Le régime des majeurs protégés et son exécution en droit international
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Le régime des majeurs protégés et son exécution en droit international
Justine Delafoy (L3 Droit) Maryne Biabiany (L3 Droit) Atelier clinique juridique Mai 2016 Le régime de protection des majeurs protégés et son exécution en droit international En principe, lorsqu’une personne atteint l’âge de 18 ans en France, elle dispose de la pleine capacité civile et devient libre d’agir comme elle l’entend sans l’aide d’un représentant légal ni autorisation quelconque. Cependant, certains majeurs nécessitent d’être assistés ou représentés en raison d’un trouble physique ou mental qui ne leur permet pas la libre disposition de leurs actes et ce pour des raisons diverses. Ces personnes font l’objet de mesures de protection qui varient en intensité; ces mesures s’adaptent aux troubles rencontrés par le majeur protégé dans sa vie quotidienne, sous le contrôle du juge des tutelles qui organise différents régimes de protection: tutelle, curatelle et sauvegarde de justice. Les majeurs protégés étant susceptibles de posséder des biens à l’étranger (immeubles, comptes bancaires,…) et étant amenés à se déplacer et à franchir les frontières, il est assez fréquent que la question de l’application d’une mesure de protection décidée à l’étranger se pose. En quoi consistent ces régimes de protection ? Et comment exécuter une mesure de protection décidée à l’étranger en France? Voici quelques éléments de réponse. Qu’est-ce que la tutelle? La tutelle est un régime de protection où une personne (le tuteur) va représenter un majeur en raison d’une altération de ses facultés personnelles (physiques ou mentales) et ce, d’une manière continue dans tous les actes de la vie civile. Ce représentant, le tuteur, exerce sa mission sous le contrôle du juge des tutelles qui l’a désigné. Le juge des tutelles compétent est Clinique juridique celui situé auprès du Tribunal d’Instance du lieu du domicile principal de la personne protégée ou à protéger (articles 390 à 413-8 du code civil). Qu’est-ce que la curatelle ? La curatelle est un régime de protection intermédiaire. Le curateur n’aura qu’un rôle de conseiller et d’assistance auprès du majeur dans la gestion de ses biens (comptes bancaires,…); le majeur placé sous curatelle ne sera contrôlé que dans les actes les plus graves de la vie civile ou en cas d’ altération de ses facultés personnelles. Parfois le juge des tutelles peut également demander au curateur d’exercer une surveillance sur tous les actes de la personne protégée et de lui en rendre compte. On parle alors de curatelle renforcée. (articles 508 et suivants du code civil). Qu’est-ce que la sauvegarde de justice ? La sauvegarde de justice est le régime de protection le plus léger. Ce sont les majeurs qui ont besoin d’être protégés dans certains des actes de la vie civile seulement en raison d’une altération momentanée de leurs facultés personnelles (par exemple suivant une opération ou une hospitalisation) qui seront placés sous ce régime (articles 433 et suivants du Code civil). Comment faire appliquer dans un état européen une mesure de protection décidée à l’étranger? Dans tous les pays européens des systèmes similaires existent permettant la protection de certains majeurs. 1 Lorsque l’un des régimes de protection des majeurs dont nous venons de parler ou analogues est ordonné dans un Etat étranger et que l’une des parties voudrait que cette décision soit reconnue et opposable dans un état européen comment procéder ? Il faut en réalité distinguer trois hypothèses ; la reconnaissance par les juridictions françaises d’une mesure de protection étrangère d’un majeur est soumise: - soit à la procédure de l’exequatur, - soit à la nouvelle procédure simplifiée, - soit à la procédure prévue par la Convention de la Haye du 13 janvier 2000. Qu’est-ce que la procédure d’exequatur? L’exequatur peut être définie comme étant une procédure qui vise à donner force exécutoire dans un Etat à une décision rendue dans un autre. Cette procédure a été règlementé dans le cadre de la Convention de Bruxelles et du Règlement européen n°44/2001; lorsqu’il est demandé aux autorités françaises de reconnaître une mesure de protection ordonnée dans un autre Etat (avec lequel il n’existe aucune convention particulière), il doit être fait application de cette procédure. La représentation par un avocat n’est pas obligatoire, mais peut être utile dans cette procédure. Le Tribunal de Grande Instance compétent est saisi par voie de requête, c’est-àdire par courrier adressé au Greffier en chef de la juridiction, ayant pour objet la demande d’exequatur. Cette requête doit être accompagnée de différents justificatifs : une copie certifiée du jugement ou de la décision ayant ordonné la mesure de protection (tutelle, curatelle ou autre); cette copie certifiée peut être délivré par les services du tribunal qui a rendu la décision, 1 En Europe, il existe le plus souvent un système similaire au système français dans lequel il y a trois niveaux de protections allant d’une protection assez poussée à une protection très souple. L’Italie par exemple prévoit un régime de tutelle et de curatelle; l’administration de soutien italienne est un peu l’équivalent de la mesure de sauvegarde de justice française. Clinique juridique une traduction de ce jugement réalisée par un traducteur officiel (liste des traducteurs assermentés disponible auprès des Cours d’Appel), un certificat délivré par la juridiction ayant décidé de la mesure de protection destiné à prouver que cette décision est bien exécutoire dans l’Etat d’origine. Ce certificat doit indiquer certains d’éléments (coordonnées de la juridiction qui a rendu la décision, date, numéro du jugement, etc.) et il doit porter le sceau du Greffe. (certificat visé à l’article 54 et prévu à l’annexe V du règlement européen n° 44/2001) Qu’en est-il de la nouvelle procédure dans le cadre de l’Union européenne? Une nouvelle procédure d’exécution directe des décisions de justice étrangères est applicable dans le cadre de l’Union européenne, sans autorisation préalable. Cette procédure n’est applicable qu’aux actes et actions entamées après le 10 janvier 2015. Désormais, les décisions judiciaires rendues dans les Etats membres pourront être exécutées au sein de l’Union européenne sans exequatur préalable. Pour ce faire, il faut simplement obtenir un certificat délivré par la juridiction qui a rendu la décision, attestant notamment qu’elle est bien exécutoire dans l’Etat européen d’origine. Dès lors, il est possible d’obtenir les mesures d’exécution forcée (pour cela il faut s’adresser à un huissier de justice et lui fournir une copie de la décision et le certificat attestant de son caractère exécutoire). En pratique, bien qu’il n’y ait aucune obligation de par le nouveau Règlement qui l’a mis en place, il est conseillé de fournir une traduction de la décision et du certificat en français. (Article 509 et suivant du Code de procédure civile) Qu’en est-il lorsque la Convention de La Haye du 13 janvier 2000 est applicable? Certains Etats sont signataires de cette convention qui vise dans un cadre plus élargi que l’Union européenne à mettre en place une certaine harmonisation au niveau de la protection des majeurs. Cette dernière est notamment applicable lorsqu’un majeur est placé sous une mesure de protection, peu important la nature de celleci :« tutelle, curatelle ou toute forme de protection analogue » (Cf article 3 de la convention de La Haye). Pour appliquer cette convention il convient de vérifier au préalable si les Etats en cause (l’Etat dans lequel la mesure de protection a été ordonnée et l’Etat dans lequel il est demandé qu’elle obtienne force exécutoire) sont signataires de cette Convention de La Haye. C’est uniquement à cette condition que cette convention leur est opposable et peut recevoir application. Les Etats signataires sont actuellement : l’Allemagne, l’Autriche, Chypre, la Finlande, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, Monaco, les Pays-Bas, la Pologne, La République Tchèque, le Royaume-Uni et la Suisse. Ainsi, lorsque les Etats sont signataires, la procédure simplifiée peut s’appliquer pour permettre l’exécution d’une mesure de protection décidée par une juridiction de l’un de ces états. Il suffit dans ce cas de figure de demander simplement un certificat à l’entité qui a rendu la décision de placement sous protection qui vaut certificat international. La mesure de protection s’appliquera alors dans l’Etat où la reconnaissance de la mesure avait été demandée. Justine Delafoy et Maryne Biabiany Liens utiles : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F2120 http://www.vos-droits.justice.gouv.fr/tutelle-curatelle-et-sauvegarde-11960/curatelle-20744.html https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F2075 http://www.chambre-mjpm.fr http://www.fnmji.fr/ Sources : Tutelle : Article 425 Code civil (Legifrance) à Article 432 Code civil (Legifrance) Article 440 Code civil (Legifrance) Article 441 Code civil (Legifrance) Des actes faits dans la tutelle : Articles 473 à 476 Code civil (Legifrance) De la curatelle et de la tutelle : Article 440 et suivants Code civil (Legifrance) De la durée de la mesure : Articles 441 à 443 Code civil (Legifrance) De la publicité de la mesure : Article 444 Code civil (Legifrance) Des organes de protection : Articles 445 à 453 Code civil (Legifrance) Des effets de la curatelle et de la tutelle quant à la protection des personnes : Articles 457-1 à 463 Code civil (Legifrance) De la régularité des actes : Articles 464 à 466 Code civil (Legifrance) Des actes faits dans la curatelle : Articles 467 à 472 Code civil (Legifrance) Sauvegarde de justice : Article 433 Code civil (Legifrance) à Article 439 Code civil (Legifrance) Exécution d’un jugement à l’étranger : Article 509 à 509-7 du Code de procédure civile (Reconnaissance transfrontalière d'un jugement) Article 54 Règlement européen n°44/2001 (délivrance d'un certificat pour reconnaissance dans un autre Etat) Convention de la Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes Clinique juridique