D. Guillaume LETTRES : PROGRAMME 4 Henri Michaux, Plume

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D. Guillaume LETTRES : PROGRAMME 4 Henri Michaux, Plume
D. Guillaume
LETTRES : PROGRAMME 4
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
Dates
1) mardi 2 mars
3 mars
4 mars
2) mardi 9 mars
10 mars
11 mars
3) mardi 16 mars
17 mars
Cours
Intro.1
Sujet DM2
Intro. 2
Intro. 3
Explication 1 : « La Ralentie » ?
Explication 2 : « Une tête sort du
mur », pp. 15-16
Thème 1 : L’écriture de soi
Explication 3 : « Entre centre et
absence », pp. 37-38
Colles d’aide à la dissertation
Thème 2 : Monstres et animaux
Expl. 4 : « Mais toi, quand viendrastu ? » pp. 98-99
Thème 3 : Le corps
Thème 4 : Écriture et temporalité
18 mars
4) mardi 23 mars
Explication 5 : « Un homme
paisible », pp. 139-140
Thème 5 : Les formes
Rendre DM2
Correction DM 2
24 mars
Révisions
25 mars
Révisions
5) mardi 30 mars
CONCOURS BLANC
6) mardi 6 avril
CORRECTION
Sujet DM2 : Dans Passages (1950), Henri Michaux affirme « [l’]honnêteté tardive »
de « ce [qu’il] écrit(t), qui est de l’invention saisie à la gorge, et à qui on n’a pas donné la
belle existence qui lui semblait promise. » En quoi cette affirmation et cette définition vous
semblent-elles éclairer Plume précédé de Lointain intérieur ?
LETTRES : PROGRAMME 4
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
Bibliographie
— 1) Sur la poésie :
. Gérard DESSONS: Introduction à l’analyse du poème, Dunod (Bordas, 1991)
. Michel JARRETY (dir.) : La Poésie française du Moyen-Âge jusqu’à nos jours,
PUF, « Premier Cycle », 1997.
— 2) Sur Henri Michaux
. Raymond BELLOUR (dir.) a> « Introduction » et « Chronologie » in Henri Michaux,
Œuvres complètes, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1998 ; b> Cahiers de l’Herne,
Henri Michaux, 1983 (1966)
. René BERTELÉ, Henri Michaux, Seghers, « Poètes d’aujourd’hui », 1972 (1946)
. Jean-Pierre MARTIN, a> « Henri Michaux » in Michel JARRETY (dir.),
Dictionnaire de poésie de Baudelaire à nos jours, 2001, pp. 502-508 ; b> Henri Michaux,
Écriture de soi, expatriations, José Corti, 1994.
. Jean-Michel MAULPOIX, Michaux, Passager clandestin, Champ Vallon, 1984
. Michel BUTOR, Improvisations sur Henri Michaux, Fata Morgana, 1985
. Michel COLLOT et Jean-Claude MATHIEU, Passages et langages de Henri
Michaux, José Corti, 1987
— 3) Sur Plume précédé dé Lointain intérieur
. Colette ROUBAUD commente Plume précédé de Lointain intérieur, Gallimard,
« Foliothèque » n°91
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RÉSUMÉ
— 1. Entre centre et absence
+ 1> Magie
. I. [9] Pour ne plus être nerveux, je me mets ds une pomme ; difficile : d’abord essayé
de s’unit à l’Escaut ms regarde les femmes, [10] et coule tt le temps. Souffrir est le mot ; glacé
quand arrive ds la pomme.
. II. La désirais ; pur la séduire, répandis des plaines ; [11] puis la possédai, elle
découvrit ma vraie nature, s’en alla comme si on l’avait volée.
. III. Enfouie en moi-même comme une boule au point que lancer un regard difficile ;
racine de l’angoisse devrait être enfouie ; immobilité d’un caveau.
. IV. [12] Carie, otite ; effacer la souffrance par concentration ; [13] difficile de durer
ainsi.
. V. Si faible que toute coïncidence avec qqn m’avalerait, tt effort pour être
exclusivement moi ; défi au plus puissant des hommes ; [14] telle concentration qu’en face de
lui, il ne me verrait pas.
+ 2> Une tête sort du mur
. [15] Qd éteins la lumière le soir, apparaît une tête énorme qui se rue sur le mur et
sort : expression de la solitude ? [16] tête vit et s’obstine ds ces élans ; parfois moi-même me
jette ds ma chambre et en ai satisfaction surhumaine ms surprise car rien de cassé alentours.
+ 3> Ma vie s’arrêta
. [17] En plein océan, le vent s’arrêta et ma vie fit « toc » : « la fiancée se retire » ; tte
ma vie s’envagine ds ce moment.
+ 4> Un tout petit cheval
. [18] Je l’élève et il grandit (50cm+) ; souci = Hélène, qui ne supporte pas le crottin.
Inquiétudes < métamorphoses : gonfle et s’effiloche ; [19] pas cheval ? rut le trouble, saute
partt, ms ttes femelles indifférentes : faute en moi ?
+ 5> Vision
. [20] Eau savonnée se mue en cristaux et tranche le bras d’une femme qui se lavait les
mains ; un homme se cassa dix-sept fois un bras qui ne le satisfait pas, à chaque fois en
pousse un autre plus long et mieux ; [21] partit avec le 18e pour les besoins de la journée.
+ 6> L’animal mange-serrure
3
. [22] Homme ds couloir d’un hôtel se promène avec cet animal, circule comme chez
lui ms animal insatiable. Je lui dis que je préférais sortir ; regard blanc. Me plaisait ss me
convenir.
+ 7> Prêcher
. [23] Se casse une jambe ds un urinoir. Veut prêcher, ms plate-forme s’effondre, retiré
de l’eau comme poisson et vendu, mis à la poêle : plus fort bon pour prédication.
+ 8> Rentrer
. [24] Je ne veux pas rentrer chez mes parents, malgré présence d’un toit. Leurs
sifflements et silence vains ds la nuit.
+ 9> On veut voler mon nom
. [25] Je me rase et aperçoit trois dents en or alors que jamais allé chez le dentiste : ils
veulent me prendre mon nom ms je m’y accroche.
+ 10> Quand les motocyclettes rentrent à l’horizon
. [26] Elles sont la seule ch que j’apprécie, avec leurs jambes fines ; ne quittent qu’à
regret l’horizon, et àa fait rêver, pisser les chiens, et nous, regarder les horizons.
+ 11> Une femme me demande conseil
. [27] Je suis devenue un requin marteau à 24 ans ; une jeune morse s’intéresse à moi,
j’ai presque 28 ans ; un empereur me demande si l’on peut chasser la baleine à la main ; [28]
répondez par pneumatique et/ou demandez à un orcal ; un buffle rôde, dois-je le tuer ?
+ 12> La nature, fidèle à l’homme
. [29] Un grand feu de bois fait tj reculer l’obscurité. L’eau tj prête à bouillir et l’océan
n’a de forme que de son lit ; les lacs apaisent sentiment d’infériorité des faibles, ms fille
moqueuse ou père sceptique peuvent les culbuter à tt jamais de leur plate-forme.
+ 13> Le chêne
. [30] Vois un tt petit chêne malade ; or pas d’ennemi ds le voisinage ; parasite
pourrait le miner. Donc je l’arrache, car n’en avait pas assez appris pour vivre.
+ 14> Le bourreau
. [31] Mon bras trop faible pour que je sois bourreau. Un jour, à l’occasion d’un
condamné au cou frêle, on se rappelle m candidature et on me l’amène. Je refuse ms le
regrette aussitôt : le bourreau ordinaire [32] la tranche comme ordinairement ; je me fais des
reproches.
+ 15> Rêve de Moore
. [33] Note : pseudo de Suzanne Malherbe qui fit le rêve transcrit ici. Elle arrive au
milieu d’une peuplade de nègres. Enfant royal nourri par mère et par une nourrice à qui on
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tranche un sein. Elle demande au roi ; ainsi, l’enfant apprend plus vite à parler car cette
absence l’intrigue [34] et veut s’exprimer ; son premier mot est tj « abricot ».
+ 16> Dimanche à la campagne
. [35] Peuplade aux noms étranges. Un Ballus de la famille des Bormulacés rencontra
Zanicovette, qui sourit puis pudique se détourne, ms une vieille paricaridelle a tout vu,
interpelle Z qui effrayée s’enfuit. Fin du jour d’été. [36] Mer au loin. Ts rentrent, même les
jeunes les moins sérieux. Village comme petit navire. Les vieilles épient les retardataires.
Avenir contient larmes, dont celle de Z ss doute.
+ 17> Entre centre et absence
. [37] C’était à l’aurore d’une convalescence (effet de refrain). Protestation contre
médicastres infâmes. Porte d’une longue angoisse. Fin de la guerre des membres ; je passerai
cette fois. [38] Inouïe simplicité, comme poulet sort d’un œuf. Épaississement du grand écran.
JE VOYAIS. On se survole ? À l’arrivée, entre centre et absence, à l’Euréka, ds le nid de
bulles.
— 2. La ralentie
— 3. Animaux fantastique
— 4. L’insoumis
— 5. Je vous écris d’un pays lointain
— 6. Poèmes
— 7. Difficultés (1930)
— 8. Un certain Plume (1930)
+ I. Un homme paisible [139]
. Pl. se rendort après chaque constat étonnant : disparition des murs > les fourmis l’ont
mangé ; sa femme le réveille : maison volée > ch est faite ; train arrive sur eux > de tte façon
avant eux ; froid, morceaux de sa femme, sang désagréable > mieux si train pas passé, ms si ;
[140] juge s’étonne de sa passivité à côté de sa femme en morceau > peux pas l’aider ; sera
exécuté demain > n’a pas suivi l’affaire.
5
+ II. Plume au restaurant [141]
. Pl. s’excuse à chaque fois, aussitôt ; garçon sévère < ce qu’il a commandé figure pas
sur la carte ;
+ III. Plume voyage [145]
+ IV. Ds les appartements de la reine [148]
+ V. La nuit des Bulgares [152]
+ VI. La vision de Plume [159]
+ VII. Plume avait mal au doigt [161]
+ VIII L’arrachage des têtes [164]
+ IX. Une mère de neuf enfants [168]
+ X. Plume à Casablanca [171]
+ XI. L’hôte d’honneur du Bren Club [173]
+ XII. Plume au plafond [175]
+ XIII. Plume et les culs-de-jatte [175]
— 9. Chaînes (pièce en un acte, 1937)
— 10. Le drame des constructeurs (acte unique, écrit en 1930, représenté en 1937 à Paris)
— 12. Postface
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INTRODUCTION
I. Belgique et France à la veille de la Seconde Guerre mondiale
— 1> Identité problématique d’un pays natal.
. Peut éclairer positionnement décentré de HM / langue et institutions en gal (né belge,
naturalisation française envisagée dès 1928 en Équateur ; obtenue en 1955).
. Cf. « En Belgique » (Pl. 268-9)
+ a) Une parcelle d’empire
. MA Pays-Bas = possession des ducs de Bourgogne > 15e : des Habsbourg.
. Absolutisme de Philippe II 16e > sentiment national : séparation des Provinces-Unies
(Hollande) / Pays-Bas espagnols puis autrichiens (Belgique).
+ b) La domination française
. Fin 18e = soulèvement révolutionnaire contre occupation autrichienne.
. > Passe sous domination française : 1795-1815 (départements français, code civil…)
. Effondrement de l’Empire NB > reconstitution, par les alliés, d’un royaume des
Pays-Bas : ms opposition catholiques sud / protestants + réticence wallonne / langue
néerlandaise > insurrection 1830, à l’exemple parisien.
— Louis-Philippe n’ose accepter la couronne pour son fils Duc de Nemours >
Léopold 1e de Saxe-Cobourg-Gotha : reconnaissance par l’Europe d’un
État indépendant et neutre.
+ c) Un tout jeune État
. 19e siècle = caractérisé surtout parle développement économique et la prospérité
(rendements agricoles = max d’Europe en 1870) > aux yeux des français = exemplaire de la
nouvelle société bourgeoise (comme EU, dont constitution fédérale a servi de modèle fin
18e) : cf. Pauvre Belgique de Baudelaire (années 60 > posth. 1921).
. Puissance économique ms faiblesse militaire > occupation allemande 1914-18.
. Poussée du nationalisme flamand (apparaît
avec indépendance : < revendiquer
égle dignité du flamand et du français) > élection de députés rexistes, de tendances fascistes
en 1936 > chef Léon Degrelles collaborera avec Hitler en 1940.
— 2> La France des années vingt et trente
7
+ a> Victoire, prospérité, sclérose (1919-29)
. Pays victorieux qui, globalement, avec gvt Poincaré et Bloc national, adopte une
politique de fermeté / Allemagne.
— Certaine inversion àp de 1924 et victoire du Cartel des gauches : intérêt
pour la SDN et système d’accords internationaux (cf. Aristide Briand).
— Prédominance de la droite < son ralliement global au parlementarisme +
division de la gauche au Congrès de Tours 1920 (communistes à
l’International / Socialistes), qui ne peut gvner qu’avec les radicaux
(socialement conservateurs).
. Redressement rapide du pays, qui profite surtt aux grandes entreprises et à la
bourgeoisie.
— inflation forte jusqu’en 1926 = touche employé, ouvriers, fctnaires ms plus
encore rentiers et retraités ; profite aux gros producteurs.
— Concentration et dvlppt industriel (électricité, automobile, automatisation et
standardisation [> dégradation de la condition ouvrière : OS], grande
distribution).
. Paradoxe des années folles.
— Bourgeoisie triomphante, gvts modérés àp de 1926 ; pays globalement âgé
(> immigration), assis sur des certitudes anciennes.
— Évolution des modes de vie, cf. place nouvelle des femmes (cf. HM
fréquente àp 1925 photographe Claude Cahun [> photo, femme] et sa
compagne Suzanne Malherbe, dite Moore > « Rêve de Moore », PL. 34),
transport, sport + presse, « folie » de la vitesse, de la mode et des arts.
— > mvt. protestataires (Dada, surR) + créateurs qui fuient ce monde pour se
découvrir (orientalisme : Segalen 1914-17, Claudel 1895-1909, SJP 191621 en Chine, Malraux 1923-27…)
. Années ou triomphe l’idée coloniale : cf. Exposition universelle de 1931 +
refus de réformer l’Empire.
+ b> Réalités de la crise (1929-39)
. Crise de régime : instabilité ministérielle (< dépendance de l’exécutif / législatif) qui
alimente immobilisme > recours à des procédures d’exception (pleins pouvoirs).
. Crise économique, même si à retardement (1932) : affecte toutes classes, moins la
bourgeoisie, qui peu vivre sur ses réserves ms se retrouve isolée.
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. > Crise politique :
— Popularité des ligues de droite et d’anciens combattants, émeute du 6
février 1934 (> Démission de Daladier Pdt du Conseil sous pression de la
rue) ; > après 36, développement de parties de masse fascisant (PSF de La
Rocque, PPF de Doriot).
— Réaction : nouvelle alliance des partis de gauche (PS-PC-radicaux) >
victoire du Front Populaire en 1936 : grève gale et réformes importantes (dt
du travail, congés payés, semaine de 40h) ; chute en 37 (< Radicaux).
. Crise diplomatique :
— Faiblesse de la réaction des démocraties, et de la France notamment, face à
l’Allemagne de Hitler : élu en 1933 > se retire de la SDN, 1934 assassinat
du chancelier autrichien Dollfuss, réoccupe la Rhénanie en 36, annexe
l’Autriche (mars 38).
— Ambiance à l’approche de la guerre : pacifisme de beaucoup(1935
Giraudoux, La Guerre de Troie n’aura pas lieu), fatalisme (Renoir, La
Règle du jeu 1939).
. Plume précédé… paraît en mai 1938 / accords de Münich (septembre 38 :
Daladier et Chamberlain entérinent annexion des Sudètes et démembrement
de la Tchécoslovaquie).
. Cf. lettre de Michaux à Claude Cahun, novembre 38 : « ils glissent ts à
droite, non plus exactement et c’est pire, vers l’autorité »
II. Quelques renseignements sur quatre-vingt cinq années d’existence (1899-1984)
Cf. à Robert Bréchon / « 59 années » in Michaux, 1959
. Paradoxe d’une très grande réticence / livrer renseignements auto-bio, multiplication
des fausses pistes et erreurs — ms : nombreuses résurgences autobiographiques ds l’œuvre +
écriture qui part de soi, PL étant à cet égard une œuvre tournant : cf. « Avec Plume, je
commence à écrire en faisant autre chose que décrire mon malaise. »
— 1> Le rejet d’une famille bourgeoise
9
. (cf. db. de la « Postface » 215 : « J’ai vécu contre mon père (et contre ma mère et contre
mon grand-père, ma grand-mère, mes arrière grands-parents) ».
+ a) Le milieu
. Porte le nom de son grand-père paternel (menuisier ébéniste > rentier) ; père =
négociant (chapellerie) > rentier ; famille paternelle : Ardennes belges. Famille maternelle
wallonne ; grand-père maternel allemand naturalisé belge, grand-mère d’ascendance
espagnole.
— Origine complexe + réussite sociale rapide au 19e.
. Frère aîné (de trois ans) fait son droit > avocat à Bruxelles
— exemple de réussite / cadet raté (« l’artiste ») ; cf. Pl. LXXX.
— Ms : lettres de guerre témoigne d’un milieu familial affectueux et cultivé.
+ b) Un enfant clos
— cf. « Portrait de A » 109 sq. + « Quelques renseignements… »
. Naissance à Namur ms famille s’installe à Bruxelles ds gde maison bourgeoise àp de
1901
. > 1906-10 HM en pension ds un petit bourg à la campagne : bourgeois wallons +
externe paysans flamands.
— années de solitude, tendance à l’anorexie ; rêverie, refus du monde
extérieur et de soi (« honteux de lui-même, de n’être que ce qu’il est »).
+ c) Études et errances
. 1911-17, études chez les Jésuites au collège Saint-Michel.
— a pour condisciples de futurs écrivains belges, dont le poète Norge : témoin /
intérêt de HM pour insectes, oiseaux, écriture chinoise (pas poésie ?)
. 1914-18 : force de la religion et de la littérature.
— vers 15-16 ans, traverse crise mystique et veut rentrer dans les ordres ; son
père le lui interdit.
. traces ds ses lectures : Ernest Hello (1828-1885 ; traducteur des suivants),
Ruysbroek l’Admirable, Angèle de Foligno, vie de saints et de mystiques >
imprégnation éthique et esthétique forte :
* tension vers une expérience intérieure qui excède les pouvoirs du
langage, et qui seule met en contact avec le divin : cf. Ruysbroek = « les
choses extraordinaires ne peuvent que se balbutier », « La sagesse […] part
du fond le plus intérieur » + Le Livre des visions et instructions de la
10
bienheureuse Angèle de Foligno = « auprès de ce qu’on veut rendre, les
mots font pitié » > HM Qui je fus 1927 = « La parole, si vite qu’elle soit,
n’est pas à la vitesse de la pensée. », Barbare 1933 : saints et mystiques « à
force d’être rien et dépouillés, étaient happés par Dieu » > proxim des surR
ds recherche du « mot-seconde inventé, [du] pouls des images » + PL 218 :
« Le véritable et profond flux pensant se fait ss doute ss pensée consciente,
comme ss image. »
* Vie de saints = biographie épurée de tout trait anecdotique (sociale,
familiale) au profit d’une dimension introspective et spirituelle,
« confession vraie » (Hello), exemplaire > HM / PL 1930 et Mes propriétés
1929 = fait parties de « ces texte tellement confessionnels » [entretien A.
Jouffroy, 1959].
— Attraction répulsion pour la littérature et le langage :
. intérêt / musique
. langage comme possibilité de séparation / autres : les mots du dictionnaire
= « n’appartiennent pas encore à des phrases, pas encore à des phraseurs,
des mots en quantité, et dont on pourra se servir à sa façon » ; de même,
latin avec son père : « belle langue, qui le sépare des autres, le transplante :
son premier départ ».
. Choc en découvrant pouvoir
de l’imagination
lors de sa première
composition française ; poussé à la littérature par ses professeurs et amis ;
résiste < « pourrait le détourner de l’essentiel » = « le secret qu’il a depuis
sa première enfance soupçonné d’exister et dont visiblement ceux de son
entourage ne sont pas au courant. »
. Lectures aussi littéraires = « Lecture re recherche pour découvrir les siens,
épars ds le monde, ses vrais parents, pas tt à fait parents non plus,
cependant, pour découvrir ceux qui pê « savent » » : (Hello, Ruysbroeck +)
Tolstoï, Dostoïevski + écrivains de la « Jeune Belgique », « à la langue
bizarre qu’il voudrait plus bizarre encore » = revue créé 1881, devise
« soyons nous » [aussi nationaliste], moderniste parnassienne, art pour l’art
(anti-symboliste) [les premiers à redécouvrir et oublier Lautréamont].
. 1917-19. Ne peut s’inscrire tt de suite à l’Université < fermée < guerre.
11
— « deux années de bricolage intellectuel »
= pê notamment lecture
d’ouvrage scientifique : science, après mystique, comme voie hors de la
littérature :
(cf. « Portrait de A » 116 : révélation des atomes, après
religion).
. En partic., cite ds QJF Haeckel, naturaliste disciple de Darwin (inspira
aussi Cendrars, et Flaubert : Tentation, Bouvard…), peu avare en
considérations philosophiques et psychologiques : Anthropogénie ou
histoire de l’évolution humaine, 1877, Les énigmes de l’univers, 1902 ;
remise en cause de la frontière entre homme et animal, subdivision possible
de l’âme selon les diverses parties du corps (polype, méduse a plusieurs
âmes), réflexion sur la génération spontanée et sur l’atavisme (saut de
génération) = cf. univers imaginaire de Michaux, entre hantise de la
prédestination et fuite éperdue hors d’une identité héritée : cf. aussi
pbmatique esthétique et poétique belge (cosmopolitisme des avant-gardes +
attaques / langue).
— s’inscrit à des études de médecine, qu’il abandonne avant la fin de la
première année ; mentionnera « une sorte de goût ou de nostalgie » pour la
médecine, ms surtt révolte : « Étudier, c’est accepter, accepter d’accepter.
J’en étais loin. »
. 1919-21. Voyages comme matelot.
— Embarque à Boulogne-sur-mer puis Rotterdam ; jamais sous pavillon
belge ; en Angleterre, Amérique du Nord et Brésil.
. Parle de « camaraderie étonnante, inattendue, fortifiante »
. 1921-23
— Retour > difficulté à trouver un emploi, exerce divers métiers : « Sommet
de la courbe du « raté » » (« Qqs… ») .
— Service militaire, dont école d’officiers > réformé pour « affection
organique du cœur ».
— Surveillant ds un collège près de la frontière française ; postule comme
greffier au Sénat de Bxlles ; aspire à quitter Belgique pour Paris, à
n’importe quel prix (chauffeur, place de plongeur ds un restaurant) <
« besoin de livres, d’exaltation extérieure, de cinéma, de théâtre, de
12
musique » [lettre à Hellens] ; ne trouve d’emploi que ds le collège privé
d’un petit hameau, où donne divers cours (arithmétique).
. 1924. Quitte définitivement la Belgique.
— emploi de surveillant ds un collège privé parisien : déjà très lié à sa vie
littéraire.
. obtenu par Marcel Jouhandeau, qui y enseigne, et ami de Supervielle que
connaît Michaux.
— àp 1925 employé au service de fabrication des éditions Kra (Norge :
souvenir comme chauffeur-livreur en salopette grise).
— Un peu plus d’aisance à la suite de son héritage pendant qqs années, ms très
longtemps gde précarité matérielle (lecteur des éditions Fourcade en 29,
rédacteur en chef rétribué de la revue Hermès en 37 ; vend son violoncelle
en 43 — copropriété avec Fourcade, ), à laquelle palliera vente de ses
peintures et notoriété après guerre (en 44, se paye une canadienne grâce à la
vente d’aquarelles).
— 2> Les débuts littéraires
+ a) Impulsions.
. Lecture de Lautréamont (Les Chants de Maldoror, 1869 > meurt en 1870 à 23 ans ;
redécouverte en Belgique 1885 > par les futurs surR ds revue Littérature 1919 > référence
forte pour Breton) > « Sursaut… qui bientôt déclenche en lui le besoin, longtemps oublié,
d’écrire. » = commence le 9 mars 1922 [lettre à Hellens, un an plus tard]. Confessera à
Bréchon : « L. m’a possédé. Au pt que je dus me délivrer de lui. Il ne me laissait pas exister. »
— Composante parodique forte : épopée, lyrisme, roman noir… ; subversion
de grandes références littéraires (intertextualité) ; « humour noir » selon
Breton (composante de cruauté, sm.).
— Détournement de références scientifiques et notamment délires naturalistes
(mise en scène du spermatozoïde, du poux, crabe, pieuvre, accouplement
avec un requin…).
— Mise en scène d’un héritier qu’accable sa famille et qui se libère
notamment par voyage en mer (allusion à expérience pélagique [JP.
Martin] réécrite en relation forte avec texte de Lautréamont)
13
. Découverte de le peinture : 1925 selon lui, Klee, Ernst, De Chirico > premiers essais
graphiques.
— « Qqs renseignts » : « Jusque-là, il haïssait la peinture et le fait même de
peindre, « comme s’il n’y avait pas assez de réalité, de cette abominable
réalité, pensait-il. Encore vouloir la répéter, y revenir ! » »
+ b) Rencontres
. Franz Hellens, qui publie les premiers texte de HM ds sa revue Le Disque vert, dont
il fera de Michaux le correspondant parisien (1924) et même un moment le codirecteur
(1925).
— Attrait pour le fantastique > roman poétique Mélusine 1920 + approche
grossie et morcelé du quotidien sous divers pts de vue (cf. cubisme) in
Notes prises d’une lucarne 1925.
— Revue délibérément internationaliste, qui inscrit litt. belge ds litt. fr. ;
création avec André Salmon (proche d’Apoll.) ; publie Max Jacob, jne
Malraux, Gide, Paulhan, Cendrars, Artaud.
. Jean Paulhan : àp 1924 ; devient peu à peu son ami, lecteur privilégié
(correspondance) et éditeur.
— Présent aux débuts du surR (présente Éluard à Breton) > surtt secrétaire
puis directeur de la Nouvelle revue Française (1925-39 > 1953-68) :
découvrit, outre Michaux, Jouhandeau, Giono, Artaud, Ponge ; fonda ds
clandestinité Éditions de Minuit (> nouveau roman).
— Outre activité d’édition, écriture et réflexion guidée par méditation sur
pouvoirs et limites du langage : àp étude des mœurs et poèmes malgache
(fut planteur et chercheur d’or) > nott. Les Fleurs de Tarbes ou la Terreur
dans les Lettres (1941 : critique du critère d’authenticité en poésie, dont
surR sont réprésentants > réhabilitation de la rhétorique) ; livre apprécié de
HM (lettre à Paulhan de 37, lors de la publication ds NRF).
. Jules Supervielle : même rencontre + exemplarité d’un homme qui s’accomplit en
littérature, le reconnaît d’emblée + aide matérielle (famille de banquier ; logement,
voire emploi de secrétaire).
— Poète post-symboliste, partagé entre Uruguay et France ; art du récit
(L’Enfant de la haute mer 1931), poésie des grands espace (Débarcadère
1922) et de l’intimité du corps (Le Forçat innocent 1930).
14
+ c) Les premiers écrits [republication toujours interdite par HM]
. Michaux s’y définit plutôt comme « essayiste » ; ds ses écrits n’y a de poésie « que le
minimum qui subsiste ds tout exposé humainement vrai » [article « Lettre de Belgique »,
1924] ; signe « Henry Michaux ». Orientations décisives. Idées forces, linéaments
idéologiques et sources plus apparents que plus tard.
. Réflexions sur la psychologie des profondeurs : « Cas de folie circulaire » (1922),
Les rêves et la jambe (1923), « Réflexions qui ne sont pas étrangères à Freud » (1924),
« Surréalisme » (1925).
— Infléchit très fortement par lecture de Ribot (Les maladies de la
personnalité, 1924) celle de Freud ; théorie d’une « personnalité physique »
qui identifie l’ics au « sentiment vague du corps » [« Les fous parlent… Ms
la jambe ne parle pas … Les rêves sont muets » in RJB] // critique =
« Freud n’a vu qu’une partie », « le morceau sexuel », négligeant autres
instincts et vices > imagine un ics réfractaire à tout, centralisation d’une
personnalité globalement incarnée et même désir cohérent, centralisateur.
— > Critique de l’écriture automatique théorisée et illustrée par les surréalistes
et surtt Breton (premier Manifeste et Poisson soluble 1924) : pas assez
profond car ne peut être qu’après-coup, laisse tj. affleurer « le crayon de
l’homme de lettres [qui] veille pour son maître », et manque de tension, de
tragique, comme l’époque > il faut : approfondir , vers une écriture du
corps, et assumer la « fiction », comme « déformation » d’une réalité haïe
(« introréalisme » préféré à l’ « extraréalisme »).
. Réflexions sur le monde contemporain : « Chronique de l’aiguilleur » (1922), « Notre
frère Charlie » (1924).
— Époque de la vitesse (« Émotivement, l’homme est devenu plus vite ») et de
l’ubiquité > engendre chez l’homme l’indifférence, comme un au-delà de
l’émotion qui s’oppose à l’excitation romantique. Cf. Charlie = « réaction
contre le romantisme », « acteur du subconscient » [≠ Pst et Fd :
« dissertateurs du subcs. »], « dadaïste », « célibataire et vagabond ».
— > Nécessité de la simplicité et de l’universalité : intérêt pour l’Espéranto et
recherche de mots pour dire l’immédiat + pratique du récit et d’une certaine
simplicité stylistique.
. Mythologie des origines : Fables des origines (1923)
15
— Mode du primitivisme nègre à travers laquelle HM retravaille question
religieuse, généalogique et cherche une écriture : mise en scène de la
création du monde à travers 27 textes brefs en prose, à l’africaine (cf. Ns
des personnages : Mada, Dwa, Mnia, Dum, Ndwa… ; versions répétitives
et contradictoires ; question de l’origine peu à peu perdue de vue).
— Expérimentation générique, première tentative à proprement parler littéraire
[≠ réflexive, programmatique] : satire de sa propre culture (dont reprend
lieu commun critiques [décentrement], ss doute ethnologiques ms aussi et
surtt littéraires : La Guerre du feu de Rosny aîné 1911, et L’Anthologie
nègre de Cendrars 1921), vacillement entre mythe (narration des origines
du monde et de la société, ms personnelle et ss croyance), fable (animaux,
ms non allégorique et ss morale), conte (imaginaire).
— 3> Henri Michaux, écrivain
+ a) Deux voyages
. L’Équateur (1928) :
— Suit de peu publication de son premier recueil chez un éditeur important,
Gallimard (contrat pour 8 livres, sauf plaquettes) en 1927 : Qui je fus, ms ss
grand écho publique.
— 13 mois de voyage, grâce à un ami poète équatorien, Alfredo Gangotena ;
épreuve pour son cœur (notamment montagne : 4000m+) ; expérience de la
drogue (éther, opium)
. L’Asie (1931-1932) :
— Suit période éprouvante : 1930= mort de son père, folie de sa mère qui se
jette par la fenêtre et meurt (cf. « Sur le chemin de la mort », PL 86) ;
forme de libération, aussi.
— Héritage > argent disponible et voyage : en 1930 = Turquie (où invente le
pers. de Plume, Italie, Afrique du Nord [ss doute Berlin, Bulgarie et Vienne
avant Turquie : cf. Plume] > publication d’une première version d’ Un
certain Plume fin 1930.
— Voyage en Asie : fin 1931-août 32 : Inde, Ceylan, Chine, Japon, Malaisie ;
enthousiasme : « cela ne me gênerait pas follement de savoir l’Europe
engloutie ».
16
— Ne cessera jamais de voyager : notamment « un mois atroce au Maroc »
1933 (cf. « Plume à Casablanca »).
+ b) Des femmes
. Rencontre Marie-Louise Ferdière, née Termet, en 1934-35, chez le docteur Gaston
Ferdière, qui fut le psychiatre d’Antonin Artaud à Rodez ; Michaux assiste à ses présentation
de malade à Ste-Anne, où Ferdière collabore avec Lacan.
. 1936, invité à Buenos Aires par Victoria Ocampo, vice-pdte du PEN club > rencontre
Borgès + texte, « Un peuple et un homme (portraits) » qui suscitera réactions indignées et lui
barrera l’entrée du pays lors d’un voyage ultérieur en Amérique du Sud.
— Tombe amoureux de sa sœur cadette Angelica et semble même lui avoir
fait demande en mariage, refusée < différences de positions sociales.
— Tombe amoureux ausside Susana Soca, poète et traductrice montévidéenne.
— > prénom Juana, in « La Ralentie » [1e parution 37](50-51-52).
. 1937 mai : séjour à la mer avec Marie-Louise Ferdière > séparation ; tentative de
suicide au Gardénal ds un hôtel ; HM la sauve juste à temps ; colère du Dr Ferdière.
— 1937 juin : publication de « La Ralentie », avec prénom « Lorellou » qui
remplace « Marie-Lou » [lettre à l’éditeur] ; mais : « Lou(p) » = aussi
prénom d’une autre amie de Michaux, Aline Mayrisch (f. de lettres mariée
à un riche industriel, revue Hermès).
— 1942 divorce de Marie-Louise > épouse HM en 1943 (témoin = Paulhan).
. 1948 mort de sa femme après souffrance terribles (brûlures ds robe de
chambre nylon).
+ c) Silhouettes de Michaux
. Notoriété grandissante après guerre, et notamment grâce à la peinture :
— 1e exposition 1938 : « Un poète se change en peintre » > 1942 > 1960 à la
Biennale de Venise > 1963 Londres, NY, Rome,
Munich, 1964
rétrospective à Amsterdam, 1965 au Musée National d’Art moderne de
Paris.
. Position singulière ds le champ littéraire : admiration de quelques pairs, puis
grandissante, ms marginalité revendiquée (refus de la bio, voire de la photographie), ne
permettant pas formation d’une école, ou attraction d’épigones (cf. fascination / expérience
avec drogue, après 1968) [≠ Breton, Aragon ; même, après guerre : Perse, Char voire Ponge].
— 1946, HM de René Bertelé
17
— 1959, id Robert Bréchon
— 1966 Cahiers de l’Herne
— 1965 = refuse le Grand prix national des Lettres, attribué pour l’ensemble
de son œuvre.
III. La poésie d’Henri Michaux ?
— 1> Éléments d’une modernité poétique
. Étymologie de « poésie » : poiêsis = « création » / « fabrication » > équilibre
changeant (dialectique muable, et qui change de sens) entre inspiration et art.
+ a) La sortie du romantisme
. Doctrine classique : Malherbe, Boileau, La Fontaine > Voltaire…
— Imitation : des anciens et de la nature, non tant comme réalité concrète, que
comme essence des choses (raison) > idéal de clarté, ds le rapport au réel
comme ds la relation au lecteur.
. > netteté ds la distinction des formes et des genres : prose ≠ vers (mais
rhétorique commune : figure de mots, de phrase et de pensée) + épopée,
ode, élégie, épigramme, discours (lien thème / forme)…
— Relation à cette nature rationnelle des choses = éclaire régularité de la
forme (vers = mètre : répétition régulière d’un nbre de syllabes + retour de
la rime) et logique commune du sens (valeur de culture, de civilisation).
. L’ambition romantique :
— Poésie non plus conçu comme une forme (vers) ou un ensemble de genres
(à côté du roman, du sermon, de la lettre, du dialogue…) mais comme un
principe créateur : il n’imite pas une nature éternelle mais manifeste un
monde en devenir, à travers la subjectivité du poète que forge l’histoire de
son temps.
. Poésie révèle une vérité à laquelle on ne peut accéder autrement
(notamment par raison argumentative) = comme accomplissement et
dépassement de la philosophie, chez frère Schlegel (db. 19e) voire
Hölderlin.
18
. Vérité en devenir > forme non régulière : cf. poème véritable, œuvre
totale, = le roman.
— Romantisme français moins spéculatif, mais met en œuvre réalisme
nouveau (Balzac), grand chantier formel et position de « mage » du poète
guidant le peuple (Hugo).
. Reprend ainsi tradition très ancienne de l’inspiration poétique (Platon >
Pléiade), ayant force de révélation (mythe d’Orphée).
— Un des aspects de cette ambition = élaboration d’un langage spécifique, qui
soit poétique en toutes ses composantes (et non par des aspects isolés :
nbre, rime, figures) > manière de signifier qui puisse même aller à rebours
de l’usage.
. Importance de la musicalité (rythme : prose ou vers) et de l’imagination :
cf. « Correspondance » de Baudelaire.
. De plus en plus (renversement), poète se situe en opposition / société
bourgeoise, utilitariste.
. Cristallisation de la « modernité » (mot de Baud.)
— Radicalisation de l’ambition formelle : recherche proprement poétique
outrepasse usages de la littérature voire de la communication (harmonie,
vraisemblance ; enchaînements, continuités et gradations qui font logique
habituelle du discours).
. Cf. Rimbaud [Lettres dite du « voyant »] : « ça ne veut pas rien dire »,
« trouver une langue », « littéralement et ds tous les sens » = cet excès fait
le poète « voyant » ; lié pour Rimb. à un arrachement de soi à la
subjectivité traditionnelle : « Je est un autre », « se faire l’âme
monstrueuse »
+
« poésie
objective »
[Lautréamont
proche,
par
expérimentation formelle et subjective].
. Théorisation par Mall. de la poésie comme « suggestion » de l’Idée par la
musicalité du poème (doctrine symboliste).
. Conséquence formelle : pas d’harmonie préétablie > poème en prose et
vers libre, « Coup de dé » de Mallarmé.
— Rupture d’un certain optimisme esthétique : croyance / langage comme
puissance de révélation (et, a fortiori, d’esthétisation) par sa prise sur le
plus intime de l’expérience.
19
. Rimbaud cesse d’écrire ; fin de son œuvre probablement la plus tardive ,
Une saison en enfer = « Adieu » : pas de salut poétique face à l’irréductible
différence du réel = « Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de
toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité
rugueuse à étreindre ! Paysan ! »
. Mallarmé épure à ce point Idée que vise la poésie, qu’elle apparaît surtout
négative, désignée comme Néant (et que représente blanc de la page).
. Déjà présent chez Baudelaire : amour de l’artifice + en gros : « le Beau est
un duel où l’artiste crie de frayeur avant d’être vaincu »
+ b) Recherches modernistes au début du 20e siècle.
. Un nouveau lyrisme :
— Libération rythmique,
à la suite du symbolisme, explorée par d’autre
poètes qui disent le monde contemporain et les grands espaces (décentrage
formel et culturel), en des vers qui se déploient jusqu’au verset : Verhaeren
(Les Campagnes hallucinées 1893, Les Villes tentaculaires 1895),
Apollinaire (« Zone » in Alcools 1913 > Calligrammes 1918), Claudel
(Cinq Grandes Odes 1910), Cendrars (Les Pâques à New York 1912, Prose
du transsibérien 1913), Saint-John Perse (Éloges 1908).
. Une écriture de la dissonance :
— Écriture de la vie moderne, depuis poèmes en prose de Baud. et Rimb.,
privilégie juxtaposition brutales qui permettent saisie rapide de relations
inattendue (à l’image de la vie ds les grandes villes > cinéma et peinture
cubiste) + effet de choc, de discordance caractérisant sociétés modernes (≠
lenteur et régularité de la vie rurale [comme utopie poétique, aussi : cf.
pastorale…]).
— > simultanéisme des Calligrammes d’Apollinaire [cf. unanimisme], ms
aussi pratique et théorisation et pratique par Max Jacob in Cornet à dés
(1917) du poème en prose comme texte bref, construit, clos témoignant
d’une certaine distance / sujet créateur (maîtrise, humour) [cf. aussi
Claudel : Connaissance de l’Est, 1906].
. Le pôle surréaliste
— Pratique de l’expérimentation subversive (ds lignée de Dada [1916 Tzara à
Zürich > 1920-22 Paris] et même Rimbaud : « Nous t’affirmons,
20
méthode ! ») : cf. « La poésie doit être faite par tous, non par un »
(Lautréamont) > jeux divers comme méthode paradoxal de création +
pratique du rêve.
— Forme de confiance proclamée ds créativité spontanée (de l’ics [écriture
automatique], du groupe, du « hasard objectif ») qui, à travers la voyance
rimbaldienne, continue le romantisme.
— 2) Les premiers recueils : se trouver, se quitter
+ a) Qui je fus (1927)
. Construction d’une contre-biographie éclatée (« On n’est pas seul ds sa peau ») en
une forme plurielle : poèmes, fragments autio-bio, esquisses de récits (fragment d’un roman
avorté, dont le projet le poursuit jusqu’en 1934).
. S’affirment composantes d’un style : régime d’énonciation et d’écriture.
— Mode narratif (< roman) et déductif (< philosophie) : écriture simple et
claire, « prosaïque ».
— Mode invocatif < « poème » : façon de problématiser genre des autres
textes, et du livre ds son ensemble ; simplification sxq. (ellipse et
juxtaposition), travail du vers libre (contrastes et répétition, alitérations), tvl
du mot (vers « esperanto lyrique » [Bertelé]).
+ b) Ecuador (1929) > succès, plusieurs critiques élogieuses.
. Voyage déceptifs à plusieurs égards :
— refus violent de l’exotisme, d’un cosmopolitisme à la mode, valorisation a
priori de l’étranger : heurt de l’altérité.
— répond assez peu au titre « Journal de voyage » (quoique chronologique) :
essai (polémique), notes de voyage, poème avec tj. négativité du sujet : « Je
suis né troué », « Je me suis bâti sur une colonne absente ».
+ c) Un barbare en Asie (1933) = succès critique aussi ; commence à fixer image de Michaux.
. Révélation de la mystique orientale : lit désormais Lao Tseu, le tao.
— révélation du multiple (sensible > religieux, en Inde).
— d’une transcendance flottante qui ne s’oppose pas à la diversité sensible
mais entretient avec elle relations multiples d’allusion ; recherche
spirituelle comme voie, détour et non accès, révélation (cf. Fr. Jullien, Le
Détour et l’Accès) : Chine
21
— esthétique malaise (« forme ergot ») = tension binaire sans être opposition :
Malaisie.
. Pas de datation, ms structure, plus continu, par région traversée : plutôt essais que
notes narratives. Livre de Mchx le plus réécrit.
+ d) La Nuit remue (1935)
. Avant PL, premier des gds recueils qui forment période de production de 20 ans
environ ; caractérisé par stratégie complexe de regroupement de publications antérieures :
— après retour d’Équateur puis d’Asie, publie deux plaquettes : Mes
propriétés 1929, Un certain Plume 1930 ; ne les regroupe pas.
— Différence de fond selon Bellour : livre des processus, lieux et états > Nuit
remue / livre des voix > PL
. Dispositif mental et imaginaire qui vaut à long terme pour l’œuvre :
— Lieux = topologie vraisemblable et métaphorique, qui va du corps à
l’espace infiniment ouvert en passant par dives intermédiaire : lit, chambre
(du malade), nuit, et question importante de l’espace privé / public, cf.
« Mes propriétés » et « Mon roi » comme aboutissement d’un travail de
haine et transformation / famille et Belgique.
— États = abolus, instables et réversibles, affectant (métamorphosant) les
lieux (dont principalement le sujet) : foie, peur, froid, sérénité, malheur ;
souvent réalité physique ne même temps que psychologique (gazeux,
liquide, solide…).
— Processus = subis ou actifs (transformation / « Intervention »), avant tout
mentaux ms relève aussi d’une matérialité naturelle > « force dynamique
des états et des lieux » (Bellour), comme « principe d’écriture » [>
caractère épique : évt, devenir]
— 3) Plume précédé de Lointain intérieur (1938)
+ a) Une genèse complexe
. Édition de 1938, à peine retouchée en 1963.
— une seule suppression = « On cherche querelle à Plume »
— Parution en édition de poche 1985 = contre volonté de Michaux (ms beau
papier).
. Composée à partir de 4 recueils antérieurs, de 1930à 1936.
22
. a1. Le plus ancien = Un certain Plume, 1930, [composé après retour d’Équateur et
avant mort de ses parents, et avant départ en Asie] ; d’une structure sensiblement différente de
celle que ns avons ds notre recueil (cf. détail in Colette Roubaud, pp. 230 sq.)
— Structuré en 4 parties, qui scandent 34 textes n°tés en continu, et qui se
terminent par « Sur le chemin de la mort » (/ mère HM) > affirme en 1936
caractère cursif (mvt. continu : « Plume voyage ») : pas de titres à
l’intérieur des parties (ds table des matières), et textes (comme parties) non
numérotées
— Comportait en particulier deux morts de Pl., sur HM a supprimé :
. 2.10 « Première mort de Pl. » (juste après « Une mère de neuf enfants »),
cf. Roubaud 234 sq. = au Danemark, forcé de danser avec des femmes qui le
piétinent > à l’hôpital militaire où il tue une infirmière > « il gisait sur une
route du Nord, le ventre ouvert par un obus, et il avait un sourire bizarre, le
sourire triste ms si paisible qu’il avait lorsqu’il était encore en vie ».
. 2.11 « À Vienne. IIe mort de Plume » = ville vide sauf un agent à un
carrefour (« ça c’est bien la race germanique ») > va au musée où décroche les
toiles > retour de la population qui s’en prend à lui, chef de la police le libère >
« Trop tard. Deux coups de feu retentissent. L’espion a vécu. »
. > libère Pl. de la mort, et de relations possible à l’actualité (pesanteur de
l’histoire).
. a2. Entre centre et absence (1936) [après La Nuit remue]
— homogénéisé ds partie qui prend ce titre en 1938 : gagne trois textes en
prose (< inédits, revue, Pl.) + perd ses textes en vers = premier fragment de
« La Ralentie », « Paix égale », « Pensées », « Le Grand Violon »,
« Vieillesse » > partie « Poème ».
— premier recueil illustré de et par Michaux (frontispice = dessin pour « Un
tout petit cheval »).
. a3. Sifflets dans le temple (1936)
— Plaquette comportant trois poèmes, datant de 1935 : « Mais toi, quand
viendras-tu ? », « Comme pierre ds la puits » [> « Poèmes » in PL] + un
non repris = « Allons, jeunesse, guerre, embrouillez-moi tout ça ! » (cf.
Pléiade 682 et notice 1292) = très antimilitariste, et anticlérical.
. a4. La Ralentie (1937)
23
— Première parution intégrale (ms non définitive), après trois publications
partielles en revue la même année (d’abord bloc initial) : = dispersion
typographique progressive, avec hiérarchisation des blancs.
. Au total, donc :
— Inversion global entre la chronologie de prépublication (1930 / 1936-7), la
plus proche de la composition.
. Cf. suggéré par datation qui intervient pour 7e et 3e partie :
« Difficultés (1930) » et « Un certain Plume (1930) ».
— Titre singulier, qui suggère un recueil composé àp de deux recueils
précédents : or l’un de ceux-ci, « Lointain intérieur », n’existe pas, parmi
les 11 parties qui composent le livre. >
. Pluralité (dualité) au fondement même du livre : unité pbmatique,
complexe ; « Lointain intérieur » n’est pas titre d’une sous-partie : doit
recouvrir tt ce qui précède « Un certain Plume » [ = 7 première parties,
jusqu’à « Difficulté (1930) »] — mais titre (daté 1938) d’une partie des
« pages choisies » in L’espace du dedans (1944, 1966)
. Fausse division en deux rejoint structure interne du recueil précédent : La
Nuit remue = « Mes propriétés » + « La Nuit remue » [continuité de cette
unité pbmatique] ; d’ailleurs, inversion chronologique fait accueillir le
lecteur de 1938 par voix la plus récente de HM.
. Sens possible selon Bellour : opposer l’exploration de l’intériorité [cf.
caractéristique de de Nuit remue] / écriture d’une médiation plus extérieure,
centrée sur le « personnage » de Plume.
+ b) Identités plurielles
. b1. Identités subjectives.
— b11.Problématique personnelle et familiale : moment crucial pour HM à
bien des égards ; cf. « Avec Plume, je commence à écrire en faisant autre
chose que cesse décrire mon malaise. Un personnage me vient. Je m’amuse
de mon mal sur lui. Je n’ai ss doute jamais été aussi près d’être un écrivain.
Ms ça n’a pas duré. Il est mort à mon retour de Turquie, aussitôt à Paris. À
Ps je redeviens moi-même et prends aussitôt l’écriture en suspicion. » :
24
médiation par pers. de Plume [Colette Roubaud 54 « Plus-me » comme
« Qui je fus » et ne suis plus].
. Ds lettre même de mars 1930 où annonce à Paulhan mort de son père,
folie et mort prochaine de sa mère, HM précise à propos d’une série
« Scénarios de cauchemar » = « Oui, je reprends mon prénom véritable qui
est Henri » [ces txts = « Nuit des embarras », « Nuit des disparitions »,
« Nuit des assassins » > ds Plume 1930 ; 2 premiers ds « Difficultés », 3e =
« L’arrachage des têtes » in partie « Plume »] ;
* Concomitance frappante entre mort du père et acquisition de ce
nom de plume : vrai prénom + approche d’un personnage médiateur.
. Premier texte signé « Henri » = antérieur encore quoi qu’isolé : « Fils du
macrocéphale » 1929
> « Portrait de A » in « Difficultés (1930) » [=
largement auto-bio, auto-portait]
* Or « macrocéphale » = grosse tête > « Arrachage des têtes »,
repris ds recueil de l’affranchissement où se trouve le nom de plume, où
s’asseoit
la
position
d’écrivain
(détachement
d’une
position
pathologique) [rem. < Bellour].
* En outre : cf. Œdipe = « pieds enflé » // grosse tête > travail
(liquidation) du complexe d’Œdipe… [rem. Perso.]
. Lien biographique se confirme de plusieurs manières :
* Confirmation explicite du lien identitiaire entre ce personnage et
lui-même comme personne. Cf. à Bréchon + confie en 1963 « Oui, à cette
époque de ma vie, Plume — tout Plume — était moi-même, Henri
Michaux ».
* Signe « Plume » certaines dédicaces + « D’un certain Plume »
court récit imprimé anonymement chez un petit éditeur ami = Tu vas être
père 1943 [= HM sur le point d’être biographiquement père ; faussecouche] ; paternité envisagé par Plume à la P1 avec peu d’enthousiasme
(« larve », « spongieux malfaiteur ») > à 3 ans enfant tombe entre les pattes
d’un ours > « Pê m serais-je fait un jour à l’idée d’être père » : pbmatique
aussi de HM écrivain, père d’un seul pers., passagèrement.
— b12. Plume et autres personnages :
identité un peu flottante de ce pers.
relais ds le recueil > question du nom, flottante (comme une Plume : N
comme figure de ce que peut ou doit être l’identité), cf. Qui je fus 1927
25
« mais bon Dieu ! qu’on me donne un substantif / un maître qualificatif où
je puisse me coller à jamais » > « Je n’ai pas de nom / Mon nom est de
gaspiller les noms » Épreuves, exorcismes 1945.
. Section « Plume » comporte aussi texte où ce pers. n’apparaît pas =
« L’arrachage des têtes ».
. Section « Plume » situé après textes faisant apparaître personnages
épisodiques (ds textes apparentés aux aventures de Pl.) et avant pers. des
pièces de théâtre.
* In « Entre centre et absence » (section 1) : pers. de « Vision »,
« Prêcher », « Rêve
de Moore », « Dimanche à la campagne » ;
« L’insoumis » (section 4), in « Difficultés » (section 7) : « A » du « Portrait
de A »[père = « très prudent » PL111 ; in Qui, « M. Chahux Père » = « très
prudent »], anonyme de « La nuit des disparitions », Pon in « Naissance »
126 [> in « Nuit des Bulgares », comparse de Pl. : 157].
* Personnage des pièces de théâtre : « Chaînes » (9e section) [1937
inédite] = mise en scène d’un scénario de type (para)œdipien : se libérer /
attaches qui le lient à sa famille + battre son père [= demande de la jne fille,
Damidia (184-5) ; laquelle = transformation possible de Pl., cf. ne pèse
« qu’une plume » 193] ; fous du « Drame des constructeurs » 10e
section(dont « A » : cf. « Portrait de A » ; en 38, « constructeurs » remplace
partt « fous ») [pièce la plus ancienne, 1930 : à la fin, selon logique globale ;
représentée 1937 > HM s’est tj. opposé à réitération de cette exp. : « pièce
injouable et très peu pièce », « faite pur être lue, non pour être jouée » : < ?
expérimentation plus que représentation de pers. et de situations]
— b13. Voix : les instance personnelles (> pluralité de l’identité énonciative /
P3 qui est la grande caractéristique du livre)
. 1e section : « Entre centre et absence » dominé par « Je » anonyme [qui
prend la suite de Nuit remue], 12 / 17 txts
* Comparable, sur mode lyrique : 6e section « Poèmes » [9/13 = P1, +
aussi « on » et « nous ».
. Flottement et pbmatisation max. = 2e « La Ralentie » : démultiplication
des positions + vacillement masculin / féminin [LIRE TEXTE ? db.].
* cf. contexte bio + dernière publication en revue : « Une délirante
parle »
26
* db. = « on » féminin / « quelqu’un » masculin, qui devient féminin
(qui serait « La Ralentie » > globalement, voix d’homme énonce, ms de
l’intérieur d’un corps et d’une conscience (voix) de femme (parfois
interpellée à la P2, désignée P3) : trois pôles ds l’ens. : Lorellou db. >
Juana fin ; entre deux = glissement du « je » [énonciateur masculin :
s’identifie et se différencie parfois / instances fém. > se stabilise ds regret
de la seconde femme]
* > cf. 5e : « Je vous écris d’un pays lointain » : rapport possible aussi à
Susana Soca et Angelina Ocampo.
. Théorisation de cette instabilité subj. > cf. 11e « Postface » = 217 « Il n’est
pas un moi. Il n’est pas dix mois. Il n’est pas de moi. MOI n’est qu’une position
d’équilibre. […] Une moyenne de « moi », un mouvement de foule. »
* « moi » = émergence précaire d’un mouvement qui le précède et
concerne une multitude d’élts. (selon Bellour = nature, vie, terre pour HM.)
* précarité permet aussi ouverture à l’autre : importance de la P2, in
poème et ds rapport final au lecteur : « Tu pourrais essayer, pê, toi aussi ? »
. b2. Identités textuelles : typologie et modes de fonctionnements divers.
— Typologie formelle (et générique) variable :
. Texte en prose long, +/- fragmenté (section à soi seul, ou pas) :
* fragmentation ss signe de séparation : « La Ralentie »41sq.,
« L’insoumis » 67sq. /// pb. = 3e « Animaux fantastiques » : pas de blanc
* avec astérisque : « Le portrait de A » 109 sq.
* suite numérotée : romain « Magie » 9 sq. / arabes : « Je vous écris »
73 sq.
. Poème en prose, de moins d’une page à quelques pages (ms ss
espacement) [type dominant] :
* Cas particulier des textes de « Plume », qui sont numérotés en chiffres
romains, de I à XIII (suggère caractère d’épisode formant suite :
fragmentation d’un même récit ; cf. édition 1930 — à rapprocher des
proses longues fragmentées, qui impliquent un devenir) ; ttes ces formes =
en fait à dominante narrative.
. « Poèmes » en vers > interroge statu générique du reste…[invocation]
. Pièces en un acte[narration / représentation]
27
. Paratexte final : « Postface » [démonstration]
— Différenciation des lieux et des processus :
. Lieux : chambre du malade (cf. « Animaux ») / univers contemporain
(ville > hôtel, salle de bain…), du voyage / lieu métaphorique de sérénité
ou de tranquillité espérée (cf. titre « Entre centre et absence » > cf. poème
id. 38 « à l’Eurêka, dans le nid de bulles » [id. : « boule » de « A »,
« pomme » de « Magie »].
. Processus : initialement = « Magie », comme opération de devenir autre
ds recherche de l’équilibre (peut se payer de souffrance et de mort : glacé)
— cf. en un sens état (fluide) de la subjectivité ds « La ralentie », lecture
possible de « A » [devenir autre > histoire…] ; modalité plus passive de la
métamorphose = vision monstrueuse du malade (« Une tête » +
« Animaux ») ; naissance ; violence répétitive…
— 4) Épreuves et méditations
. 1946 Épreuves, exorcismes = guerre deveient le réel oppressant jusqu’à l’intime, à
quoi poésie = résistance.
. 1948 = tournant < mort terrible de sa femme ; méfiance de tj. / langage gagne en
puissance ; cf. Émergences, résurgences 1972 : « Écrire ? Des mots ? Je n’en veux aucun. À
bas les mots ! ».
+ a) Libération par la peinture
. Dès janvier 36 écrit à Paulhan qu(il a trouvé sa façon de peindre.
. Cf. lettre de 1937 à Aline Mayrisch au moment où paraît « Ralentie » : serment « que
je n’entrerai plus jamais ds un état pareil […] D’ailleurs pas besoin de me forcer, la peinture
semble avoir libéré ttes mes forces et mes activités »
. Àp des années 50, peint de + en + ; et dit bientôt vouloir écrire de – en . Analyse de M. Butor : peinture ou dessin comme réponse à une impatience
d’expression, pour devancer le langage > « image » = « étape vers un discours possible » ; ms
récipt, disc. = chemin vers d’autres images — en un sens, poésie comme mouvement qui les
traverse.
— étroite interaction : ce qui se dessine = semble svent être des signes (cf. in
PL. 1938, projet = Rudiments d’une langue universelle idéographique
contenant 900 idéogrammes et une grammaire).
28
+ b) L’expérience des drogues
. À cinquante ans passés, expérience sous contrôle médical (mescaline, opium,
champignon hallucinogène…) ; nvelle forme d’ascèse pour se dégager des conventions
littéraires et poursuivre recherche personnelle, avec exigence de vérité [« pensée
expérimentale », Passages 1950].
— 1956 Misérable miracle, 1957 L’Infini turbulent, 1961 Connaissance par
les gouffres, 1966 Les Grandes Épreuves de l’esprit.
+ c) Vers une réconciliation ?
. Ds derniers recueils poétiques (Moments, 1973) = habitation du temps plus que lutte /
réel ; présence plus forte de ce fond et flux préverbal tj. éprouvé, présupposé ; tentation d’une
posture de sagesse.
29
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
Introduction
— I. Belgique et France à la veille de la Seconde Guerre mondiale
+ 1> Identité problématique d’un pays natal
. a) Une parcelle d’empire — b) La domination française [Léopold 1e de SaxeCobourg Gotha]— c) Un tout jeune État [Pauvre Belgique (Baudelaire), rexistes (Léon
Degrelles)]
+ 2> La France des années vingt et trente
. a) Victoire, prospérité, sclérose (1919-29) [Poincaré, Briand ; Claude Cahun et
Suzanne Malherbe (Moore) ; en Orient : Segalen 1914-17, Claudel 1895-1909, SJP 1916-21
en Chine, Malraux 1923-27…]
. b) Réalités de la crise (1929-39) [Daladier, La Rocque, Doriot ; Dollfuss ; Giraudoux,
(La Guerre de Troie n’aura pas lieu 1935), Renoir(La Règle du jeu 1939) ; Daladier et
Chamberlain / Sudètes]
— II. Quelques renseignements sur quatre-vingt cinq années d’existence (1899-1984)
+ 1> Rejet d’une famille bourgeoise
. a) Le milieu — b) L’enfant clos — c) Études et errances [Norge ; Ernest Hello
(1828-1885 ; traducteur des suivants), Ruysbroek l’Admirable, Angèle de Foligno Le Livre
des visions et instructions de la bienheureuse Angèle de Foligno ; Tolstoï, Dostoïevski ,
« Jeune Belgique » ; Haeckel, Anthropogénie ou histoire de l’évolution humaine, 1877, Les
énigmes de l’univers, 1902 ; Jouhandeau, Kra, Fourcade (Hermès)]
+ 2> Les débuts littéraires
. a) Impulsions [Lautréamont (Les Chants de Maldoror, 1869) ; Klee, Ernst, De
Chirico]
. b) Rencontres [Franz Hellens (Mélusine 1920, Notes prises d’une lucarne 1925, Le
Disque vert (André Salmon, Max Jacob, Malraux, Gide, Paulhan, Cendrars, Artaud), Jean
Paulhan (Nouvelle revue Française 1925-39 > 1953-68 ; Les Fleurs de Tarbes ou la Terreur
dans les Lettres 1941), Jules Supervielle (L’Enfant de la haute mer 1931, Débarcadère 1922,
Le Forçat innocent 1930)
30
. c) Les premiers écrits [« Cas de folie circulaire » (1922), Les rêves et la jambe
(1923), « Réflexions qui ne sont pas étrangères à Freud » (1924), « Surréalisme » (1925), cf.
1924 : Ribot Les maladies de la personnalité, Breton Manifeste du surréalisme et Poisson
soluble — : « Chronique de l’aiguilleur » (1922), « Notre frère Charlie » (1924) — Fables des
origines (1923), La Guerre du feu de Rosny aîné 1911, et L’Anthologie nègre de Cendrars
1921]
+ 3> Henri Michaux, écrivain
. a) Deux voyages [Alfredo Gangotena] — b) Des femmes [Marie-Louise Ferdière,
née Termet, docteur Gaston Ferdière, (Artaud, Lacan) ; Victoria et Angelica Ocampo, Borgès,
Susana Soca, Aline Mayrisch] — c) Silhouettes de Michaux
— III La poésie d’Henri Michaux ?
+ 1> Éléments d’une modernité poétique
. a) La sortie du romantisme [Malherbe, Boileau, La Fontaine, Voltaire ; Schlegel,
Hölderlin ; Balzac, Hugo ; Platon, Orphée ; Baudelaire (Fleurs du mal 1857), Rimbaud (Une
Saison en enfer et Illuminations 1873-4), Mallarmé (Poésies 1887, Coup de dés1897)
. b) Recherches modernistes au début du 20e siècle [Verhaeren (Les Campagnes
hallucinées 1893, Les Villes tentaculaires 1895), Apollinaire (« Zone » in Alcools 1913 >
Calligrammes 1918), Claudel (Cinq Grandes Odes 1910), Cendrars (Les Pâques à New York
1912, Prose du transsibérien 1913), Saint-John Perse (Éloges 1908) — Max Jacob (Cornet à
dés 1917) Claudel (Connaissance de l’Est 1906) — Dada (1916 Tzara à Zürich > 1920-22
Paris)]
+ 2> Les premiers recueils : se trouver, se quitter
. a) Qui je fus (1927)—b) Ecuador (1929) — c) Un barbare en Asie (1933) — d) La
Nuit remue (1935)
+ 3> Plume précédé de Lointain intérieur (1938)
. a) Une genèse complexe — b) Identités plurielles
+ 4> Épreuves et méditations
. a) Libération par la peinture — b) L’expérience des drogues — c) Vers une
réconciliation ?
31
L’ÉCRITURE DE SOI
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— Intro.
+ Partir de l’étrange unité dont titre suggère le défaut ≠ continuité mouvante de La Nuit
remue, comme approfondissement et dépassement de l’intériorité (cf. Nuits de Novalis puis de
Musset).
. Ici dualité affichée, entre intérieur (lui-même tiré vers une distance) et détour par un
personnage. : qu’est-ce que l’écriture de soi, ds cette dualité (entre intériorité lyrique — qui
est première, originaire : « précédé de » — encore romantique [surréaliste] + objectivité
rimbaldienne si mot titre ne lui enlevait son sérieux) ? Lyrisme allégé, enlevé ?
+ Analyse de l’énoncé :
. Écriture
— Un acte et son résultat : processus, mvt, ≠ O, œuvre (lettre écrites : figures,
cf. aussi peinture de HM, chez qui dessein évoque écriture, idéogramme —
du sens à voir et interpréter, ss code donné d’avance).
* Cf. construction intransitive du verbe prend sens esthétique > pb. de « ce
qui » est ainsi écrit.
— Cf. différence établie par Barthes, in Degré zéro (1953) [contestée mais
pratique — et respectée…]:
* Style [< lat. stilus, « poinçon servant à écrire » : plume…] : = « part
privée du rituel », « produit d’une poussée, non d’une intention », « le style
est une Nécessité qui noue l’humeur de l’écrivain à son langage » >
domaine de l’expression (ex-pression : pousser hors de soi ce qui vient
[invention involontaire], exclusion aussi — cf. Pl.…), presque du
symptôme : se dire malgré soi (surgissement du « lointain intérieur » —
lyrisme).
* Écriture : « le choix gal d’un ton, d’un éthos si l’on veut », = « acte de
solidarité historique », « le langage littéraire transformé par sa destination
sociale », « l’écriture est dc essentiellement la morale de la forme » >
domaine de l’acte volontaire, art (méthode, maîtrise > forme) + morale
32
(règle ds relation aux autres) = dégagement de la nécessité : allègement
(vers Plume… — fiction).
* Cf. aussi Derrida, L’écriture et la différence, 1967 : oppose approche de
la parole comme « voix », présence du sujet / « écriture » comme
négativité, différenciation sans fin.
. De soi :
— « de » : mouvement qui part d’une origine = éloignement de l’originaire
(du premier) — progressif, violent, récurrent…
— « soi » : de quel sujet s’agit-il ? Biographique ? Énonciatif (qui dit « je ») ?
Intellectuel ? Éthique ? Conscient / inconscient ?
* Rem. : dimension réflexive, en contradiction avec mouvement
d’éloignement, d’extériorisation (écriture comme expression et/ou acte
volontaire : selon réalité de l’écriture, pas même aspect du sujet concerné).
* Possibilité de transformation du sujet par l’écriture : discipline,
maturation-accomplissement (Proust : mémoire + art > S de l’écriture ≠
« moi social », Contre Ste Beuve), idéalisation (Mallarmé : « presque
disparition vibratoire », « impersonnalité ») ; cf. aussi considération
analytique selon lesquelles fond de la subjectivité = travail du sant (ds
l’ics : le sujet est écriture…).
+ Pbmatique : Quelles formes invente le livre pour dire quel sujet ?
. > Une personne dont on part : la première (bio + position d’énonciation)
. Distance par la représentation [qu’Arist. oppose à la poésie lyrique, où poète parle en
son nom propre] : forme de classicisme ds relation au autres, entre liberté de la fantasmagorie
et rigueur réflexive.
. Écriture comme mise à jour de processus spécifiques : actualisation d’une
irréductible différence.
— I. Écritures de la première personne
+ 1> « Le grand combat » autobiographique
. Première personne = point de départ biographique
. a) L’ancrage
33
— HM lui-même se disant à posteriori, ds cette époque de sa vie, « très
Plume » > signe d’une relation étroite quoique conflictuelle entre vivre et
écrire, à la recherche d’une identité (cf. titre Qui je fus).
— textes à caractère autobiographique :
. Ms texte max. à ce propos : « Le portrait de A », par rapprochement /
« Qqs renseignements » = clôture sur soi jusqu’à l’adolescence (« boule
hermétique et suffisante »110 > anastomose 111 : section + abouchement
avec quoi ? ouverture niée) > intérêt pour la sainteté, anorexie + scolarité
« au loin », parmi « petits gredins de paysans puants » ; id. père
« prudent »111 [cf. « Fils de Morne » in QJF : « M. Chahux père », « très
prudent »], intérêt pour la lecture
114-5 et notamment science 115-6,
voyage en Amérique 117, tvl ds l’enseignement 117, 119 ; définition de la
personne = enjeu vital, cf. pas encore né 119 (« fœtus » + « Il faut le
sortir ») > 120 « Ms il va bientôt mourir… » (inexorable / suspension)
. b) Le refus
— HM écrit contre comme il dit avoir d’abord voyagé « contre » (Équateur) :
effort de sortie de « la boule » ms aussi contre sa propre famille, cf. :
* Db. de la « Postface » + « Arrachage des têtes » (un des texte les plus
anciens de PL) / « Fils du Macrocéphale » (= grosse tête) > meurtre textuel
du Père…
— Refus d’une part de soi ms aussi de l’écriture comme littérature
(reconnaissable) tq. la présente héritage voire contexte ds les années 30 :
* Refus de l’idéalisme, de l’esthétisme symboliste ; du travail de
vraisemblance (+ de didactisme) naturaliste : ni réalisme ni transfiguration
esthétique (pas non plus par merveilleux surR).
* Refus de l’écriture comme activité institutionnelle, professionnelle : cf.
« Qqs rens. » = détournement / secret + ne veut pas « devoir écrire » [cf.
Rimb : « la main à plume vaut bien la main à charrue »] .
+ 2> L’écriture à la première personne
. Première personne comme position énonciative
. a) Expressions
34
— Tonalité lyrique des « poèmes » désignés comme tels ou apparaît la P1 ;
effets de voix subjective, ds sx. globalement dénudée (moindre articulation,
tendance au cri…)
* cf. 83 « Repos ds le malheur » : db. sur « Malheur » > fin « Je
m’abandonne », expression de l’intensité in « Jne fille de Bud. »85 :
« Obstacle si léger sur ma poitrine, comme tu t’appuies maintt »
* Phrases exclamatives : 87 « Paix égale » « FERMEZ vos corolles
d’angoisse », « Vieillesse »89, « Malédiction »95 in »Télégramme
— Moments expressifs de poèmes en prose.
* Id / vers : « Automne ! Fatigue ! » in Entre centre 36 ; « vivre enfin ! »
Nuit des Bulgares 158
* Effet de voix ds adresse à l’autre, même quand pas de P1 : « Comment
s’en tirer ? » in Nuit des embarras 123, « Oh vie continuellement infecte »
in Mvt de l’être intérieur 135.
. b) Distance
— P1 = a aussi valeur plus distanciée, éthique, expérimentale et empirique :
* Cf. relation de « Magie » = «sur une nouvelle voie »9, « des
tâtonnements, des expériences »10, « Je suis parfois si profondément
engagé en moi-même en une boule unique… »11 ; forme d’observation
expérimentation aussi avec « Tout petit cheval »18-9
— Forme de distance (et d’analyse : découpage, reconfiguration du réel) aussi
ds narration à la P1.
* Cf. « Une tête sort du mur », « Ma vie s’arrêta », « L’animal mangeserrure », « Le chêne » = attaque par P1, qui pose une situation narrative.
+ Distance ds écriture de la première personne fait passer de l’expression à la représentation.
— II Représentations : inquiétantes médiations
. une des caractéristique de cette poésie = sa narrativité, et en outre, ici, condensation
autour du personnage éponyme.
+ 1> Personnages
. a) Plume
35
— Propos de HM / distanciation du malaise personnel + invention après la
mort des parents et possibilité d’assumer son vrai nom (qui n’est plus le
nom du père > Tu seras père 43 : Pl même comme figure d’une paternité
pbmatique).
— Faux nom propre emblématique du dégagement cherché par HM : cf. 114
« Le livre est souple, il est dégagé » > de même qualité d’indifférence de
Pl. (comme de Charlot) : cf. db. de la partie « Lointain » = « Souffrir » 10
(comme A : id. 118 in « Difficulté », dernière partie avant Pl.), ≠ « Un
homme paisible » db. « Pl. »139.
. b) Tournoyante galerie.
— Ce dégagement permet multiplication des identités médiatrices : passage du
« Portrait de A » à toute une galerie de personnages, sur qui « [s]’amuse(r)
de (s)on malheur » : = jeu / possibles de la subjectivité (homme / femme,
bourreau / victime, supérieur / inférieur…)
* Nommé : cf. « A », « Pon » pers. qui ne cesse de naître », et ressurgit
comme acolyte de , « Barnabé » (P1) qui s’accroche à son nom (« On veut
voler mon nom »), « Moore », Zanicovette etc. in « Dimanche à la
campagne » , Pierre in « Arrachage », Damidia in « Chaîne », A-B-C-D-EF-G-H in « Drame » [extériorité max. de la scène ; ms refus de sa réalité
par HM — sf marionnettes : de l’inerte (extra-subjectif) pour représenter le
sujet] .
* Anonyme : avec nom périphrastique qui les caractérise = « La ralentie » /
« L’insoumis », « le malade » in « Animaux » [= tend au générique] ; vrais
anonymes = pers. qui se lavent les mains et cassent le bras in « Vision »,
propriétaire de l’animal mange-serrure (je = témoin seult.), g. qui veut
prêcher et se fait frire in « Prêcher » ; « Le jeune homme » de « Chaînes ».
+ 2> Projections
. a) Créatures
— Processus de création d’être comme mode de libération et méditation
(expression de soi > représentation d’autres) = mis en scène ds le livre
(mise en abîme : réflexion imaginante
écriture de soi = écriture de l’écriture.
36
de l’écriture par elle-même) ;
* Cf. animaux fantastiques « sont lancés au dehors sur les murs de la
chambre » 55
— C’est un malade qui est présenté comme « créateur » (55) de tout un
« « théâtre » (63) d’animaux fantastiques : monstrueuses fleurs du mal, qui
disparaissent avec lui ; représentation de la « douleur »63 qui ne la font pas
disparaître ms disparaissent avec elle ; écriture non première, issu d’un mal
qui vaut en ce qu’il arrache à soi.
* Créatures présentées comme forme de dépersonnalisation, malade n’étant
que le lieu d’un processus qui le traverse < « maladie accouche »55 +
« imagination » qui produit ses animaux
= « forêt de l’être »61
[aliénation : cf. « Constructeurs » sont créateurs]
. b) Vision
— Mvt. de projection ne se conglomère pas tj. en créatures formées (et qui se
transforment : cf. 60) : en deça d’un tel engendrement < ressemblance à
soi, ou à rien.
* Cf. « Une tête » 15-6 = directement « je vois » + partie allégorique de lui
même qui « fonce » contre les murs, autre corps de soi.
* Médiation par Pl. = « La vision de Pl » 159-60 ; présence extérieure
d’une matière répugnante (« fromage lent »), ms féconde (« mamelle ») et
peuplée (cavalerie) dont finit par sortir un personnage léger et gai (comme
Pl. : métamorphose du chef en artefact creux, ss intériorité : cylindre) =
extériorisation créatrice (dont S, Pl, n’est que témoin) comme matière
informe [putréfaction : maturation inquiétante, perte de vie — vers fantôme
que HM dit vouloir représenter ds peinture], ectoplasme.
+ 3> Réflexions
. a) Observations du dehors
— S en retrait pour voir ce qui vient « de » lui > «écriture » comme
témoignage de ce qui a été vu (cf. Rimb. in Lettres du voyant : « forme »
ou « informe »)
— Position marginale de Plume, comme témoin extérieur de tte chose (< aussi
voyageur : lieux défilent pour lui comme images de la fièvre pour le
malade).
37
* Cf. position du Candide [cf. Bulgares], ms pas porteur d’une critique
univoque ; son étonnement fait du réel non un contre-exemple / bien à lui
substituer, ms un possible parmi d’autres.
* Pas d’innocence du témoin, qui certes galt en proie à agression du dehors
(y compris des bêtes imaginaires), ms peut intervenir avec violence même
du monde : cf. « Arrachage », « Bulgares », « Chaînes » où jne h finit par
battre son père 195 ; réflexion du Pl. ouverte : « réfléchi(ssai)t » (150, 160)
— Posture clinique : retrait = forme d’action, par effort d’analyse et de clarté ;
cf. vocabulaire médical et zoologique, recherche de précision (dès
« Magie »).
. b) Poétique psychique
— Aboutissement de l’écriture = texte réflexif, qui est avant tout une
théorisation du sujet créateur comme équilibre instable ds une multiplicité :
je > « on » 217 > « un auteur »219 > « toi aussi » 220.
+ Représentation de l’écriture subjective
elle-même montre une dynamique : suggère
écriture de soi comme différence.
— III. L’écriture traversée
+ 1> Mouvements
. a) Figures insaisissable : des personnages aux voix
— Identités flottantes : celle des héros-relais [> agent = R multiple in « Nuit
des embarras » et « des disparitions »] + démultiplication énonciative
[oralité] in « Ralentie » voire in « Poèmes » (je/tu/ on-nous voire absence
d’instance et pure profération [substantifs, verbes à l’infinitif] : voix transpersonnelle)
* Dédoublement énonciatif de Plume, qui le différencie des autres pers. =
en même temps que disc. P1, incise P3 : 139-140« Avec le sang, pensa-til… », « Excusez-moi, dit-il… », « Voilà, dit-il, étant pressé… »141,
« Tiens, pensa Pl., ça fera un fameux souvenir… »170.
— Humour : degrés d’adhésion variable du poète-narrateur énonciateur /
énoncé.
38
. Absurde : développement — sur ton naturel — de situations impossibles
(permutation : paradoxe, paralogisme) > se mettre ds une pomme
(« Magie »), « Pl. au plafond », « Vision »,
. Burlesque par exagération et rabaissement corporel : cf. violence extrême
et atteintes multiples à l’intégrité corporelle (« Arrachage des têtes » ;
« assassin de la famille » in « Chaînes » ; même certaine emphase lyrique :
cf. exclamation + majuscule.
. Ironie : par litote, homme frit « il ne semble plus fort bon pour la
prédication, non, plus fort bon » 23, cratère ds joue = « peu charmant. Sa
dentelle pourrie ne séduit pas » (« Embarras »122) ; euphémisme :
. Humour (ellipse, condensation) [rendre acceptable satisfaction de pulsions
agressives ; traiter souffrance d’adulte comme frayeur d’enfant] ;
simultanéité du sens et du non sens > cf. « Plume » = incohérence
référentielle + cohérence sémantique [globalement légèreté : mouvement,
indifférence, oubli… > glisse à la surface du récit]
. b) Rythmes : phrases et histoires
— Sismographie : ds proximité-distance / surR, HM définit son attention aux
choses comme une « aiguille sismographique » > cf. traits (dessinsidéogrammes) comme retranscription de « gestes intérieurs », « donner à
voir la phrase intérieure » > livres où dessins tiennent lieu d’écriture,
comme figuration de mvt. (à la fois expression et représentation), qu’il
appelle aussi « rythmes ».
* Concevoir agencement verbaux et imaginaires de même > recherche de
schèmes.
— Le sériel et le différentiel :
* Narration répétitive (d’un texte à l’autre + ds les textes) + « poème »
litaniques = insistance, afflux d’une identité.
* Récit de mouvements et transformations (dégagement)[ms sans cesse
repris de façon différente, ds texte bref : cf. « acteur de l’ics » ≠ Pst et Fd
comme « dissertateur de l’ics : résistance / continuité du roman de
formation ou de la théorie]
(coupure)
39
+ écriture de la parataxe et de l’ellipse
. Mouvement : type d’évt. qui affecte essentiellement et indissociablement être et
langage chez HM. >
+ 2> Métamorphoses
. a) Des formes (de l’écriture)
— Genres
— Langue : mots et locutions
* Néologismes : Ns propres d’un « Dimanche à la campagne » [dépayser le
banal — le terrien] ms aussi fleur de la Ralentie (« Asclépiade »)
* Jeu sur les locutions ordinaires comme mode constitutif de Pl. : cf. « sang
froid » in « Homme tranquille », « tirer par les cheveux »/ « tenir à un
cheveu » / « ne plus savoir où donner de la tête » in « Arrachage », « perdre
la face » in « Culs-de-jatte ».
. b) De soi
— Récit : genèses de soi > biographie de A entre sphère initiale et faetus, Pon
qui ne cesse de naître, Jne homme qui s’affranchit de son père.
— Décision : jne se dresse (force) lui-même pour conquérir jne fille +
« Discipline » de « Magie » : cf. recherche d’une règle de vie, ou de
méthode pour mieux vivre (agir sur ce qui advient)
* Cf. Postface comme théorie d’une résistance à la discipline (du monde
alentours, de la pensée consciente) : tout pensée en terme d’acte ; pensée
(ics) = volonté (manifestation de flux, de désir, de « tendance »), livre =
acte de vie > écriture de soi = se réalise en se dépassant (écriture et S =
traversée de tt ce qui les constitue) > ouverture au lecteur.
40
L’ÉCRITURE DE SOI
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— I. Écritures de la première personne
+ 1> « Le grand combat » autobiographique
. a) L’ancrage
. b) Le refus
+ 2> L’écriture à la première personne
. a) Expressions
. b) Distance
+ Distance ds écriture de la première personne fait passer de l’expression à la représentation.
— II Des médiations inquiètes
+ 1> Personnages
. a) Plume
. b) Tournoyante galerie.
+ 2> Projections
. a) Créatures
. b) Vision
+ 3> Réflexions
. a) Observations du dehors
. b) Poétique psychique
+ Représentation de l’écriture subjective
écriture de soi comme différence.
elle-même montre une dynamique : suggère
— III. L’écriture traversée
+ 1> Mouvements
. a) Figures insaisissable : des personnages aux voix
. b) Rythmes : phrases et histoires
+ 2> Métamorphoses
. a) Des formes
. b) De soi
41
EXERCICE DISSERTATION
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
Raymond Bellour déclare, envisageant la poésie d’Henri Michaux : « Les poètes ont
perdu l’évidence, ils ont ourdi des ruses de langage. » (Henri Michaux, Gallimard, 1986).
Dans quelle mesure cette affirmation vous paraît-elle éclairer Plume précédé de Lointain
intérieur ?
— Analyse du sujet :
+ Les poètes : pluralité / singularité (troupe, foule / atome, plume) + poésie qu’ils exercent
(approche de la réalité, genre, forme…).
+ Ont perdu l’évidence
. Perte : renvoie à histoire de la poésie, à un passé heureux : classicisme ou
romantisme, voire surréalisme (et aspect « voyant » de Rimb.) ; cf. « évidence poétique » chez
Valéry.
— évolution du genre (s’il y en a) comme désenchantement : perte de
croyance (ou de puissance : cf. relation à la société — position fondatrice
[Homère, Virgile], courtisane, populaire > artiste opposé aubourgeois : cf ;
HM / sa propre famille, pays).
— Perte de croyance / puissance (du langage poétique, identifiable > devenu
vain, ou obstacle : cf. attaque de la rhétorique), et / transcendance à
recueillir (sacré — Höld. —, histoire, monde : se dérobent).
. L’évidence : clarté classique, révélation romantique (« mage » VH, « écho sonore »),
voyance rimbaldienne, écriture automatique [tradition de l’inspiration ; orphisme comme
possession d’un pouvoir magique, ms évidence ss lucidité — cf. pas le droit de se retourner
sur Eurydice].
+ Ils ont ourdi des ruses de langage
. Ourdir = tramer, fabriquer > art, artisanat par opposition à l’inspiration ; singulier <
pas de technique repérable, en tout cas normée, chez Michaux — mais : récurrence de
42
procédés (récurrence, justement, en vers comme en prose ; sx simplifiée et oratoire des
poèmes invocations ; style coulant des proses, avec ton d’évidence / situations absurdes).
— cf. HM assume « fiction » comme « déformation » du réel tt en reprochant
à l’écriture auto son manque de profondeur (rêve ≠ garantie de poésie).
. Ruse = emploi dissimulé de l’intelligence pour lieux parvenir à ses fins < tromper un
ennemi, adversaire ; situation de danger et d’infériorité des forces.
— cf. « Grand combat » de HM, par poésie, face à tout le réel — ce qui
remplace l’évidence [en tout cas harmonie, ouverture, accroissement de
l’humain ; ici péril], ms celle-ci peut avoir sa violence (cf. rapporter de
l’informe, horribles travailleurs qui s’affaisseront ds recherche de
l’inconnu) > violence des visions comme des situations.
— Dissimulation, en matière de poésie = qu’elle n’ait pas les dehors de la
poésie : cf. prosaïsme, violence, récit, réflexion [≠ seult lyrisme comme
émotion > exp. du temps et de l’intelligence] ; adversaire = le monde
comme donnée obtuse (et notamment bourgeoise), qui veut imposer sa
force > alliés possibles = les faibles / forces de ce monde (lecteur possible,
lecteur sage et artiste ; l’amener à cette position).
— But de la ruse ne semble pas être de mettre fin au combat (à sa possibilité),
ms de l’orienter et de le dépasser (de s’en sortir) tt en le vivant au plus fort,
d’en présenter bilan qui ait force d’engendrement (cf. fin) ; souveraineté ds
mise à mal de tte maîtrise (force d’évitement).
. De langage = faculté, puissance de parole, tension vers acte ;
— de même mots, phrases, textes chez HM à concevoir seult comme moments
de l’œuvre, qui vaut par mouvement (de vie) qui traverse écriture.
— lge ds ruse = moyen ; ms ruse = détour ; lge ruse de HM = mouvement de
détour comme moyen (pour retrouver soit l’évidence, soit qqch qui en
tienne lieu ; contraire de la « fatigue » finale de Pl., « autre chose » 220,
« présent » 102, « Pensées à la nage merveilleuse »88, « Paix »87, abandon
ds le malheur 83).
— Ces ruses = contre aussi lge lui-même (poésie trad.) comme pensées…
+ Structure globale et pbmatique :
43
. Pouvoir (de révélation) de la poésie + confiance ds son rapport au monde / rapport
conflictuel > pour en restaurer (instaurer) un meilleur, détournement des moyens poétiques
trad. (verbaux en gal).
. Ds quelle mesure, ds PL, l’objet de la poésie manque-t-il d’une présence immédiate
que les détournement s verbaux tendraient à restaurer ?
— Évidence parfois pénible d’une poésie en état de crise
— Spécificité s’impose par savant détournement des formes héritées
— Ne vise pas à un triomphe esthétique ms mû par une exigence éthique.
44
EXERCICE DISSERTATION
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— Sujet :
Raymond Bellour déclare, envisageant la poésie d’Henri Michaux : « Les poètes ont
perdu l’évidence, ils ont ourdi des ruses de langage. » (Henri Michaux, Gallimard, 1986).
Dans quelle mesure cette affirmation vous paraît-elle éclairer Plume précédé de Lointain
intérieur ?
— Problématique et plan :
+ Dans quelle mesure, dans PL, l’objet de la poésie manque-t-il d’une présence
immédiate que les détournements verbaux de l’œuvre tendraient à restaurer ?
. Évidence parfois pénible d’une poésie en état de crise
. Spécificité s’impose par savant détournement des formes héritées
. Ne vise pas à un triomphe esthétique ms mû par une exigence éthique.
— I. Évidences d’un lyrisme à l’épreuve
+ 1) La voix
+ 2) Les images
+ 3) La poétique
— II. Naïves ruses de Plume
+ 1) Montages trans-génériques
+ 2) L’esprit différentiel
+ 3) Trames de saisie verbale
— III. Morale de l’évitement
+ 1) Détours vers le vrai
+ 2) Parvenir à l’autre
45
MONSTRES ET ANIMAUX
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— Intro.
+ Cf. Rimb. : « se faire l’âme monstrueuse : […] imaginez un homme s’implantant et se
cuiltivant des verrues sur le visage » (Lettres voyant), poésie « en avant » de l’action +
« posséder la vérité ds une âme et un corps » (Saison) = relation du mouvement spirituel de la
poésie — de son animation propre — avec une incarnation aberrante, effrayante.
. Monstruosité appelle à redéfinition de la poésie, au-delà des harmonies (accords)
classiques ms aussi de l’expression romantique < livre représentation méconnaissable de
l’humain lui-même.
+ Analyse du sujet :
. cf. « monstres » : < lat. monstrum : fait prodigieux = ce qui sort de la nature <
monstrare = montrer ; soit double valeur : anormalité (en particulier / ordre naturel : formes,
proportions [grand/petit], diversité des règnes — animal, végétal…—, des espèces — cf.
chimères comme combinaisons d’animaux) + spectacle ou vision.
— Chez HM monstres relèvent du naturel (ils naissent, incarnent un principe
de naissance, de métamorphose + ont leur évidence propre) et de la
représentation, figuration.
. animaux :
— Relation avec « monstre » suggère que pas d’altérité radicale, opposition
possible ms aussi continuité (inquiétante étrangeté ; trouble ds l’ordre
naturel plus que chamboulement complet — ou s’ajoutant à lui) > interroge
place de l’homme.
— Même étymologie que « âme » < anima = souffle, principe de vie ; principe
spirituel de la personne a à voir avec principe dynamique de la vie (non
intellective), comme forme de dynamique première ; cf. animal ds le
spirituel > ne plus se sentir chez soi (Heimat : maison natale) ds le plus
intime de l’humain, Unheimlich de Fd., « inquiétante étrangeté ».
+ > En quoi la représentation (figuration) de la monstruosité et de l’animalité caractérisentelles la poésie même d’HM ?
46
— I. Aberrations vivantes
+ 1) Anomalies zoologiques
. a) Animaux sans noms
— cf. début des « Fantastiques » + « Animal mange-serrure »
. b) Autonomie des organes
— Etres les plus choquants et burlesques se caractérise par hypertrophie et
démultiplication des organes, avec confusion haut (intellect) / bas (corps >
génération et excrétion) : cf. 55-6 = ovaires > trompes et tentacules >
matrices bleues de lèpres > œil sexuel / anal + « colliers d’yeux ».
+ 2) Monstres en situation
. a) Apparitions maladives
— Circonstances ou caractéristiques
rendent monstrueux être vivants
ordinaires.
— Issues de la maladie (ou de la folie in « Drame des constructeurs ») > nbre
et comportement :
* scarabé sur globe oculaire 57, ptt animaux sortent des membres inférieurs
et de partt, mur suintent de vers, anguilles, orvet, lamproies, congres 59
* > taille : cf. cheval de 53 cm p18 + mouche-cheval 208.
. b) Férocité du vivant
— Mise en relation des anx avec homme = agression ; cf. « Je vs écris » (lions
mangent jne fille76-7)
— II. Sidérantes métamorphoses
+ 1) Instabilité des êtres et de l’être
. a) Animation constitutive
— Animaux : à la naissance cf. Pon + rat de A + puma 217 > tendance à la
métamorphose : cf. « petit cheval » + « Anx »60 »Ds le monde des anx, tt
est transformation » > cheval = protéiforme.
— Choses : « Nuit des embarras » + eau de « Vision » (> cristaux, aiguilles)
. b) Intime grouillement
— Pluralité
interne
comme
externe :
cf.
55-6
« maladie
accouche,
infatigablement » > « « animaux à matrices multiples » [réduplication] ;
47
134 « L’être intérieur combat continuellement des larves gesticulantes » //
218 « je me débrouillais ds ma foule en mvt. ».
+ 2) Le spectateur des monstres
. a) Passivité créatrice
— 220 « un livre que n’a pas fait l’auteur » = à l’image de l’attitude du S /
apparition monstrueuse de ses rêves ou de sa maladie : cf. « Anx »
[« créateur »55], « Vision de Pl. », « Tête sort mur »…
. b) Dégoût fasciné
— Peu d’intérêt (poétique pour vie saine), qui est extérieure au poème (cf. fin
« Anx »63) > description complaisante de l’immonde ds promiscuité
dégoûtante ; cf. « chien à la langue pourrie » lèche58 > « montagne couleur
de rouille »59.
— III. Monstres d’écriture
+ 1) Une violence structurante
. a) Oppression du dehors
— Agression animal à l’image d’une relation plus gale au monde : cf. féminité
agressive [// 78 « Ns sommes plus que jamais entourés de fourmis »] +
regard [et intervention] de l’autorité : = figuration d’un schème d’écriture
(que montre les monstres)
* / Pl. : Juge 140, personnel du restaurant 141 sq., ts personnels de « Pl.
voyage », contrôleur 156, chirurgien 161, Bren Club 173 ; gardiens in
« Drame »
* Regard culpabilisant de l’autorité : Roi / appartements de la Reine 151 +
«émissaires du Juge … sous paupières de pierre »56 [/ regard muet qui
regarde Pierre ds « Arrachage »] : cf. regard paralysant [Persée] de la
méduse (ds analyse de Fd. = castrat° / phallus que représente serpents sur
tête).
. b) Castration du dedans
— définition du S par retrait et scène d’amputation diverses :
* cf. « Mal au doigt » ; surtout pê 59 « creux » intérieur irréductible
(« qu’est-ce qui n’est pas creux ? »
48
+ 2) Désir du méconnaissable
. a) Mécanisme intime
— S comme petit cheval = O sexuel d’un désir humiliant (masc. / fém. >
identité incertaine) : cf. S du rêve / anx = comme « jne vierge en robe
transparente ds une caserne de pompier »57 / petit cheval 19 en rut = seult
regard dardé des femelles [id : Pl. ds appartements de la Reine 150, mère de
9 enfants avec syphilis, Hôte d’honneur 173 — tendance à sortir le sein ; cf.
ds fromage vision de Pl. : mamelle ; fécondité de la chair elle-même +
phallique]
. b) Ambition poétique
— Métamorphose de la langue et des genres
49
MONSTRES ET ANIMAUX
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— I. Aberrations vivantes
+ 1) Anomalies zoologiques
. a) Animaux sans noms
. b) Autonomie des organes
+ 2) Monstres en situation
. a) Apparitions maladives
. b) Férocité du vivant
— II. Sidérantes métamorphoses
+ 1) Instabilité des êtres et de l’être
. a) Animation constitutive
. b) Intime grouillement
+ 2) Le spectateur des monstres
. a) Passivité créatrice
. b) Dégoût fasciné
— III. Monstres d’écriture
+ 1) Une violence structurante
. a) Oppression du dehors
. b) Castration du dedans
+ 2) Désir du méconnaissable
. a) Mécanisme intime
. b) Ambition poétique
50
LE CORPS
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— Intro.
+ Ds poésie db. 20e : opposition entre engagement total de la personne selon Rimb. /
idéalisation de l’œuvre et de son sujet selon Mallarmé.
. > repenser le corps et l’œuvre par leur confrontation.
+ Analyse du sujet :
. Appartenance du S à la matérialité (pôle opposé — burlesque — ds dualisme trad.,
notamment cath. / âme et ses diverses facultés : raison, entendement ; voire imagination)
[remise en cause par pensé orientale tq. l’aborde et la perçoit HM].
— au vivant qui existe hors de lui : animaux, plantes… ; zone d’interaction
avec univers, notamment (ms pas seult.) univers non social, voire non
humain.
— Altérité intime = est du S et en diffère : lequel est l’O de l’autre ? Relation
se fait en particulier par sensations, qui peuvent devenir sentiments du S ou
les infléchir voire les déterminer (cf. importance du froid, de la douleur) >
forme de décentrage du S, aux limites de lui-même : ds logique des
expériences auxquelles se livre HM (voyage, épreuves physique
. S matériel comme organisme = ensemble organisé, autonome, assumant sa
subsistance et sa reproduction.
— Remise en cause de cette totalité par réflexion HM, nott. < Haeckel
(continuum animal-homme + subdivision de l’âme selon les parties du
corps) et Ribot (« personnalité physique » + ics comme « sentiment vague
du corps »).
. > Pb. = relation du corps ainsi problématisé (comme totalité matérielle singulière,
limitée et organisée) / œuvre poétique :
— comme expression / représentation / devenir (trans-linguistique)
— ce recueil particulier : partagé entre obscure intériorité (/ lumière de la
conscience et de la raison > Nuit qui remue et Lointain intérieur = peuvent
51
se penser comme en rapport au corps) et allègement d’une figuration peu
cernable (aux bords flous) : Plume (incarnation minimale, évasive).
— Approche sémiologique possible d’un rapport entre œuvre et corps [même
si œuvre, linguistiquement, ≠ signe mais discours — ms HM tend à penser
poème comme signe < caractère sismographique, tension vers la
peinture]. ; cf. Pierce [définitions propres à cet auteur, ms très connues] :
* Symbole : relation conventionnelle du signe à ce qu’il signifie (cf. mots
de la langue)
* Indice : relation de contiguïté, signe réellement affecté par l’O sé [réft]
(cf. symptôme / maladie, fumée / feu, girouette / direction du vent : déixis
ds langue)
* Icône : relation de ressemblance / la réalité sée (cf. image peinte, tache
noire pour ser le noir, échantillon, onomatopée).
+ Pbmartique : Quel corps écrit Plume précédé de Lointain intérieur ? [double entente]
. Plan selon catégorie de Pierce.
— I. Indice : le texte sismographe
. Texte se veut au plus près du corps [écriture : adressé au lecteur comme tel ; pas de
nécessaire acte de foi, pas verser dans le mythe, qui est choisi, orchestré] ; dispositif narratif
annonce expérimentation des drogues.
+ 1) Enregistrer le corps
. a) Un lyrisme somatique ?
— énergie énonciative, effet de voix ds les « poèmes » en vers : exclamation,
phrases nominales et infinitif(surgissement de sens plutôt qu’élaboration de
discours) ; répétitions litaniques qui désémantise les mots et tendent à
l’onomatopée ou à la mélopée (cf. « Baobabs » in « Télégramme de
Dakar » [primitivisme de la voix comme émanation du corps].
— Cf. aussi « Mon sang », comme second texte de la partie « Poème » = pose
note de corporéité expressionniste ; alex. initial admis pê < contrepoids du
corporel : « Le bouillon de mon sang ds lequel je patauge ».
. b) Tentation clinique de la prose
52
— In PL, proximité indiciel relève plus souvent de la situation énonciative
mise en scène (qq en soit degré de vraisemblance), = écriture comme
relation d’expériences (singulières / génériques) qui ont affecté (affectent)
le corps.
— Cf. P1 : « Magie » (projection / condensation / douleur), « Le bourreau »
(corps de l’autre) ≠ P3 : « Tête », « Vision »… > « Arrachage » ; en partie
« Nuit des disparitions », « Nuit des Bulgares »… ≠ méditation générique :
[nart° itérative : « L’insoumis » 69, « Embarras » 122-3] « Mouvements de
l’être intérieur »[= figuré comme corporel : ≠ nez, + il combat des larves
133-4] ; id deux pièces, dont dernière ds hôpital (cf. « acteurs de l’cs. » ≠
« dissertateurs » = signifient par présence et action de leurs corps).
+ 2) Réfléchir le corps
. a) Des récits méthodiques
— Inflexion lyrique en prose aussi (cf. disposition verset fin de « L’être int. »)
ms choix d’une prose transparente (voc svent simple, parataxe, phrases
rarement longue) et précise : scansion des étapes / cas (cf. « Mouvements »
133 sq. « Puis… quand… bientôt… Enfin… » = étapes d’un processus) +
localisation (« Magie ».12 douleur dent de devant cariée = sous le nez
« jusqu’à la racine » + otite « ds le fond de l’oreille » (auscultation
linguistique).
. b) Une poétique incarnée
— « Postface » présente vie psychique et expérience de l’écriture comme
corporelle : cf. 215 « senti en moi » > « je me cabrais » > 219 importance
de ce qu’il y a « derrière la tête » d’un auteur = « vie cachée de son corps »,
« ses déficiences physiques » > 220 lien des « signes » aux « élans, chute,
départs », « auteur poussa sa vie » [comme quoi ?]
— II. Symbole : un certain corps
.
Représentation
singulière
du
corps :
contiguïté
empirique
(clinique
/
fantasmagorique) > distance symbolique (narrative, descriptive, lyrique, didactique) ;
esthétique de cette poésie (étym. : sensation communiquée) tient largement à des figurations
du corps.
53
+ 1) Corps violenté
. a) Attaques
— Quasi immanente : maladie > faiblesse et douleur
— Violence physique venue de l’extérieur
. b) Morcellement
— Fréquence des corps morcelés (« Vision », « Tête », « Bourreau », « Rêve
de Moore », « Nuit des disparitions », « Homme paisible »…) + relative
autonomie des membres (cf. parties du corps sont S des verbes in
« Disparitions » ; mvt. du corps hors de soi : tentacules des animaux
fantastiques) — décentrage de la motricité, de la vie (de la conscience :
Haeckel et Ribot) .
+ 2) Corps incertains
. a) Déformations
— Transformation de soi : cf. petit cheval qui s’amollit 18 « sa tête enfle,
enfle, son dos s’incurve, se gondole, s’effiloche et claque au vent »
— Métamorphose en autre chose : affecte pas seulement animaux, et font
passage entre animaux et hommes (cf. « Une femme m’écrit » +
« Naissance » (Pon)[127 échappe au naturaliste qui veut l’empailler >
taxinomie comme figement mortifère].
. b) Perte de substance
— Outre Pl. (en apesanteur « Au plafond »), « La ralentie » : inconsistance du
corps à l’image d’une faiblesse gale de l’être = mains + jambes =
« fumée »47 > « je suis l’ombre d’une ombre »50, transmutation de la
souffrance (saisie comme au cœur du corps, de l’esprit comme intimité du
corps) : « le cerveau d’une plaie en sait des choses »51 > en annihilation de
la volonté : « volonté comme l’eau tombe »52.
— III. Icône : étranges corps du poème
. Corps transformé ou se quittant lui-même = figuration possible de l’œuvre, comme
processus de subjectivation et d’écriture (sens barthesien : éthique).
+ 1) Métamorphoses poétiques
54
. a) Maltraiter le corps de la langue
— Néologismes
— Intensifications litaniques et dénudation sxqs. en vers
. b) Déformer le corpus d’une tradition
— Exacerbation caricaturale des procédés poétiques traditionnels : répétitions
et cadences, exclamations et invocations lyriques.
— Jeu / double tradition du poème en prose.
+ 2) Décentrements de la parole
. a) Le plein et le vide
— Opposition manger(ingestion d’un plein : traumatique)
/ parler
(articulation d’un vide — cf. esprit comme souffle, étym. — qui permet
d’alléger le poids traumatisant du monde) : cf. Ralentie je balbutie / je lape
la vase ; jne A 110-111, Pl. au restaurant, Bren Club 174 (avaler la langue :
corporéité de l’acte de parole)
. b) Le ton de l’insituable
— Corps tend à se quitter (espace énigmatique du « lointain intérieur » peuplé
de monstres + voyage) > position difficilement situable de l’énonciation :
humour (ce retire de ce qu’il avance) = permet travail de la lecture.
55
LE CORPS
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— I. Indice : le texte sismographe
+ 1) Enregistrer le corps
. a) Un lyrisme somatique ?
. b) Tentation clinique de la prose
+ 2) Réfléchir le corps
. a) Des récits méthodiques
. b) Une poétique incarnée
— II. Symbole : un certain corps
+ 1) Corps violenté
. a) Attaques
. b) Morcellement
+ 2) Corps incertains
. a) Déformations
. b) Perte de substance
— III. Icône : étranges corps du poème
+ 1) Métamorphoses poétiques
. a) Maltraiter le corps de la langue
. b) Déformer le corpus d’une tradition
+ 2) Décentrements de la parole
. a) Le plein et le vide : manger / parler
. b) Le ton de l’insituable
56
ÉCRITURE ET TEMPORALITÉ
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— Intro.
+ Tps comme contrepoint majeur / cette écriture qui semble surtout s’appuyer, même
métaphoriquement, sur un espace : cf. « Oh ! Espace ! Espace non stratifié… Oh ! Espace,
Espace ! » = fin du recueil NR ms aussi du poème « L’avenir »,comme si dimension de
réconciliation, d’unité utopique visée = au bout d’un temps spécifique qui est celui de
l’œuvre.
. Cf. NR 76 « L’homme ne supporte pas le Temps ! »
+ Écriture : cf. / soi
. De la sensibilité-expression à l’acte d’art, éthique : couple passif/actif.
. Du pt. de vue du temps : processus et son résultat + hors-temps (en un sens) de son
actualisation (ré-énonciation) par lecture-relecture ; cf. mise à l’écart des txts les plus liées
aux circonstances (deux morts de Plume, dont l’une par obus et l’autre à Vienne — or
Anschluss en 1938 ; surtt. « Allons, jeunesse, guerre, embrouillez-moi tout ça ! » de Sifflets ds
le temple 1936) ; dégagement, à qqs mois des accords de Münich.
. Temporalité du recueil = écriture des textes + composition du livre, qui est prise de
distance (torsion du temps linéaire, vécu) < inversion entre « Plume » (1930) + « Drame »
(1930) et première partie, plus récente. ; distance inversion pour affirmer primauté (comme
besoin subjectif) de la représentation.
+ Temporalité :
. Dimension du temps : caractère de ce qui est ds le temps (par opposition / espace =
formes a priori de la sensibilité chez Kt : rapport du S à ce qui n’est pas lui) > par ex. temps
excédant écriture, choix de l’écriture face au temps, ds le temps.
. Cosmique / subjectif : quantifiable et mesurable / vécu > formes diverses.
. Temps objectifs :
— Considéré àp de sa régularité (cf. cycles : Platon, Aristote) > diverses
formes de répétition ; cette répétition, si tj. identique à elle-même = forme
de l’éternité ds le temps (extra-temporalité ds le temps).
57
* Modèle : astrologique (> aussi flux et reflux de la mer) ms aussi
biologique (respiration, surtt cœur)
* Analogie fréquente / rythme du poème (versus, mvt de retour, comme
mètre, mesure) : Hugo > SJP 20e (mer), Claudel (souffle, cœur) : pris à
rebours par vers libre et poème en prose.
— Répétition perceptible, comme discontinues (apportant forme de rupture, en
tt cas de contraste, de différence) sur un fond continu = pur devenir : cf.
Héraclite et être comme fleuve (feu).
* Élts et mvt de la vie : temps comme écoulement avec moments de
jaillissement : cf. volonté d’éprouver « les grandes ondulations de l’être »
(NR 73, « Léther ») + « je crois montrer l’arbre sans fin, l’arbre de vie qui
est une source, qui est, piqueté d’images et de mots et proposant des
énigmes, l’écoulement qui, ss interruption, même d’une seule seconde,
traverse l’homme du premier instant de sa vie au tout dernier […] » (Paix
ds les brisements, 1959).
* > cf. plutôt écriture du verset (ou vers long, non métrique), ou prose
(prorsus = écriture qui avance)
. Temps subjectifs
— Livre XI des Confessions de St. Augustin = temps concevable seult àp de
la conscience humaine > n’existe que présent (du présent — du passé :
mémoire / de l’avenir : attente, désir, crainte) > Benveniste : repère =
moment de l’énonciation (je-ici-maintenant).
* Relation à la subjectivité psychologique (biographique) et énonciative.
* Pb. / HM = pluralisation des positions subjectives > temps subj. tj.
recommencé, repris, réarticulé.
* Appréhension dynamique (temps comme fléché, orienté ; ms dimension
de la temporalité excède ligne de perception unique : amplitude d’un
espace > fondu ou pluralité des mvts) + perceptions de tempo : « La
ralentie » (cf. NR. 77 « cauchemar de la contemplation de l’écoulement lent
du temps ») / accélération sous l’effet des drogues (« accélération
fantastique », « vitesse prodigieuse et cocasse » in Misérable miracle).
+ Pbmatiques :
. Quelles formes spécifiques de temporalité met à jour le processus d’écriture ds PL ?
58
— I. La composition d’un temps
+ 1) Le dégagement du biographique
. a) La vie dans le livre
— Résurgence biographique in « Portrait de A » + parole en son nom propre
d’auteur in « Postface ».
— Vie continuée ds le livre : cf. mise en scène d’un progrès personnel ds
« Magie ».
. b) Liquidation de l’héritage
— Db préface + « Arrachage des têtes » > temps subjectif même, tq. l’écrit le
livre, se constitue en s’appuyant (sur mais) contre les données
biographiques ; conflit constitutif du temps de l’œuvre.
+ 2) Le temps d’un livre
. a) L’événement de la fiction
— Particularité du livre (place centrale d’un personnage) = caractérise un
moment du temps existentiel : cf. invention de Pl. comme identité
d’écrivain, et à distance de la France (Turquie 1930 : voyage est > Asie
1932 ) > retour du lointain à l’intérieur des Paris fin 30 [publie Plume] et
après 32 [> Nuit remue]. > complexité de composition de notre recueil.
. b) Patiente torsion du temps
— Inversion globale des dates de composition pour configurer ce trajet vers la
représentation (temps linéaire de la lecture = mise à distance du temps
personnel).
— II. Une poésie aux marges du temps
. Dégagement du temps biographique semble par effort d’écriture le plus frappant pê
en ce qu’il se condense sur saisie d’un temps pur, qui surgit au profond de soi ou déborde les
contours même de la personne.
+ 1) L’emportement du flux
. a) Surgissements de la voix
59
— Paradigme = exclamations des premiers et derniers textes de « Entre
centre » : « Quelle tranquillité » > « Inouïe simplicité !… Je VOYAIS ! » :
court-circuiter médiations de l’expérience courante pour parvenir à saisie
immédiate de l’être, qd se dénoue effort spécifique du poème.
— > litanie lyrique primitiviste : cf. « Baobab » = ouverture-fermeture comme
articulation primaire ; à concevoir comme Émergences résurgences (1972)
d’un flux de l’être.
. b) La pensée des tendances
— Recul théorique final lui-même pense cette émergence d’un « véritable et
profond flux pensant » 218 donnant position tj. en déséquilibre d’un moi
qui tente vaint d’être « chef de tendances »216 : saisie de devenirs
multiples excédant maîtrise de la conscience.
+ 2) L’extase et l’abandon
. a) La visée du moment
— Visée réitérée = accord avec ce devenir profond : laisser être qui semble
suspendre le temps en un point où le S s’absente de lui-même, centre =
aussi absence (cf. poème du même titre).
* Visée au futur : cf. textes des « Poèmes » souvent au futur, et même en
fin de section utopie de « Avenir » àp de laquelle paraît misérable présent
où « cloué ds le siècle »104.
* Visée comme lointain : logique de l’invocation [par phrase nominale],
adresse vers une altérité qu’il s’agit de rendre présente (logique de la prière
ou magie), cf. « Je vous écris » = arriver avant « le Temps »80 (> Qd
allons-nous ns voir enfin ? »), « Paix des nerfs au cœur malade »87, « Infini
incessamment qui tressaille »88, « Pensées à la nage merveilleuse » ibid.,
« Nuit » 92.
. b) Le courant de la perte
— Visée (mystique ou taoïste) = abandon total au gré de ce flux de temps pur,
où extase et détresse peu différentes l’une de l’autre : cf. « Malheur… Je
m’abandonne »83 (forme de libération).
— Cf. dissolution de la personnalité ds « La ralentie », où ralentissement
comme tenue de ce moment d’arrêt du temps de la vie, de l’action > « on
60
est, on a le temps »41 lie à effacement du sujet (même grammatical)
(affinité mortelle avec élt liquide : « noyée »43 + espace : « C’est la voix de
l’étendue… »44) ; cf. retrait du père fin « Chaînes » + fin des
« Constructeurs » A parle de se jeter ds la baleine.
— III. Aventures de la temporalité
. Dépassement de la temporalité quotidienne (cf. « L’insoumis ») au cœur de soi vers
un absolu du temps qui annihile le S = [accent ≠ / recueils de la fin] seult un composante,
plutôt première moitié du livre, avant « Difficultés » ; spécificité = montrer ce que doit
surmonter cette évidence, et donner forme à une pragmatique du temps.
+ 1) Enfers de la répétition
. a) Les attaques du multiples
— Monde qui advient (ce qui arrive, l’évt.) = tend à prendre de façon
récurrente la forme d’une multiplicité agressive : monstres, femmes,
autorités voire objets (« Nuits de embarras »).
. b) Mécaniques de l’humour
— Contre ces assauts : agencements de la réitération, par jeu sur les répétitions
constructives ds poèmes en prose (type « Entre centre », « Mouvement de
l’être ») et surtout
— Impavides répétitions à effets comique ds Plume (ms aussi ds autres
poèmes en prose : cf. « Vision » ou « Prêcher ») ; mécanique défensive
(« exorcisme ») / physique agressive du tout venant du temps [effet aussi
du personnage récurrent : devenir et répétitions].
+ 2) Ruptures éternelles
. a) Variations d’angles
— Livre ne laisse jamais s’installer nappe temporelle continue : txts longs
aérés (cf. composition de « La ralentie » — plus encore, txts en prose longs
avec subdivision intérieures, à l’image du recueil).
— Cf. logique de l’attaque brusque esquissant situation en qqs. lignes (cf. « Je
+ V » in « Entre centre » ; CC ou db. à l’imparfait > évt. trsè vite in Plume).
. b) L’écriture comme suspens
— Mvt de dégagement des circ. qui permet de leur donner formes porté aussi
par modification qualitative de la temporalité qui est son appréhension
61
humoristique : écriture en retrait du temps qui vient pour mieux l’agencer
ou s’y replonger .
— Retrait humoristique donne élan lyrique particulier ? Fin apparaît comme
synthèse dialectique : théorie (distanciée) du flux profond du temps.
62
ÉCRITURE ET TEMPORALITÉ
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— I. La composition d’un temps
+ 1) Le dégagement du biographique
. a) La vie dans le livre
. b) Liquidation de l’héritage
+ 2) Le temps d’un livre
. a) L’événement de la fiction
. b) Patiente torsion du temps
— II. Une poésie aux marges du temps
. Dégagement du temps biographique semble par effort d’écriture le plus frappant peut-être en ce qu’il
se condense sur saisie d’un temps pur, qui surgit au profond de soi ou déborde les contours même de la personne.
+ 1) L’emportement du flux
. a) Surgissements de la voix
. b) La pensée des tendances
+ 2) L’extase et l’abandon
. a) La visée du moment
. b) Le courant de la perte
— III. Aventures de la temporalité
. Dépassement de la temporalité quotidienne (« L’insoumis ») au cœur de soi vers un absolu du temps
qui annihile le sujet : seulement un composante, plutôt première moitié du livre, avant « Difficultés » ; spécificité
du recueil : montrer ce que doit surmonter cette évidence, et donner forme à une pragmatique du temps.
+ 1) Enfers de la répétition
. a) Les attaques du multiples
. b) Mécaniques de l’humour
+ 2) Ruptures éternelles
. a) Variations d’angles
. b) L’écriture comme suspens
63
LES FORMES
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
— Intro.
+ Termes riche et polysémique ; concept majeur ds tradition philosophique et esthétique.
. S’oppose à la matière (ce qui serait informe), ou au sens (au fond) ; du domaine de
l’apparence (phénomène / noumènes : essences, idées) ou de l’intelligence (principe de
détermination de la matière chez Arist. ; production subjective chez Kt ≠ matière, offerte par
l’expérience).
— sur la plan sensible : structure, système de rapports (fixe / changeant >
rythme) ; forme tj. perçue sur fond auquel elle s’oppose (lignes / [couleurs]
espace, horizon). ;
* pas oublier activité picturale de HM > inscription de formes pour saisir
mvt. intérieur : « j’eusse voulu dessiner les moments qui bout à bout font la
vie, donner à voir la phrase intérieure, la phrase sans mots, corde qui
indéfiniment se déroule sinueuse, et, dans l’intime, accompagne tout ce qui se
présente du dehors comme du dedans. / Je voulais dessiner la conscience
d’exister et l’écoulement du temps. Comme on se tâte le pouls. » (Passages,
1950)
* > voir particularités (formelles) du visible ds PL (mages de l’imagination
et de la représentation) : forme / informe, métamorphose (cf. morphe =
« forme »), place du vide ; présence-absence des descriptions…
— > formes littéraires : types de textes (genre : poésie / prose, lyrisme / récit /
réflexion / théâtre), particularités stylistiques (type de phrase, de vers ;
rythme ; typographie).
— Insistance sur leur pluralité / recherche d’une logique d’ensemble.
+ Double approche > Quelles relations se manifestent entre les formes de l’imaginaire et
celles de l’écriture ?
— I. Une vertigineuse pluralité
64
+ 1) Les grouillements de l’apparence
. a) Fécondités monstrueuses
. b) Incarnations multiples
— Figuration de soi (personnage central) = multiple
+ 2) Un livre aux multiples formes
. a) Types de textes
— Cf. Pluralité typographique, à l’intérieur même des types majeurs : cf.
typologie de l’intro. /+, à l’intérieur des vers :
* Amplitude extrêmement variables : depuis le monosyllabe (« Nuit »92,
« Noirs »95, vers de 2-3 syllabes > vers de 20 syllabes et plus > tend au
verset (notamment « Avenir », jusqu’à 6 lignes 103 [avec enchaînements de
phrases avec majuscule et ponctuation ; ms tendance à la rime intérieure]
— amplitude lyrique : mvt gal de la section, vers textes plus amples) ;
hiérarchisation typographique aussi, avec décrochages à la Reverdy
(« Baobab » : tension constructiviste [cf. connotation technique du
« télégramme »] / écriture très lyrique).
. b) Positions de voix
— Parole d’un narrateur (humour) / théoricien (cf. Postface) / poète lyrique
(exclamation, interrogation)
— Théâtre comme projections de postures (actes) psychiques, cf. Maeterlinck
et Artaud : [C. Roubaud 188 sq.] le 1e veut faire s’exprimer « la voix la plus
profonde […] des êtres », le second « incarnations de rêves, de pensées
projetées sur la scène comme à l’état pur et sans barrière » (Th. et son
double, 1938) > outre refus de représentation autre que marionnettes
(« Constructeurs » 1949 ; après amateurs 1937), « acte unique » (cf.
« drame ») = pas articulation d’une fable véritable, mais efforts renouvelés
des pers. vers eux-mêmes, vers possibilité d’agir (élan infra-dramatique).
+ Position et traitement des formes connues les rendent méconnaissable ; création traverse et
déforme les formes, travail formel va jusqu’aux confins de l’informe.
— II. Le mouvement de l’informe
+ 1) Une permanence dynamique
65
. a) Voyages
— Formes instables du visibles = sur fond sans forme, infini qui est leur
milieu (cf. d’où surgissent monstres et apparitions ; « Tête » vient avec
« l’obscurité ») : espace > ss cesse traversé : voyage comme forme
nécessaire de cette poésie quand elle recourt à la fiction (nart°) : cf. « il
voyage, il voyage continuellement » (Pl. 147).
. b) Saisies
— Visée de ce mouvement = tj. au-delà d’une forme ou d’un lieu déterminé :
cf. « Entre centre et absence » (moment de la vision, indéterminée, de
l’évidence peu articulée, notamment exclamative
— Mvt. de traversée des formes = emporte concrètement formes linguistiques
= forme de sauvagerie burlesque et/ou tragique ds traitement (inventif) de
la langue ; se saisir de la langue ; lyrisme ou satire d’emportement :
* Découpage de certains vers : Plus / plus / plus de baobabs (96)
* Gauchissement syntaxique : Ralentie, on tâte… L’un crie. L’autre
obstacle. (41), Ne résiste plus (42) [ellipse + parataxe] Moi — ça —
tremble (88), village passe (95), Et mystère son moi (109) [ellipse sans
contexte d’appui]
* Néologisme (variante burlesque de « l’espéranto lyrique » R. Bertelé ) :
dévissage en fin de texte (expressionnisme du désespoir) = demandez à un
orcal… envoyez pastilles « cri » et moustaches « cra » généalogie gergreil
et 280 en cape (28) ; ds « Dimanche à la campagne » = N propre (de
personnes : Zanicovette ; de groupes : Jarrettes et Jarnetons ; parodie
zoologiques : Ballus de la famille des Bormulacés) ; déformation de
locutions [jeu àp de préposition] : une de parmegarde, une de tarmouise,
moustiques en goupil ; adj. qualificatif : ramiellée et foruse 35, Olopoutre
et pailloché 36 [déformation et évocation ; jeu àp d’élts morphologiques
réels : cf. suffixes]
+ 2) La matière et l’espace
. a) L’abandon à l’étendue
66
— Cf. personne et corps peu consistants in « La ralentie » ; fin « Magie » : 134 être tj soi exclusivement, si coïncidence avec quiconque, avalé par lui >
capacité de « circuler librement en ce monde ».
. b) Concrétions matérielles
— Mer (« Ma vie s’arrêta », « Portrait de A »), sang (« Mon sang », « Homme
paisible », fromage (« Vision de Pl. »).
+ Globalement, concrétion formelle l’emporte sur mouvement de dépassement de toute
forme : cf. politesse de Pl. (qui respecte les formes) comme modalité de distance >liberté,
légèreté ; celle-ci se gagne à partir de formes diverses mais récurrentes, qui rendent visibles
le mouvement qui s’en dégage.
— III. L’effort du trait
+ 1) Schématisation
. Forme simple et claire permet meilleure appréhension du sens.
. a) Invisible Plume
— Forme de personne abstraite : peu d’attribut (femme 139 > 161, veston 169,
manches 176, chemise 149, lit 160, doigt + mère 162), faible visibilité =
schéma d’homme, puissance de galité > permet mise en scène de multiples
potentiels humains et sociaux.
. b) Décantation du style
— Isolement clair des éléments linguistiques.
— Majuscules = détachement des notions, mise en scène typographique de
certains mots ; pas seulement qd tout en majuscule, mais par façon de
conférer majesté : cf. « Entre centre »37, par phrases nominales
(« Brouillard ! »), substantivation («l’Eurêka »), signaler mérite particulier
de la R désignée (« le Grand Écran ») = mise en valeur, emphase qui
permet aussi distance éventuelle (d’autant plus que souvent contexte
burlesque, ou violent, ou inusité) : cf. rime int. « Malheur » /
« laboureur »83, « Gros lot » 99.
— Parataxes : détachement des élts = aussi ds construction même des phrases,
galt plutôt simple et juxtaposées ; phrases nominales in « Pensées » et
67
« Vieillesse » 88-89 ; style Candide (coupé) in « Plume » : cf. 1e § de « Pl.
voyage ».
+ 2) Insistances
. a) Schèmes récurrents
— Schèmes narratifs et imaginaires : Cf. agression du monde extérieur :
monstre + monde social (avance fém ; / jugement masc.)
— Schème syntaxique, de § : cf. construction de « Entre centre », anaphore
avec reprise de CC ou de S in « Destinée »131, « Mvts de l’être
intérieur »133. ; //ismes sxqs : « Mon sang », « Comme pierre ».
. b) Litanies
— En vers, comme exacerbation du principe même du vers (retours)
— Répétition de syntagme ds le mvt d’une phrase : db. « Dans la nuit »92,
« Repos ds le malheur »83.
— Répétition multiple d’un mot seul, tend à lui faire perdre tout sens par
isolement de tout contexte > pur effort verbal, forme comme tension vers
sens, position d’être, à partir d’un manque et face au monde : cf. « ombre
d’ombres »88 Pensées, « Ds la nuit », « Dakar »
68
LES FORMES
Henri Michaux, Plume précédé de
Lointain intérieur
« j’eusse voulu dessiner les moments qui bout à bout font la vie, donner à voir la phrase intérieure, la phrase sans
mots, corde qui indéfiniment se déroule sinueuse, et, dans l’intime, accompagne tout ce qui se présente du dehors
comme du dedans. / Je voulais dessiner la conscience d’exister et l’écoulement du temps. Comme on se tâte le pouls. »
(Passages, 1950)
— I. Une vertigineuse pluralité
+ 1) Les grouillements de l’apparence
. a) Fécondités monstrueuses
. b) Incarnations multiples
+ 2) Un livre aux multiples formes
. a) Types de textes
. b) Positions de voix
+ Position et traitement des formes connues les rendent méconnaissable ; création traverse et déforme les formes, travail
formel va jusqu’aux confins de l’informe.
— II. Le mouvement de l’informe
+ 1) Une permanence dynamique
. a) Voyages
. b) Saisies
* Découpage de certains vers : Plus / plus / plus de baobabs (96)
* Gauchissement syntaxique : Ralentie, on tâte… L’un crie. L’autre obstacle. (41), Ne résiste plus (42),Moi — ça
— tremble (88), village passe (95), Et mystère son moi (109)
* Néologismes : demandez à un orcal… envoyez pastilles « cri » et moustaches « cra » généalogie gergreil et 280 en
cape (28) ; ds « Dimanche à la campagne » = N propre (de personnes : Zanicovette ; de groupes : Jarrettes et Jarnetons ;
parodie zoologiques : Ballus de la famille des Bormulacés) ; déformation de locutions : une de parmegarde, une de
tarmouise, moustiques en goupil ; adj. qualificatif : ramiellée et foruse 35, Olopoutre et pailloché 36
+ 2) La matière et l’espace
. a) L’abandon à l’étendue
. b) Concrétions matérielles
+ Globalement, concrétion formelle l’emporte sur mouvement de dépassement de toute forme : cf. politesse de Pl. (qui
respecte les formes) comme modalité de distance >liberté, légèreté ; celle-ci se gagne à partir de formes diverses mais
récurrentes, qui rendent visibles le mouvement qui s’en dégage.
— III. L’effort du trait
+ 1) Schématisation
. a) Invisible Plume
— Forme de personne abstraite : peu d’attributs (femme 139 > 161, veston 169, manches 176, chemise
149, lit 160, doigt + mère 162)
. b) Décantation du style
— Majuscules : cf. « Entre centre »37, par phrases nominales (« Brouillard ! »), substantivation
(«l’Eurêka »), signaler mérite particulier de la R désignée (« le Grand Écran ») ; cf. rime int. « Malheur » /
« laboureur »83, « Gros lot » 99.
+ 2) Insistances
. a) Schèmes récurrents
— Schème syntaxique, de § : cf. construction de « Entre centre », anaphore avec reprise de CC ou de S
in « Destinée »131, « Mvts de l’être intérieur »133. ; parallélismes sxqs : « Mon sang », « Comme
pierre ».
. b) Litanies
69
DM2
Dans Passages (1950), Henri Michaux affirme « [l’]honnêteté tardive » de « ce [qu’il]
écrit(t), qui est de l’invention saisie à la gorge, et à qui on n’a pas donné la belle existence qui
lui semblait promise. » En quoi cette affirmation et cette définition vous semblent-elles
éclairer Plume précédé de Lointain intérieur
— Analyse de l’énoncé :
+ L’honnêteté tardive :
. Honnêteté = dimension éthique de l’écriture ; ds rapport à soi et aux autres (lecteurs :
cf. adresse finale) ; conformité à des règles morales : lesquelles ? Règles chrétiennes et
démocratiques ? > dix commandements (parmi lesquelles proscription du mensonge) + loi
évangélique (tu aimeras ton prochain comme toi-même) [cf. Kant : considérer maxime de son
action comme universelle ; désintéressement] + liberté-égalité-fraternité.
— Relation de transparence et d’égalité avec le lecteur (considéré comme
homme et comme lecteur) : cf. fin 220 « Tu pourrais essayer, pê, toi
aussi ? »ms avant = « Lecteur, tu tiens donc ici, comme il arrive souvent,
un livre que n’a pas fait l’auteur, quoiqu’un monde y ait participé. Et
qu’importe ? »
* Essayer toi aussi (/ « pour rebondir, pour chercher, pour plus loin, pour
autre chose ») = par la lecture autant pê que par l’écriture ; lecture comme
écriture de sa vie (d’où le caractère légèrement provoquant de la question
finale = appel faussement modeste au tour de force…).
— Poète ne se place pas en position de supériorité / lecteur : cf. Baud.
« Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère… » [communauté —
morale — ds le péché] ; Lautréamont > surR = « La littérature doit être
faite par tous, non par un. » > parole (style et sens) présentée comme
accessible, donner qqch. en partage : soit fusion (rencontre) de subjectivité
70
(ics) à la romantico-surR [> cf. tout le pan de prolifération imaginaire et
narrative], soit partage d’intelligence ds lignée des Lumières (cf. intérêt
scientifique) ; implique forme de devoir de vérité et/ou politesse (autre sens
de l’honnêteté) = ne pas ennuyer, ne pas accabler, écraser > choix d’une
écriture qui soit aussi amusante : humour, simplicité stylistique (côté
voltairien — et chaplinesque : adaptation à la soc contemporaine,
d’ubiquité et de vitesse, dont art le plus propre est ss doute cinéma),
narrativité.
. Honnêteté tardive = forme de relativisation : pas d’honnêteté immédiate = pour
l’auteur / pour le lecteur ?
— HM a trouvé tardivement (ds son parcours d’écrivain) écriture fictionnelle,
comme dégagement / soi, qui crée aussi rapport plus aisé — poli, honnête
— à l’autre.
— Dans le livre = cf. passage de l’intérieur au dégagement fictionnelle et
réflexif.
— Constitutivement, ds le rapport au lecteur : cette honnêteté ne se donne pas
tt de suite, est le résultat d’un processus, d’une maturation (qui aboutit tard,
trop tard, en dernière instance, après des détours).
* Cf. restriction importante apportée à la responsabilité de l’auteur par HM
lui-même = façon de poser limite à la moralité de la relation de lecture,
honnêteté étant ds le fait de le dire (cf. paradoxe du menteur…) ; cf. 219
outre « vie secrète du corps », « Gardons-nous de suivre la pensée d’un
auteur » [> ce qui importe = « perspective »] > « derrière la tête » = « désir
de domination et d’influence » [plus fort selon HM que libido tq. Fd la
conçoit] ; présente réalité ce ce qui demeure nécesst un rapport de force,
œuvre comme portée par désir de marquer de son « empreinte ».
* > honnêteté = ds partage d’une lutte pour se sortir au mieux de ce monde
de violence intérieure, pour « pousser sa vie » alors qu’on est à peine « chef
de tendance » en soi.
+ Ce qu’il écrit = périphrase qui laisse ouverte la question du genre ; valorise le processus /
résultat (cf. « passages »).
. Pronom relatif sans antécédent : projet de HM = justement àp d’une relation
pbmatique / ses antécédents ; valeur d’indéfini du « ce » > cf. rapport à l’indéfini et à l’infini.
71
+ Qui est = personnification latente, allégorisation, de la poésie = présentation comme un
être : cf. pb. de l’identité subjective et travail de l’incarnation de celle-ci, entre imagination
poétique / visuelle (poèmes en prose, monstres) et fiction narrative ; donner corps (apparence
humaine : cf. « belle ») à « l’être intérieur ».
. = question du devenir / soi (cf. Qui je fus), ds un dégagement qui peut faire de soi tj.
un autre (cf. suite) ; recherche et haine de soi par l’écrit, qui en est représentation.
+ De l’invention saisie à la gorge.
. Invention : sens trad. entre découverte [cf. « invention de la croix » ?] (de qqch. qui
existe, mais caché : ce qui vient, ce qui surgit du lointain intérieur, expression dont le poète
est pas responsable ; monde englouti, créatures latentes) et création (de qqch qui n’existait pas
avant : pouvoir démiurgique du poète [quasi concurrence / Dieu : cf. VH]).
— S’oppose à la conception classique de la littérature comme mimésis ; plutôt
romantico-surR : poésie comme création (au sens le plus large) grâce à
l’expression.
— Cf. aussi division trad. ds réfelxion rhétorique = inventio > disposition >
élocutio ; phase première de l’écriture = avant l’honnêteté tardive ;
sauvagerie première.
. Saisie à la gorge = implique lutte et blocage, et donc mvt. premier ; s’agit de saisir à
la gorge cette invention première, qui a force ms n’a pas honnêteté.
— Locution = évoque « tordre le cou » [= mettre fin] et « prendre à la gorge »
= être saisi par l’émotion (cf. gorge serrée) ; comme si s’agissait aussi de
créer de l’émotion par un acte volontaire et violent de rétention à la source,
d’intervention à la racine (radicale) ; cf. pb. de l’instance qui saisit = du
côté du « on » [≠ clairement le « il » de l’écrivain, qui se divise entre
invention et étranglement] ; intervention non calme et lucide : sauvagerie
contre sauvagerie, violence d’opposition de contradiction, contrariété.
— Gorge > cf. aussi le corps, comme approche de l’ics (instance à la fois de
vie et de création) , décentrement de la subjectivité — et représentation de
celle-ci ; façon aussi de rester pris ds pbmatique originaire : cf. « A » et pb.
de la parole comme de la nourriture [forme de répression du corps, de
douleur imposé à soi ; cf. langue de mouton et nourriture excrémentielle in
« Bren Club »].
+ À qui on n’a pas donné la belle existence qui lui semblait promise.
72
. Centre = belle existence, opposée / invention saisie à la gorge ; suppose qu’en soi
invention aurait débouché sur belle existence (cf. qui lui semblait promise) ;
— Beauté comme accomplissement dans la réalité > forme ici de censure de
l’invention (≠ sa suppression : en un sens au contraire : blocage ds son état
de plus grande sauvagerie) — n’existera pas simplement comme invention,
ne s’accomplira pas comme telle, ds la beauté.
* À la fois opposition à l’écriture automatique (= qui se meut seule, que
l’on ne bloque, étrangle pas).
* Refus de la belle apparence [classique > rationalité : inventio >
développement harmonieux ; symboliste > Idéal] (cf. « semblait » [critique
aussi d’une forme de superficialité, facilité : ds conception du poème, et ds
rapport au lecteur] + beauté comme harmonie, conformité à un canon) [cf.
Rimb. Enfer : « Un soir, j’ai assis la beauté sur mes genoux. — Et je l’ai
trouvée amère. — Et je l’ai injuriée. »] existence de l’invention non belle (
> tordue, étranglée : vitalité étranglée, battue, en lutte), de même que
l’honnêteté est tardive (autre refus d’une forme d’immédiateté).
— Cf. « on » [= part délibérée du poète] ≠ promise par X (créativité et son
culte, ou possibilité de maîtrise classique, de peaufinement symboliste).
— Pbmatique :
+ Ds quelle mesure l’éthique spécifique de l’écriture, chez HM (ds PL) passe-t-elle par
l’opposition radicale du poète à ce que s’épanouisse harmonieusement l’expression créatrice ?
73
DM2 : corrigé
Dans Passages (1950), Henri Michaux affirme « [l’]honnêteté tardive » de « ce [qu’il] écrit(t), qui est de
l’invention saisie à la gorge, et à qui on n’a pas donné la belle existence qui lui semblait promise. » En quoi cette affirmation
et cette définition vous semblent-elles éclairer Plume précédé de Lointain intérieur
Dans quelle mesure l’éthique spécifique de l’écriture, dans PL, passe-t-elle par l’opposition radicale du
poète à ce que s’épanouisse harmonieusement l’expression créatrice ?
— I. Une séduisante probité imaginaire
. L’éthique d’écriture semble d’abord permettre le jeu de l’invention.
+ 1) Les chatoiements du fantastique
. Position de sincérité dans la transcription d’un imaginaire = permet aussi que se déploient apparences
fascinantes de celui-ci (image / lyrisme).
+ 2) La légèreté du récit : belle existence de Plume
. Rigueur dans le choix, à ce moment d’un parcours d’écrivain, de la discipline narrative.
— II. Les ruses cruelles de l’expression
. L’exigence particulière de cette œuvre met à l’épreuve le lecteur par les formes mêmes de l’invention,
violente en elle-même et dans le traitement de toute tradition reconnaissable.
+ 1) L’assouvissement fantasmatique : saisir le lecteur à la gorge
. Écriture comme investissement imaginaire où se déverse toute la violence de l’intime, dans le texte et
sur le lecteur : cf. violence explicite, règlement de compte autobiographique, Œdipe, phobie orale et castration.
+ 2) L’inachèvement perpétuel : tordre le cou à la beauté
. Inconfort de lecture dans la torsion de la langue et des formes héritées, qui rendent méconnaissable la
poésie (= « ce que » HM écrit).
— III. La poésie, un labeur partagé
. Une certaine mise à l’épreuve du lecteur comme de l’auteur est impliquée par cette éthique : l’écriture
interroge de la sorte l’intérieur de chacun et les dehors du monde.
+ 1) Une réflexion morale
. Les poèmes montrent une interrogation sur la place et les pouvoirs de la subjectivité, dont les modes
d’existence sont mis à l’épreuve à travers l’écrit > « Postface » comme partage subtil de la responsabilité dans la
relation entre lecture et écriture.
+ 2) Une poésie du doute
. Élargissement : valeur satirique voire politique > relation d’honnêteté dans l’ironie et l’humour.
74
CONCOURS BLANC
Avril 2004
Lettres
Gaëtan Picon déclare, dans son article « Sur Henri Michaux » (revue Fontaine, mai
1947) : « La poésie d’Henri Michaux est le singulier exemple d’une poésie sans réconciliation
et sans mythe, d’une poésie qui reste d’un bout à l’autre sur le terrain de l’accusation : celui
de la vérité. » En quoi cette analyse vous semble-t-elle éclairer Plume précédé de Lointain
intérieur ?
— Analyse de l’énoncé :
+ Opposition :
. réconciliation + mythe (= la poésie en gal) / accusation = vérité (la poésie d’HM, une
poésie singulière)
+ Réconciliation :
. Entre quoi et quoi ? les hommes, hs et le réel, langage et la réalité, rétablissement
d’un accord ds guerre pour la survie ou pour une vie meilleure (cf. avant péché originel, ou
Âge d’or ds religions païenne) = poésie comme chant mélodieux, harmonique, qui transcende
la réalité (logique de l’élévation : ode, épopée — en un sens aussi lyrisme comme possibilité
d’une esthétisation de la douleur).
. Historicité particulière = / modernité, comme moment de rupture, ds croyance en gal
(mort de Dieu : Nz) et en particulier croyance d’un salut de l’hté par les arts (comme relai de
la religion : = axe fort du romantisme) > réconciliation=
— ramène à l’époque d’Hésiode (cosmogonie), Homère (épopée) ou Pindare
(odes), voire Virgile (Énéide, Bucoliques et >Georgiques : mais moins
75
poésie de la croyance, du mythe : celui-ci a déjà mode d’existence avant tt
culturel)
>
tentatives
Pléiade
(Ronsard),
classicisme
(Malherbe,
Lafontaine), romantisme [notamment par réaction contre effet destructeur
des Lumières](Hölderlin > Hugo écrit épopée Légendes des siècles + odes
métaphysiques in Contemplations, voire fusion des deux in Dieu, La Fin
de Satan).
— Par delà rupture que manifeste poésie de Baudelaire (« Le goût du néant » :
« Le printemps adorable a perdu son odeur ! »), Mallarmé (Idéal devient
néant > Jamais un coup de dés n’abolira le hasard), Rimbaud (« rendu au
sol ») = division irréconciliable entre langage et expérience du réel.
— Retrouver une harmonie, un accord : « Correspondances » de Baud.
[approche critique : « inventer un poncif : voilà le génie »], culte formel et
musicalité chez Mall. (« tte âme est un nœud rythmique, qu’il s’agit de
renouer »), poète voyant pour Rimb. = en particulier espoir surréaliste de la
levée des contradictions par libre exploration de l’imaginaire (ics.).
. Mythe =
— croyance collective proposant explication du monde (> fable, légende :
forme narrative) : souvent péjoratif (implique absence d’adhésion de la
part de celui qui use de ce mot > cf. « idée », comme abstraite, ss réalité :
imaginaire… ; ≠ vérité > appel à la démystification ; cf. mythe de la
galanterie française…). Ms aussi :
* image idéalisée, type légendaire (personnage) : cf. mythe de Don Juan,
Marilyne Monroe…
* expression imagée d’une idée : cf. mythe de la caverne chez Platon (=
allégorie) ; ressource de vérité ds l’imagination.
— Tension chez HM entre :
* pulsion forte de démystification (destruction ou caricature de tte
apparence illusoire) : société, imaginaire même (≠ faites de beaux rêves),
pouvoir de la pensée (cf. postface), littérature et poésie.
* investissement d’un imaginaire fascinant, qui a en outre valeur d’une
recherche intellectuelle et morale engageant tte la personne : foisonnement
imaginaire (même répulsif) et construction narrative = tendance mythique
que montre exemplairement Plume (rapport / Charlot).
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+ Le terrain de l’accusation : celui de la vérité (opposé au mythe et à la réconciliation)
. Vérité :
— sens classique : adéquation (correspondance) des pensées et des choses
[repose sur un dualisme]
. en particulier (< accusation), cf. vérité combative des Lumières, guidée
par la raison et la recherche de la preuve.
. ≠ vérité logique (ou math.) = cohérence interne d’un discours ; peu
pertinent ici < « terrain » (connotation de réalité concrète) + rejet du mythe
(= ce qui n’existe qu’en discours).
. ms. : cf. aussi sens possible de sincérité, authenticité, lucidité ; cf. vérité
subjective comme mise à bas des mythologies personnelles.
— Sens phénoménologique ou ontologique (Heidegger surtt ; Husserl), proche
d’une forme de mystique : participation à l’être, qui se découvre (cf.
aletheia) comme révélation — plutôt lié à un certain suspens du discours,
au profit de l’immédiat.
. Cf. attirance de HM pour les mystiques < tension vers une vérité qui serait
en deçà des mots et de la pensée (cf. Postface).
. Accusation
— Place vérité sur terrain moral (non légal < point de vue personnel) :
recherche de la vérité se fait au nom d’un positionnement éthique (contre
mensonges lénifiants des autres : mythes — sociaux, ms aussi poétiques) ;
présuppose qqch. comme une loi morale (pourrait être, chez HM, loi
d’inadéquation : écrire comme voyager « contre »).
. Cf. mise en accusation des accusateurs, par série Plume : juge in
« Homme tranquille », maître d’hôtel + chef d’établissement + commissaire
de police + chef de la sûreté + ceux de la Secrète + rustre d’agent in « Pl.
restaurant », pers. des restaurants, hôtels, moyens de transports in « Pl.
voyage » (cf. « on » = les autres)… [ms. Pl. complice des assassins in
« Nuit des Bulgares » : autre « on »] ; accusation par mise en scène de la
violence des autorités : apparaît comme inique et en tt cas profitant tj. d’une
supériorité de fait (nbre, institutions en place / individu).
— Implique aussi dimension polémique, voire de violence : vérité est à
débusquer / ceux qui ont intérêt à la dissimuler (cf. 219 postule libido
77
dominandi de chacun : auto-mystification, aussi) = cf. image du monde
social (et intime < cf. « Chaînes » + violence de la subjectivité ss frein : cf.
orgueil des fous in « Drame » + revirement du fils in « Chaînes » [>
reproches d’une voix 195 : se libérer = envoyer un assassin]).
. Cf. aussi caractère pbmatique de la limite entre soi et les autres : cf.
altérités intime des visions et des montres, comme accusation [=
déclaration de culpabilité] de soi ; cf. relativisation de la responsabilité par
la Postface.
— Ms : vérité de HM pas seulement ds accusation ; cf. existe aussi moments
ou composante extatique, du laisser être — cf. Ralentie + poèmes (et même
clausules in « Entre centre » voire dynamique de « L’insoumis »).
. Humour et discordances : ni extase ni violence, forme de mouvement.
. D’un bout à l’autre sur le terrain :
— Implique processus continu [pour ne pas dire exclusif] (pb. du « bout » <
plutôt mouvement : pê sens logique et non chronologique : de la conception
à l’écriture — histoires, images, et style…), et difficulté à ne pas quitter ce
terrain de la vérité (laquelle, dc, pas facile à dire).
. Même tension ds détail des mots que ds contenu imaginaire ou structure :
se discute < dualité de l’écriture, entre transparence et néologismes(
polémique de fond / de forme).
— Terrain : cf. « Mes propriétés » = seconde partie de Nuit remue ; outre
confrontation pragmatique avec le réel, spatialisation de la poésie (ds son
rapport avec réalité intérieure et extérieure) : ici comme in NR espace
d’action
et
de
déplacement
—
plus
encore,
avec
Pl..
(+
[pseudo]objectivation théâtrale — qui montre filiation avec symbolisme :
Maeterlinck voulant montrer profondeur de l’âme).
+ La poésie d’Hm est le singulier exemple d’une poésie…
. Pb. de la définition gale et de la caractérisation particulière :
— sous-entend que la poésie d’Hm ≠ la poésie en gal (laquelle serait avec
mythe et réconciliation) [exemple d’une poésie ss mythe… > il y en a
d’autres : pê Artaud, par ex. ; certains aspect de Lautréamont]
78
— Possible définition thématique (cf. ode et épopée) et formelle (vers et
rimes) — prise à rebours par HM (mais pas le premier : cf. déjà tte la
modernité > quelle est sa singularité ?)
. Terme d’écriture : comme relation délibérée ( > éthique) aux formes littéraires.
— Reformulation du sujet, pour une problématique :
+ Ds quelle mesure, ds PL, l’écriture d’HM consiste-t-elle continûment en une
démystification violente de toute fausse harmonie, mue par une exigence de lucidité sans
concession ?
. Cette fausse harmonie, c’est d’abord la poésie en elle-même, tq HM en hérite et tq.
qu’il la voit pratiquer de son temps > la poésie en accusation
. Mais l’exigence de lucidité qu’il y oppose prend bel et bien les formes d’une
véritable mythologie personnelle.
. Celle-ci ne livre qu’une vérité problématique, en mouvement : propose divers
parcours du vrai.
— I. La poésie en accusation
La démarche de Michaux propose effectivement « un exemple singulier », mais non
unique, de la grande remise en question poétique entamée par la modernité, voire le
romantisme, dans leur souci d’une vérité qui soit chaque fois contemporaine. Comme chez un
Baudelaire, voire un Rimbaud — mais dans la lignée, aussi, de certaines audaces hugoliennes
[cf. « Réponse à un acte d’accusation »] —, la poésie n’est certes plus ici l’embellissement du
monde : sa poétisation. Et ses apparences mêmes montrent la mise en chantier de sa nature,
« terrain » instable de la création.
+ 1) Contre le poétisme
. a) Haine de la beauté ?
— Cf. contemporains : merveilleux surréaliste + néo-symbolisme de Valéry
(1922 = Charmes, son dernier recueil de vers > célébrité dans les années
30, chaire de Poétique au Collège de France àp 1937 ; à la fois idéalisme
lucide et formalisme).
— Représentation de la violence et parti pris du corps (≠ idéalisation)
79
. b) Refus du sens ?
— ≠ débats théoriques contemporains (cf. Manifestes surR 1924, 1930), ds
tradition (romantique) du poète guidant le peuple (cf. rôle politique de
Lamartine ; « mage » selon VH : « rêveur sacré », « Car la poésie est
l’étoile / Qui mène à Dieu rois et pasteurs » [« Fonction du poète »] >
encore « voyant » de Rimbaud) > cf. tentation de l’essai (≠ traité), et
ambition philosophique, ms tj. avec composante satirique et ds mvt. de
recherche : cf. Postface ≠ Préface < la pratique d’abord, dont tirer qqch (≠
cadrage initial).
— Défait grands cadres explicatifs : moi (cf. notamment satire de la volonté de
puissance et de la figure du surhomme : « Tête sort du mur » +
« Chaînes » : 190 JF « Tu ne t’intéresses qu’aux faibles… Tu
m’affaiblis »), nature (cf. « Le chêne » + « La nature fidèle à l’homme »),
vision messianique de l’histoire (effacement ou jeu : cf. « Mais toi… » +
« Avenir » : « on vous haïssait » [Breton au PC 1927-33])
+ 2) Un terrain poétique en chantier
. a) Des genres méconnaissables
— Réécriture de l’élégie (plainte : « La Ralentie »), de l’ode (éloge : « Mais
toi, quand… », « Repos ds le malheur », « Pensées », « Vieillesse », « Dans
la nuit »), de la pastorale (« Dimanche à la campagne » : cadre bucolique +
idylle entre Zanicovette et le Ballus), de l’épopée (composante
généalogique [Pon, A], histoire d’un peuple : cf. « Je vous écris » et de ses
héros : Plume = tj. vaincu, et solitaire ; écrasé par ennemi et monstres [≠
Hercule, Persée…]).
— Tendance au burlesque (rabaissement stylistique et thématique : corps), ms
aussi héroï-comique (emphase déplacée : tendance des poèmes, avec
exclamations et invocations).
. b) Retraitement des formes contemporaines
— Vers libre, verset / élts de cadence
— Poème en prose harmonique (avec récurrence) / dysharmonique ; brefs /
longs, autonomes / en série…
— Théâtre
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— Néologismes : très ponctuel (ds « Dimanche ») ≠ certaine transparence du
style narratif.
— II. Une mythologie personnelle
Michaux détruit, mais pour « contruir(e) […] avec des loques », comme il le proclame
dans La Nuit remue. « Réconciliation » certes « singuli(ère) », d’une écriture subjective qui
« d’un bout à l’autre » de son parcours tente avant tout de se rejoindre elle-même, et qui
cependant peut prendre forme et force de « mythe ». « L’accusation », en effet, dans sa
cohérence, appelle et rend possible une adhésion : des images récurrentes montrent la dureté
du monde et des hommes. Comme les mythes, elles jouent de la fascination ou de l’horreur,
du plaisir de raconter.
+ 1) Accusation du monde
. a) Histoire et société
— Histoire contemporaine
(cf. « Avenir » + « Mais toi » et « Comme
pierre… » 101 : « Tettez… la civilisation des désirs à bon marché »,
« Camarades… ms il n’y a pas de camarades du « Non » »).
— Société et hiérarchie : cf. Plume (/ Charlot)
. b) Relations intersubjectives
— Histoire familiale, scénarios œdipiens + mise en scène du désir (féminin
nott.)
— Intra-subjectives aussi : cf. Postface + « Drame des constructeurs »
+ 2) Contre-offensive imaginaire
. a) Captations monstrueuses
— Vérité imaginaire = captation initiale par récit de « Magie »
— Formations imaginaires, d’êtres et de formes
. b) Entraînements narratifs
— Forme de surplace (fantasmatique et comique), par récurrence des
situations (d’agression, de passivité, de métamorphose).
— Unification par pers. de Plume (qui voyage : itinéraire ; épreuves initiatique
ou roman de formation impossibles ; plutôt aventures : modèle picaresque),
puis par forme du « drame » (en un sens : de plus en plus dans le muthos :
point max = « Chaînes » > décomposition in « Drame »).
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— III. Les parcours du vrai
Cette poésie détruit donc la poésie, pour mieux bâtir ses propres mythes, accusateurs.
« La vérité » que ces derniers portent n’est pas une : elle relève de l’authenticité subjective
autant que de l’exactitude clinique, et au « bout » de son parcours ne propose d’affirmation
que pour en relativiser la portée. Et s’agit-il bien de prouver quoi que ce soit ? Moraliste, sans
doute, l’œuvre de Michaux n’est-elle pas cependant au plus près de son « terrain » propre
dans le retrait de l’humour, ou dans l’effacement d’une mystique littéraire qui ne va pas sans
ironie ?
+ 1) La vérité en lutte contre elle-même
. a) Une vérité plurielle
— Jeu de la pseudo-autobiographie = dans recueil (« Portrait de A »), et dans
commentaires de Michaux lui-même : accrédite thèse de l’authenticité ; en
un sens renforcé par Postface qui présente livre comme travail du « moi ».
— Jeu de l’exactitude clinique : « Magie », « Animaux », « Postface »
— ≠ subjectivation lyrique [cf. Pétrarque, Pléiade, romantiques] : « je » des
textes visionnaires (in section « Entre centre ») et des « poèmes ».
. b) Agonistique du vrai
— Pbmatisation réciproque de ces divers modes de vérité > cf. limitation de la
pertinence de la pensée d’un auteur (cf. autorité) in Postface.
+ 2) Aux frontières de l’affirmation
. a) Humour
— Évaluation permanente des énoncés nécessaires : cf. euphémisme, litote,
jeu sur les locutions [« honnêteté » classique et 18e de la fiction propose
modalité distanciée de la vérité].
. b) Troubles extases
— Textes — poèmes (paix, ruine, nuit + temps et liquidité in « Ralentie ») ms
aussi prose : cf. « Entre centre » + fin des « Bulgares » (« vivre enfin ») et des « Culs-dejatte » (« fatigue ») = propose moments résolutoires, comme d’adéquation, d’intimité à l’être,
mystique, où réconciliation ds dénuement extrême qui ne distingue plus bonheur et malheur
(mise à distance ironique de l’un et de l’autre par écriture [cf. excès de forme et de ton /
« Repos ds le malheur », « Ds la nuit »]. Effort critique et poétique au bout de lui-même.
82
La démystification d’ harmonies poétiques considérées comme illusoires permet donc
que prenne forme un imaginaire bien spécifique. Celui-ci se conçoit comme le moyen d’une
lucidité dont l’acuité tient largement à ce qu’elle joue de ses propres limites. Ouverte, la
dialectique du « mythe » poétique et sa mise en « accusation » mine le « terrain » de l’œuvre :
ses déflagrations critiques tiennent alors lieu d’Illuminations.
83
CONCOURS BLANC
Avril 2004
Lettres
Gaëtan Picon déclare, dans son article « Sur Henri Michaux » (revue Fontaine, mai 1947) : « La poésie
d’Henri Michaux est le singulier exemple d’une poésie sans réconciliation et sans mythe, d’une poésie qui reste
d’un bout à l’autre sur le terrain de l’accusation : celui de la vérité. » En quoi cette analyse vous semble-t-elle
éclairer Plume précédé de Lointain intérieur ?
Dans quelle mesure, dans PL, l’écriture d’HM consiste-t-elle continûment en une démystification violente de toute fausse
harmonie, mue par une exigence de lucidité sans concession ?
— I. La poésie en accusation
La démarche de Michaux propose effectivement « un exemple singulier », mais non unique, de la grande remise en question
poétique entamée par la modernité, voire le romantisme, dans leur souci d’une vérité qui soit chaque fois contemporaine. Comme chez un
Baudelaire, voire un Rimbaud — mais dans la lignée, aussi, de certaines audaces hugoliennes [cf. « Réponse à un acte d’accusation »] —, la
poésie n’est certes plus ici l’embellissement du monde : sa poétisation. Et ses apparences mêmes montrent la mise en chantier de sa nature,
« terrain » instable de la création.
+ 1) Contre le poétisme
. a) Haine de la beauté ?
. b) Refus du sens ?
+ 2) Un terrain poétique en chantier
. a) Des genres méconnaissables
. b) Retraitement des formes contemporaines
— II. Une mythologie personnelle
Michaux détruit, mais pour « contruir(e) […] avec des loques », comme il le proclame dans La Nuit remue. « Réconciliation »
certes « singuli(ère) », d’une écriture subjective qui « d’un bout à l’autre » de son parcours tente avant tout de se rejoindre elle-même, et qui
cependant peut prendre forme et force de « mythe ». « L’accusation », en effet, dans sa cohérence, appelle et rend possible une adhésion : des
images récurrentes montrent la dureté du monde et des hommes. Comme les mythes, elles jouent de la fascination ou de l’horreur, du plaisir
de raconter.
+ 1) Accusation du monde
. a) Histoire et société
. b) Relations intersubjectives
+ 2) Contre-offensive imaginaire
. a) Captations monstrueuses
. b) Entraînements narratifs
— III. Les parcours du vrai
Cette poésie détruit donc la poésie, pour mieux bâtir ses propres mythes, accusateurs. « La vérité » que ces derniers portent n’est
pas une : elle relève de l’authenticité subjective autant que de l’exactitude clinique, et au « bout » de son parcours ne propose d’affirmation
que pour en relativiser la portée. Et s’agit-il bien de prouver quoi que ce soit ? Moraliste, sans doute, l’œuvre de Michaux n’est-elle pas
cependant au plus près de son « terrain » propre dans le retrait de l’humour, ou dans l’effacement d’une mystique littéraire qui ne va pas sans
ironie ?
+ 1) La vérité en lutte contre elle-même
. a) Une vérité plurielle (divers modes)
. b) Agonistique du vrai
+ 2) Aux frontières de l’affirmation
. a) Humour
. b) Troubles extases
La démystification d’harmonies poétiques considérées comme illusoires permet donc que prenne forme un imaginaire bien
spécifique. Celui-ci se conçoit comme le moyen d’une lucidité dont l’acuité tient largement à ce qu’elle joue de ses propres limites. Ouverte,
la dialectique du « mythe » poétique et sa mise en « accusation » mine le « terrain » de l’œuvre : ses déflagrations critiques tiennent alors lieu
d’Illuminations.
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MAMIE
GRAND-PERE
TRICYCLE
YAYO
YAYA
85