La violence dans les jeux vidéo 1. Violence et jeu vidéo : en finir

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La violence dans les jeux vidéo 1. Violence et jeu vidéo : en finir
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La violence dans
les jeux vidéo
Ce dossier est en deux parties : il propose tout d'abord un éditorial
écrit par SoLomoNK (qui est à l'origine du projet Warsow http://www.warsow.net), puis revient sur quelques exemples célèbres
de jeux qui ont provoqué une polémique par leur violence.
1. Violence et jeu vidéo : en finir avec le débat
Par SoLomoNK (01/2002)
Malgré ses 25 années d’existence commerciale et son essor fulgurant,
il est regrettable de constater que le jeu vidéo souffre encore d’une
image négative, véhiculée par une poignée de détracteurs dont le
discours s’appuie sur un certain nombre de préjugés récurrents qui
commencent à bien faire.
Pourquoi diable n’entendons nous pas davantage parler des vertus du
jeu vidéo ? Après tout, ce loisir, au même titre que tous les jeux en
général, constitue un bon moyen d’apprentissage de l'échec et de la
persévérance. De même, il participe au développement des réflexes,
de la dextérité mentale, de la capacité de concentration. Observation,
élaboration d’hypothèses, prise de décision, expérimentation, une
partie de jeu vidéo équivaut à une intense séance de gymnastique
cérébrale. Pour s’en apercevoir, il suffit de pratiquer. Mais on peut
toujours rêver. Bien qu’à ce jour aucune étude scientifique n’ait été
en mesure d’établir un lien de cause à effet entre la violence des jeux
vidéos et celle dans la réalité, une partie de l’opinion continue à
prétendre le contraire. Difficile, dans ces conditions, de prendre au
sérieux l’inquiétude de cette population non-initiée, à qui l’interactivité
des nouveaux médias fait peur. Et qui a tort d’avoir peur.
L’attirance de l’homme pour la violence date probablement de sa prise
de conscience de la notion du bien et du mal, sur la base de laquelle
il a établi un certain nombre de règles sociales qu’il apprécie à leur
juste valeur, mais malheureusement parfois contradictoires avec ses
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pulsions animales latentes plus ou moins faciles à rationaliser. C’est
pour cette raison que donner aux joueurs la possibilité d’être les
acteurs principaux d’univers virtuels violents reste un important (si ce
n’est primordial) champ d’application de cette formidable forme de
contrôle de l’image. Evidemment, la communauté des joueurs,
traditionnellement jeune et masculine, n’encourage pas vraiment
l’industrie à proposer de réelles alternatives à ces quelques vieux
schémas simplistes se faisant l’écho d’un éternel et important besoin
de jouer les héros et d’exorciser ses peurs en se racontant des
histoires morbides. Mais la bande dessinée, les films d’horreur, la
littérature policière, ou encore les contes de fées remplissent
exactement la même fonction et occupent le créneau depuis des
lustres. De ce point de vue, le jeu vidéo n’a rien inventé.
Si cet art ne flatte pas les sentiments les plus nobles de l’humanité, il
est néanmoins porteur d’un signe de sagesse : mieux vaut
reconnaître et exprimer sa part d’agressivité dans le cadre bien
délimité d’un jeu, plutôt que de la refouler et prendre le risque d’en
perdre le contrôle. Nier cette fascination que la violence exerce dans
une certaine mesure sur nos imaginaires, c’est déjà faire un pas en
arrière dans la connaissance de soi, s’exposer aux refoulements, et
donc aux surprises. C’est la porte ouverte aux actes violents impulsifs,
expressions de frustrations intérieures dont les sujets ne sont pas
mentalement armés pour en venir à bout de manière raisonnable.
Quand on y regarde de près, il n’y a pas plus de violence entre deux
personnes qui s’affrontent dans un jeu de baston qu’entre deux
individus qui échangent leurs points de vue au cours d’une discussion
animée. Dans les deux cas, l’évacuation de pulsions agressives à
laquelle nous assistons relève d’un même mécanisme. La violence
reste abstraite, contenue dans un cadre consensuel raisonnable, précis
et sans danger. En l’occurrence, nous avons d’un côté la joute orale
et le poids des mots, de l’autre un écran et deux paddles. Car les
gens ont, en général, l’intelligence instinctive de préférer des formes
de violence qui en restent au stade de l’idée. En cela, les jeux de tir à
la Quake ou à la Tomb Raider reflètent à merveille cette prudence
naturelle qui nous guide au cours de l’existence. C’est tellement plus
confortable de jouer les aventuriers ou les gros bras lorsqu’on sait
qu’il n’y a aucun risque de souffrance et pas de réel engagement
physique.
Il est temps de reconnaître que les joueurs, afin d’étancher leur soif
d’action et d’émotions fortes, ont l’intelligence d’opter pour des
formes de violence, ou de vitesse, imaginaires, certes pas très
courageuses, mais qui ne présentent pas tous les inconvénients de la
violence effective. Choisir le jeu vidéo pour canaliser son agressivité,
c’est avoir conscience du double pouvoir dissuasif de la douleur : peur
des sensations pénibles et refus de transgresser pour de vrai les
règles morales. Déambuler dans les couloirs sinistres de Resident Evil,
ou de Sanitarium, c’est avant tout jouer avec sa peur, ce qui revient
à lui donner beaucoup d’importance. Bref, tout le contraire d’une
quelconque tendance insidieuse de mise en sourdine de cette sirène
d’alarme universelle qui fait partie intégrante du comportement de la
plupart des organismes vivants. Nous sommes aux antipodes de la
désensibilisation de l’individu à la souffrance mentale et physique qui
caractérise certains actes violents et qu’on voudrait bien imputer à
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l’informatique de loisir.
Au regard de l’ensemble de la production du jeu vidéo, on est forcé
d’admettre que le genre "c’est cool d’écraser les piétons" reste très
exceptionnel. La présence d’éléments provocateurs est parfois même
involontaire, simplement due à une perception
des symboles
différente, attribuable au décalage entre cultures américaine,
européenne ou japonaise, comme ce fut le cas avec les croix
gammées dans Wolfenstein 3D, un jeu en provenance des Etats-Unis.
L’utilisation de ces bannières fascistes dans un environnement de jeu
vidéo a eu une connotation bien plus forte dans les consciences
collectives européennes. Attention, il ne s’agit en aucune manière de
justifier une idéologie abjecte (d’ailleurs, les soldats allemands
jouaient le rôle des méchants) mais de bien comprendre que le poids
d’un symbole dépend étroitement de l’ampleur de son implication et
du sens que lui attribuent des esprits baignés dans une culture et un
contexte historique donnés. Par exemple, même si nous autres,
européens, savons tous que le drapeau sudiste fait référence à un
courant esclavagiste, notre connaissance du sujet reste globalement
superficielle, ne serait ce que pour son rapport lointain avec notre
propre histoire, ne nous permettant pas de mesurer la réelle
puissance emblématique de cette bannière.
Peu d’éditeurs font le choix d’exploiter des éléments choquants ou
particulièrement amoraux dans le seul but de satisfaire à une
demande marginale des amateurs du mauvais goût et du second
degré. Ils savent que pour trouver grâce aux yeux d’une majorité de
joueurs, mieux vaut faire appel à un sens des valeurs plutôt conforme
aux bonnes vieilles recettes, mettant en scène l’héroïsme, le courage,
la ténacité et la ruse. Par exemple, on ne peut pas réfuter qu’il existe
dans tous les jeux de baston une volonté flagrante d’illustrer le vieil
archétype de la revanche de David contre Goliath. Les personnages
les plus répandus sont représentés comme de vrais athlètes, mais le
profil "montagne de muscles" n’est pas vraiment à l’honneur dans les
jeux de combat. En règle générale, les personnages massifs ne
constituent qu’une petite partie du panel. Jeunes filles, adolescents,
vieillards sont largement valorisés et revendiquent sans complexes
leur place sur le ring, palliant le handicap de leur faible constitution
par des techniques de combats et les coups qui font appel à la
rapidité et la surprise, plutôt que la force pure non canalisée. Eh oui,
même s’ils ne sont que des caricatures de récit, les jeux vidéos les
plus fédérateurs respectent la vieille tradition des bons qui gagnent
toujours à la fin. Plutôt rassurant, non ?
Parents, professeurs, non-usagers, quelque soient les raisons pour
lesquelles l’innocence du jeu vidéo vous échappe, il est temps pour
vous de tirer un trait sur vos a priori. Un jeune, qui a choisi d’investir
plusieurs centaines de francs dans un logiciel de type Time Crisis et
qui passe quelques heures à tirer sur son téléviseur avec un flingue
en plastique fait preuve d’un recul par rapport à la violence et à la
puissance symbolique des armes à feu qui lui rend hommage. Tandis
que le possesseur de la moindre carabine à plomb, du moindre lancepierres, même s’il se croit parfaitement raisonnable, s’est donné le
droit d’avoir à sa disposition un ustensile qui conserve un potentiel de
violence concrète, dont il peut éventuellement se servir pour faire un
carton sur des lézards ou des oiseaux…
Il y a un réel danger dans cette tentative de censure de la violence
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dans le jeu vidéo, alors que celle-ci appartient strictement au
domaine du jeu, de l’idée et de l’image, sans aucun rapport avec la
réalité. L’air de rien, cette croisade témoigne d’une volonté pour le
moins discutable de s’immiscer dans la tête des gens afin d’imposer
des limites à leurs délires imaginaires exutoires, ce qui revient à
toucher à leur liberté de penser.
2. Petite histoire de la violence dans les jeux vidéo
Par Laurent (01/2002)
Rétro mais violent
Si l'on considère que le fait de jouer avec un pistolet optique qu'on
dirige vers l'écran pour tirer sur des cibles virtuelles est assimilable à
la violence qui est dénoncée par certains dans les jeux vidéo, alors le
problème remonte à la préhistoire des jeux vidéo. Dès ses premiers
essais de "télévision ludique" pendant les années 50, Ralph Baer,
après avoir expérimenté avec succès un petit jeu de tennis, imaginait
un jeu de tir au moyen d'un pistolet muni d'une cellule photoélectrique. Il lui faudra tout de même attendre 1967 pour arriver à
ses fins, après que ses employeurs lui aient enfin accordé un budget
de développement pour son projet.
Le lightgun de Ralph Baer (1967)
Cependant, la première vraie polémique concernant un jeu vidéo dit
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violent date de 1976. Sur les écrans américains sort un film
complètement déjanté intitulé Death Race 2000, avec David
Carradine et Sylvester Stallone. Ce film méconnu (sorti en 1975 et
réalisé par Paul Bartel, un cinéaste underground et très provocateur)
montre une course automobile disputée en l'an 2000 lors de laquelle
les participants sont autorisés, et même encouragés, à écraser des
piétons. Il ne suscite guère d'intérêt dans un premier temps, mais
redevient d'actualité en 1976 après que Stallone ait remporté l'Oscar
pour son rôle dans Rocky (en France, il sortira en vidéo une dizaine
d'années plus tard sous le titre Les seigneurs de la route, en même
temps qu'une poignée de films avec Sly que ce dernier aurait sans
doute préféré qu'on oublie).
Death Race 2000 : L'affiche du film et le jeu d'arcade (1975 - 1976)
Le film faisant alors quelques entrées de plus, la société Exidy Games
lance un jeu d'arcade (simplement intitulé Death Race) reprenant le
principe de la course en question. Le scandale est immédiat. Même si
on n'est qu'en 1976 et que les graphismes se limitent à une
représentation très simpliste des choses, l'idée d'écraser des piétons
pour gagner des points n'est pas tolérable, et le jeu est interdit. En
tout, seulement 500 exemplaires en auront été fabriqués, qu'on
croyait perdus à jamais mais qui refont peu à peu surface grâce aux
collectionneurs fous qui se promènent sur le net. A l'époque, aucun
autre jeu n'a encore fait l'objet d'une telle interdiction, mais c'est le
point de départ pour les Etats-unis d'une série interminable d'études,
de thèses et d'articles sur le rôle joué par la violence montrée dans
les jeux vidéo dans la recrudescence des agressions perpétrées par
des jeunes. Ajourd'hui encore, une simple recherche sur le sujet par
l'intermédiaire d'un moteur de recherche quelconque renvoie sur des
dizaines de liens. Des sites entiers sont même consacrés au sujet, et
certaines personnes en ont fait un combat personnel, comme par
exemple le sénateur Joseph Lieberman, qui soutint en 1999 la
candidature de Al Gore aux présidentielles américaines et se
présentait comme le "défenseur de la famille".
L'exemple de Death Race 2000, en dehors de son côté précurseur,
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montre bien l'hypocrisie et la méconnaissance avec laquelle la
violence a toujours été considérée dans les jeux vidéo. L'idée de tuer,
voire d'exterminer des dizaines d'ennemis qui ont parfois figure
humaine est à la base d'une grande partie des jeux vidéo, et ce
depuis leurs débuts, mais certains titres ont été villipendés alors que
d'autres n'ont suscité aucune réaction. En réalité, seule la provocation
directe et grossière réveille les foudres des censeurs, ou encore
l'utilisation d'images et de symboles tabous, sans que l'on cherche
vraiment à comprendre quelle était l'intention des auteurs.
Wolfenstein 3d
En 1992, par exemple, lorsque Id Software lance Wolfenstein 3d, le
premier FPS, une mini polémique marque l'évènement. Dans le jeu,
qui se passe durant la 2e guerre mondiale, le joueur se retrouve
prisonnier dans un chateau allemand tenu par la wehrmacht. Des
croix gammées et des portraits d'Hitler sont visibles un peu partout,
et cela ne plait pas beaucoup à certains. Pourtant, le but du jeu est
justement de se battre contre ces soldats et de sortir de cet enfer. Le
procès d'intention est donc à côté de la plaque, et le designer John
Romero y fera une allusion amusée dans le jeu suivant d'Id Soft,
Doom, dont un des niveaux prend la forme d'une croix gammée,
visible uniquement quand on affiche la carte du jeu. Le gag est de
mauvais goût, certes, mais seuls les vrais joueurs l'ont vu, et
personne n'en a parlé. Et pourtant Doom est beaucoup plus violent,
car plus réaliste visuellement, que Wolfenstein 3d.
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Return to Castle Wolfenstein
Aujourd'hui, la suite de Wolfenstein vient de sortir, atteignant un
niveau de réalisme visuel bien supérieur, et basant une partie de son
intérêt sur la fascination morbide qu'exercent les redoutables armes à
feu Allemandes de l'époque (Lüger, Mauser, lance-flammes...), mais
cette fois personne ne semble y faire attention, car c'est un aspect
qui nécessite de se pencher réellement sur le jeu pour être perçu.
Les FPS et les MODs multi-joueur : la violence comme si vous y
étiez
Aujourd'hui, les FPS orientés multi-joueur,
comme Counterstrike, Ghost Recon ou Strike
Force permettent de se battre entre terroristes
et anti-terroristes dans des conditions proches
de la réalité. Les armes sont reproduites d'après
les modèles authentiques, et leur comportement
est
restitué
parfaitement
(les
joueurs
connaissent sur le bout des doigts leurs
caractéristiques techniques). La moindre balle
reçue entraîne la mort, une mort bien réelle qui
ne se solde
pas par
une résurrection
instantanée comme dans les deathmatches classiques, mais par la
mise hors-jeu du joueur jusqu'à la partie suivante, ce qui est pour lui
la pire des punitions et donc une source de motivation sans pareille.
Les embuscades, le sniping, les visées laser, les mines et grenades,
autant de choses absolument terrifiantes dans la vie réelle (pour les
malheureux qui y sont confrontés), sont dans ce type de jeu des
éléments déterminants dans le plaisir ressenti par les joueurs. Il ne
s'agit pas seulement de tuer son adversaire, mais de faire preuve du
maximum de malice, de varier les angles d'attaque, d'utiliser toute la
panoplie du tueur professionnel et de donner au meurtre une certaine
beauté dans l'inéluctable. Par ailleurs, le joueur adoptera les mêmes
tactiques qu'il se trouve du côté des terroristes ou des antiterroristes, et rien dans le contexte du jeu ne fait d'un camp les bons
et de l'autre les méchants.
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Counterstrike et Strike Force
Doit-on craindre que ce genre de jeu excite les tendances violentes ?
Trop facile. La violence dans ce type de jeu est très graphique, et de
plus en plus réaliste, mais dans le même temps le dépaysement et le
changement d'identité ressenti par le joueur est de plus en plus fort,
et c'est avant tout le but recherché. On aime d'autant plus la violence
dans un jeu vidéo qu'on la craint dans la réalité. Ainsi, le joueur
prend-il conscience de l'horreur vécue par les victimes de la violence
qu'il vit par procuration. Au final, plus le jeu en montre, moins il
banalise, et les jeux réalistes qui permettent de gagner en se
montrant déraisonnable et irresponsable vis à vis de la violence sont
en voie de raréfaction et de désuétude.
Cette philosophie réaliste de jeu, née dans les LAN parties et les
MODs pour FPS (autrement dit chez les joueurs plutôt que chez les
éditeurs), peut désormais se généraliser au jeu vidéo dans son
ensemble, puisque les jeux multi-joueurs peuvent aussi se pratiquer
en solo contre des partenaires dirigés par l'ordinateur. Par ailleurs, les
jeux réalistes comme ceux précédemments cités ne sont qu'un
exemple de ce qui se pratique sur les consoles et micro-ordinateurs.
Le reste du temps, la rêverie et l'évasion pure restent les principales
moteurs de la motivation des joueurs. Une telle analyse ne peut être
faite qu'après avoir pratiqué les différents styles de jeux vidéo et
fréquenté des joueurs. Il s'agit donc de bien savoir de quoi l'on parle
avant de condamner, mais hélas le débat sur la violence dans les jeux
vidéo met trop souvent face à face des censeurs qui n'y connaissent
rien et des joueurs qui refusent toute remise en question de l'objet de
leur passion.
En revanche, les FPS orientés multi-joueur, Counter-Strike en tête,
posent un problème très concret : Leur pratique prend énormément
de temps. Nécessitant d'être joués en équipe et de maintenir un
niveau d'entraînement constant (sous peine dans certains cas d'être
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exclu de son équipe, et il existe des équipes semi-professionnelles qui
participent à des tournois rémunérés), ils poussent leurs adeptes à
certains extrémités. Dans un premier temps, ils peuvent délaisser tout
autre forme de jeu vidéo, passant parfois à côté de l'essentiel du
média, puis finiront par augmenter leurs temps de jeu au détriment
de leurs études, de leur travail, de leurs amis, voire même de leur
sommeil. Il n'est ainsi pas rare pour certains joueurs se lancer dans
un réseau du samedi après-midi au dimanche soir sans interruption,
ou pour les plus jeunes de sécher l'école en semaine pour se rendre
au cyber-café. Dans ces cas extrêmes, le jeu vidéo peut à terme être
un facteur d'exclusion sociale, non pas à cause de son contenu mais
par la façon dont sa pratique est gérée par le joueur et son entourage
(ou ses parents, s'il est mineur). Quand aux dégâts qui peuvent être
observés sur sa perception de la réalité... tout cela est bien délicat à
évaluer, et si l'on s'y risque on entre dans des considérations
sociologiques d'ordre général qui sont à des lieues du sujet qui nous
intéresse.
Jeux violents : Exemples récents célèbres
Max Payne
Un des derniers jeux en date à avoir subi une vraie censure est Max
Payne, qui s'est vu interdire de vente en Allemagne. Même si la
violence montrée dans le jeu n'est pas ce qu'on a vu de plus gore, il
faut reconnaître que les personnages possèdent une véritable identité,
et que l'implication morale du joueur est tout autre que dans les deux
précédents titres. Les massacres montrés peuvent donc être perçus
comme éprouvants. En fait, c'est surtout l'ambiance glauque et
malsaine distillée par le jeu, héritée d'un certain cinéma dont les
développeurs se sont inspirés, qui peut mettre mal à l'aise. L'histoire,
elle, est finalement tout ce qu'il y a de plus moral, même si la
rédemption du héros n'est pas au programme, et le succès du jeu
tient surtout à sa réussite technique et ses trouvailles ludiques.
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SWAT 3
Plus intéressant (dans le cadre de ce dossier) est Swat 3, jeu hyper
réaliste dans lequel le joueur fait partie d'une unité d'intervention de
la police américaine chargée de stopper des malfaiteurs en surnombre
dans des conditions très dangereuses. L'intérêt du jeu réside dans
une approche lente en terrain conquis par l'ennemi et dans la maîtrise
de son unité et des divers équipements, mais à la fin, on est tout de
même héberlué de voir que la mission est réussie quand les
malfaiteurs sont neutralisés, qu'ils aient été simplement arrêtés ou
tués revenant au même. Il est même possible de les abattre alors
qu'ils ont déjà les menottes aux poignets sans que la hiérarchie ne
s'en offusque dans le rapport d'après-mission. En est-il de même
dans la réalité ? Le jeu a le mérite de pousser le joueur à se poser la
question. Il pourra aussi se demander si le jeu condamne la violence
en montrant que la police peut toujours lui faire face et y mettre fin,
ou s'il en fait l'apologie en faisant du flingue le meilleur outil du
maintien de l'ordre.
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Soldier of Fortune et Kingpin : Life of Crime
Soldier of Fortune fait aussi très fort, cette fois par son rendu visuel
de la violence digne d'une série Z gore. Dans ce FPS rigolo où le
joueur incarne un policier d'élite, les impacts de balles sont rendus
avec une complaisance sanguignolente incroyable qui leur donne un
goût de revenez-y. Sous les coups de fusil à pompe, les jambes et les
bras sont arrachés, les têtes explosent, les entre-jambes sont broyés
et les méchants poussent des hurlements de douleur atroces. Il est
même possible de continuer à s'acharner sur les cadavres des
ennemis après les avoir descendus sans jamais manquer de munition.
A ce niveau de délire, le joueur ne peut prendre les choses qu'au
second degré, et les parties multi-joueurs sont à hurler de rire.
D'autre part le jeu est superficiel et finalement peu intéressant. On
n'y passera qu'un temps limité.
Citons également Kingpin - Life of Crime, qui se déroule dans la pègre
underground, et dans lequel le joueur ne rencontre que des déchêts
humains qu'il doit tabasser ou massacrer pour progresser. Le jeu
frappe surtout par ses graphismes très réalistes, ses décors
cradingues et le côté ordurier des dialogues, mais dans l'ensemble, il
n'y a pas de quoi s'en relever la nuit, d'autant que là encore on est
loin des meilleurs titres du genre FPS.
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Grand Theft Auto et Carmageddon
Reste le cas des jeux qui jouent ouvertement la carte de la
provocation et titillent la censure. On peut citer notamment les
descendants du lointain Death Race 2000 que sont Carmageddon et
Grand Theft Auto. Carmageddon propose une course en 3d lors de
laquelle il est possible d'obtenir des bonus lorsque l'on fait preuve de
raffinement dans un certain comportement destructeur : provocation
d'accidents, écrasements de piétons et animaux, carambolages... Il
s'agit d'un jeu misant avant tout sur le fun, au sujet duquel il n'y a
pas lieu de se lancer dans une analyse thématique.
Grand Theft Auto 3
Le cas de Grand Theft Auto est un peu plus complexe, et mérite un
article dédié, d'autant que c'est un des titres les plus populaires et
vendeurs de l'histoire des jeux vidéo. Là, le joueur incarne un homme
de main de la mafia ou un trafiquant de drogue débutant (le jeu est
vue de dessus dans les deux premiers épisodes, et en 3d dans le
troisième et sa suite Vice City sortis sur PS2, PC et Xbox, avec une
représentation beaucoup plus réaliste mais toujours caricaturale), et il
doit accomplir des missions pour la pègre. Tout lui est permis pour
cela, bien entendu : voler des voitures en agressant leur propriétaire,
rouler à contre-sens, écraser des piétons, dérober des véhicules de
police ou des autobus...
Le jeu trouve une grande partie de son intérêt (dont tous les joueurs
ne sont pas clients, contrairement à ce que pensent certains
censeurs) dans la diversité des méfaits et des phases d'action
possibles, différentes en fonction du comportement du joueur, mais
systématiquement portées sur la violence envers tout ce qui
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représente une certaine Amérique puritaine et impérialiste (le jeu est
développé par des Ecossais). Bien sûr, tout n'est pas impuni au sein
du jeu, et le but premier reste l'accomplissement des missions, sans
lesquelles il devient erratique, peu prenant et fatalement répétitif. Par
ailleurs, la surenchère visuelle permanente du jeu permet de se
distancier de ce qui se passe, mais les GTA figurent parmi les jeux les
plus subversifs et politiquement orientés qu'on ait vu ces dernières
années... Il est clair qu'on ne doit pas les laisser entre toutes les
mains, mais la violence y est tellement omniprésente qu'il faudrait
être irresponsable pour y laisser jouer de très jeunes enfants sans se
rendre compte de ce qu'ils y font.
Consoles : Une autre approche
La plupart des exemples précédemment cités sont des jeux sur PC,
support qui peu à peu se réduit à une clientèle portée sur le réalisme,
la complexité au premier degré des actions possibles et le jeu en
réseau. Chez les fabricants de consoles, en revanche, l'auto-censure
est un phénomène qu'on a souvent pu observer, notamment chez
Nintendo, qui cible depuis toujours le grand public et use d'une
politique commerciale inspirée de Disney, basée sur une ligne créative
sévèrement délimitée. Les jeux Nintendo, ou sortis sur des consoles
Nintendo avec la bénédiction de la compagnie, sont soumis à un
cahier des charges assez restrictif. Certains mots y sont proscrits,
certaines situation aussi, et de multiples témoignages de développeurs
tiers viennent confirmer qu'il n'est pas toujours facile de réspecter
toutes les conditions.
Super Mario Bros 3 et Zelda 64
Les hits de Big N que sont les séries Mario et Zelda ne doivent
cependant pas seulement leur aspect pacifique à cette politique. Leur
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créateur, Shigeru Miyamoto, est un rêveur indécrottable qui préfère
depuis sa plus tendre enfance la verdure et les forêts aux ambiances
urbaines. La non violence est une composante fondamentale de son
univers, et pas une limite créative, et elle a fait de nombreuses
émules. S'inspirant plus ou moins de cette vision, les éditeurs
japonais (Taito, Capcom, Jaleco, Data East) ont pendant longtemps
réalisé des jeux passionants et difficile totalement dénués de toute
violence, mettant en scène des créatures sympathiques dont aucune
ne meurt, et revêtant un aspect audiovisuel coloré et chatoyant,
digne d'un dessin animé pour petits enfants.
Rainbow Islands
Ce courant créatif dans les jeux vidéo, baptisé "cute-games", a eu son
heure de gloire (au niveau mondial) à la fin des années 80,
notamment dans les salles d'arcade. On peut raisonnablement estimer
qu'il a su répondre à un besoin, les joueurs étant lassés de ne rien
faire d'autre qu'abattre bêtement des ennemis, qu'ils aient été
extraterrestres ou non. Cette époque est aussi celle ou les consoles
de jeu, après de longues années de purgatoire, sont revenues au
premier plan, et pendant longtemps, les cute-games et leurs dérivés
(Sonic, Bubble Bobble, Mario, Wonder Boy, Alex Kidd, Bonze
Adventure, Puzzle Bobble, Ray Man...) en resteront les stars.
Aujourd'hui, le public auquel les consoles s'adresse vieillit, et on y
retrouve beaucoup de jeux initialement sortis sur PC. Cela ne veut pas
dire que tout est permis, puisqu'on a vu Microsoft intervenir auprès
des développeurs de Fable (un des jeux phare de la Xbox qui table
sur une
liberté
d'action jamais
vue),
pour que certains
comportements meurtriers y soient proscrits. Nintendo de son coté
continue à créer des jeux à l'atmosphère onirique, colorée, dépourvue
de tout pessimisme démagogique.
Les jeux d'arcade : Le cas Mortal Kombat
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Mortal Kombat et Street Fighter 2
Aussi incomplet soit-il, cet article se doit d'évoquer Mortal Kombat. Au
début des années 90, les salles d'arcades font à nouveau le plein de
clients après quelques années de baisse de régime. Le responsable du
phénomène est Street Fighter 2. Si le premier épisode de ce jeu de
combat en 2d signé Capcom avait connu un succès modéré, le
second, grâce à un design qui figure certainement dans les 10 plus
gros coups de génie de l'histoire des jeux vidéo, est un triomphe
mondial quasiment sans précédent. Ainsi, si les salles d'arcade sont à
nouveau pleines, c'est surtout grâce à ce jeu, qui figure parfois en dix
exemplaires dans la même salle. Un seul concurrent va alors parvenir
à se faire remarquer : Mortal Kombat, de Midway.
Alors que le hit de Capcom possède des graphismes inspirés du
dessin animé japonais, des personnages au look délirant et des
couleurs vives, Mortal Kombat prend une option contraire en montrant
des personnages digitalisés incarnés à l'origine par des acteurs. A
l'exception d'un monstre à 4 bras, ils ont tous un aspect humanoïde
qui renforce l'identification. Les impacts des coups se soldent par des
gerbes de sang, alors que dans Street Fighter 2 le gore est laissé de
côté. A la fin des combats apparaissent les Fatalités, combinaisons de
mouvements qui permettent de tuer l'adversaire de façon horrible et
complètement gratuite, puisqu'à ce moment du jeu, il est KO et le
combat est censé être déjà gagné. Rapidement, Mortal Kombat trouve
sa clientèle, désireuse de se démarquer en optant pour un jeu
subversif, et devient un hit alors que les joueurs du monde entier ne
jurent que par un autre titre. Sur consoles, Mortal Kombat est lavé de
son sang, mais se montre tout de même plus méchant que
l'adaptation de Street Fighter 2, et les deux jeux obtiennent un succès
équivalent. Il s'agit d'un des rares exemples de jeu qui doive en
grande partie son succès à se violence, même si encore une fois on
peut être certain que s'il n'avait pas été particulièrement agréable à
jouer et d'une parfaite maniabilité (moins riche que Stree Fighter 2
mais plus accessible), les joueurs s'en seraient rapidement détournés.
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Il faut tout de même préciser que les jeux d'arcade ont toujours été
le domaine de prédilection de la violence vidéo-ludique. Le
phénomène est du à la fonction sociale même du support, qui se
pratique souvent dans un bar ou une salle spécialisée, soit hors du
domicile parental pour les adolescents en quête d'un peu d'interdit.
Par ailleurs, le jeu d'arcade est par définition rapide, simple et
privilégie les sensations audiovisuelles. Il cherche à en mettre plein la
vue pour que le joueur ne remarque pas trop la courte durée de la
partie et l'argent engagé. Les ambiances violentes et destructrices
sont donc souvent au rendez-vous.
House of the Dead 2 et Operation Wolf
Les exemples sont innombrables, mais on se souviendra notamment
de titres comme House of the Dead (tir au lightgun sur des mortsvivants), Lethal Enforcers (tir au lightgun toujours, cette fois sur des
malfaiteurs), Operation Wolf (tir à la mitrailette en plein champ de
bataille), Splatter house (beat'em'all ou le joueur incarne Jason, de la
série de films Vendredi 13) ou encore Total Carnage, qui est peutêtre le plus délirant avec ses deux héros armés de monstrueuses
mitrailleuses et qui abattent des ennemis à la chaîne.
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Total Carnage
Dans la majeure martie des cas, il s'agit d'une violence prise au
second degré, très BD dans l'esprit, et qui ne va pas bien loin dans le
traumatisant.
Conclusion
Le débat est vaste et complexe, mais il gagnerait à être ramené à de
plus justes proportions. La polémique sur la violence dans les jeux
vidéo et la censure dont ils font parfois l'objet sont souvent dus à de
mauvaises interprétations et à une certaine ignorance du sujet traité.
Car censurer les jeux vidéo, c'est avant tout refuser de faire l'effort
de les connaître. Seule certitude pour nous, les chiffres et statistiques
sur lesquelles certaines études se basent pour montrer les jeux vidéo
du doigt sont de pures foutaises qu'il convient de dénoncer avec
véhémence. L'influence des jeux vidéo sur le comportement des
joueurs ne peut réellement être quantifiée, leur évolution permanence
empêchant tout recul. Avec le temps, les exemples de personnes
ayant baigné dans ce divertissement durant de longues années se
multiplient et ne font pas forcément apparaître que de grands aliénés
(regardez nous, par exemple !). Quand aux parents qui s'inquiètent à
juste titre de ce que leurs enfants pourraient tirer des heures qu'ils
passent devant l'écran joystick en main, qu'ils se penchent un peu sur
tout ce que le jeu vidéo peut apporter de positif, et la liste est
longue.
Voir aussi dans GrosPixels :
Dossier Cinéma et Jeu Vidéo 1ere partie, notamment le passage sur
le film Brainscan.
Test de House of the Dead 2
Test de Operation Wolf
Test de Max Payne
Test de Wolfenstein 3d
Test de Doom
Test de Duke Nuk'em 3d
Test de Spycraft
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Test
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de
de
de
de
Rainbow 6
Quake I-II-III
Speedball II
Unreal Tournament
Et n'oubliez pas le site de SoLomoNK : Chasseurs de Bots
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