La tomate ancienne, bonne et fragile à la fois

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La tomate ancienne, bonne et fragile à la fois
Date : 10 JUIN 15
Journaliste : Sophie Noachovitch
Pays : France
Périodicité : Quotidien
OJD : 280453
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La tomate ancienne,
bonne et fragile à la fois
AGRICULTURE Alors que les tomates pleine terre arrivent à maturité dans quèlques jours,
les producteurs marmandais disent tout des atouts des anciennes variétés
SOPHIE NOACHOVITCH
marmande@sudouest fr
œurdebœuf.cornuedesAn
des, noire de Crimée, ananas,
green zébra. La poésie s'est
emparée des noms des tomates anciennes. Les étals des marchés ou
des grandes surfacesenproposent
de toutes couleurs, de routes formes
maisaussiauxvaleursgustanvesva
nables «Pourmangerdes tomates
anciennes, le client doit déjà se met
tre en tête qu'il est impossible de les
conserver longtemps, martèle feanRobertGergeres, chef d'exploitation
àMeilhan-sur-Garonne, producteur
Rougehne. Si je ramasse une cœur
debœufle lundi, elle ne pourra se
manger quejusqu'au dimanche enwroa»
Et le consommateur n'est pas à
un paradoxe près. S'il veut un fruit
goûteux, juteux, empli de chair, il
veut aussi qu'il ait une longue durée de vie. « Cela a donné lieu à des
croisements d'espèces dont le résultat était très décevant, se souvient
Marie-Hélène Tillos, productrice à
la Ferme de la Bergerie à Samte-Ba
zeille, exploitation intégrée au réseau des Fermes de Garonne. Elles
tiennent longtemps, maîs elles
n'ont aucun gout »
C
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«ll faut consommer
différemment.
Une tomate ancienne
ne se conserve que
quatre ou cinq jours»
Même constat chez Jean Robert
Gergerès «II existe une tomate appelée anémone, toute stnée, três
belle et qui a une durée de vie longue. Elle ressemble à la cœur de
bœuf maîs elle n'a pas de chair et
pas de gout » Pour les deuxproducteurs, hors de question de se tour
ner vers des variétés hybrides plus
résistantes « Les gens doivent ap
prendie a consommei difféiem
ment, insiste Marie-Hélène Tillos.
Une tomate ancienne se mange
dans la semaine, voire sous quatre
oucmqjours.»
Surtout pas dè réfrigérateur
Et, condition sine quoi non, il ne
faut surtoutpas les même au frigo.
« Le réfrigérateur casse le gout du
fruit, assure le producteur meilha
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Jean-Robert Gergerès produit des tomates sur six hectares de serres et de tunnels à MelLhansur-Garonne.pHGTOb N
nais.D'ailleurs,lesdistributeursont
fait beaucoup de progres a ce niveau Autrefois, ils les mettaient
dans des chambres froides à 3 ou
4 degrés. C'est pour cela que les to
mates achetées en supermaiché
n'étaientpas bormes Aujourd'hui,
ds le font de moins en moins et si
cela arrive encore, les températures
sont bien supérieures, autour de
14°C Onsebatpourqu'ilsarretent
le réfrigérateur. » Conséquence, les
distnbuteurs et plateformes de
fruits et légumes travaillent dêsor
maîs à flux tendu, pouravoii lespioduits les plus frais possibles
Quant au mode de production,
la très grande majorité des producteurs français travaillent sous serre
ou sous tunnel « Cela permet de
protéger les tomates des intempéries, des maladies et des insectes,
souligne Marie Hélène Tillos. En
plein champ, je serais obligée de
traiter. Sous serre, je ne mets aucun
pesticide. Jeproduis en pleine terre,
ce qui apporte des minéraux. »
Pour Jean Robert Gergerès, au
ame difference n'existe entre la production en pleine terre et en hors
sol, si ce n'est l'intervalle duiant
lequel elles dorment les fruits. « En
hors-sol, mes pieds sont couverts de
fruits de mars a fin octobre et en
pleine terre sous tunnel, ils sont
murs à partir du 20 juin C'est la
seule différence Le goût est le
mêmeetlespiedsiecoiventlesmêmes nutriments. » Le producteur
travaille en Protection biologique
intégrée, c'est-à-dire qu'aucun pesticideoufongiciden'estdiffijsé «Le
goût d'un fruituentà40%àla variéte, puis la manière dont le produc
leur travaille son pied de tomates,
plus on le bichonne, plus il vous fait
plaisir, à ce qu'on y met et au mo
ment où on ramasse la tomate • lorsqu'elle est mure »
La fragilité explique le prix
Quant au prix des variétés anciennes, souventsupéneurauxtomates
rondes ou grappes plus classiques,
il s'explique pai sa fi agilité et donc
le risque que prend l'agriculteur.
«Unecœui de bceuf estplusdiffi
aleàproduire Elle demande beaucoup plus d'attention, assure Jean
Robert Gergerès. Sa peau, plus fine,
ne doit subir aucun choc Tout se fait
à la main, hors de question d'utili
ser une calibreuse. » Les fruits rou
ges sontamsi bichonnés pourqu'ils
arrivent toujours aussi beaux et
bons dans nos assiettes
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