LIFE Eau et forêt : article 3
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LIFE Eau et forêt : article 3
3/6 Pierres qui roulent... ... n’amassent pas mousse L e proverbe utilise l’image du transport sédimentaire pour exprimer sa vérité. Les mousses et autres lichens ne colonisent pas les pierres des rivières car celles-ci se déplacent au gré des crues et constituent de ce fait un habitat instable. Même si nous sommes tous conscients de ce phénomène naturel, le transport des graviers dans les rivières constitue un processus physique complexe, difficile à appréhender et à mettre en équation. Et c’est bien de cela qu’il s’agit lorsque nous sommes amenés à comprendre et à prédire le fonctionnement du lit de la rivière, ce paysage en pleine métamorphose dans la vallée de la Drôme (relire l’article « la Drôme et son bassin versant » du 14 octobre 2005). N ous proposons ici de présenter succinctement les grands mécanismes du transport sédimentaire avant de faire le point sur celui de la Drôme, à l’occasion du prochain article. La rivière : une machine à transporter des sédiments L es spécialistes de géomorphologie fluviale (la science qui s’intéresse aux formes du relief édifiées par les cours d’eau) ont coutume de découper le bassin versant d’une rivière en trois grandes zones. La zone de production, située à l’amont, a pour fonction principale de produire les sédiments que la rivière utilise pour bâtir son lit et façonner sa plaine alluviale. Elle constitue ainsi l’usine à graviers et elle regroupe l’ensemble des ravins, dérochoirs, torrents, éboulis et glissements de terrain qui entail ent les versants de nos Les zones d’érosion, de transport et de dépôt des sédiments (d’aprés Matt Kondolf) montagnes. La zone de transport, qui prend le relais de la zone de production, peut être assimilée à un tapis roulant à mouvement saccadé qui véhicule les graviers vers la zone de dépôt. Ce tapis roulant ne se met en marche que pendant les crues dont l’intensité est suffisamment forte pour mettre en mouvement les graviers. On en compte entre 5 et 10 par an en moyenne dans les régions méditerranéennes. Ce mouvement discontinu explique la formation des bancs de graviers dans la zone de transport. Enfin, la zone de dépôt, située sur le cours Le tapis roulant de la Drôme à Pontaix inférieur, a pour fonction principale de stocker les sédiments transportés par le tapis roulant. Cette partition en trois zones nous conduit à adopter une vision globale du fonctionnement de la rivière, indispensable pour comprendre les éventuels dysfonctionnements et agir en conséquence. Pour faire rouler les pierres, la rivière respire U ne des fonctions vitales de la rivière est donc d’assurer le transfert des graviers vers l’aval. Pour effectuer ce travail prodigieux (la quantité de sédiments à transporter se compte généralement en dizaines de mil iers de tonnes), elle dispose de deux principales sources d’énergie : les forces de gravité liées à la pente du fond de vallée et les volumes d’eau qui s’écoulent pendant les périodes de crues. Plus la pente est forte et les débits élevés, plus la rivière est capable de déplacer de grandes quantités de matériaux. Hors, les quantités de graviers et les débits ne sont pas constants dans le temps. Ils varient en fonction des changements climatiques et des modifications de l’occupation du sol du bassin versant. La rivière doit donc ajuster continuellement son lit pour lit de la rivière: un équilibre fragile entre maintenir une capacité de transport en Le la fourniture sédimentaire et la capacité de adéquation avec sa charge sédimentaire. transport (d’après E.W. Lane) C’est la raison principale qui explique la grande mobilité des lits fluviaux, qui se manifeste par des berges qui reculent, des chenaux qui changent de position, des bancs qui se forment et qui disparaissent. Sans cette respiration des formes fluviales, la rivière ne peut trouver son état d’équilibre qui lui permet de faire rouler les pierres. On parle d’équilibre lorsque l’altitude du lit reste relativement stable dans le temps. Il arrive parfois que l’équilibre soit rompu et que le lit s’enfonce ou s’exhausse durablement. L’enfoncement se produit lorsque la capacité de transport devient excédentaire par rapport à la fourniture sédimentaire. Inversement, la surélévation du fond du lit résulte d’un apport en matériaux trop important par rapport à la capacité de transport. Pour rétablir l’équilibre, la rivière peut ajuster le calibre des matériaux de construction (la granulométrie des sédiments) et la pente de son lit. Une rivière qui s’enfonce aura donc tendance à réduire sa pente et à privilégier l’utilisation des grosses pierres pour bâtir son lit. Inversement, un exhaussement se traduira plutôt par une pente plus forte et une granulométrie plus fine, ce qui facilitera le transfert de la fourniture sédimentaire excédentaire vers l’aval. Le budget sédimentaire C es phénomènes complexes d’élévation et d’enfoncement du lit (on parle alors d’incision) peuvent également être appréhendés en terme de budget. Une rivière se caractérise par des entrées, des sorties et un stock de sédiments. L’état de ce stock, retranscrit par la géométrie du lit, dépend du bilan entre les entrées et les sorties. Si le bilan est équilibré (entrées = sorties), le stock reste stable et la rivière est en équilibre. Si le bilan est déficitaire (les entrées sont inférieures aux sorties), la rivière puise dans son stock et ceci se traduit par une incision du lit. Cette situation est souvent induite par des prélèvements excessifs de graviers dans le lit (les extractions) ou par un tarissement des apports en matériaux lorsque les vitesses d’érosion en montagne se ralentissent brusquement. Enfin, lorsque le bilan est excédentaire (les entrées sont supérieures aux sorties), le stock augmente et ceci se manifeste par l’exhaussement ou élévation du lit. L Jeu Concours Gagnez un survol du bassin versant en hélicoptère à la découverte de la rivière Drôme et de ses sédiments... es bilans à fort déficit ou excédent en graviers posent de nombreux problèmes en terme d’environnement et d’aménagement du territoire. Ils se traduisent souvent par une dégradation de la qualité écologique des cours d’eau et une amplification des contraintes avec lesquelles la société doit composer (l’instabilité du lit de la rivière et les déchaussements des ouvrages, le risque d’inondation…). L a Communauté de communes du Val de Drôme vous invite à suivre notre série de 6 articles consacrés au bassin versant de la Drôme, ses forêts, ses matériaux L e bilan sédimentaire actuel de la Drôme n’est pas en situation d’équilibre. Nous sommes aujourd’hui dans une situation de déficit aggravé. Quelles sont les raisons qui solides et au programme LIFE Eau et Forêt. Vous pourrez répondre aux questions qui vous seront posées à l’issue de ces publications. Ces articles seront publiés tous les 15 jours dans le Crestois et le Journal du Diois, vous pourrez également les retrouver sur: expliquent une telle situation ? Quels sont les éléments qui nous permettent d’établir ce diagnostic ? Quelles sont les conséquences du déficit sédimentaire pour les habitants de la vallée ? Les réponses dans le prochain article… www.valdedrome.com Direction de la publication : Communauté de Communes du Val de Drôme Expert scientifique : Frédéric Liébault Conception Graphique : Silicon Worlds