplifiées
en Aquitaine » Yves RAIBAUD - Maison des Sciences
de l’Homme d’Aquitaine,
2005.
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Ce serait alors ignorer ce qui fait peut-être l’originalité et la force de ce que l’institution
a désigné en tant que « musiques actuelles » : leur émergence s‘est dans la plupart
des cas opérée au milieu du corps social et non dans les lieux repérés de pratiques
culturelles, au cœur de territoires parfois bien identifiés (des champs de coton aux
quartiers du Bronx, des banlieues industrielles aux vallées du Pays Basque ou du Béarn).
C’est en cela que le lien entre ces pratiques et les territoires revêt une importance
particulière : par la capacité à favoriser des expressions plurielles, individuelles et
collectives qui traduisent un état de société, d’être et de vivre ensemble dont
témoignent des pratiques musicales en perpétuelle évolution. Pour le dire autrement,
le territoire est la scène sur laquelle se matérialise l’enjeu des pratiques.
4.2 Territoires, espaces de structuration des activités
et de développement
L’essor des pratiques liées aux musiques actuelles est générateur de multiples activités,
ainsi que le démontrent les précédents chapitres de ce travail.
Celles-ci se répartissent de façon assez large sur l’ensemble du territoire, avec cependant
des phénomènes de concentration plus ou moins marqués selon les types d’activités et
selon les territoires.
La structuration de ces activités s’est essentiellement opérée sur des bases sectorielles,
par catégories d’opérateurs, à travers diverses organisations syndicales ou fédérales :
sociétés d’auteurs et d’artistes231, organisations de producteurs232 et fédérations233. La
dimension territoriale est relativement peu présente à ce niveau, sinon par la mobilisation
particulière de certaines collectivités (Fédération Nationale des Collectivités pour la Culture,
Fédération des Nouveaux Territoires des Arts Vivants ou commissions spécialisées au sein
des associations nationales regroupant des collectivités234).
Au plan national, certaines structures représentatives des musiques actuelles (Fédurok,
FSJ) se sont regroupées au sein du Syndicat des Musiques Actuelles, « syndicat national
des petites et très petites structures non lucratives de musiques actuelles ». La logique de
cette initiative se situe à l’interface entre les trois modèles de développement qui animent
ce secteur : le « public administré », le « privé lucratif » et « l’associatif amateur ». Pour ce
syndicat, il s’agit de combiner non seulement la production et la diffusion d’œuvres
musicales entendues comme des biens ou services consommables tout en affirmant une
« éthique sociale et solidaire ». Cette posture souligne bien la démarche d’hybridation
(privé lucratif/privé non lucratif/public) qui non seulement fédère mais caractérise aussi une
large partie des opérateurs des musiques actuelles face à la concentration oligopolistique
des industries du divertissement (culturelles certes, mais aussi médias et opérateurs du
numérique désormais).
Cette approche est plus largement partagée dans le champ du spectacle vivant et a
donné lieu en décembre 2007 à l’adoption d’un manifeste signé de plusieurs organisations
membres de l’Union Fédérale d’Intervention des Structures Culturelles (UFISC), qui se
revendique dans un espace intermédiaire et alternatif entre la logique « d’excellence »
de l’intervention publique et la logique financière des industries culturelles235.
L’analyse des points-clés de ce manifeste est intéressante en ce sens qu’elle permet de
mieux qualifier les valeurs et principes des structures et acteurs concernés, parmi lesquels
un grand nombre de ceux intervenant dans le champ des musiques actuelles :
- l’initiative privée et l’autonomie de gestion,
- l’implication sur un territoire et le rapport aux populations,
(231) ADAMI, CSDEM, CEMF, MMFF,
SACD, SACEM, SFA, SNAC, SNACOPVA,
SNAICOCA, SNAM, SPEDIDAM,
SYNDEAC, SYNAPSS, UNAC.
(232) PRODISS, SCPP, SNEP, SPPF, UPFI.
(233) AFIJMA, FAMDT, FEDUROK,
FERAROCK, FNEIJMA, FSJ, SMA,
Technopol, UFISC, Zone France…
(234) ADF, AMF, AMGVF, ARF, FNCC,
Réseau Chaînon (FNTAV).
(235) « Manifeste de l’UFISC
pour une autre économie de l’art
et de la culture » - Décembre 2007 –
Co signé par la Fédération des Arts
de la Rue, la Fédurok,
le Syndicat National des Arts Vivants,
le Syndicat du Cirque de Création,
la Fédération des Scènes de Jazz
et Musiques Improvisées,
le Centre International du Théâtre
Itinérant, le Réseau Chaînon, le SMA,
Zone Franche, le réseau francilien
de musiques actuelles RIF…
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- la diversité culturelle et des missions d’intérêt collectif,
- une économie « plurielle ».
Leurs modes de fonctionnement entendent privilégier des entreprises associatives
d’esprit coopératif, une pluralité de proximité et d’innovation, une économie artisanale et
de main-d’œuvre et de nouvelles relations de travail. La primauté de la diversité artistique
et culturelle, de la coopération, de l’initiative citoyenne à buts autres que lucratifs sont
au centre des revendications portées par ce manifeste.
Face à la multiplicité des interlocuteurs dans ce domaine des musiques actuelles et suite
à une demande conjointe de la Fédurok et de la Fédération des Scènes de Jazz et de
Musiques Improvisées (FSJ), le Ministère de la Culture a lancé en 2004 une concertation
nationale pour les musiques actuelles. Cette concertation nationale a associé la plupart
des syndicats, fédérations, collectivités et organismes professionnels du secteur.
L’objectif de cette concertation visait à mieux prendre en considération les problématiques
des lieux par une réflexion élargie au développement des musiques actuelles, à la fois
dans une approche sectorielle et territoriale. Les premières conclusions du travail réalisé
dans ce cadre furent présentées à Bordeaux en juin 2005 puis à Nancy en octobre de la
même année lors d’un Forum national des musiques actuelles (Foruma). Il a débouché
en 2006 sur la création d’un Conseil Supérieur des Musiques Actuelles236 (CSMA), qui fut
chargé notamment de l’élaboration d’un plan pour une politique nationale et territoriale
des musiques actuelles. Ce plan, rendu public en juin 2006 parallèlement à la publication
d’un rapport de l’Inspection Générale de l’administration des affaires culturelles237,
prônait la mise en place de concertations territoriales pour le développement des
musiques actuelles, afin de rassembler l’ensemble des acteurs et des organisations à
l’échelle territoriale, de structurer un espace d’analyse partagée, d’élaborer ou coconstruire des schémas territoriaux et d’assurer un suivi-évaluation de leur mise en œuvre.
Une circulaire du Ministère de la Culture de novembre 2006 demandait aux préfets et
directeurs régionaux aux affaires culturelles de « créer les conditions pour que ces
concertations territoriales soient engagées dans les meilleurs délais par les acteurs et les
organisations professionnelles concernées, les collectivités territoriales ainsi que leurs
services. » C’est en Aquitaine que furent lancées les premières concertations territoriales
sur les musiques actuelles, suivie peu après de la région Limousin.
Cette dynamique de structuration du secteur à l’échelle territoriale a cependant eu du
mal à se généraliser. Assez peu de régions ou de collectivités se sont emparées de cet
outil de co-construction d’une politique publique et d’organisation du secteur. Le
Ministère lui-même, depuis de nombreux mois, a quelque peu mis le Conseil Supérieur
des Musiques Actuelles en sommeil, en n’ayant pas procédé au remplacement du
Président du CSMA laissé vacant (un vice-président représentant de l’ARF ayant assuré
l’intérim jusqu’en mars 2010).
La dimension territoriale des activités liées au secteur des musiques actuelles n’est pourtant
pas contestable, compte-tenu à la fois de l’importance de la demande sociale sur les
territoires, des répercussions ou retombées générées par ces activités en termes
d’apprentissage artistique ou musical, de fréquentation de lieux souvent sous maîtrise
publique, d’économie, d’animation, d’emplois, d’implication citoyenne.
(236) Composé
d’une trentaine
de membres,
dont le Ministère de la Culture,
le Centre National de la Variété, l’IRMA,
les organisations représentatives
des collectivités territoriales (ARF, ADF,
AMF, AMGVF, FNCC) et les diverses
organisations professionnelles du secteur.
Frédéric VILCOCQ,
conseiller régional d’Aquitaine en charge
de la culture et des industries créatives,
fut représentant de l’Association
des Régions de France auprès du CSMA.
La situation aquitaine offre un bon exemple de cette dimension territoriale des activités
liées aux musiques actuelles, ainsi qu’en attestent les cartes jointes en annexe de ce
rapport. Une étude réalisée en 2003 par l’association Culture et Proximité (OPALE)
apportait un premier éclairage sur cette réalité et sur sa prise en compte dans le cadre
des « pays »238. Si l’on ne devait considérer que les structures ou opérateurs spécifiques
(237) « Rapport sur le soutien de l’État
aux musiques dites actuelles » Michel BERTHOD, Anita WEBER,
inspecteurs généraux –
Ministère de la Culture
et de la Communication,
juin 2006.
(238) Cf. supra nota n° 210.
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aux musiques actuelles, ce sont entre 500 et 600 acteurs concernés sur le territoire
aquitain, avec un noyau dur d’environ 150 acteurs spécifiques de l’apprentissage
à la production et à la diffusion (hors bars et discothèques), environ 300 bars et
discothèques diffusant de la musique et près de 150 points de vente (GSA, GSS,
disquaires) à quoi on pourrait ajouter une centaine de bibliothèques/médiathèques
disposant d’un catalogue de disques. Cet inventaire devrait par ailleurs intégrer la
fabrication, la réparation et le commerce d’instruments de musique de même que
certaines activités de services intervenant accessoirement pour le spectacle vivant.
D’autres acteurs seraient susceptibles de consolider ce que l’on pourrait qualifier de
« système » régional des musiques actuelles, à l’instar de la société d’édition d’ouvrages
Mélanie Seteun installée depuis peu à Bordeaux ou encore des liens existant avec certains illustrateurs et/ou auteurs du monde de la bande dessinée239. Même si
l’agglomération bordelaise concentre l’essentiel de l’activité, on constate une assez
large répartition des lieux de diffusion, des activités d’organisation de festivals et dans
une moindre mesure des producteurs phonographiques, des structures d’apprentissage
et lieux de répétition.
Le travail de recherche publié en 2005 par la Maison des Sciences de l’Homme a mis en
exergue la participation du secteur des musiques actuelles « à la création ou à la
re-création de la territorialité », œuvrant à « l’élaboration d’un compromis territorial »240.
La structuration à l’échelle régionale des acteurs de ce système « musiques actuelles »
est encore très récente et partielle. La création du Réseau Aquitain des Musiques
Amplifiées (RAMA) remonte à 1997, grâce à l’impulsion donnée par le DRAC de
l’époque, Jean-Michel LUCAS. Sa création fut officialisée en 1998, à la faveur d’une
charte de développement des musiques amplifiées. Ce réseau, devenu entre-temps
« Réseau Aquitain des Musiques Actuelles », rassemble une trentaine de membres,
aussi bien lieux de diffusion, écoles ou lieux d’apprentissage, structures d’accompagnement, producteurs phonographiques, organisateurs de spectacles ou de festivals…
Le RAMA est avant tout un outil d’appui et d’animation au service des opérateurs
de musiques actuelles en région, à l’image des structures équivalentes créées dans
d’autres régions françaises241. Ce n’est donc ni un opérateur culturel au sens strict,
ni un syndicat professionnel, ni le bras armé de la collectivité qui le finance pour une
large part. A cet égard, il fait office de Pôle ressource artistique et culturel, par convention
avec le Conseil régional d’Aquitaine. Ses missions dans ce cadre portent sur la mise
en réseau des opérateurs, l’accompagnement de projet, la co-construction de politiques
publiques, la formation (partenariat avec l’IDDAC et l’IRMA), le centre de ressources
documentaires et l’observation culturelle.
Le RAMA intervient sur des problématiques ou des missions transversales intéressant
l’ensemble des opérateurs, à travers des projets à vocation collective. Ainsi, le RAMA
a largement contribué à la création du groupement d’employeurs RAMAGE (devenu
AGEC, cf. 3.1.2) et s’est fortement mobilisé dans la déclinaison sectorielle des principes
de développement durable (8 festivals et plusieurs salles désormais concernés). Il
coordonne plusieurs autres actions collectives avec ses membres : risques auditifs
(avec la Rock School Barbey), centre ressources (avec le Krakatoa), l’éducation artistique
(avec l’Ampli et un relais par département), l’enseignement (avec le CIAM et AREMA
Rock & Chanson), action JMF en milieu scolaire (avec le Sans Réserve).
De manière plus précise, le RAMA a conduit en 2009 plusieurs actions :
- poursuite des actions coopératives déléguées à des membres du réseau (ressource,
prévention des risques auditifs, éducation artistique, action en milieu scolaire, enseignement et formation…),
(239) Cf. audition
de M. Christian MARMONNIER,
auteur et journaliste,
et de Mme Lucie BRAUD (ECLA),
le 14 septembre 2009.
(240) « Territoires musicaux en régions.
L’émergence des musiques amplifiées
en Aquitaine » Yves RAIBAUD – Maison des Sciences
de l’Homme d’Aquitaine,
2005.
(241) Avant Mardi en Midi-Pyrénées,
FRACAMA en région Centre,
le CRY dans les Yvelines,
MUSEAU en Champagne-Ardennes,
les pôles régionaux de musiques actuelles
de Haute-Normandie
et de Poitou-Charentes,
RAOUL en région Nord-Pas-de-Calais,
l’UDCM en Provence-Alpes-Côte d’Azur,
Zic-Zac en Lorraine.
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- développement des actions de développement durable, d’abord portée en direction
des festivals puis élargie à d’autres catégories d’acteurs, qui mobilise un CDD spécifique, avec le soutien de la Fondation de France, de la Fondation Nicolas Hulot, de
la DREAL et du Conseil régional d’Aquitaine,
- accompagnement du groupement d’employeurs RAMAGE et de la réflexion sur la
gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences, avec mise en place de formations
collectives (sécurité des lieux de spectacle en partenariat avec l’IRMA et l’IDDAC),
projet de transfert de savoir-faire avec les régions Centre et Pays-de-la-Loire et projet
« mobilité européenne » conduit avec la Chambre Régionale de l’Economie Sociale
et Solidaire (CRESS Aquitaine),
- développement de coopérations aux niveaux national et international, notamment
avec Pays-de-la-Loire (plate-forme des cafés-culture, observation, rapprochement
des réseaux ou pôles régionaux) et la région Centre (projets de coopération sur le
numérique, l’emploi culturel et le développement durable),
- action de réflexion sur l’économie créative, marquée notamment par la recherche
de projets et de coopérations (jeux vidéo, littérature et BD, arts graphiques…), sur
les TIC, la gouvernance, le renforcement des liens avec les universités…,
- projet spécifique sur le numérique, dans les domaines de la billetterie numérique,
des services aux professionnels (visioconférence, formation à distance, centrale de
référencement, logiciels professionnels…), les jeux vidéos, les médias numériques,
les technologies innovantes (réalité augmentée), les relations aux publics et les
réseaux sociaux, le croisement avec d’autres secteurs culturels et les nouveaux
modèles économiques.
Le RAMA a été chargé de la coordination en Aquitaine des concertations territoriales,
qui a représenté l’une de ses principales actions depuis 2006 (notamment sur la thématique du développement durable en 2009). La mise en œuvre de ces concertations
s’est inscrite dans une démarche de dialogue social territorialisé242, d’économie sociale
et solidaire243 et d’éducation populaire. Durant cette période, les thèmes abordés ont
concerné la ressource et l’information, les labels indépendants, la formation et la
transmission, les pratiques en amateurs, la coopération territoriale, les festivals et le
développement durable, les mutations de l’emploi culturel, les lieux de diffusion ou
encore les médias indépendants. Ces concertations doivent déboucher sur l’élaboration
d’un schéma territorial des musiques actuelles. A ce propos, le RAMA contribue à la
préfiguration de schémas d’orientation et de développement des lieux de musiques
actuelles, en cours de préparation, sur le département de la Dordogne, l’agglomération
paloise et celle de Bordeaux. Près d’une trentaine de réunions de concertation ont été
organisées, mobilisant plus de 1 200 participants. Elles se sont adressées à un public
élargi associant des services de l’Etat, des collectivités (dont agences culturelles),
des partenaires du secteur, des artistes et publics, des médias en région et opérateurs
culturels. Elles ont donné lieu à l’organisation de conférences-débats, ateliers, sessions
d’accompagnement et séminaires.
Le RAMA a établi des partenariats avec la CRESS Aquitaine, l’OARA (Office Artistique
de la Région Aquitaine), l’IDDAC, le Pôle Emploi culture-spectacle, l’Observatoire
régional de la culture, les associations Meduli Nature et Alternatiba. Il fait partie des
membres fondateurs du Centre de Ressource des Groupements d’Employeurs en
Gironde et participe à la FEPPIA.
Pour la période 2010-2012, le RAMA entend poursuivre les chantiers engagés et
approfondir certains axes, parmi lesquels :
(242) Dans l’esprit des dispositions
de la loi relative à la formation
professionnelle tout au long de la vie
et au dialogue social du 4 mai 2004.
(243) Conformément à la Charte
de la CRESS Aquitaine.
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- l’économie créative, dans une approche de « recherche-développement »,
- le numérique, par préfiguration d’outils et services au bénéfice du secteur,
- l’emploi culturel, sous l’angle de la mutualisation et de la GPEC,
- le développement durable, par une déclinaison économique (création d’un service
d’achats groupés), collaborative (festivals, lieux), territoriale (agenda 21 des acteurs
culturels), sociale (groupement d’employeurs) et prospective (projet de recherche
en lien avec l’IRMA sur les équipements son et lumière de haute technologie),
- l’accompagnement des acteurs (aide aux porteurs de projet via le pôle ressources,
en lien avec l’AGEC, la FEPPIA, la FARL, Méduli Nature, les Cafés-culture…),
- la communication et l’observation, en relation avec l’Observatoire régional, l’IDDAC
et l’outil documentaire national Réseaudocs,
- la poursuite des concertations territoriales, en développant le volet de sensibilisation des
publics, acteurs et partenaires publics sur les enjeux des musiques actuelles en région,
- les projets de coopération avec les adhérents.
Pour accomplir cet ensemble de missions, le RAMA dispose d’un budget de l’ordre de
150 000 € (dont 80 % de subventions) et mobilise 4 salariés (2,8 ETP). Ces ressources
restent encore limitées face à la diversité et à l’importance de ce travail de structuration,
d’animation, de conseil et de réflexion collective244, d’autant qu’une partie des emplois
aidés et des besoins nécessiteront à court terme (fin 2010/2011) de trouver des
financements complémentaires.
Si l’ancrage territorial des pratiques et des activités liées aux musiques actuelles est bien
une réalité en Aquitaine, leur structuration à l’échelle territoriale reste encore récente.
Par ailleurs, malgré la multiplicité des initiatives, des ressources et des compétences
mobilisées, rares sont les collectivités (et non des moindres) qui jusqu’à aujourd’hui ont
réellement ou suffisamment perçu à la fois les enjeux et les opportunités de ce secteur
pour la dynamique de développement de leur territoire. Au-delà du soutien classique à
des équipements ou à des événements, on devine assez bien certains effets de « système »
que pourrait entraîner une véritable stratégie de valorisation de ce que certains
chercheurs ont qualifié « les petites fabriques de territoire245 ».
Jusqu’à aujourd’hui pourrait-on dire, car les conclusions de certains travaux réalisés au
plan international et national ont ouvert de nouvelles pistes, plus ou moins bien
appropriées par certaines collectivités. Ces pistes portent sur la « mise en musique » de
concepts, ceux d’économie créative et d’industries créatives qui se sont propagés au
plan international depuis le début des années 2000.
4.3 Pour quels « territoires créatifs ? »
ou la « mise en musique » des territoires
Le 10 mai 2010, une réunion du Conseil des Ministres de la culture européens marquait
la reconnaissance du rôle de la culture dans le développement régional, considérée
comme un investissement stratégique car source de créativité et d’innovation246. Cette
position officielle s’est appuyée sur les résultats du Livre vert relatif à la « libération du
potentiel des industries culturelles et créatives » et des expériences conduites dans plusieurs
villes et régions européennes (ex : Lille, Liverpool, Bilbao, Marseille, Essen, Lens, Glasgow…).
Les priorités définies par le Conseil visent à « intégrer la culture dans les politiques de
développement local et régional » et à favoriser à cette échelle « un environnement
propice à un meilleur développement des industries culturelles et créatives, s’agissant
notamment des PME ».
(244) Le nombre d’heures
supplémentaires réalisées en 2009
par les permanents du RAMA
(> 1 100 heures dont plus
de 1 000 heures non rémunérées)
en est une illustration.
(245) « Territoires musicaux en régions.
L’émergence des musiques amplifiées
en Aquitaine » Yves RAIBAUD – Maison des Sciences
de l’Homme d’Aquitaine, 2005.
(246) Cf. « Conclusions du Conseil sur
l’apport de la culture au développement
local et régional » - Conseil de l’Union
Européenne ref. 8263/10.
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Le concept d’économie créative est issu de travaux de recherche anglo-américains, dont
certains ont pu être contestés dans le monde scientifique247. Il recouvre une approche
très large de la notion de créativité. De manière plus réductrice, certains en France font
plutôt référence à « l’économie de la culture » ou à la « nouvelle économie de la culture », soit
de l’économie générée par le secteur culturel dans lequel s’inscrivent les musiques
actuelles. Ce concept d’économie créative s’est fortement inspiré d’un autre concept
apparu à la fin des années 1990 en Grande-Bretagne248, celui d’industries créatives ou
industries (au sens de « secteur » ou de « filière ») dans lesquelles le produit final est un
objet de création249, à l’interface des arts, de la culture, des affaires et de la technologie.
Des travaux ultérieurs250 ont permis de préciser peu à peu les contours de ces concepts,
plaçant la création artistique et culturelle au cœur du système.
De fait, le champ des musiques actuelles relève bien de ce noyau dur des industries
créatives. Un second cercle est composé d’autres activités connexes mobilisant la
créativité (architecture, design, publicité, édition, recherche…), auquel s’ajoutent les
industries du goût et celles des loisirs au sens large. La principale idée associée à ces
concepts est que la culture est au cœur du développement. Cette vision est cependant
assez biaisée sinon réductrice car elle tend à instrumentaliser la culture en n’en
reconnaissant que l’une des dimensions à savoir celle de la valorisation marchande de
biens et services culturels. Or, toute l’analyse qui précède démontre les enjeux sociaux
(individuels et collectifs, en référence aux processus d’individuation et de transindividuation déjà évoqués – cf. chapitre 2.2) et plus largement de développement artistique,
culturel, éducatif, territorial associés aux activités culturelles, particulièrement ici aux
musiques actuelles.
Néanmoins, cette approche se heurte à plusieurs difficultés : on ne sait pas vraiment mesurer
la valeur des actifs immatériels, la contribution intangible directe ou indirecte (comment
mesurer la créativité, l’inventivité, l’innovation ?), et plus généralement ce que les
experts désignent en termes d’externalités positives ou encore de bien-être collectif251.
Les travaux de recherche sur l’économie créative ont néanmoins rencontré un certain
succès auprès de différentes instances internationales (CNUCED, UNESCO, Conseil de
l’Europe, Commission Européenne). Ainsi, un réseau des « villes créatives » a été lancé en
2004 par l’UNESCO, qui regroupe actuellement une vingtaine de villes (dont Lyon en
France sur l’art numérique). Ces villes participent à une « alliance globale pour la diversité culturelle » et l’objectif affiché d’un tel réseau est de constituer des « clusters » (ou
grappes) de villes créatives.
La position du Conseil des Ministres européens de la culture s’inscrit dans cette même
mouvance. L’Union Européenne avait déjà fait de l’année 2009 celle de la créativité et de
l’innovation, cette initiative prenant place dans le cadre de la préparation de la stratégie
européenne « UE 2020 ».
En France, certains observateurs considèrent que l’on assiste à une découverte assez
« naïve » de ces concepts d’économie créative ou d’industries créatives, qui apparaissent
de plus en plus dans la rhétorique des politiques publiques. Des interlocuteurs ont
souligné le risque que les acteurs publics, séduits par ces nouveaux concepts, ne jurent
que par un développement reposant sur cette économie créative, alors que c’est le
développement économique et social qui à l’échelle d’un territoire permet le développement d’activités artistiques ou culturelles252.
Pour autant, on commence à repérer des initiatives qui témoignent des potentialités
de cette approche, par exemple par la création d’activités au croisement du numérique,
de la culture et du design (cf. l’exemple déjà mentionné du groupe SmartSystem,
qui associe dans une démarche collaborative industriels, chercheurs et artistes sur des
projets de réalité virtuelle).
(247) Notamment les travaux
de Richard FLORIDA publiés en 2002
sur le concept de « creative class ».
(248) Travaux du Department
of Culture, Media and Sport, 1998.
(249) Cf. « L’AlphaBEM des industries
créatives », sous la direction d’Anne
GOMBAULT, Florine LIVAT-PÉCHEUX
et François DURRIEU –
Bordeaux École de Management, 2009.
(250) Dont ceux du chercheur australien
David THROSBY.
(251) Cf. à ce sujet les travaux
de l’économiste indien Amyarta SEN
sur l’économie du bien-être.
(252) Cf. audition
de Mme Anne GOMBAULT
et de Maud DERBAIX, Chaire Arts,
Culture et Management en Europe
de Bordeaux École de Management,
le 19 mai 2010.
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Des rapports et travaux récents soulignent les enjeux de la créativité et de l’innovation
pour les territoires et les conditions ou facteurs permettant de qualifier des territoires
« créatifs ». Un rapport du Conseil d’Analyse Économique et de la DATAR sur la créativité
et l’innovation dans les territoires253 révèle la portée des univers imaginaires et symboliques
dans l’innovation à l’échelle territoriale tout en mettant en exergue plusieurs facteurs
permettant à des territoires de devenir créatifs.
Art
Goût
de l’insolite
Initiative Réseaux
Confiance
Culture
Entrepreneuriat
Imagination
Communautés
de pratique
Prise de risque
CRÉATIVITÉ
GOUVERNANCE
Délégation
Expérimentation
Décentralisation
Dépenses de recherche
dans les firmes
et les pays
Tolérance
DÉCOUVERTES
Débat
Mobilité
Formation
Curiosité
Rêve
IDÉES
ÉCOSYSTÈME
CRÉATIF
Progrès
et amélioration
des conditions
de vie
Ex : roue, effet de levier
PROJETS
INVENTION
INNOVATION
TECHNIQUE, ORGANISATIONNELLE
FINANCIÈRE, MARKETING, ETC.
Invention industrialisée
et mise sur le marché
Ex : brouette
Idée répondant
à un besoin
non satisfait
Ex : roue qui tourne
autour d’un axe,
levier
La spirale de l’innovation
Source : CAE/DATAR, 2010
Le premier de ces facteurs est la capacité des territoires à entretenir un lien étroit avec
l’art ou la culture de manière plus générale. Le second facteur est la nécessaire tolérance
(aussi bien des institutions que de la société civile) à l’égard de la transgression ou de
la diversité. Cette ouverture et cette diversité sont indispensables pour permettre le
« frottement » interculturel et les échanges.
Par ailleurs, « Pour innover, il est souvent nécessaire de disposer d’une liberté que ne
laissent pas des règles administratives contraignantes » et il serait opportun à cet effet
d’instaurer une forme « d’élasticité réglementaire »254. Enfin, la créativité des territoires
repose sur la sociabilité, les occasions de rencontre et l’émulation. Pour s’exprimer sur
les territoires, la créativité a donc besoin d’une combinaison de talents, de tolérance à
la déviance et de population aux capacités créatives diversifiées255. Cette approche
impose également la recherche de nouveaux modes d’enseignement plus aptes à
susciter la curiosité et l’initiative qu’à développer l’accumulation de connaissance ou
de savoir rationnel256.
La créativité territoriale dépend aussi de la densité de ressources (humaines) et d’aménités
(cadre de vie, équipements culturels et de loisirs). Enfin, la mise en chantier d’un
territoire créatif suppose la définition d’un projet construit non pas sur la juxtaposition
d’initiatives éparses mais d’un projet global intégrant toutes les dimensions du développement durable et une démarche de valorisation culturelle approfondie257. Enfin, la
gouvernance créative ne peut faire l’impasse sur les « personnalités » jouant un rôle de
médiateur, ni sur les démarches de démocratie participative.
(253) « Créativité et innovation
dans les territoires » Rapport du groupe de travail présidé
par Michel GODET – CAE, DATAR,
Académie des Technologies, mai 2010.
(254) Cf. proposition de dispositif ECRIN
(Espace Concerté de Réalisation
Innovante) formulée par Gérard BARRAS,
dirigeant d’entreprise du secteur
coopératif (Ardelaine).
(255) Richard FLORIDA évoque une règle
des trois « T » :
talent, tolérance, technologie.
(256) Cf. à ce sujet les travaux
de François TADDEI sur l’éducation
et la créativité (« Training creative
and collaborative knowledge-builders,
a major challenge
for 21st century education »,
OCDE, février 2009).
(257) Voir à ce propos la contribution
de Stéphane CORDOBES
et Raphaëlle DUCRET
« Le « territoire créatif » : nouveau
modèle ou utopie ? » dans le cadre
du travail conjoint CAE/DATAR
et référence aux travaux
de Christian LEMAIGNAN
de l’Université de Poitiers.
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Cette approche est utilement complétée par certains travaux portant plus précisément
sur la dynamique des réseaux sociaux à l’échelle territoriale, autour des notions
« d’encastrement social » et « d’encastrement territorial » de l’innovation258. Le schéma
ci-après synthétise la thèse qui alimente ces travaux.
Réseau social
Territoires
performants
Confiance
Performance
territoriale
Capital social
Innovation
Créativité
Source : Raphaël SUIRE.
Elle repose sur l’hypothèse d’une combinaison de réseaux de proximité ou liens forts (les
« petits mondes » ou les « cliques sociales») et de réseaux à distance ou liens faibles, par
lesquels s’effectue essentiellement la captation de l’information et de l’innovation venue
de l’extérieur. Cette combinaison est déterminante dans l’émergence de territoires créatifs.
L’analyse plus spécifique du lien entre culture-créativité et la dynamique économique du
territoire s’appuie enfin sur quelques constats. La géographie des activités innovantes
met en évidence le lien existant sur un temps long entre innovation et regroupement.
Autrement dit, le territoire se délite d’autant plus vite que le maillage n’existe pas.
L’encastrement dans un collectif et les réseaux d’acteurs préviennent le risque de délocalisation
et favorisent l’innovation collective. Toutefois ce maillage ne suffit pas à lui seul pour
permettre au territoire de devenir créatif. Le « bon » maillage est d’abord celui qui
décloisonne les pratiques. Innover et être créatif suppose d’aller vers l’autre.
Or, les arts de manière générale constituent déjà un bon terrain d’expérimentation des
pratiques hybrides259. La structuration d’un réseau créatif passe par plusieurs étapes :
- d’abord celle d’échanges spontanés qui se forment par affinités entre acteurs dispersés
sans véritable réseau,
- dans une deuxième phase, un ou quelques acteurs émergent (souvent des individus très
impliqués ou emblématiques), jouant un rôle centralisateur : un réseau « hub&spoke »
se hiérarchise,
- La troisième phase est celle d’une stabilisation, avec coexistence de plusieurs « hubs »
et réseaux qui peuvent éventuellement coopérer,
- La dernière phase est celle du maillage général avec un noyau dur stable et structuré
et une périphérie plus à la marge jouant un rôle explorateur.
A ce stade, l’organisation du système des musiques actuelles offre, au moins potentiellement,
un espace d’expérimentation sur la manière dont s’organise un territoire créatif, autour
de trois couches étroitement liées :
- « l’underground » ou partie périphérique et exploratoire du réseau. C’est souvent un
collectif informel, peu visible qui se coordonne autour des lieux et par bouche à oreille,
- le « middleground » qui rassemble les intermédiaires du réseau, souvent au contact
de l’underground, en capacité d’identifier, de repérer, de révéler. La rencontre se fonde
en amont sur la fréquentation des lieux et en aval sur l’exposition à travers des scènes.
Plus le réseau est multiple ou hétérogène, plus les sous-communautés sont diverses.
(258) Cf. travaux de Raphaël SUIRE,
chercheur de l’Université de Rennes1
(UMR CNRS 6585) et membre
du Môle Armoricain de Recherche
sur la Société de l’Information
et les usages d’Internet (MARSOUIN) :
« Des réseaux de l’entrepreneur
aux ressorts du créatif :
quelles stratégies pour les territoires ? »,
PUQ, 2004.
(259) Cf. le cas exceptionnel
de la ville de New York.
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- « l’upperground » est le cœur du réseau (institutions ou grands groupes) qui exploite et
valorise sur les marchés, par repérage et combinaison, des productions du middleground.
La dynamique et les connaissances créatives ne peuvent émerger et se développer que
si l’underground, le middleground et l’upperground travaillent ensemble dans le même
espace créatif et physique.260
En conséquence, la créativité à l’échelle territoriale est un processus collectif, qui se
construit dans une « diversité reliée » (ou « related variety »), avec des communautés
décloisonnées. Elle dépend aussi de la manière dont est gérée la distance cognitive
(capacité des acteurs à s’entendre) et d’une structuration cœur/périphérie. Elle repose
sur la qualité des relations établies entre les diverses couches de créativité
(underground/middleground/uppergroung) et sur l’existence de lieux où se tissent les
liens faibles, le territoire devenant une « fabrique à idées ». C’est également dans cette
approche que peut s’inscrire la combinaison des 3 « T » développée par Richard
FLORIDA (talents/tolérance/technologie), à partir d’une recherche sur l’attractivité du
capital humain qualifié (ce que ce même chercheur a désigné en tant que « classe
créative ») et sur l’utilisation de certains outils statistiques.261
Sur cette base, il apparaît que les lieux culturels et les artistes qui les animent sont des espaces
où se noue de l’actif spécifique et relationnel qui constitue un facteur de rétention. Ils
peuvent devenir des facteurs d’attractivité pour cette même catégorie d’acteurs.
Une illustration par contraste de cette approche théorique a été présentée à partir du
cas de la ville de Rennes. Entre 1975 et 1990, cette ville s’est caractérisée par une forte
culture de l’underground et du middleground (artistes locaux, labels, lieux), contribuant
à créer une scène rennaise marquée par une culture bottom-up. Une phase d’institutionnalisation est survenue entre 1990 et 2000, avec un festival (les « Trans Musicales ») qui
s’ouvre mais en délaissant peu à peu l’underground et le middleground locaux, qui
s’épuisent. De fait, entre 2000 et 2010, la réglementation conjuguée à l’étouffement des
places locales par une offre institutionnelle dans une logique top-down, avec l’illusion
d’une trajectoire acquise, a provoqué la disparition de l’underground local, parti explorer
d’autres territoires. L’upperground n’était plus connecté à l’underground. Un espoir renaît
en 2010, avec la création d’un nouveau festival (le « Breizh Entropy Festival »). Cet événement se distingue par une thématique large et inter-disciplinaire (création et culture
libre), par une expression originale (concerts, conférences, ateliers, performances) et par
une réappropriation des lieux et du format par l’underground, traduisant une forme de
résilience du territoire. Cette première édition a rencontré un certain succès et a même
créé un mini-buzz… aux Etats-Unis. D’autres villes en France, comme Nantes ou
Clermont-Ferrand, ont su cultiver ce terreau de créativité de l’underground.
Selon plusieurs observateurs, le système des musiques actuelles constitue potentiellement
un espace fertile d’émergence, de développement et d’attractivité pour des territoires
créatifs, combinant arts, culture ou talents au sens large, et technologie. Cette analyse
exprime d’une autre manière la valeur d’innovation associée aux musiques actuelles :
innovation artistique, innovation sociale, innovation technologique, innovation territoriale
enfin.
(260) Cf. audition de Raphaël SUIRE,
le 25 mai 2010.
(261) Richard FLORIDA a ainsi
défini plusieurs indicateurs ou indices :
l’indice « bohème » (nombre d’artistes,
% de population de jeunes adultes
dans la tranche 22-29 ans,
nombre de bars ou boîtes,
infrastructures culturelles),
l’indice du talent
(nombre de personnes qualifiées,
par exemple de niveau bac+3 et plus),
l’indice de diversité ou d’ouverture
(% de population locale étrangère
ou de population homosexuelle),
l’indice de concentration en activités
de haute technologie.
Le panorama des pratiques et des activités liées aux musiques actuelles en Aquitaine
témoigne de la vitalité de ce secteur. Les inquiétudes provoquées par la crise de
l’économie du disque et les mutations engendrées par les technologies numériques
obligent les opérateurs à une remise en question par rapport aux schémas encore
en vigueur du modèle économique. Cela les place, nécessairement, dans une position
de changement ou d’adaptation qui favorise les regroupements.
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La structuration relativement récente des acteurs au niveau régional, malgré une relative
précarité de moyens, associée à la mise en place des concertations territoriales,
contribue à tisser des « liens forts » au niveau régional. Elles donnent un cadre à
l’instauration de connections indispensables et élargies entre les différentes couches
de créativité (underground/middleground/upperground), mais ce travail reste encore
à approfondir par un élargissement des réseaux ou sous-communautés existantes.
Si le système des musiques actuelles dans une logique apparentée à l’économie créative
a commencé à s’organiser au niveau régional (RAMA, FEPPIA), notamment grâce au
soutien du Conseil régional d’Aquitaine, qu’en est-il à l’échelle des territoires infrarégionaux ?
Si l’on se réfère aux différents paramètres qui caractérisent les territoires créatifs,
l’Aquitaine n’offre pas encore d’expérience locale susceptible de répondre à cette
définition et ce malgré l’existence de ressources diversifiées (lieux dédiés, événements…),
soit d’un vrai potentiel à partir des musiques actuelles.
Des observateurs interrogés ont identifié plusieurs obstacles à ce niveau :
- d’abord la prédominance d’une logique d’institutionnalisation plutôt que de
participation ou de co-construction avec le milieu artistique, à savoir des pratiques
qui privilégient souvent le schéma « top-down » plutôt que le « bottom-up »,
- la co-existence de réseaux fermés, plutôt qu’ouverts, traduit des difficultés à gérer
les « distances cognitives » et à développer des démarches collaboratives,
- la persistance d’une logique de position acquise par rapport à une logique d’innovation,
- la préférence accordée à la mesure et le rejet de la démesure, c’est-à-dire une limite
constatée du facteur de tolérance à la déviance ou à ce qui se joue sur les marges.
Ainsi, la tendance majoritairement constatée dans les politiques publiques locales
consiste à privilégier les infrastructures ou les grands événements là où il faudrait
davantage favoriser les supports à la création, l’identité territoriale et adopter une
stratégie autour de la dynamique créative.
Ce constat en apparence sévère, même s’il appelle quelques nuances, justifie
quelques éclairages. Le territoire régional qui détient le meilleur potentiel est sans
réelle surprise celui de l’agglomération bordelaise :
- Par son poids et sa structure démographique (dont sa diversité ou les origines
plurielles de la population) tout d’abord,
- par ses ressources culturelles (lieux ou équipements, universités et centres de
recherche, identités plurielles) ensuite,
- par son histoire (dont celle associée à l’émergence et à la vitalité d’une scène « rock »
au sens large à Bordeaux262),
- enfin par la présence de personnes ressources jouant un rôle moteur, porteurs
d’initiatives, et celle d’un tissu d’entreprises clairement positionnées dans le champ
des industries créatives.
Bordeaux dispose d’un véritable gisement propice à l’affirmation d’un projet d’envergure
basé sur la créativité, à partir de ce système associé aux musiques actuelles. Le potentiel
existe donc mais pas encore le projet global de nature à le valoriser. Il semble depuis
peu qu’une prise de conscience se soit opérée dans le proche environnement des
décideurs publics. Les signaux de cette prise de conscience sont apparus dans le cadre
de plusieurs travaux récents :
« Du côté de l’attractivité de la vie culturelle, malgré son engagement financier, Bordeaux ne
semble pas pouvoir se targuer d’un rayonnement majeur identifié à son territoire. Pourtant
(262) Cf. à ce sujet le remarquable
ouvrage collectif « Bordeaux Rock(s) »,
Denis FOUQUET,
Editions du Castor Astral, 2007.
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il est une filière complète qui, sous condition d’une attention accrue, pourrait rapidement
constituer une référence locale de portée internationale : les musiques actuelles. »263
« Déployer et revendiquer une politique renforcée d’accompagnement, de collaboration et
de développement de la filière musiques actuelles est certainement le moyen le plus rapide,
efficace, et le moins coûteux, d’inscrire définitivement ce territoire parmi ceux offrant une
scène culturelle créative, préalable à la réussite d’un investissement du territoire plus
général autour des économies créatives. »264
Un déclic symbolique semble s’être produit à l’occasion de la candidature de
Bordeaux au projet de Capitale Européenne de la Culture, marqué par la constitution
d’une association et une forte mobilisation des acteurs et de la population, au-delà
même de l’agglomération :
« C’est pourquoi nous n’entendons pas faire de la culture un vase clos mais l’affirmation de
la rencontre de plusieurs mondes : monde artistique, économique, numérique, universitaire,
associatif… Et géographiques ! C’est pourquoi nous souhaitons impliquer et toucher un
vaste public et travailler sans exclusive. »265
L’échec de ce projet a eu du mal à maintenir la dynamique collective engagée. La programmation par la ville d’un nouvel événement culturel voulu d’envergure
(« Evento ») n’a pas suscité le même engouement, les acteurs culturels locaux se considérant laissés trop à l’écart de ce projet. Un exemple type de démarche « top-down »
qui n’a pu ré-enclencher, du moins à ce stade, le processus d’appropriation collective
qui fut obtenu lors de la candidature Bordeaux 2013.
Pour autant, le secteur des musiques actuelles s’exprime avec beaucoup d’intensité
sur Bordeaux et son agglomération : prolifération de groupes locaux, richesse de la
programmation des lieux à tous les niveaux (underground/middleground/upperground),
dynamisme de certaines associations gestionnaires de lieux ou organisatrices de
concerts, diversités des activités supports (producteurs, labels, structures d’apprentissage et d’accompagnement d’artistes ou groupes, technologies, recherche). Malgré
ces atouts objectifs, Bordeaux reste en panne d’imaginaire ou de projet collectif en
tant que territoire créatif porté sur les musiques actuelles.
Si l’on reprend les éléments d’analyse critique apportés par certains observateurs, il
est possible de cerner la nature des blocages rencontrés :
- Institutionnalisation/participation : la volonté de la collectivité de se doter d’une image
culturelle de dimension internationale l’incite à mobiliser des ressources extérieures
et à s’appuyer préférentiellement sur certaines institutions locales en négligeant les
liens avec les acteurs culturels de terrain et la population. Une telle démarche ne
permet pas de créer une adhésion collective suffisante au niveau local pour construire
un véritable territoire créatif.
- Réseaux fermés/réseaux ouverts : les 3 couches de créativité existent bien à l’échelle
de l’agglomération bordelaise, mais elles ne communiquent pas assez. La densité des
liens entre « underground », « middleground » et « upperground » n’est pas suffisante
pour créer un effet de masse cohérent. Chaque réseau d’acteurs a tendance à fonctionner en vase sinon clos ou du moins semi-clos, parfois en raison de relations
dégradées entre « leaders ». Des liens s’opèrent entre réseaux mais à l’intérieur des
couches (notamment au sein de l’underground ou du middleground). Le système
bordelais des musiques actuelles se situe donc pour l’heure dans une phase demistabilisée de coexistence de réseaux non encore maillés.
- Rente/innovation : l’offre culturelle de l’agglomération bordelaise en général et de
Bordeaux en particulier est dominée par la présence de grandes institutions culturelles
(ex : ONBA, TNBA, Conservatoire, CAPC, Musées…) qui mobilisent l’essentiel des moyens
(263) « L’économie créative :
une introduction »,
Institut des Deux Rives, 2009.
(264) « Bordeaux l’Aquitaine, territoire
créatif – Un écosystème
et une plateforme pour les économies
créatives » - José DARROQUY
pour le compte de l’association
Bordeaux 2013.
(265) Cf. préambule
du dossier de candidature
de Bordeaux 2013.
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de la collectivité en matière culturelle. Ce constat n’est pas propre à Bordeaux et se
retrouve au plan national, mais la force inertielle induite par ces grandes structures
culturelles limite le champ de l’innovation faisant appel aux ressources diversifiées,
plus ou moins saisissables, des acteurs impliqués dans les musiques actuelles.
- Mesure/démesure : Bordeaux conserve une certaine image élitiste et de pondération,
assez éloignée des postures parfois radicales portées par les musiques actuelles. Pour
le dire avec les termes employés plus haut, elle a encore du mal à tolérer les
déviances supposées (plus qu’avérées) associées à la créativité des musiques actuelles.
Cette difficulté tient certainement pour partie à une méconnaissance de la réalité
des musiques actuelles telle qu’elle ressort du panorama dressé dans ce rapport.
Encore faudrait-il qualifier ces déviances (le bruit ? l’alcool ? la drogue ? les jeunes ?
les tenues ou les paroles qui choquent ?). Ce serait ignorer tout le travail qui s’opère
en amont dans la plupart des lieux, par un grand nombre d’acteurs.
La précarité d’exercice de l’activité de certains lieux de ce territoire, marquée par des
arrêts d’activité (ex : le 4Sans prochainement pour lequel les collectivités n’ont pu
trouver de solution de repli) ou par les difficultés rencontrées de certains bars-culture
ajoutent à ces obstacles.
En conclusion Bordeaux et son agglomération disposent de réels atouts pour coconstruire un véritable projet de ville créative s’appuyant sur les ressources existantes
dans le champ des musiques actuelles (équipements, outils, compétences, associations,
entreprises, citoyens). De nouvelles infrastructures vont prochainement contribuer à
renforcer encore ce potentiel (ex : Arena, Rocher de Palmer, M.I.B.). Des projets ou
envies nouvelles portées par les opérateurs locaux ne manquent pas (ex : Triangle
Noir, festival électro, festival rock sur le campus…). Des travaux conduits par le
Conseil de Développement Durable de la Communauté Urbaine de Bordeaux sur
la question de l’identité266 ou de la culture267 révèlent l’intérêt d’un récit dans la
construction d’une identité territoriale et d’identités ouvertes porteuses d’innovation
et de progrès social268. Ces composantes de l’imaginaire d’un territoire sont reconnues
comme des paramètres déterminants pour les territoires créatifs. Les musiques
actuelles peuvent, à l’échelle de cette agglomération voire plus largement (zone
urbaine) offrir un support privilégié par le bouillonnement créatif qu’elles alimentent
et pour les raisons évoquées précédemment. Une réflexion est en cours relative à un
schéma d’orientation pour le développement des musiques actuelles sur ce territoire.
Il y aurait matière à l’accompagner de la mise en œuvre d’une concertation territoriale
offrant un espace élargi de discussion et de réflexion, susceptible de « mailler » les divers
projets et initiatives dans un projet d’économie créative plus global et stratégique.
Du MOMA de New York au « BOMA269 » bordelais, une utopie ?
D’autres territoires infra-régionaux entretiennent de vraies dynamiques d’animation
et de structuration territoriale autour des musiques actuelles, en dépit de ressources
plus limitées. C’est par exemple le cas à partir de la dynamique créée par certains
festivals (ex : Musicalarue en Haute Lande ou encore le Reggae Sun Ska en Médoc et
Garorock à Marmande). Le Pays Basque et le sud des Landes disposent aussi d’un
potentiel qui s’alimente du croisement entre musiques traditionnelles et musiques
amplifiées. Les réflexions en cours en Dordogne et dans l’agglomération paloise
relatives à la définition de schémas d’orientation et de développement des musiques
actuelles (SOLIMA) peuvent ouvrir de nouvelles perspectives. L’intérêt de ces
dynamiques est qu’elles sont portées par les acteurs sur les territoires. La répartition
des lieux de diffusion (scènes de musiques actuelles, festivals) et des structures
d’accompagnement pose donc déjà les bases d’un système aquitain des musiques
(266) « Identité de l’agglomération
ou agglomération d’identités –
Radioscopie du territoire bordelais » C2D / Communauté Urbaine
de Bordeaux – Mai 2010.
(267) Travail en cours au moment
de la rédaction de ce rapport.
(268) Cf. contributions
d’Olivier MONGIN et Guy DI MEO
au travail du C2D sur l’identité
de l’agglomération bordelaise.
(269) Bordeaux ville Ouverte
aux Musiques Actuelles.
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actuelles qui légitime la poursuite des concertations territoriales à l’échelle régionale
et devrait conforter dans ses missions l’outil d’animation, de coordination et d’appui
à l’innovation que constitue le Réseau Aquitain des Musiques Actuelles (RAMA).
Face aux enjeux posés en termes de pratiques, d’innovation et aux opportunités identifiées, la reconnaissance et le soutien des musiques actuelles par les politiques publiques
sont essentiels. L’intervention publique est l’une des conditions au maintien d’une offre
culturelle diversifiée et la plus largement accessible. Elle est aussi l’une des clés de la
pérennité économique d’activités dont le modèle repose fondamentalement sur un
principe d’hybridation des ressources, combinant économie marchande, économie non
marchande et soutien public. L’émergence d’une culture inventée au quotidien et la
dimension symbolique des formes d’expression liées aux musiques actuelles participent
aussi, on l’a souligné, à la construction des individualités. Pour reprendre les propos d’un
ancien directeur régional aux affaires culturelles qui a marqué son passage pour les
acteurs concernés, « on ne peut laisser cette question aux seules mains du marché. »270
Un argument dans ce sens, de portée plus générale, est apporté par l’article 8 de la
Déclaration Universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle, le classement UNESCO
constituant un autre élément de la symbolique rattachée à plusieurs territoires aquitains
(dont Bordeaux) :
« Face aux mutations économiques et technologiques actuelles, qui ouvrent de vastes
perspectives pour la création et l’innovation, une attention particulière doit être accordée à
la diversité de l’offre créatrice, à la juste prise en compte des droits des auteurs et des artistes
ainsi qu’à la spécificité des biens et services culturels qui, parce qu’ils sont porteurs d’identité,
de valeurs et de sens, ne doivent pas être considérés comme des marchandises ou des biens
de consommation comme les autres ».
4.4 Politiques publiques en région, territoires
et musiques actuelles : un autre terrain pour l’innovation
Le rapport commandité par le Ministère de la Culture et de la Communication à
l’Inspection générale des affaires culturelles et publié en juin 2006 soulignait les enjeux
artistiques, sociaux et économiques liés au secteur des musiques actuelles, concluant à
une insuffisante prise en compte par les pouvoirs publics271.
Il faut rappeler que l’élargissement aux « musiques amplifiées » des champs d’interventions
culturelles des pouvoirs publics s’est heurté à beaucoup de résistances car « il a paru
transgresser les limites de la sphère légitime de l’action publique. »272
Depuis 1959, date de la création d’un Ministère de la Culture, la politique de l’Etat en
matière culturelle est guidée par une compétence essentielle, à savoir la sélection des
productions culturelles méritant d’être reconnues comme « œuvre de l’art et de l’esprit »
ou pouvant détenir une place « capitale pour l’Humanité », autrement dit par une vision
de culture universelle opposable aux « usines à rêves ». Un demi-siècle s’est écoulé, la
société a profondément changé depuis, mais cette approche reste toujours fortement
ancrée dans la tradition politico-administrative française.
C’est au début des années 1980, sous le Ministère Jack LANG, qu’une première impulsion
fut donnée à la politique culturelle de l’Etat en faveur des musiques « amplifiées »
(cf. 1.3). La première édition en 1982 de la « Fête de la musique » (également dans
l’esprit « faites » de la musique) libère dans l’espace public des villes françaises des
milliers de groupes « rock ». C’est dans la foulée de ce mouvement qu’un « réseau
rocks » est créé fédérant plusieurs associations puis un Centre d’Information du Rock et
des variétés (CIR), devenu depuis l’IRMA. Une autre étape importante, bien que non
(270) Cf. audition
de M. Jean-Michel LUCAS,
le 20 avril 2009.
(271) « Rapport sur le soutien
de l’État aux musiques actuelles » Michel BERTHOD et Anita WEBER,
inspecteurs généraux – Juin 2006.
(272) Cf. « Éléments pour une histoire
des politiques publiques en faveur
des musiques amplifiées » Philippe TEILLET – Université d’Angers
(CRAP-ESA CNRS 6051), 2002.
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limitée aux musiques actuelles, sera en 1985 la publication de la loi sur les droits voisins,
qui fondera la gestion déléguée d’un intérêt général aux professionnels via les sociétés
civiles (SACEM, ADAMI, SPEDIDAM, SCPP, SPPF). Parallèlement, un Fonds pour la
Création Musicale et un Fonds de soutien pour la chanson, les variétés et le jazz,
alimentés par une taxe parafiscale sur les recettes de spectacles, ont été mis en place.
L’année 1989 est une autre date clé, marquée par la présentation d’un plan « rock » élaboré
par le Ministère de la Culture273, qui débouchera notamment sur la création du Fonds
d’Action et d’Initiative Rock (FAIR), créé afin d’aider au démarrage de carrière d’artistes
ou groupes musicaux français (une quinzaine par an sur 400 demandes en moyenne).
C’est également à cette occasion que seront lancés un plan « zéniths », un plan « labels »
et que sera mise en place une agence des petits lieux musicaux qui a permis l’aménagement de 200 salles sur l’ensemble du territoire national. Durant cette période, sera
parallèlement engagée une initiative en faveur des cafés-musique, avec l’objectif de
création d’une centaine de projets co-financés par le Ministère de la Culture, la
Délégation Interministérielle pour la Ville et le Fonds d’Action Sociale pour les immigrés.
Ce programme sera abandonné en 1995 au profit des Scènes de Musiques Actuelles (SMAc).
Au début des années 1990, cette dynamique culturelle subit les effets de la crise et de
l’attention politique accrue portée sur la situation sociale de certains quartiers urbains.
C’est alors la politique de la Ville qui prend le relais, instrumentalisant d’une certaine
manière la politique culturelle dans la lutte contre l’exclusion sociale.
Il faut attendre 1995 pour qu’une politique en faveur des musiques « actuelles » soit
remise à l’ordre du jour, notamment à l’occasion des premières Rencontres nationales
« politiques publiques et musiques amplifiées » qui se tinrent à Agen. Cette période a
également été marquée par la naissance de plusieurs fédérations d’acteurs : FAMDT
(1985), réseau « Chaînon » (1987), FNEIJMA et Zone Franche (1990), Férarock (1991),
AFIJMA (1993), FEDUROK (1994), Allumés du Jazz, FSJ et Technopol (1996). Cette nouvelle
politique sera essentiellement marquée par la création du label national des Scènes de
Musiques Actuelles (SMAc – cf. 3.2.4), plus ou moins bien accueilli par les professionnels
par défaut de concertation et dont la circulaire sera revue en 1998. Cette année-là, le
Ministère met en place une Commission nationale pour les musiques actuelles qui mobilisa
une soixantaine de professionnels durant plusieurs mois et qui remit un rapport
exprimant quatre idées-clés : reconnaissance, proximité, pluralisme et rééquilibrage.
Cette mobilisation ne fut pas suivie de l’accroissement attendu des moyens dévolus aux
musiques actuelles. C’est à ce moment que se créent de nouvelles structures fédérales
ou syndicales (Syndicat des Musiques Actuelles, UFISC).
En 2004, dans le prolongement de la crise de l’intermittence du spectacle, Mme TRAUTMANN a décidé la mise en place d’une concertation sur les musiques actuelles, quelque
peu sous la pression du secteur face à la volonté du Ministère d’accorder la priorité à des
équipements structurants de type SMAc et appelant à la définition d’une politique
culturelle globale en faveur des musiques amplifiées. Cette concertation nationale a
produit un plan « Pour une politique nationale et territoriale des musiques actuelles ».
Celui-ci préconise, entre autre, la mise en place de concertations territoriales. Cela sera
complété par une initiative parallèle des acteurs parties prenantes, qui lancent en 2005
le ForuMa (forum national des musiques actuelles), lequel rassemblera plus d’un millier
de participants à Nancy, appelant à une logique de co-construction avec l’Etat et les
collectivités territoriales et sera prolongé par la création d’un Conseil supérieur des
musiques actuelles.274
Le rapport commandité en juin 2005 à l’Inspection générale de l’administration des
affaires culturelles indique que l’Etat alloue 7,5 M€ aux 137 scènes de musiques
(273) Notamment par M. Bruno LION,
alors chargé de mission « rock »
au Ministère et auparavant fondateur
du « réseau Rocks ».
(274) Pour plus de détail
sur cet historique, cf.
« Le développement des musiques
actuelles et leur entrée en politiques
publiques »
(intervention de Gilles CASTAGNAC
le 15 novembre 2006 devant la FNCC)
et « Eléments pour une histoire
des politiques publiques en faveur
des musiques amplifiées »
(Philippe TEILLET, 2002).
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actuelles (soit 55 000 € en moyenne par site). L’une des principales conclusions de ce
rapport est celle du déséquilibre dans la mobilisation de ses moyens par l’Etat dans le
domaine de la musique.
Quelques années plus tard, la situation n’a guère changé : la masse totale des crédits
d’Etat consacrés aux musiques actuelles atteignait seulement 20 M€ en 2008275. Même
si ce volume a doublé entre 1997 et 2008, il reste modique au regard du travail réalisé
par l’ensemble des acteurs concernés et des enjeux actuels de cette filière276. Au-delà de
cette considération financière, la mise en sommeil récente du Conseil supérieur des
musiques actuelles n’augure pas d’une révision à court terme de la politique culturelle
nationale, dont les crédits à la baisse subissent les conséquences des arbitrages opérés
sur fond de crise et de révision générale des politiques publiques. C’est faire bien peu
de considération à la place de la culture dans la société, à un moment où, au contraire,
on pourrait supposer que l’investissement dans la créativité et l’innovation offrirait une
vraie alternative à un modèle de développement que chacun s’accorde à reconnaître
intenable sur le long terme. En 2009, face à la fragilisation constatée des lieux de
musiques actuelles, les acteurs de la filière (Fédurok, FSJ…) ont souhaité relancer la
mobilisation des pouvoirs publics en s’appuyant sur les propositions du Plan pour des
politiques publiques nationale et territoriales en faveur des musiques actuelles de 2006 et de
la circulaire de novembre 2006277 en appelant à l’élaboration de Schémas d’Orientation
et développement des Lieux de Musiques Actuelles (SOLIMA)278, dans une logique de
co-construction. Cette démarche, qui a reçu un accueil a priori favorable de l’Etat, a
commencé à trouver un certain écho sur le terrain, la mise à l’étude de plusieurs
schémas ayant été engagée depuis le début de l’année.
La reconnaissance des musiques actuelles se heurte néanmoins encore à l’absence de
réelle définition de service public de la culture, notamment à l’aune des conventions
internationales signées par la France, en particulier celle relative à la protection et à la
promotion de la diversité des expressions culturelles d’octobre 2005.279
En Aquitaine, les moyens mobilisés par les services déconcentrés du Ministère de la Culture
(DRAC) en faveur des musiques actuelles représentaient un volume de 800 000 €
en 2008. Ses représentants soulignent l’intérêt des concertations territoriales qui se sont
développées au niveau régional, l’Aquitaine constituant une région pilote en la matière
au plan national. Cette démarche a permis d’offrir un espace organisé, prospectif et
innovant de dialogue. L’objectif reconnu est de parvenir à l’élaboration d’un schéma
territorial raisonné et à une reconnaissance de ce secteur en tant que filière.280
Dès le début des années 1990, l’Aquitaine a d’ailleurs fait figure d’exception dans
le paysage national, ayant anticipé le mouvement sous l’impulsion du DRAC de
l’époque281, convaincu des potentialités de cette région et de l’enjeu artistique de
circulation des œuvres. A cette époque, cette posture relevait d’un véritable pari,
notamment face à des élus locaux peu sensibilisés à cette réalité de la vie culturelle
locale liée aux musiques actuelles. Cette conviction s’appuyait aussi sur la présence
d’un tissu d’opérateurs culturels à la fois engagés dans leur projet artistique et
ouverts à une démarche de co-construction avec les pouvoirs publics. Cette
démarche affirmait la liberté artistique des acteurs tout en imposant le respect de
règles partagées. Cette phase de co-construction s’est déroulée entre 1992 et
1995, autour de certains principes :
- pas de subvention pour l’activité de création artistique (faute de moyens et de
volonté, les crédits en faveur des musiques actuelles étant alors au plus bas),
ni pour la diffusion de concerts,
(275) Dont 9 M€ affectés aux SMAc
et gérés par les DRAC,
3 M€ en faveur des festivals et 5 M€
en faveur des institutions nationales
et fédérations.
(276) Cf. audition de M. André CAYOT,
conseiller aux musiques actuelles
auprès du Ministère de la Culture
et de la Communication,
le 15 décembre 2008.
(277) Circulaire n°CC 166/914
du 2 novembre 2006,
adressée par le Ministère de la Culture
et de la Communication aux préfets.
(278) « Pour des Schémas d’Orientation
de développement des Lieux de Musiques
Actuelles (SOLIMA) » Version au 15 janvier 2010.
(279) « Convention sur la protection
et la promotion de la diversité
des expressions culturelles » - UNESCO,
Octobre 2005 à laquelle la France
a adhéré en décembre 2006.
(280) Cf. audition
de M. Claude JEAN, DRAC Aquitaine,
le 15 décembre 2008.
(281) Jean-Michel LUCAS,
qui exerça entre 1992 et 1998
les fonctions de DRAC Aquitaine – Cf.
audition du 20 avril 2009.
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- inscription des musiques actuelles dans le cadre de politiques publiques, par
exemple en matière d’apprentissage ou d’éducation sur la base des objectifs
du Mémorandum de Lisbonne qui a mis en évidence l’intérêt de l’éducation
informelle, ou encore en matière de santé (prévention des risques auditifs ou des
maladies sexuellement transmissibles) et d’intervention dans les quartiers ou en
direction de certaines populations en difficulté à travers la Politique de la Ville.
C’est sur la base de ces principes qu’ont pris corps certaines initiatives, dont celle du
Carnaval des Deux Rives, co-organisé par les associations Musiques de Nuit Diffusion
et Parallèles Attitudes Diffusion (cf. 4.1) ou encore des projets d’accompagnement
individuel et collectif à partir de lieux ressources.
Cette phase de co-construction a favorisé la mise en place d’une structuration collective
du secteur qui a débouché sur la création du Réseau Aquitain des Musiques Amplifiées.
Face aux difficultés de mobilisation des collectivités, une charte de développement
des musiques amplifiées fut élaborée en 1998 entre acteurs associatifs et élus. Cette
charte marquait alors la volonté d’engager une négociation sur la prise en compte
élargie de ce champ culturel dans plusieurs domaines d’intervention (éducation,
formation, politique de la ville, santé…).
Cette démarche de co-construction, qui s’inscrivait dans un cadre contraint (faiblesse
des budgets du Ministère de la Culture, capacité à mobiliser d’autres lignes de crédits
déconcentrés et européens), ne fut pas déployée au plan national.
Depuis le début des années 2000, l’Aquitaine semble avoir assez peu bénéficié de
certains dispositifs mis en place par l’Etat (ex : procédure d’aide pour les résidences
« chanson ») et souffre aujourd’hui, selon le constat opéré par les services de la DRAC,
d’un problème de saturation des lieux de pratiques (apprentissage, répétition voire
diffusion).
Si l’action de l’Etat en région a pu être considérée comme atypique sinon
exemplaire durant les années 1990, certaines collectivités ont aussi joué un rôle
catalyseur et contribué d’une certaine manière au caractère précurseur de
l’Aquitaine en matière de politique publique au bénéfice des musiques actuelles.
Parmi ces collectivités, le cas d’Agen fait figure de cas d’école. En 1989, Agen
disposait de la plupart des équipements culturels classiques pour une ville-préfecture
de 30 000 habitants (musée, théâtre, centre culturel, école de musique, bibliothèque).
Toutefois, cette offre correspondait assez peu aux besoins d’une jeune population
qui plus est marquée par une assez forte proportion d’immigrés. Face à ce constat,
l’élue chargée de la culture de cette municipalité282 a alors décidé d’engager une
réflexion pour trouver une solution au désœuvrement de cette jeune population
peu attirée par les structures culturelles existantes. Ce travail déboucha sur l’intérêt
d’un projet destiné à favoriser les pratiques culturelles pour les « autres » musiques
que celles proposées par les équipements et services culturels en place. Les principes retenus furent donc de faire « à côté », « autrement » et avec une « égale
considération ». Un projet d’équipement culturel, doté d’un budget spécifique, fut
ainsi décidé par réhabilitation d’un ancien cinéma pour un coût de 1,8 M€ (12 MF
de l’époque). Une subvention exceptionnelle du Ministère de la Culture, complétée
d’une aide du Conseil régional et du Conseil général du Lot-et-Garonne, permit sa
concrétisation. Sa gestion en fut confiée à une association créée à cet effet, statut
préféré à celui d’un établissement public, avec la volonté de préserver
l’autonomie absolue de la structure gestionnaire en contrepartie du respect de
l’ordre public, du développement d’actions dans les cités et sur l’espace départemental
et d’un contrôle des comptes. C’est ainsi que fut ouverte en 1993 la salle du Florida.
(282) Il s’agit de Mme Marie-Thérèse
FRANCOIS-PONCET – Cf. audition
du 15 décembre 2008.
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Le travail réalisé depuis plus de 15 ans est révélateur du « flair » de cette élue, qui
met aujourd’hui en évidence à la fois l’influence et la résonance de cette politique
en faveur des musiques actuelles notamment du point de vue du lien social à
l’échelle de la cité, même si cet aspect reste toujours difficile à évaluer. Une enquête
conduite en 2001 a révélé l’attachement des Agenais à cet équipement et sa
reconnaissance auprès de la population.
Parallèlement, d’autres collectivités en région ont plutôt soutenu des projets portés
par des associations : Bordeaux (la « Rock School Barbey »), Mérignac (le « Krakatoa »),
Périgueux (Le « Réservoir » devenu le « Sans Réserve »), Bergerac (Le Rocksane),
Mont-de-Marsan (le « Café Music »), Pau (« L’Ampli »). Ainsi, durant la décennie
des années 1990, un réseau de salles de musiques amplifiées s’est constitué avec
l’appui des collectivités, contribuant à un maillage territorial de lieux favorisant les
pratiques de musiques actuelles (apprentissage, répétitions, diffusion… Cf. 3.2.4).
Ce mouvement fut complété au cours des années 2000 avec la création de l’Atabal
à Biarritz, mais dans une logique différente, la gestion en étant confiée à un établissement public et non à une association. Au cours de ces dernières années, un
certain essoufflement a pu être constaté alors qu’une demande de lieux (en répétition notamment) reste encore largement insatisfaite et que l’on assiste à une fragilisation de la situation de certaines salles (ex : L’Ampli à Pau).
L’action des pouvoirs publics locaux dans le domaine des musiques actuelles face
à cette demande sociale s’est donc essentiellement portée sur la création de lieux
de diffusion ou de pratiques, sans forcément que cette intervention ne s’accompagne
d’une politique globale en la matière.
Un autre terrain sur lequel des collectivités se sont investies, avec plus ou moins
d’engouement ou de facilité, est celui du spectacle vivant par le soutien apporté à
de multiples festivals, avec parfois des résultats qui dépassent la simple échelle de
leur territoire de référence (cf. Garorock à Marmande, Reggae Sun Ska dans le Médoc,
Musicalarue à Luxey ou Euskal Herria Zuzenean à Hélette pour ne citer que ceux-là).
Les politiques conduites par les Conseils généraux sont très variables d’un département
à l’autre. En Gironde, le Conseil Général propose un dispositif assez large, intégrant
l’appui aux pratiques artistiques notamment par l’intermédiaire de l’Institut
Départemental de Développement Artistique et Culturel (IDDAC), le soutien à
certaines associations, l’aide à la diffusion en particulier à travers son dispositif
« Scènes d’Eté » (dont les festivals Nuits Atypiques, Reggae Sun Ska, Musik à Pile,
Ouvre la Voix…)283. L’une des initiatives les plus originales de cette collectivité est
la prise en compte de la problématique de l’emploi culturel, suite à la crise de
l’intermittence en 2003. A partir de l’expérience issue de la participation à un projet
européen (RELIER)284, cette collectivité a prolongé son soutien dans ce domaine par
un dispositif également financé sur fonds européens (FSE), combinant l’aide à la
personne (Consolidation du Parcours Professionnel Artistique et Culturel)285 et
l’aide aux structures en matière de gestion de l’emploi, d’organisation du travail, de
coopération ou de mutualisation.
En Dordogne, l’Agence Culturelle Départementale regroupe depuis 2008 l’ensemble
des outils culturels du Conseil Général, dont l’Association de Diffusion et d’Animation
Musicale. Cette collectivité apporte des aides en matière de co-productions, de
diffusion (ex : soutien à des lieux tels que le Rocksane de Bergerac, le Lemb@rzique
Café de Lembras et à des festivals tels que le Grand Souk à Ribérac ou le festival de
jazz MNOP de Périgueux). L’agence travaille actuellement sur un projet de Schéma
d’orientation et de développement des musiques actuelles.
(283) La seule opération des Scènes
d’Eté représente un budget de 6 M€.
Elle intéresse 200 communes
dans le département sur une période
de 4 mois, plus de 70 opérateurs
culturels, et accueille
plus de 360 000 spectateurs.
(284) « Relancer un Environnement
Local pour l’Innovation et l’Emploi
culturel en Réseau », afin de favoriser
la mutualisation d’emplois culturels
entre associations ; le RAMA a bénéficié
de ce dispositif pour la création
du groupement d’employeurs RAMAGE.
(285) CPPAC d’une durée de 12 mois,
en partenariat avec le Pôle Emploi
culture-spectacle, destiné aux artistes
RMIstes (ou en RSA) porteurs d’un
projet, comportant un volet formation
orienté vers la culture numérique
ou la création d’outils informatiques.
Ce dispositif a concerné 25 artistes
en 2009, toutes disciplines confondues.
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Le Conseil Général des Landes déploie également un dispositif d’intervention qui
intègre le soutien à la pratique artistique, notamment via l’Association de Diffusion
et d’Animation Musicale des Landes286, le soutien à l’éducation musicale à travers
le Conservatoire de musique des Landes287 qui est l’un plus actif dans le domaine
des musiques actuelles en région. Il a mis en place depuis 2001 un label de scènes
départementales, dont bénéficie l’association Musicalarue de Luxey et apporte une
aide à plusieurs festivals de musiques actuelles durant l’année288.
Le Conseil général du Lot-et-Garonne apporte son soutien à des manifestations de
spectacle vivant (ex : Garorock) et à certaines structures associatives (ex : Voix du
Sud à Astaffort).
Dans les Pyrénées-Atlantiques, le Conseil général développe une politique d’organisation culturelle du territoire en lien avec les collectivités locales (communautés
de communes, communes), notamment par l’aide au financement de certains
équipements et par le soutien apporté à quatre « scènes de pays » (Orthez, sud du
Pays Basque, Piémont oloronais, Basse Navarre) chargées de la programmation de
spectacles, de l’accueil d’artistes en résidence, d’actions d’animation en direction
de certains publics (jeunes, seniors) et du développement des pratiques amateurs.
A ce titre, il apporte également son appui à plusieurs pôles ressources dont la salle
de musiques actuelles l’Ampli de Pau. En matière d’animation culturelle, ce Conseil
général a mis en place un fonds départemental d’initiative culturelle (FDIC) et
apporte son soutien à plusieurs festivals (ex : festival d’automne lors duquel est
organisé un tremplin de musiques actuelles en partenariat avec l’Ampli et l’Atabal).
Il participe enfin à des actions d’éducation culturelle et artistique, notamment en
direction des jeunes publics.
Au cours des années 2000, une autre collectivité va jouer un rôle décisif en termes
de reconnaissance et de prise en compte des musiques actuelles : le Conseil
régional d’Aquitaine.
Sa première initiative en faveur des musiques actuelles remonte à 1991, par l’aide
à l’investissement apportée pour la création de la scène du Florida à Agen
(228 000 €). Cette opération marquera le début d’une série d’équipements pour
la réalisation desquels l’aide régionale a également été mobilisée. L’association
Musiques de Nuit Diffusion sera également à cette époque la première dans le
secteur des musiques actuelles à solliciter une aide régionale dans le cadre de la
Politique de la Ville. Une nouvelle étape a été franchie en 1995, lorsque le Conseil
régional a apporté son soutien à la ville d’Agen en vue de l’organisation des
premières rencontres nationales des musiques actuelles et, dans ce cadre, d’un
colloque portant sur le thème « politiques publiques et musiques actuelles ». C’est
à ce moment qu’une réflexion est engagée par la collectivité pour élargir son aide
au-delà d’une aide à l’investissement, afin de soutenir les équipes ou structures
gestionnaires de lieux de diffusion. Entre 1993 et 2003, les crédits régionaux
consacrés aux musiques actuelles vont être multipliés par 3,5 pour atteindre
215 000 € en 2003. L’année suivante, une délégation aux cultures émergentes
a été créée, couvrant plusieurs domaines d’intervention (culture, économie,
politique de la ville, coopérations), qui a mobilisé plus de 600 000 € cette annéelà.
En 2004, l’arrivée aux fonctions d’un nouvel élu délégué à la culture et issu du
sérail des musiques actuelles289, va stimuler l’action régionale dans ce domaine. Il
prend ses fonctions au moment même où l’Etat lance la concertation nationale,
auprès de laquelle il représente l’Association des Régions de France. Il a ainsi
(286) En 2010, le programme
de l’ADAM40 prévoit l’accueil
de l’instrumentiste de jazz Erik BARON,
en relation avec le Conservatoire
des Landes et le Café Music’
de Mont-de-Marsan, une série d’ateliers
avec le collectif Ca’I à Sabres
et en Haute Landes, une opération
de sensibilisation en direction des jeunes
et des adolescents avec le festival
« Chantons sous les Pins ».
(287) En 2007, l’aide apportée
par le Conseil Général des Landes
à ce conservatoire a atteint 1,3 M€.
(288) Musicalarue de Luxey,
Atout Chœur de Benquet,
Chantons sous les Pins,
Toros y Salsa à Dax,
Fugue en pays jazz à Capbreton,
festival de jazz de Sanguinet,
les Océaniques à Tarnos,
Arte Flamenco à Mont-de-Marsan…
(289) Il s’agit de Frédéric VILCOCQ,
délégué à la culture
et à l’économie créative
entre 2004 et 2010,
qui fut en tant que représentant de l’ARF,
vice-président du Conseil supérieur
des musiques actuelles
et membre du Centre National
des Variétés, de la chanson et du jazz.
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participé durant toute l’année 2005 à cette concertation, en s’appuyant également
sur sa connaissance du terrain et des acteurs en région, en relation avec le Réseau
Aquitain des Musiques Actuelles. Les propositions formulées dans ce cadre, présentées
lors du Forum des Musiques Actuelles (Foruma) à Nancy, ont notamment
débouché sur la définition d’un plan d’action, la mise en place du Conseil supérieur
des Musiques Actuelles et sur le lancement des concertations territoriales (cf ci-dessus).
L’Aquitaine n’a pas attendu pour engager cette démarche de co-construction
d’une politique publique en faveur des musiques actuelles. Dès avril 2005, le Conseil
régional profite de l’édition du festival Garorock de Marmande pour organiser une
réunion d’information avec les acteurs et c’est en juin 2005, lors d’une première
rencontre des musiques actuelles, qu’est officiellement lancée la concertation
territoriale en partenariat avec l’Etat (DRAC) et les acteurs. Cette concertation a
particulièrement bien fonctionné et a contribué à faire évoluer la politique régionale
au profit de ce secteur des musiques actuelles.
Cette politique s’est parallèlement inspiré des principes énoncés par la Convention
de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions
culturelles ainsi que des conclusions des travaux conduits au niveau national (rapports
de 1998 et de 2006).
Traiter la filière des musiques actuelles dans son ensemble (de la création à la
diffusion), dans une démarche transversale quelle que soit la nature des opérateurs
et intégrant tout le champ des politiques régionales : tels furent les principes
retenus par la collectivité régionale dans la mise en œuvre de sa politique en faveur
des musiques actuelles. Cette approche transversale n’a pas été évidente, notamment
par la difficulté de coordination entre politiques sectorielles mais les résultats ont
été encourageants.
Durant la période 2004-2010, le budget régional consacré aux musiques actuelles
est passé de 490 000 € à 1,5 M€ en 2009.
Évolution des aides régionales
en faveur des musiques actuelles
1 600 000
1 400 000
1 200 000
■ Equipements
■ Associations
1 000 000
■ Festivals
800 000
■ Apprentissage/
formation
600 000
■ SMAc
■ Economie culturelle
400 000
■ PRAC
200 000
0
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Ces aides concernent :
- les pôles de ressources artistiques et culturels régionaux (PRAC), s’agissant
notamment du RAMA, de Musiques de Nuit Diffusion (jazz et musiques du monde)
et de l’association Musicalarue (nouvelle chanson française) pour 145 000 € en 2009
auxquels il faut ajouter 35 000 € consacrés à la mutualisation de l’emploi culturel
(AGEC),
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- l’économie culturelle, par le soutien apporté notamment aux producteurs phonographiques indépendants aquitains (FEPPIA) pour 156 500 € en 2009, complété par
une aide à certains éditeurs ou sociétés audiovisuelles en matière de captation de
spectacle vivant,
- l’aide au fonctionnement des salles de musiques actuelles (SMAc), pour un montant
supérieur à 356 150 € en 2009, à raison de 50 000 € minimum pour les salles les
plus importantes et un plancher de 30 000 € pour les autres salles afin d’éviter de
trop fortes disparités de traitement,
- l’appui aux structures d’apprentissage et de formation a mobilisé plus de 134 000 €
en 2009 (Voix du Sud, AREMA Rock & Chanson, le CIAM…), alors que les régions
ont hérité de nouvelles compétences en matière d’enseignement artistique,
- près de 280 000 € ont été consacrés en 2009 aux festivals à rayonnement national
(Garorock, Reggae Sun Ska, Musicalarue) ou régional, à quoi il faudrait ajouter le soutien
particulier aux éco-festivals sous la forme d’une réduction de 50 % des prix de billet
TER pour les festivaliers (opération Fes’TER),
- une aide importante au développement artistique est également apportée par le
Conseil régional d’Aquitaine aux structures ou associations œuvrant dans ce domaine
(plus de 436 000 € en 2009),
- enfin, cette collectivité contribue à la réalisation d’investissements réalisés par certaines
structures de musiques actuelles (environ 43 500 € en 2009), essentiellement en
faveur de lieux de diffusion ou de formation.
Ce panorama de l’action publique en faveur des musiques actuelles en Aquitaine
témoigne de l’importance de ce soutien et l’intérêt que représente la démarche exemplaire
de co-construction impulsée depuis plus d’une quinzaine d’années.
Cette action mérite aujourd’hui d’être considérée au regard des enjeux mis en évidence
tout au long de ce rapport dans le contexte largement décrit de crise de l’économie du
disque, de mutation des comportements et de transformation du schéma économique
induit par le développement des technologies et usages numériques.
Ces évolutions ne doivent pas faire oublier l’enjeu fondamental, à savoir celui des pratiques
artistiques et culturelles d’une partie de plus en plus large de la population. Cet enjeu rend
d’autant plus nécessaire l’adaptation de la réponse apportée à une demande sociale
plurielle.
Enfin, et plus globalement, l’action publique en direction de ce secteur offre actuellement
une opportunité d’innovation des modalités d’intervention, prenant en compte la dimension
de la citoyenneté dans le sens de la mise en œuvre d’une forme de démocratie culturelle
qui est d’abord celle d’un droit culturel, celui de la liberté de création et d’expression
artistique de chacun, s’inspirant notamment des principes de la Déclaration Universelle
sur la diversité culturelle.
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5 - Plan Régional
Initiatives, innovations et Soutien
en faveur des Musiques actuelles
en Aquitaine (PRISMA)
L’ensemble du secteur des musiques actuelles est aujourd’hui soumis à de profondes
mutations qui s’expriment à la fois par l’évolution des pratiques culturelles, par les effets
liés à l’utilisation des technologies numériques et par une modification des modèles
économiques de ce secteur, sur fond de crise économique plus générale qui affecte
aujourd’hui les budgets publics. Les acteurs aquitains de la filière doivent également
faire face à ce nouveau contexte, avec leurs spécificités, à savoir un tissu de petites
structures œuvrant le plus souvent à l’interface entre secteur marchand, secteur non
marchand et missions d’intérêt général dans le cadre d’une économie sociale et solidaire et
dans une approche associant désormais éducation populaire et démarche environnementale.
Pour l’exprimer en d’autres termes, le secteur des musiques actuelles est actuellement
confronté à une « tourmente de la complexité », à savoir à un faisceau de difficultés nées
de l’évolution du contexte dans lequel il s’inscrit : économique et concurrentiel,
technologique, culturel, social ou sociétal, institutionnel, structurel et juridique.290
En Aquitaine, l’analyse qui précède révèle un ensemble d’opérateurs qui ont su faire
preuve d’initiative, de capacités d’adaptation quand ce n’est pas d’innovation et, avec
l’appui des pouvoirs publics, s’inscrire dans une démarche de structuration et de concertation.
Face aux évolutions constatées, les éléments de contexte décrits au niveau régional
mettent en évidence plusieurs enjeux qui peuvent se définir comme autant d’objectifs
en réponse aux besoins identifiés en termes d’accompagnement des acteurs, dans une
phase délicate de changement.
(290) « Cf. contribution
de Jean-Christophe APLINCOURT,
directeur du « 106 » à Rouen,
lors de l’assemblée générale
de la Fédurok des 8 et 9 mars 2010.
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• Tout d’abord, il convient d’insister sur l’enjeu premier qui devrait guider toute politique
culturelle, à savoir permettre l’émergence d’une création artistique entendue dans
toute sa diversité et comme un droit accessible à chaque individu. Il n’est pas vain
de rappeler à ce stade certains passages de la Déclaration Universelle de l’UNESCO sur
la diversité culturelle.
EXTRAITS DE LA DÉCLARATION (UNESCO, 2 Novembre 2001)
« Sources, d’échanges, d’innovation et de créativité, la diversité culturelle est, pour le
genre humain, aussi nécessaire que la biodiversité dans l’ordre du vivant. En ce sens,
elle constitue le patrimoine commun de l’humanité et doit être reconnue et affirmée au
bénéfice des générations présentes et des générations futures. » (Article 1 : la diversité
culturelle, patrimoine commun de l’humanité)
« Dans nos sociétés de plus en plus diversifiées, il est indispensable d’assurer une interaction
harmonieuse et un vouloir vivre ensemble de personnes et de groupes aux identités culturelles
à la fois plurielles, variées et dynamiques. Des politiques favorisant l’inclusion et la participation de tous les citoyens sont garantes de la cohésion sociale, de la vitalité de la société
civile et de la paix.
Ainsi défini, le pluralisme culturel constitue la réponse politique au fait de la diversité
culturelle. Indissociable d’un cadre démocratique, le pluralisme culturel est propice aux
échanges culturels et à l’épanouissement des capacités créatrices qui nourrissent la vie
publique. » (Article 2 : De la diversité culturelle au pluralisme culturel)
« La diversité culturelle élargit les possibilités de choix offertes à chacun : elle est l’une des
sources du développement, entendu non seulement en termes de croissance économique
mais aussi comme moyen d’accéder à une existence intellectuelle, affective, morale et
spirituelle satisfaisante. » (Article 3 : la diversité culturelle facteur de développement)
« Les droits culturels sont partie intégrante des droits de l’homme, qui sont universels,
indissociables et interdépendants. L’épanouissement d’une diversité créatrice exige la
pleine réalisation des droits culturels, tels qu’ils sont définis à l’article 27 de la Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme et aux articles 13 et 15 du Pacte international relatif
aux droits économiques, sociaux et culturels. […] Toute personne doit pouvoir participer à
la vie culturelle de son choix et exercer ses propres pratiques culturelles, dans les limites
qu’impose le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. » (Article 5 : les
droits culturels, cadre propice de la diversité culturelle).
Par conséquent, cet enjeu recouvre la nécessité d’une adaptation de la réponse à une
demande et à des pratiques sociales diversifiées considérées à la fois du point de vue
individuel (les musiques actuelles en tant qu’espaces de liberté, moyens d’expression
et d’épanouissement ou d’individuation des Aquitains) et du point de vue collectif
(les musiques actuelles comme supports d’échanges, de liens sociaux et transgénérationnels, de découverte et de brassage interculturels et de transindividuation).
Ce premier enjeu est essentiel car il conditionne fondamentalement aussi bien l’activité
des opérateurs intervenant dans la valorisation des pratiques liées aux musiques actuelles
que les modalités de gouvernance d’une politique culturelle co-construite et partagée,
dans l’esprit des principes définis par les conventions internationales291.
• En second lieu, la nécessité d’une consolidation de l’accompagnement des groupes
ou artistes et des fonctions supports (répétition, production et développement
d’artistes, édition, diffusion, distribution). L’importance de ces fonctions dans la valorisation
de la création artistique liée aux musiques actuelles a été amplement soulignée, dans
la mesure où elles permettent la formalisation et la concrétisation de projets artistiques
et professionnels. Cet enjeu recouvre à la fois la prise en compte de certains besoins
(291) « Convention pour la sauvegarde
du patrimoine culturel immatériel »
(UNESCO, 17 octobre 2003)
et « Convention sur la protection
et la promotion de la diversité
des expressions culturelles »
(UNESCO, 20 octobre 2005).
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de développement quantitatif en offre de services (capacités d’accueil de groupes en
répétition par exemple) et l’appui à la structuration et au développement des entreprises
concernées (TPE : associations, coopératives, sociétés).
Dans ce dernier cas, l’objectif vise à proposer à ces opérateurs, qui exercent dans une
relative instabilité et précarité, des moyens de consolidation de leur activité (gestion de
l’emploi et des compétences, aide au recrutement, formation, aide au conseil, soutien
à l’investissement ou à l’innovation…).
• Le troisième enjeu porte sur le renforcement des capacités d’adaptation et d’anticipation des changements liés aux usages des technologies numériques. L’impact de
ces technologies touche l’ensemble des pratiques liées aux musiques actuelles, aussi
bien celles relatives aux comportements d’écoute ou d’achat d’œuvres musicales, que
les pratiques de création et celles de l’ensemble de la chaîne de valorisation (édition
phonographique, diffusion, distribution), notamment en termes de sélection et de
promotion des œuvres. L’objectif dans ce domaine est de favoriser le développement
d’applications, de services et d’innovations (technologiques mais aussi organisationnelles,
de marketing et commerciales) susceptibles de répondre à l’évolution des comportements,
d’offrir des pistes de meilleure répartition des revenus (au bénéfice des artistes et
ayant-droits) et de favoriser les solutions collaboratives entre les différents maillons de la
filière en région. Il intéresse parallèlement et non moins essentiellement la mobilisation
des ressources en matière de sensibilisation et d’éducation des publics à ces nouveaux
outils et usages numériques, tant en termes d’accès aux œuvres artistiques que
d’apprentissage de pratiques ou de développement de nouvelles créations.
• L’élargissement des réseaux et des démarches d’organisation collective constitue
un quatrième enjeu important. Compte-tenu de la diversité, de la taille et des ressources
limitées de la plupart des structures intervenant dans ce champ des musiques actuelles
en Aquitaine, une partie essentielle des réponses à apporter aux mutations en cours
passe par des partenariats renforcés à la fois entre les acteurs de la filière, entre ces
derniers et les pouvoirs publics et avec d’autres catégories d’opérateurs culturels ou
hors du champ culturel (par exemple avec certaines organisations de salariés dans le
domaine de la GPEC). A ce niveau, il importe de souligner le rôle central des structures de
médiation, de coordination et d’animation telles que le RAMA ou encore la FEPPIA.
• Le cinquième enjeu, en partie lié au précédent, est celui du mode de gouvernance
ou des modalités de détermination des choix ou orientations dans ce domaine
des musiques actuelles. L’importance de cet aspect est loin d’être négligeable si l’on
considère le constat d’un manque de reconnaissance souvent évoqué par les acteurs
dans leur prise en compte par les politiques publiques. Or, il y a une forme de paradoxe
entre le constat d’une popularité croissante des pratiques et le peu d’attention portée
à ce champ d’intervention par les pouvoirs publics, sans se limiter aux seules politiques
culturelles. Pour dépasser ce paradoxe, il serait opportun d’étendre la démarche de
co-construction entamée depuis une quinzaine d’années en y associant une partie
prenante jusqu’alors un peu laissée en marge de ce dispositif : entendons par là le
citoyen, l’usager, le pratiquant amateur, l’artiste en chemin. Sauf à persister dans une
conception de la politique culturelle dictée « d’en haut », dans le cercle restreint
des spécialistes de l’art et autres gestionnaires avertis, en négligeant les processus
démocratiques de création culturelle. Il serait dommage que le secteur des musiques
actuelles néglige cette dimension car il se priverait de l’un des atouts qui le caractérise et
qu’il revendique : sa popularité. La dynamique engagée dans le cadre des concertations territoriales offre à cet égard un véritable espace d’expérimentation citoyenne et
de co-construction, à la base d’un véritable « contrat culturel ».292
• Enfin, un dernier enjeu porte plus spécifiquement sur les modalités d’intervention
des acteurs publics, dont le caractère souvent trop cloisonné et procédural ne facilite
(292) Pour reprendre les propos du
« Docteur Kasimir Bisou », dans un texte
daté du 13 juin 2005 « Diversité
culturelles et politiques publiques, la
fausse conversion française ! ».
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ni la mise en œuvre de projets à dimension multiple et parfois expérimentale, ni
la nécessaire réactivité face aux mutations que connaît ce secteur. En la matière,
il appartiendrait aux collectivités territoriales d’user de leur droit constitutionnel
d’expérimentation, encore très peu exploité293. Or, « l’expérimentation participe de la
volonté plus générale de renouveler les modalités de la décentralisation, d’en passer à
une nouvelle forme, non plus « octroyée » par l’État, mais portée par l’initiative des élus
locaux eux-mêmes. »294
Ce droit prévoit que toute collectivité territoriale puisse déroger, pour un objet précis
et une durée limitée (5 ans maximum), aux dispositions législatives et réglementaires
qui régissent l’exercice de ses compétences, dans la limite des conditions essentielles
d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti295.
L’exercice de ce droit dans le champ de la culture reste néanmoins suspendu au terme
du processus législatif en cours portant réforme des collectivités territoriales. La dernière
version de ce texte adoptée en seconde lecture par le Sénat en juin 2010 prévoit
cependant, dans son article 35, que « les compétences en matière de tourisme, de
culture et de sport sont partagées entre les communes, les départements et les régions ».
Sur la base de ces enjeux ou objectifs, les préconisations qui suivent n’ont pas vocation
à répondre à l’ensemble de la problématique posée par les politiques publiques en
faveur des musiques actuelles. Elles portent essentiellement sur le terrain de construction
et d’évolution d’une politique en région.
Par ailleurs, elles doivent avant tout être considérées comme des pistes destinées à
nourrir la réflexion des acteurs concernés et à ouvrir un débat élargi avec l’ensemble
des parties prenantes dans l’esprit énoncé de co-construction d’une politique publique
intégrant l’expression citoyenne.
L’ensemble de ces préconisations ou pistes a été rassemblé dans un cadre général
désigné « Plan Régional d’Initiatives, d’innovations et de Soutien en faveur des
Musiques actuelles en Aquitaine » (PRISMA).
Pourquoi un tel « plan » ? Quel est son intérêt en comparaison des systèmes d’intervention
existants ?
- Il s’agit d’abord de prolonger et de donner consistance à l’échelle régionale aux
objectifs affichés depuis 2006 dans le « Plan pour une politique nationale et territoriale
des musiques actuelles » et au travail réalisé dans le cadre des concertations territoriales.
- Il s’agit par ailleurs de donner suite aux attentes exprimées par les acteurs à propos de
l’élaboration de « schémas d’orientation et de développement des lieux de musiques
actuelles », tout en considérant la nécessité de prendre plus largement en compte
l’ensemble des enjeux auxquels doit faire face cette filière. Ces enjeux ne sauraient se
restreindre à la seule problématique des lieux. Ils intéressent aussi les pratiques,
l’accompagnement économique des activités, l’innovation et le virage numérique, ou
encore l’organisation et la structuration collective du secteur.
- Enfin, la vocation d’un tel plan est d’inciter à la mise en place d’un cadre transversal,
multisectoriel et pluri-partenarial à l’action publique au niveau régional. La réponse
aux enjeux et aux objectifs précédemment identifiés invite à une mobilisation élargie
des dispositifs d’intervention, notamment du Conseil régional (culture mais aussi
emploi et action économique, formation, TIC, jeunesse, développement territorial urbain
ou rural, recherche-transfert de technologie, coopérations, développement durable…).
A travers ce plan, l’objectif général poursuivi est de créer des conditions favorables à
l’affirmation de l’Aquitaine en tant que « région créative », par intégration de la culture
dans les politiques de développement local et régional, dans l’esprit de la stratégie
européenne « UE 2020 » et en s’appuyant sur les conclusions de plusieurs expertises
menées aux plans international et national.
(293) Conformément aux dispositions
introduites par la loi constitutionnelle
du 28 mars 2003 relative
à l’organisation décentralisée
de la République.
(294) Cf. « L’expérimentation :
une condition nécessaire de l’innovation »,
contribution de Philippe DURANCE
au rapport établi par le Conseil d’Analyse
Économique et la DATAR portant sur
« la créativité et l’innovation
dans les territoires », mai 2010.
(295) Titre XII, article 72
de la Constitution,
complété par la loi organique n°2003-704
du 1er août 2003.
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Dans cette optique, le fil conducteur de ce plan consiste à ce que l’intervention publique
agisse comme facilitateur d’initiatives en veillant à la fois à leur « encastrement social
et territorial »296, à un maillage de réseaux collectifs qui permette parallèlement le
décloisonnement des pratiques et l’innovation collective.
La description du « système » régional des musiques actuelles apporte de réels arguments
qui démontrent l’opportunité d’une déclinaison de cette démarche sur ce terrain des
musiques actuelles et cela à plusieurs niveaux :
- la popularité des pratiques qui leur sont liées ainsi qu’en attestent les enquêtes sur les
pratiques culturelles297 en matière d’écoute musicale ou de sorties (concerts, festivals),
confortées par la dynamique de créativité dont témoigne, le nombre d’artistes et de
groupes amateurs, semi-professionnels ou professionnels298. Cette popularité s’appuie
aussi sur des héritages et des brassages culturels qui favorisent le lien social,
- elle alimente une demande sociale, de plus en plus large, d’accès à la pratique et
d’accompagnement, qui se traduit actuellement par une saturation des lieux d’apprentissage et de répétition et par des disparités d’accès en fonction du lieu de résidence
ou des ressources disponibles,
- cette demande génère tout un ensemble d’activités directement lié à la valorisation
de ces pratiques : activités d’apprentissage, de production, d’édition phonographique,
de diffusion, d’organisation de spectacles ou concerts, de distribution…299. Cette réalité
témoigne de la vitalité d’un secteur dominé par des structures relevant de l’économie
sociale et solidaire, dont l’activité repose aussi, pour une part non négligeable, sur
l’implication bénévole et citoyenne,
- dans un contexte d’évolution des pratiques, aujourd’hui largement influencées par les
technologies et services numériques, la créativité du secteur des musiques actuelles
s’exprime non seulement dans le domaine artistique300 mais aussi en matière d’innovation technologique301 ou encore sur le plan de l’innovation sociale ou organisationnelle
au sein même des structures302,
- enfin, l’ensemble de ces pratiques et activités se caractérise en Aquitaine par leur
ancrage et par leurs dynamiques territoriales, soulignant en parallèle, l’importance de
la prise en compte du territoire en tant que « scène sur laquelle se matérialise l’enjeu
des pratiques ». Cette dimension territoriale importe au moins à deux niveaux : d’une
part celui de la réponse apportée à la demande sociale, d’autre part celui de la structuration ou du maillage des activités. Enfin, il importe aussi de considérer le territoire
comme espace privilégié de diversité et de brassage culturels, d’interaction ou de
dynamique créative, prenant appui à la fois sur le terreau social et démographique
des collectivités et sur les liens entretenus avec d’autres « territoires » physiques (villes,
régions, pays) ou immatériels (ex : réseaux sociaux).
Dès lors, quelles peuvent être les mesures associées au Plan « PRISMA » proposé, susceptibles de faciliter la mise en œuvre d’un processus, permettant de satisfaire tout autant
à une exigence de diversité des pratiques culturelles et à une ambition de région créative ?
(296) Pour reprendre les termes
utilisés par Raphaël SUIRE.
(297) DEPS, SACEM, CNV notamment,
(298) Environ
2 000 groupes en Aquitaine,
plus de 4 000 auteurs-compositeurs
et interprètes.
(299) Plus d’un millier d’établissements
employeurs réguliers
dans le spectacle vivant,
essentiellement sous statut associatif
et 5 000 occasionnels (Audiens, GUSO).
5.1 Répondre à la demande sociale,
libérer les pratiques et la création artistiques des Aquitains
Ce premier axe vise ni plus ni moins à garantir un droit fondamental, à savoir la capacité
donnée à chaque individu de participer à la vie culturelle, d’exercer ses propres pratiques
sans limiter celles-ci au rôle de « public », « d’audience » ou de « consommation » de
biens culturels.
■ Une forte demande s’exprime en termes d’apprentissage et de répétition. La
réponse à celle-ci passe par une évaluation des besoins à l’échelle territoriale
(300) Cf. le succès et la diversification
de certains genres musicaux
(électro, techno, house et dérivés).
(301) Cf. le Lémur de Stantum-Jazz
Mutant, Blue Yéti, les programmes
de recherche conduits par le SCRIME…
(302) En référence aux démarches
de mutualisation d’emplois
et de ressources entre opérateurs.
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(agglomérations, « pays » ou communautés de communes) et par un renforcement
de l’offre de services (locaux, compétences, outils pédagogiques). Cette offre doit
prendre en compte les solutions mobilisables par les structures publiques
(ex : écoles de musique) et par les structures privées (associations), si possible en
favorisant les partenariats et la mutualisation de ressources (personnels, locaux).
Cette réponse devrait s’inscrire dans les schémas d’orientation et de développement
de lieux de musiques actuelles (SOLIMA) en cours de préparation. Sur un plan plus
opérationnel, il est proposé que le Conseil régional prenne en compte ces besoins
dans le cadre de ses politiques de développement territorial, au titre des « services
innovants créateurs de lien social et d’emploi »303 et dans l’esprit du schéma directeur
des équipements sportifs et culturels.
Le cas échéant, selon la nature des caractéristiques territoriales, le développement
d’une offre itinérante de services (ex : Bus Rock) pourrait être envisagé, en s’adossant
à certains lieux ressources (SMAc et « rock-schools» notamment) et en partenariat
avec les collectivités locales.
■ Sur le plan qualitatif, il conviendrait de favoriser les échanges et les transferts
d’expériences en matière de démarches pédagogiques (ex : le CIAM avec « PACAP »,
cf. 2.2.2) et d’accompagnement (répétitions), en s’appuyant sur le réseau des
« rock schools » d’une part et sur le tissu des écoles de musique municipales d’autre
part. La question de la formation des formateurs mérite d’être également abordée,
sans dogmatisme, considérant l’accroissement de la demande d’apprentissage
d’un côté et par ailleurs les perspectives de stabilisation de l’emploi culturel offertes
par certaines qualifications (CEM, DEM, certificat FNEIJMA). L’opportunité d’une
validation des acquis de l’expérience (VAE) pourrait être explorée dans ce domaine
de l’apprentissage des musiques actuelles.
■ Par ailleurs, il importe de considérer dans ce domaine la demande et les perspectives
liées aux nouvelles pratiques numériques (dont musique assistée par ordinateur
et plus largement les nouvelles interfaces combinant musique/image/spectacle vivant),
■ Sous réserve d’un renforcement de l’offre d’apprentissage (dont répétition), l’accès
à celle-ci peut, pour des jeunes issus de familles à bas revenus, s’avérer difficile.
En ce cas, et sous conditions de ressources, il est proposé d’étendre le dispositif
« Coup d’Pouce », sous la forme d’un « pass » (ou chèque), pour de jeunes
lycéens, musiciens amateurs, qui souhaiteraient plus facilement accéder aux services
existants, afin de compenser certaines disparités sociales et territoriales.
■ Dans le même esprit, il pourrait être proposé de créer, avec l’appui de certains
pôles ressources et dans le prolongement de certaines expériences (ex : « Scènes
croisées »), un tremplin régional ouvert aux lycéens, apprentis, élèves des centres
de formation, dont la finale serait organisée chaque année dans le cadre du festival
des lycéens.
■ Enfin, la popularité des musiques actuelles et l’intérêt croissant qu’elles suscitent en
matière d’apprentissage artistique amènent à exprimer l’opportunité d’une sensibilisation relative aux origines et aux héritages des différents genres musicaux
auprès des jeunes publics. Celle-ci pourrait s’opérer de manière élargie dans le cadre
des contenus pédagogiques associés à l’apprentissage de ces musiques ou à
l’animation culturelle, par la mobilisation du tissu associatif (dont associations
de jeunesse et d’éducation populaire), par intervention dans les lycées (« lycées
créatifs » ?) ou encore par définition d’une mission confiée au réseau de discothécaires
des bibliothèques-médiathèques (lesquelles disposent d’un fonds patrimonial de
plus de 355 000 disques).
(303) Cf. adaptation du règlement
d’intervention relatif à la politique
de développement local adopté
en séance plénière
du 15 décembre 2008.
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5.2 Mieux accompagner les artistes ou groupes en renforçant
les activités et emplois supports
La valorisation des pratiques et de la création artistique associées aux musiques actuelles
est assurée par un ensemble d’activités diversifiées. Celles-ci, dont le rôle clé a été souligné,
exercent pour une très large part dans le cadre d’un schéma d’économie ternaire
(combinant économie marchande, non marchande et économie publique), à travers des
structures/entreprises de petite ou très petite taille, œuvrant majoritairement dans le
champ de l’économie sociale et solidaire. Toutefois, l’équilibre économique de ces
structures et la stabilité des emplois qu’elles occupent, sont relativement fragiles,
d’autant plus que la filière est actuellement engagée dans une phase de profonde mutation
et que cette catégorie d’opérateurs est exposée aux risques de réduction de certains
budgets publics.
■ Les activités rattachées à la filière de la musique enregistrée (production et édition
phonographique) rassemblent plus de 70 opérateurs en région (dont une part
d’artistes en autoproduction). Cette filière est la plus directement impactée par la
crise de l’économie du disque. Pourtant, la production d’un CD audio reste encore
une condition d’accès à la diffusion (dont grands médias) pour beaucoup d’artistes
et de professionnels. C’est pourquoi il est proposé de renforcer le soutien apporté
à ce segment d’activité à plusieurs niveaux :
- l’innovation par le développement de supports physiques intégrant de nouveaux services (ex : vidéos inédites, programme de tournées, possibilités de
téléchargements…),
- l’appui aux entreprises, par la mobilisation d’une aide au conseil (ex : stratégie
de diversification), l’aide au recrutement de cadres ou de techniciens spécialisés
(ex : webmestres) et l’appui à la création d’emploi (dont emplois mutualisés),
- l’aide à la diffusion et à la commercialisation, en partenariat avec certains distributeurs
indépendants (dont ceux de la chaîne du livre),
- la formation des salariés et plus largement la gestion prévisionnelle des emplois
et des compétences,
- le soutien aux démarches collectives permettant la mutualisation de moyens ou
la consolidation des entreprises (par exemple via la constitution d’une société
coopérative d’intérêt collectif304).
■ En matière de distribution de disque, il est proposé d’accompagner dans le cadre
du régime des aides à l’artisanat et au commerce l’activité des disquaires et des
libraires indépendants proposant un rayon disques, en mobilisant les dispositifs
du Fonds d’Intervention pour les Services, l’Artisanat et le Commerce305. Cette aide
devrait être conditionnée à la diffusion d’œuvres produites par des producteurs et
éditeurs phonographiques indépendants aquitains.
Parallèlement, il est proposé d’accompagner ces derniers pour leur faciliter l’accès
aux marchés publics des bibliothèques-médiathèques d’Aquitaine disposant d’un rayon
disques audio306, en mobilisant les compétences et ressources de l’agence régionale pour l’écrit, le livre, le cinéma et l’audiovisuel (ECLA). Enfin, un programme
d’information-formation (en sessions courtes mais régulières d’une journée ou
d’une demi-journée) des personnels de librairies et de bibliothèques-médiathèques
portant sur les genres musicaux, les labels en région, les groupes et artistes…
pourrait être développé en partenariat entre ECLA, la FEPPIA et certains acteurs
culturels (dont le RAMA). Il convient de rappeler le rôle potentiel des bibliothèques
et médiathèques en matière de sensibilisation et d’éducation des publics sur les
musiques actuelles.
(304) Ce statut particulier de coopérative
permet d’associer à un projet collectif
d’entreprise différentes catégories
d’acteurs ou de parties prenantes :
salariés, entreprises, associations,
bénévoles, usagers, collectivités.
Au 31 mai 2010,
il en existait 173 au plan national.
(305) Notamment en application
de la Convention du 25 juin 2003
réservant une aide spécifique
aux commerces culturels de proximité
situés en centre-ville
ou dans une zone d’habitat dense.
(306) Rappel : en Aquitaine,
une centaine de bibliothèques
et médiathèques achètent environ
40 000 disques audio par an.
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La filière du spectacle vivant regroupe près de 500 opérateurs dans le champ des
musiques actuelles en Aquitaine, producteurs ou développeurs d’artistes, structures
gestionnaires de lieux de diffusion, organisateurs de spectacles ou concerts.
Conséquence de la crise du disque, une part importante de ces opérateurs doit
faire face au renchérissement de certains coûts (coûts artistiques et techniques)
qui fragilise leur équilibre économique et à une concurrence accrue. Le poids des
opérateurs associatifs reste très important dans cette filière (à l’exception de cafésdiscothèques et dans une moindre mesure parmi les producteurs-développeurs
d’artistes). C’est aussi dans ce secteur que l’on trouve le plus grand nombre d’emplois
salariés (permanents et occasionnels) à vocation fonctionnelle (administration,
communication, technique…) et que le rôle du bénévolat s’avère le plus essentiel.
- Le rôle des salles de musique actuelles (SMAc) ou assimilées est ici déterminant,
à la fois par leur activité de diffusion et leur vocation de pôles-ressources à
l’échelle des territoires. Il est essentiel de prendre en compte la polyvalence de leurs
missions : très souvent apprentissage (rock-school), repérage et accompagnement
de groupes ou d’artistes (répétition, enregistrement), accueil de résidences,
diffusion (organisation de concerts, de tremplins, parfois de festivals), animation
territoriale auprès de quartiers ou de zones rurales, actions en direction de certains
publics (milieu scolaire, hospitalier, médico-social ou carcéral), développement
durable (lutte contre les risques auditifs et prévention des MST, initiatives
éco-responsables…). Cette polyvalence doit être prise en compte dans les
conventions liant ces structures aux collectivités territoriales et plus largement
dans un véritable cahier des charges co-construit entre les acteurs, l’Etat et
les collectivités. Compte tenu de l’expérience acquise et du dynamisme des
opérateurs, l’Aquitaine a vocation à être région pilote pour l’élaboration d’un tel
cahier des charges.
Par ailleurs, considérant la fragilisation de certains lieux, l’établissement de
conventions pluriannuelles (sur 3 ans) donnant lieu à des engagements pluriannuels
(autorisations d’engagement pour le Conseil régional) serait de nature à stabiliser
le fonctionnement des structures gestionnaires.
En matière de politique de diffusion de ces lieux conventionnés, il importe de
veiller à un nécessaire équilibre entre programmation à vocation commerciale et
programmation à vocation découverte intéressant des groupes locaux et/ou
régionaux. Dans le même esprit, il serait opportun de favoriser la circulation des
groupes ou artistes repérés à travers le réseau des salles en région.
De même, le développement de l’accueil de résidences ou de master-classes,
associant artistes confirmés et artistes/groupes semi-amateurs ou amateurs mériterait dans ce cadre une attention particulière.
Au niveau local, le renforcement des coopérations entre salles conventionnées et
autres lieux de diffusion (salles, bars-concerts) pourrait être recherché et être pris
en compte dans le cadre des conventions.
Outre ces missions, ces conventions pourraient comporter un volet relatif à la
gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, prenant en compte
les besoins éventuels de recrutement et de formation (salariés et bénévoles).
- D’autres lieux de diffusion de capacité plus restreinte, sous gestion associative,
jouent également un rôle important de diffusion pour des artistes et groupes
locaux. Deux aspects méritent d’être soulignés à ce niveau : le manque de lieux
de taille réduite (150 à 300 places) dédiés à la diffusion de certains genres musicaux
(ex : jazz impro, musiques traditionnelles) d’une part et la prise en compte de
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l’activité des bars-concerts d’autre part. Les besoins exprimés à cet égard appellent une prise en compte dans le cadre des politiques de développement local
(agglomérations, « pays ») et des futurs schémas d’orientation et développement
des lieux de musiques actuelles.
S’agissant des bars-concerts, il est proposé de développer en Aquitaine le réseau
des établissements affiliés au Collectif Culture Bar-Bars, par un développement
de l’information en direction des établissements ayant une activité régulière ou
occasionnelle d’accueil de concerts, dans le cadre d’un partenariat associant le
RAMA (dont réseau des salles) et l’UMIHRA.
De façon générale, le Plan Régional d’Initiatives, d’innovations et de Soutien en faveur
des Musiques actuelles en Aquitaine devrait intégrer une déclinaison régionale des
schémas d’orientation et développement des lieux de musiques actuelles (SOLIMA),
prenant en compte l’apprentissage, la répétition, l’enregistrement et la diffusion.
Un autre aspect à considérer dans ce cadre est la mise en place au niveau local
d’instances de médiation, associant l’Etat (Ministère de l’Intérieur, DRAC), les gestionnaires de lieux, les collectivités locales, des artistes et usagers, afin d’entamer
un travail de sensibilisation et de traiter de manière préventive les relations avec le
voisinage des lieux de diffusion307.
- La prise en compte particulière de la situation des artistes (auteurs-compositeursinterprètes) ou musiciens relevant du champ des musiques actuelles, qui exercent
pour la plupart dans des conditions d’emploi ou de rémunération précaires, est
un point délicat. Plusieurs raisons à cela :
• D’abord l’atypicité des motivations et des parcours – la démarche artistique est
pour la plupart avant tout guidée par une passion plus que par un schéma de
« carrière », par le plaisir de jouer en groupe et devant un public aussi limité
soit-il, par un engagement dans la création plus que par un « business ».
• Ensuite, autant par réalisme que par choix militant, une grande majorité exerce
dans un cadre « amateur », ce qui n’exclut pas, loin s’en faut, l’absence de
professionnalisme. Autrement dit, la pluri-activité et les « petits boulots »
accompagnent souvent le parcours des artistes et groupes, complétés quand cela
est possible et souhaité des indemnisations de période de chômage permises
par le régime de l’intermittence.
• Par conséquent, l’application aux activités artistiques concernées des approches
traditionnelles de gestion de l’emploi (et du schéma adéquationniste entre
formation qualifiante et emploi) est largement inadaptée ou inopérante.
L’établissement d’un véritable « statut de l’artiste » (à ne pas confondre avec le
pseudo-statut d’intermittent du spectacle), tout comme l’ajustement (entendu
comme adaptation dans le sens d’une justice sociale accrue308) du régime
d’indemnisation du chômage de l’intermittence est à ce jour hors de portée
d’une collectivité territoriale. Ils relèvent pour l’un du pouvoir législatif de l’État
et pour l’autre d’une négociation entre partenaires sociaux. Par conséquent,
l’action du Conseil régional dans ce domaine doit porter essentiellement sur le
renforcement des systèmes d’accompagnement des artistes et groupes, par le
soutien apporté à certains lieux ressources (ex : SMAc) et opérateurs (producteurs
et développeurs d’artistes).
- Un autre segment clé de la diffusion dans le spectacle vivant est constitué par
l’organisation de festivals. Le territoire aquitain est riche d’initiatives dans ce
domaine, certaines manifestations ayant même acquis une notoriété nationale
voire internationale. De plus, le travail d’animation culturelle réalisé à l’échelle
des territoires par certaines associations organisatrices, en amont des festivals
(307) En s’inspirant de l’expérience
menée dans certaines villes
telles que Nantes.
(308) Visant notamment à écarter
de ce régime des artistes percevant
par ailleurs des revenus très substantiels
de leur activité, en le réservant à ceux
qui en ont le plus besoin.
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quand ce n’est pas tout au long de l’année, doit être mis en exergue. L’économie
de ces « TPE » culturelles reste cependant fragile, soumises à la fois à des phénomènes
de concurrence (y compris celle d’opérateurs internationaux), concurrence
accentuée par la transposition de la directive européenne sur les services, et au
renchérissement de certains coûts, mais aussi à la réduction des budgets publics.
La politique régionale de soutien à ces festivals et aux structures organisatrices
devrait accorder une priorité :
• aux événements organisés en région par des opérateurs régionaux,
• s’inscrivant dans une démarche de valorisation et de diffusion équilibrée, c’est-àdire de programmation permettant à la fois de satisfaire aux attentes d’un large
public mais aussi à une demande de production sur scène d’artistes ou groupes
repérés en région,
• développant en amont de la période des festivals des activités d’accueil de
résidences d’artistes ou des master-classes associant des artistes ou groupes
locaux émergents,
• mettant en œuvre des actions de développement durable en termes d’écoresponsabilité (transports, gestion des déchets, consommables), d’accessibilité
des publics (politique tarifaire, handicapés…) et de prévention de certains
risques (auditifs, alcoolisme, MST).
La modulation des aides régionales devrait parallèlement tenir compte des
activités déployées de manière plus régulière par les structures ou associations
concernées, que ce soit en matière de sensibilisation ou d’éducation des publics,
d’accompagnement d’artistes ou de diffusion sur les territoires d’implantation.
Ces structures devraient également pouvoir accéder à des aides ou dispositifs
d’appui en matière de création ou de gestion de l’emploi et de formation (salariés et
bénévoles).
- Enfin, dans le cadre de la politique contractuelle établie entre le Conseil régional
et certains médias et entreprises d’audiovisuels (dont chaînes TV, sociétés de
production), il est suggéré de favoriser la captation de spectacles vivants
(concerts) de groupes ou artistes régionaux, notamment parmi ceux édités par
des labels aquitains.
5.3 Face à la mutation numérique, renforcer les capacités
d’adaptation, d’anticipation et d’innovation du secteur
Actuellement, l’ensemble de la filière des musiques actuelles est secoué par l’impact
des nouveaux usages et services développés à partir des technologies numériques.
Celles-ci modifient en profondeur les comportements d’écoute, d’accès aux œuvres
musicales, de création artistique, de rémunération des artistes et ayant-droits, de promotion
et de diffusion des biens culturels. Elles concernent aussi bien la filière de la musique
enregistrée que celle du spectacle vivant.
Dans un tel contexte de mutation, l’intervention régionale devrait agir à plusieurs niveaux :
l’accompagnement des opérateurs dans une phase de changement, le développement
de la recherche-développement, l’éducation et la sensibilisation des usagers.
■ Vis-à-vis des opérateurs (producteurs et éditeurs phonographiques notamment,
mais également des lieux de diffusion, organisateurs de concerts et spectacles,
distributeurs indépendants…), l’objectif à ce niveau vise à faciliter leur adaptation
aux nouvelles pratiques en soutenant le déploiement de solutions (techniques, services,
organisationnelles) permettant d’exploiter les opportunités de valorisation
multimédia des œuvres et groupes/artistes (rénovation de sites intégrant des
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possibilités de téléchargement ou l’écoute en ligne, liens dynamiques avec des
blogs d’artistes, vidéo-clips, réseaux sociaux ou communautés virtuelles…). Pour ce
faire, la mise en place d’une aide au conseil, d’une assistance technique ou encore
la mobilisation d’un personnel qualifié et/ou la formation de personnel salarié
(ex : chargés ou assistants de communication) devraient être favorisées. Compte-tenu
de la transversalité de cette question, l’hypothèse d’une réponse mutualisée mérite
d’être envisagée, soit au travers de la mise à disposition d’un personnel qualifié
via un groupement d’employeurs (AGEC) soit à travers une mission externalisée
coordonnée par le RAMA.
L’objectif d’anticipation consiste à ce niveau à accompagner les acteurs vers des
scénarios de mobilisation de ces technologies et services plus favorables aux
opérateurs de la chaîne musicale (des artistes aux auditeurs/internautes).
■ Certaines structures ou entreprises309 ont développé des technologies et services
spécifiques. En fonction des besoins, celles-ci pourraient bénéficier d’un accompagnement pour le développement commercial de leurs produits (définition d’une
stratégie commerciale, recrutement d’un cadre commercial, participation à des
salons, aide à l’export).
■ Considérant les acquis et le potentiel de recherche-développement existant310,
il est proposé de renforcer les moyens mobilisés dans ce domaine, en consolidant
les équipes des laboratoires concernés (ex : Labri, Scrime), en structurant les partenariats intra et extra-régionaux (nationaux et européens) et en favorisant les
transferts de technologies en direction de certains acteurs régionaux des musiques
actuelles, s’agissant notamment de certains pôles ressources (SMAc par exemple).
■ Par ailleurs, il importe d’accompagner cette mutation numérique et l’innovation
technologique dans le domaine des musiques actuelles par un travail en profondeur
de sensibilisation et d’apprentissage auprès des artistes et du public. Cela recouvre
le développement des ressources et ateliers de formation en matière de Musique
Assistée par Ordinateur (MAO), l’expérimentation et le transfert d’expérience en
matière d’appropriation de nouvelles interfaces technologiques (audio/vidéo), le
développement de modules de formation pour des artistes tentés par l’autoproduction mais aussi le déploiement d’une pédagogie pro-active sur les conditions et
modalités d’accès numériques aux œuvres musicales.
Ce travail pourrait mobiliser certains pôles ressources intéressés (ex : SMAc ou
structures d’apprentissage), le réseau des médiathèques (dont Média-Cités), des
entreprises développant des technologies ou services (Stantum/Jazz Mutant, Blue
Yéti, Musique Libre !) et les centres de culture scientifique et technique (ex : Cap
Sciences, Créacsiences, Lacq Odyssée).
A ce niveau, la conception et l’organisation spécifiques d’une exposition portant
sur le thème « musiques et technologies, les univers du son », permettant de
sensibiliser le grand public à la fois sur les évolutions et l’avenir des technologies
associées à l’univers de la musique mais aussi sur certains risques (ex : risques auditifs)
pourraient être envisagées.
■ La promotion et la diffusion sur des lieux publics (SMAc, médiathèques) de certaines
technologies et services innovants311 permettant l’accès à une offre diversifiée d’œuvres
musicales produites en région (labels, autoproductions) doivent être encouragées.
■ Enfin, la diversité des enjeux et des impacts liés à la société numérique sur la filière des
musiques amplifiées justifie la mise en place d’une mission de veille et d’animation,
qui pourrait être coordonnée par le RAMA avec l’appui de l’agence régionale
Aquitaine Europe Communication (AEC) et faire l’objet d’un thème spécifique de
(309) Exemples : Stantum,
Musique Libre ! Blue Yéti
ou projets développés au sein
de l’incubateur de l’AEC.
(310) Labri, Scrime, ENSEIRB,
programmes de recherche développés
en lien avec des entreprises
de technologie
et des structures culturelles.
(311) Exemples : plate-forme
1d-Aquitaine, Pragmazic,
bornes interactives Automazic
et Minimazic.
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travail dans le cadre de la concertation territoriale sur les musiques actuelles. Cette
veille devrait porter à la fois sur les aspects technologiques et techniques, mais
aussi sur les usages ou comportements des internautes et sur les aspects juridiques
(gestion des droits, confidentialité, sécurité…).
5.4 Conforter la structuration en réseau des acteurs
et les démarches d’organisation collectives
La réponse des opérateurs régionaux des musiques actuelles aux enjeux soulevés se heurte
à différents obstacles ou limites. A la grande diversité et fragilité des acteurs s’ajoute un
relatif défaut de structuration sinon, localement, de cohésion. C’est la raison pour
laquelle il convient d’élargir et de consolider le travail d’organisation collective engagé
depuis quelques années, en s’appuyant sur les réseaux existants.
■ Cet élargissement et cette consolidation concernent en premier lieu le Réseau
Aquitain des Musiques Actuelles. Le travail réalisé par cette structure depuis une
douzaine d’années mérite ici d’être souligné, d’autant qu’il s’est construit avec des
ressources limitées. Il faut insister sur l’importance de la mission de coordination et
d’animation collective du secteur dans le contexte décrit. Si le RAMA n’a pas vocation
à se substituer au rôle spécifique de chacun des acteurs qui y participe, il joue un
rôle évident de co-construction de réponses collectives, de réflexion, de transfert
d’expériences et d’expérimentation, de maillage entre « underground » et « upperground » à l’échelle régionale.
La diversité des chantiers engagés dans ce cadre lui confère une position d’interface
entre les différents acteurs composant le « système » régional des musiques
actuelles. La mise en œuvre de ce travail a atteint aujourd’hui un seuil, faute de
ressources. De ce point de vue, l’accroissement et l’élargissement de ce réseau doit
rester une priorité. A cet effet, il conviendrait de renforcer les moyens du RAMA
autour des missions suivantes :
- Des missions transversales : animation et coordination des concertations territoriales
(à prolonger sur plusieurs thématiques), accompagnement des acteurs (développement de projets, ingénierie technique, juridique et financière312…), le montage
de sessions de formation courte sur des sujets techniques ou de management,
observation du secteur (en lien notamment avec l’Observatoire régional de la
culture et avec les universités ou établissements d’enseignement supérieur313), la
veille et la communication (site internet, lettres ou bulletins thématiques…).
- Des missions thématiques : poursuite du travail sur le développement durable
(festivals, lieux, système d’achats groupés…), mise en place d’une mission de
veille et de réflexion sur les enjeux du numérique, prolongement des travaux sur
la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (dont groupement
d’employeur), appui à la création d’un collectif aquitain Culture Bar-Bars, lancement d’un travail sur l’économie créative et sur les territoires créatifs, réflexion
sur l’accès aux médias audiovisuels (dont chaînes TNT et radios numériques…).
Ces missions thématiques offrent l’opportunité d’un élargissement du réseau vers
d’autres catégories d’acteurs régionaux. Elles sont aussi de nature à mobiliser des
moyens d’expertise et de préfigurer certains projets portés par des adhérents.
Par son action, le RAMA constitue donc une pièce maîtresse du système régional des
musiques actuelles qui appelle un effort spécifique de soutien au niveau régional.
■ Un autre acteur important de ce dispositif intéresse les producteurs de musique
enregistrée, à travers la Fédération des Éditeurs et Producteurs Phonographiques
Indépendants d’Aquitaine (FEPPIA). Regroupant actuellement une trentaine de
(312) Dont montage de dossiers
de demande d’aide
auprès du Centre National des Variétés,
du Fonds pour la Création Musicale,
du Fonds d’Action
et d’Initiative Rock (FAIR).
(313) Universités de Bordeaux 3,
Bordeaux 4, Bordeaux 2 (sociologie),
Bordeaux Ecole de Management…
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structures, cette toute jeune fédération remplit également une fonction importante
d’animation de ce maillon déterminant de la filière. Directement concernée par la
crise du disque audio, cette fédération a initié des projets relatifs au réseau des
points de vente de disques (dont librairies indépendantes avec l’appui de l’agence
ECLA) et à la mise en place d’une plate-forme commune des labels régionaux. Il
convient d’approfondir et de soutenir ce travail dans plusieurs domaines :
- la sensibilisation et la promotion des productions concernées en direction du
public des bibliothèques-médiathèques, en lien avec le réseau des discothécaires
(rassemblés au sein d’un collectif BIMUDAQ) et l’agence ECLA,
- l’accès des producteurs - éditeurs phonographiques indépendants aux appels
d’offres de ces mêmes établissements (marché régional de 40 000 disques / an),
- le développement des solutions mutualisées pour mieux accompagner le virage
numérique des labels aquitains, notamment par un enrichissement de l’offre de
services sur la plate-forme numérique 1d-aquitaine,
- l’expérimentation de solutions technologiques et de services innovants associés
à la diffusion de supports (CD, fichiers numériques aux formats MP3, FLAC ou
plus largement « lossless »…),
- le développement de supports audios/vidéos (cf. Axe 2),
- la communication (présence sur les lieux de spectacle vivant et festivals, relations
médias…).
La vocation de cette fédération, la structure dominante des entreprises ou organisations adhérentes et l’esprit qui les anime militent en faveur d’une possibilité
d’évolution à terme vers un statut de type société coopérative d’intérêt collectif,
forme de société coopérative permettant d’associer diverses catégories d’acteurs
(en l’occurrence ici producteurs et éditeurs phonographiques, artistes ou groupes,
associations, particuliers amateurs de musique…) sur un territoire donné poursuivant
un objectif commun (ici la défense et la promotion de la diversité culturelle et
du dialogue interculturel).
■ La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences est un enjeu capital pour
l’avenir de cette filière : aussi bien pour les artistes en voie de professionnalisation
que pour les salariés des activités-supports, mais aussi pour les bénévoles administrateurs d’associations gestionnaires, très présentes dans ce secteur.
Les travaux conduits auprès des structures employeurs révèlent les besoins (politique de recrutement, accompagnement des plans de formation, compétences
entrepreneuriales et stratégiques, formation des bénévoles). De plus, certaines
compétences restent difficilement accessibles pour des associations ou TPE aux
ressources limitées. D’où l’intérêt de formules mutualisées de gestion de l’emploi.
Les axes d’intervention dans ce domaine devraient prioritairement concerner :
- le soutien au développement du groupement d’employeurs Aquitaine Groupement
d’Employeurs Culture (AGEC), dont l’activité devrait bénéficier d’un accord
obtenu avec le Ministère des Finances permettant une exonération de TVA quel
que soit le régime fiscal des structures adhérentes. L’élargissement à d’autres
opérateurs du spectacle vivant de l’intervention de ce groupement d’employeurs
devrait également être encouragé,
- l’organisation de sessions de formation sur la GPEC au profit des administrateurs
et gestionnaires d’association (via le RAMA et la CRESS Aquitaine),
- dans une approche plus générale, il serait opportun d’étudier la définition et
les conditions d’application d’un Accord régional pour de Développement de
l’Emploi et des Compétences (ADEC) dans le secteur des musiques actuelles et
du spectacle vivant, prenant en compte la spécificité de ce marché de l’emploi.
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Un tel accord suppose l’instauration d’un véritable dialogue social, encore
embryonnaire, au sein de la filière, associant employeurs, représentants de salariés
et les pouvoirs publics.
Au-delà de ces dispositions de portée générale, il importe d’insister sur l’indispensable
approche territoriale de ces questions, qui pourrait être couplée à l’élaboration des
schémas d’orientation et de développement des lieux de musiques actuelles en
préparation (Dordogne, agglomérations bordelaise et paloise) et à venir, par
déploiement de certains dispositifs en lien avec le service public de l’emploi (ex :
Dispositifs Locaux d’Accompagnement).
■ Cet objectif de structuration et d’organisation est d’autant plus pertinent qu’il s’adosse
à un véritable projet territorial. L’ancrage aux territoires des pratiques et des activités
liées aux musiques actuelles a clairement été souligné dans l’analyse (4ème partie),
favorisant l’accès aux expressions et pratiques artistiques, le dialogue interculturel
et le lien social. Il offre dans certaines configurations de réelles opportunités
d’affirmation de territoires « créatifs ». (cf. 4.3). Cette « mise en musiques » des
territoires pourrait s’appuyer sur le réseau de pôles-ressources répartis sur le
territoire régional. En ce sens, l’intervention régionale a vocation à favoriser les
initiatives portées à l’échelon départemental ou local (agglomérations, pays ou
communautés de communes), notamment :
- par l’accompagnement à l’élaboration des schémas d’orientation et développement
des lieux de musiques actuelles (SOLIMA), en veillant à la prise en compte des divers
aspects mentionnés précédemment,
- par le soutien à des projets collectifs en direction de populations défavorisées ou
isolées dans les quartiers et en zones rurales,
- par un accompagnement à la définition et à la mise en œuvre de projets territoriaux
basés sur la valorisation des musiques actuelles et des activités créatives ou innovantes
associées (cette démarche pouvant être associée ou prolonger l’élaboration d’un
SOLIMA, notamment dans le cas de l’agglomération bordelaise),
- par un soutien à des projets de mobilité (échange de groupes, accueil de résidences
ou de master-classes) favorisant les liens ou les brassages interculturels, aussi bien
à l’échelle des territoires concernés que dans le cadre d’échanges avec d’autres
régions d’Europe ou pays extra-européens.
Le succès de ces démarches territoriales dépend pour une large part de l’intensité et de
la qualité des relations établies entre les différents maillons de la filière ou pour le dire
autrement sur les capacités d’ouverture des acteurs (privés et publics).
5.5 Poser les bases d’une nouvelle « démocratie culturelle »
ou d’un contrat citoyen par les musiques actuelles
Les musiques actuelles se caractérisent à la fois par leur popularité, par un certain
manque de reconnaissance du côté des pouvoirs publics et par la diversité des acteurs
impliqués dans leur valorisation en région. En outre, les principes et la démarche de
développement de ce secteur, qui évolue dans un système d’économie « hybride » (privé
lucratif ou marchand / privé non lucratif ou non marchand / public), le placent au centre
d’un système de partenariat multiple.
De fait, la mise en place d’espaces d’intermédiation ou de concertation entre les différentes
parties prenantes s’avère déterminante, notamment dans le cadre de démarches de
définition, de co-construction et de mise en œuvre de projets collectifs.
A ce titre, le travail réalisé au niveau régional à travers les concertations territoriales sur
les musiques actuelles en Aquitaine, coordonné par le RAMA, a permis une réelle avancée
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dans l’inter-connaissance, le dialogue et la structuration entre les divers opérateurs.
Toutefois, l’organisation et la mise en œuvre de ces démarches collectives se sont essentiellement opérées entre opérateurs bien identifiés et pouvoirs publics, délaissant
quelque peu l’expression des Aquitains qui, par leurs pratiques et leur demande,
fondent l’activité de ces mêmes opérateurs.
C’est pourquoi il est proposé d’approfondir la démarche inaugurée à travers les concertations territoriales par application des principes contenus dans la Déclaration universelle
de la diversité culturelle et de certains cadres d’action issus des principes du développement durable, dont la récente norme-guide ISO 26000 sur la responsabilité sociétale des
organisations.
■ Il est suggéré d’élargir les concertations territoriales en direction des Aquitains
(notamment artistes amateurs, usagers des lieux ou pôles ressources, habitants à
proximité des lieux de diffusion) par l’organisation d’ateliers thématiques ou
réunions ouvertes à un public plus large.
■ Le déploiement de ce type de concertations territoriales à l’échelle des périmètres
couverts par les SOLIMA pourrait également être encouragé.
■ Les expériences d’organisation de structures gestionnaires associant des représentants
d’artistes et du public dans leur conseil d’administration (ex : le « Sans Réserve » à
Périgueux) mériteraient d’être mieux valorisées, notamment par des transferts
d’expérience.
■ Un autre aspect à considérer dans ce cadre est la contribution directe et indirecte
des pratiques et activités liées aux musiques actuelles à l’exercice de la citoyenneté
et à l’apprentissage d’un vivre-ensemble. Cette contribution, bien que perceptible,
reste cependant difficile à cerner ou évaluer. Il serait à cet égard intéressant d’initier
un programme de recherche en sciences humaines (sociologie, anthropologie…)
autour d’un tel sujet.
5.6 Expérimenter un nouveau mode d’intervention publique
L’ensemble de ces préconisations témoigne du caractère transversal d’une politique en
faveur des musiques actuelles qui va bien au-delà du champ des compétences ou des
interventions d’une politique culturelle stricto sensu. Au demeurant, ce Plan Régional
d’Initiatives, d’innovations et de Soutien en faveur des Musiques actuelles en Aquitaine
n’a pas la prétention d’une politique culturelle régionale mais d’une prise en compte,
dans la politique régionale, des conditions favorables à l’exercice de pratiques artistiques
ou culturelles et à leur valorisation. Cette approche a pour effet, et pour contrainte, la
mise en cohérence de cadres d’intervention sectoriels et l’élaboration de dispositifs
adaptés aux caractéristiques, à la structure et aux missions des différentes organisations
impliquées dans cette filière d’activités.
■ C’est la raison pour laquelle il est proposé que le Conseil régional (éventuellement
associé à d’autres collectivités) use de son droit d’expérimentation, conformément
aux dispositions constitutionnelles et à celles de la loi organique du 1er août 2003.
Cette expérimentation pourrait être accompagnée d’une adaptation organisationnelle, de manière à répondre efficacement aux exigences d’une approche
transversale.
■ Parallèlement, la Région devrait développer ses services de e-administration afin
de faciliter la circulation de l’information, d’améliorer les conditions de traitement
de dossiers parfois complexes et de mieux exploiter les informations recueillies
sur le système des musiques actuelles aquitain.
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Enfin, considérant les défaillances existantes du système de péréquation des
revenus au sein de cette filière (ex : CNV) au détriment des petits opérateurs ou
lieux en région, il est proposé d’une part que les pouvoirs publics usent de leur
représentation dans les instances concernées pour aboutir à un rééquilibrage de
ce système, par modification de certains critères (ex : concerts amateurs versus
professionnels) et en testant leur application en Aquitaine. D’autre part, il est suggéré
d’étudier en Aquitaine la création d’un fonds régional ou d’une fondation, qui
pourrait être alimenté(e) par des opérateurs privés sous la forme de contributions
volontaires.
Au bout du compte, ce plan « PRISMA » est bien un prisme, un point de vue collectivement assumé, sur une réalité non pas déformée mais transformée, celle d’une reconnaissance de ce que sont les musiques actuelles en Aquitaine, de leur potentiel et des
opportunités qu’elles offrent en termes d’initiative, de créativité et d’innovation.
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Conclusion
Ce parcours dans l’univers des musiques actuelles en Aquitaine est révélateur de la diversité,
de l’intérêt et des potentialités du secteur culturel dans son ensemble, considéré autrement
que sous l’angle d’une Culture officielle ou légitime, autrement que sous le préjugé
d’une culture de « barbares » menaçant l’ordre public.
Au contraire, l’analyse développée met en évidence un ensemble de pratiques qui, pour
peu qu’elles soient justement reconnues, favorisent l’épanouissement personnel comme
le lien social et l’engagement citoyen, nourrissent des courants de création en perpétuel
mouvement et les brassages de cultures diverses. Elles génèrent des activités multiples
de valorisation des œuvres et contribuent, parfois fortement, à l’animation des territoires,
à l’innovation… en bref au développement et à un meilleur bien-être individuel et
collectif.
Ces « musiques actuelles », ainsi qu’on les désigne, offrent aussi le bruit de fond de nos
sociétés, à la fois par leur omniprésence, mais aussi par les expressions qu’elles donnent
à entendre et à voir du corps social dont elles sont issues, constitutives en cela d’une
« culture populaire », par les récits et les formes esthétiques qui les caractérisent dans
toute leur diversité.
Les acteurs qui composent le « système » régional des musiques actuelles sont animés
pour beaucoup d’entre eux par la passion, par l’engagement et l’esprit d’initiative.
Ils font preuve d’une grande capacité ou souplesse d’adaptation et d’une ouverture à
l’innovation. Leur secteur est néanmoins soumis aujourd’hui à de profondes évolutions.
L’objectif premier de ce travail est de rendre compte de cette réalité multiple, de contribuer
ainsi à une meilleure reconnaissance de ce secteur.
Il vise aussi à proposer des pistes d’accompagnement dans le cadre d’une politique publique
régionale en s’appuyant précisément sur cette capacité d’initiative et d’innovation, et en
privilégiant le dialogue et la nécessaire mise en débat public.
Car l’approche de cette réalité régionale des musiques actuelles introduit une question
plus fondamentale : celle de la place de la culture dans le développement régional.
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Annexes
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Maloya (Réu)
Raï
Mbaqanga
(AfrS)
Afrobeat
(Nig)
Raï
Zouk (Ant.)
Cumbia
Vilera (Arg)
Kwaito
Cumbia
digitale
E
Domaine
africain
Shellele
(Eth)
Bossa-Nova
(BR)
Tropicalisme
Salsa
Bailé Funk
Ragga (Jam)
Britpop (GB)
L
Bélé
Gumbé
Samba
Cha-cha-cha
(CU)
Dancehall
Reggaeton
(Pan)
Dub (Jam)
Anti-Folk (US)
L
Chorinho
Mambo (CU)
REGGAE (Jam)
Rocksteady
(Jam)
Grime
(GB)
Nu Disco
GlitchHop
2010
E
Son (CU)
Jazz afrocubain (CU)
Ska (Jam)
ROCK’ROLL
Rockabilly
Nu Soul
2000
U
Danzon (CU)
Changui (Cu)
Calypso
Banda (Mex)
Be-Bop
1990
T
Cumbia
(Col)
Bluegrass
(GB-Irl-US)
Middle
Jazz
Gypsy jazz
Ambient
1980
Electronica
Techno (US)
Trance (All)
Soul (US)
ELECTRO
Drill’n’Bass
Northern
R’n’B
Miami
Bass (US)
Soul (GB)
DISCO
HOUSE (US)
Ghetto H.
Acid House
Prog. House
FUNK
HIP’HOP/rap
Hip House
Hard Rock (US)
P-funk
Hip Hop ind. UK Garage
Space rock GlamRock (GB) New Wave BigBeat (GB)
Rock
Math Rock
Trip Hop
Sudiste (US)
Acid Jazz
(US)
Dirty South
Jazz Fusion
Shoegaze
Jungle
Prog-rock
(GB)
Drum’n’Bass
“Pop”
Krautrock
(GB)
Anadolu Pop
(All)
Crunk (US)
(Tur)
Metal
Trash metal
Dark metal
Nashville
Punk-Funk
Darkwave
Sound (US)
PUNK
Post-punk
(GB)
No Wave “Grunge” (US)
1970
C
Traditions
Afro-Caraïbes
et latinoaméricaines
Skiffle
(US)
Country
(US)
Swing
Southern
SOUL (US)
Doo-Wop
1960
A
Flamenco
Fado
Ragtime
JAZZ
Rhythm’
Blues
(US-Afr.Am)
1950
S
FOLK
(GB-US)
New
Orleans Jazz
(US–Afr Am.)
BoogieWoogie
1940
E
Traditions
musicales
(Europe)
Chants
liturgiques
(Europe)
Gospel
(US-Afr.Am.)
1930
U
Country (US)
1920
1.
Paysage
des musiques
actuelles
et de leur
évolution
Q
Negro
Spiritual
(US-Afr.Am.)
1910
I
BLUES
(US-Afr.Am.)
1900
S
…
U
1850
M
S
187
Musiques traditionnelles et carnavals
d’Afrique de l’Ouest, de France
(dont musique des troubadours !)
Au moins depuis Musiques populaires
le 19ème siècle
19ème siècle
19ème siècle
19ème siècle
Fin 19ème
Années 1910
Gospel
Gumbé
Mento
Ragtime
Jazz
Harry Belafonte, Count Owen, Stanley Beckford…
Scott Joplin, Joseph Lamb, James Scott, Tom Turpin…
San Francisco Seals, Mamie Smith, King Oliver, Kid Ory,
Sydney Bechet, Louis Amstrong, Paul Whiteman,
Fletcher Henderson, Duke Ellington, Count Basie,
Glenn Miller, Lester Young, Coleman Hawkins,
Miles Davis, Gil Evans, Art Blakey, Horace Silver,
Sonny Rollins, Bill Evans, Charles Mingus,
Oscar Peterson, John Coltrane, Ornette Coleman…
E
Afrique de l’Ouest,
Caraïbes
Ska, Reggae
Jamaïque
Jazz, stride, novelty piano
USA
Scat, swing, bebop, hard bop, latin jazz, USA
free jazz, jazz fusion, (jazz-rock), acid-jazz, (Nouvelle-Orléans)
jazz rap, rhythm and blues, rock, pop,
soul, funk, free funk, hip-hop, bossa nova,
house, math rock, mbaqanga, nu soul,
ska, reggae, prog rock, trip hop
U
USA
Woodie Guthrie, Doc Watson, John Baez, Bob
Dylan, Donovan, Léonard Cohen, Phil Ochs,
Pete Seeger, John Wright, Alan Stivell, Hugues
Aufray, Fairport Convention, Steeleye Span…
Mahalia Jackson, Golden Gate Quartet, Sam Cooke,
Hank Williams, Aretha Franklin, Liz Mc Comb…
Andrews Sisters, Harry Bellafonte, Lord Invader…
T
Negro-spirituals
(+ soul plus tardivement)
Musiques traditionnelles européennes
et africaines
Rituels Afrique de l’Ouest
Cakewalk / musiques populaires de salon
Blues, ragtime,
musiques traditionnelles
d’Afrique de l’Ouest et européennes
Pays anglo-saxons
Altamiro Carrilho…
Caraïbes
C
Bluegrass, country, Pop, Rock
and Roll, Rockabilly,
rock sudiste, skiffle, anti-folk,
trip hop
Doo-wop, rhythm and blues,
rock and roll, soul, southern soul,
Zouk
Shuffle, ska, soca, reggae, zouk
Son House, Blind Lemon Jefferson, Blind Blake,
Tommy Johnson, Lonnie Johnson, Robert Johnson,
Gertrude “Ma” Rainey, W.C. Handy, Ida Cox, Bessie Smith,
Howlin’ Wolf, Muddy Waters, Elmore James, Sam Myers,
John Lee Hoocker, Slim Harpo, Big Joe Turner…
Joaquim Callado, Ernesto Nazareth,
Joao Pernambuco, Celso Machado,
Heitor Villa-Lobos, Paulo Moura, Rafael Rabello,
A
Folk
Fin 19ème siècle
Calypso
(ou Kaiso)
Brésil
Sud des USA
(delta Mississippi)
S
Adaptation de musiques européennes
(polka, valse, scottish…)
et africaines (lundu)
19ème siècle
Chorinho
(Choro)
Negro spirituals, chants traditionnels
afro-américains…
mais aussi le flamenco et le fado
19ème siècle
E
Blues
USA
Colombie, Panama, Cuba Lucho Bermudez, Soledeno Efrain Mejia,
Rigo Tovar
Martinique
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
U
Gospel, blues
Cumbia rap (1980)
Cumbia digitale
Cumbia Villera (1990)
Chicago blues, Swamp blues
Jump blues, West side blues, Country,
skiffle, boogie-woogie, jazz, rhythm
and blues, rock, rock sudiste, pop, soul,
southern soul, funk, hip-hop
Zouk
INFLUENCES
Q
Negro Spirituals
Cumbia
Musique et danses traditionnelles
martiniquaises
17ème siècle
Chants religieux
17 et 18ème siècle Traditions musicales africaines
+ amérindiennes + espagnoles
siècle
17
Bèlè
SOURCES
I
ème
S
DEBUTS
U
STYLES
M
L
L
E
S
188
Musiques traditionnelles irlandaises
et écossaises, country, folk
Blues, jazz, boogie-woogie, gospel
Musiques traditionnelles brésiliennes,
samba, jazz
Années 1920
Années
1920/1930
Années 1930
Années 1930
Années 1930
Années 1940
Années 1940
Années 1950
Années 1950
Raï
Banda
Boogie-Woogie
Jazz manouche
(gypsy jazz)
Bebop
Bluegrass
Rhythm and Blues Années 1940
Années 1950
Country
Bossa Nova
Doo-Wop
Free Jazz
SOURCES
No Wave
USA
Eric Dolphy, Cecil Taylor, Ornette Coleman, Albert Ayler,
John Coltrane, Chico Hamilton, Jimmy Giuffre, Paul Bley,
Steve Swallow, Charlie Haden, Sunny Murray, Sun Ra,
Michel Portal, Bernard Lubat…
Golden Gate Quartet, Orioles, The Platters, The Drifters,
Midnighters, The Isley Brothers…
E
Jazz
USA
L
Gospel, Rhythm and Blues
L
Antonio Carlos Jobim, Joao Gilberto
E
Brésil
Johnny Ace, Charles Brown, Jesse Belvin, Ray Charles,
Rosco Gordon, Louis Jordan, Joe Liggins, Junior Parker,
Jimmy Preston, Guitar Slim, Big Joe Turner, Chuck Willis,…
U
Bill Monroe, The Blue Grass Boys, Earl Scruggs,
Alisson Krauss, Lester Flatt, The Osborne Brothers…
Clifford Brown, Paul Chambers, Kenny Clarke, Miles Davis,
Dizzy Gillespie, Dexter Gordon, Pierre Michelot,
Charles Mingus, Thelonious Monk, Charlie Parker,
Oscar Pettiford, Bud Powel, Max Roach, Sonny Rollins
T
Doo-wop, Rock and Roll, pop, soul,
USA
southern soul, funk, ska, reggae, house,
trip hop, rocksteady
USA (Kentucky, Appalaches)
USA
Django Reinhardt, Stéphane Grappelli…
Albert Ammons, Pete Johnson, Memphis Slim,
Lloyd Glenn, Louis Jordan, Big Joe Turner…
C
Jazz
France
USA (New York)
A
Jazz, musique gitane
Rhythm and blues, Rock and roll,
rockabilly,
Mexique
S
Blues, country
Musiques traditionnelles mexicaines,
polka
Cheb Abdou, El-Houari Sghir, Mohammed Zargui,
Mohammed Maghni, Rachid Baba Ahmed, Meksa,
Les Abranis, Idir, Cheb Hasni, Cheb Khaled, Cheb Mami,
Raïna Raï, Fadela, Rachid Taha…
Vernon Dalhart, Jimmie Rogers, The Carter Family,
Roy Acuff, Gene Autry, Roy Rogers, Arthur Smith…
E
Algérie
USA
Jimmy O’Briant, Chicago Skiffers, Dan Burley
& His Skiffle Boys, Lonnie Donegan, Gin Mill Skiffle Group,
Quarrymen, Billy Fury, Hughes Aufray (Skiffle Group)…
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
USA (Nouvelle Orléans)
U
Traditions algériennes, rock, pop, funk,
disco, reggae
Boogie-woogie, Nashville Sound,
rock and roll, rockabilly, rock sudiste,
southern soul, skiffle, pop, cowpunk
INFLUENCES
Q
Blues, folk
Folk, blues, country
DEBUTS
I
Débuts
20ème siècle
S
Skiffle
U
STYLES
M
S
189
Années 1950
Années 1950
Années 1950
Fin années 1960 Chants + percussions yoruba
et funk
Années 1960
Rock, pop,
musiques traditionnelles turques
Années 1960
Soul, jazz, rock, rhythm
Free-funk, p-funk, afrobeat, disco, pop, hip hop,
and blues
electro, house, techno, hip-hop, acid jazz,
Balearic house, drum and bass, post-punk, R&B,
Rap, no wave, nu soul, raï
Années 1960
Pop rock
Punk, Grunge
Ska
Soul
Southern soul
Afrobeat
Années 1960
Heavy metal
Acid jazz
Grunge
Heavy Metal, punk-rock, grunge…
USA
USA, Grande-Bretagne
USA, Grande-Bretagne
E
Jazz, rock, funk,
rhythm’n’blues, soul
Classique, Rock, hard rock
Rock, blues-rock, rock garage
L
Jazz rock (fusion) Années 1960
Années 1960
L
Hard Rock
E
USA, Canada
James Brown, The Meters, Archie Bell & The Drells,
The Commodores, George Clinton
& Funkadelic-Parliament, Earth, Wind & Fire, Prince,
Kool & The Gang…
The Sonics, Trashmen, The Kills, The White Stripes, MC5,
Stooges, New York Dolls, The Monks, The Standells,
The Seeds…
The Kinks, The Who, Jimi Hendrix, MC5, Led Zeppelin,
Deep Purple, Cream, Yardbirds
Rolling Stones, Black Sabbath, Led Zeppelin, Deep Purple,
Scorpions, AC/DC, Uriah Heep, UFO, Alice Cooper,
Judas Priest, Motorhead, Rainbow…
Miles Davis, Herbie Hancock, Chick Corea, Joe Zawinul,
Wayne Shorter…
USA
U
Garage (rock)
Murat Ses
T
Turquie
C
Nigéria
A
USA
USA
Jamaïque
S
Gospel, rhythm and blues, blues,
country, rock and roll
Northern soul, Funk, Disco, hip hop, Rap,
Rocksteady, House garage, Baléaric house,
Trip hop, UK Garage
Rocksteady, reggae, dub
E
Mento, calypso, jazz, shuffle,
rhythm and blues
Rhythm and blues, gospel
Elvis Presley, Carl Perkins, Bill Haley, Johnny Cash,
Little Richard, Buddy Holly, Jerry Lee Lewis,
Eddie Cochran, Chuck Berry, Gene Vincent
Toots & the Metals, Desmond Dekker & The Aces,
The Skatalites, Prince Buster, Coxsone…
Sam Cooke, Ray Charles, James Brown, Solomon Burke,
Wilson Picket, Otis Redding, Percy Sledge, Aretha Franklin,
Etta James, Curtis Mayfield, Marvin Gaye, Stevie Wonder…
Ray Charles, James Brown, Eddie Floyd, Rufus Thomas,
Bobbie “Blue” Bland, Sam&Dave et Wilson Picket,
Little Willie John, Otis Reding…
Fela Anikulapo Kuti
U
Boogie-woogie, country,
blues, folk
Q
Anadolu Pop /
Rock
Funk
Années 1950
Chuck Berry, Fats Domino, Little Richard, Johnny Otis,
Elvis Presley, Jerry Lee Lewis, Bill Haley…
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
Rockabilly, rock-pop, prog rock, garage rock,
USA
folk-rock, punk-rock, hard rock, funk, techno,
glam rock, anadolu rock, Britpop, metal,
heavy metal, hip hop, krautrock, math rock,
new wave, no wave, rock sudiste, post-rock, funk,
rap, raï, shoegazing, southern soul, space rock
USA
Rockabilly
Rhythm and Blues,
jazz, gospel, country,
boogie-woogie, folk…
Années 1950
INFLUENCES
I
Rock and Roll
SOURCES
S
DEBUTS
U
STYLES
M
S
190
Rock, blues, country, folk
Années 1960
Années 1960
Années 1960
Années
1960/1970
Années 1960
Reggae
Rock garage
Rock
psychédélique
Rock sudiste
Années 1970,
1990
Années 1970
(années 1990)
Années 1970
Années 1970
Années 1970
Ambient
Dancehall
Dub
Free Funk
Ornette Coleman, Ronald Shannon Jackson,
Jamaaladeen Tacuma, James “Blood” Ulmer
E
Funk, jazz
L
Reggae
Italo-disco, Euro-disco, Nu disco, House,
Garage house, Acid jazz, Hip Hop, Postpunk, Punk-funk, Raï, Rap, Techno, Electroclash,
Ragga, Techno, drum and bass jungle,
house, ambient, hip hop, trip hop,
électronica, post-punk, progressive house,
M-Base
USA
L
Funk, soul, pop
Ambient techno
Electronica, krautrock
Ragga, Reggaeton
E
Reggae, électro
Tous styles (dont classiques)
Jazz, pop, funk, soul, disco
U
Disco
Années 1970
T
Acid-jazz
New age, trance
C
Prog rock, rock psychédélique
A
Années 1960
S
Space rock
E
Ska, rhythm and blues, soul
Acid-jazz, anadolu-pop, Baléaric house,
Britpop, disco, house, rock garage, R&B,
shoegazing, techno, trip hop, raï,
électroclash, grunge
Mento, calypso, jazz, rhythm and blues, Dub, Dancehall, Ragga, Jungle,
ska, rocksteady
Drum and bass, reggaeton, raï
rock
Punk, grunge
Rhythm and Blues, Jazz, folk, blues,
soul, funk, musiques diverses
U
Rocksteady
rock
Années 1960
Pop
Pop rock
Q
Soul
Années 1960
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
Afrique du Sud
The Cool Crooners, Simon Mahlathini Nkabindé,
Miriam Makeba, Dolly Rathebe, Letta Mbulu…
Grande-Bretagne
Paul Weller, Jam, Soft Cell, Dexys Midnight Runners,
Jimmy James and the Vagabonds, Esther Phillips,
Marvin Gaye, Jerry Butler, Gene Chandler…
USA, Europe
Beatles, Rolling Stones, The Animals, The Shadows,
The Yardbirds, Abba, Oasis, James Brown, Madonna,
Michael Jackson, Téléphone, Johnny Halliday,
Eddy Mitchel, Michel Polnareff, Gainsbourg…
Jamaïque
Bob Marley, Lee « Scratch » Perry, Peter Tosh,
Bunny Wailer
USA
Trashmen, MC5, The Stooges, New York Dolls, The White
Stripes, The Kills, The Monks, Iggy Pop, Noir Désir…
USA – Grande-Bretagne Pink Floyd, Cream, The Byrds, The Doors, The Who, Grateful
Dead, The Seeds, Temptations, The Deviants, Pink Fairies…
USA
The Allman Brothers band, Lynyrd Skynyrd,
Marshall Tucker Band, Doc Holliday, 38Special…
USA
The Heptones, Alton Ellis, Stranger Cole, Val Bennet,
The Clarendonians, The Paragons, Desmond Dekker,
BB Seaton, Bob Marley…
Grande-Bretagne
Pink Floyd, Hawkwind, Ozric Tentacles, Dream Machine,
Tangerine Dream…
Grande-Bretagne
Gilles Peterson, Galliano, The Brand New Heavies,
(Londres)
Mother Earth, James Taylor Quartet, Jamiroquai
Grande-Bretagne
Brian Eno, Tangerine Dreams, Vangelis…
(Londres)
The Orb, Aphex Twin, Autechre
Jamaïque
Yellow Man, Super Cat, Beenie Man, Buju Banton,
Bounty Killer, Elephant Man, Shaggy, Sean Paul…
USA
Donna Summer, Village People, Cerrone,
George McCrae, Bee Gees, Gloria Gaynor, Barry White,
Shirley Goodman, Marianne Rosenberg, Boney M, Abba…
Jamaïque
King Tubby, Lee Scratch Perry, Bunny Lee, The Clash,
Mad Professor, Adrian Sherwood, The Revolutionaries…
I
Northern Soul
(Motown soul)
SOURCES
INFLUENCES
Jazz, musiques traditionnelles sud-africaines
S
DEBUTS
Années 1960
U
STYLES
Mbaqanga
M
S
191
Années
1970
Années
1970
P-Funk
E
Coldwave
Grande-Bretagne,
USA
Appellation française
darkwave
L
Années
Punk, disco, électronique
1970
Années
New Wave, post-punk
1970-1980
L
Rock garage
Europe
(Grande-Bretagne)
USA
Panama,
Amérique latine
Cowpunk, Punk-funk, post-punk,
Grande-Bretagne,
Anti-folk, Grunge, New wave, électroclash USA
Southern rap, grime, jazz rap, ragga,
snap music
Space rock, progressive house
E
Reggae, dancehall, hip hop
Rock, jazz fusion, musique classique,
musique électronique
Soul, funk, disco, rock
U
Punk-funk
Années
1970
Rap (cf. hip-hop) Années
Rhythm And Poetry 1970
Rock Against Police
Reggaeton
Années
1970
Punk
Années
1970
USA
T
Prog Rock
Codwave, darkwave, no wave
USA
USA (New York)
C
Punk, Krautrock, dub, funk, disco
Funk
New wave, rock, funk, free jazz,
post-punk
A
Post-punk
Années
1970
International
S
No Wave
New Wave
E
Tangerine Dream, Can, Neu !, Faust, Kraftwerk,
Cosmic Jokers…
The Buggles, Human League, U2, Depeche Mode, Tears For
Fears, Eurythmics, Simple Minds, The Cure, New Order,
Cocteau Twins, Erasure, Kim Wilde, Blondie, Indochine…
James Chance and the Contorsions, James White and the
Blacks, Teenage Jesus and the Jerks, Mars, DNA, Lydia Lunch,
Don King, Theoretical Girls, Red Transistor, Rhys Chatham,
Blurt, Tuxedomoon, Sonic Youth, Liars, Swans…
George Clinton, Parliament, Funkadelic, Eddie Hazel,
Bootsy Collins
Public Image Ltd, Devo, The Fall, Gang of Four, Wire,
Joy Division, Pere ubu, The Raincoats, The Cure,
The Stranglers, The Slits…
King Crimson, Genesis, Pink Floyd, Yes, Magma, Tool,
Radiohead, EmersonSoft Machine…
Public Enemy, Grandmaster Flash, Assassin, Run-DMC,
KRS-One, NWA, Gang Starr, Dr Dre, Ice Cube, Eazy-E,
NAS, Mobb Deep, Eminem, RJD2…
Bobby Digital, El Chumbo, Vico C, Speedy, Yandel,
Daddy Yankee…
Sex Pistols, The Ramones, The Clash, Patti Smith Group, Bay City
Rollers, Bruce Springsteen, Lou Reed, The Heartbreakers,
The Voidoids, Green Day, The Offsprings, Sum 41…
Gang of Four, Liquid Liquid, Devo, Wire, PIL, Talking Heads, Joy
Division, Radio4, The Rapture, LCD Soundsystem, Duchess Says…
Marquis de Sade, Joy Division, Bauhaus, The Cure,
Dead Can Dance, Cabaret Voltaire, Kas Product, Clair Obscur…
U
Allemagne
Q
Rock, électronique, ambient, musique
contemporaine (Stockhausen, Glass, Reich…)
Punk, rock
Coldwave, darkwave, électroclash,
italo-disco, No wave, synth-pop
Années
1970
Années
1970
Krautrock
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
Grande-Bretagne
T-Rex, Marc Bolan, David Bowie, Roxy Music, Queen,
Alice Cooper, Freddy Mercury, New York Dolls, Stooges…
USA (New York)
DJ Kool Herc (Clive Campbell), Grandmaster Flash,
Run DMC, Public Enemy, DJ Dee Nasty…
I
Hip house, hip hop industriel, drum
and bass, electro, jazz rap, Miami bass,
R&B, reggaeton, trip hop, UK garage,
crunk, ghettotech, glitch Hop, nu soul
Post-punk
INFLUENCES
S
DEBUTS SOURCES
Années
Rock
1970
Années
Soul, funk, disco, rock
1970
U
STYLES
Glam Rock
(Glitter rock)
Hip Hop
(rap, slam)
M
S
192
DJ Larry Levan, Masters at Work, Kerry Chandler,
Kings of Tomorrow…
Mark Stewart, Bill Laswell, Tackhead, Adrian Sherwood, Dälek…
The Beatmasters, The Jungle Brothers, Todd Terry,
Bob Sinclar, Technotronic, Rihanna…
DJ Frankie Knuckles, Keith Farley, Marshall Jefferson,
Lil’ Louis, Larry Heard, Steve “Silk” Hurley…
Europe
USA (New York)
USA (Chicago)
Mouvement gothique
House, Electronica, Miami bass, ghtettotech,
Dancehall, techno, darkwave, bailé funk, punk funk
UK garage
C
T
U
E
Acid house, Deep house, house garage, ghetto house, USA (Chicago)
tech house, Balearic house, hip house, progressive house,
techno, électronica, kwaito, nu disco, nu soul, trance
Nu disco
Europe (Italie,Allemagne,
France, Espagne)
USA
Crunk, Dirty South, ghetto house,
USA (Floride)
ghettotech, bailé funk
Grunge, trance, math rock
USA, Europe
A
L
Aleph, Atrium, Baltimora, Carrara, Casco, Coo Coo, Den Harrow,
Deborah Kinley, Mirage, Opus, Raf, Silent Circle…
Don Caballero, 65Daysofstatic, Slint, Shellac, JuneOf44…
Amos Larkin, 2 Live Crew, MC ADE, DJ Magic Mike,
Quad City DJ’s, 95South, Freak Nasty…
Metallica, Iced Earth, Slayer, Megadeth, Anthrax, Sepultura,
Testament, Exodus, Dark Angel, Bathory, Mercyful Fate,
Hellhammer/Celtic Frost, Venom…
Green on Red, The Gun Club, Lone Justice, The Vandals,
Meat Puppets, The Mekons, Guttermouth…
Bauhaus, Cocteau Twins, The Cure, Dead Can Dance,
Joy Division, Siouxie & the Banshees, Killing Jokes,
Dépêche Mode…
Afrika Bambaataa, Kraftwerk, Drexciya, Juan Atkins, Aux 88…
USA (Californie)
S
USA
José Padilla
E
Espagne (Ibiza)
U
Culture rave, trance, big beat, ghetto house
Q
House
Folk traditionnel,
punk
Bailé Funk
Rythmes trad.
afro-brésiliens+ hip-hop,
électro, miami bass
Balearic House
Années
House, soul, funk,
1980
dub, pop…
Cowpunk
Années
Country, folk-rock,
1980
punk
Darkwave
Années
Post-punk,
1980
new wave,
électro
Electro
Années
Hip hop,
1980
funk
Garage (house) Années
House, disco,
1980
soul
Hip hop industriel Années 1980 Hip hop, musiques
électroniques
Hip House
Années
Hip hop, House
1980
House
Années
Disco, pop, electro,
1980
funk, jazz,
rhythm and blues
Italo-disco
Années
Euro-disco, disco,
1980
new wave…
Math Rock
Années 1980 Rock, jazz, metal
Miami Bass
Années 1980 Electro, hip hop,
(booty bass)
ghettotech…
Metal (dérivés : Années 1980 Rock
trash metal, black
metal, death metal)
Années 1980
Années
1980
Années
1980
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
Grande-Bretagne
Depeche Mode, The Cure, Soft Cell, The Pet Shop Boys,
Tears for Fears, Eurythmics, Duran Duran, Dead or Alive,
Indochine, Rita Mitsouko, Etienne Daho, Richard Gotainer,
Niagara, Mickey 3D…
USA (Chicago) / GB
Phuture, 808 State, Lil Louis, LFO, Happy Mondays, Fatboy Slim…
USA (New-York)
Ani DiFranco, Michelle Shocked, The Moldy Peaches
(Adam Green, Kimya Dawson), Regina Spektor, Beck
Brésil
De Falla, DFL Boss, MC Gi…
I
Acid-House
Anti-folk
INFLUENCES
Electroclash
S
DEBUTS SOURCES
Années
New Wave
1970/1980
U
STYLES
Synth-Pop
M
L
E
S
193
Années 1980
Années 1980
Années 1980
Compas, beguine, calypso, bèlè
Années 1980/1990 Funk, soul, pop, hip hop
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Shoegazing
Techno
Zouk
R&B
Britpop
Crunk
Dirty South
Drill’n’Bass
Drum and Bass
(jungle)
Electroclash
Electronica
Ghetto House
Ghettotech
Glitch Hop
Grunge
SOURCES
microhouse
USA (Seattle)
L
Electronica, hip hop
Garage rock, pop, punk, metal…
USA (Chicago)
USA
L
Miami bass
Chicks on Speed, Fischerspooner, Peaches, Ladytron,
Sexy Sushi…
Amon Tobin, Aphex Twin, Autechre, Chris Clark, Fraction,
Jam’s, Kelpe, Mike Paradinass, Mouse on Mars, Ovuca,
Pan Sonic, Prefuse73, VLAD, Two Lone Swordsmen…
DJ Funk, DJ Deeon, DJ Rush, Waxmaster, Robert Armani…
Disco D, DJ Assault, DJ Godfather, Aux88,
The Detroit Grand Pubahs, Sixfoe, Mr De…
Autechre, Funkstörung, Richard D James
Nirvana, Pearl Jam, Melvins, Soundgarden, Green River,
Screaming Trees, Alice in Chains, L7, Babes in Toyland,
Hole, Foo Fighters, Puddle of Mud, Creed, Seether…
E
House, Miami Bass, Acid House
Miami Bass, techno, electro, hip hop
Grande-Bretagne
(Londres)
Europe (Allemagne,
France)
U
Techno, house, electro, drum and bass, Post-rock, Glitch Hop
dub, big heat, trip hop…
Dubstep, Grime, 2step, UK Garage,
trance, électronica
Nu disco
USA
T
Breakbeat, hip hop, funk, reggae,
dub, techno
Techno, pop, disco, new wave, punk
Crunk, Snap music
USA (Tennessee)
C
Southern rap, Miami bass
Snap music
A
Hiphop, Dirty south, Miami bass
Grande-Bretagne
Kassav, Zouk Machine
Prince, Michael Jackson, Janet Jackson, Whitney Houston,
Luther Vandross, Missy Elliott, Timbaland, Kelis,
Boyz Il Men, Rihanna, Pink, Mariah Carey, Kanye West…
The Smiths, The Stone Roses, Blur, Suede, Oasis, Supergrass,
The Boo Radleys, Pulp, The Divine Comedy, Elastica…
Three 6 Mafia, Lil Jon, BoneCrusher, Lil’Scrappy,
YoungBloodZ…
Cash Money Records, Master P., Goodie Mop, Lil’Flip,
Ludacris, Lil’Jon, Yin Yang Twins, David Banner…
Squarepusher, Luke Vibert, Aphex Twin…
A Guy Called Gerard, 4Hero, Goldie
S
Rock, pop
Antilles
USA
USA
Yellowman, Lone Ranger, Sean Paul, Raggasonic,
Massilia Sound System, Pierpoljak, Elephant Man…
The Velvet Underground, The Jesus and Mary Chain,
The Cocteau Twins, Spacemen 3, My Bloody Valentine,
Sonic Youth, Pixies…
Kraftwerk, Cybotron, Juan Atkins, Derrick May,
Kevin Saunderson, Laurent Garnier, Scan-X…
E
2step, UK Garage, Nu soul, Grime
Tech-house, trance, gabber, jungle,
Ghettotech, Progressive house,
Microhouse
Jamaïque,
Grande-Bretagne
Grande-Bretagne
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
U
Electro, house, funk, disco, pop
INFLUENCES
Q
Pop, rock alternatif
Reggae, rap, rub-a-dub
DEBUTS
I
Années 1980
S
Ragga
U
STYLES
M
E
S
194
Années 1990
Années 1990
Nu soul
Post-rock
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 1990
Années 2000
Années 2000
Années 2000
Années 2000
Snap music
Trance
Trip Hop
UK Garage
Dubstep
Grime
Microhouse
Nu disco
E
Disco, euro-disco, italo-disco,
electroclash, deep-house
L
Techno, tech-house, glitch
L
UK Garage, 2step
UK garage, rap, R&B
E
Dubstep, 2step, grime
U
Electronica,
T
Hip hop, dub, pop, folk, jazz, rhythm
and blues, soul
House garage, hip hop, soul, R&B
C
Techno, house, acid-house, jungle, drum Acid-transe, goa-trance,
and bass, musiques industrielles
trance progressive
A
Crunk, Dirty South, Southern rap
Rock, punk, britpop, grunge
Années 1990
Rock alternatif
S
Rock progressif, house, dub, techno
Trance
E
Progressive House Années 1990
Progressive trance Années 1990
U
Rock, électronica
PAYS D’EMERGENCE ARTISTES, GROUPES
USA
Miles Davis, Ronny Jordan, Roy Hargrove, Steve Coleman,
MC Solar…
Afrique du Sud
Danny K, Mandoza, Boom Shaka, Brenda Fassie, TKZee,
Mzambiya…
Raphael Saadik, D’Angelo, Groove Theory, Maxwell,
Eric Benét, Erykah Badu, Lauryn Hill, Angie Stone,
Jaguar Wright, Jill Scott, Bilal, Pru, Musiq Soulchild,
Lucy Pearl, Macy Gray, Les Nubians…
USA, Grande-Bretagne Tortoise, Mogwai, Stereolab, Cul de Sac, Talk Talk, Laika,
Disco Inferno, Bark Psychosis, Pram, Slint, Seefeel,
Moonshake, Labradford…
Grande-Bretagne
Guerrilla Records, Leftfield, Fluke, Sasha, James Holden…
International
Armin Van Buuren, DJ Tiesto, ATB, Markus Shulz,
Infected Mushroom, Paul Van Dyk, Paul Oakenfold,
Gareth Emery, Nightcore…
International
REM, Pixies, Nirvana, Sonic Youth, Placebo, Mano Negra,
Béruriers Noirs, Wampas
USA (Georgie)
D4L, Ying Yang Twins, BHI, Lil Jon, T-Pain,
Dem Franchize Boyz…
Allemagne
KLF, Sven Väth, Jam El Mar, Paul van Dyk, Goa Gil,
Hallucinogen, Juno Reactor, Astral projection, Hardfloor,
Emmanuel Top, Tiesto…
Grande-Bretagne
Massive Attack, Tricky, Portishead, Archive, Björk,
Morsheeba, Hooverphonic, DJ Shadow…
Grande-Bretagne
MJ Cole, The Artful Dodger, Jaimeson, So Solid Crew,
Heartless Crew, The Streets, Ms. Dynamite, Gemma Fox,
Sweet Female Attitude
Grande-Bretagne
DJ Hatcha, Jay Da Flex, Skream, Benga, Horsepower…
Grande-Bretagne
Dizzee Rascal, Wiley, Roll Deep Crew, Lady Sovereign,
(Londres)
Mike Skinner, Hadouken!, Spinnerette…
Europe
Akufen Farben, Isolée, Herbert, Ricardo Villalobos,
(Allemagne)
Baby Ford, Ark, Anders Ilar, Losoul…
USA, Europe
Runaway, Mock & Toof, Hercules & Love Affairs,
Italo Hammers, Beat Electric, Discodust…
Q
R&B, soul, jazz, funk, hip hop, house
House, musiques africaines
Années 1990
INFLUENCES
I
SOURCES
Jazz, rap, hip hop
S
DEBUTS
Années 1990
U
STYLES
Jazz rap
(jazz hop)
Kwaito
M
S
M
U
S
I
2.
Cartographie
des musiques
actuelles
en Aquitaine
Q
U
E
S
A
ATLAS DE L'AQUITAINE
C
T
U
E
L
L
E
S
CESR Aquitaine
Sources : L'officiel de la musique - IRMA-2010 - REGION AQUITAINE - Fond de plan : IGN BDCarto®
V a l i da t i o n de l a do n n é e : ju in 2 0 1 0
C a r t e m i se à j o u r l e 7 ju ille t 2 0 1 0
Musiques actuelles : Formations
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
APPEL ARTISTIQUE
CIAM
CRR
IREM
MAP
ROCK SCHOOL BARBEY
ADAMS FORMATION
CEFEDEM AQUITAINE
ADAMS FORMATION
CIAM
MAP
ECOLE BRITTEN
IMR
SANS RESERVE
IDDAC
ABC
TRANSROCK
AREMA ROCK ET CHANSON
O cc éé
O
aa nn AA
tt ll aa nn
tt ii qq uu
ee
ROCK IN BUCH
CECAM
UNIVERSITE BORDEAUX III
UNIVERSITE BORDEAUX III
UNIVERSITE BORDEAUX IV
ADEM - FLORIDA
ADEM - FLORIDA
15
30 km
MIDI-PYRÉNÉES
Légende
UNIVERSITE PAU
L'AMPLI
ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE
FORMATIONS ADMINISTRATIVES
PPP
0
VOIX DU SUD
ROCK SCHOOL ANGLET
SSS
CRD DE MUSIQUE DES LANDES
ROCK SCHOOL MONTOISE
LMA
LANETIK EGINA
EEE
ATABAL
CARMA
ACMA
ROCK SCHOOL ROCKSANE
ADAMS FORMATION PÔLE IMAGE
CABINET MUSICAL DU DR LARSENE
CAEM SUD
LA LOCOMOTIVE
A
A
A
G
G
G
N
N
N
FORMATIONS ARTISTIQUES /
ACCOMPAGNEMENT
FORMATIONS TECHNIQUES
EEE
R
CONTACT
Conseil régional d'Aquitaine
Conseil Economique et Social Régional
[email protected]
Tél : 05 57 57 83 19
© Région Aquitaine, Cellule cartographie / SIG
195
E
G
I
O
N
U
S
I
Q
U
E
S
A
ATLAS DE L'AQUITAINE
C
T
U
E
L
L
E
S
CESR Aquitaine
Sources : L'officiel de la musique - IRMA-2010 - REGION AQUITAINE - Fond de plan : IGN BDCarto®
V a l i da t i o n de l a do n n é e : ju in 2 0 1 0
C a r t e m i se à j o u r l e 7 ju ille t 2 0 1 0
Musiques actuelles : Studios et sonorisation technique
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
A - D MASTERING
SIP AUDIO
GLOBE AUDIO MASTERING
VIRTUAL
STUDIO
REVERBERATION
L'EVENEMENT SCENE
PROSYSTEM BIO
! !
CONKRETE STUDIO
LIMELIGHT
CONKRET LIVE
!
HESAT SALEM
DUPLIWORKS
!
!
!
!
ECLIPSONIC - LES COULEURS DE LA NUIT
Z PROFESSIONNEL
ATELIERS LUMIERE - SUD-OUEST SON
AUDIO PRO
BUD RECORDS
Le PHARE - AUDIO PRO
!
CARAT SARL
Studio BERDUQUET
33 TOUR
CARAT
AUDIO PHIL
Studio AREMA ROCK ET CHANSON
LA SCENOPOLE
LA SCENOPOLE
!
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CADILLAC STUDIO
EN PHASE CREATION
STUDIO AIRPORT
!
LE MANOIR DE LAGUENS
JMSON
SAS
JMSONSAS
SAS
JMSON
0
15
30 km
MIDI-PYRÉNÉES
STUDIO LES MILANS
AMANITA
!
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Légende
STUDIO ROBY
CBS
LAGUNA STUDIOS
LAGUNA STUDIOS
EEE
MUSIK OLHA SARL
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SSS
PPP
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STUDIOS D'ENREGISTREMENT
MASTERING
PRESSAGE
ENTREPRISE DE SONORISATION
ET D'ÉCLAIRAGE
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CONTACT
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Conseil Economique et Social Régional
[email protected]
Tél : 05 57 57 83 19
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Musiques actuelles : Production et édition phonographique, labels
ALIENOR RECORDS
AMOR FATI
BANZAI LAB
BASE
BOXON RECORDS
CIP AUDIO
CLAC RECORDS
CORNFLAKES ZOO
EL RANCHO PRODUCTION
EXUTOIRE RECORDS
GHAT PRODUCTION
M- ALLIANS PRODUCTION
MADAME LEO
MILK PACK RECORDS
MK LABEL
MUSIC PLUS PRODUCTION
ODETTE RECORDS
PLATINIUM RECORDS
RADAR SWARM
RAGAMUFFIN REGGAE BAND
RATBONE RECORDS
SONORIS
TALITRES RECORDS
TELEPHERIQUE
TER A TERRE
TRAHISON RECORDS
VICIOUS CIRCLE
WWILKO
A-HAEON
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
SOULBEATS RECORDS
HORS DE PORTEE
PRODUCTION,
EDITION BA ET SON
MICHEL PEPE
LA CERVELLE
TAMAMUSIK
IMPULSE PRODUCTION
DV'S RECORDS
LES 2 SINGES
COMPOSIT MUSIC
MUSIQUE EN CHANTIER,
BIP BIP PRODUCTION
LUNATIK MUSIC
ENERGIE NATURE
PRODUCTION
CRISTAL MUSIQUE
AQUI LABEL MUSIQUE
CARMA PRODUCTION
DAQUI
BORDEAUX ROCK
ND MUSIQUE
SL WORKS
THEO PRODUCTIONS
V MUSIC PRODUCTION
HORS-NORMES PRODUCTIONS
JDC MUSIC
ZONE LIBRE
CAROLINE PRODUCTION
SABOR DISCOS
0
15
30 km
EXIL MUSIQUE
JABA
MIDI-PYRÉNÉES
AGORILA SARL
JAZZ AUX REMPARTS
SCENE NATIONALE BAYONNE
Légende
STUDIO ROBY
SARL ERIC
MOUQUET
MUSIC
AMANITA
TUTA MUSIC INC.
VIVA VOICE
EDITIONS GABRIEL
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Nombre de structures
JEAN DUCASSE
DEFECTED RECORDS
LAGUNA STUDIO
LOBELIA MUSIC
1
COLLECTIF ÇA-I
LA CAD
ATRDR RECORDS
MENESTRERS GASCONS
EX. T.A
2
5
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PPP
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Plus de 5
CONTACT
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Musiques actuelles : Distribution
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
FNAC
HARMONIA MUNDI
O'CD
ALICE MEDIA STORE
VIRGIN MEGASTORE
LA DEMOTHEQUE
SUPER LOVE DISC & MORE
TOTAL HEAVEN
FNAC
ERBEL SA
MKZ
CULTURA
PLANETE SATURN
VIRGIN MEGASTORE
MADISON
NUGGETS
CULTURA
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ESPACE CULTUREL LECLERC
FORUM ESPACE CULTURE
ESPACE CULTUREL LECLERC
ESPACE CULTUREL LECLERC
MARTIN DELBERT
0
ESPACE CULTUREL LECLERC
15
30 km
MIDI-PYRÉNÉES
FNAC
HARMONIA MUNDI
VIRGIN MEGASTORE
ESPACE
CULTUREL
LECLERC
Légende
AGORILA SARL
CULTURA
ESPACE CULTUREL LECLERC
FNAC
CHAÎNES DE MAGASINS DE DISQUE
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PPP
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DISTRIBUTION
GROSSISTES
DISQUAIRES INDÉPENDANTS
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CONTACT
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Musiques actuelles : Entrepreneurs et programmateurs
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
ALLEZ LES FILLES - ADMAA
CAT
BANZAÏ LAB
L'ESTRAN
HELLO MY NAME IS
CORNER
LET'S PANIC LATER
MUSIQUES DE NUIT DIFFUSION
ROCK SCHOOL BARBEY
3C
ALHAMBRA PRODUCTIONS
ART SESSION
ARTISTES DU MONDE
ARTISTIC PRODUCTION
BASE
BCP SARL
BLUE FISH
JOSETTE
PARALLELES ATTITUDES DIFFUSION
SEA OF FLAMES
TER A TERRE CONCERTS
TROISQUATRE !
ZOOBOOK
LOS JITOLS
MUSIC'ACTION PROD
MEGASTAFF
IDDAC
BLEU UP !
BOX OFFICE
TIN TAM ART
TRANSROCK - KRAKATOA
AGORA
SOME PRODUKT
MAPLACE
NELL PROD
JAZZOGENE
ARIANE PRODUCTIONS
LARURAL
MUSICALEMENT VOTRE
LA SAUCE
BORDEAUX ROCK
CABINET MUSICAL DU DR LARSENE
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CRABB
HORS NORMES PRODUCTIONS
0
15
30 km
VOIX DU SUD
MIDI-PYRÉNÉES
LATITUDE PRODUCTIONS
LANDES MUSIQUES AMPLIFIEES
Légende
EINSTEIN ON THE BEACH
EINSTEIN ON THE BEACH
ZUBIKOA MANAGEMENT
ACP
A TANT REVER DU ROI
AMPLI ASSOCIATION
EEE
SSS
AFTER BEFORE
les BLUES' RIE
ADEM - FLORIDA
ROUTES DU ROCK
LANETIK EGINA
ABC - BLUES STATION CONCERTS
MUSICALARUE
LA LOCOMOTIVE
BENJAMIN INTERNATIONAL PRODUCTION
DECIBELS CHARTER
STACCATO
PPP
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NN
BILLETERIE
ASSOCIATION ET SERVICE CULTUREL
PROGRAMMANT DES SPECTACLES
ENTREPRENEURS DE SPECTACLES
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C a r t e m i se à j o u r l e 7 ju ille t 2 0 1 0
Musiques actuelles : Salles et concerts
CASINO DE BORDEAUX
LE COMPLEXE CAT
ESPACE TATRY
PATINOIRE DE BORDEAUX-MERIADECK
MOLIERE SCENE D'AQUITAINE
Le 4 SANS
ROCK SCHOOL BARBEY
THEATRE FEMINA
LE SATIN DOLL
HERETIC CLUB
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
MUSIC INSTITUTE BAZAR
ROCHER DE PALMER
LE ST-EX
LA DIBITERI
LE FIACRE
LE CAFE DES JOURS HEUREUX
LE CAFE DES MOINES
LE CONGO CAFE
CULTURE OF ROCK
LE CHAT QUI PECHE
LE CHAT GOURMAND
LE LUCIFER
LA POLITIQUE
LE ZIG ZAG CAFE
LE ZUBU
COMPTOIR DU JAZZ
GUINGUETTE CHEZ ALRI
Le SANS RESERVE
CENTRE CULTUREL LA FABRIQUE
L'ENTREPOT DU HAILLAN
SALLE DU VIGEAN
LES COLONNES
Le CARRE DES JALLES
La MEDOQUINE
ANDRO MAC
L'ANTIROUILLE
THEATRE OLYMPIA
CENTRE CULTUREL DE BERGERAC
ROCKSANE
DE CREON
PAVILLON 108
THEATRE GEORGES LEYGUES
Le FLORIDA
THEATRE MUNICIPAL DUCOURNEAU
LA TANNERIE
0
Le CAFEMUSIC'
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30 km
MIDI-PYRÉNÉES
Légende
CENTRIFUGEUSE
ZENITH -PAU
AMPLI ASSOCIATION
ESPACE JELIOTE
SSS
LEMB@RZIQUE CAFE
LA LUNA NEGRA
EEE
CENTRE CULTUREL DE SARLAT
LE KALIMUCHO
CENTRE CULTUREL DES CARMES
SALLE DES BOURDAINES
THEATRE DES 4 SAISONS
CENTRE SIMONE SIGNORET
LA GUINGUETTE DE RENAMONT
LES TOURELLES
La COUPOLE
BT 59
LE POULAILLER
SALLE BELLEGRAVE
ESPACE CULTUREL
L'ATABAL
GRAND ARENA
Le PIN GALANT
LE KRAKATOA
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CLUBS ET SALLES DE CONCERT
BARS RESTAURANTS CONCERTS
PROJETS
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Musiques actuelles : Festivals
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
1 TRUZION
REGGAE SUN
SKA FESTIVAL
DRUMS ADDICT
Festival DES HAUTS DE GARONNE
JAZZ A LA BASE
MUSIQUES A PILE
Festival LE GRAND SOUK
CULTURE ROCK
LES NOCTAMBULES
EYSINES GOES ROCK' N SOUL
SOLID' ARTS HIP HOP
Festival OVER LOOK
OUVRE LA VOIX
LES 24 HEURES
SWING DE MONSEGUR
UZESTE MUSICAL
ABRACADA'SONS
GAROROCK
MUSICALARUE
FESTIVAL DE GUITARE
0
ARTE FLAMENCO
CHANTONS SOUS LES PINS
La RUEE AU JAZZ
ATOUT CHŒURS
MIDI-PYRÉNÉES
Légende
ERROBIKO
FESTIBALA
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Nombre de festivals
FESTIVAL EMMAUS
G
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G
JAZZ NATUREL D'ORTHEZ
Festival des
TRANSHUMANCES
MUSICALES
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30 km
JAZZ A OLORON
PPP
15
FUGUE EN PAYS JAZZ
FESTI MAI
Festival EHZ
SSS
LE FESTIN
LES NUITS ATYPIQUES DE LANGON
LES OCEANIQUES
EEE
JAZZ POURPRE
BORDEAUX ROCK
LES RENDEZ-VOUS DE TERRES NEUVES
TOROS Y SALSA
VIBRATIONS URBAINES
BIG FESTIVAL
MUSIK A PILE
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HESTIV' OC
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CONTACT
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Conseil Economique et Social Régional
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C a r t e m i se à j o u r le 7 ju ille t 2 0 1 0
Musiques actuelles : Presse - Edition Conseil
LIMOUSIN
POITOU - CHARENTES
ABUS DANGEREUX
BORDEAUX CONCERTS
DES OREILLES DANS BABYLONE
HIP HOP SHOW
MUZZART
CLUBS ET CONCERTS
ESSENTIEL DES SPECTACLES
SPIRIT
SUD OUEST
THAT'S ALL ROCK !
DOGMAZIC
GLOSSAIRE DES TERMES TECHNIQUES DU SPECTACLE
VAGUE NOCTURNE LE FANZINE
HARMONIE - MAGAZINE
A.M. BX
HIGHLANDS
LE BORD DE L'EAU
SUR LA MEME LONGUEUR D'ONDES
LDA PUBLISHING
MELANIE SETEUN
CASTOR ASTRAL
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M
SUR LA ROUTE DE MEMPHIS
CAF'ZIC
15
30 km
MIDI-PYRÉNÉES
0
CULTE ZINE
Légende
EDITIONS CASTELLE / ELKAR
ROCK POSTER ART
ROCK POSTER ART
PRESSE ET FANZINES
PORTAILS DOCUMENTAIRES
ET COMMUNAUTAIRES
EXPOSITIONS ET CONFÉRENCES
EDITION
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CONTACT
Conseil régional d'Aquitaine
Conseil Economique et Social Régional
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Glossaire et index des sigles
ADAMI :
ADCMR :
ADF :
ADSL :
Administration des Droits des Artistes, Musiciens et Interprètes
Association Départementale de Centres Musicaux Ruraux
Association des Départements de France
Asymmetric Digital Subscriber Line, technologie de communication
utilisée pour la transmission de données numériques à haut débit
AEC :
agence régionale Aquitaine Europe Communication
AFEPT :
Association pour la Formation et l’Éducation Permanente à Tivoli
AFIJMA :
Association des Festivals Innovants de Jazz et Musiques Actuelles
AGEC :
Aquitaine Groupement d’Employeurs Culture
AMF :
Association des Maires de France
AMGVF :
Association des Maires des Grandes Villes de France
ARCEP :
Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes
ARF :
Association des Régions de France
BEM :
Bordeaux Management School
BEPC :
Brevet d’Étude du Premier Cycle du second degré
(ou diplôme national du brevet)
CAE :
Conseil d’Analyse Économique
CAE :
Coopérative d’Activités et d’Emploi
CAEM :
Carrefours d’Animation et d’Expression Musicale
CAGEC :
Centre d’Aide à la Gestion des Entreprises Culturelles
CALIF :
Club Action des Labels Indépendants Français
CAMDT :
Carrefour Aquitain des Musiques et Danses Traditionnelles
CARMA :
Centre Aquitain de Recherches sur les Musiques Acoustiques
CCN :
Conventions Collectives Nationales
CD :
Disque compact
CDD :
Contrat à Durée Déterminée
CDDU :
Contrat à Durée Déterminée d’Usage
CDI :
Contrat à Durée Indéterminée
CEFEDEM : Centre de Formation supérieure des Enseignants de la Musique
et de la Danse
CEM :
Certificat d’Études Musicales
CEMF :
Chambre Syndicale des Éditeurs de Musique
CESR :
Conseil Economique et Social Régional
CGIET :
Conseil Général de l’Industrie de l’Energie et des Télécommunications
CIAM :
Centre d’Information et d’Activités Musicales
CMR :
Centres Musicaux Ruraux
CNAR :
Centre National d’Appui et de Ressources pour la culture
CNUCED : Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement
CNV :
Centre National des Variétés, de la chanson et du jazz
CPPAC :
Consolidation du Parcours Professionnel Artistique et Culturel
CRD :
Conservatoire de Rayonnement Départemental
CREDOC : Centre de Recherche pour l’Étude et l’Observation des Conditions de vie
CRR :
Conservatoire de Rayonnement Régional
CSDEM :
Chambre Syndicale de l’Édition Musicale
CSMA :
Conseil Supérieur des Musiques Actuelles
DATAR :
Délégation interministérielle à l’Aménagement du Territoire
et à l’Attractivité Régionale
DEM :
Diplôme d’Études Musicales
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DEPS :
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Département des Études, de la Prospective et des Statistiques
du Ministère de la Culture et de la Communication
DIRECCTE : Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence,
de la Consommation, du Travail et de l’Emploi
DJ :
Disc Jockey
DRAC :
Direction Régionale des Affaires Culturelles
DRM :
gestion des droits numériques (digital rights management)
DRTEFP :
Direction Régionale du Travail de l’Emploi et de la Formation Professionnelle
DVD :
Disque vidéo digital
ECLA :
agence régionale pour l’Écrit, le Cinéma, le Livre et l’Audiovisuel
EHZ :
Euskal Herria Zuzenean (festival)
ENSEIRB : École Nationale Supérieure d’Électronique,
d’Informatique et Radiocommunication de Bordeaux
ETP :
Équivalent Temps Plein
FAIR :
Fonds d’Action et d’Initiative Rock
FAMDT :
Fédération des Associations de Musiques et Danses Traditionnelles
FCM :
Fonds pour la Création Musicale
FEDUROK : Fédération nationale des lieux et scènes de musiques actuelles
FELIN :
Fédération nationale des Editeurs et Labels Indépendants
FEPPIA :
Fédération des Editeurs et Producteurs Phonographiques
Indépendants Aquitains
FERAROCK : Fédération nationale des Radios associatives Rock
FLAC :
Free Lossless Audio Codec, système libre de compression audio
sans perte de qualité sonore
FNCC :
Fédération Nationale des Collectivités pour la Culture
FNEIJMA : Fédération Nationale des Ecoles d’Influence Jazz et Musiques Actuelles
FNFR :
Fédération Nationale des Foyers Ruraux
FNTAV :
Fédération des Nouveaux Territoires des Arts Vivants (réseau Chaînon)
FSE :
Fonds Social Européen
FSJ (MI) :
Fédération des Scènes de Jazz et de musiques improvisées
GPEC :
Gestion Prévisionnelle de l’Emploi et des Compétences
GRANEM : Groupe de Recherche Angevin en Économie et Management
(université d’Angers)
GSA :
Grandes Surfaces Alimentaires
GSS :
Grandes Surfaces Spécialisées
GUSO :
Guichet Unique du Spectacle Occasionnel
HADOPI : Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits
sur Internet
HQE :
Haute Qualité Environnementale
IDDAC :
Institut Départemental de Développement Artistique et Culturel
de la Gironde
IFPI :
Fédération internationale des industries phonographiques
IMPALA :
Association européenne des entreprises indépendantes de la musique
IMR :
Institut des Musiques Rock
IREM :
Institut Régional d’Expression Musicale
IRMA :
Centre d’information et de Ressources pour les musiques actuelles
LABRI :
Laboratoire Bordelais de Recherche en Informatique
(Université de Bordeaux 1)
LMA :
Landes Musiques Amplifiées
MAO :
Musique Assistée par Ordinateur
MMFF :
Music Manager Forum France
204
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MP3 :
OARA
OPCA :
PACAP :
PGHT :
PRODISS :
RAMA :
SACD :
SACEM :
SCAM :
SCIC :
SCPP :
SCRIME :
E
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format de compression sonore au standard MPEG-1/2 Audio Layer 3
Office Artistique de la Région Aquitaine
Organismes Paritaires Collecteurs Agréés
Projet d’Actions Culturelles et Artistiques Partagées
Prix de Gros Hors Taxe
Syndicat national des Producteurs, Diffuseurs et Salles de Spectacles
Réseau Aquitain des Musiques Actuelles
Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques
Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique
Société Civile des Auteurs Multimédia
Société Coopérative d’Intérêt Collectif
Société Civile des Producteurs Phonographiques
Studio de Création et de Recherche en Informatique
et Musique Électroacoustique (Université de Bordeaux 1)
SDLC :
Syndicat des Distributeurs de Loisirs Culturels
SFA :
Syndicat Français des Artistes Interprètes (CGT)
SMA :
Syndicat national des Musiques Actuelles
SMAc :
Scène de Musiques Actuelles
SNAC :
Syndicat National des Auteurs et Compositeurs
SNACOPVA : Syndicat National des Artistes Chefs d’Orchestre Professionnels
de Variétés et Arrangeurs
SNAICOCA : Syndicat National des Artistes Interprètes,
Chefs d’Orchestre et Cadres Artistiques (CGC)
SNAM :
Union Nationale des Syndicats d’Artistes Musiciens (CGT)
SNEP :
Syndicat National des Editeurs Phonographiques
SOLIMA : Schéma d’Orientation et de développement des Lieux de Musiques Actuelles
SPEDIDAM : Société de Perception et de Distribution des Droits des Artistes Interprètes
SPPF :
Société civile des Producteurs Phonographiques en France
SYNDEAC : Syndicat National des Entreprises Artistiques et Culturelles
SYNAPSS : Syndicat National des Petites Structures de Spectacle
SYNPASE : Syndicat National des Prestataires de l’Audiovisuel Scénique et Evénementiel
SYNPTAC : Syndicat National des Professionnels du Théâtre et des Activités Culturelles
SYROL :
Syndicat des Radios On-Line
TER :
Trains Express Régionaux
TMP :
Télévision Mobile Personnelle
TNT :
Télévision Numérique Terrestre
TPE :
Très Petite Entreprise
TTC :
Toutes Taxes Comprises
TVA :
Taxe sur la Valeur Ajoutée
UFISC :
Union Fédérale d’Intervention des Structures Culturelles
UNAC :
Union Nationale des Auteurs Compositeurs
UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture
UPFI :
Union des Producteurs phonographiques Français Indépendants
VAE :
Validation des Acquis de l’Expérience
VOD :
Vidéo à la demande
WAV :
(ou WAVE) standard de stockage de fichiers audio numériques
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Bibliographie
Introduction
1. « Convention universelle sur le droit d’auteur », UNESCO, 1971.
2. « Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel », UNESCO, 2003.
3. « Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles »,
UNESCO, 2005.
4. « Sud-Ouest, porte des Outre-mers », éditions Milan, 2006.
5. « Avis de tempête, musiques amplifiées sur la planète, le virage électrique »,
Marc TOUCHÉ, Les Cahiers de l’ORCA, 2008.
6. « Les nouveaux courants musicaux : simples produits des industries culturelles ? »,
Gérôme GUIBERT, IRMA, Éditions Séteun, 1998.
7. « Les valeurs de la musique, valeurs sociale, esthétique et économique »,
Observatoire des usages numériques culturels, 2007.
Des pratiques populaires et plurielles
8. « Votre vie en musique - Enquête sur le rapport des Français à la musique »,
TNS/SOFRES - SACEM, 2005.
9. « Les pratiques culturelles des Français à l’ère numérique - Enquête 2008 »,
DEPS, 2009.
10. « Les pratiques culturelles des Français à l’ère numérique - Éléments de synthèse
1997-2008 », Olivier DONNAT, DEPS, 2009.
11. « Approche générationnelle des pratiques culturelles et médiatiques »,
Culture Prospective n° 3, DEPS, 2007.
12. « Les loisirs des 6-14 ans », Développement culturel n° 144, DEPS, 2004.
13. « Bilan radio - TV - Clubs de la programmation musicale », Yacast/Musicast, 2010.
14. « Bilan radio 10 ans de programmation musicale », Yacast - SNEP, 2010.
15. « Indicateurs de la diversité musicale dans le paysage radiophonique - rapport 2009 »,
Observatoire de la Musique, 2010.
16. « Bilan de l’année radio 2008-2009 », Médiamétrie, 2009.
17. « Bilan 2009 du marché de la musique enregistrée »,
Observatoire de la Musique, 2010.
18. « Indicateurs de la diversité musicale dans le paysage audiovisuel - rapport 2009 »,
Observatoire de la Musique, 2010.
19. « L’année TV 2009 », Médiamétrie, 2010.
20. « Guide des chaînes numériques », 8ème édition, CSA - CNC - ACCeS - SNPTV, 2010.
21. « La fréquentation des sites internet français », Données mensuelles,
Estat Médiamétrie, 2010.
22. « L’audience de l’internet en France » Données mensuelles, Médiamétrie, 2010.
23. « Diffusion et utilisation des TIC en France et en Europe en 2009 »,
Culture Chiffres, DEPS, Valérie DEROIN, 2010.
24. « La diffusion des technologies de l’information et de la communication
dans la société française (2009) », CREDOC - CGIET - ARCEP, 2009.
25. « La génération internet en Aquitaine : équipée, connectée et accessible »,
Analytic n, AEC, 2008°.
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26. « Les habitudes, les pratiques et la consommation culturelles au Pays Basque
en 2007/2008 - Rapport du Pays Basque nord »,
Gouvernement de la Communauté Autonome du Pays Basque.
27. « Pays Basque 2020 : état des lieux sur la culture »,
Conseil de développement et Conseil des élus du Pays Basque, 2007
28. « Les publics des concerts de musiques amplifiées »,
Développement culturel n° 122, 1998.
29. « La place d’internet dans les sorties culturelles et de loisirs - Approche exploratoire
des expériences de consommation », Bruno MARESCA - Isabelle VAN DE WALLE,
CREDOC, 2006.
30. « Éléments statistiques sur la diffusion des spectacles de variétés et de musiques
actuelles en 2008 », CNV, 2009.
31. « Le marché français des instruments de musique et accessoires Synthèse et tendances », Chambre Syndicale de la Facture Instrumentale, 2008.
32. « Données sur l’enseignement de la musique dans les CRR et les CRD de métropole Année 2006/2007 », DEPS, 2009.
33. « Les publics, services et métiers de la répétition dans les lieux de musiques
amplifiées/actuelles », Fédurok - CNV, 2009.
34. « Quels artistes demain ? Artistes 2020, variations prospectives »,
Collection ®Évolutic, IRMA, 2009.
35. « Bordeaux Rock », Denis FOUQUET, Le Castor Astral, 2007.
36. « Langues et cultures d’Aquitaine : pour une dynamique d’ouverture et d’intégration PARLOC BAI ! », CESR d’Aquitaine, 2005.
Ouvrez le son
37. Cf. supra ref. n° 6.
38. « Une typologie de l’emploi salarié dans le secteur culturel en 2007 »,
Marie GOUYON, DEPS, Collection Chiffres n° 3, 2010.
39. « Étude sur les musiciens interprètes », Philippe COULANGEON, DEPS, 2003.
40. « Tendances de l’emploi dans le spectacle », Marie GOUYON - Frédérique PATUREAU,
Culture Chiffres n° 1, 2010.
41. « Vers une meilleure connaissance des associations culturelles employeurs Rapport d’enquête », OPALE/CNAR, 2008.
42. « Les associations culturelles employeurs en France - Enquête nationale 2008,
principaux résultats », OPALE/CNAR, 2008.
43. « Enquête économique et sociale auprès des entreprises du spectacle vivant
de musiques actuelles et de variétés », CNV, 2008.
44. « État des lieux de l’emploi, des métiers et des qualifications dans le champ
du spectacle vivant en Aquitaine »,
Observatoire régional de la culture d’Aquitaine - ObsTer, La Lettre n° 1, 2008.
45. « Auteurs, compositeurs et éditeurs de musique : les oubliés de la crise », SACEM,
2009.
46. « Filière de la musique enregistrée : quels sont les véritables revenus des artistes
interprètes ? », ADAMI, 2006.
47. « Étude économique 2009 des manques à gagner des artistes interprètes
de la musique », SPEDIDAM, 2010.
48. « Musicien interprète des musiques actuelles, le titre », FNEIJMA, 2008.
49. « Caractéristiques et problématiques de gestion des emplois dans le secteur
des musiques actuelles », Carole LE RENDU - LIZÉE, GRANEM, 2010.
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50. « Étude sur la gestion prévisionnelle des emplois et compétences au sein du Réseau
Aquitain des Musiques Actuelles - Rapport final 13 novembre 2007 »,
Carole LE RENDU-LIZÉE/Gérôme GUIBERT, CRESS Aquitaine - DRTEFP Aquitaine RAMA - Conseil Général de la Gironde - Conseil Régional d’Aquitaine.
51. « AGEC, le premier groupement des employeurs culturels en Aquitaine Projet 2010-2011 », RAMAGE - AGEC, 2010.
52. « Trajectoires professionnelles et stabilité sur le marché du travail :
le cas des musiciens en France, 1987-2000 », Philippe COULANGEON - Ionela ROHARIK,
10ème journées d’études Céreq, 2003.
53. « La situation des professionnels de la création artistique en Europe »,
Parlement Européen, 2006.
54. « Statistiques d’entreprises des industries culturelles »,
DEPS, Culture-Chiffres n° 4, 2008.
55. « Investing music : how music companies discover, develop & promote talent »,
WIN-IFPI, 2010.
56. « 2008 : une baisse continue des droits d’auteurs dans un environnement économique
difficile – Étude économique mondiale des perceptions des sociétés d’auteurs membres
de la CISAC en 2008 », Frédéric PATISSIER, CISAC, 2010.
57. « Bilan économique 2009 », SNEP, 2010.
58. « Les marchés de la musique enregistrée - Rapport annuel 2009 »,
Observatoire de la Musique, 2010.
59. « Enquête SPEDIDAM sur la consommation et les échanges d’œuvres numériques
par les internautes français », SPEDIDAM - Médiamétrie, 2007.
60. « 14 000 artistes-interprètes pour une licence globale sur internet »,
SPEDIDAM, 2005.
61. « Internet pour la création musicale - Synthèse du cycle de rencontres sur les nouveaux
modèles économiques de l’offre légale de musique en ligne »,
Centre d’Analyse Stratégique, 2009.
62. « Les sites de streaming musical », Observatoire de la Musique, 2009.
63. « L’artiste-producteur en France en 2008 »,
Aymeric PICHEVIN/ManMedia - ADAMI, 2009.
64. « Bilan, perspectives, enjeux », SACEM, MIDEM 2010.
65. « Création et internet - Rapport au Ministre de la Culture et de la Communication », 2010.
66. « La société et l’économie à l’aune de la révolution numérique - Enjeux et perspectives
des prochaines décennies (2015-2025) », Centre d’Analyse Stratégique, 2009.
67. « Internet et création : comment reconnaître les échanges hors marché sur internet
en finançant et rémunérant la création ? », Philippe AIGRAIN, In Libro Veritas, 2008.
68. « Musique enregistrée et numérique : quels scénarios d’évolution de la filière ? »,
Marc BOURREAU - Michel GENSOLLEN - François MOREAU, DEPS,
Culture Prospective n° 1, 2007.
69. « IFPI Digital Music Report 2010 », IFPI, 2010.
70. « État des lieux de l’offre de musique numérique au deuxième semestre 2009 »,
Observatoire de la Musique, 2010.
71. « Le diagnostic 2009 de l’Aquitaine numérique », AEC, 2009.
72. « Le spectacle vivant en France en 2009 : bilan et perspectives », SACEM, 2010.
73. « Cahier des charges des salles Zénith », 2002.
74. Cf. supra ref. n° 30.
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75. « Quelle place pour les développeurs d’artistes dans la refondation du spectacle vivant
et une ré-écriture des politiques - De la nécessité d’une autre conception
de l’accompagnement de la culture », Alexandre COL,
COMEC - Université de Bordeaux 3, 2009.
76. « Bilan de l’année 2008 », association Le Sans Réserve, 2009.
77. « Résultats de l’enquête sur le public », Le Réservoir, 2006.
78. « Projet d’action artistique et culturelle de l’ADEM 2009-2010-2011 »,
ADEM Florida, 2009.
79. « Pour que vivent les cafés-cultures », Collectif Culture Bar-Bars, 2009.
80. « Plateforme nationale des cafés cultures », MaMA du Printemps de Bourges, 2009.
81. « Premières rencontres nationales des Cafés-Cultures - Les synthèses »,
Collectif Culture Bar-Bars, 2008.
82. Directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 sur les services.
83. « Les Entretiens de Valois : pour une rénovation des politiques publiques du spectacle
vivant », Ministère de la Culture et de la Communication, 2009.
84. Circulaire ministérielle n° CC166914 du 2 novembre 2006 : « Plan pour
des politiques nationales et territoriales concertées en faveur des musiques actuelles ».
85. « Les manifestations culturelles d’été en Aquitaine - État des lieux »,
Observatoire régional de la culture d’Aquitaine, La Lettre n° 2, 2010.
86. « La critique des politiques culturelles à l’aune de la diversité culturelle »,
Doc Kasimir Bisou, 2006.
Des territoires lieux d’émergences
87. « Diversité culturelle et politiques publiques, la fausse conversion française ! »,
Doc Kasimir Bisou, 2005 dans le cadre d’un colloque sur le thème
« Politiques publiques et économie sociale et solidaire ».
88. « Envie de France : rapport de prospective sur l’attractivité culturelle de la France »,
Gilles ARNAUD, Centre d’Analyse Stratégique/Commissariat Général du Plan, 2006.
89. « Créativité et innovation dans les territoires »,
Conseil d’Analyse Économique - DATAR - Académie des technologies, 2010.
90. « Rapport général de la Commission « musiques amplifiées » de la FNCC »,
Marie-Thérèse FRANÇOIS-PONCET - Jean-Claude WALLACH, FNCC, 1999.
91. « Éléments pour une histoire des politiques publiques en faveur des musiques amplifiées »,
Philippe TEILLET, 2002.
92. « Territoires musicaux en régions. L’émergence des musiques amplifiées en Aquitaine »,
Yves RAIBAUD, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, 2005.
93. « Manifeste de l’UFISC pour une autre économie de l’art et de la culture », UFISC, 2007.
94. « Rapport sur le soutien de l’État aux musiques dites actuelles »,
Michel BERTHOD - Anita WEBER, IGAC, Ministère de la Culture
et de la Communication, 2006.
95. « Conclusions du Conseil sur l’apport de la culture au développement local et régional »,
Conseil de l’Union Européenne ref. 8263/10, 2010.
96. « L’AlphaBEM des industries créatives », Bordeaux École de Management, 2009.
97. « Training creative and collaborative knowledge-builders, a major challenge
for 21st century education », François TADDEI, OCDE, 2009.
98. « Des réseaux de l’entrepreneur aux ressorts du créatif :
quelles stratégies pour les territoires ? », PUQ, 2004.
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99. Cf. supra ref. n° 35.
100. « L’économie créative : une introduction », Institut des Deux Rives, 2009.
101. « Bordeaux l’Aquitaine, territoire créatif »,
José DARROQUY, association Bordeaux 2013, 2010.
102. Dossier de candidature de Bordeaux, Capitale Européenne de la Culture, 2009.
103. « Identité de l’agglomération ou agglomération d’identités - Radioscopie du territoire
bordelais », Conseil de Développement Durable de la Communauté Urbaine
de Bordeaux, 2010.
104. « Le développement des musiques actuelles et leur entrée en politiques publiques »,
intervention de Gilles CASTAGNAC devant la FNCC, 2006.
105. « Pour des Schémas d’Orientation de développement des Lieux de Musiques Actuelles
(SOLIMA) », Fédurok-FSJ, version au 15 janvier 2010.
106. Cf. supra ref. n° 3.
Autres références de portée générales
107. « La politique culturelle en France »,
Xavier GREFFE - Sylvie PFLIEGER, La Documentation Française, 2009.
108. « La musique, une industrie, des pratiques », sous la direction de Pierre FRANÇOIS,
Collection Études de la Documentation Française, 2008.
109. « Marketing de l’art et de la culture »,
coordonné par Dominique BOURGEON-RENAULT, Éditions Dunod, 2009.
110. « L’Officiel de la musique - Guide-annuaire des musiques actuelles 2010 », IRMA, 2010.
111. « A l’écoute du XXème siècle - La modernité en musique - The rest is noise »,
Axel ROSS, Actes Sud, 2010.
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Liens Internet
1d-Aquitaine
3C
Accès
ADAMI
ADEM Florida
AEC
AFEPT
AFDAS
AFIJMA
AGEC
AGI-SON
Aliénor Rec.
AllezLesFilles
Amor Fati
ARCEP
AREMA
ARPEL
Ars Industrialis
Artus
Atabal
AUTOMAZIC
BAR-BARS
Base Prod.
Believe
BIS
BordeauxRock
BuzzMyBand
C2Rives
Cabinet Larsène
CAE
CAE
CAEM
CaféMusic
CAGEC
ÇA-I
CALIF
CAMDT
CARMA
CD1D
CEFEDEM
CEMF
CESR
CGIET
CIAM
CMR
CNAR
CNUCED
CNV
211
http://1d-aquitaine.com/
http://3ctour.com/3c-spectacles-1.html
http://www.acces-s.org/breve.php3?id_breve=1
http://www.adami.fr/
http://www.le-florida.org/
http://www.aecom.org/
http://www.afept.fr/
http://www.afdas.com/
http://www.afijma.asso.fr/
http://www.agec-culture.com/
http://www.agi-son.org/spip.php?rubrique42
http://www.alienor-records.com/V2/?label=alienor&lang=fr
http://www.allezlesfilles.com/
http://www.amorfati.fr/indeks.php?doc_rub=39
http://www.arcep.fr/
http://www.rocketchanson.com/pres_accueil.aspx
Cf. ECLA
http://www.arsindustrialis.org/
http://familha.artus.free.fr/
http://www.atabal-biarritz.fr/
http://automazic.pragmazic.fr/
http://www.bar-bars.com/main.html
http://www.base-productions.com/
http://www.believe.fr/
http://www.bis2010.com/fr/
http://www.bordeauxrock.com/
http://www.buzzmyband.com/
http://carnavaldes2rives2010.blogspot.com/
http://dr.larsene.free.fr/
http://www.cae.gouv.fr/spip.php?breve17
http://www.auto-entrepreneur.fr/cooperative-activites-emploi.php
http://www.lescmr.asso.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=35&Itemid=5
http://www.lecafemusic.com/?page=accueil
http://www.cagec.fr/
http://collectifca-i.jimdo.com/
http://www.calif.fr/page.php
http://www.carrefouraquitain.com/
http://www.albacarma.com/
http://cd1d.com/fr
http://www.cefedem-aquitaine.com/accueil/accueil.php
http://www.francemusiqueimageson.fr/entreprise/cemf-paris.html
http://cesr-aquitaine.fr/
http://cesr-aquitaine.fr/
http://www.le-ciam.com/
http://www.lescmr.asso.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=28&Itemid=26
http://www.culture-proximite.org/rubrique.php3?id_rubrique=3
http://www.unctad.org/Templates/StartPage.asp?intItemID=2068&lang=2
http://www.cnv.fr/
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CongésSpect.
CPPAC
CRDLandes
CREDOC
CRESS
CSDEM
CSMA
DATAR
DEPS
Dibiteri
DIRECCTE
DOGMAZIC
DRAC
DRTEFP
ECLA
EHZ
Einstein
EKE
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FAIR
FAMDT
FARL
FCM
FEDUROK
FELIN
FEPPIA
FERAROCK
FLUCTUAT
FNAC
FNACMusic
FNAS
FNCC
FNEIJMA
FNFR
FNTAV
FSJ
Garorock
Grand Arena
GRANEM
GUSO
IDDAC
IFPI
IMPALA
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INOC
ICBasque
IREM
IRMA
Jamendo
Jazz Mutant
Krakatoa
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http://www.conges-spectacles.com/congesspectaclesite/jsp/index.jsp
http://www.cg33.fr/cg33/jcms/c_20425/consolidation-de-lemploi-culturel
http://www.landespublic.org/conservatoire
http://www.credoc.fr/
http://www.cressaquitaine.org/fr/
http://www.csdem.org/
http://www.csma-info.fr/
http://www.datar.gouv.fr/
http://www.culture.gouv.fr/nav/index-stat.html
http://www.myspace.com/dibiteri
http://www.aquitaine.travail.gouv.fr/
http://www.dogmazic.net/static.php?op=association.php
http://www.culture.gouv.fr/culture/min/organigramme/html/drac/aquitaine.htm
Cf. DIRECCTE
http://arpel.aquitaine.fr/spip.php?article100002338
http://www.ehz-festibala.com/
http://www.einsteinonthebeach.net/
http://www.eke.org/fr/eke
http://www.enseirb.fr/
http://www.lefair.org/
http://www.famdt.com/
http://www.farl.net/
http://www.lefcm.org/
http://www.la-fedurok.org/accueil.php
http://www.irma.asso.fr/La-Felin-nouvelle-federation-d
http://www.feppia.org/
http://www.ferarock.com/
http://www.fluctuat.net/dossiers/index-histoire-musique.html
http://musique.fnac.com/l17631/Attention-Talent
http://www.cnetfrance.fr/produits/fnacmusic-39366655.htm
http://www.fnas.info/qu-est/qu-est.asp
http://www.fncc.fr/
http://www.fneijma.org/
http://www.fnfr.org/ ; http://www.mouvement-rural.org/
http://www.fntav.com/
http://www.la-fedurok.org/accueil.php
http://www.garorock.com/#News
http://grand-arena.fr/grand-arena-projet.php#upload/g446906.jpg
http://ead.univ-angers.fr/~granem08/
http://www.guso.com.fr/
http://www.iddac.net/site.php
http://www.ifpi.org/
http://www.impalamusic.org/about_01_mission.php
http://www.imr.asso.fr/association/asso-cadre.php
http://www.in-oc.org/
Cf. EKE
http://www.musique-bordeaux.com/
http://www.irma.asso.fr/
http://www.jamendo.com/fr/
http://www.jazzmutant.com/
http://www.krakatoa.org/
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L’Ampli
LABRI
LaMallette
LaRural
Légiculture
LeGrandSouk
LibreAccès
LMA
Loco-motive
MAN Média
Médias-Cité
MMFF
Musicaction
MdeNuits
Musicalarue
MusiquesàPile
Musicast
MyMajorComp.
NuitsAtypiques
OARA
ORCA
Pavillon108
Pôle Emploi
PRAGMAZIC
PRODISS
Radio103
RAMA
ReggaeSunSka
RocherPalmer
Rocksane
RockSchoolB.
RVTerresNeuves
SACD
SACEM
SaintEx
SansRéserve
SCAM
SCIC
SCPP
SCRIME
SDLC
Seteun
SFA
SMA
SNAC
SNACOPVA
SNAM
SNEP
Sondaqui
SPEDIDAM
SPPF
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http://www.ampli.asso.fr/
http://www.labri.fr/
http://www.lamallette.org/
http://www.myspace.com/larural
http://www.legiculture.fr/
http://www.legrandsouk.com/
http://www.libreacces.org/
http://www.lma-info.com/
http://loco-motive.fr/
http://www.manmedia.fr/
http://www.medias-cite.org/
http://www.mmffrance.com/
http://www.musicaction.fr/
http://mdn.free.fr/
http://www.musicalarue.com/
http://www.musiquesapile.fr/MKP2009/Festival.htm
http://www.musicast.fr/
http://www.mymajorcompany.com/
http://www.nuitsatypiques.org/fr/accueil.php
http://oara.fr/
http://aquitaine.fr/politiques-regionales/culture/observatoire-regional-de-la-culture.html
http://www.myspace.com/pavillon108
http://www.culture-spectacle.anpe.fr/internet/site/html/index.jsp
http://www.pragmazic.net/bin/accueil.php
http://www.prodiss.org/public/
http://www.radioperigueux103.org/
http://www.le-rama.org/
http://www.reggaesunska.com/
http://lerocherdepalmer.fr/
http://www.rocksane.com/
http://www.rockschool-barbey.com/accueil.html
http://www.lesrdvdeterresneuves.com/
http://www.sacd.fr/
http://www.sacem.fr/cms
http://www.myspace.com/saintex33
http://www.sans-reserve.org/sansreserve/sansreserve.php
http://www.scam.fr/fr/Accueil/tabid/363222/Default.aspx
http://www.scic.coop/
http://www.scpp.fr/SCPP/
http://scrime.labri.fr/
http://www.sdlc.fr/
http://www.seteun.net/
http://www.sfa-cgt.fr/accueil
http://www.sma-syndicat.org/accueil.php?width=1280&height=1024
http://www.snac.fr/accueilsnac.htm
http://www.snacopva.org/
http://www.snam-cgt.org/
http://www.disqueenfrance.com/fr/
http://www.sondaqui.com/
http://www.spedidam.fr/#
http://www.sppf.com/
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Stantum
SYNDEAC
SYNPASE
SYNPTAC
SYROL
Talitres
TroisQuatre
UFISC
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UMJ
UNAC
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Uniformation
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VIBRATIONS
VibrationsUrb.
ViciousCircle
VoixduSud
Zimbalam
Zone Franche
214
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http://www.stantum.com/en/
http://www.syndeac.org/
http://www.synpase.fr/
http://www.synptac-cgt.com/
http://www.syrol.fr/
http://www.talitres.com/newsvf.htm
http://www.troisquatre.com/accueil.htm
http://www.ufisc.org/
http://www.umih.fr/actu.php?id=1772
http://www.umj-asso.com/accueil.php
http://www.unac-auteurs-compositeurs.org/
http://portal.unesco.org/culture/fr/
http://www.uniformation.fr/
http://www.upfi.fr/
http://www.uzeste.org/a/index.php/Main/HomePage
http://vibrationsmusic.com/author/florent-mazzoleni/
http://www.vibrations-urbaines.net/
http://www.viciouscircle.fr/
http://www.voixdusud.com/centre.php
http://zimbalam.fr/distribution.php
http://www.zonefranche.com/
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Personnes
auditionnées
ou ayant contribué
aux travaux
de la commission
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Le CESR d’Aquitaine remercie l’ensemble des interlocuteurs ayant accepté de contribuer
à ce travail, que ce soit dans le cadre des auditions conduites par la Commission, à l’occasion
d’entretiens ou encore par la fourniture de données.
Mme Sabine AGGOUN
M. Stéphane ALAUX
M. Matthieu ALOUSQUE
M. Eric AOUANES
Mme Pascale AUJAY
Mme Gaëlle AUDEON
M. Pierre BELLOUARD
M. Cyril BEROS
M. Xavier BONNOT
M. Christophe BOSQ
M. Sean BOUCHARD
Mme Lucie BRAUD
M. Jérôme CASAMAYOU
Mme Irène CASTEIG
M. Jean-Jacques CASTERET
M. André CAYOT
M. Xavier CHABELARD
M. Tony CHAPELLE
Mme Christel CHAPIN
M. Nicolas CLEMENT
M. Alex COL
M. Bruno COLIN
Mme Claire COUTHENX
Mme Mylène COUTURIER
M. Laurent COUZI
Mme Béatrice De FOURNOUX
M. Bruno DIETSCH
Artiste (Groupe Basement)
CIAM
Heretic Club
Musique Libre !
Talence Gestion Équipement
CAGEC
La Dibiteri
IREM
LMA
3C
Talitres Records
ECLA
Mairie d’Anglet
Jazz in Marciac
Institut Occitan
Ministère de la Culture et de la Communication
Le Saint-Ex
TC-Lab
FEPPIA
Bibliothèque de Bordeaux / BIMUDAQ
TroisQuatre !
OPALE
Librairie Entre 2 Noirs
Uniformation
Bibliothèque Bordeaux (discothécaire) / BIMUDAQ
AFDAS
DEPS / Ministère de la Culture
et de la Communication
Mme Maud DERBAIX
Bordeaux Management School
M. Bruno DIETSCH
DEPS / Ministère de la Culture et de la Communication
M. Julien DUBOIS
Conservatoire de Rayonnement Régional Bordeaux
M. Patrice DUGORNAY
Rock & Chanson
M. Christophe DUPUIS
Librairie Entre 2 Noirs
M. Patrick DUVAL
Musiques de Nuit Diffusion
M. Gérald ELBAZE
Médias-Cité
M. Jean-Jacques ERNANDORENA UMIH Région Aquitaine
M. Didier ESTEBE
Le Krakatoa
M. Jean FONTANILLE
Rock et Chansons
Mme Marie-Thérèse
FRANÇOIS PONCET
FNCC
M. Mario GACHIS
Conservatoire des Landes
M. Guy GARCIA
Le Sans Réserve
M. François GARRAIN
Musicalarue
Mme Catherine GIFFARD
(CNV)
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Mme Anne GOMBAULT
M. Stéphane GRECO
Mme Nadège GUEDON
M. Jean-Pierre HELAND
M. Alain HERMAN
M. Romain HUMEAU
M. Mathieu IMMER
M. Claude JEAN
M. Stéphane JONATHAN
M. Frédéric LACHAIZE
M. Laurent LAFFARGUE
M. Hervé LAJOINIE
Mme Carole LE RENDU-LIZEE
Mme Laurie LEBLOND
Mme Laëtitia LEGLISE
M. Eric LEJEUNE
M. Jean Michel LUCAS
M. Philippe MARCHANDIN
M. Christian MARMONNIER
M. Daniel MARROUAT
M. Maxime MAZZARESE
M. Florent MAZZOLENI
M. Aymeric MONSEGUR
M. Olivier MORINEAU
M. Laurent MOULEDOUS
M. André NICOLAS
Mme Sylvette PEIGNON
M. Philippe PERES
M. Olivier PETERS
M. Aymeric PICHEVIN
M. Julien PRAS
M. Emmanuel RANCEZE
Mme Mathilde RIMAUD
M. Emmanuel ROMANI
M. Eric ROUX
Mme Jeanette RUGGERI
M. Guillaume SARAGOSA
M. Raphaël SUIRE
M. Bernard TAVITIAN
M. Jean Damien TERREAUX
M. Florent TEULE
M. Marc TOUCHÉ
M. Maider URRUTY
M. Didier VALDES
Mme Muriel VIGEZZI-RUZZI
M. Frédéric VILCOCQ
M. Patrick VOLPILHAC
Mme Marie-Christine WIBAUT
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Bordeaux Management School
Landes Musiques Amplifiées
CIAM
UMIHRA
Observatoire régional de la culture
Artiste (Groupe EIFFEL)
Amor Fati / Evolution
Directeur Régional des Affaires culturelles Aquitaine
SUD-OUEST
Musicaction / Reggae Sun Ska
Aliénor Record (label Platinum Rec.)
Radio 103
GRANEM
Pôle Emploi Culture Spectacle
Euskal Herria Zuzenean
Collectif Culture Bar-Bars
Université Rennes 2
4 SANS
Ecrivain journaliste
Rock School Barbey
CMDTA
Ecrivain journaliste
Bordeaux Rock
Vibrations Urbaines
Collectif ÇA’I
Cité de la Musique
BIMUDAQ
ABC Blanquefort
Ampli
MAN Média
Artiste (groupe CALC)
Rock School Barbey
ECLA
Rock et Chansons
Rock School Barbey
Les Rendez-Vous de Terres Neuves
Association LARURAL’
Université Rennes1
FRANCE3 Aquitaine
Fédération Nationale des Foyers Ruraux
Le RAMA
Sociologue
ADCMR64
Café Music
FNAC Bordeaux centre
Conseil Régional d’Aquitaine
ECLA
ADCMR40
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Commission
« Cadre de Vie
et Solidarités »
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Présidente : Muriel BOULMIER
Vice-Président : Luc CADILLON*
Rapporteur sur ce dossier : Christian SAUVAGE
Chargé de Mission : Jean-Claude GUICHENEY
Assistante : Stéphanie BROTHIER
COLLEGE I
Joël FRERET
Dominique GOURSOLLE-NOUHAUD
Jacques LOUGE
Bernard PÉRÉ (1)
Christian SAUVAGE
COLLEGE II
Marc BESNAULT
Gilles BEZIAT
Luc CADILLON
Jean-Baptiste ETCHETO
Bernard GAMBIER
Laurence ROBERT
Alain TESTON
COLLEGE III
COLLEGE IV
Muriel BOULMIER
Françoise GADY-LARROZE
Nathalie DELATTRE
Chantal GONTHIER
Manuel DIAZ VAZ
Paulette LABATUT
Michel FOUCHOU-LAPEYRADE
Sèrgi JAVALOYES
Jean-Claude LABADIE
Henri MARTIN
Elie PEDRON
Jacques PÈRE
Eric ROUX
Maurice TESTEMALE
Sylvie WEBER
VICE-PRÉSIDENTS DU BUREAU ET AUTRES CONSEILLERS
Michel CISILOTTO
Jean-Louis BOST
Jean-Michel GAUTHERON
Bernard CAZALA
Jacqueline BRET
Maguy MARUEJOULS
Philippe CRUEGE
Marc FERNANDES
Richard PEYRES
Patrick de STAMPA
Michel FOURCADE
Dominique GRACIET
Patricia MILLEPIED
Maurice PRAUD
Pierre DELFAUD
(1) M. Bernard PÉRÉ a été remplacé par M. Jean-Pierre LEROY le 12/04/2010
*Jusqu’au 17 mai 2010, la vice-présidence de la Commission a été assurée par M. Bernard GAMBIER
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Déclarations
des groupes
et membres du CESR
lors de la séance plénière
du 9 juillet 2010
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Intervention de Monsieur Luc PABŒUF,
Président du CESR d’Aquitaine
Notre Assemblée présente ce jour un avis sur un dossier qui semble très attendu. En
effet, bien qu’encore non publié, ce travail fait d’ores et déjà parler de lui, d’autant
qu’il a mobilisé durant près de deux ans beaucoup de professionnels et d’acteurs de ce
secteur des musiques actuelles. Ce travail répondait aussi à un besoin.
Je dirais dans le contexte actuel, à savoir celui d’une crise où certains pourraient avoir le
sentiment que les questions culturelles ne sont pas des questions de premier ordre,
que pour ma part je crois que ce sont au contraire des questions essentielles.
En effet, la culture est ce qui nous fait humain et dans un monde soumis à des inquiétudes
ou à des questionnements, c’est par l’expérience et la dimension culturelle que nous
pouvons retrouver des éléments de créativité. Même si la musique peut paraître
quelquefois éloignée de ce contexte, outre qu’elle adoucit les mœurs, elle est une
expérience à partager et, de ce point de vue, elle peut aussi être facteur de lien social,
ce lien social dont on a dit, lors du débat précédent consacré à la conjoncture, qu’il était
très affecté par cette situation de crise. C’est aussi une activité qui suscite des échanges
de biens, de services, des flux matériels et immatériels qui ont une valeur. La musique
génère donc une économie. Par conséquent, la musique est un fait social global et qui
mérite en tant que tel notre attention.
C’est aussi sans doute l’une des raisons de l’intérêt exprimé par les acteurs des musiques
actuelles, sujet dont la Commission « Cadre de vie et solidarités » a dû définir le périmètre
et ce à quoi le travail s’est entre autre attaché. Ce dernier a plus largement une dimension
« encyclopédique » ou systémique. J’ai été personnellement impressionné par la contextualisation à la fois sociétale et historique de ce secteur qui caractérise le travail.
Celui-ci est salué par les acteurs parce qu’il permet de rendre visible un domaine qui ne
l’est pas toujours et ce constat a été la première des impressions de ceux qui ont
contribué à sa réalisation.
Un travail très riche par conséquent, pour lequel notre Assemblée va être amenée à
innover, en s’inspirant de ce qui avait déjà été fait lors de la restitution du rapport sur
les langues et cultures régionales. En effet, il a été décidé d’accompagner la sortie
publique du rapport de la réalisation d’un support comprenant un double CD-audio afin
de mieux faire comprendre et entendre les musiques dont il est question. Ce support
sera remis lors d’une présentation publique le 18 octobre prochain.
Je passe donc la parole à Muriel BOULMIER, la présidente de la Commission « Cadre de
vie et solidarités » qui a conduit ce travail sur les musiques actuelles en Aquitaine.
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Intervention de Madame Muriel BOULMIER,
Présidente de la Commission
« Cadre de vie et solidarités »
Chers Amis,
Nous voici devant vous après presque 18 mois de travail, 40 réunions de la Commission,
une centaine de personnes auditionnées et ce rapport collectif élaboré avec passion, que
nous avons conduit en équipe avec Bernard GAMBIER puis Luc CADILLON et Christian
SAUVAGE, et un conseiller très présent, Eric ROUX, avec un clin d’œil particulier pour
Henri MARTIN qui fut notre « maître Capello » de la copie.
Merci à tous ceux des conseillers qui se sont associés avec assiduité à ce sujet nouveau
et iconoclaste. Un mot particulier pour Jean-Claude GUICHENEY qui a élaboré ce rapport
important, structuré et documenté avec beaucoup de compétence mais aussi de sangfroid.
Sujet nouveau pour le CESR, consubstantiel des aspirations des jeunes et des moins jeunes,
d’une ambition personnelle ou collective, tous animés par une même caractéristique :
la passion parfois avec le talent en plus.
Ce qui est le plus frappant c’est l’ambivalence de ce secteur qui oscille entre l’action
associative et le marché, en marge des subventions publiques de l’Etat ou des collectivités
locales. La mutation de la contribution publique ne s’est pas encore faite : elle demeure
majoritairement consacrée aux disciplines classiques ou à l’enseignement académique.
Cet état des lieux détaillé prenant différentes entrées, la pratique culturelle, mais celle
aussi de l’innovation et de projets au travers des territoires et des dynamiques locales,
nous amène à vous proposer un Plan Régional d’Initiatives, d’Innovation et de Soutien en
faveur des Musiques Actuelles : le PRISMA.
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Intervention de Monsieur Christian SAUVAGE,
Rapporteur général de la Commission
« Cadre de vie et solidarités »
Merci Madame la Présidente,
Monsieur le Président,
Chers Collègues,
Depuis la première audition effectuée par la Commission sur ce sujet le 15 décembre
2008, ce sont en effet 75 interlocuteurs auditionnés, une vingtaine d’entretiens ou
consultations extérieures. Ces quelques chiffres donnent une idée du travail qu’il a été
nécessaire de mener par la Commission pour aboutir au résultat qui vous est soumis
aujourd’hui.
Ce travail n’a pas toujours été évident et je serais tenté de nuancer le propos de notre
Président reprenant cet adage comme quoi la musique adoucirait les mœurs. Certains
parmi nous avaient du mal à percevoir l’intérêt d’un tel sujet à l’origine, ce dont peut
témoigner notre collègue Éric ROUX qui, avec Manuel DIAS VAZ, est à l’origine de cette
auto-saisine.
Les multiples auditions successives, les réflexions ou discussions qu’elles ont alimentées
au cours des dix-huit mois passés, concernant aussi bien l’histoire des musiques actuelles,
que les pratiques artistiques et activités auxquelles elles offrent un terrain d’expression,
ont permis une meilleure appropriation des différents enjeux liés à ces musiques.
L’analyse développée dans ce rapport met en évidence un point essentiel, à savoir le
facteur de bien-être individuel et d’un mieux vivre ensemble qui est associé à cet
ensemble de pratiques.
Je voudrais m’associer de manière solennelle aux compliments qui ont été adressés à
Jean-Claude GUICHENEY pour son implication dans la réalisation de ce travail. J’associe
également à ces remerciements tous les agents du service du CESR d’Aquitaine qui ont
accompagné la concrétisation du travail de la Commission.
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Intervention de Madame Maguy MARUEJOULS,
au nom de l’Union Régionale des Centres d’Information
sur les droits des Femmes et des Familles
Monsieur le Président,
Vous avez très justement qualifié le thème de ce rapport de véritable fait social et vous
avez cité tout à l’heure Amartya Sen, un économiste qui a obtenu le prix Nobel en 2000
pour un ouvrage où il démontrait qu’un pays ne pouvait durablement se développer
sans intégrer la dynamique de l’apport des femmes.
Je regrette que ce rapport intéressant, très instructif, n’analyse pas de manière fine la
situation des femmes dans les musiques actuelles tant du point de vue des opératrices,
actrices que du point de vue des utilisatrices.
La place des filles dans les musiques actuelles en Aquitaine aurait donné à ce rapport une
valeur ajoutée.
J’avais à plusieurs reprises fait part de cette demande au Bureau. Ce rapport n’en tient
pas compte.
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Intervention de Madame Jacqueline BRET,
Au nom du groupe Force Ouvrière
Lors de la définition, en début de mandature, des sujets d’autosaisine à traiter par les
quatre commissions, je crois pouvoir affirmer qu’au sein du bureau et de l’ensemble du
Conseil certains d’entre nous, comme moi je l’avoue, avions une idée très approximative
de ce que recouvrent « les Musiques Actuelles ». Nous savons aujourd’hui de quels sons
et de quels rythmes il s’agit et nous pouvons mesurer la complexité de la question à
l’aune des 18 mois de travail de la Commission, des 40 réunions et de la centaine
d’auditions qu’a nécessité l’approfondissement du sujet.
Nous avons bien noté l’ambition de promouvoir un « plan régional d’initiatives,
d’innovations et de soutien en faveur des musiques actuelles en Aquitaine » (PRISMA)
qui s’inscrirait dans le prolongement du « plan pour une politique nationale et territoriale
des musiques actuelles » de juin 2006 et répondrait aux attentes exprimées par les
acteurs de la filière dans le cadre du récent cycle de concertations territoriales engagé
par la Région sur les musiques actuelles en Aquitaine.
Il apparaît ainsi que la problématique des musiques actuelles a déjà fait l’objet d’études
et d’initiatives tant au niveau national que régional, d’autres régions s’étant également
penché sur la question, dont le CESR de Poitou-Charentes dans un rapport récent. Il
pourrait être, d’ailleurs, intéressant de confronter les réflexions ainsi engagées pour en
tirer le meilleur profit au bénéfice des musiques actuelles.
Au-delà de ces constats, notre groupe fera sien l’adage selon lequel « la critique est aisée
mais l’art est difficile » et se limitera à quelques remarques d’ordre général.
Il faut observer, tout d’abord, que la musique n’a jamais eu autant de place qu’aujourd’hui
dans notre société. Elle est véritablement créatrice de liens sociaux et les richesses
qu’elles suscitent ne sont pas seulement d’ordre financier.
Il faut également souligner que la musique sous ses diverses composantes est, souvent
pour les jeunes la première forme d’appropriation de la culture. Il est donc très important
d’insister sur le rôle culturel évident des musiques actuelles. Cet aspect est essentiel car
ceux qui ne voient en la musique qu’un simple produit marchand se trompent et, de
plus, la mettent en danger.
Avec le développement du disque, la musique est devenue un véritable produit de
consommation. Actuellement, comme le souligne le rapport, le disque est en voie de
disparition ; se pose, dès lors, l’organisation des autres moyens de diffusion.
Un autre aspect qui mérite d’être abordé est le rôle de l’Europe en ce domaine. En effet,
l’Europe se montre plus intéressée par la mobilité de certains artistes de renom plutôt
que par des expressions marginales n’ayant qu’une valeur économique faible.
En conclusion, on peut retenir que le chantier majeur de l’intégration des musiques
actuelles dans les politiques publiques est, avant tout, celui de la compréhension et de
la prise en compte des enjeux artistiques et culturels qu’elles représentent.
Enjeux artistiques : car la question est de mieux définir les dispositifs à mettre en œuvre
pour permettre aux musiciens de réaliser leurs propres projets musicaux et de vivre leurs
pratiques dans les meilleures conditions.
Enjeux culturels : car ces musiques intègrent et s’intègrent dans des champs plus larges,
qu’ils soient ceux du développement local et des mises en réseau avec les structures
locales (écoles de musique, notamment).
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Pour ce qui concerne le poids du secteur des musiques actuelles, on ne peut que retenir
l’idée de l’implication économique et sociale des structures de musiques actuelles dans
les territoires qu’ils soient urbains ou ruraux.
Enfin, à côté des oppositions disque/spectacle vivant et Paris/Province, il faut tenir
compte dans l’étude économique de la pratique des musiques actuelles, de l’opposition
entre professionnels et amateurs. Alors que lorsqu’ils jouent certains musiciens travaillent,
d’autres s’adonnent à un loisir. Le flou qui entoure le statut de musicien mais aussi
l’importance du bénévolat accentuent les difficultés de l’analyse. Il faut signaler, en ce
qui concerne l’ensemble des pratiques artistiques en amateurs, que des travaux menés
au niveau national soulignent l’interpénétration amateurs/professionnels au sein des
musiques actuelles.
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Intervention de Madame Françoise SARTHOU,
Au nom du groupe CGT
Cette auto-saisine particulièrement importante par son ampleur et sa rigueur, s’est
finalisée par un rapport détaillé qui fournit des éléments de réflexions, d’analyses, de
propositions qui devraient permettre à la collectivité territoriale de mettre en œuvre des
actions visant à une meilleure reconnaissance des musiques actuelles.
Il faut d’abord souligner une meilleure prise en compte depuis ces dernières années par
la Région de ce mode d’expression musical à l’initiative d’un élu particulièrement
attentif à ces données.
Les musiques actuelles représentent 95 % des pratiques musicales et seulement 5 % des
subventions. Sans vouloir opposer les musiques actuelles aux musiques dites classiques,
qui elles représentent l’inverse (c’est-à-dire 5 % des pratiques et 95 des subventions !).
La région Aquitaine a consacré depuis ces dernières années une part plus importante
de son budget culture aux Musiques Actuelles. De tout temps ces genres musicaux que
sont les musiques actuelles ont reçu moins d’aide de la part de l’Etat et des autres
collectivités territoriales (20 % de subvention Etat, 80 % CT). En région Aquitaine :
42 millions vont aux musiques classiques et seulement 3,6 aux musiques actuelles.
Il faut s’interroger sur plusieurs aspects. D’abord sur les politiques publiques qui ne sont
pas à la hauteur des attentes du public et des intervenants (professionnels, amateurs).
La culture en général, comme les musiques actuelles, est aujourd’hui traitée dans un
concept de marchandisation et les orientations politiques nationales tendent surtout à
privilégier ce qui rapportera le plus.
L’art doit-il se réduire à des conceptions uniquement financières ? Doit-on laisser aux
seules collectivités le soin de financer ce qui ne serait pas rentable ?
Pour en arriver à avoir deux types de choix :
• De l’argent pour la création ?
• Ou de la création pour faire de l’argent ?
Les musiques actuelles sont des musiques vivantes portées par un public et des acteurs
qui souvent exercent leur art dans des conditions difficiles (statut, emploi précaire).
La crise du disque a accentué des disparités déjà importantes et la recherche de solutions
d’aide à la diffusion doit être poursuivie (aides aux petits distributeurs, nouvelles
technologies).
S’il est difficile de cerner la frontière entre amateur et professionnel, des aides conséquentes
doivent permettre aux « écoles » de musiques actuelles, souvent issues du monde
associatif (SMAC, Salles de Musiques Actuelles) pour pouvoir transmettre et organiser
des pratiques demandées par un public de plus en plus nombreux et souvent intergénérationnel. Des tentatives de meilleure prise en compte de la professionnalisation se
font jour à travers une reconnaissance de l’acteur professionnel par son emploi et non
par un système d’indemnisation de périodes de non-travail (statut d’intermittent).
Si les aides régionales qui se font à des structures et non à des groupes sont efficaces,
ces aides doivent quand même être repensées dans leur importance pour réduire l’écart
actuel entre les aides aux Musiques Actuelles et les musiques classiques qui absorbent
une grande majorité des fonds publics (l’opéra de Bordeaux dispose de 8 millions €
par an, soit autant que les 136 SMAC en France !)
La diversité du territoire Aquitain mérite aussi une réflexion et des aides maillant tout le
territoire, tant aux structures que pour l’organisation des festivals.
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La RGPP et la réforme des collectivités territoriales nous font craindre pour les musiques
actuelles. Les collectivités pourront-elles garder la clause générale de compétence, qui
permet aujourd’hui de répondre à des besoins que l’Etat ne veut par couvrir ?
La part que fournit l’Etat est nettement insuffisante, et l’apport culturel des musiques
actuelles dans notre société doit être beaucoup plus reconnu, notamment par la mise
en œuvre d’une politique nationale plus aidante dans ce domaine.
L’emploi stable, la formation doivent être développés pour des acteurs professionnels en
grande majorité précaires. La réalisation d’un groupement d’employeur apporte une
sécurisation professionnelle qui mérite d’être élargie sur le territoire Aquitain.
La région Aquitaine doit mieux répartir ses subventions entre les Musiques Actuelles et
les musiques classiques. La part dominante des grands majors, comme des tourneurs
dans le paysage de ce secteur ne pourra que réduire la diversité et l’originalité des
musiques actuelles.
Pour la sauvegarde des pratiques et des écoutes qui doivent rester ce qu’elles sont :
l’essence de tous, dans tous les sens !
La culture n’est surtout pas une marchandise !
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Intervention de Monsieur Éric ROUX,
Au nom du Réseau Aquitain des Musiques Actuelles
C’est tout d’abord un sentiment de fierté qui m’anime, loin de toute autosatisfaction
tout simplement la satisfaction du devoir accompli.
Mesdames Messieurs les Conseillers, nous pouvons être fiers de ce rapport, il fera date et
bien au-delà des frontières de l’Aquitaine, ce rapport a une portée nationale.
Je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui y ont participé et qui ont ainsi
contribué à la qualité de ce travail.
Rapidement, je voudrais mettre en exergue quelques éléments :
Premièrement : le fait associatif est au cœur de nos pratiques et en fait sa vitalité.
Deuxièmement : grâce à l’engagement sans faille d’Aquitaines et d’Aquitains de tous
horizons depuis plus de 30 ans, notre région occupe une place prépondérante dans
ce domaine.
Troisièmement : ce rapport met un terme, du moins je l’espère, à beaucoup de lieux
communs attribués à nos musiques (musiques de jeunes, musiques urbaines, musiques
uniquement vouées à un rôle social, musiques réservées aux hommes…)
J’espère que la Région Aquitaine saura s’emparer des préconisations originales mais
réalistes qui lui sont faites, avec les autres collectivités territoriales et l’Etat, pour
répondre enfin à sa juste mesure à la lame de fond sociétale que constituent nos
musiques dites actuelles, et à leur apport en terme d’attractivité de développement
et de cohésion sociale pour l’ensemble de nos territoires.
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Intervention de Monsieur Manuel DIAS-VAZ,
Au nom du Réseau Aquitain
sur l’Histoire et la Mémoire de l’Immigration
Monsieur le Président,
Cher(e)s Collègues Conseillers,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais d’abord vous dire que je partage totalement l’intervention de notre collègue
Maguy MARUEJOULS sur la question de la place qui doit être faite aux femmes dans
nos travaux et avis.
Je me permets en tant que membre de la Commission « Cadre de vie et solidarités »
de remercier Jean-Claude GUICHENEY pour son excellent travail, son engagement, son
professionnalisme et son sens de la synthèse. Notre rapport est en partie le fruit de son
implication.
Je partage, Monsieur le Président, Chers Conseillers, mots pour mots l’intervention de
mon ami Eric ROUX. Je vous rappelle que c’est Eric et moi-même qui avions proposé
cette auto-saisine sur les musiques actuelles en Aquitaine à la Commission.
La richesse de ce rapport est le fruit des multiples auditions, contributions et d’une
réflexion approfondie des membres de notre Commission. Il met en évidence le
dynamisme, la créativité, le potentiel de notre région dans le domaine des musiques
actuelles et populaires. Il souligne l’importance des acteurs publics et privés, notamment
les associations d’éducation populaire intervenant dans ce secteur, avec leur engagement,
leur passion et leur grand professionnalisme, tout en valorisant l’action des amateurs et
le rôle des bénévoles, qui font vivre les lieux et projets dédiés à ces formes de musiques.
La Région Aquitaine a la chance de pouvoir compter avec des acteurs culturels et des
créateurs de qualité, des êtres passionnés. Ce rapport met également en évidence
l’importance du métissage, de la diversité culturelle et des enjeux de la démocratisation
de l’accès à la culture.
Ces formes d’expressions musicale et artistique sont l’illustration de l’importance de la
culture dans le vivre ensemble, la cohésion sociale, l’enjeu du dialogue entre les cultures
et les générations.
J’espère que nos travaux, nos propositions seront de nature à créer les conditions pour
que les décideurs nationaux, régionaux et locaux soient demain plus attentifs à ce
champ d’intervention musical qui montre le dynamisme et la créativité de notre région
et de sa population.
Je vous remercie.
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Intervention de Monsieur Maurice TESTEMALE,
Au nom du Comité Régional des Associations de Jeunesse
et d’Éducation Populaire
Monsieur le Président, chers Collègues,
Je souhaitais développer quelques remarques sur deux axes mais c’est avec plaisir que
j’en ajoute un troisième en préambule pour m’associer aux félicitations adressées aux
principaux acteurs de ce remarquable travail : ils ont déjà été cités.
« Nous évoquons un domaine qui se situe entre vie associative et marché » disait la
Présidente dans son propos d’ouverture. Certes…
De mon point de vue il manque les acteurs importants que constituent les pouvoirs
publics, c’est ma première remarque, et dans tous les cas les associations resteront au
premier rang à plusieurs endroits de la chaîne, quelle que soit la part prise par le marché,
c’est mon second propos.
Tout l’avis, ainsi que les préconisations interpellent les pouvoirs publics pris au sens le
plus large puisqu’aussi bien l’Etat, les Régions, les Départements et /ou les communes
et leurs regroupements se retrouvent tantôt en initiative, souvent en accompagnement.
Hélas, certaines ne peuvent ou ne veulent s’engager.
Mais nos préconisations vers la collectivité régionale ne vaudront - si elles étaient entendues et suivies - que si la réforme des collectivités en débat au Parlement ne prive pas
les acteurs publics de la compétence générale qui leur a permis d’être acteurs sous des
formes diverses jusque-là. Car nous pouvons douter de l’efficacité d’une compétence
regroupée sur une seule collectivité.
Mon second propos souligne la place des associations tout au long de la construction
de ce secteur, de son développement, de son ancrage sur les territoires. Les musiques
actuelles sont constitutives d’une culture populaire; elles se développent dans cette
partie associative de l’éducation populaire et l’enrichissent de toutes ses initiatives.
Le cadre de cette loi 1901, loi de libertés reste un levier adapté pour révéler les initiatives bénévoles, les mutualiser, les renforcer. C’est un support légal pour porter des
emplois, pour réaliser des investissements adaptés. C’est un outil appropriable par les
jeunes pour se former et valoriser leur expression et leurs créations. L’association, révélatrice des demandes sociales et de leurs différentes expressions, reste un laboratoire
pour de nouvelles pratiques.
Même si demain les pouvoirs publics répondaient à toutes nos préconisations, la place
des acteurs associatifs resterait essentielle. Pour peu que les pouvoirs publics veuillent lui
reconnaître ce rôle.
Nous aurions pu imaginer un amendement qui dans l’axe 5 aurait invité le conseil
régional - mais aussi les autres collectivités - à favoriser le contrat citoyen en soutenant les
coordinations associatives et en affirmant une politique d’accompagnement transversal.
Il ne s’agirait pas seulement de soutenir les domaines que les associations développent
mais aussi leur capacité à produire encore de l’ingénierie sociale pour donner vie à ce
contrat citoyen évoqué.
L’expression de cette conviction, plusieurs fois répétée ici sera entendue et au-delà nous
ne doutons pas que cette dynamique portée par des bénévoles passionnés qui allient
leurs compétences à celles des professionnels sera reconnue et accompagnée.
Je vous remercie.
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Intervention de Monsieur Jean-Pierre LEROY,
Au nom de la Confédération Paysanne
Ayant participé à ce travail tardivement, j’ai tout de même pu en apprécier la qualité,
mais aussi l’ambiance sympathique dans laquelle s’est déroulée l’écriture de ce rapport.
Concernant le soutien public de 5 % aux musiques actuelles et 95 % aux structures
« musiques conventionnelles », on peut nuancer ces chiffres même s’ils reflètent bien
la réalité.
Beaucoup de musiciens appartenant aux musiques actuelles ont été formés dans les
écoles de musiques dites conventionnelles et bénéficient de fait des soutiens publics
dans la tranche des 95 %. Néanmoins, cela ne doit pas entraver un rééquilibrage des
soutiens publics vers les « musiques actuelles », d’autant qu’une transversalité s’opère
entre les différentes musiques s’enrichissant ainsi mutuellement. Les musiques actuelles
ont pris leur place dans le monde artistique de la région aquitaine.
Dans ce rapport, nous parlons beaucoup de professionnalisme, mais nombreux sont
des musiciens amateurs aux vrais sens du terme. Leur capacité à faire vivre leur musique
est souvent comparable à des professionnels. Eux aussi participent pleinement à
l’expression musicale spontanée que sont les musiques actuelles en Aquitaine.
Tous les acteurs amateurs et professionnels participent à un mieux-être sociétal et
permettent la création de liens pour un mieux vivre ensemble dans notre communauté
d’Aquitaine.
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CONSEIL ECONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL RÉGIONAL AQUITAINE
Hôtel de Région
14, rue François de Sourdis
33077 BORDEAUX CEDEX
Tél. 05 57 57 80 80
Site Internet : http://cesr-aquitaine.fr
Bientôt : http://ceser-aquitaine.fr
Edition : PG Edition
Illustration : Lionel BARAT, KYMZO
Dépôt légal : Octobre 2010
ISBN : 978-2-11-099404-2
Octobre 2010
tel
3 3 0 7 7 B ORDEAU X C e d e x
05
57
57
fax
05
56
99
80
80
com@cesr-aquitaine
21
67
h t t p : // c e s r - a q u i t a i n e . f r
aquitaine musiques actuelles : pratiques porteuses de valeurs sociales, économiques et d’innovations pour l’aquitaine - rapport - octobre 2010
© CESER Aquitaine 2010 - Impression : PG Edition - Design visuel : KYMZO
14 rue François de Sourdis

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