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Aline KELLERHALS
Promotion 1999-2002
Mémoire Infirmier
Tuteur: Mme Marlhens
INSTITUT de FORMATION en SOINS INFIRMIERS
Des centres Hospitaliers d’AVIGNON et de MONTFAVET
Mémoire Infirmier IFSI Avignon
Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
SOMMAIRE
Remerciements .................................................................................................... 2
Préambule............................................................................................................ 3
Introduction ......................................................................................................... 4
Titre 1 : Problématique pratique................................................................................ 6
Titre 2 : Historique de la mort en Occident............................................................. 13
Titre 3 : Qu’est ce que la mort ?.............................................................................. 16
I - Ma propre mort............................................................................................. 16
II - La mort de l’autre....................................................................................... 18
Titre 4 : Hypothèse .................................................................................................. 28
Titre 5 : Le rôle infirmier ........................................................................................ 29
Titre 6 : L’accompagnement ................................................................................... 30
Titre 7 : Le soignant face à ses deuils ..................................................................... 33
I - Le soignant face à ses deuils ........................................................................ 33
II - Difficultés du soignant lors de la prise en charge de personnes en fin de vie.
................................................................................................................................. 35
Titre 8 : Hypothèses d’action .................................................................................. 39
Titre 9 : Conclusion................................................................................................. 41
Bibliographie..................................................................................................... 43
Annexes
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier Mme Marlhens pour sa participation tout au long de l’élaboration de
mon mémoire.
Je tiens également à remercier Mme Constant, surveillante générale de la clinique Sainte
Catherine ainsi que toute son équipe médicale pour leur contribution à ce travail.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
PREAMBULE
Avant d’élaborer ce travail écrit sur l’accompagnement, j’ai effectué huit entretiens, ceci
pour valider l’utilité de ma démarche.
Ainsi, ces entretiens m’ont permis de définir l’orientation de mon mémoire ainsi que ses
bases, tout en essayant de répondre à la demande des équipes médicales.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
INTRODUCTION
«Mourir plus tôt ou plus tard est indifférent, bien ou mal mourir ne l’est pas».
Sénèque1
On doit tous mourir un jour et pourtant, ce moment inévitable proche de la mort
où le corps se dégrade, où le corps respire la souffrance est un moment très difficile
aussi bien pour l’entourage, que pour les équipes médicales. Quelque soit l’âge, le
sexe, la religion, ce moment est particulièrement dur pour les personnes présentes
comme pour la personne elle-même, où le regard de l’autre devient très important car
miroir de soi.
Ce passage n’a jamais été facile mais aujourd’hui il est presque caché,
l’entourage médicalise la mort pour éviter de la rencontrer par hasard ou trop souvent,
pour éviter le questionnement qui en découle sur la vie et sa propre mort. C’est ainsi
que le problème est plus ou moins détourné par la famille et l’entourage. Et la mort se
retrouve maintenant dans le milieu médical qui, n’étant pas habitué à ces situations, se
retrouve en très grande difficulté ne comprenant pas leur rôle auprès de ces gens.
Cette fin de vie est donc aussi une source d’angoisse et de souffrance en service, c’est
pourquoi des services spécifiques commencent à se développer : ce sont les soins
palliatifs. Mais ces services sont rares et souvent ce sont des services mobiles qui
interviennent ponctuellement alors que la fin de vie nécessite une prise en charge
continue. C’est donc le personnel soignant qui se retrouve face à cette mort, sans y
être forcement préparé et/ou formé.
C’est devant le comportement des soignants dans les situations de fin de vie en
service non spécialisé en soins palliatifs que j’ai décidé de faire mon mémoire sur la
possibilité d’une meilleure prise en charge des gens en fin de vie en dehors des soins
1
D’après Sénèque (vers 4 - 65 après. J.C.)
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
techniques tout en considérant les difficultés de chacun face à cet accompagnement
(ses limites, ce que ça réveille en soi) et les envies du mourant.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
TITRE 1 :
PROBLEMATIQUE PRATIQUE
Après plusieurs stages à l’hôpital général, tous services confondus, j’ai pu
constater que la mort est un sujet tabou : il ne peut être associé à la médecine moderne
où tout est mis en œuvre pour repousser cette mort. Face à ces situations de plus en
plus fréquentes, où le soignant doit travailler avec des mourants, les équipes médicales
se trouvent en très grande difficultés voir en très grande souffrance.
Le personnel est souvent incapable de prononcer le mot «mort» entre eux,
comme si de dire ce mot ou encore «il va mourir» pourrait provoquer un drame. Ou
peut-être que de dire ces mots signifie pour le soignant qu’il ne peut plus être utile au
près de ce mourant, et pourtant même s’il n’existe plus de guérison, il reste encore
beaucoup de choses à faire auprès de ces personnes.
Je me souvient au cours d’un de mes stages en deuxième année, où je suis
arrivée à 7H30 en service sans avoir eu de relève, j’ai donc pris le train en route, c’est
à dire que j’ai rejoint les infirmières dans le couloir pour finir le tour avec elles. Mais
voilà que arrivée devant une chambre, je vais pour taper à la porte et là l’infirmière me
dit de ne pas y aller. Dans l’incompréhension de son refus je demande pourquoi, elle
me répond que le patient n’est plus là. Pensant qu’ils l’ont muté dans un autre service,
je lui demande où il est, enfin me répond-elle, il est parti. Mais parti où ? Devant mon
insistance et mon incompréhension, une aide-soignante me murmure à l’oreille très
discrètement que cette personne est morte. Cela est si difficile de dire la vérité au lieu
de chuchoter dans les couloirs ces quelques mots. D’ailleurs cette mort est une fin
inévitable pour tout le monde, pourquoi l’éviter alors quelle se déroule de plus en plus
souvent dans les institutions médicalisées.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Si cette mort fait peur dans notre société, c’est qu’il faut répondre à certains
critères pour réussir qui sont : la beauté, la jeunesse, le dynamisme… tout ce qui peut
s’opposer à la vieillesse et à la mort. C’est pourquoi aujourd’hui la déchéance du
corps humain et la mort sont cachés dans les institutions.
Sachant que la mort est inévitable pour chacun, pourquoi autant de difficultés
pour les soignants? La mort n’est pas un échec de la science, par contre notre
comportement est un refus de l’être humain d’accepter sa mort.
Ce sujet est donc peu abordé dans ces lieux où tout est possible dans la guérison,
mais très difficile dans l’accompagnement de la mort. Le patient mourant est souvent
évité, on ne sait jamais dans quel service l’installer, comment être avec lui, que lui
dire, comment se comporter avec son entourage… Tout ceci pouvant être source de
souffrance, de mal-être, car le personnel se sent mal à l’aise, en échec, ne comprend
pas son rôle dans ces situations là.
Le soignant n’arrive pas à trouver sa place. Mais comment se comporter pour
apporter quelque chose à ces personnes? Que peut-on leur apporter réellement?
Toutes ces nouvelles questions et difficultés peuvent s’expliquer par l’évolution
de la mort au cours de ce dernier siècle, par le deuil devenu presque inexistant, par
l’absence de formation lors des études infirmiers où le sujet est peu, voir non abordé.
C’est ainsi que la majorité des soignants et futurs soignants se retrouve incapable de
gérer ces situations, source d’angoisse et de bouleversements intérieurs. Ce qui
continue de renforcer le problème actuel de l’accompagnement en fin de vie dans les
institutions médicales.
C’est face à ce malaise croissant, que j’ai décidé de faire un travail écrit pour
réfléchir sur la façon de se comporter en tant que soignant et être humain devant ces
personnes toujours vivantes malgré leur mort imminente.
De plus du côté du malade, l’approche de la mort déclenche une angoisse
importante mais cette angoisse peut être modifiée dans son intensité selon la prise en
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
charge offerte par l’entourage. La considération de l’être en fin de vie peut modifier la
sensation d’exister du mourant, car le regard de l’autre, son comportement, renvoie à
la personne agonisante ce qui reste de lui, comment on le voit. C’est pourquoi il est
important d’entendre ce que le mourant a à dire, prendre en compte ses dires et
adapter son comportement à la demande de cette personne.
Comme j’ai eu l’occasion de le constater au cours d’un remplacement de nuit
dans un service de cancérologie, où un patient n’arrêtait pas de sonner pour se
plaindre de difficultés respiratoires et d’impossibilité de s’endormir. Lorsque ce fût
moi qui répondit à la sonnette, je pris le temps de lui demander ce qui l’empêchait de
dormir. Et là, dans une violence verbale qui exprimait très bien l’angoisse de cette
personne, elle me demande si j’ai peur de mourir ? Estomaquée par la question, je me
suis assise sur son lit, j’ai eu un temps de silence, et puis j’ai décidé de lui répondre
ouvertement ce que je pensais de la mort, en lui expliquant bien que ceci est mon
point de vue. Puis je lui est demandé le sien, et c’est ainsi que l’on a discuté un
moment sur le thème de la mort et de sa mort. Ensuite cette personne n’a plus sonné
de cette nuit et le lendemain elle m’a dit qu’elle avait réussi depuis longtemps à
dormir plusieurs heures d’affilées dans la nuit.
Aujourd’hui encore je m’étonne d’avoir réussi à parler d’un sujet pareil avec
un mourant, mais en prenant de plus en plus de recul, je réalise que cette conversation
n’aurait pas eu lieu si je n’avais pas écouté cette personne. Ce n’est pas ce que j’ai dit
qui a calmé ce mourant, mais simplement le fait qu’il est pu verbalisé ce qui
somatisait dans ces troubles respiratoires et dans son insomnie. Mon opinion lui
importait peu, il voulait juste parler de sa mort.
L’écoute est donc essentielle dans l’accompagnement. Il faut savoir entendre
la souffrance du mourant (qui peut parfois faire désirer la mort, plus vite) car elle
produit une perte du contrôle de soi, physique et psychique. Le corps échappe à la
volonté et les multiples points de douleur évoquent l’anéantissement de son unité, la
conscience se retourne sur elle-même. Ce qui favorise le clivage du mourant avec son
environnement et anticipe sa séparation définitive avec le monde des vivants. D’où
l’importance de prendre en charge la douleur de la personne en fin de vie pour lui
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
éviter cette coupure avec son entourage, ainsi l’absence de la douleur lui permet
d’optimiser ces derniers moments, être toujours dans la relation avec l’autre.
Après la reconnaissance de cette souffrance et sa prise en charge, il faut
organiser un soutient pour une relation d’aide.
La communication non verbale sera au premier plan, les mots devront être
utilisés pour dire l’implicite de cette relation, c’est-à-dire ce que le patient ressent sans
l’exprimer directement. Ne surtout pas se cacher derrière la fonction de soignant qui
ferait écran à une relation de face à face. La dimension médicale rencontrera alors la
dimension proprement humaine de cette relation en fin de vie. Cette dimension
humaine est très difficile car elle réveille beaucoup de choses en soi en tant qu’humain
et plus qu’en tant que soignant, selon le vécu de chacun et de son cheminement
personnel.
De plus être malade, c’est un peu devenir « objet » de soins, une « chose »
médicalisée, technicisée. Il faut donc faire attention, le soignant ne doit pas profiter de
cette situation, en utilisant un dialecte médical incompréhensible pour la personne
mourante. Le soignant ne doit pas se cacher derrière sa fonction, sa blouse blanche en
restant inaccessible au mourant. Dans l’accompagnement ces comportements sont à
éviter, l’être humain ne doit pas se masquer derrière un rang déterminé par sa présence
à l’hôpital. Avant d’être mourant ou soignant, une personne est humaine. Cette
humanité est nécessaire dans le relationnel, base de l’accompagnement. Le mourant
n’est pas un objet de soins, c’est une personne qui a vécu, qui a des souvenirs, qui a
des envies que le soignant doit entendre et prendre en compte. Ne pas être présent que
pour poser des perfusions, remplir des dossiers ou autres. Le soignant doit donc
s’adapter au mourant, se mettre à son niveau pour mieux l’accompagner et mieux le
comprendre.
Se retrouver en institution pour y mourir, c’est perdre son environnement
habituel, s’éloigner de son entourage familial, perdre son rôle social ; en fait
abandonner beaucoup de choses qui donnaient un sens à sa vie. Ces pertes de rôle
s’additionnent aussi au fait de perdre le contrôle de son corps face à l’approche de sa
mort. Lorsque le corps ne répond plus, il y a une réactivation de l’angoisse de mort car
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le corps dépendant, évoque la disparition de son unité donc de soi. Eprouver cela
déstabilise l’identité et les limites du « Moi ».
La période autour de la fin de vie est très difficile pour le mourant, car il existe
pendant cette période beaucoup de raisons pour que le « je » existentiel soit détruit,
d’où la possibilité pour la personne de vouloir mourir avant, face à cette sensation de
non existence face à l’autre.
Ces raisons qui font que le « je » existentiel soit modifié sont souvent une
succession de deuils par rapport à ce que le mourant était, modifiant son sentiment
d’être, donc d’exister.
9 Le deuil de sa fonction professionnel et sociale, perte de son rang
économique, de son importance dans le fonctionnement de la société,
perte de son utilité.
9 Le deuil de son avenir, de ses souhaits qui rendent difficile le sentiment
d’exister.
9 Les deuils matériels de toutes les acquisitions que l’on peut faire au
cours d’une vie (maison, meubles, animaux…).
9 Un des deuils les plus difficile, qui consiste à faire un deuil de sa
fonction au sein de sa famille, laisser la main à quelqu’un d’autre,
autoriser les autres à continuer sans nous. Accepter que l’autre continue
de vivre sans soi est difficile, mais c’est aussi continuer d’exister à
travers l’autre.
9 De plus il s’associe le deuil de son apparence physique, la maigreur, la
pâleur modifiant le regard de l’autre sur soi. Or le regard de l’autre est
miroir de ce que je suis à ce moment là, de comment il me voit, le
changement de ce regard est très difficile à accepter. Le regard de
l’autre est modifié car il ne reconnaît plus la personne qu’il a en face de
lui. Ce regard peut-être teinté de peur, de peine, de souffrance,
d’angoisse, de pitié… qui font que le patient comprend qu’il n’est plus
ce qu’il était aux yeux de son entourage. Le regard de l’autre me fait
exister, si ce regard change, je n’existe plus ou plus comme avant.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Il faut donc rappeler au mourant par notre comportement, notre attitude qu’il est
toujours vivant.
Il ne faut pas oublier la famille, qui elle aussi a besoin d’un soutien pour
accompagner au mieux le patient à l’approche de sa mort, participer aux soins de
confort et de bien être de la personne. De plus la présence de la famille pourra
diminuer la sensation de solitude que le mourant peut ressentir face à sa mort, qui
approche, surtout lorsque celle-ci se déroule en milieu médicalisé.
Car en milieu hospitalier, la solitude est plus importante du fait de la durée des
soins écourtée, du temps de visite, du manque de personnel, de la peur du relationnel
avec un mourant, etc. …Cet isolement est déjà très important dans notre société, où
bien souvent on ne connaît pas son voisin, on ne voit pas l’agression qui se passe juste
devant soi. On évite d’instaurer des relations qui pourraient être gênantes ou
envahissantes. Alors comment ne pas cacher la mort ? C’est ainsi que la mort se
retrouve isolée pour éviter qu’elle gène, qu’elle questionne. Le mourant se voit
hospitalisé, loin de son domicile, hors de ses repères, de ses habitudes. Loin de son
entourage, de son histoire gravée dans ses meubles, de ses souvenirs. Cet isolement
induit une solitude, qui se retrouve renforcée par les règles des institutions médicales
et le comportement de son personnel. Des éléments qui sont à l’origine d’une absence
de communication donc de relationnel. Alors que le mourant au contraire recherche le
contact car il en a besoin pour se sentir toujours vivant.
Donc dans notre fonction de soignant, il est important de mettre en place avec
le mourant des moments privilégiés pour garder un contact relationnel nécessaire
pour diminuer les angoisses existantes face à la mort. Et aussi vérifier s’il existe
encore un contact avec l’entourage familial, pour ainsi éviter un isolement trop
important.
Il est donc très important lors des fins de vie pour le soignant d’être présent
face au mourant, d’être à son écoute, de l’assister dans ces derniers instants. Dans bien
des cas le toucher permet aussi, pour la personne de prendre conscience que son corps
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
est toujours vivant, malgré sa déchéance il peut encore être massé et faire partie de la
relation avec le monde extérieur.
De plus le soignant doit rester à l’écoute de ses peurs, de ses angoisses qu’un
accompagnement réveille en soi. Pour trouver un équilibre et être disponible à l’autre.
Ainsi il est possible de tendre vers un accompagnement utile pour le mourant et moins
angoissant pour le soignant, c’est à dire un accompagnement efficace.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
TITRE 2 : HISTORIQUE DE LA MORT EN
OCCIDENT
Avant le Moyen Age, les mourants sentaient la mort venir par des signes
naturels et des convictions intimes. On attendait cette mort, on prenait ces dispositions
face à elle. Cela restait une chose simple et familière. Le déroulement de fin de vie
était à cette époque un regret rapide de sa vie, des rappels discrets, puis un pardon de
son entourage, une absolution et ensuite l’attente de cette mort. La mort s’attend, et
elle s’attend en public, entouré des siens.
Au Moyen Age, la mort la plus redoutée était la mort à l’improviste, celle qui
ne laisse pas le temps de se préparer. Une « bonne mort » était celle que l’on sentait
venir et pour laquelle on avait eu le temps de se préparer. L’espoir et la foi dans l’audelà faisait de la mort un passage et non une fin en soi. L’assistance au moribond
soulageait son angoisse dans le même temps qu’elle anticipait pour l’entourage le
deuil à venir. La religion à cette époque convergeait pour donner au mourir le sens
d’un acte public : « L’homme subissait dans la mort l’une des grandes lois de
l’espèce, et il ne songeait ni à s’y dérober ni à l’exalter. Il l’acceptait simplement avec
juste ce qu’il fallait de solennité pour marquer l’importance des étapes que chaque
vie devait toujours franchir».2
A cette époque les personnes sont aussi bien familiarisées avec les morts,
qu’avec leur propre mort. Cela peut-être expliqué par l’acceptation de l’homme à
l’ordre de la nature, sans songer à y échapper. Accepter sa mort et la mort de l’autre
pour marquer l’importance de l’étape à franchir, donnant une notion de « bonne
2
ARIES (Philippe). Essais sur l’Histoire de la mort en Occident du Moyen Age à nos jours. Edition du
Seuil, 1975, 223 pages.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
mort » pour racheter ses fautes (notion d’idéologie religieuse). La mort est vécue
comme un destin collectif alors qu’à partir du XVIII° siècle, la mort est vécue
individuellement.
A partir du XVIIIe siècle, les médecins se plaignent de cet entourage trop
présent au moment de la mort publique, et demandent par mesure d’hygiène que le
mourant reste seul ou avec un entourage restreint, mais avec une présence médicale
plus importante. Ce changement provoque un passage de l’idéologie religieuse à une
idéologie scientifique. La mort est donc dévalorisée et présentée comme ce qui résiste
à la science. La mort est un échec par rapport aux promesses de vie et ces
attachements passionnés.
C’est à partir de ce moment là, que la mort est considérée comme une
transgression qui arrache l’homme à sa vie quotidienne pour un monde cruel, violent
et irrationnel. Ce qui explique l’apparition des émotions au moment de sa propre
mort : les cris, les pleurs, les râles, l’agitation…Pour aboutir au XIX°siècle, à une
mort cachée au mourant ; à cause de toutes ces émotions et réactions possibles que le
mourant peut exprimer à l’annonce de cette mort imminente. La vérité fait question :
avant on naissait dans les choux, aujourd’hui on meurt dans les jardins ou en voyage.
De plus au XXe siècle, la mort est escamotée de la vie sociale ; elle devient
privée et solitaire, écartée du monde des vivants. On l’espère rapide, sans souffrance
et le plus tard possible (tout le contraire de la période du Moyen Age). La mort semble
presque être devenue taboue, les causes de cette désocialisation les plus marquantes
sont :
9 L’urbanisation de plus en plus accentuée, avec ses structures et ses
modes de vie de plus en plus éloignés de la nature et de la religion.
9 Le passage de la famille élargie à la famille nucléaire, voire
monoparentale, qui isole davantage les individus, et qui est renforcé par
l’éclatement géographique important des familles. Ainsi que le travail
de la femme.
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Mémoire Infirmier IFSI Avignon
Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 L’évolution des pratiques et coutumes mortuaires, la famille délègue
souvent les actes des rites funéraires ( toilette du corps, habillage… ) et
d’autres rites comme la veillée funèbre, le cortège, le repas des
funérailles qui tendent à disparaître. La mort ne fait plus partie de la
réalité socialement partagée, ce qui a comme conséquence une perte de
repères, de modèles de conduite devant la mort et par conséquence un
malaise plus grand.
9 L’évolution de la technique médicale qui augmente de plus en plus la
faisabilité du grand rêve de l’homme qui est l’immortalité. Que la
médecine arrive à vaincre les maladies, la vieillesse et la mort son des
pensées raisonnables pour bon nombre de nos contemporains.
Pour arriver de nos jours à une mort plus souvent en institutions, que entourée
des siens chez soi. L’hôpital a dû faire face à cette nouvelle responsabilité sans y être
préparé, c’est ainsi que le milieu médicalisé s’est arrogé le « mourir ». La mort en
service incite à la réflexion sur la qualité du « mourir », de l’accompagnement du
malade en fin de vie, de la gestion de la douleur, du nouveau rôle du personnel
médical… autant d’éléments qui sont à l’origine d’une nouvelle exigence de la
médecine et du corps médical.
La mort est devenue technique, pour refouler ses sentiments et leurs
expressions. C’est ainsi que pour contribuer au bonheur collectif de la société les
deuils sont de moins en moins respectés dans leur durée et leur intensité. La vie
aujourd’hui ne nécessite que du bonheur, de la joie de vivre, de la jeunesse éternelle.
La mort a perdu sa place imminente que la coutume lui a reconnu pendant
longtemps, pour aujourd’hui paralyser, inhiber les réactions de l’entourage familial et
médical.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
TITRE 3 : QU’EST CE QUE LA MORT ?
I - MA PROPRE MORT
Je ne sais pas où ni comment je vais mourir, mais par contre je sais comment je
ne voudrais pas mourir c'est-à-dire : je ne peux supporter de penser mourir dans
d’atroces souffrances et seule de façon anonyme, avec le sentiment d’abandon comme
si j’étais déjà inexistante, plus froid, de noir obscur qui se refermerait petit à petit sur
moi parce que le regard de l’autre me fuit, m’évite, a peur de moi. Parce que si la mort
doit prendre son temps à venir je préférerais être accompagné, avoir quelqu’un qui
m’écoute, qui me tienne la main quand j’en éprouverais le besoin pour éviter de me
dire que je suis déjà morte pour autrui avant ma mort parce que les autre m’évitent (en
incluant aussi bien ma famille, que mon entourage et l’équipe soignante).
Seule c’est être déjà morte puisque l’on existe à travers l’autre : sans l’autre je
ne suis pas ou je ne suis plus, c’est le besoin de se raccrocher à la vie de l’autre alors
que la mienne me glisse entre les doigts provoquant en moi beaucoup d’angoisse.
Si je ne peux plus contrôler ma fin de vie je peux encore me rassurer en
constatant que des gens s’intéressent encore à moi et que pour eux la vie continue
normalement. Le monde que chacun se crée où tout est prévu et anticipé est
complètement détruit, remis en question face à sa mort. C’est pourquoi il est important
de se dire que pour les gens qui sont autour de nous (aussi bien sa famille que
l’entourage médical) rien ne change, la vie continue pour eux.
Par contre si ma mort doit être rapide sans que je puisse avoir le temps de m’en
apercevoir cela m’importe peu d’être seule ou accompagnée.
Mais en général on sent venir la mort, c’est pourquoi je pourrais difficilement
rester seule dans une pièce blanche, épurée non personnalisée, à attendre cette mort
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Mémoire Infirmier IFSI Avignon
Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
angoissante, incertaine ; pourquoi l’attendre avec en plus un sensation d’abandon du
reste du monde?
Pourquoi ne pas avoir une personne avec qui je pourrais parler sans crainte de
mes peurs, pleurer en sa compagnie pour ainsi avoir encore le sentiment d’être
toujours vivant à travers l’intérêt que l’autre me porte. Si il n’y a personne avec qui
partager ces derniers moments, cela doit rendre la fin de vie encore plus difficile et
longue ce qui peut expliquer le désir de certaines personnes à vouloir voir arriver la
mort plus vite car les derniers jours ne peuvent être appréciés à leur juste valeur.
Peut-être est-ce inconsciemment une volonté d’abandonner ce monde avant que lui
nous abandonne en nous ignorant, et mourir avec le sentiment d’être encore vivant
dans le cœur de l’autre ?
Je complèterais donc la phrase de Sénèque par « mourir seule ou accompagnée
n’est pas indifférent ».
C’est en réfléchissant sur ma propre mort et en ayant pu constaté certains
comportements de soignants à l’hôpital, que j’ai eu envie d’aller plus en profondeur
dans mon questionnement sur l’accompagnement.
Pour réussir à trouver un compromis entre ma future fonction de soignante,
mon état d’être humain mortel, l’accompagnement que la personne mourante désire et
l’accompagnement que je suis capable d’offrir selon le moment.
Ce qui est faisable dans la réalité de tous les jours avec les moyens matériaux
et humains propre à chaque service non spécialisé en soins palliatifs. De quelle utilité
peut être le soignant face à la mort ?
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Mémoire Infirmier IFSI Avignon
Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
II - LA MORT
DE L’AUTRE
II.1 - La mort
A ce jour, nous participons à une utopie, un rêve qui essaie de rejeter la mort
dans l’inhabituel. Les examens complémentaires remplacent la clinique, les médias et
le public veut croire en la toute puissance de la médecine. Car la médecine se veut
scientifique en se déshumanisant.
A l’hôpital, les services se distinguent en longs ou moyens séjours, en soins
intensifs, en soins palliatifs pour cacher la tristesse, la misère, la chronicité et
l’incurabilité. La morgue est toujours dissimulée au fond de l’institut médical, prélude
à de discrets enterrements qui ne risquent plus guère d’encombrer les rues.
Pourtant le milieu médical reste confronté tous les jours à l’angoisse de la mort
sous toutes ces formes : suicides, morts rapides après de graves agressions ou
accidents de la route, phases terminales de cancer…
Malgré la mortalité de l’homme, il est très difficile de définir la mort car elle
n’est pas scientifiquement objectivable. La mort reste dans le domaine « des ultra
choses » de Wallon3 qui se prête à tous les fantasmes et à toutes les peurs. On parle de
subjectivité car l’homme a besoin d’avoir des représentations de la mort, qu’il intègre
dans son système de pensée (vie après la mort, notion de paradis, de nirvana…) mais
en même temps, il existe des interdits dans notre société pour des pensées aussi
irrationnelles.
Il est important de voir la mort comme une réalité possible, permanente, à
envisager pour soi et autrui, sans être un spectacle ou une entrave à la vie.
Il faut voir la mort comme structurant une nouvelle vie, une renaissance pour
celui qui meurt en fonction de ses croyances religieuses et aussi pour ceux qui restent.
La mort est comme un but organisateur, un repère fondamental car il représente
l’aboutissement de l’existence.
C’est un fait moderne de ne pas donner d’importance à la mort, elle est
banalisée (dans les médias où les informations sont violentes, les meurtres de plus en
3
Le deuil des accompagnants. ETUDES SUR LA MORT. L’esprit du temps, 1999, n°116, p153.
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Mémoire Infirmier IFSI Avignon
Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
plus visibles à la télévision). Voir la mort à la télévision ne gène personne, mais chez
soi cela pose plus de problèmes, car chacun a ses propres représentations et ses
propres attitudes face à la mort. Individuellement les images de la mort sont
ambivalentes, oscillantes entre l’apprivoisement et la répulsion, la paix et la
souffrance.
Les attitudes sont difficiles à apprécier face à la mort, car de multiples facteurs
interviennent, en particulier l’âge et ce que l’on a vécu. Au moment de mourir ces
attitudes changent souvent et irrégulièrement, car il est difficile de garder un même
comportement face à sa mort. On ne peut repérer une bonne façon de mourir pas plus
qu’il existe de bonne façon de vivre.
Il est donc important de relever ces différents changements d’attitudes et bien
les entendre pour pouvoir les accepter. Et alors offrir un accompagnement le plus
adapté possible.
Il est important de constater, que face à sa mort et sa prise de conscience une
relecture de sa vie se fait de façon plus ou moins évidente selon les gens. C’est à dire
que le mourant prend conscience de ses limites, remet de l’ordre dans ces souvenirs, se
remémore les situations passées en les restituant ou en leur donnant un sens par
rapport au présent ou à leur mort proche. Ceci est un travail d’adaptation à sa
condition d’être mortel, il peut parfois échouer ou être particulièrement difficile. C’est
dans ces cas là, qu’il est possible de demander la participation d’un thérapeute ou
l’aide d’une tierce personne pour faciliter ce processus.
II.2 - La mort pour le mourant.
Le docteur E. Kübler-Ross, pionnière en matière d’accompagnement, a décrit
plusieurs phases dans l’approche de la mort4. La description de ces états permet une
meilleure compréhension du langage du malade mourant et met en évidence
l’importance de l’aspect relationnel dans la fin de vie.
4
MANOUKIAN (A.) & MASSEBOEUF (A.). La relation soignant soigné. Paris / Lamarre ; 1995, 157
pages.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Le premier état affectif décrit est la dénégation c’est à dire le patient refuse
l’éventualité de sa mort, parfois de la gravité de sa maladie. Cette dénégation permet
d’atténuer le choc de la révélation. Cet état cède assez rapidement pour laisser place à
la colère due à l’émergence des questions : « Pourquoi moi ? Qu’est ce que j’ai fait
pour mériter ça ? ».
Ensuite l’état du marchandage se met en place : d’une part avec les habitudes de
vie (comme je ne fumerais plus), d’autre part avec les soignants comme vous allez me
soigner pour que je guérisse, et parfois même avec la religion comme promettre une
foi sans faille s’il guérit. Suivie de l’état de dépression qui correspond à un travail
de deuil anticipé de sa vie, ce travail de deuil varie selon la situation familiale et
sociale de chaque patient. L’intensité de la dépression dépend de ce que le patient
laisse derrière lui (enfants en bas âge, un conjoint…). Il tente d’arriver à une certaine
réconciliation avec lui-même. Le travail de deuil sera donc sensible à l’aide procurée
par l’entourage, tant médical et paramédical que familial. Une nouvelle appréhension
du temps se fait alors au jour le jour, chaque journée garde une valeur irremplaçable
et c’est ainsi que dans les meilleurs cas on arrive à l’acceptation. Cette acceptation
équivaut à un détachement progressif du monde qui permet une mort plus sereine.
L’ordre de ces étapes dans le vécu du malade en fin de vie n’est pas rigide, il y a
souvent des aller-retours d’un état à l’autre. Mais ce qui est essentiel à retenir, c’est
que l’acheminement vers l’acceptation nécessite la participation des autres.
Vouloir partir «en règle», en laissant une image de soi acceptable, c’est vivre
encore à travers l’autre ou mieux survivre dans la mémoire des autres. Faut-il qu’il y
ait ces autres ? Partir sans rien laisser derrière soi (famille, travail, amis, souvenirs …)
est synonyme d’une mort totale et donc d’autant plus intolérable.
Toute cette évolution d’état vers la mort, est entrecoupée de moments d’espoir et
d’illusions qu’il nous faut respecter. La multiplicité des sentiments extrêmes du
malade rencontre ceux de son entourage familiale et professionnel, créant ainsi des
liens favorables à un accompagnement.
Malgré ces différentes étapes, au final, c’est à dire juste avant la mort, il existe
un passage très difficile qui est l’agonie du mourant. C’est une lutte douloureuse
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
marquée par le refus de mourir, une tentative désespérée de s’accrocher à la vie qui
s’en va. C’est une succession de différents états d’âme avant de vivre le départ. C’est
un combat psychique contre l’absurdité de l’issue et la souffrance générée par la
situation. L’agonie est une lutte physique pour résister à cette mort avant que celle-ci
prenne le dessus. Parfois ce passage se déroule alors que le patient est totalement
inconscient, mais si la personne est consciente alors il faut rester très présent pour elle.
C’est à ce moment surtout que les équipes, les familles doivent se relayer pour
ne pas laisser seule le mourant, tout en essayant de conserver un minimum de contact
avec lui, sachant que l’audition et le toucher sont les derniers sens à mourir avec la
personne.
II.3 - La mort pour l’entourage familial.
En parallèle, la famille passe par différentes phases par rapport à leur proche qui
est en train de mourir. Ces phases sont en faite des sentiments de culpabilité à vivre ou
survivre alors que l’autre meurt. Cette culpabilité de ne pas souffrir et de ne pas
pouvoir soulager l’autre dans son agonie, qui peut-être à l’origine d’un vécu dépressif
dans l’attente de la perte définitive de l’être cher. Cette attente est passive.
Si la communication devient trop difficile, si les soignants ne servent pas
d’intermédiaires, il arrive que la famille s’éloigne pour éviter une angoisse non
gérable et malheureusement dans ces cas là le mourant se retrouve seul.
L’impuissance, la frustration poussent parfois à la colère, à l’accusation des
soignants jugés inefficaces. Comme si la famille projetait sur les soignant leur propre
impuissance, afin d’éviter la détresse des situations où elle ne reconnaît plus celui qui
meurt tant la transformation physique et psychique est marquée.
Lorsque tout espoir de traitement est perdu ou que l’on croit qu’il ne reste
« plus rien à faire », le risque d’une coupure de communication augmente dans ces
situations. Les regards s’évitent, les mains s’échappent, la douleur morale et physique
se confondent pour s’amplifier. Si la mort survient dans ce contexte, le travail de deuil
de la famille est d’autant plus difficile.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Mais il existe aussi des situations contraires, où la famille considère le
mourant
comme
déjà
mort
pour
éviter
toutes
les
souffrances
liées
à
l’accompagnement. Cela permet ainsi de se faciliter le deuil mais ce n’est que
mensonge.
L’hôpital, dans son rapport au mourant, ressemble à la société dans son rapport
avec la personne endeuillée : tous deux gênent, ils font donc tout pour l’éviter. En fait,
la famille endeuillée se retrouve isolée tout comme le patient en fin de vie.
Accompagner les deuils était la fonction des rituels funéraires qui aujourd’hui tendent
à disparaître sans être remplacés.
Il n’est pas question de prôner une bonne mort ou un accompagnement modèle
car chacun fait selon ses possibilités. Cependant, si la communication est maintenue à
travers des échanges authentiques, si la parole circule entre les patients, leurs familles,
l’aide désirée lors de cette fin de vie est alors possible.
Ne pas oublier de dire aux familles que s’ils éprouvent certaines difficultés, il
existe à disposition des psychologues, des psychiatres, des bénévoles pour les aider
dans leur accompagnement ou leur deuil pour faire face à leurs affects. L’équipe
médicale est aussi présente pour eux. Il existe aussi des groupes de parole, des lieux
de verbalisation pour soulager ces moments très difficiles.
II.4 - La mort pour l’équipe soignante
Le soignant connaît des émotions et des difficultés apparentées à celles des
familles face à la mort. Selon la tension émotionnelle des relations lors d’un
accompagnement, il peut se manifester au sein de l’équipe ou au niveau individuel une
souffrance. Les différentes raisons possibles à l’origine de cette souffrance sont :
9 La contradiction entre l’idéal du soignant qui est la guérison du patient, et
l’accompagnement vers la mort. Renoncer à un sentiment d’efficacité,
perdre son pouvoir et accepter son impuissance sont les étapes obligées
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
d’un travail auprès des malades mourants. Accepter de modifier ses
convictions, ce que l’on croit vrai, être en perpétuelle remaniement
intérieur. Ne pas admettre les choses comme définitives.
9 La prise en charge de la douleur physique est associée à la considération
de la douleur morale. Cela force l’équipe à savoir écouter la peine, la
révolte, l’angoisse. Le temps et les formations manquent souvent pour ce
type d’action. Et parfois le vécu de certains soignants peut limité cette
disponibilité à l’écoute.
9 Chaque accompagnement invite le soignant à répondre à ses propres
angoisses de mort. Dès lors, il a besoin d’en parler pour les comprendre
et apprendre à mieux se connaître. Pour le soignant, l’envahissement par
la peur et l’angoisse risque de l’empêcher de bien gérer ce vécu mortifère
et de bien prendre en charge le mourant. De quoi avoir peur ? C’est
l’autre qui meurt pas soi, mais cette mort fait écho en soi.
Or, participer à conserver la dignité et le respect que chacun est en droit
d’attendre en fin de vie, peut permettre de réhabiliter l’image de sa propre mort.
Soigner des mourants nous permet d’apprendre à mieux profiter de notre vie. La mort
oblige à la soumission devant l’inéluctable, et la considération des patients en fin de
vie est le meilleur témoignage que l’on puisse donner du respect de la vie humaine.
Mais il existe des limites dans la prise en charge du soignant. Ces limites sont
définies par sa « biographie » et par ces différents sentiments qu’il peut ressentir au
cours de l’accompagnement.
L’accompagnement aidera le soignant à mieux se connaître et à mieux connaître
ses sentiments qui peuvent l’animer à certaines périodes de sa vie, et selon la personne
à accompagner. La connaissance de soi permet un recul sur la vie, et d’affiner ses
attitudes ainsi que ses réponses face à chaque situation rencontrée. Le soignant se
découvrira, découvrira ses dispositions personnelles en s’appuyant sur son rôle de
soignant et son milieu de travail si besoin.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Ainsi le soignant développe une meilleure connaissance de lui-même qui lui
permet de s’enrichir, en s’aidant si nécessaire d’un psychologue en cas de difficultés
personnelles importantes. Par contre, il est utile d’instaurer des temps de parole avec
l’intégralité de l’équipe pour partager ces connaissances. Et ainsi il est possible de
faire avancer l’équipe ou même une personne en difficulté identique. Servir à d’autre
dans des cas similaires ou inversement, d’autres qui peuvent nous apprendre. De plus
verbaliser les difficultés éprouver au cours d’un accompagnement peuvent permettre
une mise à distance nécessaire pour avancer et être plus objectif. Il faut avoir un
regard extérieur enrichissant pour grandir, évoluer, apprendre, comprendre, réfléchir.
II.5 - Les limites du soignant face à ses sentiments.
L’un des sentiments les plus courants chez le soignant est le sentiment de
supériorité lié à sa connaissance médicale donc de sa profession. Ce sentiment permet
de donner une certaine confiance en soi, indispensable à la relation de soins. Mais il
faut faire attention, il existe un versant négatif dans le sentiment de supériorité qui est
l’abus de sa position. Le soignant peut abuser de sa supériorité face au patient et sa
famille, en utilisant un jargon très médicalisé incompréhensible pour les autres. Une
relation de confiance exige bien sûr pour le patient de se sentir « dans des mains
compétentes », mais elle demande aussi certain partage des connaissances sur la
maladie, et l’établissement d’une collaboration active dans la démarche de soins. Une
supériorité trop marquée vis-à-vis du patient, le placerait dans une dépendance mal
saine
(qu’il
faut
éviter)
et
qui
empêcherait
tout
accompagnement.
Car
l’accompagnement nécessite que le soignant soit accessible au mourant.
Un autre sentiment peut naître chez le soignant au cours d’un
accompagnement, mais ce sentiment renvoie à l’être humain et non à la fonction de
soignant, ce sentiment est celui de l’impuissance. Ce sentiment prend naissance face à
certaines pathologies incurables et mortelles à long terme. L’impuissance
s’accompagne souvent d’émotion de tristesse et de colère face à cette mort inévitable,
et incontrôlable par l’homme. De ce sentiment en découle de la lassitude, du
désespoir, qui eux pourront être soulagés s’ils rencontrent un soutien dans son équipe
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(ou éventuellement au près d’autres professionnels). Travailler avec l’idée « qu’on ne
peut rien faire » pour tel ou tel patient, devant telle maladie ou devant la vieillesse,
doit être traité en redéfinissant les objectifs de soins de son unité et sa philosophie,
parfois même son comportement. C’est une chose très difficile de se remettre en
question en tant que professionnel, mais cela est encore plus difficile en tant qu’être
humain de remettre en cause son mode de fonctionnement. C’est pourquoi il n’est pas
permis à tout le monde de travailler auprès des mourant, car cela crée beaucoup de
remue-ménage en soi. De plus l’accompagnement nécessite une bonne écoute de soi,
de ses limites ce qui nécessite une bonne connaissance de soi. Il peut parfois émerger
une hyperactivité du soignant face à son sentiment d’impuissance, car ainsi le «trop en
faire » permet de cacher ou de compenser la souffrance induit par cette impuissance.
Pour accompagner, il faut prendre conscience de son impuissance et apprendre à faire
avec.
Il existe parfois un sentiment de responsabilité pour le soignant qui « prend trop
à cœur » la situation du malade. Ce qui peut être à l’origine d’un investissement
professionnel trop important, bien au-delà des règles professionnelles instaurées par le
service, celles-ci dans le but de protéger le soignant. Mais qui à long terme épuise le
soignant jusqu’au « burn-out ». Il faut donc que le soignant trouve une juste distance
par rapport au mourant et sa part de responsabilité, pour arriver à travailler sans
culpabiliser sur son impuissance, et ainsi investir au mieux ces accompagnements.
Toutefois comment ne rien ressentir, ne rien éprouver ? Peut-on éviter les
émotions? Nous sommes des être humain avant d’être soignant. Est-on maître de nos
sentiments? Et cette maîtrise est-elle vraiment souhaitable? Car elle peut limiter la
relation à l’autre. Il est donc plus raisonnable de faire avec ses émotions, de profiter de
celles-ci pour créer des liens avec l’autre, mieux se connaître. Mais il est important de
ne pas se laisser submerger par ces sentiments, pour pouvoir rester efficace dans sa
fonction de soignant, pour cela il est nécessaire de s’appuyer sur l’équipe pour
contenir ce qui est individuel, plutôt que de vouloir nier ce qui arrive au cours de
l’accompagnement. Le panel de tous ces sentiments peut encore se compléter par de la
sympathie, de l’inquiétude, de la peur, de l’attachement, etc.… tout ce qui peut
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toucher à l’être humain, toute la richesse des sentiments qui peuvent prendre naissance
au cours de toute relation humaine.
Mais dans la responsabilité, il faut prendre en compte l’éthique : en quoi je suis
responsable, responsable de qui, de quoi et en quoi je suis responsable. En fait c’est
une réflexion sur le professionnalisme de l’accompagnement en fin de vie. Le
soignant en fin de vie prône les valeurs de confort et de qualité c’est à dire de nonagression, de douceur et de communication. L’éthique dans ces situations permet de
réfléchir individuellement sur la prise en charge de chaque patient en fonction de ce
qu’il est et en fonction de l’accompagnement possible par l’équipe.
Ainsi l’éthique permet de considérer chaque situation de soins, son efficacité, car
à tout moment le mourant peut changer d’avis. L’éthique permet aussi d’éviter de
confondre les souhaits des équipes et les envies du mourant. En fait l’éthique permet
une réflexion poussée pour que le mourant reste toujours au coeur du soin, et que les
choses ne soient pas faites par habitude et en systématique. Donner un sens à tout ce
que l’on fait est essentiel pour permettre une bonne mise en place des actions et un
meilleur suivie. De plus cela peut permettre à l’équipe de se poser des questions plus
facilement par la suite. Donc de se remettre en question ce qui est essentiel pour
améliorer les accompagnements. L’éthique, c’est réfléchir sur le sens de ce que l’on
fait avec une notion de bon et de mauvais.
Il peut encore exister un sentiment de découragement face aux nombreux décès,
face à l’ambiance de certains services, du manque de reconnaissance et de
considération de l’administration, ainsi que les contraintes des effectifs et des horaires.
Mais ce sentiment de découragement peut léser la relation avec le mourant lors de son
accompagnement et à long terme aller jusqu’au « burn-out ».
Le vécu du soignant intègre des aspects sociaux et psychologiques dont il est
difficile de faire la part au quotidien. Chaque sentiment cité plus haut peut-être
considéré comme un point de repère d’un point de vue individuel mais aussi collectif.
Aucun n’est à éviter absolument, c’est davantage le dosage de ces divers sentiments et
émotions qui constitue l’intérêt du travail d’accompagnement.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Ce ne sont que des exemples, il existe d’autres sentiments qui peuvent être mis
en cause lors des accompagnements. En plus des sentiments, la biographie du soignant
peut limiter l’intensité de l’accompagnement. Ce vécu étant propre à chacun, il ne
peut-être expliquer et développer dans mon travail écrit. Il faut juste savoir mettre en
relation sa biographie et ses réactions actuelles lors d’un accompagnement pour
pouvoir l’investir correctement.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
TITRE 4 : HYPOTHESE
Aujourd’hui, on meurt rarement chez soi…plutôt à l’hôpital. Certains services
peuvent particulièrement être considérés comme « des mouroirs » : service de
médecine, service de cancérologie et d’hématologie… Les soignants sont donc obligés
de s’adapter à cet état de fait : ayant choisi de soigner, voir de guérir, il vont devoir
traiter la mort.
On ne communique plus avec le mourant, on ne l’écoute pas mais il est observé
comme un objet clinique, que l’on isole s’il on peut. Même s’il est bien traité, il reste
solitaire et chosifié. Et en même temps, le personnel souffre de son rapport avec ces
mourants.
Pourtant un accompagnement différent peut offrir une mort plus sereine pour
tous les acteurs en présence.
L’hôpital est un lieu où la solitude, les angoisses et la souffrance de chacun
peuvent se rencontrer.
Le soignant est seul dans sa fonction, même s’il se trouve dans une équipe, il
reste seul face à ces angoisses qui ne le renvoie qu’à lui-même. Ainsi il se retrouve
seul face aux souffrances que réveille toute cette situation.
Parallèlement, le mourant se retrouve aussi seul face à sa souffrance, ses
angoisses, ses deuils face à la vie qui s’en va…
Donc ces deux personnes différentes dans leur rôle peuvent se rencontrer, créer
une relation et ainsi faire un bout de chemin ensemble. Il s’agit de l’accompagnement.
Cet accompagnement est enrichissant pour le mourant comme pour le soignant, si
chacun d’eux reste disponible à l’humanité de l’autre, sans se réfugier en lui-même.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
TITRE 5 : LE ROLE INFIRMIER
On devient rarement infirmier par hasard ; il se cache beaucoup de choses dans
la volonté d’exercer cette profession.
Le désir d’aider son prochain, de le guérir, de le soigner, de lui rendre des
capacités qu’il aurait perdu, de lui sauver la vie …D’être utile pour l’autre, voire
indispensable.
Mais malheureusement, dans l’accompagnement tout ceci n’est qu’illusions,
car accompagner c’est faire le deuil de la symbolique de sa fonction, pour pouvoir
accepter qu’il ne reste plus rien à faire pour le sauver ou lui prolonger la vie.
L’infirmier lors de la fin de vie est juste présent, pour rendre le moment plus
confortable et plus humain selon son comportement.
Il faut donc pour accompagner que le soignant accepte la fin inévitable de la
situation, pour pouvoir investir sa véritable fonction d’accompagnant et non de
soignant.
Il s’agit de faire du relationnel à partir des soins de confort. Il ne faut pas
séparer de façon distincte les soins techniques des soins relationnels, aussi bien en fin
de vie que dans d’autres situations. Car les soins techniques ne sont pas dépourvus
d’humanité, puisqu’ils sont utilisés comme support pour entrer en relation avec
l’autre. Ou dans le cas contraire, une défense pour éviter une relation avec l’autre en
se cachant derrière notre fonction pour éviter d’affronter nos peurs.
Dans la dynamique du soin, le soignant engage son corps, sa façon d’être, ses
compétences, ce qui confirme bien que la technique n’oblitère pas la qualité de la
relation. Elle est une composante intrinsèque car le soignant y participe corps et âme.
Il faut donc être vrai, c’est à dire rester soi-même pour pouvoir, à partir des soins
techniques, établir un soin relationnel. Par exemple, un simple massage est considéré
comme un simple soin technique de confort mais si le massage s’intensifie dans sa
réalisation, il permet alors de rentrer en contact avec l’autre, d’utiliser le langage infra
verbal pour que la personne soulage ses tensions et ses angoisses. Et ainsi que la
personne reprenne conscience de sa carapace corporelle en la réinvestissant.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
TITRE 6 : L’ACCOMPAGNEMENT
Accompagner , c’est apporter sa présence, ses compétences mais aussi ces
qualités de cœur .
Accompagner, c’est partager la souffrance et toutes les émotions pénibles ou
non qui lui sont liées. Souffrir avec ceux qui souffrent, réveille d’anciennes douleurs
qui ne sont pas forcément cicatrisées, l’accompagnement réactive d’anciens deuils.
Accompagner, c’est donc accepter de s’exposer, de prendre des risques en
recherchant la bonne distance entre pas assez et trop d’investissement. C’est une
recherche continuelle pour essayer de tendre vers une bonne prise en charge du
mourant sans trop donner de sa personne.
Accompagner, c’est aussi accepter de s’attacher en veillant à ce que
l’investissement de la personne que nous voulons aider ne soit pas trop important à
notre égard. Il ne doit pas s’accrocher à tout ce que l’on peut lui apporter ou dire, la
personne aussi doit garder une certaine distance pour cela il doit continuer à voir
d’autres personnes. Il faut donc être à la fois naturel et attentif pour que la personne ne
dépende pas complètement de nous.
Accompagner une personne en fin de vie, cela suppose un savoir concernant le
processus de deuil, l’écoute et la relation d’aide. Tout ceci suppose un savoir être, une
prise de conscience de son propre cheminement par rapport à la mort.
Accompagner nécessite un minimum de savoir-faire apporté par diverses
sources théoriques comme des formations. Mais il est aussi important de tirer profit de
ses expériences au cours du temps, pour encore améliorer son attitude lors de ces
accompagnements.
Donc quelque soit l’accompagnement, celui-ci nécessite des qualités
déterminées chez l’accompagnant : une formation adaptée et continue, une mise en
commun des expériences et des vécus affectifs.
L’accompagnement comporte une fin qui est connu dès le début de cette
relation, cette fin brutale et non prévisible peut limiter l’investissement du soignant
comme du mourant. Accompagner demande donc de faire fi de cette fin pour arriver à
créer des liens.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Mais il faut savoir qu’il n’existe aucune recette pour accompagner une
personne jusqu’à sa mort, car chaque être humain est unique. Les réactions, les
émotions, le vécu, le cheminement… sont individuels et propres à chacun. La seule
règle de base pour l’accompagnement serait de savoir s’adapter à chaque histoire et
personne en fonction de ce que l’on est à ce moment là et de ce que l’on peut donner.
C’est pourquoi, aussi complet que peut-être une formation et un apport
théorique, il n’est jamais suffisant. Il faut savoir être à l’écoute de l’autre, de soi pour
s’adapter.
De plus, l’accompagnement peut-être générateur d’angoisse, d’un sentiment
d’impuissance, de malaise à l’idée de ne pas comprendre et de ne pas accepter la
situation. La fin tragique de la situation enrichit encore plus les sentiments de
l’accompagnant. Le vécu personnel peut faire écho en réveillant des souffrances
difficiles à gérer, pouvant empêcher d’être aidant.
A l’opposé, il peut arriver que le soignant s’oublie dans la relation, pour être
totalement centré sur le mourant. Un tel comportement risque d’épuiser très
rapidement le soignant pouvant aller jusqu’au « burn-out ».
Il faut donc arriver à obtenir un juste milieu où les envies du mourant sont
prises en compte, respectées et adaptées aux possibilités du soignant. C’est à dire en
respectant les limites de chacun.
Eviter les sentiments douloureux qui découlent d’un accompagnement est
illusoire, car ces sensations sont nécessaires pour le bon déroulement du processus
psychique. C’est à dire pour la séparation et le réaménagement psychique de chacun.
C’est une dynamique nécessaire pour être capable par la suite de vivre et de réinvestir
d’autre accompagnement.
L’accompagnant doit éviter les pièges de l’idéalisation d’une mort apprivoisée,
au contraire il doit reconnaître ce qui se joue, s’interroger sur la situation. Ainsi il doit
être capable d’entendre, de partager et de vivre le moment avec l’autre.
L’accompagnement est un engagement dans la relation avec celui qui va
mourir, il s’agit de profiter du temps qui reste pour créer un lien et faire un bout de
chemin ensemble. Ce chemin étant d’autant plus investi lorsque la mort n’est pas niée.
Mais l’accompagnement auprès d’une personne dont la rémission ou la guérison ne
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
sont plus espérées, déclenche des sentiments humains de violence, de souffrance, qui
peuvent démunir, il faut savoir les prendre en compte.
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TITRE 7 : LE SOIGNANT
FACE A SES DEUILS
I - LE SOIGNANT FACE A SES DEUILS
La souffrance du soignant est un vécu subjectif car c’est le décalage entre les
attentes du sujet et les apports des situations réelles. Donc la souffrance du soignant
lui est propre à un moment donné, à une situation donnée. L’origine de ces
souffrances vient des différents deuils auxquels le soignant doit faire face lors
d’accompagnement.
On associe aussi bien le deuil du soignant face à la mort de ses patients que le
deuil face aux pertes de ces idéaux professionnels qui ne peuvent se concrétiser. Ces
deuils peuvent nous affecter négativement ou positivement selon nos capacité à les
reconnaître, à les identifier, selon comment ils nous affectent et comment nous les
vivons.
Il existe plusieurs stratégies afin de rendre ces pertes et ces deuils plus
supportables, pour éviter un comportement routinier ou des relations superficielles. Ou
encore un manque d’intérêt dans son travail, désinvolture mise en place pour se
défendre contre des angoisse trop envahissantes. Ce comportement est souvent
favorisé par l’incapacité ou l’interdit de se laisser aller à ressentir ces émotions, à les
vivre. Il faut donc prendre le temps de s’écouter autant que prendre le temps d’écouter
l’autre.
Chacun utilise des moyens ou des méthodes différentes pour porter attention à
soi, pour refaire le plein d’énergie et ainsi être entièrement disponible à l’autre lors de
l’accompagnement. Certains utilisent la musique, les magasins, le vélo, le cinéma, la
famille, les enfants, les voyages… à chacun ses goûts. Cela sert de soutient dans les
moments difficiles et intenses de l’accompagnement. Cela permet aussi d’apprendre à
se détendre, à maîtriser des situations anxiogènes et à trouver en soi de nouvelles
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
ressources. Ainsi une certaine assurance est acquise, qui permet par la suite de mettre
les connaissances au service de la personne mourante.
Il est aussi important que le soignant achève ou complète ce qui n’a pas été fini
au cours de sa vie, ce qui est ravivé lors des accompagnements. Pour arriver à avancer
et être capable d’aider l’autre.
Evaluer la réalité le plus clairement possible et faire avec en s’adaptant fait
partie des critères importants pour un bon accompagnement. Cela signifie qu’une des
meilleures façon d’accompagner cette vie c’est de la reconnaître telle qu’elle est, c’est
à dire souffrante, mourante, et pas comme nous aimerions. C’est à dire en voie de
guérison, en bonne santé et heureuse. C’est aussi reconnaître que nous sommes
impuissants à changer le cours des évènements. Réaliser cela, permet de nous rendre
témoin de cette expression de fin de vie, de nous rendre disponible à l’autre. Notre
présence consiste à pendre soin de cette vie, de répondre aux attentes du mourant
après avoir vérifier la bonne compréhension de ses désirs ; et par la suite s’assurer de
sa participation, si limitée soit-elle, et de son accord à notre participation.
Lorsque l’on sait que la fin est proche, il faut arriver à prendre le temps de faire
ses adieux à la personne. Et ensuite, après sa mort prendre le temps de vivre sa peine,
de l’exprimer en s’assurant d’un contexte où l’on trouvera respect et compréhension.
Si possible à la suite du décès s’accorder quelques instants avec le corps du défunt, en
respectant ensuite les rituels, les désirs et les besoins religieux exprimés par la
personne avant sa mort (cf. annexes).
Pour des accompagnements plus intenses que d’autres, il est possible pour
l’accompagnent d’être là jusqu’au bout, de lui tenir la main jusqu’à la fin, d’être
présent aux funérailles et pourquoi pas garder un contact avec la famille, ce qui peut
aider par la suite à faire son deuil.
L’écoute de soi et de l’autre est donc essentielle dans l’accompagnement car
pour être source de croissance la souffrance doit être accueillie, reconnue et acceptée.
Les échanges avec l’équipe sont importants (cf. annexes), car ils permettent de se
libérer, d’échanger et de constater qu’il n’existe pas de réponse définitive et de
réaction idéale face à la mort.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Le travail auprès des personnes souffrantes et mourantes, ainsi que de leur
famille, ne peut laisser indifférent. La perte engendrée par le décès d’une personne
provoque beaucoup de souffrances chez l’accompagnant et la famille. C’est pourquoi
il est important de prendre appui sur soi, sur l’équipe pour arriver à continuer
d’innover dans sa façon d’accompagner, sans crainte exagérée de l’échec. Et ainsi
offrir un accompagnement fait d’intimité, de compassion, de tendresse et de respect,
au cours de cette étape importante qui est la fin de vie.
II - DIFFICULTES DU SOIGNANT LORS DE LA PRISE EN CHARGE DE PERSONNES
EN FIN DE VIE.
Il existe de nombreuses difficultés pour que le soignant ne puisse pas faire
correctement le deuil de ces patients morts dans le milieu médical. Les raisons les plus
importantes sont en générale un manque de temps pour faire son deuil, un manque de
verbalisation des moments partagés avec la personne qui vient de décéder. Mais aussi
la rapidité avec laquelle le lit du mort est très vite occupé par une autre entrée.
Face au décès, le soignant doit ritualiser la mort, c’est à dire aménager dans le
cadre médicale pendant les heures de travail, des pratiques qui permettraient
d’exprimer et de partager ce qui est vécu dans ces moments là. Cette démarche
rendrait possible à ceux qui accompagnent, de vivre leur travail de deuil, et pouvoir
réinvestir par la suite un autre accompagnement sans les souffrances du précédent.
C’est ce qui est indirectement ressorti dans les entretiens que j’ai fait au cours de mes
recherches pour élaborer mon travail écrit. C’est à dire que pour eux il est important
de partager entre les différentes personnes de l’équipe, des souvenirs qu’ils ont gardé
des personnes mortes dans le service. Cela leur permet de rester humain face à la
difficulté de ces services où la mort est très présente. Mais verbaliser tous ces
souvenirs, pour ces équipes, ne nécessite pas forcement une réunion régulière avec un
psychologue, car souvent c’est au fil de conversations anodines que les souvenirs
resurgissent (cf. annexes).
Les groupes de parole mensuels dans mes entretiens n’ont pas été reconnus
comme très utiles, car souvent ces moments sont utilisés pour critiquer le
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
fonctionnement du service où il est difficile pour eux d’être reconnu, encouragé et
compris. Donc toutes ces plaintes ne peuvent être utiles pour travailler sur
l’élaboration des deuils et le psychologue n’a aucune possibilité face à ces plaintes
(que l’administrations médicale se refuse encore de prendre en compte, même si elle
les entend ). Pourtant les équipes arrivent plus ou moins bien à faire face à des deuils
répétitifs en se serrant les coudes, en s’écoutant, en partageant leur ressenti, en prenant
le temps de se parler en fonction de leurs affinités avec certaines personnes de leur
équipe (cf. annexes). Mais pour eux, le plus gênant et qui est le plus à l’origine de
souffrance, est l’incompréhension et la non reconnaissance de leurs souhaits par leurs
supérieurs hiérarchiques (cf. annexes). Sans pour autant réfuter la présence de
psychologues, les soignants ressentent plus leur utilité lors d’accompagnements qui
posent des difficultés pour l’équipe, ainsi que dans les situations individuellement très
douloureuses. Où dans ces cas là, la personne ira voir individuellement le thérapeute
pour comprendre ce qui se joue dans cet accompagnement pour souffrir autant.
Ces ainsi que certains rituels ont été mis en place, pour aider les équipes à
travailler sur leurs différents deuils :
9 que le mort reste quelques heures dans sa chambre, au sein de l ‘unité,
afin que la famille et les soignants puissent avoir le temps de réalisé
cette mort, de revoir la personne.
9 que lorsque le défunt est au dépôt mortuaire qu’il reste ouvert à la
famille et toujours aux soignants.
9 de ne pas oublier d’informer le personnel soignant absent le jour du
décès à leur retour, surtout si une de ces personnes la accompagné dans
son cheminement. Pour cela il est possible de laisser plusieurs jours le
faire part de décès affiché dans le service.
9 la mort de cette personne peut-être évoquer avec son entourage
familiale, les autres personnes de l’équipe et parfois même avec
d’autres mourants du service qui auraient pu créer des liens avec la
personne décédée.
9 autres rituels possibles : lettre de condoléances à la famille, présence
d’un membre de l’équipe à l’enterrement…
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Pour prévenir de ces souffrances humaines et inévitables au cours des
accompagnements, les soignants doivent pouvoir bénéficier de formations initiales et
continues. En sachant que cela n’est pas tout, il faut aussi utiliser son expérience
personnelle et professionnelle.
La formation initiale permet de sensibiliser les étudiants à l’accompagnement
des personnes en fin de vie, de partager ces expériences de stages ou personnelles, de
favoriser des échanges autour des questions de la vie et de la mort, des réflexions sur
l’éthique de notre profession face à l’accompagnement, des réflexions sur le respects
des rites religieux…
La formation continue elle permet d’enrichir la pratique des soins infirmiers, et
de développer des projets de soins respectant la vie sans nier la mort. Donc d’enrichir
et améliorer ces futurs accompagnements.
Il ne faut pas nier le rôle du soignant au cours de ces accompagnements, il est
donc nécessaire de reconnaître le travail du soignant pour qu’il puisse continuer
d’investir comme il faut par la suite sa fonction. La reconnaissance de ce travail
infirmier, de leur rôle propre et de leur créativité favorise la mise en place
d’initiatives, enrichissant le projet de vie du mourant et de ces proches.
De plus l’aménagement de temps de parole avec l’équipe permet l’expression
des ressentis de chacun, la verbalisation de ces limites, de ces peurs, de ces angoisses
et même le partage des moyens mis en place par chacun pour se protéger. Et en
prenant ce temps de paroles, il est alors possible d’établir un projet de vie le plus
adapté, en fonction des capacités de chaque soignant et les souhaits de chaque
mourant.
Ces temps de parole offrent donc la possibilité de partager des expériences, de
s’enrichir car les savoirs empiriques utilisés au quotidiens sont souvent méconnus du
groupe. Si ces temps ne sont pas présents, il va alors se créer des rencontres
informelles entre les équipes pour se soutenir et s'entraider, ce qui risque de ne pas
profiter à tout le monde et être incomplet.
Il faudrait que ces réunion se mettent en place avec la participation de toute
l’équipe, en oubliant si possible l’ordre hiérarchique. La surveillante par exemple
n’est pas là pour juger son équipe mais pour améliorer le travail de son équipe. Il n’y a
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
pas de jugement dans ces réunions mais des mise en commun de savoirs, de difficultés
pour rendre l’équipe la plus performante possible. Car des temps de paroles
correctement utilisés permettent une cohérence d’équipe, ce qui par la suite est
bénéfique pour l’équipe elle-même, ainsi que pour les personnes en fin de vie et leurs
familles.
Lors des temps de parole ou des formations, le soignant est engagé à se dire, à
dévoiler ce qui ressent au chevet des mourants, à retrouver des échos dans sa
biographie, ainsi que d’apprécier et de critiquer son comportement. Tout ceci dans
l’objectif d’améliorer et d’investir mieux son rôle dans l’accompagnement.
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TITRE 8 : HYPOTHESES D’ACTION
Pour faire face à l’angoisse engendrée par les accompagnements en fin de vie
chez les soignants, il est important de prendre en compte le soignant en tant
qu’humain, le respecter et reconnaître son travail d’engagement que nécessite une
relation avec un mourant. C’est ainsi qu’au Canada, les services de soins en fin de vie
n’engagent le personnel qu’à 50% pour éviter l’épuisement de son équipe en lui
proposant à coté, des activités professionnelles très différentes pour se ressourcer et se
sentir « plus utile » en sachant travailler avec d’autres thèmes que la mort.
Reconnaître tous ce qui est chamboulé au cours d’un accompagnement chez le
soignant, c’est aider celui-ci à le prendre en compte et à travailler dessus sans
éprouver de culpabilité. La reconnaissance de son engagement personnel dans
l ‘accompagnement chez le soignant, permet d’empêcher les situations où il se cache
derrière sa fonction, en évitant de s’investir dans une relation trop difficile et à
l’origine de trop de souffrances.
Aider les autres, c’est aussi avoir la capacité de demander de l’aide. Un
soignant est un membre d’une équipe et comme le corps humain nous le montre,
lorsqu’un poids est trop lourd pour un seul bras, le second vient à la rescousse. Savoir
demander de l’aide à l’équipe, demander un relais en cas de difficulté est essentiel
pour optimiser l’accompagnement du mourant. Cet accompagnement étant utile pour
le mourant, pour l’aider dans l’acheminement de sa mort, mais aussi utile pour le
soignant car cela lui offre la possibilité de mieux se connaître et de s’enrichir.
L’écoute de la personne mourante et l’écoute de ses limites sont aussi essentiels
pour un accompagnement favorable aux deux acteurs. Le soignant doit porter attention
à lui, s’écouter, compléter ses histoires inachevées passées ou présentes, se poser les
bonnes questions et y répondre le plus honnêtement possible.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
La vérité est essentielle pour tisser de véritables liens dans
l’accompagnement ; la vérité sur soi, la vérité de la situation.
Reconnaître ainsi qu’admettre ses limites personnelles et professionnelles est
essentiel pour l’accompagnement. Ces limites ne peuvent pas être définies
correctement dans mon travail, car elles sont propres à chacun. Mais dans tout les cas,
elles peuvent entraver la relation avec la personne en fin de vie si elles ne sont pas
prises en compte, reconnues et dans le meilleur des cas travaillées. Une aide extérieure
peut intervenir à la demande de la personne en difficulté, en souffrance comme un
psychologue ou autre selon le cas échéant.
Il faut aussi prendre le temps de vivre les étapes de la perte engendrées par la
mort d’une personne que l’on accompagnait, pour mieux vivre les accompagnements
suivants. Prendre le temps de reconstituer les moments importants et marquants de
cette relation, en prenant note de ce que l’on retiendra, de ce que l’on y a découvert
sur soi-même, sur le défunt, sur la vie en générale et sur ce que cela a développé en
nous. Faire ce bilan après chaque accompagnement est nécessaire pour pouvoir
avancer dans son travail et mieux se connaître.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
TITRE 9 : CONCLUSION
L’accompagnement : c’est l’équilibre entre les désirs de la personne en fin de vie
et les capacités des personne qui l’entoure. Ces capacités doivent respecter le mourant
en le soulageant et en l’écoutant ; c'est-à-dire respecter le désir de la personne en fin
de vie. Mais cela n’aboutit pas pour autant à une mort sereine, car une mort parfaite
n’est pas possible. On peut malgré tout, offrir de mourir dans des conditions
psychologiques meilleures selon le travail préalablement fait avec la personne
mourante ; c'est-à-dire selon la qualité de son accompagnement.
Malgré ce travail préalablement fait, la mort reste difficile, parfois longue et
douloureuse : pourquoi ? Qui peut dire qu’il pourrait quitter ce monde sans regrets, sans
déceptions de ne pas avoir fait certaines choses, qui peut partir en laissant pleins de
biens autour de soi ? C’est facile pour nous maintenant qui sommes jeunes, en bonne
santé de dire le contraire, mais même si l’on profite de tout, tout le temps, ce monde
restera toujours difficile à quitter.
Chacun aura ses propres difficultés face à sa mort mais si elles peuvent être
soulagées par de la présence, de l’écoute, de la compréhension et de l’aide dans son
cheminement d’abandon de la vie. Alors pourquoi pas essayer d’améliorer son
comportement en service, pour proposer un accompagnement plus bénéfique pour la
personne. Et ainsi améliorer les conditions de travail en écoutant ces limites.
Nous ne pouvons avoir aucune certitude sur l’efficacité de nos soins
d’accompagnement auprès d’une personne lorsqu’elle est morte. Mais nous pouvons
être à l’affût des expressions des mourants lorsque nous tentons un accompagnement,
pour voir si celui-ci sert à quelque chose ou pas. Et ainsi réévaluer notre comportement
et le modifier si nécessaire.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Après la mort, il est trop tard pour faire quelque chose et avec des « si on
pourrait refaire le monde » …. Alors pourquoi pas écouter l’autre tant qu’il est vivant,
pour essayer de comprendre ce qu’il désire de notre présence, si on peut l’aider et s’il
accepterait notre aide ?
Toute cette relation peut-être faite, si la mort n’inspirait pas autant la fuite pour
une grande partie du personnel médical. Cette fuite s’explique par la culpabilité du
soignant face à son sentiment d’inutilité devant cette fin inévitable dans certaines
pathologies. Certes, l’accompagnement est à l’origine de nombreuses souffrances et
angoisses, mais offrir notre présence est très enrichissant pour soi. Cela permet de
grandir psychologiquement en réfléchissant sur la vie et la mort.
Essayer de rester présent face à la mort, c’est essayer de donner un autre sens à
la vie.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
BIBLIOGRAPHIE
ARIES (Philippe). Essais sur l’Histoire de la mort en Occident du Moyen Age à nos
jours. Edition du Seuil, 1975, 223 pages.
MANOUKIAN (A.) & MASSEBOEUF (A.). La relation soignant soigné. Paris /
Lamarre ; 1995, 157 pages.
RUSZNIEWSKI (M.). Face à la maladie grave : patients, familles, soignants. Paris /
Dunod, 1995, 206 pages.
Le deuil des accompagnants. ETUDES SUR LA MORT. L’esprit du temps, 1999,
n°116, p153.
Articles
BEAUCHESNE, H. & VIREL, A. & HALFON, Y. & COLLECTIF. (1994). La mort.
PERSPECTIVES PSYCHIATRIQUES, vol 33 n°42, pp 62-115.
CHALIFOUR, J. (1998). L’infirmière face à ses deuils : quelques stratégies
d’intervention. SOINS, n°623 mars, pp 39-42.
CLEMENT, N. & MOREAU SAVIOUX, L. (1993). Deuil des malades et épuisement
professionnel. OBJECTIF SOINS, n°16 octobre, pp 37-38.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
ANNEXES
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
ENTRETIENS
Ceci est la retranscription de 8 entretiens (dont 4 entretiens infirmiers et 4 entretiens
d’aide soignants, aussi bien des équipes de jour que de nuit ) qui s’adressent à de
soignants sans formation spécifique à la mort et qui se trouvent régulièrement
confrontés à la fin de vie puisque j’ai fais mes entretiens en service de cancérologie où
la moyenne est de 365 décès par an.
Voici le questionnaire auquel ils sont dues répondre au cours de l’entretien :
9 Votre fonction ici ?
9 Vous êtes diplômé depuis quand ?
9 Dans quel service avez vous travaillé avant de venir dans ici ?
9 Depuis quand vous travaillé en cancérologie ?
9 Avez-vous choisi volontairement la cancérologie ?
9 Quelles étaient vos motivations ?
9 A ce jour avez-vous trouvé ce qui correspondait à vos motivations ou êtes vous
déçu ? En quoi ?
9 Que vous a apporté votre pratique ?
9 Pensez-vous faire toute votre carrière en cancérologie ?
9 Qu’est ce que pour vous le relationnel aussi bien avec le patient, qu’avec la
famille et l’équipe ?
9 Pensez-vous que c’est facile d’accompagner les patients en fin de vie ? Que
cela est permis à tout le monde ? Et pensez-vous qu’il est nécessaire d’avoir
une formation spécifique pour travailler dans l’accompagnement de ces gens ?
9 Parlez-vous de votre travail chez vous? Comment réagit votre entourage à ces
mots ?
9 Vous arrive-t-il d’emmener mentalement les patients à la maison? Comment
vous faites pour vous défendre, vous protéger dans ces cas là et est-ce que ça
marche ?
9 Qu’est ce que vous pensez devoir au patient en dehors de la Chartre du
patient ?
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 Est-ce que vous avez besoin de reconnaissance de la part du patient ? Et quelle
reconnaissance attendez-vous ?
9 Comment réagissez-vous lorsqu’un patient et/ou un famille sont très
envahissants ? Comment être trop envahissant ?
9 Comment réagissez-vous dans le cas contraire c’est à dire quand la famille est
absente ou le patient non concerné?
9 Est-ce qu’il vous est déjà arrivé d’éviter une chambre ? Une famille ?
Pourquoi ? Que se passe-t-il dans ces cas là ( c’est à dire qui vous remplace ou
vous seconde ou vous épaule ou autre…) ?
9 Qu’est-ce que pour vous des soins palliatifs?
9 Considérez vous effectuer des soins palliatifs ici ?
9 Pensez vous être assez bien formé et préparé à ces soins ?
9 Considérez vous qu’il vous manque des moyens ? Lesquels ?
9 Aimeriez vous plus de formations ou alors la création d’un service spécialisé
avec son équipe comme à l’hôpital d’Avignon ( un service mobile) ?
9 Lors d’un décès dans le service comment cela se passe-t-il et que faites vous?
Comment réagissez vous?
9 Souhaitez vous être au courant lorsque les décès se déroulent à domicile ou
hors de vos heures de travail?
9 Que ressentez vous à cette annonce ?
9 Ressentez vous le besoin d’aides psychologiques ou autres comme en parler
avec quelqu’un de particulier ?
9 Avez vous la possibilité d’en parler avec l’équipe?
9 Avez vous des aides psychologiques à votre disposition dans l’établissement ?
Lesquelles ? Est ce que vous y allez ? Est ce que cela vous apporte quelque
chose, si oui quoi?
9 Avez vous un autre moyen qui vous ai personnel pour vous détendre l’esprit
après un moment difficile en service( par exemple : vos enfants, le sport, le
ménage, la lecture, le cinéma, les magasins etc…) ?
9 Est ce que vos patients se rendent-ils compte en général quand ils sont proche
de la fin de leur vie ? Comment s’en rendent-ils compte, tout seule ou
quelqu’un leur dit ? Qui ?
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 Parlent-ils facilement de cette mort ? Vous parle-t-ils de leur angoisse, de leurs
peurs ?
9 Quelles sont vos réactions lorsqu’un patient parle de cette mort ( vos gestes,
vos paroles ou autres…) ?
9 Que ressentez vous ?
9 Dans notre société la mort est un sujet peu abordé cela a-t-il une incidence sur
l’attitude du patient face à sa mort ?
9 Dans notre société la mort est un sujet peu abordé cela a-t-il une incidence sur
l’attitude du soignant face à la mort?
9 Si vous pouviez changer quelque chose que serait ce?
Entretien n° 1 ; c’est une aide soignante diplômée depuis 1990 et qui travaille dans
ce service depuis novembre 2001 :
9 C’est un choix de sa part de vouloir travailler dans ce service par volonté
d’assister les personnes en fin de vie et découvrir / voir l’accompagnement.
9 Ressent des déceptions lorsqu’il s’agit de personnes jeunes avec un sentiment
d’impuissance face à leur souffrance : sentiment d’injustice.
9 Ne compte pas faire toute sa carrière en cancérologie.
9 Pour cette personne le relationnel est une grande écoute, être à l’écoute,
prendre le temps.
9 Pour elle l’accompagnement n’est pas permis à tout le monde car c’est pas
facile, c’est une lourde tache. Il y a beaucoup de remise en question seule le
soir : « est ce que j’ai assez fait, bien fait ou pas ?».
9 Cette personne n’a pas eu de formation spécifique, elle aurait bien aimé en
avoir une au départ mais maintenant elle apprend sur le tas se qu’elle trouve
enrichissant. De plus elle bénéficie comme le reste de l’équipe de groupe de
parole mensuel (et à la demande si nécessaire).
9 Cette personne ne parle pas de son travail à la maison même en cas de décès
difficile ou plus marqué mais par contre mentalement cela lui arrive de
repenser à certains patients. D’avoir des pensées pour eux lorsqu’il a plus
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
d’affinité mais se contrôle en se disant stop sinon elle pourrait se rendre
malade. Ces pensées sont en générale imprévisibles.
Ex : quand un patient décède dans une chambre, à l’entrée du nouveau patient par
habitude on parle de cette chambre comme celle du patient précédent.
9 Cette personne pense devoir au patient beaucoup de respect, de compassions
en rapport aux souffrances et leur maladie en plus de leurs soucis quotidiens.
9 Elle ressent le besoin de reconnaissance, une reconnaissance simple comme un
sourire, un regard( qui en dit souvent plus qu’une parole), geste de la main…
9 Face à un éventuelle envahissement d’une famille cette personne se pose une
question toute simple : « peut-on l’être dans ces situations ?» s’il existe
vraiment un problème de comportement de l’entourage il faut réagir avec
beaucoup de tact, de diplomatie, expliquer les choses.
9 En cas contraire quand la famille ou l’entourage est absent ou peu présente, il
est très difficile de dire quelque chose car elle n’est pas là pour faire la moral.
9 A la question si ça lui est déjà arrivé d’éviter une chambre ou un patient : « oui
quand il y a trop de pression, quand il y a beaucoup de chagrin exprimé car on
est pas de marbre ainsi je ne prends pas le risque de flancher car je suis là pour
remonter l’entourage, leur donner une épaule. Mais dans ces cas de difficultés
où je me sens moins forte je relais le travail à une autre personne de
l’équipe …de toute façon on pleure aussi. »
9 Pour cette personne les soins palliatifs signifient les soins de fin de vie, les
derniers moments de confort, de la présence : être là pour eux , être disponible.
Elle considère faire des soins palliatifs régulièrement dans son service sans
avoir était formé aujourd’hui elle parle avec son cœur et son expérience. Elle
considère qu’il lui manque des mots ( si les mots servent à quelque chose !),
plus de douceur et de tendresse qui prime à ces yeux.
9 Elle considère qu’il manque des formations spécifiques dans son service pour
se permettre de mieux travailler.
9 Au moment d’un décès : « on le fait le plus beau possible ( vêtements qu’il
aimait, maquillage…), pour que la famille présente puisse le voir. Ensuite nous
restons disponible pour l’entourage. Lorsque nous préparons la personne on est
jamais seule : deux aide soignantes ou une infirmière et une aide soignante.
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
Ensuite on discute entre collègue, on vide notre sac, ce qu’on aurait pu faire,
on s’interroge tant qu’on est ensemble au travail. On rentre pas chez soi avec
tout ça dans sa tête on parle entre nous.
9 Cette personne ressent le besoin d’être tenu au courant de l’évolution dans la
maladie de chaque patient surtout quand la fin approche. Car elle considère
faire du relationnel à long terme et non du ponctuel.
9 Le besoin d’aide psychologique se fait ressentir pour cette personne car cela
lui permet de trouver des réponses à beaucoup de ces questions. Mais utilise
aussi des moyens personnels pour évacuer le stress ce sont ces enfants qui lui
permettent de reprendre goût à la vie.
9 Face à leur mort les patients peuvent se cacher cette vérité mais généralement
ils sentent la chose arrivée et ils en parlent indirectement mais ils en parlent,
surtout lorsqu’ils se sentent près, souvent par l’intermédiaire de questions, ou
de synonymes. Face à ces questions cette personne répondait au début de sa
fonction par : « il ne faut pas dire ça, il ne faut pas parler comme ça » mais
maintenant elle dit la vérité : « oui, vous allez mourir et moi aussi. ».Ils parlent
avec les yeux, on se comprend avec le regard : « je prend les mains, je reste là
même quand je ne peux pas répondre. Je peux rester et pleurer avec la famille
derrière la porte. »
9 Face à la modification de la mort dans la société quelle changement par
rapport au comportement du patient : « pas trop de modifications car ils savent
qu’ils sont la pour mourir c’est de la cancérologie pas de la chirurgie. En
permission ces personnes perdent vite pied car ils n’ont plus de cadre, ils sont
désemparés donc reviennent vite en service. La mort à domicile est perdue. »
Pour vous en tant que soignant : « au fur et à mesure du contact avec les gens
en fin de vie, à chaque décès, on devient un peu moins sensible car on prend de
la distance mais cela reste difficile avec certains car on reste humain. C’est
difficile à expliquer. »
9 Aujourd’hui : « j’ai une autre vue de la mort, j’en est moins peur, en y pensant
je ressent moins de stress. Si je devais changer quelque chose se serait plus de
présence, plus d’écoute, plus de sérénité, changer leur soucis, un temps moins
long face à leur souffrance. »
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Entretien n° 2 ; c’est une infirmière diplômée depuis 1998 et qui travaille dans ce
service depuis fin 1998(c’est à dire depuis trois ans et demi) :
9 Choix de travailler dans ce service, par les expériences qu’elle a pu connaître
au cours de stages en cancérologie au cours de ses études d’infirmière. Elle
aime l’ambiance de ces services, s’intéresse à la cancérologie, elle pense que
dans ces services il existe : « un truc qu’on ne voit pas ailleurs » .
9 « la déception, oui par apport à ce que l’on apprend, à l’école et la différence
qui existe entre la réalité et les moyens possibles. »
9 « intérêt dans la prise en charge globale du patient, tout ce que j’ai pas appris à
l’école car on survole rapidement les pathologies cancéreuses je le découvre
progressivement en service. Tout ce que tu ne peux pas imaginer voir, ressentir
en t’occupant de ces patients. De plus, t’occuper de personnes mourantes te
fait relativiser sur beaucoup de chose c'est-à-dire la mort, les soucis
quotidiens. »
9 « je ne pense pas faire toute ma carrière en cancérologie, environ cinq ans à
un an près, car psychologiquement ça fatigue beaucoup. Je ressens déjà
régulièrement le besoin de vacances pour bien couper du travail et me
ressourcer. »
9 « pour moi le relationnel consiste à une très grande écoute, à expliquer au
patient les choses avec ces mots à lui, s’adapter au niveau du patient. »
9 «travailler en soins palliatifs n’est pas permis à tout le monde, mais quand on
travaille dans ces services on sait à quoi s’attendre, on est pas en maternité. »
9 « Oui, il y a de l’intérêt à participer à des formations pour les traitements, la
mise en place des chimiothérapies. Mais je n’ai jamais reconnu d’efficacité de
ces formations pour le relationnel, elles ne sont pas adéquates, en tout cas à
moi cela ne m’a rien apporté, j’utilise beaucoup plus mon expérience. »
9 « à la maison je parle très rarement de mon travail, je raconte plus des
anecdotes qui m’arrivent dans ma journée de travail. De toute façon quand ça
ne va pas cela se lit sur le visage, pas besoin de parler. Par contre mentalement
cela m’arrive souvent d’y repenser. »
9 « si je doit quelque chose au patient, se serait l’écoute. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « une reconnaissance, pas spécialement, si je suis en phase avec moi-même
pas besoin de reconnaissance. »
9 « si une famille est trop envahissante, j’essaierais de gérer, de recadrer tout en
étant présente pour eux sans répondre à leur questions car ce n’est pas à nous
d’y répondre. Au contraire si la famille est trop absente, je cherche un moyen
de relais en passant par l’assistance sociale et on essaie d’être plus présent. »
9 « cela m’est déjà arrivé une fois d’éviter une chambre, car le décès qui si était
déroulé avant l’entrant, était particulièrement marquant. Difficultés à rentrer
de nouveau dans cette chambre à cause des souvenirs que cela réveillaient en
moi. Se forcer à entrer, éviter de rester s’en faire payer à la personne quelque
chose pour laquelle elle n’y est pour rien. »
9 « dans les soins palliatifs, on met tout et n’importe quoi, même les gens
fatigués. C’est une expression qui m’énerve beaucoup, synonyme de fin de vie
pourquoi ne pas dire plutôt soins d’accompagnement ou de nursing. Je ne
considère pas effectuer des soins palliatif mais des soins de vie. »
9 « je ne considère pas que nous soyons former en accompagnement en fin de
vie au cours de nos études, mais l’expérience est très utile à force se sont les
nerfs qui prennent le dessus. Le premier décès on est très mal ensuite on rie,
on rie de plus en plus au fur à mesure, c’est un moyen de décompenser. Mais
tu t’habitues jamais à la mort. Ca m’est arrivé de tenir la main au mourant
jusqu’au bout, mais après tu craques un bon coup puis tu repars. »
9 « il y a plein de chose à améliorer pour le confort de ces personnes en fin de
vie comme des lits médicalisés électriques pour tous, des matelas anti escarres,
du personnel en plus, plus de temps pour offrir plus de confort à la personne
comme des massages et pas du nursing. »
9 « la création d’un service mobile en soins palliatifs me déplaît entièrement, je
ne trouve pas ça normal que ce soit une autre équipe qui prenne le relais car la
mort est proche. Ce sont nos patients on les connaît. Je préfère que l’on
considère dans notre service qu’il y est des lits considérés comme soins
palliatifs pour obtenir un budget plus conséquent, du personnel en plus. Donc
la possibilité d’une meilleure prise en charge, s’occuper d’eux du début
jusqu’à la fin. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « pour des formations pourquoi pas, dépend de leur sens, de leur utilité. »
9 « en cas de décès, on laisse du temps à la famille pour qu’il puisse voir le
défunt, ensuite on donne les papiers à la famille ainsi que la liste des
démarches à faire car souvent se sente perdu. Ensuite deux personnes de
l’équipe prépare le défunt pour le descendre à la morgue. »
9 « on discute en équipe des décès, surtout si la personne était bien connu du
service, si soucis particulier par rapport à ce décès. Sinon on a à notre
disposition un groupe de parole avec un psychologue, où l’on peut parler une
heure ou deux des difficultés particulières que l’on peut ressentir et arriver à
se libérer. Personnellement je préfère discuter avec mon équipe, car avec un
psychologue j’ai toujours l’impression qu’il interprète ce que je dis, qu’il veut
juger et analyser alors que pour lui sait facile ce n’est pas lui qui est devant la
famille ou le mourant.
9 « je tiens à être au courant des décès qui interviennent dans le service, de tout
façon c’est moi qui m’en inquiète quand pas de nouvelle de cette personne au
bout d’un moment. C’est un besoin de savoir comment ça c’est passé. »
9 « je n’ai pas d’activité extérieur pour me ressourcer, mais il faudrait que j’en
trouve une car j’en ressent le besoin de plus en plus comme de la relaxation ou
des séances de kiné pour me détendre. »
9 « les personnes réalisent que leur fin est proche que lorsqu’ils sont conscients,
s’ils sont endormis ou comateux alors non. Quand ils sont lucides, ils se voient
partir, quand ils s’étouffent c’est horrible pour eux et pour nous. Mais avant la
mort, il peut arriver qu’il parle de ce moment, parfois ouvertement, parfois
indirectement. Mais il est difficile de répondre ouvertement selon l’entrée en
matière, en tout cas je réponds en fonction de mes possibilités tout en disant la
vérité. Je peux les aider si besoin à régler leurs soucis, je les écoute. Il est
difficile de dire ce que je ressent à cette mort, car je peux facilement me
mettre à la place de ces personnes, brouiller mes sentiments pour ne ressentir
que de la colère contre l’injustice de la vie. Mais avec l’expérience, je suis plus
ouverte à cette mort et j’en parle plus facilement, même si la société en parle
peut, dans ces services on en parle ouvertement. J’ai donc appris à parler de la
mort, j’ai évolué en travaillant dans ce service. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « si je devais changer quelque chose : on peut toujours faire plus, mais ici avec
un peu plus de sous et un peu plus de personnel on pourrait améliorer
beaucoup de chose. »
Entretien n° 3 ; c’est une aide soignante qui travaille dans ce service depuis deux ans
et demie, et qui est diplômée de 1999 2000 :
9 « j’ai seulement travaillé trois mois en maison de retraite avant de venir dans
ce service que j’ai volontairement choisi, d’abord en remplacement pour
découvrir réellement le travail de cancérologie, puis on m’a proposé un poste
que j’ai accepté car cela m’avait beaucoup plus. »
9 « mes motivations se sont estompées dans le temps, se sont d’aider ces gens et
de les accompagner. Seulement on est pas formée pour ça, de plus il y a trop
de travail pour le personnel que l’on est, pas assez de temps, pas assez de
reconnaissance pour ce que l’on fait… tout ce qui développe beaucoup de
déception. Heureusement qu’il y a l’expérience qui elle est très formatrice. »
9 « je ne pense pas faire toute ma carrière, pas plus de dix ans. Le travail en
cancérologie donne beaucoup de déception au niveau du moral car on voudrait
aider face à la mort hors on ne peux que soulager. »
9 « le relationnel comprend la communication entre les différentes personnes de
l’équipe, la famille, le patient pour écouter leur ressenti ou ils en sont de leur
maladie. »
9 « l’accompagnement n’est pas quelque chose de facile, ce n’est pas permis à
tout le monde. Il est utile d’avoir des formations initiales spécifiques car aider
à la toilette, au repas je sais faire mais faire attention à ce que je dis selon les
personnes, selon leur déroulement dans leur maladie nécessite
une
formation. »
9 « chez moi je parle de mon travail car il a beaucoup d’investissement dans
celui-ci qui nécessite que j’en parle. Quand je rentre chez moi, je suis tendu, il
faut que j’évacue tout ça, car je n’arrive pas à faire comme les psychologues
disent de passer la porte et d’oublier en même temps. Mon entourage me
soutient et m’écoute. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « mentalement, je pense tout le temps aux patients, même en vacances je
téléphone pour savoir comment ils vont, s’ils sont décédés. C’est plus fort que
moi d’appeler car il y a des personnes à qui on s’attache plus que d’autre. »
9 « ce que je doit au patient, toujours plus : masser, laver la tête… Je voudrait
faire partie des soins palliatifs en me spécialisant dans les soins esthétiques en
fin de vie car j’ai une formation de coiffure. »
9 « j’attend un petit peu de reconnaissance de la part du patient, comme un
merci, un sourire. Car les patients sont de plus en plus exigeants, de plus en
plus agressifs, on ne peut pas être là tout de suite, l’urgence en premier. »
9 « si une famille est trop envahissante, on discute avec elle, on explique les
choses avec le médecin si nécessaire. »
9 « si au contraire la famille est absente, on peut intervenir à la demande du
patient en prenant contact avec sa famille. Si le patient ne le désir pas on essaie
de le faire changer d’avis quand sa fin est proche pour favoriser un
rapprochement familial. Et s’il n’existe pas de famille alors on reste plus
possible dans la chambre. »
9 « en cas de difficultés à rentrer dans une chambre, je me fais relayer si je peux
sinon je rentre vite et ne m’attarde pas. »
9 « les soins palliatifs pour moi c’est de l’accompagnement en fin de vie, qui
consiste à soulager, à aider moralement, à donner du confort, offrir quelques
plus qu’ils ne peuvent pas avoir chez eux. Je considère faire des soins palliatifs
ici et ne pas avoir eu de formation conséquente. »
9 « dans ce service, il manque des moyens, du temps et pour améliorer ça
j’imagine très bien de séparer les soins de chimiothérapie et les soins palliatifs
pour obtenir deux services distinctes avec des équipes qui tournent. »
9 « en cas de décès, je reste disponible à la famille, leur laisse la personne
défunte à disposition, puis au bout d’une heure, avec une autre collègue je le
prépare (petite toilette, bracelet d’identification, la couche…) Attention pas
plus de deux heures dans la chambre puis on le descend à la morgue. On est
jamais seule en cas de décès, deux, voire trois si possible. »
9 « après le décès, on discute en équipe de la personne, si vraiment il y a un
problème on peut aller voire la psychologue à notre disposition. En cas de
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
nombreux décès, il arrive que l’on décompense en fou rire, on ne rigole pas du
patient c’est juste pour supporter la situation. »
9 « je ressent souvent le besoin d’écoute et parfois d’aide mais je préfère parler
avec une collègue de mon équipe qu’une psychologue. Car la psychologue
parle avec ces mots, il faut réagir comme ça, dire ceci mais c’est facile de le
dire. Ce n’est pas elle qui y est et on ne peut pas toujours faire comme elle le
dit. »
9 « personnellement pour me changer les idées je ne rentre pas chez moi, je fais
les boutiques en ayant besoin d’acheter. »
9 « les personnes proche de la mort s’en rendre très bien compte, mais tous n’en
parlent pas, certains évitent le sujet ou le détourne. Je respecte leur souhait,
j’écoute seulement ce qu’il on a dire. A cette écoute je ressent un peu de la
haine mais cela dépend de la personne, de mes liens avec elle. »
9 « Aujourd’hui j’arrive à accompagner en tenant la main jusqu’au bout, au
début c’était très difficile ensuite c’est une question d’habitude. L’injustice me
touche beaucoup. Ca m’arrive de pleurer dans la chambre, je trouve ça
normale, je suis humaine et cela ne me gène pas. »
9 « le comportement de la société face à la mort et ce que j’ai vue en service m’a
permis de changer, la mort avant me faisait peur, j’en parlais peu. Maintenant
j’accepte la mort chez les autres mais pas la mienne. »
9 « à changer quelque chose : plus de temps à consacrer pour être plus
disponible, ainsi que plus de personnel pour arriver à passer plusieurs heures
avec une personne si nécessaire. »
Entretien n°4, c’est une infirmière de jour qui est diplômée depuis 1987 (donc depuis
25 ans) et qui a toujours travaillé dans ce service mais qui a quelque fois quitter celuici pendant trois mois en moyenne, pour travailler aux urgences, en chirurgie et en
vasculaire :
9 « au départ, c’était les circonstances et non un choix de travailler dans ce
service, puis un choix de rester et de revenir. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « mes motivations sont liés aux patient que l’on trouve ici et nulle part ailleurs.
Les relations qui se créent ne se retrouvent pas ailleurs. Ne ressent aucune
déception, persiste et signe encore. »
9 « je ne me vois pas travailler toute ma vie ici, ni en tant qu’infirmière. Le jour
où j’en aurais mare je changerais de travail. Je n’ai pour l’instant aucune idée
de mon recyclage. »
9 « l’intérêt de travail ici c’est que cela m’apporte du recul par rapport à la vie en
général, elle vaut d’être vécu et vécu pleinement. »
9 « le relationnel c’est tout ce qui est dit et non dit, tout ce qui est entendu et non
entendu, et qui passe de l’un à l’autre. »
9 « accompagner, c’est très difficile, intérieurement pas permis à tout le monde.
Dans le sens où la culpabilité, les choses que l’on a pas faite, l’angoisse que ça
engendre, c’est avec l’expérience que l’on acquière un certain équilibre.
Malheureusement avant ça pose beaucoup de problème et que ça fait mal.
Heureusement qu’il existe une aide psychologique si besoin. »
9 « des formations spécifiques par rapport aux soins techniques oui, mais
l’expérience est importante pour arriver à se libérer et faire de la relation qui
est essentielle dans l’accompagnement. Le relationnel s’apprend sur le tas. »
9 « je ne parle jamais de mon travail chez moi. »
9 « mentalement, ça m’arrive mais dans ces cas là c’est que c’est moi qui est un
problème, j’en parle donc avec la psychologue. C’est que je n’ai pas pu
extérioriser avec l’équipe, avec la famille, avec la personne mourante et il faut
que ça sorte. Je parle. »
9 « ce que je dois c’est la vérité. »
9 « je n’ai plus besoin de reconnaissance, maintenant je ne m’y arrête plus. Il y
a d’autre façon de dire les choses, en se touchant, en se regardant pas
forcément en se souriant. »
9 « si la famille est trop envahissante, je dis les choses, je leur dit stop. Si la
famille se braque alors je recommence et j’explique les choses ou je renvois
sur le médecin. Qui lui rappelle que les visites sont réglementées, qu’il faut
respecter la tranquillité du mourant et du service. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « quand la famille est absente, sans la demande du patient je ne fais rien mais
je peux mettre en route le système de l’assistance sociale si le patient est
d’accord. »
9 « éviter une chambre est un moyen de défense, il est toujours possible de se
faire remplacer et l’équipe comprend très bien cette demande. »
9 « les soins palliatifs c’est ce que l’on fait tout les jours c'est-à-dire la prise en
charge psychologique et physique des patients. Aussi bien les soins de confort
que les soins curatif s’ils ont raison d’être. »
9 « être prés à faire de l’accompagnement oui avec l’expérience, mais au début
on ne sait rien car tant que l’on ne se dégage pas du soins, on ne peux penser à
la relation. Il faut compter un an environ pour maîtriser le geste puis ensuite on
peut passer à la relation avec le patient. »
9 « pour une meilleure prise en charge il faudrait plus de personnel, plus de
disponibilité, pour créer quelque chose de cohérent, de fixe… éviter les
intérimaire. »
9 « je suis contre une équipe spécialisée en soins palliatifs, l’équipe peut se
débrouillée ce qu’elle fait plus au moins tout les jours. Que l’intervention de
personnes extérieurs perturberait l’équilibre de l’équipe avec le patient qui
c’est instauré. »
9 « une formation spécifique, ont en a tous fait et chacun en retire ce qui peut, ce
qui veut mais personnellement cela m’a servi surtout sur l’empathie, l’écoute,
la vérité… »
9 « en cas de décès, on le fait constater, appelle le médecin, la famille. On
explique à la famille comment va se dérouler la suite car celle-ci n’est pas
préparée. Le corps reste deux heures dans la chambre à la disposition de
l’entourage. Puis l’équipe reste disponible pour la famille si besoin pour
s’exprimer, s’extérioriser et appeler autour si besoin. L’équipe si besoin pleure
avec la famille, ou le rire prend le dessus sur les larmes avec l’équipe. »
9 « je finie toujours pas connaître les décès, alors qu’on me le dise ou pas peu
importe. A cette annonce je ressent du soulagement, car c’est fini. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « une aide psychologique, selon les décès oui, mais d’abord j’en discute avec
mon équipe (commentaire, anecdotes…) et problème plus important je vais
voire la psychologue individuellement. »
9 « moyen personnel de me détendre, le jardinage. »
9 « les personnes réalisent très bien quand la fin est proche, il en parle : quand,
combien de temps. Je réponds la vérité mais devant leur peur, leur l’angoisse,
leur la mort je voies ma propre mort. L’échéance est la même pour tout le
monde, c’est plus facile a accepté chez les autres que pour soi. En plus de la
vérité, je les aide si besoin à régler leur problème, à dire ce qui doit être dit,
entendre ce qui doit être entendu pour si possible diminuer la souffrance de la
mort. Les réponses que je fais, je les fait en rapport aux attentes du patient et
en rapport à ce que j’aimerais entendre dans sa situation. C’est dans la relation
que tout ceci se crée. »
9 « à cause de la société, il y a beaucoup de tabou autour de la mort en
l’occurrence ici. Ce qui me choque c’est l’utilisation de la morphine, un patient
préfère supporter des douleurs importantes plutôt que d’avoir de la morphine.
Tout ça à cause de la guerre où l’on utilisé la morphine pour les mourants
seulement. Ridicule et toujours encré dans l’esprit des gens, car s’ils sont mis
sous morphine alors cela signifie que la fin est proche. »
9 « chez le soignant de travailler ici j’espère que cela le change, plus ouvert aux
soins, à l’accompagnement. »
9 « changer quelque chose, je ni est pas réfléchi, j’ai appris à m’adapter avec ce
que j’ai. »
Entretien n°5, c’est une aide-soignante diplômée depuis 1978 et qui travaille de nuit
dans ce service depuis 1996. Avant la cancérologie, elle a travaillé dans différents
services comme la chirurgie, les urgences, la rééducation, la neurologie...
9 « j’ai travaillé en cancérologie au début par hasard, mais je ne suis pas déçu à
ce jour. Je me suis bien adaptée au service, aux patients, à l’équipe. Ce sont
des patients comme les autres, la dégradation physique rend le travail plus
difficile, mais se ne sont pas des spécimens à part pour moi. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « je travaille ici depuis six ans et cela ne me dérangerais pas de finir ma
carrière ici. »
9 « ici il y a beaucoup de relationnel : relation de confiance, relation privilégiée
car on les voit régulièrement, on voit leur famille. Il y a donc des liens
particuliers qui se créent. »
9 « l’accompagnement n’est pas facile pour tout le monde, car on n’a pas
toujours les réponses à leurs questions. Je suis pour les formations spécifiques,
si elles apportent des connaissances sur les différentes étapes par lesquelles
passe le patient entre le début de son accompagnement et sa mort. Mais l’école
et les formations n’apprennent pas tout, l’expérience est importante. »
9 « je parle rarement de mon travail à ma maison, je dis simplement que j’ai eu
une sale nuit sans explications particulières. »
9 « mentalement, j’y pense même si tu change de tenue, de cadre malgré tout
dans la journée ça revient surtout si quelque chose de marquant c’est passé.
Heureusement j’ai mes enfants pour me changer les idées, ils me donnent de la
force, j’ai du plaisir à les voir et à les embrasser. »
9 « je dois aux patients du respect, de l’intérêt. Je ne suis pas là que pour changer
la couche, masser les talons… mais aussi pour donner de petites attentions. »
9 « de la reconnaissance, oui quand la relation est particulière, j’attends des mots
comme je suis contente de vous revoir, c’est vous ce soir, dans quinze jours je
reviens vous serais là ? Des paroles qui touchent, qui montre qu’ils sont contes
malgré leur situation. »
9 « si la famille est trop envahissante, je leur explique, je prends le temps avec
eux de discuter. »
9 « si au contraire, ils sont absents, je respecte la situation. »
9 « je n’ai encore jamais éviter une chambre, même si parfois j’ai ressenti un
malaise je rentre quand même. »
9 « pour moi les soins palliatifs c’est ce que l’on fait mais en mieux car ils ont
plus de moyens que nous. C'est-à-dire qu’ils ont deux à trois malades par
soignant, les soignants peuvent donc être présent plus facilement à la
demande. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « je pense que l’on est bien formé mais plus on en voit mieux sait. Car
l’expérience personnelle permet de mieux gérer les prochaines situations. Je ne
refuserais pas des formations en plus mais je préfère mon expérience. »
9 « des moyens en plus, j’aimerais plus de personnel pour plus d’encadrement et
pour plus de présence. Et pourquoi pas la création d’un service spécifique en
soins palliatifs pour une meilleure prise en charge. »
9 « en cas de décès, on prépare le défunt, on attend que la famille vienne. Si la
famille est déjà présente on les laisse un petit moment avec lui, puis on le
prépare et on le laisse encore deux heures à a disposition de l’entourage puis
on l’emmène à la morgue. Chaque décès se passe différemment
selon
l’attachement, les relations créés, mais dans ces cas là on en discute dans
l’équipe, on se soutient entre nous. »
9 « j’aime être au courant des décès, au moment de la relève je sers à savoir
même si ça ne sert pas forcément de savoir. »
9 « l’annonce des décès ne me fait pas tout le temps le même effet cela dépend
des situations. Je peux ressentir de l’impuissance, du désespoir mais c’est pour
tout le monde pareil, on doit tous mourir. »
9 « dans tout les cas j’ai besoin d’aide, mais pas d’une psychologue, mais de mes
collègue de travail. Je n’ai pas encore ressentie le besoin d’aide psychologique
mais j’y suis déjà aller par curiosité et ça ma permis de voire les choses sous
un autre angle, d’expliquer les réactions de chacun. »
9 « en plus de mes collègues, j’utilise mes enfants pour me changer les idées. Je
rentre tranquille chez moi, je jardine, je lis, j’écoute la musique. J’arrive à
garder un bon équilibre. »
9 « quand la fin est proche, ils disent eux même qu’ils sont foutus, qu’il vont
bientôt mourir et le lendemain c’est vrai ils sont morts. Ils s’en rendent compte
eux même. S’ ils me questionnent face à leur mort proche je les rassure en
disant que je ne sais pas. Car le sujet est difficile à aborder. S’ils sont
conscients jusqu’au dernier moment je vais les voir régulièrement pour les
arranger et que les derniers moments soient les plus agréable possible.
Améliorer le moment présent car ils sont toujours vivants. Mais cela ne
m’empêche pas d’être mal à l’aise de ne pouvoir changer la situation. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « la société rend la communication difficile entre le mourant et son entourage,
refus de parler de ce moment, de l’anticiper. »
9 « par contre le soignant en travaillant ici se modifie, il devient plus présent,
parle plus de la mort avec les mourants et l’équipe. Les choses changent tout
doucement, on est plus ouvert même si cela reste un sujet difficile à aborder.
Les soignants se familiarisent plus avec la mort. »
9 « si je pouvais changer quelque chose se serait la mort chez les enfants. La
mort chez les jeunes n’est pas acceptable, annuler la mort avant un certain
âge. »
Entretien n°6, c’est un infirmier de nuit diplômé depuis 1994 et qui a travaillé en
cancérologie après quelques mois d’intérim à la sortie de son diplôme :
9 « j’ai choisi de travailler en cancérologie car j’avais fait des remplacements en
tant qu’intérimaire en sois externes dans ce service, et cela m’avait beaucoup
plue. Je trouve que les patients sont très attachants et qu’une relation
particulière s’engage avec eux. Je suis malgré tout déçu car il y a de plus en
plus de gens grabataires et le service n’est pas adapté, ou de plus en plus de
gens désagréables. »
9 « mais de travailler ici me permet d’être moins égocentrique, de rendre service
aux autres. »
9 « je ne veux pas faire toute ma carrière ici, mais j’ai peur de perdre les
avantages d’ici en allant travailler ailleurs. »
9 « pour moi le relationnel, c’est aider les autres par la parole, aller à l’avant des
gens. »
9 « l’accompagnement n’est pas facile et au début ce n’est pas permis à tout le
monde. »
9 « une formation est nécessaire mais elle n’existe pas forcément alors
j’apprends sur le tas. »
9 « je parle de mon travail chez moi qu’avec des personnes du milieu médical,
c’est un simple échange. »
9 « mentalement je ne pense plus aux patients, avant oui mais j’essayais
d’oublier et aujourd’hui je m’habitue donc ça me touche moins. »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « je ne vois pas ces gens comme de simples patients mais comme si c’étaient
des membres de ma famille pour m’en occuper au mieux, je veux les traiter
comme des personnes de ma famille. »
9 « je n’attend aucune reconnaissance, mais quand elle existe ça fait toujours
plaisir. Je préfèrerais une reconnaissance du milieu médical pour le travail que
l’on fourni, car les patients on autres choses à penser que remercier les gens
qui s’occupent d’eux. »
9 « si une famille devient trop présente je l’a fait sortir de la chambre. Si elle me
court après ou qu’elle refuse la vérité je recommence mes explications et si je
suis à bout j’envoie quelqu’un d’autre de l’équipe. Et dans le pire des cas je
laisse tomber. »
9 « si la famille est absente, cela ne me regarde pas. »
9 « je passe dans toutes les chambres quoiqu’il arrive, mais je reste moins
longtemps si problème particulier. »
9 « pour moi les soins palliatifs ce sont les soins de fin de vie c'est-à-dire le
nursing, le confort…qui prennent beaucoup de temps qu’ici on a pas. »
9 « je ne considère pas avoir eu de formation adapté et donc de ne pas avoir était
préparé. »
9 « il manque plein de moyens, essentiellement du personnel, mais aussi des
locaux inadaptés (pas de lits électriques, pas de nébulisateurs…). »
9 « je suis pour la création d’un service spécifique en sois palliatifs mais je ne
veux pas en faire partie. Car je ne suis pas venu en cancérologie pour faire des
soins palliatifs. Des formations spécifiques pourquoi pas mais avec des gens
qui savent de quoi ils parlent, c'est-à-dire de leurs expériences personnelles,
professionnelles, pas des gens qui font de la théorie. »
9 « en cas de décès, on prépare le défunt, on appelle la famille, puis on reste
disponible à eux. Au sein de l’équipe on s’habitue et pour moi c’est un
soulagement lorsque la personne est âgée, mais je ressens de la tristesse quand
la personne est plus jeune. »
9 « je souhaite être tenu au courant des décès des patients que l’on suit. »
9 « l’aide psychologique je la ressent quand la famille est trop imposante ou trop
agressive pour savoir y faire face. Besoin d’aide pour gérer les familles. Mais
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
personnellement je n’en ressens pas le besoin, on doit tous mourir un jour. Il
existe des groupe de parole mais je n’y suis jamais aller car les horaires ne sont
pas adaptés à ceux qui travaillent de nuit, c’est en plein milieu de la journée
vers quatorze heures. Sinon peut-être que j’y serais aller. »
9 « personnellement j’utilise des moyens futiles pour me changer les idées,
comme faire la fête. »
9 « ils réalisent très bien que la fin est proche lorsqu’ils restent conscient
jusqu’au bout, mais ils abordent le sujet plus ou moins directement, cela
dépend des personnes. »
9 « dans ces cas là je les écoute, je les laisse parler tout simplement. Je ne ment
pas ça ne sert à rien pour eux, mais dire la vérité est trop difficile alors je les
laisse parler tout simplement. »
9 « la société n‘y est pas pour grand chose ça dépend simplement des personnes.
Certains voudront en parler d’autre non. »
9 « entre nous on en parle peu, même si on n’est pas aveugle de ce qui se passe
en service mais on est pas préparé à ce que l’on voit. Je ne considère pas la
mort comme un échec en cancérologie mais comme un soulagement, c’est une
libération pour la personne qui est morte. »
9 « à changer, je ne suis pas Dieu je ne sais pas quoi répondre. Mais si on
changeait déjà les locaux et que l’on embauchait plus de personnel adéquate
alors se serait déjà un début pour un lieu plus idéal pour y mourir et partir
sereinement. »
Entretien n°7, c’est une infirmière de nuit, diplômée depuis 1995 et qui a toujours
travaillé ici (après quelques mois en intérim un peu de partout sauf en psychiatrie) :
9 « au cours d’un stage en tant qu’élève infirmière ce service m’a beaucoup plu,
j’ai donc décidé de venir travailler ici. Ce qui m’a plu c’est l’ambiance du
service et que la cancérologie soit diversifiée au niveau des pathologies. »
9 « au bout de six ans c’est sûre que j’ai eu des déceptions quand tu réalise qu’il
n’y a pas de suivi, que les médecins se déchargent de leur responsabilités face
à la mort… »
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Thème : L’ accompagnement des personnes en fin de vie
9 « la pratique m’a donné de l’assurance, surtout quand tu travailles seule de
nuit. Ensuite cela m’a appris à modérer mes sentiments que l’on ressent face
aux patients que tu connais depuis longtemps, à prendre du recul. »
9 « je ne ferais pas toute ma carrière ici, ça c’est sûre. »
9 « je prime sur le relationnel car la nuit on a plus de temps, les angoisses sont
plus présentes, peu de chance que l’on soit déranger par une sonnette alors que
l’on fait du relationnel. Les conditions sont donc plus favorables. Si les
émotions sont trop fortes, je sais que je peux compter sur mon équipe car on
est très soudé. Il faut savoir se décharger sur elle en cas de besoin. »
9 « l’accompagnement, ce n’est pas facile surtout quand il a des sentiments, de
l’attachement. Tu prends sur toi, mais tu en prends aussi plein la figure, car la
mort renvoie beaucoup de choses. »
9 « des formations spécifiques, oui mais basées sur l’écoute car ce n’est pas
facile t’entendre tout ce qu’ils ont à dire. Il existe des techniques car parfois
même le silence fait partie de la communication quand on n’a pas envie de
parler. Le silence fait passer des émotions que la parole ne fait pas passer. Et
nous il ne faut pas trop que nous parlions en retour. L’expérience apporte
quand même plus que la technique. »
9 « à la maison, je parle peu de mon travail, avec ma sœur oui car on travaille
dans la même milieu. Notre entourage est parfois choqué par ce que l’on
raconte, mais si je ne parle pas il se rendre très bien compte que je suis
énervée. »
9 « mentalement, je le gère plus au moins bien, même si je me fais encore avoir
à chaque fois. Cela dépend des liens tissés entre le soignant et moi. Mettre des
barrières en théorie c’est facile mais en pratique tu est un être humain, tu as du
cœur, des sentiments, les personnes reflètent quelque chose. Soit tu assumes et
tu accompagnes jusqu’à la fin en sachant que se sera difficile, sinon tu changes
d’étage pour éviter de t’en occuper. »
9 « les moyens que j’utilise pour contrôler le flux mentale, je m’occupe de mon
enfant et je fais la part des choses, le boulot c’est le boulot et la vie personnelle
c’est la vie. Sinon tu te fais bouffer et tu te bouffes la vie. Mais quand je pars
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en vacances ou quelques jours j’appelle mes collègues, pour me tenir au
courant des décès, de la situation des patients dans le service. »
9 « je dois le maximum au patient dans mes limites, je fais ce qui est en mon
pouvoir pour qu’il soit bien ainsi que sa famille. De toute façon j’ai mes
convictions, mon tempérament et des choses que je ne tolère pas, même pas du
patient comme l’agressivité, le manque de respect. Je reste donc moi-même en
donnant beaucoup au patient, en faisant en sorte d’être au maximum de ma
forme, d’être polie avec eux. J’attends donc le même respect en retour. »
9 « je n’attends pas forcément de reconnaissance, mais cela est agréable de
savoir que tu fais bien ton boulot, car de la part de tes collègues et de la
hiérarchie tu as plus de blâme que le contraire. Alors un petit compliment fait
toujours plaisir, mais en générale le patient n’a pas besoin de le dire. »
9 « si c’est le patient qui est envahissant tu fais avec, car tu peux pas faire
autrement, il est là. Par contre la famille, si c’est envers moi qu’ils sont
envahissants alors je leur explique que ce n’est pas eux les principaux mais le
patient, donc je recadre en leur expliquant et ensuite je reste disponible à eux,
malgré tout. Mais si la famille est envahissante envers le patient et que celui-ci
le supporte difficilement, alors je prends la famille à part en leur expliquant
qu’il va mourir et que ça ne sert à rien de faire des visites trop lourdes et
inopinées. »
9 « si la famille est absente, ma réaction est difficile, je préfère qu’il y est trop de
personnes présentes autour de lui, que le contraire et qu’il se retrouve seul dans
sa chambre, face à sa mort. J’ai du mal à le concevoir, on dirait que l’on a
abandonné son chien au bord de l’autoroute. Ca me fait mal au cœur, même si
c’est difficile pour la famille, ce que je conçois mais je n’arrive pas à
l‘accepter. Je préfère que la personne m’appelle, s’il n’a pas de famille pour
qu’il ne soit pas seul. Je refuse l’indifférence. »
9 « oui, ça m’est arrivée d’éviter une chambre. Au début j’essayais de me forcer
à renter dans la chambre et de répondre brièvement aux attentes de la personne
en la renvoyant sur quelqu’un d’autres. Mais maintenant quand je ne peux
plus, je le signale à l’équipe qui prend alors le relais même si ce n’est pas son
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secteur. Il est donc important d’avoir une équipe soudée en qui on a confiance
ainsi le patient est mieux pris en charge. »
9 « les soins palliatifs sont faits pour que le patient finisse dans les meilleurs
conditions possibles, le meilleur état possible. C'est-à-dire en souffrant le
moins possible, avec de la confiance, qu’il puisse discuter avec sa famille si
besoin. C’est du travail au niveau de la douleur et du confort pour éviter que la
personne se dégrade trop. »
9 « je n’est pas était formé, mais j’ai eu la possibilité de faire le module
optionnel de soins palliatifs et de visiter une unité spécifique à Vaison la
Romaine, je savait donc à quoi m’attendre et en quoi consister le travail.
J’essaie de faire mon maximum et de traiter le patient comme si c’était
quelqu’un de ma famille. »
9 « il manque des moyens, comme pour leur donner un bain, on a peu de
matériels disponibles pour un meilleur confort. Les matelas anti-escarres sont
insuffisants. Et en ce qui concerne les moyens humains, je pense que l’on est
en nombre suffisant mais que les personnes ne s’en donne pas la peine. »
9 « il faut vraiment avoir envie de travailler en soins palliatifs sinon il vaut
mieux changer de service. Créé un service spécifique pourquoi pas, mais cela
doit être épuisant à la longue pour un service de s’occuper que de mourants.
Psychologiquement très difficile, même si tu ne t’attache pas aux personnes en
cancérologie la prise en charge est longue, on connaît les patients depuis
longtemps, alors je suis plutôt pour des formations plus adaptées que pour un
service spécifique. »
9 « lors d’un décès, on tient au courant la famille, on appelle jamais le médecin
quand c’est la nuit. Car on sait qu’il est mort ça ne changera rien de lui dire.
On aide la famille si besoin, lorsqu’elle est en état de choc. Puis on prépare le
défunt c'est-à-dire qu’on l’habille, on lui fait une petite toilette, on le
débranche, on lui met une couche, on range la chambre pour que la famille
puisse rester avec le défunt pendant deux heures. »
9 « dans l’équipe, quand le décès nous touche beaucoup, on ne dit pas un mot,
on garde un certain silence car cela nous met dans une colère noire. Surtout si
la personne est jeune, ou que l’on connaissait son entourage ou encore quand il
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y a beaucoup d’attachement. Souvent, on reste silencieux pendant une heure
ou deux. Parfois quand la personne est moche, on peut partir en éclat de rire,
cela n’est pas très bien mais c’est pour évacuer la tension. »
9 « j’aime être au courant des décès, car parfois on est étonné de l’apprendre par
hasard. »
9 « en cas de décès m’on ressenti diffère, parfois je peux être insensible si je n’ai
pas eu de déclic ou d’affinités au cours des différentes hospitalisations de la
personne. Et parfois pour d’autres, cela me provoque un pincement au cœur
car je pense à la famille, aux enfants qu’ils laissent derrière eux. On trouve ça
dommage car cela pour être nous, il m’arrive même d’avoir les larmes aux
yeux lorsqu’il s’agit de femme jeune dont les enfants on encore besoin
d’elle. »
9 « oui, j’ai besoin d’aide psychologique ais cette aide je la trouve réellement au
sein de mon équipe avec mes collègues de travail. Pour les réunions de la
psychologue j’ai autre chose à faire, de plus l’équipe de jour ce n’est pas pareil
que l’équipe de nuit, on ne peux pas arriver à faire un travail en commun lors
de ces réunions. De plus c’est sur le moment que j’ai besoin de parler pas
après. J’y suis déjà aller à ces réunions et personnellement cela m’a rien
apporté, les discutions finissent toujours sur les déraillements du service. »
9 « pour évacuer je fais du vélo, je mets toute ma rage sur mes pédales, ou alors
je m’énerve sur le premier qui passe en général mon mari, puis je redeviens
calme. »
9 « les patients se rendent compte quand la fin est proche, ils ne sont pas bête, la
clinique Sainte Catherine n’est pas un lieu anodin. Mais on parle pas de mort
mais de synonymes et de ce qui entoure a mort. Est-ce qu’il vont souffrir, si ils
en ont pour longtemps, comment ça va se passer, qu’ils aimeraient que cela
aille vite…C’est très rare qu’il en parle directement. La mort fait tellement
peur, qu’ils n’en parlent pas sauf si tu discute longtemps avec eux alors ils
vont te parler de leur angoisse, de leur peur. »
9 « face à leur comportement je leur dis la vérité, oui on va tous mourir mais il y
en a à qui ça arrive plus vite. Puis je renvoie sur eux, en leur demandant ce
qu’ils ressentent au fond d’eux même réellement. En général, il te dise qu’il le
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sente que la mort est proche, et le débat s’ouvre pourquoi vous me poser la
question si vous connaissait la réponse. Mais attention quand on ouvre un
débat comme celui-là, il faut vraiment être derrière eux, discuter avec eux, ne
pas les laisser seuls face à cette annonce de mort. »
9 « mon comportement, le plus naturel possible en évitant de faire ressentir mes
émotions. Mais en général, notre
regard nous trahie, les yeux pleurent.
J’essaie de résister jusqu’à la sortie de la chambre mais c’est très difficile. Il ne
faut pas craquer mais les émotions reviennent à chaque fois qu’il faut retourner
dans la chambre. »
9 « la mort est un sujet tabou, mais il y en a qui y sont mieux préparés que
d’autres. C’est à dire qui ont déjà fait certaines démarches mais la peur reste
toujours présente dans tous les cas. Généralement ce n’est pas pour eux qu’ils
ont peur mais pour les êtres qu’ils laissent derrière eux. C’est pourquoi ils en
parlent peu avec leur entourage, de peur de les choquer, de leur faire de la
peine. Souvent la famille ne connaît pas les dernières volontés du patient car
celui-ci à refuser de leur en parler, pourtant le sujet ne tue pas. »
9 « je ne sais pas si c’est en rapport avec la société mais dans le milieu médical,
l’échec est difficilement accepté même si la prise en charge et
l’accompagnement a été fait comme il faut. On pense toujours que l’on peut
mieux faire, et qu’il y a encore à faire en médecine. »
9 « si je pouvais changer quelque chose se serait toutes les maladies qui tuent en
donnant une dégradation physique importante. Cela est moche, car c’est la
dernière image que l’on laisse qui ne reflète aucunement la personne. »
Entretien n°8, c’est une aide soignante diplômée depuis 1992 et qui travaille en
cancérologie depuis 1995 (cela fait 7 ans) :
9 « avant j’ai travaillé en chirurgie, puis j’ai choisi de venir ici après un
remplacement en tant qu’intérimaire. C’est l’ambiance qui m’a donné envie de
rester ainsi que le contact avec le patient »
9 « je ne me vois pas faire toute ma carrière en cancérologie puisqu’en
septembre je rentre à l’école d’infirmière et je souhaite travailler dans d’autres
services. »
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9 « en ce moment pour des raisons personnel, je n’arrive plus à faire du
relationnel, je fuis ces situations. Je n’arrive plus à discuter, je boues car cela
me rappelle ma situation, j’ai besoin de lire le dossier pour comparer avec
moi. »
9 « l’accompagnement c’est très difficile, ce n’est pas permis à tout le monde,
pas à moi en ce moment. »
9 « des formations spécifiques pourquoi pas selon leurs apports, ce que l’on veut
faire, à voir. De toute façon tu choisi de venir travailler ici, tu sais donc à quoi
t’attendre. »
9 « je ne parle jamais de mon travail à la maison »
9 « mentalement c’est fini je n’y pense plus, mais avant pour oublier je m’aérais
ou j’allais au cinéma pour voir un film rigolo même je louais des cassettes
comiques. »
9 « je fais ce que je ressens par rapport au patient, j’apporte de l’aide, je donne
du réconfort moral pour les accompagner le mieux possible. Gérer aux moins
les problèmes d’escarres, de propreté… »
9 « je n’attends aucune reconnaissance »
9 « si la famille est trop envahissante, j’envoies quelqu’un d’autre. »
9 « si l’entourage est absent je reste neutre, je n’ai pas de jugement à porter
aussi bien envers la famille, que envers le patient. Même si ça te fout les
boules, parce que tu sais que la personne va vraiment mal et que seul ce n’est
pas mieux. »
9 « si je n’arrive pas à rentrer dans une chambre, je vais chercher une collègue
pour me remplacer juste dans cette chambre. »
9 « les soins palliatifs ce sont les soins de fin de vie. »
9 « on n’y est pas préparer. »
9 « il manque des formations, du personnel de jour, des lits électriques… »
9 « je suis pour plus de formation mais pas pour un service spécifique. »
9 « lors d’un décès on prépare le défunt pour l’entourage, on reste disponible à
l’entourage que l’on a contacté pour les prévenir. Puis on attend les deux
heures pour amener le corps à la morgue. »
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9 « mes réactions lors du décès dépendent de l’investissement que j’ai eu lors de
cet accompagnement, si tu le connais, si il est jeune ou vieux. Mais j’ai
toujours des réactions, elles sont juste différentes selon les situations. Mais en
ce moment je ne ressens plus rien »
9 « je n’ai pas besoin d’être au courant des différents décès. »
9 « je n’éprouve pas le besoin d’aide psychologique mais de parler avec mon
équipe si besoin oui. »
9 « je suis déjà aller aux réunions de la psychologue quand je travaillais de jour,
mais ça ne m’a rien apporter. Je n‘en voies donc aucune utilité pour moi. »
9 « personnellement j’utilise le cinéma, le vélo, la course ainsi que des moments
avec mon fils pour me changer les idées. »
9 « selon les personnes, il y en a qui réalise que la mort est proche, d’autres non
et d’autres qui ne veulent pas savoir. Peu sont conscient jusqu’au bout. »
9 « il parle très peu de cette mort, car dans les trois quart du temps ils sont dans
le déni complet, ou on leur a jamais dit la vérité ou ils ne veulent pas savoir.
Une personne sur vingt sait ce qu’elle a et décide d’en parler, et ainsi aborder
le sujet de sa mort. »
9 « face à ces peurs j’écoute je suis présente. C’est tellement difficile quand la
personne te touche de rester indifférent, même si on se protège ça arrive de
pleurer avec elle, de craquer. »
9 « le sujet de la mort est tabou, à partir de là beaucoup ne discute pas avec leur
entourage. Tu nais pour mourir mais en prendre conscience est difficile, c’est
de là que vient le tabou provoquant le manque de dialogue entre les mourants
et leur entourage. »
9 « même si on s’habitue aux moments de fin de vie, on ne sait jamais comment
réagir, il existe toujours une difficulté de dialogue. »
9 « on ne peux pas empêcher la mort, mais si je pouvais changer quelque chose
se serait l’échéance. Leur donner plus de temps pour qu’ils comprennent
réellement ce qu’ils ont, qu’ils réalisent mieux les choses et que l’on puisse
leur consacrer plus de temps. »
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