la Chine - Touteconomie

Transcription

la Chine - Touteconomie
La Chine, nouvel acteur
de la mondialisation
Comment
multiplier
la richesse
nationale par 9
en 25 ans ?
Le décollage économique de
la Chine depuis le début de
l’ère des réformes défie les
comparaisons, à l’échelle de
l’histoire du pays bien sûr, mais
aussi par rapport aux autres
« miracles asiatiques », seul
le Japon ayant connu un développement plus
rapide : en 25 ans, à parité de pouvoir d’achat, la
richesse créée par la Chine est passée de 4 à 14%
du total mondial, ce qui équivaut à un rattrapage
d’un tiers du terrain perdu sur les 200 années
qui ont précédé. La production de ciment a été
multipliée par 8, l’électricité par 5, l’acier par
4. Malgré la croissance démographique (+320
millions d’habitant depuis 1978), la richesse par
habitant continue d’augmenter sur une tendance
de 7 à 8% par an. Le PIB de la Chine (1410 Md
USD en 2003) occupe déjà le 7 e rang mondial et
dépassera vraisemblablement la France et la
Grande-Bretagne d’ici 2 ou 3 ans. Les volumes
d’échange augmentent plus vite encore : le commerce extérieur total est passé de 21 à 850 Md
USD entre 1978 et 2002 (soit de 10 à 60% du
PIB) et représente désormais 5% du commerce
mondial.
Une politique de réforme unique,
exemplaire… et irreproductible
que devait être le résultat final. Cette approche
pragmatique et graduelle a permis de libérer les
soutiens de la croissance (incitations positives,
contraintes budgétaires et concurrence), mais
par des moyens originaux :
Le développement économique chinois a pris
place dans un cadre institutionnel très éloigné
des canons de l’économie libérale : la libéralisation des marchés n’a pas été complète, les privatisations ont été partielles et tardives, les droits
de propriété privée n’ont pas toujours été établis
de manière claire et le régime politique est resté
éloigné de la démocratie (1). L’expérience chinoise
montre ainsi qu’il est possible de connaître une
croissance soutenue avec des institutions imparfaites et hybrides, à condition que les questions
essentielles du séquençage des réformes et du
partage des gains soient convenablement gérées.
La décision historique de « se réformer et
s’ouvrir sur l’extérieur » est, en effet, partie
de la volonté d’améliorer la productivité et les
conditions de vie, sans idée préconçue de ce
La décentralisation administrative
L’important transfert d’autorité et de compétence du gouvernement central vers les échelons
locaux, engagé dès 1979, a eu plusieurs vertus :
Æ"
les pouvoirs locaux sont mieux à même de
fournir des biens publics appropriés ;
Æ"
la décentralisation autorise des expérimentations régionales, qui ont été et sont toujours un
élément primordial de la méthode chinoise ;
la décentralisation fiscale limite les travers interventionnistes voire prédateurs des autorités vis-à-vis
des entreprises, en raison de la concurrence interrégionale et du lien entre les résultats économiques
locaux et les ressources fiscales locales.
(1) Ce développement s’appuie notamment sur les travaux de Yingyi Qian (Université de Stanford)
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La coexistence de différents modes
de régulation économique
ou le « growing out of the plan »
Le système planifié n’a été éliminé que très
progressivement, mais le développement d’un
marché libre « hors plan » a été simultanément
La substitution partielle du système
financier au budget
Comme d’autres pays en transition, le gouvernement a du faire face à une baisse rapide des revenus fiscaux en pourcentage du revenu national
(de 28,5% à 11% du PIB entre 1978 et 1996) mais
celle-ci a été amortie par les financements tirés
indirectement, via un système bancaire en rapide
développement, d’une épargne captive, peu
rémunérée et abondante. Cela a permis de limiter à la fois les déséquilibres des comptes publics
et les comportements prédateurs des autorités à
l’égard des entreprises. En théorie, l’imposition
Une évolution progressive du régime
des droits de propriété
Contrairement à ce qui s’est passé en Russie,
la réforme économique chinoise a privilégié
l’introduction des règles de marché à celle de la
propriété privée. Alors que la Chine est devenue
un marché relativement concurrentiel comme
l’atteste le niveau très faible de l’inflation avec
une croissance élevée, le transfert de propriété
s’est déroulé de manière à la fois originale, progressive et très imparfaite.
L’émergence et le développement des
Entreprises de Bourg et de Village (EBV)
Bien que les premières réformes aient mis
l’accent sur l’agriculture, la majeure partie
de la croissance des années 80 provient de
l’industrialisation des zones rurales par les
Entreprises de Bourg et de Village (EBV); une
spécificité chinoise, des entreprises relevant
des autorités locales, et qui ne peuvent donc
être classées ni dans le secteur étatique ni dans
le secteur privé. Dans un environnement non
autorisé pour les quantités produites en surplus
des quotas exigés (lesquels restèrent quasiment
constants). Les avantages sont multiples : la libéralisation est attractive politiquement car elle
crée des gagnants et peu de perdants ; l’allocation
des ressources et la productivité sont améliorées.
est préférable mais dans le cas de la Chine, où
le risque de « confiscation fiscale » du potentiel
de développement était grand, la coexistence de
la « répression financière » (contrôle des capitaux, prélèvement d’une « taxe inflationniste »
grâce à des taux d’intérêt réels négatifs, crédit
dirigé) et de l’ «anonymous banking » (autorisation des transactions en cash et des dépôts
bancaires individuels anonymes) s’est révélée
bénéfique. Cet exemple est emblématique du
parcours des réformes chinoises, où la coexistence de plusieurs distorsions constitue, pour un
moment donné, une forme optimale.
régi par le droit et hostile à la propriété privée,
ce statut était synonyme d’accès au crédit et de
sécurité juridique et fiscale. Il était ainsi plus
efficace pour les autorités locales d’accroître
leurs revenus en développant leurs EBV qu’en
augmentant la pression fiscale.
Un transfert progressif des droits de
propriété des entreprises publiques
Parallèlement à un effort de restructuration des
entreprises publiques (réduction des effectifs de
l’ordre de 25 millions de personnes, réduction
des capacités excédentaires, allègement des
charges non liées à l’activité productrice), le
régime de la propriété a, ces dernières années,
progressivement évolué :
Æles petites et moyennes entreprises ont fait
l’objet d’un mouvement massif mais inégal selon
les provinces de transformation en entreprises
collectives voire de privatisation pure et simple
(vente de détail et services) ;
Æl’actionnariat des grandes entreprises a été
diversifié, d’abord entre entités publiques, pour
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limiter les effets de capture de l’actionnaire par
la firme, puis par des introductions en bourse,
d’abord limitées puis plus larges avec pour objectif de contribuer au financement des retraites.
Une gestion pragmatique des gains de la
réforme
Le processus de réformes a pu être imposé et
gagner le soutien d’opposants nombreux et de
perdants inévitables grâce au :
Æchoix d’une méthode très empirique, tirant
parti d’expériences régionales (l’agriculture
d’abord réformée dans un canton, puis une
La Chine et la
mondialisation,
une association
fructueuse
L’investissement étranger a joué un rôle crucial dans le décollage
économique
Une particularité du miracle
chinois est le recours massif à l’investissement
étranger, dès les premières étapes de la réforme
industrielle. Démarrée au milieu des années 80
puis relancée en 1992, celle-ci cherche à utiliser
au mieux les fonds et surtout le savoir-faire étranger en matière de gestion, d’approvisionnement et
de distribution internationale. L’acquisition accélérée de ces compétences, d’abord à partir de la
diaspora chinoise, puis de l’ensemble des industriels asiatiques et occidentaux, a fait gagner à
la Chine un temps précieux. Les entreprises à
capitaux étrangers réalisent aujourd’hui 20% de
la production industrielle et 54% du commerce
extérieur. La dynamique reste très positive avec
un afflux d’IDE annuel en hausse, de l’ordre de
55 Md USD, soit plus de la moitié de ce que reçoit
l’Asie entière.
L’importance de l’IDE en Chine est paradoxale sachant que cette dernière bénéficie d’un taux
d’épargne domestique parmi les plus élevés au
monde, et, en dépit des attraits d’une société de
consommation en plein essor, en augmentation.
province, puis tout le pays) ou délimitées (les
zones économiques spéciales, par exemple) qui a
permis d’esquiver les débats idéologiques ;
Æpartage relativement équitable des bénéfices de
la réforme : loin de créer des gagnants intermédiaires réticents à de nouveaux changements et
d’aboutir à un « partial reform trap », l’approche
graduelle, associée à des schémas de compensation transitoires, a stimulé les espoirs de gains
futurs et permis de s’accommoder d’une perte de
rente à court terme.
En conséquence, bien que l’investissement soit
très important (45% du PIB en 2003 !), la Chine
dispose des ressources nécessaires pour le financer sans faire appel aux capitaux étrangers. Le
bien-fondé de cette stratégie d’ouverture mérite
alors d’être questionné, car même les apports de
capitaux de la part d’investisseurs ont un prix,
qui sur le long terme peut conduire à l’assimiler
à de la dette externe. Dès lors, et bien que les
firmes étrangères continuent à réinvestir majoritairement sur place leurs bénéfices, la question
pour la Chine du coût des 500 Md USD d’IDE
contractés avec l’étranger pourrait se poser à
terme. Dès à présent, on estime en effet que 15
à 20 Md USD de dividendes sont rapatriés chaque
année vers les pays investisseurs étrangers, ainsi
que 35 Md USD de royalties et licences.
En fait, au delà des facteurs traditionnels
d’explication de l’importance des entrées d’IDE
en Chine (la taille de son marché, l’abondance et
le bas coût de sa main d’œuvre, les infrastructures relativement satisfaisantes...), deux spécificités permettent de résoudre le paradoxe :
Æ"
un environnement institutionnel très défavorable à l’activité privée chinoise (impératifs idéologiques, priorités politiques, défaillances du
système financier...), qui a empêché le développe-
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ment d’une industrie exportatrice sans transfert
de propriété à l’étranger. La forte présence des
entreprises à capitaux étrangers dans le secteur
exportateur (plus de 50%) tiendrait donc, en
partie, à un effet d’éviction. Dans des secteurs
tels que l’habillement, où le risque « technologique » et le risque « produit » sont faibles, le
recours à des investisseurs étrangers ne peut être
justifié que par ces handicaps pesant sur l’investissement privé (accès au crédit limité, accès aux
devises limité, droits de propriété incertains...).
En Turquie ou dans les années 1960-70 à Taiwan
et Hong Kong, les entrepreneurs locaux de ce secteur ont en effet préféré se saisir des opportunités extérieures par des contrats de sous-traitance
avec les firmes étrangères.
Æ"
Si la Chine n’a pas besoin d’IDE pour boucler
sa balance des paiements, de nombreux travaux reconnaissent que ceux-ci ont accéléré le
développement technologique de la production
chinoise. Ce point est d’ailleurs commun à l’en-
semble des pays émergents, pour lesquels une
abondante littérature montre que les principaux
bénéfices attendus des IDE tiennent avant tout à
des transferts de savoir faire et de technologie,
directement et indirectement par effet d’apprentissage sur les entreprises concurrentes. Dans
le cas de la Chine, la meilleure productivité des
entreprises à capitaux étrangers ne fait aucun
doute (elle serait, pour le travail, quasiment
double de celle des entreprises publiques). Selon
les calculs du FMI, les entreprises à capitaux
étrangers seraient ainsi responsables de la moitié
des gains de productivité obtenus dans les années
90, soit 2 à 2,5 points de croissance annuelle du
PIB (ceux-ci constituent de loin le principal effet
des IDE sur le PIB, puisque l’effet direct d’accumulation du capital ne serait responsable quant
à lui que de 0,4 point de croissance supplémentaire). Cet effet d’entraînement a par ailleurs
vocation à s’accroître avec le développement de
l’approvisionnement local.
Et son corollaire : l’intégration croissante de la Chine dans le circuit de
production asiatique
La Chine s’insère pleinement dans cette évolution,
dont elle a renouvelé et renforcé les orientations,
notamment à partir de la fin des années 1990.
Entre 1995 et 2001, les exportations asiatiques
vers la Chine ont crû de 11,5% par an (à comparer avec la croissance de 3,8% du commerce
mondial). Cette interdépendance croissante
entre la Chine et ses plus proches voisins fonctionne dans les deux sens :
Æ"
la Corée et Taiwan réalisent de l’ordre de 45%
de leurs échanges avec les pays d’Asie, soit un
gain significatif de 10 points en dix ans. Pour
un tiers, leur commerce extérieur reste localisé
en Asie du Nord-Est, en particulier en Chine, qui
assure près de 13% des échanges de la Corée,
soit un gain de plus de 10 points en dix ans. Les
exportations japonaises en Chine, nulles jusqu’en
1972, représentaient 57 Md USD en 2003 soit 12%
du total japonais.
Æ"
la Chine réalise plus de 45% de ses échanges
De même que le miracle économique des pays
émergents d’Asie est indissociable de leur réussite
commerciale, cette dernière est fondamentalement liée à l’intégration intra-régionale croissante
du processus de production, par des flux d’échanges de biens intermédiaires ou d’investissement.
Ainsi, tandis que la part de l’Asie dans le commerce mondial a été multipliée par 3 entre 1975
et 2001, la part du commerce intra-asiatique a été
multipliée par 6. Au total, et sans qu’un véritable
ensemble d’accords commerciaux préférentiels ait
pu être mis en place (ou alors limité à quelques
secteurs ou quelques pays), le commerce intraasiatique a augmenté de 2,2 à 6,5% du commerce
mondial entre 1985 et 2001, soit nettement plus
vite que le commerce au sein de l’ALENA (de 8,1 à
10,1%) ou de l’UE-15 (de 21,1 à 20,2%).
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avec l’Asie de l’Est, une part élevée qui a toutefois
légèrement reculé depuis le milieu des années
1990, traduisant une certaine réallocation des
priorités entre ses différents partenaires. La
cause en revient à la baisse relative des échanges
sino-japonais, qui représentait en 2001 moins
de 16% des échanges chinois (-9 points depuis
1995), et des échanges sino-hongkongais (en
raison de la normalisation des relations commerciales entre la Chine et ses partenaires et
de la délocalisation de l’activité industrielle
hongkongaise en Chine, le rôle d’intermédiaire
de la RAS a tendance à reculer). Les échanges
entre la Chine et l’ASEAN progressent à partir
d’une base relativement faible, mais si l’ASEAN
reste un débouché mineur de la Chine (7% de
ses ventes en 2003), sa part relative en tant que
fournisseur va toutefois en croissant (11% de ses
achats). Surtout, la Corée et Taiwan sont devenus
des partenaires importants de la Chine (14% au
total des échanges chinois en 2003, soit 10 points
de plus qu’en 1993).
Les investissements en Chine ne sont
en général pas des délocalisations
issues des pays industrialisés
ment dominée par une stratégie de présence sur
le marché chinois. Du reste, les 600 entreprises
françaises présentes en Chine (soit plus de 1000
implantations et 150 000 employés) ne placent
ce pays qu’au 26e rang de nos cibles d’investissements (soit 0,4% de notre stock total d’investissement à l’étranger fin 2002). La délocalisation
dans le secteur des services, type « call-center »
ou développement logiciels, est marginale. De
ce point de vue la Chine se distingue de l’Inde,
même s’il existe une volonté des autorités chinoises de développer ce secteur. La délocalisation
des centres de recherche reste assez faible, car
freinée par les problèmes de respect de la propriété intellectuelle et l’obstacle de la langue.
On assiste cependant à la création de nombreux
centres de R et D en Chine, à côté des centres
existants dans les pays industrialisés, dans une
logique de politique de la recherche globale .
La réussite économique chinoise est indissociable de l’ouverture du pays aux flux de commerce
et d’investissement. Les entreprises étrangères,
encouragées par les autorités, ont contribué de
manière déterminante à la spécialisation industrielle et à son insertion dans les circuits de production et distribution mondiaux. De ce point de
vue, leur apport ne se mesure pas tant en capital
(les capitaux étrangers ne s’élèvent qu’à 10% de
l’investissement total en Chine) qu’en termes de
savoir faire et connaissance de réseaux. Avec
un flux entrant de plus de 50 Md USD par an, la
Chine a été en 2002 et 2003 le 1er récipiendaire
d’IDE dans le monde. Les entreprises étrangères
présentes sur son sol ont apporté avec elles un
capital cumulé de 500 Md USD ; elles contribuent
à 30% de la production industrielle, à 55% du
commerce extérieur, et, dans certains secteurs
tels l’électronique, jusqu’à 70% du CA.
Pour autant, l’idée de délocalisation massive des
industries occidentales en Chine est erronée.
Les délocalisations touchent aujourd’hui surtout les entreprises asiatiques ; plus que l’usine
du monde, la Chine est l’atelier de l’Asie. Dans
les secteurs à forte utilisation de main-d’oeuvre
les délocalisations venant de pays occidentaux
existent, mais l’implantation des entreprises
françaises en Chine reste pour le moment large-
Un ralentissement de la croissance chinoise ou
une saturation de certains secteurs industriels
pourraient certes conduire certaines entreprises, venues s’installer pour le marché chinois,
à chercher des débouchés sur les marchés de
l’Union. La grande distribution, qui achète massivement en Chine, représente sans doute la partie
immergée de l’iceberg, moins visible mais probablement plus importante en termes d’emplois en
France que d’éventuelles délocalisations.
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Une nouveauté : le développement de
grands groupes chinois à l’international
Parallèlement aux flux croissant d’IDE, l’évolution majeure en cours est le développement
de très grands groupes industriels chinois, non
seulement sur le marché intérieur mais aussi sur
le plan international. Cette évolution s’appuie
sur une politique industrielle volontariste, qui a
pour objectif la constitution dans les prochaines
années d’une cinquantaine de grands groupes
publics (deux ou trois « champions nationaux »
par grand secteur jugé stratégique), capables de
Toutefois les progrès enregistrés dans ces différents domaines sont très rapides. L’OCDE estime
que la Chine est au troisième rang mondial des
dépenses de R&D et au deuxième en nombre
de chercheurs, et plus de 300 000 ingénieurs
sont formés chaque année en Chine. Un certain
nombre de grandes entreprises industrielles ont
entamé leur internationalisation : Petrochina,
Sinopec et CNOOC dans le secteur pétrolier,
Baosteel dans la sidérurgie, Huawei ou ZTE dans
les équipements de télécommunication, Lenovo
(ex Legend) dans l’informatique, TCL, Kejian,
SVA, Konka, Changhong dans les téléphones
mobiles et les produits bruns, Haier ou Galanz
dans l’électroménager, Tsingtao dans la bière.
Et plusieurs de ces groupes ont une véritable
politique de marque mondiale, à l’exemple de
Lenovo ou Haier. Comme pour les multinationales occidentales, cette expansion s’appuiera
vraisemblablement autant sur l’investissement
que sur le commerce international : la Chine a
ainsi réalisé en 2002 près de 3 Md USD d’investissements à l’étranger, notamment dans les pro-
résister à la concurrence étrangère sur le marché
intérieur et de s’internationaliser.
Aujourd’hui les faiblesses des groupes chinois
sont connues : taille limitée (11 entreprises chinoises dans les 500 premières mondiales dont
deux industrielles, toutes les deux pétrolières,
Petrochina et Sinopec), faiblesses du management et des structures financières, effort de
recherche insuffisant (la moyenne des dépenses
de R&D des 500 premières entreprises chinoises
est inférieure à 1% du CA contre plus de 5% pour
les 500 premières mondiales), absence de marques reconnues internationalement.
duits manufacturés (Asie centrale), le software
(Inde) et l’énergie (Asie centrale et du Sud-Est).
Ce chiffre est promis à une forte croissance étant
donné que 70% des grandes entreprises chinoises auraient selon une enquête de tels projets à
l’étranger.
Un cas spécifique concerne l’industrie du textile
et du vêtement, où la Chine est de loin le plus
gros employeur du monde avec 28 millions de
salariés. Au terme du démantèlement des quotas
d’importations tels que prévu par l’Accord Textile
Vêtement (ATV) au 1er janvier 2005, il est probable que l’UE assiste à une progression très significative de la part de marché des produits chinois.
De nombreuses études mettent en évidence
un choc pour l’industrie européenne avec une
baisse de la production de l’ordre de 3% pour le
textile et 8% pour l’habillement. Le choc s’avèrera toutefois beaucoup plus violent pour les pays
du bassin méditerranéen avec des baisses allant
de 9% à 33% selon les secteurs et les régions.
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Le défi des réformes
à renouveler
Vers un mode de développement plus
autonome et plus soutenable
Une analyse détaillée des sources de la croissance
économique montre qu’en Chine, comme dans les
autres pays émergents d’Asie, celle-ci a essentiellement reposé au cours des 20 dernières années
sur l’accumulation de capital productif : accumulation du capital humain d’abord, grâce à la phase
la plus favorable de la transition démographique,
accumulation du capital physique ensuite, grâce
à l’investissement des industries d’État, puis des
entreprises collectives qui ont cherché à partir
du milieu des années 80 à faire émerger un
tissu industriel au niveau des villes moyennes.
Le développement rapide du système bancaire
d’État, parallèlement à une propension record des
ménages à l’épargne, ont d’une certaine manière
permis au système de s’auto entretenir à l’écart
de toute contrainte de rentabilité, puisque les
revenus sont systématiquement réinjectés dans
les banques qui, surliquides, les réemploient
ensuite dans de nouvelles constructions de capacités. Bien sûr, le quadruplement du PIB en 25 ans
s’explique aussi par des gains de productivité bien
réels. Cependant ces derniers proviennent essentiellement de la main d’œuvre, et plus précisément
de sa réallocation de l’agriculture vers les centres
manufacturiers urbains et dans une moindre
mesure du démantélement de l’industrie d’État,
alors que la productivité intrinsèque du travail
(résultant du niveau de qualification) et du capital
progresse plus lentement(cf. page 23 du dossier).
De fait, certains considèrent que les taux d’épargne et d’investissement sans cesse croissants (ils
dépassent désormais 40% du PIB), pour un taux
de croissance stable autour de 8% par an, sont
un symptôme patent de la difficulté de la Chine à
allouer efficacement ses ressources.
À ce tableau assez sombre, il manque bien sûr
une composante essentielle, qui sera amenée de
plus en plus à en modifier l’aspect d’ensemble :
le mouvement d’ouverture et de libéralisation,
engagé en 1978, a en effet permis à la Chine de
développer une impressionnante industrie manufacturière, qui en fait la 4e puissance exportatrice
au monde. Étroitement liée au réseau intra-asiatique de production (dans le textile, l’électroménager, et maintenant l’informatique…), la compétitivité de la Chine dans ces secteurs n’est plus
à démontrer. Sa surabondance de main d’œuvre
lui permet de contenir la hausse des salaires (du
moins dans les faibles qualifications) et d’attirer
chaque année environ 50 Md USD d’investissement étranger. Avec l’entrée de la Chine à l’OMC
fin 2001, le mouvement d’ouverture est certes
resté progressif voire pragmatique, mais son
irréversibilité est désormais reconnue. L’enjeu
majeur pour le gouvernement chinois consiste en
effet à réaliser maintenant pour tous les secteurs
et toutes les régions ce qu’il a jusqu’à présent
brillamment réussi pour une fraction. Ce n’est
qu’en remplissant ce pari que l’objectif officiel de
croissance (quadrupler de nouveau le PIB d’ici
2020 et faire de la Chine une société « d’aisance
moyenne ») pourra être atteint. Pour ce faire, les
principes retenus et réaffirmés par les autorités
consistent à faciliter le développement de l’entreprenariat privé, réduire l’activité économique de
l’État à quelques noyaux stratégiques en laissant
les forces de marchés allouer les ressources (sauf
lorsqu’il s’agit d’objectifs précis de développement tels que dans la promotion des provinces
de l’Ouest) et améliorer la cadre des affaires y
compris en mettant en place un État de droit. Les
principaux axes de réformes sont les suivants :
Réduire la stimulation budgétaire et améliorer
son efficacité, en contenant dès 2004 l’évolution
du déficit en niveau (ce qui devrait le faire passer
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sous 3% du PIB) et en rééquilibrant le partage des
ressources entre le centre et les provinces (par
manque de moyens, ces dernières ont recours à
une série d’expédients parfois très malheureux :
impôts illégaux, corruption, investissements
aventureux). La politique d’investissements
publics serait en conséquence concentrée sur
quelques priorités (développement des provinces
intérieures, production et distribution de l’énergie,
éducation, santé, accompagnement social des restructurations industrielles…) ;
Æ Restructurer et consolider l’industrie d’État, en
forçant le démantèlement ou la mise en vente de
structures non rentables et en favorisant le regroupement, par secteur, autour de quelques grands
pôles performants ;
ÆRéformer les banques d’État, en assainissant leur
bilans et en leur donnant les moyens de mieux
gérer leurs actifs ;
Æ"
Redessiner le rôle de l’État gestionnaire, en sépa-
rant ses fonctions de supervision de celles d’actionnaire, tant dans la banque que dans l’industrie
(réforme administrative début 2003 et création
de commissions indépendantes aux compétences
clairement délimitées), en renforçant la responsabilité du management (notamment pour les entreprises cotées, les obligations de transparence sont
sans cesse renforcées) ;
Æ"
Faciliter l’entreprenariat privé : ce dernier a déjà
bénéficié de gestes symboliques forts (autorisation
des entrepreneurs à entrer au PCC, reconnaissance par la Constitution du rôle important du secteur
privé…) et se voit désormais convié à entrer dans
le capital des entreprises publiques pour y apporter ses méthodes de travail. Les PME-PMI feront
l’objet d’une attention particulière : une politique
volontariste et des mesures ciblées doivent faciliter leur accès au crédit bancaire, dont elles étaient
traditionnellement tenues à l’écart en raison
notamment du plafonnement des taux prêteurs ;
Æ"
Libérer
de nombreux acteurs (PME notamment), mais
les mesures de libéralisation restent sur ce point
suspendues au progrès de la réforme des banques
publiques ;
Æ"
Améliorer le cadre des affaires, c’est à dire tout à
la fois l’application des textes, la transparence des
procédures administratives et la responsabilité
des dirigeants. L’enquête comparative menée par
la DREE dans une cinquantaine de pays montrait
déjà en 2000 que la Chine rattrape rapidement son
retard dans ces domaines. La reconnaissance du
fléau de la corruption conduit les autorités à des
mesures drastiques (licenciement et réaffectation
dernièrement de 40 000 policiers, médiatisations
de procès de hauts fonctionnaires…).
les forces de marché. Après avoir
été un atout dans la stratégie de transition
graduelle suivie par la Chine, les derniers
verrous de contrôle sont devenus un frein
voire un handicap à la poursuite du développement. Des mesures ont notamment d’ores et
déjà été engagées dans le démantèlement des
contrôles de change (promotion des investissements vers l’étranger, augmentation des plafonds
convertibles…) et l’acceptation des flux migratoires internes (suppression progressive du passeport interne ou hukou(2)). Dans le secteur financier en particulier, les freins au développement
de la concurrence privée (chinoise et étrangère)
sont reconnus comme un préjudice dont pâtissent
(2) HuKou ou , signifie littéralement « État civil »
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La tactique : le carré interdépendant
des réformes
Les réformes à réussir forment un carré interdépendant : l’assainissement des banques dépend
du succès de la réforme des entreprises d’État,
lui même conditionné par la mise en place de
mécanismes plus performants de protection
sociale. Le financement de ceux–ci reposera en
partie sur la vente d’actifs d’État : les marchés
financiers auront un rôle essentiel à jouer dans
la gestion des fonds ainsi constitués. Les prochaines étapes seront marquées par l’accentuation du
désengagement de l’État dans l’économie et par
la confirmation d’un secteur privé dynamique
et créateur d’emplois. La Commission des Actifs
d’État (SASAC), créée en mars 2003, devrait
La réforme des entreprises publiques
Le secteur public au sens large est à l’origine
d’environ 50% de la production industrielle brute
totale du pays. La réforme des entreprises d’État
en Chine est actuellement, avec la réforme du système bancaire et celle de la protection sociale, un
des piliers de la restructuration et de la modernisation de l’État chinois. Ces 3 axes de réformes
sont d’ailleurs directement interdépendants
puisque la modernisation et consolidation des
entreprises publiques doit pouvoir être accompagnée par une protection sociale moderne, basée
sur les contributions des employeurs et employés,
de même que la réforme des banques passe par
l’apurement du stock de mauvaises créances sur
les entreprises publiques puis l’assainissement
de la relation créancier / débiteur. La nécessité
de faire face à une plus forte concurrence extérieure, issue notamment de l’entrée de la Chine
dans l’OMC rend impérieuse une restructuration
et justifie la place centrale qu’accorde le gouvernement à cette réforme.
C’est une réforme prioritaire pour le
Gouvernement chinois : la réforme des entreprises d’État a été réaffirmée comme étant un des
objectifs centraux de la politique du gouverne-
devenir l’instrument de la redéfinition du secteur
étatique et superviser le processus de privatisation. La Commission de Régulation des Banques
(CBRC), également créée par l’Assemblée du
printemps 2003, a pour tâche le rétablissement
de la situation des quatre grandes banques d’État
et la création d’un système bancaire sain. Les risques sociaux, liés aux reconversions, notamment
humaines, qu’impliquent les réformes structurelles, sont le principal facteur d’incertitude
pour l’évolution du pays dans les prochaines
années. Nous ne traiterons ici que des deux principaux axes de réforme (entreprises et banques
publiques), sachant que la partie suivante est
consacrée aux problèmes sociaux.
ment pour la période du Xe Plan quinquennal
(2001-2005). Déjà en 1997, le XVe Congrès du
Parti Communiste chinois en avait fait une priorité
pour les trois années suivantes. Au terme de cette
période, les chiffres officiels de la Commission
d’État au Plan indiquaient qu’un tiers des 6 599
grandes et moyennes entreprises d’État recensées
en 1997 avait soit disparu, soit été repris, soit avait
renoué avec les bénéfices. Bien que les entreprises non rentables restent nombreuses, le bénéfice
net global a connu une nette amélioration (de
81 Md RMB en 1997, ils est passé à 265 Md RMB
en 2002), de même que la part d’entreprises
rentables (de moins d’un tiers à la moitié). De
grandes entreprises d’État ont même été cotées
sur les principales places financières internationales comme Hong Kong (PetroChina, Banque de
Chine, China Telecom… ) ou New York (Sinopec,
Huaneng Power...).
Des efforts ont été déployés en terme de rationalisation des coûts, de gestion des surcapacités
productives et d’amélioration du capital humain.
Les autorités incitent désormais les entreprises à
adopter de nouvelles formes juridiques (sociétés
par actions), à opérer des fusions, pour constituer dans les 5 ans une cinquantaine de groupes
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industriels capables de réaliser de véritables
économies d’échelles, et à rechercher une cotation sur les marchés financiers internationaux.
Parallèlement, les autorités incitent les entreprises à se séparer de leurs actifs non essentiels et
à faire entrer dans leur capital des investisseurs
stratégiques. Des réglementations ont été passées
pour accélérer la mise en vente des actifs d’État,
en veillant à en améliorer la transparence et le
mécanisme de fixation de prix afin d’éviter ce qui
apparaîtrait comme un bradage du bien public.
Cette réforme a un coût social important : inadaptées aux normes de l’économie de marché et
aux standards internationaux de productivité, les
entreprises d’État chinoises ont dû se séparer
d’un grand nombre d’employés, souvent pléthoriques. Plus de 30 millions de personnes auraient
été licenciées depuis 1998 (soit près de 40% de
la main d’œuvre industrielle totale, les autorités
annonçant un taux de réembauche de 66%).
La crainte du « chaos » social préoccupe tout
particulièrement les autorités qui doivent gérer
cette transition dans la stabilité. Les tensions
sociales se font désormais plus vives en Chine
car les entreprises d’État, plus que de simples
entités économiques, jouaient le rôle d’institutions sociales. Le « contrat social » institué par
la République Populaire dans les années 1950
reposait sur le concept du « bol de riz de fer » :
des salaires très faibles en échange de l’emploi à
vie et de la prise en charge par l’employeur, c’est
à dire les entreprises d’État, de l’intégralité de
la protection sociale (soins médicaux, retraites),
mais aussi de l’éducation et du logement. Leur
incapacité actuelle à assumer l’intégralité de ce
fardeau financier rend plus que jamais nécessaire
la création d’un système de protection sociale en
Chine, pour l’instant à l’état embryonnaire.
La réforme des entreprises est une condition au
succès de la réforme du système bancaire : les
entreprises d’État absorbent encore aujourd’hui
plus de 70% des crédits accordés par les banques
chinoises qui demeurent sous la coupe de l’État
ou d’émanations de l’État. Un assainissement
des bilans des banques est indissociable d’une
remise en cause de la politique de distribution de
crédit. Pour les banques chinoises, dont le niveau
des mauvais prêts en proportion des actifs bancaires est considérable - officiellement 20% pour
les principales mais près du double selon des
estimations indépendantes (et ce après transfert
de 168 Md USD à des structures de défaisance
en 1999) - , la réforme des entreprises d’État
est indispensable pour éviter une implosion du
système.
Cette réforme est soutenue par la nouvelle équipe
dirigeante. La réforme des entreprises d’État
avait connu un certain ralentissement en 2001 et
2002, qui peut être attribué à plusieurs facteurs
(réactions sociales, à l’exemple des manifestations particulièrement importantes dans le nord
est du pays au printemps 2002 ; réticences des
autorités locales ; lenteur de la mise en place du
système de protection sociale ...).
La nouvelle équipe de dirigeants chinois mise
en place en mars 2003 a donné une nouvelle
impulsion. L’Assemblée Nationale Populaire a
adopté le 10 mars 2003 une réforme des instances gouvernementales, qui crée notamment
la Commission des Actifs d’État (SASAC), en
charge de la valorisation et de la réforme des
entreprises publiques. Elle devrait procéder à
une accélération des ventes partielles ou totales
à des investisseurs privés. Par la suite, la session
plénière de l’ANP en mars 2004 a entériné l’ajout
historique dans la Constitution de la protection
de la propriété privée, désormais officiellement
« inviolable », tandis que la propriété publique
reste « sacrée ».
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La réforme bancaire
La réforme bancaire en Chine a été portée au
centre des préoccupations des responsables
économiques chinois par l’éclatement de la crise
dite asiatique. La réforme qui avait été engagée
quelques années plus tôt a été vigoureusement
relancée et des actions concrètes et institutionnelles ont été prises rapidement, notamment la
recapitalisation des banques commerciales et la
création de structures de défaisance (AMC), auxquelles ont été transférées les mauvaises créances, nées avant 1996, pour un montant équivalent
à 168 Mds USD (soit 15% des actifs des banques
commerciales d’État à fin 1999). Cinq ans après,
les résultats obtenus sont décevants, tant dans
la restructuration et la mise en vente des portefeuilles de mauvaise dette par les AMC que dans
l’amélioration des bilans et pratiques des ban-
ques. Alors que le marché bancaire chinois doit
s’ouvrir progressivement à la concurrence d’ici fin
2006, il devient prioritaire de doter enfin la Chine
d’un système financier efficace.
À cette fin, l’Assemblée Nationale Populaire a avalisé le 10 mars 2003, la création d’une Commission
de Régulation Bancaire, indépendante de la
Banque Centrale qui jusqu’ici régulait et supervisait le secteur bancaire. Présidée par l’ancien
président de la Banque de Chine, LIU Mingkang,
la CBRC a engagé des enquêtes de terrain avant de
proposer un cadre général de réforme, associant
un resserrement de la supervision bancaire et
des objectifs quantitatifs impératifs de résultats,
ainsi que pour 2 des principales banques (Bank
of China et China Construction Bank), un programme d’ouverture du capital (mise en bourse,
probablement à Hong Kong et New York).
Le ratio de prêts non performants a connu une
diminution sensible (de 26 à 20% sur l’année
2003), mais il s’explique à 80% par une augmentation rapide du volume global de crédit (plus de
20% en rythme annuel). Plus que jamais, les progrès en matière de provisionnement apparaissent
insuffisants pour permettre de respecter l’objectif
de moins de 10% de mauvais prêts à horizon de 5
ans. Les banques ont certes utilisé une part substantielle de leurs profits avant impôt pour provisionner ces mauvaises créances (certaines y affectant jusqu’à 87% du résultat), comme le permet
maintenant la nouvelle réglementation, mais un
simple calcul montre que même avec des profits
en croissance il faudrait entre 15 et 20 ans selon
les banques, en l’absence de toute nouvelle génération de mauvais prêts, pour apurer le stock actuel.
Les autorités mènent donc parallèlement une
nouvelle injection de fonds publics, qui a pris
la forme originale d’un abandon de participation d’État et d’un transfert de réserves de
change dans la BOC et la CCB pour un montant
de 45 Md USD en décembre 2003, et devrait être
suivie à partir de fin mai de nouveaux transferts
de mauvais prêts aux structures de défaisance.
L’idée sous-jacente est de rendre les comptes
de ces deux banques pilotes présentables aux
investisseurs étrangers potentiels, mais aussi
de briser la dépendance des banques envers
leurs débiteurs insolvables, relation malsaine
dans laquelle l’intérêt mutuel était de cacher les
problèmes. Le souci majeur demeure en effet de
mettre fin au climat d’irresponsabilité (« alea
moral ») dans des banques déjà secourues sans
succès au cours des années passées. La dernière
étape sera la « privatisation » (partielle dans un
premier temps) par l’introduction en bourse et
le placement de la banque sous le regard permanent et attentif des actionnaires et des analystes
financiers, avec dans certains cas l’entrée dans
le capital d’un partenaire étranger qui apportera
ses normes de gestion et son savoir-faire dans la
perspective de l’ouverture complète à la concurrence d’ici fin 2006.
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