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Les Notes de l’Institut Diderot
ERIC KESLASSY
Une Assemblée nationale
plus représentative ?
Sexe, âge, catégories socioprofessionnelles
et ”pluralité visible”
www.institutdiderot.fr
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ERIC KESLASSY
Une Assemblée nationale
plus représentative ?
Sexe, âge, catégories socioprofessionnelles
et ”pluralité visible”
Automne 2012
Les Notes de l’Institut Diderot
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SOMMAIRE
AVANT-PROPOS
p. 5
Jean-Claude Seys
UNE ASSEMBLÉE NATIONALE
PLUS REPRÉSENTATIVE ?
P. 7
Eric Keslassy
LES PUBLICATIONS
DE L’INSTITUT DIDEROT
P. 31
3
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AVANT-PROPOS
Éric Keslassy fait le tableau de la représentation des Français
dans les instances élues, en particulier au Parlement ; pour être
factuelle elle n’en soulève pas moins d’intéressantes questions
concernant la représentativité en démocratie et l’exercice du pouvoir.
Les Grecs anciens, qui nous ont légué le concept de démocratie,
simplifiaient le problème de la représentativité en ne considérant
comme citoyens qu’une fraction minoritaire et relativement
homogène de la population : les hommes libres, chefs de famille,
autonomes sur le plan économique ; les élus constituaient
mécaniquement un miroir du corps électoral, sinon de la société
dans son ensemble.
Par rapport à cette situation archétypale, les sociétés modernes
se caractérisent par trois traits essentiels :
Elles rassemblent des populations très importantes.
Elles sont devenues très hétérogènes sur le plan économique,
culturel et religieux.
Tous les membres sont considérés comme citoyens, à l’exception
des mineurs de 18 ans et, pour l’instant encore, des étrangers.
Un certain nombre de contradictions naissent de ces évolutions.
• Un scrutin majoritaire exclut les minorités de la représentation
nationale mais un scrutin proportionnel, où toutes les diversités
seraient représentées, tendrait au blocage du processus
décisionnel.
• La complexité des tâches appelle une professionnalisation du
personnel politique mais celle-ci enlève son sens à l’élection.
• La professionnalisation implique un âge moyen élevé du
personnel élu, peu propice à la prise en compte rapide des
évolutions sociales et techniques, mais le rajeunissement
supposerait un renouvellement fréquent contraire à l’exigence
de compétence.
• Le renouvellement fréquent du personnel politique bénéficie
à des segments de la population qui n’encourent pas de risque
professionnel, en particulier les fonctionnaires, amenuisant la
distance nécessaire entre pouvoirs législatif et exécutif.
5
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• Le cumul des mandats favorise la professionnalisation mais limite
le nombre d’élus et freine le renouvellement générationnel.
Au-delà des grands mots sur lesquels tout le monde s’accorde,
Éric Keslassy nous invite à apporter de vraies réponses à ces
questions pour que la démocratie demeure vivante.
UNE ASSEMBLÉE
NATIONALE PLUS
REPRÉSENTATIVE ?
Jean-Claude Seys
Président de l’Institut Diderot
SEXE, ÂGE, CATÉGORIES SOCIOPROFESSIONNELLES
ET « PLURALITÉ VISIBLE »
En dépit de quelques « éclaircies », la France traverse une longue
période de « gros temps ». Sans trop exagérer, on peut considérer
qu’elle est aux prises avec une crise économique qui ne cesse de
se renouveler depuis 1973. La crise des dettes souveraines n’est
finalement que le dernier avatar d’un dysfonctionnement
structurel apparu avec le « choc pétrolier ». Les conséquences
économiques et sociales sont connues : chômage de masse,
inégalités et exclusion. L’impact politique en a été par contre
sous-estimé : il a conduit à une crise de la démocratie représentative.
On occulte trop souvent que les difficultés économiques, en
perdurant, sont à l’origine d’une crise politique qui se manifeste
notamment par une abstention croissante et la montée des
extrêmes.
Au sortir des élections de 2012, il est désormais temps de prendre
acte du fait que cette perpétuation des crises économiques a nourri
une grave crise politique. Une grande partie des citoyens n’accorde
plus leur confiance à leurs représentants, qu’ils soient de droite
ou de gauche, pour résoudre leurs problèmes économiques et
sociaux. Ils ressentent avec d’autant plus d’acuité que le politique
est dominé par l’économique, que son impuissance a déjà été
admise par les responsables en place. Rappelons-nous du fatalisme
de François Mitterrand concédant que tout a été essayé contre
le chômage ou de Lionel Jospin qui lance, devant des ouvriers
médusés, que « l’État ne peut pas tout » face aux délocalisations
des usines. Et la déception s’est renforcée lorsque le volontarisme
affiché par Nicolas Sarkozy en matière de pouvoir d’achat fut démenti
6
7
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par les faits. Sans parler de ce que les marchés financiers et la
mondialisation paraissent de plus en plus ouvertement déterminer
les grandes orientations des politiques publiques. En participant
faiblement aux consultations électorales1 ou en votant pour des
partis qui n’ont pas encore gouverné – et qui, dans le cas du Front
national, possède a priori peu de chance de le faire –, les citoyens
envoient un message assez facile à interpréter : ils reprochent aux
élus leur manque d’efficacité et, au total, leur inaptitude à résoudre
leurs soucis économiques et sociaux.2
Cette défiance générale envers le politique n’empêche pas
l’expression de deux demandes fortes de la part du corps social.
La première est une exigence éthique. Alors que les Français sont
aujourd’hui 69 % à juger les politiques « plutôt corrompus » 3, ils
attendent d’eux qu’ils adoptent un comportement irréprochable
tant sur le plan du respect de la loi que de la morale. Cette note
n’a pas pour objet d’examiner les conséquences de ce double
constat mais remarquons que la multiplication des ‘affaires’ –
qu’elles soient judiciaires ou simplement médiatiques – est
évidemment un bien mauvais signal.
La seconde exigence des citoyens à l’égard du personnel politique
est une demande de représentativité : « puisque vous êtes inefficaces,
nous souhaitons au moins pouvoir nous reconnaître en vous ».
La distorsion sociologique qui existe depuis longtemps entre le
« pays légal » et le « pays réel » est désormais perçue comme une
nouvelle trahison. Les politiques l’ont d’ailleurs bien compris,
comme en atteste certains des critères retenus au moment de la
formation des récents gouvernements. On l’a oublié aujourd’hui
mais, en 2007, Nicolas Sarkozy s’était déjà engagé à mettre en place
une équipe gouvernementale parfaitement paritaire. Avec huit
hommes et sept femmes parmi les ministres, le premier
gouvernement de François Fillon tenait presque la promesse
– les quatre secrétaires d’État étaient cependant des hommes et,
au lendemain des élections législatives, le remaniement entraîna
la constitution d’un gouvernement beaucoup plus déséquilibré 4.
Outre la question du genre, Nicolas Sarkozy fit sensation en
demandant à son Premier ministre de nommer trois femmes
relevant des minorités visibles. La nomination de Rachida Dati
fut, sur ce point, très symbolique : pour la première fois, une
Française issue de l’immigration se voyait attribuer un ministère
régalien. En 2012, sur les deux critères de représentativité
mentionnés – le sexe et l’origine ethnique –, François Hollande
est allé plus loin que son prédécesseur, confirmant qu’une
dynamique est sans doute définitivement lancée. Au cours de la
campagne présidentielle, il s’est engagé à avoir un gouvernement
absolument paritaire et qui tienne compte de la « diversité » de
la société française. De fait, les deux équipes gouvernementales
mises en place par Jean-Marc Ayrault sont strictement paritaires.
Avec les ajustements jugés nécessaires après les législatives, le
second gouvernement Ayrault présente même davantage de femmes
que d’hommes ministres de plein exercice. Et l’engagement en
matière de « diversité » est aussi respecté : trois ministres et quatre
ministres délégués appartiennent aux minorités visibles. Notons
que les ultra-marins y sont représentés comme jamais (trois
ministres sont nés dans les DOM-TOM, ce qui n’avait jamais été
le cas jusque là sous la Vème République) et que le poste de Garde
des Sceaux a été confié à Christiane Taubira – comme si, sur ce
point qualitatif, François Hollande ne pouvait pas faire moins que
Nicolas Sarkozy. Qui plus est, cette remarque est loin d’être
anecdotique, les ministres relevant des « minorités visibles » des
gouvernements Ayrault sont tous des élus et, pour 6 d’entre eux
(sur 7), il s’agit de professionnels de la politique. La volonté de
la gauche de composer des gouvernements représentatifs paraît
donc davantage relever de la conviction que celle de la droite.
N’oublions pas que, lorsqu’elles furent nommées, Rachida Dati,
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1. Observons tout de même que, globalement, les élections à forte intensité
politique (présidentielles et, dans une moindre mesure, législatives) connaissent
de bien meilleurs taux de participation que les élections à faible intensité
politique (comme les européennes, les cantonales ou les régionales). Rappelons
cependant que les deux tours des dernières élections législatives (10 et 17
juin 2012) ont connu les plus fort taux d’abstention jamais enregistrés sous la
Vème République : 42, 8 % et 44, 6 % (données du ministère de l’Intérieur).
2. Nous n’ignorons pas que les explications de l’abstention, comme celles de
la progression des extrêmes, sont nombreuses. Il n’entre pas dans la vocation
de cette note de les analyser.
3. Baromètre de la confiance politique du CEVIPOF, octobre 2011.
8
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4. Précisons que le second gouvernement de François Fillon prévoyait une sorte
de « compensation » puisque trois grands portefeuilles ministériels étaient détenus
par des femmes : outre Rachida Dati à la Justice, Michèle Alliot-Marie fut nommée
à l’Intérieur et Christine Lagarde à l’Economie.
9
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Rama Yade et Fadéla Amera ne s’étaient jamais présentées
devant les électeurs. Et leurs destins respectifs sont très loin d’être
enviables. Si bien que la démarche de Nicolas Sarkozy apparaît
a posteriori comme une tactique purement politicienne pour
occuper l’espace médiatique.
Il reste que, indépendamment de leurs motivations, les
politiques cherchent aujourd’hui à répondre à l’exigence citoyenne
de représentativité au niveau du pouvoir exécutif. Mais l’institution
censée directement représenter la Nation se situe au niveau du
pouvoir législatif : il s’agit de l’Assemblée nationale. Les élections
législatives sont effet des élections nationales : chaque député
n’est pas seulement l’élu de sa circonscription mais bien celui
de la Nation tout entière. Il en représente en fait une part de 1/577.
Cette approche de la souveraineté nationale, qui fait de la Nation
une entité abstraite, a longtemps délégitimé tout débat autour
de la représentativité de la représentation nationale. La loi sur
la parité du 6 juin 2000, rendue possible par une modification
des articles 3 et 4 de la Constitution (en 1999), a constitué une
sorte de brèche : on y reconnaissait que la Nation « indivisible »
est composée d’hommes et de femmes dont il faut favoriser « l’égal
accès » « aux mandats électoraux et fonctions électives » (article
1er de la Constitution). Il est donc désormais juridiquement admis
que les députés doivent ressembler à la population du point de
vue du genre. Par contre, ce n’est pas formellement le cas pour
les trois autres critères que nous entendons étudier : l’âge, la
catégorie socioprofessionnelle et la « pluralité visible ».
Pour autant, il paraît essentiel aujourd’hui de tenir compte des
aspirations citoyennes pour une meilleure représentativité : une
nette majorité de Français (55%) considère que « la société française
n’est pas très bien représentée et (qu’) il est important que plus
de jeunes, de femmes et de personnes issues de l’immigration
exercent des responsabilités politiques. »5 Ajoutons qu’une trop
forte distorsion entre la composition sociale des députés et celle
du peuple met à mal le principe démocratique fondamental de
l’égalité devant le mandat public : l’article 6 de la Déclaration des
droits de l’Homme et du citoyen (26 août 1789) stipule en effet que
tous les citoyens « égaux en droit », « sont également admissibles
à toutes les dignités, places et emplois publics, selon leur capacité
et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs
talents. » Le fait qu’il y a en réalité, depuis très longtemps, un profil
type du député – homme, blanc, de plus de 50 ans, appartenant
aux couches sociales supérieures – témoigne au contraire de
l’existence de blocages qui, de fait, ne donnent pas à tous les Français
les mêmes chances d’entrer au Palais Bourbon. Éviter une
déformation trop importante de la distribution sociale des
députés apparaît donc comme une nécessité démocratique, ne
serait-ce que pour améliorer l’image du personnel politique. Rien
n’est plus dévastateur, en ces temps de crise de la démocratie
représentative, que la perception d’une classe politique coupée
des réalités sociologiques d’un peuple qu’il est censé représenter.
L’image d’un monde politique, replié sur lui-même et favorisant
l’entre-soi, est directement à l’origine du scepticisme des citoyens
vis-à-vis de ses représentants.
Pour autant, s’interroger sur la représentativité de l’Assemblée
nationale ne signifie pas qu’il soit souhaitable de rechercher une
« représentation miroir ». Il ne s’agit pas de retrouver les
équilibres précis de la population sur les bancs de l’hémicycle.
Le principe des élections rend d’ailleurs irréel une telle perspective
en croisant les quatre critères évoqués plus haut. On peut alors
décider de privilégier seulement l’un des paramètres pour tenter
de réduire la distorsion. Si la pression de l’opinion publique est
aujourd’hui moins forte en ce qui concerne l’âge et les catégories
socioprofessionnelles, certains souhaitent l’introduction d’une
loi sur la « diversité » suivant le modèle de la loi sur la parité.
Cela supposerait certainement d’établir un système de quota
ethnique qui constituerait un remède pire que le mal. Outre qu’il
s’agirait d’une mesure anticonstitutionnelle – un obstacle juridique
qu’il est toutefois toujours possible de lever en cas de volonté
populaire –, cette réforme imposerait de définir des groupes
ethniques d’appartenance, posant ainsi le redoutable problème des
frontières entre communautés, et renforcerait inévitablement un
processus de communautarisation déjà à l’œuvre dans notre société.
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5. 30 % affirment qu’« il est vrai que la société française n’est pas très bien
représentée mais (qu’)il n’est pas important que plus de jeunes, de femmes et
de personnes issues de l’immigration exercent des responsabilités politiques,
car le plus important ce ne sont pas les personnes mais les idées » et seulement
12 % pensent que « la société française est bien représentée par les hommes
politiques ». « L’attitude des Français à l’égard de la diversité et de la représentation
politique », Sondage CSA réalisé pour Le Parisien/Aujourd’hui en France réalisé
en octobre 2006.
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On l’a compris, dans notre esprit, il n’est donc pas question
de promouvoir l’idée d’une « représentation miroir ». Dans un
premier temps, nous évaluerons la répartition sociologique des
députés de la XIVème législature qui a débuté le 20 juin 2012 à
l’aide des notices biographiques publiées sur le site de l’Assemblée
nationale. Ensuite, nous étudierons les solutions techniques qui
seraient susceptibles d’améliorer la représentativité de l’Assemblée
nationale, en particulier le non cumul des mandats.
Document 2 : Age moyen des groupes politiques en 2012
Gauche
Socialiste,
Groupe
Radical,
Union des
Union
démocrate et Républicain Écologiste républicain, démocrates
pour un
Républicaine et Citoyen
démocrate et
et
Mouvement
(principalement (principalement
progressiste indépendants Populaire
Front
Parti
de Gauche)
Socialiste)
61
54
(principalement
Parti Radical
(alliance des
centristes)
de Gauche)
50
54
54,5
55,5
Le document 2 ci-dessous indique quelques différences de
moyenne d’âge en fonction des groupes politiques qui se sont
formés pour la XIVème législature. Si les écologistes sont les plus
jeunes, l’âge moyen du groupe socialiste se situe seulement
quelques mois en dessous de la moyenne, loin des promesses de
campagne et de la rupture générationnelle occasionnée par la prise
de pouvoir en 1981.
Alors que 40 % de l’effectif du Palais Bourbon a été renouvelé,
comment peut-on expliquer que le rajeunissement ne soit pas
plus prononcé ? Précisément parce qu’il n’y a pas eu de véritable
« rupture » générationnelle. Quelques chiffres permettent de le
démontrer aisément : les députés de plus de 50 ans représentent
68 % du total des députés quand le poids des moins de 40 ans
est de 9,5 % et celui des moins de 30 ans est de 0, 35 %.7 Rappelons
que les 18-36 ans représentent pourtant 29 % de la population
et 26 % des inscrits. La surreprésentation des quinquagénaires
et des sexagénaires par rapport à d’autres tranches d’âges est donc
relativement nette dans l’hémicycle.
Mais un renouvellement générationnel est-il réellement
possible ? Sauf circonstances politiques particulières, comme le
passage de la IVème République à la Vème République en 1958 ou
une prise de pouvoir après une très longue cure d’opposition
comme en 1981 (voir document 1), le rajeunissement de
l’Assemblée nationale semble peu envisageable. Avant d’être
confronté aux choix des électeurs, un candidat se doit d’être investi
par son parti politique. Dans cette perspective, il est évident que
l’expérience politique accumulée au fil des années est toujours
une donnée importante : un ancrage territorial ou un long travail
de militant sont presque des passages obligés avant d’obtenir une
chance de décrocher un mandat national. Par ailleurs, se porter
candidat suppose d’être déjà accompli dans sa vie professionnelle
6. Précisons que le 21 juillet 2012, les suppléants des membres de gouvernement
sont devenus députés. Leur moyenne d’âge (53,5) est légèrement plus élevée
que celle des élus de juin 2012 (52,9). Comme ils ne sont que 25, cela ne modifie
pas significativement l’âge moyen de l’Assemblée nationale. Sauf indication
contraire, les chiffres proposés dans le reste de la note sont calculés au 21 juillet
2012.
7. Pour un député de moins de 40 ans, il y a 3,5 députés de plus de 60 ans. Ce
coefficient qui donne une bonne indication de l’homogénéisation générationnelle
est en net recul puisqu’il s’établissait à 9 dans la législature précédente. Voir
Louis Chauvel,« L’âge de l’Assemblée (1946-2007).Soixante ans de renouvellement
du corps législatif : bientôt, la troisième génération », LaVie des idées, 22 octobre
2007.
UN RENOUVELLEMENT GÉNÉRATIONNEL ?
A en croire les dirigeants socialistes lors de la dernière
campagne, le changement de majorité à l’Assemblée nationale
devait permettre un véritable renouvellement générationnel.
Résultat : bien qu’en légère baisse par rapport à la législature
précédente, l’âge moyen des députés reste élevé (54,6 contre 55,1),
comme l’indique le tableau suivant (document 1).Toutefois, excepté
en 1986, l’âge moyen des députés ne cessait d’augmenter depuis
1981, date à laquelle il n’était que de 49 ans. L’Assemblée nationale
de 2012 met donc un terme salutaire au « vieillissement »
continu des représentants de la Nation.6
Document 1 : Age moyen des députés sous la Vème République
1958 1962 1967 1968 1973 1978 1981 1986 1988 1993 1997 2002 2007 2012
48,6 50,8 52,8 51,4 52,9 51,2
49
50,8 50,4 51,9 52,2 53,5 55,1 54,6
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(pour disposer d’un capital économique favorisant le financement
de sa campagne et d’un capital social élargi) et stabilisé dans sa
vie privée, notamment pour pouvoir dégager du temps. Autant
de propriétés personnelles que l’on détient plus surement avec
les années. Sans volonté politique réelle des partis politiques8, il
paraît donc très difficile d’obtenir un véritable rajeunissement
de l’Assemblée nationale.
proche de la parité.10 A l’inverse, l’UMP, qui possédait la majorité
dans la législature précédente – et donc de nombreux députés
sortants plus difficiles à ne pas investir s’ils ont bien travaillé –
a présenté moins de 30 % de femmes pour les dernières élections
législatives, avec pour conséquence de faire baisser la part de son
groupe à l’Assemblée nationale de 14,4 % en 2007 à 13,8 % en
2012 ! La situation, particulièrement choquante, de l’UMP à Paris,
n’investissant aucune femme dans une circonscription gagnable
par la droite est finalement assez symbolique.
LES PROGRÈS DE LA PARITÉ ?
Peu ouvert aux jeunes, le monde politique est contraint par la
loi de faire une place aux femmes depuis le vote de la loi sur la
parité du 6 juin 2000. Si bien que la représentation des femmes
à l’Assemblée nationale progresse, comme l’indique le document
3 ci-dessous : après l’effort voulu par Lionel Jospin en 1997 – qui
avait demandé de réserver 30 % des circonscriptions du Parti
socialiste à des femmes –, les deux dernières législatures
témoignent des avancées réalisées. En 2012, on compte 153
députées 9 et, pour la première fois, plus du quart des députés
sont des femmes (26, 5 % précisément).
Document 3 : Évolution de la part des femmes à l’Assemblée nationale
sous la Vème République (en %)
1958 1962 1967 1968 1973 1978 1981 1986 1988 1993 1997 2002 2007 2012
1,3
1,7
1,9
1,7
1,7
4
5,5
5,8
5,6
5,9
10,8 12,1 18,5 26,5
Les progrès observés sont surtout dus aux choix effectués
par les formations politiques de gauche (document 4). Sans
parfaitement respecter la parité – en dépit du discours très
volontariste prononcé par sa direction – puisqu’il a présenté
45 % de candidates, le Parti socialiste voit la part des femmes de
son groupe à l’Assemblée nationale passer de 25,9 % en 2007 à
36,4 % aujourd’hui. Quant aux écologistes, ils ont un groupe très
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8. En novembre 2011, chargé de la rénovation, Arnaud Montebourg a proposé
au Bureau national du Parti socialiste de limiter l’âge des candidats à 67 ans
pour les législatives de 2012. Une idée qui n’a pas été retenue !
9. 155 femmes ont été élues en juin 2012. L’arrivée des suppléants des ministres
à l’Assemblée nationale, le 21 juillet 2012, fait baisser ce total à 153.
14
Document 4 : Part des femmes des groupes politiques à l’Assemblée nationale en 2012
Gauche
Socialiste,
Groupe
Radical,
Union des
Union
démocrate et Républicain Écologiste républicain, démocrates
pour un
Républicaine et Citoyen
démocrate et
et
Mouvement
progressiste indépendants Populaire
(principalement (principalement
Front
de Gauche)
Parti Socialiste)
20 %
36,4 %
(principalement
Parti Radical
(alliance des
centristes)
de Gauche)
47 %
18,75 %
3,45 %
13,8 %
La forte sous-représentation des femmes à l’Assemblée nationale
par rapport à leur poids dans la population inscrite sur les listes
électorales (52,6 %) souligne néanmoins les insuffisances de la loi
sur la parité. La principale difficulté provient de ce qu’elle n’est
pas toujours impérative. Lorsque l’élection utilise la liste comme
mode de scrutin, les partis politiques qui ne présentent pas autant
de femmes que d’hommes ne peuvent valider leur participation
auprès du Conseil Constitutionnel. Dès lors, mécaniquement, la
représentation des femmes dans les Conseils régionaux, les
Conseils municipaux des villes de plus de 3 500 habitants 11 ou
parmi les députés français qui siègent au Parlement Européen
s’approche de la parité (voir document 5). Dès que l’obligation est
levée, la part des femmes parmi les élus décroît de façon vertigineuse
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10. Europe Ecologie - LesVerts avait 50 % de femmes candidates aux législatives
et a obtenu une parfaite parité lors des résultats : 9 femmes sur 18 élus. Nommée
ministre, Cécile Duflot a été suppléée par la socialiste Danièle Hoffman-Rispal.
Le groupe écologiste a donc perdu une unité (de 18 à 17) et une femme (de 9
à 8) avec pour conséquence de faire baisser la part des femmes du groupe écologiste
de 50 % à 47 %.
11. La loi n’est pas contraignante dans les communes de moins de 3500 habitants.
15
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– au niveau des Maires ou des Présidentes de Conseil régional par
exemple. Pour les scrutins uninominaux majoritaires – comme les
législatives ou les cantonales –, la loi sur la parité ne prévoit aucun
dispositif obligatoire : les appareils partisans voient seulement leur
dotation publique se moduler en fonction de la proportion de
candidates qu’ils présentent. Or, l’incitation financière fonctionne
très mal, comme le montrent les élections législatives de 2012 :
bien loin de se conformer à la loi sur la parité, l’UMP devrait subir
une pénalité de 4 millions d’euros (soit 15 % du total de sa subvention
chaque année tout au long de la législature) ; le Parti socialiste,
lui, devrait être sanctionné pour moins d’un million d’euro (3 %).
Même renforcée en 2007, la modulation financière ne suffit pas à
féminiser de façon décisive l’Assemblée nationale. Depuis quelques
années, on évoque la possibilité de supprimer le financement public
des partis qui ne respectent pas la parité des candidatures. La
porte-parole du gouvernement, NajatVallaud-Belkacem, a d’ailleurs
tenu des propos qui vont dans ce sens.12
UN LÉGER PLUS DE « PLURALITÉ VISIBLE » ?
Bien qu’il se soit désormais imposé dans le débat public, le terme
« diversité » ne nous paraît plus suffisamment opérant aujourd’hui.
Il sert à désigner des publics trop différents et renvoie à des
problématiques peu comparables : la question de l’âge n’est pas
celle du genre ; la diversité sociale ne correspond pas à la question
du handicap ; et il y a encore la dimension « ethnique » de la
diversité.Trop souvent utilisé sans être défini ou même seulement
précisé, le mot « diversité » se traduit par un flou sur les populations
qu’il est censé décrire.Afin de lever cette confusion, nous préférons
nous servir du concept de « pluralité visible » permettant de mieux
cibler les inégalités de représentation qui concernent spécifiquement les
« minorités visibles ». Dans notre esprit, les « minorités visibles »
sont toutes les personnes qui sont issues d’une immigration
non-européenne et celles qui sont originaires des DOM-TOM.13
Rappeler cette définition nous paraît essentiel au moment où la
presse se fait l’écho d’un progrès de la « diversité » à l’Assemblée
nationale en 2012 sans expliquer ce que ce terme recouvre.14
De même, la méthode retenue pour identifier les « députés de
la diversité » n’est jamais explicitée. Pour mesurer les avancées de
la « pluralité visible » avec le plus d’exactitude possible, nous
avons retenu trois critères pour désigner les députés qui en
relèveraient :a) leur patronyme (nom et prénom) b) leur photographie
c) leur lieu de naissance ou celui de leurs parents. Les résultats
sont donnés dans le tableau ci-dessous (document 6).
Document 5 : La représentation politique des femmes
Année
Part des femmes
Députées
2012
26,5 %
Sénatrices
Présidentes du Conseil
régional
2011
21,8 %
2010
7,7 %
Conseillères régionales
2010
48 %
Conseillères générales
2011
13,9 %
2008
9,6 %
2008
48,5 %
2009
44,5 %
Maires (communes de plus
de 3 500 habitants)
Conseillères municipales (pour les
communes de plus de 3 500 habitants)
Députées européennes
.. . . . . . . . . . . . .. . . . . .. . .. . . . . . . .. . . . . . ...........................................................
12. Sans donner de calendrier, NajatVallaud-Belkacem a affirmé le 18 juin 2012
que « s’agissant des élections législatives des mesures seront adoptées pour que,
à l’avenir, les dotations de l’Etat aux partis politiques qui ne contribueront pas
à la parité dans l’investiture de leurs candidats soient purement et simplement
supprimées. »
13. Nous excluons cependant les Français dits « pieds noirs » et leurs descendants
dont la trajectoire est trop particulière. Si leur « intégration » a pu être difficile
à leur arrivée,ils ne subissent pas les mêmes handicaps que les immigrés d’Afrique
du Nord.
16
Document 6 : Place des « minorités visibles » à l’Assemblée nationale en 2007 et en 2012
2007
2012
« Minorités visibles »
(nombre)
Nombre total
des députés
Part des « minorités
visibles » (%)
3
1016
55515
55017
0,54
1,8
.................................................................. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
14. Par exemple, « La diversité progresse dans l’hémicycle », Le Monde.fr, 18 juin
2012.
15. Considérant que la problématique est inverse dans les DOM-TOM, nous
ne tenons compte ici que des circonscriptions métropolitaines.
16. A l’issue des élections législatives, on comptait 12 députés relevant des
« minorités visibles ». Nommés ministres, Georges Pau-Langevin et Kader Arif
sont remplacés par leurs suppléants qui ne relèvent pas de la « pluralité visible ».
17. Il s’agit du total des circonscriptions métropolitaines et de celles des Français
établis hors de France. Le nombre des circonscriptions des DOM-TOM est passé
de 22 en 2007 à 27 en 2012 suite au redécoupage électoral de 2009.
17
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On peut alors formuler plusieurs observations : tout d’abord,
entre 2007 et 2012, la « pluralité visible » à l’Assemblée nationale
avance à petits pas. La sous-représentation des « minorités
visibles » y reste toutefois très forte, puisque l’on estime que leur
poids s’élève à un peu plus de 10 % du total des Français. Ensuite,
la part des « minorités visibles » au Palais Bourbon (1,8 %) reste
assez éloignée de celle que l’on connaît dans les Conseils
régionaux – qui est de 5, 34 % 18–, ce qui atteste à nouveau de la
plus grande difficulté qu’il y a pour obtenir une arène politique
représentative avec un scrutin uninominal majoritaire. Il faut
également souligner la meilleure volonté des états-majors des partis
politiques de promouvoir les « profils atypiques » lors des
élections locales, qu’ils considèrent comme moins importantes
que les élections nationales. Reste à déterminer si cette très relative
progression des « minorités visibles » à l’Assemblée nationale
s’explique par la volonté résolue de tous les appareils partisans
à favoriser la « pluralité visible ».
Avec le document 7, on peut constater que les progrès de la
« pluralité visible » à l’Assemblée nationale sont exclusivement dus à
la gauche gouvernementale. De plus, 91 % des députés relevant des
« minorités visibles » sont socialistes. Même s’il l’on peut toujours
attendre plus, on peut considérer que le Parti socialiste a tenu
ses engagements en matière de « diversité ». Pour y parvenir, il a
mis en place une forme indirecte de discrimination positive au
moment d’accorder ses investitures. Le PS a en effet établi une
liste de 22 « circonscriptions fléchées diversité », c’est-à-dire qu’elles
étaient réservées à des candidats issus des « minorités visibles »
– dont certains ont été imposés par la rue de Solférino contre la
volonté des militants locaux. Cette procédure spécifique peut
s’entendre comme un moyen de compenser les handicaps qui
frappent les « minorités visibles » lorsqu’ils souhaitent siéger au
Palais Bourbon.
L’autre grande formation politique, l’UMP, n’a aucun député
appartenant aux « minorités visibles ». Constat très intéressant,
qui permet de mesurer combien les décisions fortement
symboliques de Nicolas Sarkozy en 2007, lors de la mise en place
du premier gouvernement de François Fillon, n’ont eu que très
peu d’effet "structurel" : il ne suffit pas de nommer quelques
« ministres de la diversité » pour changer en profondeur les
mentalités d’un parti politique éminemment conservateur. Au
moins la gauche a-t-elle transformé l’essai : la présence conséquente
des « minorités visibles » dans le gouvernement Ayrault trouve
une sorte de prolongement à l’Assemblée nationale. A droite, la
thématique de la « diversité » est, semble-t-il, définitivement passée
de mode. Ajoutons que l’orientation droitière de la campagne
présidentielle ne lui laissait guère de chance de réapparaitre.
Document 7 : Place des minorités visibles à l’Assemblée nationale selon les groupes
politiques en 2012
Gauche
Socialiste,
Groupe
Radical,
Union des
Union
démocrate et Républicain Écologiste républicain, démocrates et pour un
Républicaine et Citoyen
démocrate et indépendants Mouvement
progressiste
Populaire
(principalement (principalement
(alliance des
Front
Parti
(principalement
de Gauche)
Socialiste)
Parti Radical
centristes)
de Gauche)
Nombre de
député(s)
issu(s) des
« minorités
visibles »
0
10
1
0
0
0
Part des
députés
relevant des
« minorités
visibles »
dans le total
des députés
du groupe (%)
0
3,4
5,9
0
0
0
.. . . . . . . . . . . . .. . . . . .. . .. . . . . . . .. . . . . . ...........................................................
18. Eric Keslassy, « Quelle place pour les minorités visibles ? Retour sur les
élections régionales de mars 2010 », Institut Montaigne, septembre 2010.
18
UNE REPRÉSENTATIVITÉ SOCIALE INTROUVABLE ?
Les élites politiques ne sont jamais représentatives des équilibres
socioprofessionnelles de la population. L’Assemblée nationale de 2012
n’échappe évidemment pas à la règle, comme le confirme le
document 8 ci-après. Deux faits restent tout de même à la fois
marquants et préoccupants.Tout d’abord, la surreprésentation des
cadres et professions intellectuelles supérieures et la sous -représentation
des employés et ouvriers par rapport à leurs poids respectifs dans
la population active occupée, sont écrasantes. Ensuite, elles
19
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s’accentuent d’une législature à l’autre.
possible par certaines activités professionnelles (comme les
professions libérales). Le résultat est incontestable : les bancs
de l’Assemblée nationale sont très largement occupés par la
« classe supérieure ». Et il semble peu envisageable de modifier
cet état de fait, tant il paraît constituer une sorte de loi sociologique
du champ politique : l’élite sociale s’accapare la représentation
nationale.
2%
6,7 %
16,7 %
24,4 %
28,9 %
21,3 %
Ces chiffres démontrent qu’une partie majoritaire du pays
n’existe quasiment pas à l’Assemblée nationale. En effet, la « classe
populaire » (que l’on peut admettre composée des employés et
des ouvriers) regroupe 2,6 % du total des députés alors qu’elle
représente 50,2 % de la population active occupée. Plus précisément
encore, le déclin progressif du monde ouvrier dans l’hémicycle est
particulièrement symbolique : il n’y a plus qu’un seul ouvrier élu
député en 2012 (contre 3 en 2002 et 2 en 2007).A l’inverse, la part
des députés relevant de la « classe supérieure » est en très forte
surreprésentation par rapport à son poids dans la population active
occupée.
La composition socioprofessionnelle de l’Assemblée nationale
actuelle démontre à nouveau la pertinence de l’idée d’un « cens
caché » – pour reprendre l’expression de Daniel Gaxie – dans l’accès
au mandat public. Une France, la moins qualifiée, n’est
pratiquement pas représentée au Palais Bourbon. Compte tenu
de la professionnalisation de la politique, le métier du candidat
est d’une grande importance au moment de sa première victoire
électorale – il s’agit généralement d’un mandat local qui constitue
le point d’entrée classique en politique. Le document 8 confirme
que les chances d’obtenir une place d’élu au niveau national sont
très inégalement réparties suivant la profession du candidat.
Appartenir à la strate supérieure du corps social offre des ressources
qui favorisent l’élection, à savoir un capital économique élevé,
un fort capital social (réseau relationnel et statut social) et un
nécessaire capital culturel (diplôme et capital politique). Il faut
aussi tenir compte de la flexibilité d’emploi du temps rendue
20
Document 9 : Répartition des députés en fonction des familles socioprofessionnelles
en 2007 et 2012
Divers
0,2 %
Part dans la
Population
active occupée
en 2010 (INSEE)
Ouvriers
0,5 %
2,4 %
Employés
3%
5,9 %
Fonctionnaires
6%
81,5 %
Journalistes
79,5 %
6,9 %
Enseignants
8%
3.1 %
Professions
libérales
3%
2012
Cadres
et ingénieurs
2007
Chefs
d’entreprise
Professions Employés Ouvriers
Cadres et
Agriculteurs Artisans,
exploitants commerçants professions intermédiaires
intellectuelles
et chefs
d’entreprise supérieures
Agriculteurs
Document 8 : Part des députés en fonction de leur PCS en 2007 et 2012
2007
3%
7,1 %
18,4 %
19,9 %
13,5 %
1,2 %
16,6 %
3%
0,5 %
16,8 %
2012
3,1 %
5,2 %
20,3 %
15,4 %
9,4 %
1,4 %
19,4 %
2,4 %
0,2 %
23,2 %
Le détail par famille socioprofessionnelle donné par le
document 9 indique quelques mouvements intéressants entre
2007 et 2012 : alors que le poids des chefs d’entreprises, des
professions libérales et des enseignants baisse sensiblement, il
faut noter que le poids des cadres et des ingénieurs et des
fonctionnaires fait le chemin inverse. Notons que le nombre de
permanents politiques à l’Assemblée nationale reste constant entre
2007 et 2012 : 15 – soit 2,6 % du total des députés.
Un découpage suivant la nature de l’employeur (privé/public)
permet de tirer d’autres conclusions intéressantes (avec le
document 10).
Document 10 : Répartition des députés en fonction de la nature de l’employeur
en 2007 et 2012
2007
2012
Secteur public
49 %
55 %
Secteur privé
51 %
45 %
Le mouvement constaté entre 2007 et 2012 n’est pas
surprenant : une majorité de droite réduit la part des députés
qui sont fonctionnaires ; au contraire, si la gauche est majoritaire,
21
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elle augmente. La sociologie des appareils partisans est ici
déterminante. Ainsi, la victoire de la gauche en 2012 fait monter
la part des députés issus du secteur public à 55 %. Ces chiffres
traduisent une autre inégalité : les salariés du privé doivent
interrompre leur carrière professionnelle pour embrasser celle
de député, sans aucune garantie professionnelle en cas de
défaite ; à l’inverse, les fonctionnaires peuvent se mettre en
disponibilité pour exercer leur mandat. Lorsque celui-ci vient à
s’achever, ils retrouvent leur poste exactement dans les mêmes
conditions en termes de rémunération et d’ancienneté qu’au
moment de leur détachement. Se pose donc la question du statut
de l’élu, d’autant plus fondamentale que l’on doit envisager une
limitation du nombre de mandats dans le temps.
Document 12 : Nombre de mandat(s) local (aux) détenu(s) par les députés en 2012 19
VERS LA FIN DU CUMUL DES MANDATS ?
Le cumul des mandats est une spécificité française qui s’est
fortement accentuée au cours de la Vème République. Même si
l’on peut constater une légère baisse par rapport à 2007, la part
des députés qui cumulent reste accablante dans la nouvelle
Assemblée nationale :
Document 11 : Poids des députés « cumulards » en 2007 et 2012
2007
2012
83 %
80,6 %
Au fil des réformes territoriales, s’est construit en France un
« millefeuille » institutionnel qui a fortement augmenté le nombre
des mandats locaux. Outre les strates municipales, départementales
et régionales, sont venus s’ajouter ces dernières années les
mandats intercommunaux (communautés de communes,
communautés urbaines ou communautés d’agglomération). Si bien
que les députés peuvent détenir jusqu’à 4 mandats locaux en plus
de leur mandat national. Certains ne s’en privent pas, comme
l’indique le document 12 ci-après. Point aggravant : 2/3 de ces
mandats locaux correspondent à des fonctions exécutives – la plus
fréquente étant celle de Maire.
22
Sans cumul de mandat
112
Un mandat
220
Deux mandats
158
Trois mandats
73
Quatre mandats
14
Total
577
Cette situation, déplorable pour l’image de la démocratie
représentative, s’explique en partie par la professionnalisation
du politique. Vivant désormais de et pour la politique, pour
reprendre la définition de Max Weber, les politiques sont
néanmoins soumis à l’incertitude du résultat électoral. S’assurer
d’un « fief » permet de pérenniser sa présence dans le champ
politique en cas de défaite lors d’une élection législative. L’ancrage
local d’un député peut donc d’abord s’entendre comme une sorte
de « filet de sécurité ». Mais il permet aussi au parlementaire
de tenir un discours axé sur le maintien de sa proximité avec le
peuple tout en augmentant significativement sa notoriété.Autant
de facteurs qui maximisent ses chances de conserver sa place
au Palais Bourbon. Par le cumul des mandats, les « entrepreneurs
politiques » cherchent également à améliorer leur situation
financière – même si les indemnités des élus sont plafonnées.
Mais, on l’aura compris, cette pratique est surtout un moyen pour
les politiques de limiter l’accès aux responsabilités politiques
de leurs concurrents. Les « cumulards » se comportent comme
des insiders du système politique, refusant l’arrivée d’outsiders
parmi lesquels on compte notamment ces « profils atypiques »
qui pourraient en améliorer la représentativité.
Ainsi, outre l’absentéisme des parlementaires tant décrié par
.................................................................. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
19. Chiffrage établi suivant les données disponibles sur le site l’Assemblée
nationale au 31 juillet 2012. Sans confirmation officielle, nous ne pouvions tenir
compte des déclarations de certains députés de gauche qui, conformément à
leurs engagements de campagne, ont réaffirmé leur intention d’abandonner
leur mandat exécutif local sans attendre l’obligation législative.
23
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les citoyens20 et la confusion entre leurs missions nationales et
locales21, le cumul des mandats renforce la crise de la démocratie
représentative en verrouillant la vie politique. Le monde politique
apparaît dès lors comme une « caste » particulièrement fermée
et repliée sur elle-même – ce qui, plus généralement, fait
écho à la panne de l’ascenseur social qui affecte notre société
démocratique. Cette culture de l’« entre soi » empêche le
renouvellement attendu du champ politique. Se donner une
chance d’y faire émerger de nouveaux visages et surtout de nouveaux
profils suppose donc de mettre un terme au cumul des mandats.
Les Français y sont fortement favorables, comme l’a démontré
l’enquête IFOP pour Acteurs publics de juin 2012 : 92 % d’entre
eux approuvent la mesure d’interdiction à un parlementaire de
cumuler ses fonctions avec un mandat exécutif local.
La victoire du Parti socialiste lors des dernières élections
législatives est objectivement une bonne nouvelle si l’on
souhaite réformer le cumul des mandats. Pour deux raisons : tout
d’abord, parce que les deux moments précédents où les
parlementaires ont accepté de limiter (insuffisamment) le cumul
des mandats, en 1985 et 2000, sont intervenus avec une majorité
socialiste à l’Assemblée nationale ; ensuite, parce que François
Hollande a promis de faire voter une loi sur le non-cumul des
mandats22, précisant au cours de sa campagne qu’il s’agira de
prohiber le cumul d’un mandat parlementaire avec celui d’un
exécutif local. Le 3 juillet 2012, au cours de son discours de politique
générale, Jean-Marc Ayrault a réaffirmé cet engagement en
précisant qu’il sera applicable en 2014.
Il est très instructif d’examiner comment le Parti socialiste a
arrêté cette position et, plus encore, de constater ses récentes
reculades. Dès l’automne 2009, les militants ont voté l’adoption
d’un texte particulièrement clair : « Tout-e élu-e à une élection
parlementaire abandonnera ses mandats exécutifs locaux dans
un délai maximum de trois mois après la tenue du scrutin. »Validé
par le conseil national du PS en juin 2010, le texte prévoit également
d’inscrire « dans le projet présidentiel le vote d’une loi dès l’été
2012 sur le non-cumul des mandats et le statut de l’élu. » Les
élections sénatoriales de 2011 constituaient une échéance
importante. L’échec fut patent. Les Sénateurs obtinrent que la
règle ne leur soit pas appliquée pour conquérir la majorité au
Sénat ! Pour éviter que cela ne se renouvelle après les législatives
de 2012, Martine Aubry est montée d’un ton : pour obtenir
l’investiture du Parti, les candidats devaient s’engager, par écrit,
à abandonner leur(s) mandat(s) exécutif(s) local(aux) sans attendre
le vote de la loi sur le sujet. Les députés socialistes ont donc jusqu’au
30 septembre 2012 pour respecter leur promesse. Las, ils traînent
les pieds et bon nombre d’entre eux sont aujourd’hui prêts à se
renier : sur les 297 membres du groupe « Socialiste, républicain
et citoyen », une quarantaine seulement accepterait de mettre en
pratique leur engagement. Les autres veulent attendre que le
Parlement légifère et restent les « croyants non pratiquants »
qu’ils ont toujours été sur cette question. Avec toujours les
mêmes arguments : il serait fondamental de ne pas s’éloigner
du « terrain » – comme si un député ne devait pas tout de même
arpenter sa circonscription et tenir sa permanence pour espérer
conserver son mandat ; il ne faudrait pas se « déshabiller » pour
les prochaines élections locales (municipales et conseillers
territoriaux23 en 2014) – mais en démocratie, il y a toujours une
.. . . . . . . . . . . . .. . . . . .. . .. . . . . . . .. . . . . . ...........................................................
20. Les députés ont désormais trois missions importantes : voter la loi, contrôler
le gouvernement et, depuis 2008, évaluer les politiques publiques. La charge
est donc suffisamment lourde pour se suffire à elle-même. Le cumul des mandats
se traduit nécessairement par un déficit de présence à l’Assemblée nationale –
le travail en commission parlementaire est tout particulièrement sacrifié. 91 %
des Français considèrent que « le cumul des mandats empêche l’élu de se consacrer
pleinement à son mandat et favorise l’absentéisme » (Sondage IFOP pour Acteurs
publics, juin 2012).
21. Oubliant qu’il est un représentant de la Nation, un député « cumulard » a
tendance à orienter ses activités au Palais Bourbon en fonction des intérêts de
sa collectivité locale. Il faut cependant reconnaitre que la forte centralisation
administrative a longtemps poussé les élus locaux à devenir parlementaires pour
obtenir les ressources qu’ils considéraient nécessaires pour leur territoire. Les
différentes étapes de la décentralisation ont pu desserrer cette contrainte.Aussi,
au cours d’une réforme territoriale, par exemple lors des discussions menées
sur l’attribution des compétences aux collectivités territoriales, les positions d’un
député qui cumule paraissent rapidement relever du conflit d’intérêt (voire du
clientélisme local électoral).90 % des Français pensent que « le cumul des mandats
accroît le risque de conflit d’intérêt car l’élu aura tendance à favoriser sa ville,
son département ou sa région » (Sondage IFOP pour Acteurs publics, juin 2012).
24
.................................................................. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
22. François Hollande, Engagement 48, Mes 60 engagements pour la France,
janvier 2012.
23.Les conseillers territoriaux doivent remplacer les conseillers généraux
et régionaux.
25
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.......................................................................................................................................................................
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prochaine élection à gagner ; la relève ne serait pas prête – peut-on
envisager qu’elle le soit un jour sans jamais accéder aux
responsabilités ? Etc.
Pourtant, pour lutter efficacement contre le puissant scepticisme
des citoyens à l’égard des politiques, il conviendrait d’aller très
loin en matière de non-cumul des mandats. Les députés n’ont
aucune raison d’avoir une autre fonction élective (voire une autre
fonction professionnelle). Il serait également essentiel de limiter
à trois le nombre de mandats successifs. Ces mesures doivent
permettre de donner un souffle salutaire à l’Assemblée nationale.
Elles sont susceptibles de rebattre les cartes et d’introduire de
la "diversité", toutes les diversités, dans notre vie politique. Pour
être juste, la réforme se doit d’être ambitieuse et repenser le statut
du député.
Alors que les députés issus du secteur public retrouvent leur
position professionnelle en cas d’interruption de leur carrière
parlementaire, les députés sortants qui viennent du secteur privé
n’ont pas du tout les mêmes garanties. Il est donc objectivement
plus difficile pour les salariés du privé de s’investir dans une carrière
parlementaire, ce qui est préjudiciable pour la représentativité
de l’Assemblée nationale. Tout ancien député – qu’il soit battu
ou qu’il décide de lui-même de quitter l’hémicycle – devrait pouvoir
bénéficier des mêmes conditions de réintégration professionnelle.
Cela suppose donc d’aligner le « régime » de sortie de mandat
des députés issus du public au privé. Pour cela, il faudrait étendre
au-delà du premier mandat la garantie de retrouver l’emploi laissé
pour devenir député. Une loi de 1978 n’accorde une garantie de
réintégration professionnelle uniquement qu’ à l’issue du premier
mandat. Il demeure ensuite une priorité d’embauche valable
seulement un an, ce qui est bien insuffisant. On doit toutefois
convenir que les évolutions du marché du travail, de plus en plus
rapides en termes de qualification ou de méthode de travail, rendent
un retour dans son entreprise d’origine aléatoire. Une autre
proposition paraît alors échapper à cet écueil : les députés sortants
pourraient utilement intégrer la haute-fonction publique grâce
au savoir-faire acquis au Palais Bourbon. Ce serait aussi une façon
précieuse de valoriser le travail parlementaire.
D’AUTRES PISTES ?
En dehors du non-cumul des mandats, on peut envisager d’autres
pistes pour améliorer la représentativité de l’Assemblée nationale.
Ainsi, changer le mode de scrutin des élections législatives en
introduisant une dose de proportionnelle peut se révéler efficace. Outre
que cela doit conduire toutes les formations politiques qui comptent
à entrer dans l’hémicycle, l’utilisation de la liste facilite la
diversification « sociologique » des députés. De plus, pour des
raisons financières, les « petits partis » ne peuvent faire l’impasse
sur la parité. En outre, par conviction ou par nécessité – lorsqu’ils
manquent de candidats –, ils accordent plus facilement leur
confiance à des jeunes ou des Français relevant des « minorités
visibles ». Par ailleurs, fortement contestée par l’UMP au cours
de la campagne présidentielle, une autre proposition du Parti
socialiste doit permettre d’augmenter la « pluralité visible » à
l’Assemblée nationale : accorder le droit de vote aux résidents étrangers
non européens aux élections municipales. Les partis politiques ne
pourront alors ignorer cette nouvelle catégorie d’électeurs : pour
mieux la capter, ils présenteront davantage de candidats issus des
« minorités visibles ». Mieux introduits sur le plan local, ils devraient
être plus souvent investis lors des élections législatives. Par ailleurs,
il s’agirait d’un signal d’intégration civique très fort envoyé en
direction de la deuxième ou troisième génération d’immigrés, ce
qui doit favoriser leur participation électorale. De nouveaux
électeurs qu’il faudra aussi attirer.
26
POUR FINIR…
En dépit des quelques progrès constatés, l’élection législative
de 2012 n’aura pas permis de modifier le profil type du député
qui reste un homme, blanc, de plus de 50 ans et issu des couches
sociales supérieures. Si l’adoption de solutions techniques – comme
le non-cumul des mandats – peut améliorer la représentativité
« sociologique » du Palais Bourbon, le tournant décisif ne peut
être attendu sans une implication sans faille des appareils
politiques. La volonté des partis politiques, en particulier de ceux
qui ont vocation à détenir la majorité, reste fondamentale pour
s’approcher d’une représentation nationale plus représentative
puisqu’ils désignent les candidats en position d’entrer dans
l’hémicycle. Aussi peut-on vivement regretter que les modalités
27
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d’investiture n’apparaissent pas dans les réflexions à venir de la
commission sur la moralisation de la vie politique présidée par
Lionel Jospin.
Retrouvez l’actualité de l’Institut Diderot sur
www.institutdiderot.fr
28
29
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LES PUBLICATIONS DE L’INSTITUT DIDEROT
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L’avenir de la régénération cérébrale
Alain Prochiantz
L’avenir de l’Europe
Franck Debié
L’avenir de la cybersécurité
Nicolas Arpagian
L’avenir de la population française
François Héran
L’avenir de la cancérologie
François Goldwasser
L’avenir de la prédiction
Henri Atlan
L’avenir de l’aménagement des territoires
Jérôme Monod
L’avenir de la démocratie
Dominique Schnapper
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31
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L’avenir du capitalisme
Bernard Maris
L’avenir de la dépendance
Florence Lustman
L’avenir de l’alimentation
Marion Guillou
L’avenir des humanités
Jean-François Pradeau
L’avenir des villes
Thierry Paquot
L’avenir du droit international
Monique Chemillier-Gendreau
L’avenir de la famille
Boris Cyrulnik
L’avenir du populisme
Dominique Reynié
L’avenir de la puissance chinoise
Jean-Luc Domenach
L’avenir de l’économie sociale
Jean-Claude Seys
L’avenir de la vie privée dans la société numérique
Alex Türk
L’avenir de l’hôpital public
Bernard Granger
L’avenir de la guerre
Henri Bentegeat & Rony Brauman
Les Dîners de l’Institut Diderot
La Prospective, de demain à aujourd’hui
Nathalie Kosciusko-Morizet
Politique de santé : répondre aux défis de demain
Claude Evin
La réforme de la santé aux Etats-Unis : quels enseignements
pour l’assurance maladie française ?
Victor Rodwin
Les Entretiens de l’Institut Diderot
L’avenir du progrès (actes des Entretiens 2011)
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Une Assemblée nationale
plus représentative ?
Éric Keslassy est sociologue et politologue. Il enseigne
notamment à l’IEP de Lille. Il vient de publier Lire
Tocqueville. De la démocratie en Amérique. Pour une
sociologie de la démocratie (Ellipses, 2012) et Citations
politiques expliquées (Eyrolles, 2012).
Eric Keslassy
En plus d’une crise économique sans précédent, la France souffre actuellement
d’une grave crise politique, marquée par un sentiment de coupure entre le peuple
et ses élites politiques. Ce sentiment trouve pour partie son fondement dans un
véritable déficit de représentativité de l’Assemblée nationale.
Le profil type du député : homme blanc, de plus de 50 ans et issu des classes
sociales supérieures, laisse hors de toute représentation des pans importants de la
population.
Éric Keslassy, statistiques à l’appui, montre toute la gravité de ce déficit
représentatif : manque de représentation des jeunes, des femmes, de la pluralité
visible, des classes populaires et des salariés du privé.
Il en analyse les causes, étudie les avancées de ces dernières années et leurs limites,
afin de proposer quelques solutions qui puissent contribuer à la réduction d’une
fracture politique désormais préoccupante.
FONDS DE DOTATION POUR LE DEVELOPPEMENT DE L’ECONOMIE SOCIALE REGI PAR LA LOI N°2008-776 DU 4 AOUT 2008 – SIRET N° 513 746 651 00019
11, place des 5 martyrs du lycée Buffon 75014 Paris / T. +33 (0)1 53 10 65 60 / F. +33 (0)1 53 10 65 36
[email protected] / www.institutdiderot.fr
www.idcomm.fr - Imprimé sur papier issu de forêts gérées durablement.
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