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Juin 2011 • Volume 2 • Numéro 8
Dépot légal : 0840-5530
L’homophobie, la cyberdépendance et la synergologie
Le mot du directeur
Par [email protected]
L’ALPABEM vise dans le 1 000… et plus
Lors de la dernière assemblée générale, nous nous étions
fixé comme objectif d’atteindre le nombre de 1 000 rencontres en individuel par année. Avec 936 rencontres en
2009-2010, nous étions passés très près d’atteindre ce
sommet. Lorsqu’on sait qu’en 2005-2006, 109 rencontres
avaient été effectuées, ce « presque » 1 000 était déjà
très impressionnant.
Cette année, notre équipe d’intervenants a effectué pas
moins de 1 205 rencontres en individuel! Mission accomplie. Derrière ces chiffres, il y a des gens évidemment, et
c’est surtout cette donnée qui est importante pour notre
équipe. Nous désirons aider le plus de familles possible.
Toutes nos énergies sont orientées vers cette mission : «
Soutenir les membres de l’entourage d’une personne
atteinte de maladie mentale ». Derrière ces chiffres il y a
aussi des partenaires qui n’hésitent plus à référer les
familles, les jeunes et les adultes vers notre association
qui existe depuis 30 ans. Derrière ces chiffres se cachent
aussi des bénévoles qui, pour la plupart, ont « goûté »
aux services de l’ALPABEM et ont voulu redonner à notre
association. Merci à vous tous de « ramer » dans le
même sens que nous; nous gardons le cap et l’horizon
est féerique.
Francine explique en grande partie pourquoi j’accepte de
prolonger ma carrière avec notre organisme. Le plaisir et
le cœur toujours au rendez-vous, jamais je n’y ai été aussi
heureux que maintenant… Merci Francine d’être dans ma
vie, dans la vie de l’ALPABEM.
L’ALPABEM déjà gagnant
Nous avons appris à la mi-mai que l’ALPABEM faisait partie des quatre finalistes, au niveau national, pour le Prix
d’excellence du Ministère de la santé dans la catégorie
«Impact dans la communauté ». Le fait de faire partie de
ce groupe sélect est déjà pour nous une grande victoire et
viens confirmer le travail abattu par notre organisation
depuis 30 ans. Je ne vous cacherai pas que j’aimerais
que l’ALPABEM gagne ce prix. Non pas pour le trophée,
non pas pour l’argent, ni même pour la belle carte de
visite qu’offrirait cette reconnaissance, mais pour nos fondateurs et nos bâtisseurs qui, il y a trente ans, ont été les
investigateurs de cette réussite.
Bon été à tous !
Sommaire
Malgré ce nombre record de familles rencontrées en individuel, l’ALPABEM a su préserver ses valeurs. Ainsi,
nous avons continué de porter une attention particulière à
accueillir avec respect, empathie et diligence les familles
éprouvées par la maladie mentale de leur proche. Lors de
la dernière évaluation, 100% des répondants se sont dit
satisfaits ou très satisfaits de notre accueil. Notre Sylvie,
à la réception des appels et à l’accueil, contribue grandement à cette perfection; merci d’être la « voix » de
l’ALPABEM.
Mot du directeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
Entamant la 4e année de son mandat, notre présidente
Francine Robillard aura redonné à l’ALPABEM beaucoup
plus qu’elle n’aura reçu. En effet, après avoir utilisé nos
services durant seulement un an, elle a accepté en 2008
la présidence de l’ALPABEM. Depuis ce temps, jamais
elle n’aura compté son temps… au grand bénéfice des
membres. Comme directeur, le fait de travailler avec
Qu’est-ce que la cyberdépendance . . . . . . . . . . . . . 18
Mot de la présidente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
Bénévole de l’année : Sylvie Piché . . . . . . . . . . . . . . 4
Nouvelle intervenante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
Comme un boulet de canon - Témoignage . . . . . . . . 6
Antidépresseurs et anxiolitiques . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
Le bruit de nos silences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
L’homophobie c’est la peur de l’autre en soi . . . . . . 12
L’intervention familiale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
L’accompagnement des familles. . . . . . . . . . . . . . . . 27
Pourquoi le narcisse pousse-t-il
près d’une étendue d’eau? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
Les petites annonces de l’Alpabem . . . . . . . . . . . . . 33
2
Le mot de la présidente
Par [email protected]
Le prix du calme
apprécier le calme que le vide apporte dans l’être, je
sais que là est ma récompense.
Ce titre m’est venu en tête dans un soupir alors que
je me disais qu’on est bien quand tout est calme.
Immédiatement j’ai pensé au chemin parcouru et
aux efforts que l’on fournit pour atteindre ce calme…
On ne vide pas l’océan avec un coquillage. Ce
calme est fragile, alors à nous de le saisir et de l’apprivoiser avant qu’il ne s’envole; l’instant présent a
une date d’expiration comme les yogourts.
L’été arrive bientôt et je vous souhaite d’agréables
moments et de pouvoir vous ressourcer dans la
nature, qu’elle soit dans votre jardin, dans les fleurs
sur votre balcon, dans le parc, en campagne, sur le
bord de la rivière ou encore dans vos souvenirs.
Que ces moments puissent vous permettre de vivre
complètement l’instant présent.
La plupart d’entre nous ont mentionné un jour ou
l’autre avoir atterri à l’ALPABEM. En entendant ces
mots, je vois souvent l’image d’une fusée ou d’une
météorite qui s’en vient à toute allure et « ploc »,
s’écrase face contre terre… Après un certain temps,
on essaie d’accueillir ce qui se présente, la curiosité
remplace le choc, nous apprenons à aimer les questions et par la suite, nous commençons à espérer
atteindre un certain calme. Nous découvrons notre
capacité à rebondir dans une vie faite de beauté,
d’espoirs, de blessures, d’ombres et de tabous
aussi.
Ceci m’amène à vous parler des activités ludiques
que nous vous proposons depuis l’été dernier. Nous
n’avions aucun but précis en tête au départ, sauf
celui de permettre à des membres de s’offrir des
petits moments de plaisir, de rencontrer de nouvelles personnes, de prendre du temps pour soi, de
mettre leur cerveau au neutre; « relax and receive ».
Au fil de ces ateliers, j’ai rencontré des membres
heureux d’être là et plusieurs ont dit avoir oublié
tous leurs soucis pendant l’activité, car ils se sont
concentrés sur de petites douceurs. Ceci confirme
que l’entraide fait du bien, que le bénévolat et le
sentiment d’appartenance ne font qu’un. Parfois
j’aurais préféré aller marcher au parc au lieu de me
retrouver dans la salle de conférence de
l’ALPABEM, mais dès que quelqu’un mentionne
Francine Robillard
Présidente de l’ALPABEM
Deux nouveaux
membres honoraires
Lors de l’assemblée générale annuelle du 31 mai
dernier, les membres présents ont pu accueillir
deux nouveaux membres dans la catégorie très
convoitée de membre honoraires de l’ALPABEM.
En plus de recevoir leur «cocarde d’or», ces
messieurs ont reçu une petite appréciation pour
souligner leur implication. Félicitation à nos deux
nouveaux membres honoraires 2010 Messieurs
Jean-Guy Blanchette et Jean-Marc Légaré.
M. Jean-Guy Blanchette
M. Jean-Marc Légaré
3
Bénévole de l’année : Sylvie Piché
Elle est toute douce, mais combien efficace!
Elle a toujours un sourire au coin des yeux, l’éclair de
l’idée pas trop loin. Elle énonce clairement ce qu’elle
veut dire en y ajoutant des exemples, parfois subtils,
parfois percutants.
Sa tête est pleine de suggestions, elle aime sortir de sa
zone de confort en respectant les limites du « politically
correct » et elle s’y sent à l’aise. Un pépin arrive et au
lieu de capituler, elle voit plein de solutions, car il n’y a
presque pas de bâtons dans ses roues. En fait, elle a
pris connaissance que le monde lui appartient et voilà
probablement pourquoi elle réalise ses ambitions.
Son cœur est grand, son élan est généreux, elle n’a
pas peur de partager.
Sylvie Piché s’est jointe au CA en juin 2009; elle y a
occupé le poste de secrétaire la première année et le
poste de trésorière la deuxième année.
Le directeur de l’association désirant promouvoir la
coanimation avec un proche pour le programme TPL, il
fallait donc identifier quelqu’un de compétent. Par son
expérience, sa facilité de communication, son empathie et sa volonté de transmettre à l’autre son expérience personnelle, le nom de Sylvie a fait surface. En
août dernier, malgré un horaire très chargé, elle a
accepté de devenir coanimatrice avec l’intervenante
responsable du programme et elle en est actuellement
à sa deuxième formation de 18 semaines.
Qu’en pense l’intervenante du programme? Au cours
de sa première participation, le rôle de Sylvie a graduellement pris forme. Elle a su s’adapter et sa collaboration est devenue indispensable par sa présence
chaleureuse, son partage d’expérience, son implication, sa motivation, ses exemples concrets qui aident
les participants à mieux intégrer le contenu, son empathie, sa volonté d’aider son prochain et sa touche d’humour.
4
Qu’en pensent les
participants?
Les
participants
ont
apprécié que les
interventions
de
Sylvie et sa façon de
divulguer ses expériences soient très
touchantes
et
humaines. Ils ont
apprécié sa franchise et son ouverture face à eux, malgré le fait que la
situation de chacun
soit
difficile.
Transparence et expérience ont fait en sorte que les
participants ont pu se reconnaître comme parent ou
proche d’une personne atteinte et cela les a encouragés et motivés énormément.
Lorsque nous avons eu l’idée d’offrir des ateliers de
répit social aux membres, Sylvie s’est évidemment
proposée comme membre du comité et elle a même
animé un atelier de rouleaux de printemps; nous y
avons découvert son talent de chef et d’humoriste.
Sylvie est aussi une mère de trois enfants, dont une
fille qui compose avec le TPL. Malgré les préjugés
reliés à la maladie mentale de sa fille, Sylvie est toujours disponible pour témoigner aux médias de l’impact
de cette maladie sur sa famille. Sylvie et « sa tribu »,
comme elle appelle affectueusement sa famille, ont
même participé à un enregistrement vidéo dans le
cadre d’un cours universitaire de la TÉLUQ, afin de
sensibiliser les futurs intervenants en santé mentale.
Pour toutes ces raisons et plein d’autres, nous estimons que c’est un privilège de te côtoyer Sylvie et
nous sommes heureux de te nommer bénévole de l’année 2010.
Nouvelle intervenante : Janie Morin
Bonjour,
Depuis le mois de mars, il me fait plaisir de faire partie de l’équipe de l’ALPABEM. C’est avec enthousiasme que je réalise le mandat du volet jeunesse,
en plus d’avoir l’opportunité d’effectuer des
interventions individuelles, familiales et de groupe.
La sensibilisation dans les écoles visant à
démystifier les problèmes de santé mentale est
également un aspect qui m’interpelle.
Sexologue de formation, mon expérience professionnelle m’a permis d’acquérir diverses aptitudes
et connaissances en santé mentale. Ayant travaillé
auprès de plusieurs clientèles; jeunesse, santé
mentale, trouble de comportement, déficience intellectuelle, toxicomanie et les femmes et enfants
violentés, je suis en mesure d’offrir des services qui
pourront répondre à vos besoins.
Il me fera plaisir de vous rencontrer à l’ALPABEM.
Je vous souhaite de passer un bel été!
Janie
Départ d’un élément-clé de notre équipe
Nous avons été attristés d’apprendre qu’une des intervenantes les plus appréciées
de ses collègues et des membres allait bientôt nous quitter. Effectivement, Alexandra
König a été acceptée en mars dernier à la maîtrise en neuropsychologie aux PaysBas. Nous sommes évidemment très fiers qu’elle puisse réaliser ses rêves, mais
attristés de perdre une collègue inestimable et une professionnelle si dévouée aux
clients de l’ALPABEM. Nous lui souhaitons la meilleure des chances.
Alexandra faisait partie de notre équipe depuis l’automne 2009 et elle était responsable entre autres du programme CAP sur la schizophrénie. Elle quittera officiellement ses fonctions le 8 juillet prochain, mais passera malgré tout l’été au Québec.
Donc, si vous désirez lui transmettre vos dernières salutations, n’hésitez pas à nous
faire parevenir vos bon mots. Qui sait peut-être aurez-vous le plasir de la lire à
nouveau dans une des prochaines revues Oxygène...
5
Comme un boulet de canon - témoignage 1
Par Nanou La Terre - Blogue d'une membre de l'ALPABEM
Mardi dernier, je me croyais brave et forte. Pourtant,
le dôme de la prison de Bordeaux m'est apparu
comme un boulet de canon en pleine poitrine. Dès
cet instant, j'ai su, senti... Non, cette fois-ci je
n'échapperais pas à ma peine. Ce jour-là, le
vacarme infernal dans les parloirs remplis à craquer,
la chaleur suffocante et le manque d'intimité ont eu
raison de mon humeur. Je n'ai eu ni l'envie de rester
forte, pas plus que de garder le sourire ou de
demeurer positive. Quand bien même j'aurais désiré
de toute mon âme, je n'acceptais pas, c'est tout.
J'ai eu amplement le temps de réfléchir pendant un
interminable 45 minutes d'attente, mon fils étant
coincé derrière les plateaux pour le dîner. Aucun
sens. Quand on pense qu'ils n'ont droit qu'à une
seule visite par semaine, cloîtrés derrière les vitres
de parloirs archi désuets. J'ai eu beau prendre de
grandes respirations, tâcher de contenir le déferlement de larmes coincées dans ma gorge, rien n'y faisait. Je sentais que cette fois-ci, je ne pourrais tenir
le coup, même devant lui... Lorsqu'il arriva enfin, les
traces de ma peine avait déjà marqué mon visage.
C'est avec les yeux rougis que je l'accueillis. Un bonjour timide, à peine perceptible pour éviter d'éclater:
- Je te trouve très beau avec cette nouvelle coupe de
cheveux...
-Merci! Et t'as vu mon tatouage?
Fafouin baisse un peu son chandail à la hauteur des
épaules pour me montrer avec fierté le haut de son
dos...
-C'est moi qui l'ai dessiné et ensuite on l'a reproduit!
Il n'est pas encore terminé. Comment tu le trouves?
- J'ai de la peine. Je trouve cela extrêmement difficile
de venir ici et de voir tous ces barreaux aux centaines de fenêtres alignées, car je sais que c'est derrière ces barreaux que tu vis...
Les larmes coulaient à flot. Je n'en pouvais plus.
-Maman, pleure pas ici voyons!
À St-Jérôme, je savais que j'allais le visiter en prison, mais les fenêtres des détenus n' étaient pas
accessibles aux visiteurs. Ce que l'on ne voit pas fait
moins mal... Et puis, dans ce centre de détention à
dimension plus humaine, nous avions de petites
pièces fermées où nous pouvions avoir un contact
de qualité, même au travers la baie vitrée.
-Il est très beau, vraiment très beau Fafouin...
Pendant ces 45 minutes d'attente, je me suis sincèrement demandé quel était le sens profond de cette
souffrance qui m'était imposée bien involontairement, à travers cette peine indescriptible.
- Maman, mais qu'est-ce que t'as?
Mon fils ne fonctionnera jamais de façon normale,
6
Comme un boulet de canon - témoignage 2
ne vivra jamais une vie normale tant et aussi longtemps qu'il niera sa difficulté. Fafouin souffre depuis
longtemps d'un problème de santé mentale extrêmement difficile à traiter. Je sais ce qui fut et
demeure lourd, de façon constante. Ce sont ces
deuils perpétuels qui ne cessent de s'accumuler au
fil du temps, des années. Et la vie me demande de
m'adapter sans cesse, chaque fois, m'adapter vite,
sans quoi la souffrance devient intenable.
Pourtant, mon fils au fond de lui est un pur et grand
soleil. Je regarde parfois ses photos d'enfant en
m'imaginant arrêter le temps, un moment de pure
magie où rien de cet enfer ne serait arrivé. Ça me
fait du bien de pouvoir me l'imaginer... Pendant
quelques instants seulement, je veux que cela soit
ainsi. Un peu de rêve, j'en ai tant besoin, j'y ai tant
investi. De la vie et du temps de qualité que je tenais
à lui offrir, il a pu bénéficier. J'ai eu le bonheur d'entendre ses premiers mots, voir ses premiers pas, le
regarder jouer au parc, le sachant heureux, lui
apprendre à nager, faire du vélo, l'encourager dans
tout ce qu'il accomplissait et aimait. Du succès qu'il
avait auprès de tous par son sourire si communicatif, son charisme, sa personnalité unique et si attachante, sa sensibilité, sa créativité. Il aurait terminé
ses études secondaires, ne se défoncerait pas dans
les drogues fortes et l'alcool, garderait simplement
un emploi, n'aurait pas de casier judiciaire, ne se
ferait pas défoncer le visage, ne cambriolerait pas,
ne menacerait pas de sauter en bas de la fenêtre du
2e, ne mettrait pas sa vie en danger, ni celle des
autres en faisant du 160 km/heure sur l'autoroute,
sans permis, ne coucherait pas dans des bacs à
recyclage ou des abribus. Il serait autonome et cela
le remplirait de fierté.
Comme dans tous ses rêves accumulés au fil des
ans, il deviendrait vidangeur, pompier, policier, cascadeur, comédien, joueur de basket, technicien en
animation 3D, briqueteur et, depuis peu, éducateur
spécialisé. Et je l'accompagnerais tout simplement,
l'encourageant dans ses désirs. Est-ce trop demander que de n'avoir que cet unique désir de voir son
jeune autonome et fonctionnel, simplement?
Et lorsque les premiers symptômes seraient apparus, les éducateurs prendraient la chose au sérieux,
me croiraient, m'accordant toute la crédibilité nécessaire au lieu de me taper sur l'épaule comme si
j'étais une enfant, en m'affirmant que mon fils n'a
rien. Au lieu de le réprimander en lui enlevant des
privilèges ils insisteraient eux aussi pour l'envoyer
en évaluation, étant donné les antécédents familiaux, et mon fils bénéficierait d'un traitement préventif qui l'aiderait à contrôler son impulsivité. Quel
beau rêve...
Pourquoi faut-il attendre le fameux 18 ans alors
qu'on sait très bien qu'à cet âge, le mal est déjà fait
7
Comme un boulet de canon - témoignage 3
et les blessures, immensément profondes.
Pourquoi, pourquoi... De peur de coller trop tôt une
étiquette...
-100 mg
En agissant ainsi, on prend la chance d'hypothéquer
le jeune pour le reste de sa vie. Quand va-t-on un
jour démystifier les problèmes de santé mentale,
leur accorder toute l'attention qu'ils méritent et traiter
tous ceux qui en sont atteints, jeunes et moins
jeunes, comme toute autre maladie, dignement et
avec ouverture? Est-ce que j'ai une étiquette qui me
colle à la peau parce que je suis asthmatique? Ma
mère n'a pas d'étiquette "parkinson" collée au front
et pourtant, elle en est atteinte. Lorsque je souffre
d'asthme, je peux contrôler ma maladie en prenant
des anti-inflammatoires combinés à un bronchodilatateur.
-Parce que je lui ai demandé!
C'est merveilleux. Quelqu'un quelque part s'est
occupé de moi, a pris mon mal au sérieux! Le diabétique peut contrôler sa maladie avec de l'insuline.
Il a aussi cette chance d'avoir été entendu et soigné
dans sa maladie. Il existe des enfants diabétiques et
asthmatiques et on les traite, non!
Ici au Québec, les jeunes aux prises avec un trouble
de personnalité limite sont complètement ignorés et
laissés à eux-mêmes. Pire encore, ils se retrouvent
en grande majorité en Centre Jeunesse à l'intérieur
duquel les éducateurs n'ont pas la formation adéquate pour les orienter et les diriger de la bonne
façon. Par la suite, plusieurs se retrouvent dans les
centres de détention provinciaux ou fédéraux. La
grande majorité des personnes incarcérées souffrent d’un problème de santé mentale...
_________
-Le médecin m'a prescrit du Séroquel.
-Ah bon, et à quel dosage?
8
-Et pourquoi t'a-t-il prescrit cela?
-Mais Fafouin, le médecin ne prescrit pas de médicaments comme ça, sur simple demande!
-Mais oui maman, ils s'en foutent les médecins ici!
Je me sens perplexe. Séroquel est un antipsychotique qui sert à traiter la schizophrénie et à contrôler
les épisodes maniaques et dépressifs du mal bipolaire. Mais, j'ai appris aussi de source sûre qu'il était
employé aussi pour traiter le trouble de personnalité
limite, ce qui n'est pas mauvais en soi. Mon fils ne
me dit probablement pas tout...
Par ailleurs, est-ce possible qu'un médecin dans un
pénitencier soit à ce point inconscient, au point de
donner n'importe quoi à qui le demande? Je me
pose la question.
- Fafouin, je t'ai vu à peine 15 minutes...
-C'est pas grave maman, tu reviendras la semaine
prochaine!
Quelle capacité de résilience tout de même mon
beau garçon... J'ai quitté en larmes ayant peine à
conduire. Je n'ai pu enseigner en après-midi. J'ai
donc tout annulé. Ça m'a permis de refaire mes
énergies et de retrouver peu à peu mon équilibre.
J'avais tant besoin de sentir le vent printanier au
bord de la rive et c'est ce que je fis...
Antidépresseurs et anxiolytiques,
faut-il les prendre ou pas ?
Par Giancarlo Jr. Collacciani, Psychothérapeute, Doctorant dép. psychologie UQAM
La chimiothérapie représente très certainement
l’icône de la modernité en médecine; à chaque trouble sa molécule. Toutefois en psychothérapie, où la
contribution respective du biologique et du psychique n’est pas encore clairement établie, la question d’une prise de médicaments est souvent source
de confusion. Nous ne faisons pas référence ici à la
confusion de l’ordre du diagnostic ou de celui de la
molécule appropriée, mais bien celle ressentie par
l’individu confronté à un mal de l’être.
Cette confusion est souvent soutenue par l’abondance de résultats de recherches, lesquelles mentionnent d’une part l’efficacité des antidépresseurs
et d’autre part leur absence d’effet sur certains
patients présentant des symptômes faibles à modérés. Suite à ces informations parfois contradictoires,
les patients portent souvent une opinion tranchée
sur la question des médicaments pour traiter les
troubles liés à la santé mentale, plus particulièrement sur les antidépresseurs ou les anxiolytiques.
Certains demanderont de manière insistante la prise
d’une molécule, tandis que d'autres s’y opposeront
fermement avant même que la proposition d’une
telle avenue leur soit suggérée.
Ces deux attitudes dialectiques peuvent laisser supposer respectivement le désir d’être libéré rapidement et sans effort de leurs maux, ou la crainte
d’être englouti par l’effet d’un traitement pharmacologique. Ceci étant dit, le dilemme peut bien souvent
s’avérer plus complexe qu’il ne l’est en apparence.
Sur le plan physiologique, la prise d’un traitement
pharmacologique s’accompagne parfois d’effets
secondaires désagréables, ce qui incite les gens à
mettre fin au traitement de façon anticipée et peut
parfois être nuisible au fonctionnement physiologique. Sur le plan affectif, la prise d’un traitement
pharmacologique s’accompagne, dans certains cas,
d’un sentiment de honte ou de culpabilité. Le patient
peut avoir l’impression d’être faible ou d’avoir
échoué là où il s’imagine que les autres auraient
réussi sans problème. Derrière cette illusion se
cache généralement le désir d’être tout-puissant, de
pouvoir tout faire en une seule journée, de réagir
adéquatement en toutes circonstances. Le résultat
ne peut être alors qu’une déception, une fracture de
l’idéal de soi. Lorsqu’une personne se fracture une
jambe, l’utilisation de béquilles se passe d’argumentation.
Le repos, les limitations et certains changements
d’habitudes s’imposent. Peut-être en va-t-il de
même pour la dépression et l’anxiété. La recherche
a clairement démontré que la prise d’un antidépresseur couplée à une psychothérapie est l’avenue la
plus efficace et la moins coûteuse pour surmonter
une dépression. Ainsi, la prise de médicaments peut
souvent servir de support ponctuel pour continuer à
fonctionner quotidiennement et déployer les efforts
nécessaires pour apporter certains changements
essentiels à une hygiène de vie plus saine. L’idée
importante est de comprendre qu’une pilule ne règle
pas tous les problèmes et qu’elle n’offre qu’un taux
de succès d’environ 60 % en cas de dépression
sévère. Lorsqu’elle est couplée à une psychothérapie ou à une forme d’aide psychologique, ce taux
peut grimper à plus de 80,5 %.
Ceci étant dit, il est clair que les médicaments permettent de rester debout et d’amorcer un mouvement vers un changement. Finalement, la question
n’est donc plus : « Est-ce que je dois prendre des
médicaments ? » Elle devient plutôt : « Dans quel
but dois-je prendre des médicaments et pendant
combien de temps m’offriront-ils le support dont j’ai
besoin pour transformer certaines sphères de ma
vie? N’oubliez pas que vous pouvez toujours discuter avec votre médecin ou votre psychothérapeute
afin de prendre une décision plus éclairée, et que
vous ne devez surtout pas hésiter à consulter en
cas de besoin.
9
Les bruit de nos silences : la synergologie 1
Par [email protected]
Par ce titre, je veux vous faire connaître l’importance de la synergologie dans nos vies. Mais avant
tout, qu’est-ce que la synergologie? Ce n’est pas
une science exacte, mais plutôt une discipline dont
l’objet est de déchiffrer le fonctionnement de notre
esprit en tenant compte de nos gestes. Quels messages livrons-nous à travers notre gestuelle? Quels
sont les gestes qui nous trahissent lorsque nous
voulons taire quelque chose qui nous tracasse ou
lorsque nous ne voulons pas communiquer
consciemment.
Vous savez qu’un des principes de la communication interpersonnelle est que nous ne pouvons pas «
ne pas communiquer ». Ce qui veut dire que tout
comportement en présence de deux personnes est
nécessairement une forme de communication, car
même s’il n’y a pas de parole, un message non verbal est transmis. Nul besoin d’émettre des sons
pour communiquer, car notre corps parle tout seul.
Le dicton dit : « Une image vaut mille mots », n’estce pas? Nous pourrions facilement dire « qu’un
geste vaut plus que mille mots ». Certaines études
prouvent que près de 80 % de nos échanges passent par d’autres canaux que les mots.
En fait, la discipline de la synergologie nous
apprend à lire ce qu’une personne nous communique de façon non verbale à travers une multitude
de gestes. Selon le petit Larousse, le mot « geste »
se définit comme suit : tout mouvement du corps,
principalement de la main, des bras, de la tête, porteur ou non de signification. Pour les spécialistes de
la synergologie, un geste exprime nos pulsions
réprimées. Ils appellent ces gestes des micromouvements dont ils identifient trois catégories, à savoir :
les microfixations, les microcaresses et les microdémangeaisons.
Se gratter sous les narines, toucher son oreille ou
caresser son menton est un geste banal qui pourtant
10
recèle des significations insoupçonnées. Par exemple, le simple fait de se gratter la tête pourrait signifier que nous sommes devant une situation nous
demandant de faire appel à toutes nos facultés de
raisonnement et que nous réfléchissons afin de livrer
une réponse adéquate. Un peu comme pour dire :
Comment vais-je m’y prendre pour résoudre ce problème?
Lors d’une conversation, notre interlocuteur peut
adopter une série de positions corporelles, telle que
le croisement des bras qui est une des positions les
plus fréquemment adoptées. Ce geste signifie que
notre interlocuteur n’est pas réceptif et que ce n’est
donc pas le meilleur moment pour tenter de le
convaincre ou de négocier avec lui.
Pour les spécialistes, le non verbal précède à 80 %
le verbal. Nos gestes nous trahissent avant même
que nous arrivions à verbaliser une émotion, que ce
soit la colère, la tristesse, ou la peur. Je me souviens de la dernière fois où j’ai loué un film dans une
boutique de location de vidéos; le film était intéres-
Les bruit de nos silences : la synergologie 2
sant, mais certains passages étaient entrecoupés, ce qui le rendait
impossible à visionner.
J’ai donc décidé de
retourner le film à la boutique. Aussitôt entré, et
avant même que je me
présente au comptoir
pour signaler le problème, un commis s’est
exclamé que j’avais l’air
d’un client insatisfait.
J’étais décontenancé par son flair, car c’était tout à
fait le cas ! Il m’a aussitôt offert un autre DVD. De
retour à la maison, j’ai eu l’idée de retourner voir le
commis qui avait remarqué cette attitude chez moi.
Premièrement pour le féliciter d’avoir eu cette sensibilité et deuxièmement, pour lui demander de
décrire ma physionomie lorsque je me suis représenté à la boutique. Finalement, je n’y suis pas
retourné, mais je trouve que l’exemple se prête bien
pour démontrer que nos gestes précèdent l’émotion.
C’est sûrement pour cela que l’on affirme que le langage du corps est l’expression de nos émotions.
Nous aimerions tous savoir comment identifier les
vraies intentions de nos interlocuteurs. La perspective est séduisante. Toutefois, il ne s’agit pas d’un
code secret qui va nous permettre de savoir tout ce
que l’autre nous cache ou ne veut tout simplement
pas nous dire. Certains diront : « Je vais faire attention à mes gestes pour ne pas dévoiler ma vraie
nature, mais « attention », car plus on tente de les
cacher, plus on les rend visibles paraît-il.
N’oubliez pas que l’authenticité est la qualité qui
nous fait le plus aimer autrui.
Pour plus d’indormations sur le sujet consultez ce
site: www.synergologie.org
Bonne retraite à
deux oiseaux rares
Après plus de trente ans de vie professionnelle,
notre région vient d’être amputée de deux des professionnels les plus appréciés de Laval. L’ALPABEM leur souhaite donc de profiter de ce repos bien
mérité. Nous leur ouvrons nos portes dans l’éventualité où la tentation de s’impliquer dans un organisme comme l’ALPABEM serait trop forte. Bonne
retraite messieurs et merci pour votre contribution à
faire de l’ALPABEM un partenaire incontournable
dans l’offre des services en santé mentale de Laval.
PAUL BÉDARD -Psychologue
Paul aura contribué de façon exceptionnelle
aux
services
de
l’ALPABEM. En plus d’avoir
présenté plusieurs conférences, il
aura bâti pour notre association le
fameux programme de communication interpersonnelle. De plus il a
effectué, jusqu’en janvier dernier,
des rencontres individuelles avec
nos clients. Merci Paul.
SERGE ARCHAMBAULT Travailleur social
Il aura été impliqué de nombreuses
années à la ressource régionale
suicide de Laval et aura participé à
la fondation de l’Îlot de Laval.
Adjoint à la direction SMA à la fin
de sa carrière, il aura été un
acteur important dans l’organisation du congrès de 2009 et dans
l’organisation des conférences
mensuelles de l’ALPABEM.
Bonne retraite Serge
11
L’homophobie c’est la peur de l’autre en soi 1
Par [email protected]
L’impact de l’homophobie sur la santé mentale
«Depuis que je suis au primaire, je me fais traiter de
gai, fif, et tapette. Je suis déménagé l’an dernier et
ça recommence cette année. Deux filles dans mon
cours de techno n’arrêtent pas de m’écœurer. J’ai
raconté mon problème à mon prof de français et elle
pensait que j’étais gai (ce qui est le cas, mais personne ne le sait à part moi et ma meilleure amie).
J’ai été voir une psychologue alors que je ne savais
pas que j’étais gai pour savoir ce que je pouvais
faire, et pour que le monde arrête de me lancer des
insultes par la tête. Elle m’a dit que je devais arrêter
de les écouter et qu’ils allaient arrêter de m’insulter
à un moment donné. Mais ça n’a rien fait. Je crois
que je vais vivre ça toute ma vie, car c’est ce que les
homosexuels subissent.»
«L’été dernier, j’ai dû déménager de mon appartement du quartier Rosemont, car mes voisins étaient
ouvertement homophobes. Ils me faisaient des
menaces verbales : « fucking fagot », « I’ll kill fucking
fagots ». J’avais très peur pour ma sécurité physique. Je ne dormais plus, j’étais toujours sur le quivive. Je ne croyais pas que cela pouvait m’arriver.»
Ces témoignages illustrent seulement deux expériences bouleversantes de l’homophobie vécue par
des personnes homosexuelles. Avant d’aborder plus
en détails ce phénomène très courant, voici
quelques définitions :
Qu’est-ce que l’homophobie ?
(1)Selon Daniel Borillo, juriste, maître de conférences et auteur de différents ouvrages sur l’homophobie, ce terme signifie «l'attitude d'hostilité envers
des individus supposés avoir des pratiques
sexuelles avec des personnes du même sexe.» Le
Petit Larousse définit l’homophobie comme «le rejet
de l’homosexualité, l’hostilité systématique à l’égard
12
des homosexuels.» Ces deux définitions ont un
point en commun, c’est-à-dire le refus irrationnel,
voire la haine envers les homosexuels. Le terme «
homophobie » a été entendu pour la première fois,
en 1971, mais ce n’est qu’en 1998 qu’il est apparu
dans un dictionnaire de langue française.
Découvrir l’homophobie
(2)L’homophobie représente surtout un sentiment
d’aversion et de peur, la peur de la remise en question de la hiérarchie des sexualités qui consacre
l’hétérosexualité comme pratique supérieure au
niveau moral et affectif. « L'homophobie est aussi le
produit de la peur de l'autre en soi » . C'est donc
une réaction agressive de rejet provoquée par la
crainte d’être soi-même homosexuel. Loin d'être une
conduite d'évitement ou de fuite, l'homophobie est
une agression, une stigmatisation et une discrimination. Elle est une forme de domination.
L’homophobie peut affecter tous et chacun, hétéro
ou homosexuel, et porte préjudice en premier lieu
aux gais, lesbiennes et bisexuels, mais aussi à leurs
familles et leurs amis.
L’homophobie c’est la peur de l’autre en soi 2
Il existe différents niveaux d’homophobie, comme
par exemple l’homophobie de langage (insultes,
plaisanteries, vocabulaire négatif qui stigmatise l’homosexuel), l’homophobie personnelle (sentiment
personnel que les homosexuels sont anormaux,
malades, bizarres, sentiment d’évitement, violence
verbale, voire physique), l’homophobie institutionnelle (institutions, lois, règlements qui discriminent
les homosexuels), l’homophobie sociale et culturelle
(normes sociales et culturelles qui favorisent l’hétérosexualité au détriment de l’homosexualité), et l’homophobie intériorisée (les homosexuels eux-mêmes
intériorisent les préjugés, les normes sociales
homophobes et en viennent à se dévaloriser, voire à
se détester eux-mêmes, et à dévaloriser, voire à
détester les homosexuels de leur entourage).
L’homophobie en chiffres (USA)
• Un collégien américain entend des commentaires
homophobes tels que« pédé », « tapette »,
«gouine» en moyenne 26 fois par jour.
• Dans 97% des cas, les enseignants n’interviennent pas.
•
80% des jeunes gais et lesbiennes souffrent
gravement d’isolement social.
• 53% des élèves entendent des commentaires
homophobes de la bouche des enseignants et
administrateurs de l’école.
• 28% des élèves gais quittent l’école avant
d’obtenir leur diplôme, contre seulement 11% des
élèves hétérosexuels.
• 26% des jeunes gais sont mis à la porte du foyer
familial par leurs parents.
• 19% des jeunes gais et lesbiennes sont victimes
d’agressions physiques à cause de leur orientation sexuelle.
• Le taux de suicide est 4 fois plus élevé chez les
adolescents gais que chez les hétérosexuels.
• Dans 40 états américains sur 50, un enseignant
peut être licencié à cause de son homosexualité..
Origines et causes
Tirant ses origines de phénomènes culturels, sociologiques et psychologiques complexes, et surtout de
l’histoire judéo-chrétienne, l’homophobie est présente à de multiples niveaux dans notre société,
13
L’homophobie c’est la peur de l’autre en soi 3
dans le cœur et l’esprit de nombreuses personnes,
consciemment ou inconsciemment, dans le vocabulaire courant, dans les livres comme dans les institutions. Elle est intimement liée à la problématique du
sexisme, c’est-à-dire l’inégalité des sexes par une
domination masculine, et à des définitions stéréotypées de la masculinité et de la féminité. Elle engendre des discriminations telles que l’exclusion, la violence verbale et physique à l’encontre des homosexuels et de leur entourage. Selon la vue «hétérosexiste», il est considéré normal et naturel que le
masculin et le féminin soient deux genres sociaux
bien différents et hiérarchisés ; le sexe biologique
détermine l’appartenance à un genre social et à
chaque genre correspond des attributs et comportements typiquement masculins ou typiquement féminins.
Le fait d’être un homme démontrant « trop » d’attributs féminins, par exemple, une passion pour la cuisine, la décoration ou les arts, est encore aujourd’hui
souvent perçu comme une «faiblesse». «Celui-là
n’est pas un VRAI homme !». Ce qui veut dire qu’il
a moins de valeur dans notre société . L’homophobie
est en fait la preuve de l’existence actuelle de cette
vision «hétérosexiste» selon laquelle les attributs
féminins sont perçus comme inférieurs aux attributs
masculins Ainsi, le présupposé est véhiculé que
tout le monde soit hétérosexuel, et que l’hétérosexualité soit la seule option valable. De ce fait,
lorsque le sujet de l’homosexualité est soulevé, des
sentiments pénibles émergent qui amènent les gais,
les lesbiennes et les bisexuels à cacher leur orientation affective.
L’impact sur la santé mentale
Les études récentes confirment que l’homophobie
peut être une source d’isolement social, de décrochage scolaire, voire de tentatives de suicide, en
particulier chez les adolescents qui découvrent leur
14
homosexualité dans un milieu qui ne favorise pas le
développement et l’acceptation de leur orientation
sexuelle. (3)Selon une étude menée au
Département de psychologie de l’Université
Concordia par le Dr. Benibgui, les jeunes lesbiennes, gais ou bisexuels (LGB) courent davantage
le risque de souffrir de graves problèmes de santé
mentale que leurs pairs hétérosexuels. Cela s’expliquerait en partie par un dérèglement du système
hormonal résultant du stress d’être victimisé ou
rejeté pour son orientation sexuelle. Dans le cadre
de son étude, le Dr. Benibgui a constaté qu’au
secondaire et au cégep, on relève un taux de suicide
jusqu’à 14 fois plus élevé chez les élèves lesbiennes, gais et bisexuels que chez leurs camarades hétérosexuels. Ces chiffres sont très inquiétants et indiquent la nécessité d’une intervention
assez précoce. Lors d’une entrevue téléphonique
avec ce chercheur, celui-ci m’a confirmé que les difficultés psychologiques les plus rencontrées dans
cette population sont la dépression, les troubles
anxieux, les tentatives de suicide et l’abus de substances.
L’homophobie c’est la peur de l’autre en soi 4
Pour mieux comprendre les causes principales, le
Dr. Benibgui a examiné le lien entre le fait de vivre
dans un environnement homophobe et «l’homophobie internalisée». Cette dernière se traduit notamment par des émotions négatives envers soi-même
en raison de son identité sexuelle. Il a découvert
que les personnes homosexuelles et bisexuelles
subissent davantage de stress causé par les disputes sur l’identité sexuelle, l’intimidation ou la discrimination. Elles ressentent une homophobie internalisée importante et enregistrent une production de
cortisol (hormone de stress) plus élevée. Plus la
personne vit dans un milieu homophobe, plus elle vit
de l’homophobie internalisée et du stress et plus
elle est à risque de développer des symptômes de
dépression et d’anxiété ainsi que des pensées suicidaires. Ce taux de cortisol anormal est donc étroitement lié à une présence de détresse psychologique.
(4) La surproduction de cette hormone a un effet
sur le cerveau et les émotions, voire la santé mentale en général ainsi que sur les fonctions immunitaires. Certaines recherches indiquent que les personnes vivant des situations stressantes à long
terme ont un système immunitaire moins efficace
pour combattre les maladies physiques. Il a d’ailleurs été démontré que différents liens existent
entre le stress et des problèmes de santé tels que le
rhume, le cancer, la dépression, les maladies cardio-vasculaires, les pathologies de la glande thyroïde, les pathologies cutanées et le diabète. Aussi,
Dr. Benibgui mentionne le concept du «minority
stress», un phénomène psychologique et sociologique qui explique qu’une minorité, qu’elle soit ethnique, sexuelle ou culturelle, vit un niveau de stress
plus élevé en raison de sa marginalisation sociale.
Il semble qu’un des problèmes centraux des jeunes
homos et bisexuels est leur difficulté à développer
une solide estime d’eux-mêmes. Il leur manque souvent des ressources suffisantes et nécessaires pour
devenir des personnes confiantes. De ce fait, plusieurs autres problématiques peuvent découler,
comme entre autres les relations sexuelles non protégées; une personne ayant une faible estime de
soi aura plus tendance à adopter des comportements à haut risque et autodestructeurs.
Comment prévenir?
Tout d’abord, il faut souligner que même si cette
population est plus à risque de vivre des difficultés,
la majorité des personnes homosexuelles ou
bisexuelles ne développera pas de problèmes de
santé mentale, ce qui veut donc dire qu’elles sont
résilientes. Le facteur de protection le plus puissant
que le Dr. Benibgui a relevé dans le cadre de son
étude est l’acceptation et le support des parents et
des pairs.
Une différence primordiale entre les individus
homos et bisexuels et les individus tirés d’autres
minorités culturelles ou ethniques, est que leurs
parents partagent généralement le même « statut
minoritaire ». Ils peuvent donc se supporter mutuellement en accentuant une certaine fierté culturelle.
Par exemple, quand un adolescent haïtien rentre à
la maison après avoir vécu de la discrimination à
l’école, il peut compter sur un soutien de la part de
ses parents. Par contre, les jeunes homos et
bisexuels ne partagent pas, dans la majorité de cas,
leur « statut minoritaire » et leur réalité avec leurs
parents. Ils ne peuvent donc pas s’attendre nécessairement à un tel support ou à la compréhension
de la part de leur famille. Ils n’ont pas tous autour
d’eux une famille qui soit aussi ‘homosexuelle’
comme c’est le cas chez les autres minorités ethniques où tout le monde est aussi haïtien.. De ce
fait, ils expérimentent souvent cette discrimination
en étant seuls, isolés et retirés. Cependant, ils n’ont
pas nécessairement accès aux mêmes ressources
de protection (support familial) pour maintenir un
15
L’homophobie c’est la peur de l’autre en soi 5
équilibre mental. Les conséquences sont néfastes et
imperceptibles, car les sentiments ne sont pas discutés ouvertement. Il est difficile pour les parents
d’intervenir, car ils ne sont pas toujours au courant
de l’orientation sexuelle de leurs enfants.
L’homosexualité est invisible, et non pas évidente
comme une couleur de peau. Par conséquent, le
‘coming-out’ semble pour plusieurs personnes un
processus épeurant, lent et pénible à vivre.
En effet, nous nous intéressons surtout à la question
comment améliorer la santé mentale des personnes
homos et bisexuelles à risque et qu’est-ce que la
famille et l’entourage peut faire pour mieux
intervenir auprès d’eux?
Le chercheur Benibgui conseille aux parents de ne
pas attendre jusqu’au moment où jeune sera prêt à
faire son ‘coming out’ pour parler ouvertement de
son orientation sexuelle. Il recommande d’oser être
plus proactif, d’aller vers le jeune et de s’éduquer
soi-même sur l’homosexualité afin de démystifier
certains mythes et de normaliser cette identité à la
maison. Il propose d’adopter un langage inclusif.
Par exemple, au lieu de demander : «As-tu une
blonde ?», il est préférable de demander : «As-tu
quelqu’un dans ta vie présentement?»
Pendant l’adolescence, les jeunes sont en construction de leur identité, ils expérimentent afin de découvrir leur orientation sexuelle. Ils ont besoin de savoir
que peu importe comment leur orientation sexuelle
se développera, leurs parents les accepteront. Ceci
a un impact énorme sur l’individu, son estime de soi
et son sentiment de valeur personnelle. Il est important de lancer de temps en temps des messages tels
que «Si tu étais gai, lesbienne ou bisexuel, nous t’aimerions quand même, la seule chose qui compte
pour nous est que tu sois heureux,…voici un livre
que j’ai lu sur ce sujet, je peux te le prêter, on pour-
16
rait en parler avec ton intervenante de l’école si tu
t’inquiètes…».
Il faut rester à l’écoute et disponible sans juger, tout
en montrant de l’ouverture et de l’empathie pour ce
que l’autre vit. Les parents peuvent aussi regarder
dans leur propre entourage si des amis ou des
proches homos ou bisexuels pourraient servir de
modèles d’identification. Aujourd’hui, nous sommes
témoins de plus en plus de diverses représentations
des minorités sexuelles dans les médias. Mais
durant l’adolescence, la plupart des jeunes n’ont pas
de contact avec d’autres pairs homos et bisexuels.
Ce genre de contact peut servir de facteur de protection important, en particulier si la famille n’accepte
pas l’orientation sexuelle. Ainsi, les rassemblements
dans les communautés gaies peuvent aider à combler le besoin d’appui et même remplacer jusqu’à un
certain point la famille.
(5)Le comédien Jasmin Roy (fondateur de la
Fondation Jasmin Roy) croit fermement que «quand
nous sortirons l’homophobie des écoles, nous libérons tout le monde, les agressés comme les agres-
L’homophobie c’est la peur de l’autre en soi 6
seurs. Des garçons s’empêchent de faire des
métiers ou des loisirs comme de la danse, par
exemple parce qu’ils ont peur de se faire traiter de
‘fif’. A l’inverse, plusieurs agresseurs sont malheureux, puisqu’ils lancent des insultes uniquement
pour faire comme les autres. Il est même fréquent
qu’un homosexuel traite les autres de ‘tapette’ pour
cacher le fait qu’il le soit lui-même».
(6)L’organisme GRIS-Montréal est un organisme
communautaire sans but lucratif dont la mission
consiste à la prévention par démystification de l’homosexualité dans les écoles. Sa mission générale
est de favoriser une meilleure connaissance des
réalités homosexuelles et de faciliter l’intégration
des gais, lesbiennes et bisexuels dans la société.
Selon l’organisme, l’intégration d’une minorité dans
la société, comme dans la lutte contre le racisme, ne
peut se faire qu’en s’efforçant d’éliminer l’ignorance
et les préjugés. L’école est un milieu où les valeurs
des jeunes prennent forme et où l’ignorance cède à
la connaissance.
C’est la raison pour laquelle GRIS-Montréal a
décidé de s’adresser principalement aux jeunes en
milieu scolaire afin de leur offrir en priorité des services de démystification de l’homosexualité en
milieu scolaire. Leurs interventions se réalisent
majoritairement dans les écoles secondaires et les
cégeps. Elles sont données sous forme de témoignage par des bénévoles spécialement formés pour
répondre aux questions des jeunes de 12 ans et
plus. L’objectif de cette méthode d’intervention est
de permettre aux jeunes de mettre un visage sur
une réalité qui les effraie encore en les laissant
poser toutes les questions qui les préoccupent au
sujet de l’homosexualité. Les bénévoles s’engagent
à leur répondre le plus ouvertement possible en parlant de ce qu’ils ont vécu et de ce qu’ils vivent
encore aujourd’hui comme lesbiennes et gais. De
cette manière, des modèles d’identification sont pro-
posés aux jeunes, autres que les représentations
stéréotypées sur les homosexuels produites par les
grands médias (exemple le gai type ‘coiffeur’ et la
lesbienne type ‘butch’). Les médias participent à l'«
annihilation symbolique » des gais et lesbiennes en
les stéréotypant, en en donnant rarement une image
réaliste ou en ignorant tout simplement leur existence. GRIS-Montréal essaie donc de combattre
ces représentations trop catégoriques et restreintes
en montrant des images plus diversifiées des homosexuels à la population scolaire.
Pour conclure, afin d’améliorer la santé mentale des
adolescentes et des jeunes adultes homosexuels, il
ne faut pas intervenir seulement auprès de l’individu, mais aussi auprès de l’entourage et de la communauté, ce qui favorisera l’acceptation générale
dans notre société. Nous appliquons ce même
concept à l’ALPABEM en démystifiant et en sensibilisant la population afin de mieux intégrer les personnes en difficultés et marginalisées – car c’est
l’affaire de tout le monde!
Un grand remerciement à Dr. Benibgui et Mme
Houzeau pour leur disponibilité et leur collaboration
pour la production de cet article.
Références :
1) Livre : Daniel Borillo, L’homophobie, PUF, Coll. Que sais-je ?, Paris,
2000
2)
http://www.amnestyinternational.be/doc/les-campagnes-permanentes/themes/droits-des-personnes-lgbt/Campagnes/Combattre-lhomophobie/Qu-est-ce-que-l-homophobie
3) Entrevue téléphonique avec Dr. Benibgui, chercheur à l’Université
Concordia, Montréal
4) Tiré des notes de cours PSY 1989 «Stress et Anxiété» à l’Université
de Montréal
5) visitez : www.fondationjasminroy.com
6) Entrevue avec Mme Marie Houzeau., directrice générale de l’organisme GRIS-Montréal ; visitez : http://www.gris.ca/2009/index.php
17
Qu’est-ce que la cyberdépendance ? 1
Par [email protected]
Lors de la découverte des possibilités infinies du
Web, certains ressentent une curiosité considérable
et passent de longs moments devant l’écran d’ordinateur. Évidemment, il est légitime d’investiguer
pour se sustenter, d’autant plus que l’accessibilité
est facilitée. Malgré l’attrait de la nouveauté, le nombre d’heures d’utilisation d’Internet tend à diminuer
après quelque temps. Les internautes apprennent
rapidement qu’ils peuvent combler certains besoins,
notamment les aspects informatifs et récréatifs, sans
être constamment devant leur écran.
Est-il approprié d’utiliser le terme « cyberdépendance » pour décrire cette problématique liée à l’ère
de la technologie ? Les scientifiques et les chercheurs n’arrivent pas à un consensus, car ils contestent la notion de dépendance. Il n’existe pas encore
d’indicateurs mesurables pour quantifier la durée et
l’utilisation répétée d’Internet. Une définition claire et
précise de ce syndrome est encore à venir, puisqu’il
n’est toujours pas répertorié dans le DSM (Manuel
diagnostique et statistique des troubles mentaux).
Deux différentes études, l’une menée par Nawla et
Anand, et l’autre par Niemz et al., qualifient de «
cyberdépendance » une utilisation d’Internet qui
dépasse deux heures par jour. Scherer stipule que
les cyberdépendants passent « deux fois plus de
temps en ligne pour usage personnel que les autres
internautes » (7).
Il est possible de parler d’une dépendance, car les
chercheurs, notamment Young, ont emprunté les critères diagnostiques du jeu pathologique à cause de
leurs nombreuses similitudes. Marie-Anne Sergerie
et Jacques Lajoie, psychologues, ont remarqué une
étroite ressemblance avec les troubles liés au
contrôle des impulsions, trouble sous lequel est
classé le jeu pathologique. Les symptômes s’apparentent à ceux-ci; préoccupations inadaptées par
rapport à l’usage d’internet, usage étant irrésistible
ou excessif se concrétisant par des périodes d’utili-
18
sation plus longues que prévues. L’usage ou les
préoccupations associées à l’utilisation d’Internet
provoquent une détresse significative ou une altération importante du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres sphères de la vie. Le Web
peut aussi devenir une échappatoire, une fuite
devant les problèmes réels qui entraîne les cyberdépendants vers un univers virtuel où les tracas n’existent pas.
En prenant en considération de l’inexactitude de la
terminologie, il devient ardu d’obtenir des statistiques fiables et justes. Certains chercheurs ont
obtenu des pourcentages plus élevés pour quantifier
l’ampleur de la problématique, mais les résultats
demeurent contestés. L’étude de Greenfield est la
plus laborieuse jusqu’à présent, puisqu’elle a été
menée auprès de 17 000 internautes. À la suite d’un
sondage réalisé en ligne, 6 % des sujets se sont
déclarés cyberdépendants. Jusqu’à présent, cette
prévalence est la plus fiable et l’une des plus utilisées par la communauté scientifique. À titre indicatif,
« au Canada, 90 % des 18-24 ans passent en
moyenne 17.6 heures par semaine en ligne » (7).
Qu’est-ce que la cyberdépendance ? 2
Selon une enquête réalisée par NETendances, en
décembre 2004, parmi les Québécois d’âge adulte,
60 % font usage du Web de façon hebdomadaire
(Jacob et al., 2005) (5)
Que fait-on sur Internet ?
Internet transcende le 21e siècle et offre une multitude de possibilités. Les gens qui le consultent poursuivent des objectifs différents. Le type d’usage
varie donc en fonction des besoins de chacun. Dans
un premier temps, les cyber-relations sont des facteurs
d’utilisation
extrêmement
fréquents
puisqu’elles suscitent beaucoup d’intérêt. De prime
abord, l’anonymat offre la chance de s’exprimer
sans craindre les réactions et le jugement de l’interlocuteur. De plus, le fait de ne pas être présent physiquement entraîne une diminution des inhibitions et
facilite la divulgation des émotions et des pensées
(10). La communication devient donc moins menaçante, un sentiment de confort s’installe, ce qui favorise le développement de l’intimité et le dévoilement
de confidences. Des sujets prohibés peuvent alors
être abordés puisque les restrictions des conventions sociales sont écartées. La dynamique des
cyber-relations se distingue des interactions de la
vie courante et peut paraître plus attrayante (9). Il
n’est pas rare que l’interlocuteur virtuel soit idéalisé,
ayant pour effet d’amplifier la perception du potentiel
séducteur.
Par ailleurs, l’absence physique de l’autre engendre
l’augmentation de l’aisance pour aborder le sujet de
la sexualité. Effectivement, la sexualité suscite la
curiosité et l’intérêt des gens. Pour illustrer l’ampleur
de ce phénomène, « une étude exploratoire sur les
requêtes effectuées dans des moteurs de recherche
révèle que déjà, en octobre 1996, environ 60 % des
50 mots les plus fréquemment utilisés dans le
moteur de recherche Yahoo étaient des mots à
caractère sexuel » (5). Ainsi, l’utilisation du Web à
des fins sexuelles est prédominante, notamment
parce que les normes sociales ne tiennent plus.
Chacun peut surfer où bon lui semble, dans le
confort de son salon et dans l’anonymat (8).
Les possibilités offertes par Internet étant constamment repoussées, le potentiel créatif est infini, de
même que les options de diffusion. Les amateurs de
jeux d’action et d’aventures en sont donc satisfaits.
Il faut également se rappeler que les joueurs peuvent communiquer entre eux, ce qui ajoute un élément d’interactivité sociale. Le type de jeux choisis
par une personne correspond au type de besoins
qu’elle désire combler (13). Une étude scientifique
réalisée par Everquest stipule que la moyenne
d’âge des utilisateurs de jeux en ligne est de 28 ans
et que 34 % d’entre eux ont complété un diplôme
universitaire. Cette population d’internautes passe
en moyenne 25 heures par semaine pour les
adultes et 50 heures par semaine pour les adolescents, notamment parce que ces derniers ont plus
de temps pour surfer sur le web (2).
19
Qu’est-ce que la cyberdépendance ? 3
L’accessibilité d’Internet permet également aux
adeptes des jeux de hasard et d’argent de s’adonner
à leur passe-temps préféré à même leur domicile,
sans avoir besoin de se déplacer. L’un des usages
d’Internet le plus fréquent est évidemment la
recherche d’informations. Il va sans dire que l’abondance des sujets disponibles grâce à quelques clics
de souris facilite l’acquisition de connaissances.
D’ailleurs, beaucoup de gens s’y réfèrent religieusement. Ces informations sont-elles crédibles et véridiques ? Notre jugement critique devient alors notre
meilleur atout pour analyser les renseignements qui
nous sont offerts.
Qui est à risque ?
Certains facteurs prédisposent les individus à devenir cyberdépendants. Il faut comprendre que ce n’est
pas systématique, mais plutôt que certaines personnes seraient plus vulnérables par rapport à cette
problématique. Dans un premier temps, l’isolement
social est un aspect souvent mentionné dans la littérature. La timidité ou un style de vie marginal sont
également en cause, puisqu‘Internet offre une panoplie de regroupements auxquels une personne peut
s’identifier. Le développement d’un sentiment d’appartenance à un réseau ou à une communauté peut
engendrer une augmentation des heures d’utilisation
d’Internet (5). Donc, la recherche d’identification et
d’estime de soi représente d’autres motifs pour trouver refuge dans le cyberespace. Par l’entremise des
cyber-relations, la recherche de la gratification, de la
reconnaissance et du dévoilement de soi renforce
l’utilisation du Web, puisque l’internaute en obtient
un bénéfice (5-10). Le besoin d’approbation sousjacent exerce une influence considérable, car l’utilisateur en retire une valorisation. Une personne
vivant des difficultés d’affirmation de soi peut s’exprimer plus aisément sur Internet. L’absence physique
de l’interlocuteur évite la communication non verbale, telle que le contact visuel. La personne se sent
20
moins intimidée et plus à l’aise d’extérioriser ses
pensées (11). La vulnérabilité au rejet ainsi que le
manque de support social sont également des facteurs qui prédisposent à la cyberdépendance (5-7).
Sachant qu’Internet permet de garder une distance
physique, les personnes atteintes d’un trouble de
l’intimité peuvent esquiver les relations émotionnelles (6). L’usage du Web peut être utilisé comme
une fuite, un évitement ou un soulagement à l’égard
des difficultés de la vie quotidienne (8).
La présence d’une psychopathologie, telle que
l’anxiété sociale (3), l’agoraphobie ou la phobie sociale
(12), est un facteur qui peut susciter le développement
de la cyberdépendance. En utilisant Internet, certaines
personnes n’ont plus besoin d’aller à l’extérieur pour
communiquer, il n’est plus nécessaire d’affronter des
gens. Une personne aux prises avec une personnalité
paranoïaque peut utiliser Internet pour projeter ses
délires de persécution et de violence (6). L’utilisation
des réseaux sociaux peut alimenter un individu touché
par le trouble de personnalité narcissique, car les
manifestations peuvent s’amplifier par l’autopromotion
et l’augmentation du nombre d’amis virtuels (1).
Qu’est-ce que la cyberdépendance ? 4
D’autre part, puisque les liens sont limités, il est possible que l’utilisation du Web soit suffisante pour
répondre aux besoins de socialisation d’une personne atteinte de schizophrénie et, par le fait même,
prolonger l’isolement social (10). Au niveau de la
dépression, les études sont mitigées. Pour certains,
Internet peut être vu comme une opportunité pour
s’ouvrir et pour se confier, donc un moyen d’expression qui permet de rompre l’isolement (13). D’un
autre côté, l’usage d’Internet peut augmenter la
dépression si cela engendre l’isolement social (11).
Quels sont les risques ?
De prime abord, il faut savoir que les répercussions
de la cyberdépendance varient en fonction de l’intensité et de la gravité de ses manifestations dans la
vie d’une personne. Il faut donc relativiser l’utilisation qui en est faite, car le contrôle de la durée et de
la fréquence peut donner un indice de ce qui est
normal ou non. Quant à la recherche d’informations,
une problématique émerge, soit l’infobésité. Plus
spécifiquement, « l’infobésité fait référence à l’incapacité à retirer les connaissances et les informations
pertinentes d’une grande masse de renseignements
(Nelson 1997).
En effet, l’infobésité peut survenir lorsqu’une personne n’arrive pas à comprendre l’information disponible, qu’elle se sent submergée par la quantité
d’informations à comprendre… » (4). Dans l’éventualité où une personne vit de la cyberdépendance,
il peut aussi arriver que ses relations affectives et
sociales soient perturbées (9). L’isolement peut être
une cause, mais aussi une conséquence de l’abus
d’utilisation du Web, ce qui peut générer de
l’anxiété. En entretenant plusieurs relations superficielles sur le Web, l’engagement et l’intimité dans
les interactions sociales réelles s’amoindrissent
(13).
Ainsi, cela peut se juxtaposer à une diminution des
capacités d’adaptation et des habiletés sociales.
Lorsqu’on parle de dépendance, il est possible de
constater des répercussions dans diverses sphères
de la vie, par exemple, le fait de négliger ses obligations. Puisque l’individu consacre une grande partie
de son temps sur Internet, l’absentéisme scolaire ou
professionnel devient envisageable, pouvant même
conduire à la perte de l’emploi ou mettre en péril les
études. Le manque de sommeil, de même qu’une
perte de motivation sont des symptômes de la
cyberdépendance, s’apparentant à ceux de la
dépression et de la schizophrénie (11). Par ailleurs,
l’anédonie, soit l’insensibilité au plaisir, compte
parmi les conséquences possibles, qui sont aussi
reliées aux deux maladies précédemment mentionnées.
Quoi faire ?
Malgré la reconnaissance de la problématique de la
cyberdépendance par le ministère de la Santé et
des Services Sociaux du Québec en 2004 (7), l’accessibilité à des services spécifiques pour traiter la
cyberdépendance est rare. Actuellement, le Centre
Dollard-Cormier reçoit les personnes aux prises
avec la cyberdépendance. Ils abordent, entre
autres, la gestion du temps, les sources d’insatisfaction, la diminution de l’anxiété et le développement
de réseaux sociaux (2).
Ce centre de réhabilitation travaille à la conception
d’un programme spécifique pour le traitement de la
cyberdépendance. Une recherche scientifique est
présentement en cours afin d’obtenir des appuis
théoriques solides qui répondront aux besoins des
Québécois, en collaboration avec le centre le
Maillon de Laval et d’autres centres de réhabilitation
sur le territoire québécois. De plus, il est possible de
consulter en psychothérapie, car certains professionnels se sont spécialisés dans le traitement de
cette dépendance. Par ailleurs, il est possible de
procéder à une désensibilisation progressive, donc
21
Qu’est-ce que la cyberdépendance ? 5
de faire un sevrage, et ce dans la même optique
qu’une dépendance aux psychotropes.
L’auto-observation à l’aide d’une banque d’heures
prédéterminées par semaine peut aider la personne
à prendre conscience de la fréquence et la durée de
son utilisation d’Internet. Au départ, Internet a été un
outil exceptionnel de recherche et d’avancement
pour la société. En considérant que nous avons
maintenant la possibilité d’avoir Internet à tout
moment, avec les nouveaux téléphones intelligents,
sommes-nous en mesure d’en dire autant ?
Bibliographie
1. CHREVIER N. et M. SERGERIE. « Le phénomène Facebook
: Comprendre l’impact du Web 2.0 dans la vie des clients »,
Psychologie Québec, vol. 26, n° 2 (2009), p.23-25.
2. DUFOUR M., et M. PARENT. « La dépendance à Internet :
Problématique virtuelle ou réelle ? », Echotoxico (janvier 2009),
p. 6-7.
3. HARDIE E. et M. YI TEE. « Excessive Internet Use : The Role
of Personality, Loneliness and Social Support Networks in
Internet Addiction », Australian Journal of Emerging technologies and Society, vol. 5, n° 1 (2007), p. 34-47.
4. LAJOIE J., et M. SERGERIE. « Internet : usage problématique et usage approprié », Revue québécoise de psychologie,
vol. 28 (2007), p.149-159.
5. SERGERIE, M. Usage problématique d’Internet, Thèse de
maîtrise, Université du Québec à Montréal (2005), 63p.
6. SEYS B. « Place et rôle des usages des jeux vidéo et
d'Internet dans la souffrance psychologique », Les Cahiers du
numérique, vol. 4, n° 2 (2003), p. 117-134.
Adresse URL : www.cairn.info/revue-les-cahiers-du-numerique2003-2-page-117.htm.
7. VAUGEOIS, P. « La cyberdépendance : fondements et perspectives », Centre québécois de lutte aux dépendances (2006),
40 p.
8. YOUNG K., et al. « Cyber-Disorders: The Mental Health
Concern for the New Millenium », CybersPsychology &
Behavior, 3(5) (2000), p. 475-479.
9. YOUNG K. « Internet Addiction, A New Clinical Phenomenon
and Its Consequences», American Behavioral Scientist, vol. 48,
n° 4 (2004), p. 402-415.
10. YOUNG K., et R.RODGERS. Internet Addiction : Personality
Traits Associated with Its Development, Annual meeting of the
Eastern Psychological Association, University of Pittsburg,
22
Bradford (1998), p. 1-6.
11. YOUNG K., et R. RODGERS. « The Relationship Between
Depression and Internet Addiction », CyberPsychology &
Behavior, 1 (1) (1998), p. 25-28.
Livres
12. JEAN N. Guérir de soi, Édition Dauphin blanc, 2009.
13. MINOTTE P. Cyberdépendance et autres croquemitaines,
Édition Faber, 2010, Belgique, 65 p.
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L’intervention familiale 1
Par Stéphanie Avoine, stagiaire
L’entretien familial est une occasion de permettre à
tous de s’exprimer entre eux. Cette discussion permet de clarifier certains problèmes et d’élucider des
non-dits entre les proches. Les membres de la
famille peuvent mettre cartes sur table et tous ont le
droit de parole. Ces rencontres peuvent également
favoriser la croissance personnelle et apaiser les tensions dans la famille.
L’entretien familial aide à comprendre le fonctionnement de la famille et prendre conscience de la souplesse existante à la maison. Il peut également être
une occasion d’explorer les difficultés que rencontre
chaque membre de la famille. Cette exploration peut
avoir un effet préventif sur d’éventuels conflits. En
intervention, la présence de tous les membres de la
famille évite que l’on mette la faute sur une seule personne et, par le fait même, favorise la collaboration
lorsqu’il y a des conflits à résoudre. Bref, l’intervenant
est au préalable un intermédiaire qui encourage la
communication entre les membres de la famille, ce
qui favorise ensuite l’entraide mutuelle. Cette
entraide encourage la famille à se responsabiliser.
En trouvant elle-même les moyens pour réduire les
symptômes du problème,la famille se mobilisera pour
trouver les ressources nécessaires qui lui conviennent pour l’accompagner dans ses démarches.
Déroulement
Le déroulement de l’entretien commence par l’accueil. Comme il en a été fait mention plus haut, il est
important de créer un lien de confiance avant de
commencer l’intervention avec la famille. L’accueil
consiste à expliquer à la famille le déroulement des
rencontres et le but visé par l’intervenant. Il est normal au début d’avoir certaines craintes et d’appréhender ce qui se passera au cours de ces rencontres, c’est pourquoi il peut être rassurant de connaître
ces détails à l’avance.. En effet, l’intervention ne
commence pas nécessairement lors de la première
visite de l’intervenant, car celui-ci doit d’abord
s’adapter à la famille et attendre que le stress diminue avant de commencer une intervention. Une
bonne façon positive de débuter consiste à demander à chacun ce qu’il apprécie dans la famille.
Ensuite, l’intervenant peut observer comment les
membres de la famille interagissent entre eux. Il
pourra observer s’il existe des tensions entre certaines personnes et tenter de les atténuer. Bien sûr,
si un conflit existe au sein de la famille, il peut être
difficile pour l’intervenant de le résoudre. Pour faciliter son observation, l’intervenant peut proposer une
activité collective et ainsi assister aux échanges
entre eux. En fait, il, est bien important pour l’intervenant de mettre à profit tous les membres de la famille
et de les observer dans leur milieu de vie. Par la
suite, l’intervenant peut recueillir les perceptions de
chacun lors de leurs échanges. Enfin, l’intervenant
peut commencer à explorer les émotions vécues par
chaque membre de la famille. Cette étape n’est pas
à négliger, car cela donne une bonne idée de la perception de chacun sur le fonctionnement de la
famille. Explorer les émotions permet de savoir si
chaque personne a un sentiment de bien-être dans
ses relations avec les autres membres de la famille.
23
L’intervention familiale 2
Rôle de l’intervenant
L’intervenant a également la chance de cerner la
complexité du système familial, par exemple les
règles, le rôle de chacun et les contraintes existantes
qui empêchent l’harmonie.. L’intervenant analyse les
symptômes du ou des problèmes de l’environnement
familial et guide la famille dans la résolution des problèmes. Par exemple, si l’entourage d’une personne
atteinte d’un problème de santé mentale vit beaucoup
de conflits et que cela entraîne énormément de tension, l’intervenant travaille sur la tension entre les
membres et non sur la personne atteinte. En intervention familiale, il n’y a pas de recherche de coupable. Donc, l’intervenant ne recherche pas un membre
de la famille qui serait la cause de tous les problèmes
à la maison. Il perçoit plutôt la problématique comme
un problème familial où chacun doit participer à la
résolution du ou des problèmes. Cela signifie que
tous doivent communiquer leurs perceptions, leurs
émotions et être à l’écoute des autres. Il ne s’agit pas
de mettre en doute les compétences de la famille.
L’intervenant est conscient que ces rencontres peuvent provoquer de la culpabilité chez certains membres de la famille, c’est pourquoi il est important de
créer un lien de confiance pour permettre la continuité de l’intervention.
L’intervenant doit se montrer disponible et flexible,
car un suivi familial est complexe et demande beaucoup d’énergie. Il doit également veiller à souligner
les efforts de la famille afin d’améliorer leurs relations
réciproques.. L’intervenant doit signaler à la famille
les outils et ressources qu’elle possède déjà, car
celle-ci devra se mobiliser pour régler ses conflits
malgré l’absence de l’intervenant. Il peut être utile
d’effectuer un retour dans le passé afin de savoir
comment se sont réglés les anciens conflits. Cela
peut aider la famille à trouver des moyens pour prévenir d’éventuelles sources de problèmes.
Il peut être également intéressant de discuter des
24
attentes et des besoins de tous. L’intervenant doit
être empathique avec chaque membre de la famille et
ne doit pas avoir de parti pris. Il peut arriver qu’au
départ une famille soit divisée par des coalitions entre
ses membres.. L’intervenant doit être impartial et rappeler aux membres de la famille que leur but commun
doit être d’avoir une meilleure relation. Enfin, l’intervenant a un rôle de mobilisateur, il rappelle les forces
de chacun et leur donne espoir afin de s’assurer de la
continuité de leurs démarches.
Situation de crise
L’entretien familial peut être particulièrement bénéfique en contexte de crise. Il n’est toutefois pas
nécessaire que la famille soit aux prises avec des
problèmes pour faire appel à un intervenant. Même si
les membres de la famille ne perçoivent pas de difficultés relationnelles entre eux, la présence d’un intervenant peut avoir un effet préventif et favoriser un
échange sur la procédure à suivre en cas de conflit.
Si la famille est déjà en crise, il n’est pas trop tard
pour agir. La crise est un déséquilibre psychologique
qui peut être vécu pendant une courte période. Celleci précédée d’une « pré-crise » et suivie d’une «
après-crise ». Bien que la crise elle-même soit de
courte durée, la pré-crise peut durer bien plus longtemps.
La fatigue psychologique empêche la crise de s’étendre sur une longue période. Le corps humain doit
prendre une période de repos et la personne va également trouver les moyens de réorganiser sa vie. La
crise est souvent causée par un sentiment de perte
de contrôle face à un problème qui entraîne énormément de stress. Une personne qui vit une crise isolée
peut être très vulnérable et l’implication de son entourage peut faire une grande différence en ce qui
concerne son rétablissement. La crise est un synonyme de danger, mais également une occasion d’actualisation de soi. Le fait de surmonter la crise peut
être valorisant pour la personne atteinte et celle-ci
L’intervention familiale 3
peut alors développer des mécanismes afin d’éviter
que la situation ne se reproduise.
L’intervention familiale en situation de crise commence souvent par une rencontre individuelle avec la
personne concernée. Bien sûr, cette personne doit
donner son accord pour que la famille participe à la
résolution du problème.. Si le patient donne son
accord, une rencontre est organisée avec toute la
famille.. Au fil du temps,, il se peut que certaines rencontres impliquent seulement quelques membres de
la famille qui sont davantage en interaction avec la
personne en crise. Ces personnes auront alors plus
d’impact sur le rétablissement de la personne sans
pour autant exclure les autres membres de la famille
qui désirent s’impliquer. Lors des interventions familiales, l’intervenant aide les membres de la famille à
expliquer les sentiments enfouis qui peuvent causer
des situations conflictuelles. Cette interaction est
bénéfique afin de clarifier des situations passées qui
pourraient avoir un impact sur la crise actuelle.
L’intervenant peut alors, s’il y a lieu, questionner la
famille sur ses mécanismes de résolution de crises
antérieures.
Il y a plusieurs avantages à intégrer la famille en
période de crise. En outre, cette occasion peut souder la famille et la personne atteinte et créer de nouveaux liens. L’implication de la famille peut être rassurante pour toutes les parties, puisque celle-ci
devient plus apte à intervenir si la situation se reproduit. Le soutien de l’intervenant peut alors favoriser la
consolidation du réseau d’entraide autour de la
famille. L’intervention en situation de crise peut être
le moment idéal pour partager les émotions de chacun et s’ouvrir aux autres. Le sentiment d’urgence
ressenti lors d’une crise augmente la motivation de la
famille.. Cette motivation se traduit par une forte
cohésion de la famille et un désir de changer. C’est à
ce moment que l’intervenant invite la famille à agir
afin d’aider la personne en crise à retrouver son équilibre.
Intervention en contexte d’autorité
Il se peut qu’une famille soit accompagnée par un
intervenant dans un contexte d’autorité. Pour commencer, il y a trois types de contexte d’autorité.
Le premier est l’autorité sociale où l’intervenant tente
de persuader la famille de modifier un comportement,
une croyance ou une situation. Cette forme d’autorité
varie selon la personne. Certaines caractéristiques
seront prises en compte comme l’âge, le statut
social, la religion, etc. Par exemple, l’intervention doit
se faire avec discernement lorsqu’il s’agit d’une
famille immigrante qui ne possède aucune connaissance sur le sujet de la santé mentale. L’intervenant
présente d’abord les ressources disponibles pour
soutenir les proches et la personne atteinte. Au
contraire,, l’intervention peut s’effectuer plus rapidement avec des gens qui ont de l’expérience en tant
qu’éducateurs spécialisés ou dans un autre domaine
social. Bien que l’autorité s’exerce en tenant compte
des particularités de chaque personne, ce premier
type de contexte aura pour but légitime de persuader
la famille d’effectuer le changement approprié.
Le second type d’autorité est celui qui s’exerce sous
mandat. L’intervenant a alors un pouvoir de décision
selon le mandat de son organisation affiliée. Il effec-
25
L’intervention familiale 4
tue une évaluation de la personne atteinte et de son
environnement. Par exemple, les intervenants
sociaux des CSSS qui offrent des suivis à domicile
sont des intervenants mandatés. Ils ont un mandat
bien précis à accomplir, c’est-à-dire voir au bon
déroulement des démarches de la famille avec la personne atteinte.
Le troisième et dernier type d’autorité s’exerce sous
mandat avec pouvoir de contrainte. . En plus des
deux types d’autorité précédents, ces personnes
agissent dans le cadre d’une loi. Par exemple, si
vous devez recourir à des intervenants sous le couvert de la loi de la protection de la personne en danger pour elle-même ou pour autrui (P-38), le policier
qui intervient est mandaté et a le pouvoir de contraindre la personne à le suivre à l’hôpital. Cette autorité
ne s’exerce pas dans le but de nuire à la famille, mais
plutôt pour obtenir une collaboration entre l’intervenant, la famille et la personne atteinte.
L’autorité s’exerce selon quatre méthodes : la persuasion, la confrontation, la méthode orientée vers
l’obéissance et la coercition. Il y a bien des manières
de persuader une personne, mais ce qui importe c’est
de ne pas laisser à la personne le choix entre l’action
et l’inaction afin d’éviter qu’elle ne se rétracte. Afin de
persuader la personne, il peut être bénéfique de lui
expliquer le problème et de mettre en lumière le but
commun de la famille et de l’intervenant.
En outre, l’intervenant doit ajuster ses attentes et
viser un changement progressif afin qu’il soit durable.
Mettre en lumière les bons coups de la famille permet
d’entretenir un climat satisfaisant. Certaines personnes perçoivent la confrontation comme un
manque de respect. Cependant, il existe plusieurs
formes de confrontation et celle-ci peut être bénéfique et entraîner un changement de comportement
ou de perception. La confrontation consiste à signaler
une contradiction entre les valeurs, les croyances, les
désirs, les comportements, etc. Il est important pour
26
l’intervenant de bien expliquer son observation à
l’aide d’exemples afin que la personne ne perçoive
pas cette confrontation comme un jugement.
Il se peut que la famille ait de la difficulté à accepter
les propos de l’intervenant, mais cela peut avoir pour
effet d’alimenter la motivation de la famille. Ensuite, la
méthode orientée vers l’obéissance précède la
contrainte. L’intervenant est alors de plus en plus
autoritaire et tente de diriger la famille vers un cadre
précis. La coercition est synonyme de contrainte et à
ce moment-ci l’intervenant n’est plus qu’une figure
d’autorité. Donc, la personne concernée dans l’intervention aura moins de possibilités d’action et il lui
sera imposé une façon d’agir. Il est toutefois préférable de communiquer avec la famille et la personne
atteinte avant d’en venir à la contrainte afin de préserver autant que possible un lien de confiance.
En plus de vouloir maintenir l’harmonie entre la personne atteinte et son entourage, l’intervenant tente
également de sensibiliser la communauté à cette problématique. Il accorde une grande importance à l’alliance thérapeutique, c’est-à-dire, qu’il tente de réactiver les liens entre la personne atteinte, sa famille et
lui-même. En effet, l’intervention prend en considération le besoin manifesté par la personne atteinte et sa
famille.
.
L’intervention peut s’effectuer avec des familles qui
ne désirent pas coopérer, mais le plus souvent la
famille collabore, puisque tous désirent l’harmonie
entre chaque membre de la famille incluant la personne atteinte. Cette personne pourra sembler être
davantage supportée par l’intervenant, mais c’est tout
simplement qu’elle est plus vulnérable. Si la famille
sent le besoin d’être accompagnée, il existe aussi
des associations de familles qui offrent également du
soutien et de l’accompagnement aux proches.
Étude comparative de l’accompagnement des familles
québécoises et françaises 1
Par Benjamin Gaubert, stagiaire
La santé mentale rappel historique :
Au Québec le champ de la santé mentale a connu au
cours des dernières décennies de nombreuses évolutions et transformations structurelles qui ont façonné
sa conception et ses pratiques. La notion de santé
mentale est à la fois complexe et évolutive. L’année
1952 marque un tournant dans l’accompagnement des
malades alors que l’invention des neuroleptiques
entraîne des évolutions dans la prise en charge des
malades. Jusqu’en 1960, celle-ci est réservée aux institutions religieuses, les asiles n’étant que des lieux de
gardiennage. Le rapport Bédard permet alors de
transformer les hôpitaux en lieux de soin.
Durant les années 70, l’évolution de la médication, le
travail de concert des acteurs du milieu et l’évolution
des représentations de la population laissent place au
phénomène de désinstitutionnalisation. Quant aux
années 80, elles sont caractérisées par l’adoption, en
1989, de la Politique de santé mentale (Gouv. du
Québec, MSSS, 1989). Résultat d’un long cheminement entrepris en 1971 par le Comité de santé mentale du Québec, cette politique gouvernementale originale campe les orientations du Québec. Elle place la
personne et ses proches au centre des services dispensés dans le milieu de vie. Cependant, la politique
de santé mentale, innovatrice dans ses proclamations,
est freinée dans ses actions, car les ressources matérielles, humaines et financières demeurent attachées à
la centralité institutionnelle. Cette politique favorise
néanmoins les revendications concernant les droits
des usagers ainsi que l’engagement des proches et
des familles.
Qu’en est-il aujourd’hui ?
Toutes les enquêtes épidémiologiques menées au
Québec, au Canada et ailleurs dans le monde confirment l’accroissement des problèmes de santé mentale. Le rapport « La santé mentale dans le monde :
problèmes et priorités des pays à faibles revenus,
1995 », présenté par la Faculté de médecine de
l’Université Harvard, affirme qu’à eux seuls, les pro-
blèmes de santé mentale constituent 8,1 % de la
charge de morbidité globale (CMG), une mesure de
l’ensemble des pertes attribuables à la maladie. Les
grandes enquêtes épidémiologiques les plus récentes
en Amérique du Nord indiquent que l’on peut diagnostiquer un problème de santé mentale chez 20 % de la
population. L’ampleur du phénomène est inquiétante.
Quelle est la place pour les familles ?
Entre les années soixante et aujourd’hui les institutions
psychiatriques au Québec ont diminué de prêt de 70 %
leur capacité d’accueil. Ce phénomène n’est pas
causé par une diminution du nombre de malades, mais
plutôt par le fait que leur retour dans leur milieu familial
est rendu possible notamment par l’avènement des
neuroleptiques. C’est dans ce contexte et face à ces
orientations que les familles ont décidé de se réunir
afin de répondre collectivement aux nombreuses
questions apparaissant au quotidien avec leurs
proches, mais aussi dans le but de lutter contre la solitude qui les envahissait. Des associations telles que
l’ALPABEM se sont alors créé pour apporter aide et
soutien, information et formation aux familles et aux
proches de la région de Laval. Au Québec, près de
quarante associations venant en aide à des milliers de
familles sont aujourd’hui réparties sur le territoire.
Fortes de leur ancienneté et bénéficiant des efforts
consentis par les équipes de travail, ces associations
27
Étude comparative de l’accompagnement des familles
québécoises et françaises 2
occupent à ce jour une place importante dans le
réseau local de la santé, dans le réseau communautaire et sur l’échiquier politique de la région de Laval.
En effet, profitant des nouvelles orientations de la politique de santé mentale développée sur les régions par
les ASSS, les organismes communautaires s’inscrivent
dans le débat politique dans le but de développer le
réflexe chez le législateur de prendre en compte les
familles lors de la prise de décision. Ils s’inscrivent
aussi dans une volonté affichée et intersectorielle de
développer les réseaux locaux de santé, en augmentant la complémentarité et la fluidité entre les services
par le développement de partenariats.
Et en France ?
Lointain cousin du Québec, malgré l’histoire commune
qui les lie, l’accompagnement des familles de personnes atteintes de trouble de santé mentale en
France ne bénéficie pas des mêmes avantages et
outils qu’au Québec.
Après la révolution de 1789, « les fous » sortent des
prisons pour aller dans les asiles d'aliénés. Le rôle du
personnel se réduit cependant trop souvent à celui des
gardiens. Le souhait des aliénistes, de l'époque est de
faire de ces maisons d'aliénés un lieu de guérison.
Ayant précédemment exercé à l'asile de Bicêtre,
Philippe Pinel, nommé médecin-chef de la Salpêtrière
en 1795 et Jean-Baptiste Pussin, son surveillant, décident de retirer leurs chaînes aux « fous » après avoir
constaté que certains le sont par période et d'autres
continuellement. Ils entreprennent de classer les maladies mentales en catégories selon leurs signes cliniques, leur continuité ou discontinuité, les crises de
folie, etc. La psychiatrie est née.
L’année 1960 marque un tournant en France alors
qu’une circulaire ministérielle crée la psychiatrie de
secteur sous l’impulsion des médecins désaliènistes.
Les malades sont alors de plus en plus maintenus
dans la communauté ce qui amène l’augmentation des
équipes de soignants. Parallèlement, la loi de 1838
cède alors la place à celle du 27 juin 1990 en mettant
28
l'accent sur le soin et le renforcement des droits du
malade. Elle conserve toutefois les deux modes d'hospitalisation sans consentement. Le placement d'office
est alors remplacé par l'hospitalisation d'office et le placement volontaire cède sa place à l'hospitalisation à la
demande d'un tiers. Les patients ayant donné leur
consentement sont en hospitalisation libre. Toutefois, il
faut garder à l’esprit que la psychiatrie est toujours en
évolution et doit faire face aux nouveaux maux de la
société actuelle ceci entraînant des réformes, comme
le plan santé mentale 2005/2008.
Aujourd’hui, le projet de partenariat entre professionnels, parents et patients est soutenu par une forte part
de la profession soignante. Il reste cependant des
étapes à franchir qui conduiront de la conception à la
réalisation du projet. Cependant, le débat est ouvert,
familles et patients ont montré leur capacité à se faire
entendre et à faire pression sur les élus. Des pactes
collaboratifs ont été¨é mis en place avec la collaboration de la FNAPSY et de l’UNAFAM.
Qu’en est-il des familles ?
Une rencontre avec une responsable de l’antenne 12
de l’UNAFAM nous éclaire à ce niveau, voici des
extraits de cet entretien.
« L’UNAFAM (Union Nationale des Amis et Familles de
Malades Psychiques) est un organisme reconnu d’utilité publique. Depuis 1968, il vient en aide aux familles
de personnes atteintes de trouble de santé mentale.
Son action est encadrée par ses missions qui sont :
• S’entraider et se former ;
• Agir ensemble dans l’intérêt général.
L’entraide et la formation par :
• L’accueil dans les permanences ;
• L’information des familles.
L’action dans l’intérêt général par :
• L’orientation vers des lieux de soins ou d’insertion ;
Étude comparative de l’accompagnement des familles
québécoises et françaises 3
• La représentation des usagers ;
• La participation auprès des instances consultatives chargées de définir la politique de santé
mentale ;
•
La promotion et le soutien de la création de
structures d’accompagnement ;
• La promotion de la recherche.»
L’UNAFAM est donc un organisme dont l’action se
situe à différents niveaux. Des entretiens ou des
groupes de paroles sont mis en place pour l’accompagnement des familles. Il agit aussi sur un plan intersectoriel dans le lien qu’il tente de faire avec les différents
acteurs de la santé mentale. En effet, l’UNAFAM tente
de mettre en place un système de référence systématique qui dirigerait vers eux les familles, tant que le
milieu institutionnel ne proposera pas d’accompagnement aux familles. Enfin, ses actions ont aussi un
retentissement au niveau politique, car cela il s’engage
notamment au niveau de la réforme de la loi de 1990,
mais aussi dans différentes instances où il représente
les usagers entre autres à la MDPH, CDHP, CASA…
etc.
L’UNAFAM apparaît donc comme un intermédiaire privilégié entre l’institution et les familles, guidé par des
revendications claires qui sont à mettre en relation
avec :
• La continuité des soins ;
• L’hébergement ;
• La protection juridique ;
• L’accompagnement lors des phases d’entrée et
de sortie des patients.
C’est dans ce contexte et fort de ces revendications
que les membres de l’UNAFAM font la proposition au
gouvernement d’un plan psychique . Ce plan fait suite
à l’obtention dans la loi de 2005 de la reconnaissance
du handicap psychique et a pour but d’anticiper les
réponses à apporter aux personnes malades, il se
centre sur la personne, intègre la non-demande et
valorise la place des aidants de proximité. Les propositions du plan psychique sont regroupées en quatre
actions :
• Faciliter l’entrée progressive dans les soins ;
• Garantir une réponse adaptée lors des
urgences psychiatriques ;
• Assurer une formation indispensable aux
aidants de proximité ;
• Lutter contre l’abandon des exclus.
L’UNAFAM est donc en première ligne dans le débat
des aidants familiaux. Même si un chemin a été parcouru avec la reconnaissance du handicap psychique
et la loi 2005, les ressources pour les familles, autres
que celles apportées par l’organisme sont peu nombreuses. La comparaison avec d’autres pays tels que
le Québec démontre un retard certain. Le défi passe
donc par l’acceptation des orientations définies ci-dessus par le gouvernement.
Enfin, que le développement relatif à l’aide apportée
aux aidants familiaux soit québécois ou français, il
faut souligner que le mérite revient à un petit nombre
de personnes travaillant pour la communauté.
Cependant, dans le contexte actuel, ce petit nombre
ne suffit plus. La pérennité des organismes aidants et
l’impact de leurs actions passeront par un développement des relations intersectorielles. C’est parce que
chacun aura convaincre l’autre de travailler ensemble
dans un intérêt commun et collectif que ces initiatives
obtiendront l’ampleur que prennent celles mises en
place aujourd’hui au Québec. Développer les actions
en partenariat et en réseau permettra aux organismes
d’obtenir une reconnaissance et une légitimité au-delà
des frontières de leur secteur d’activité. L’accès à une
population plus large sera envisageable, et les impacts
recherchés en découleront, parce que, comme le disait
L. Fèvre, « Il n’y a pas d’autonomie dans l’isolement
total. »
29
Pourquoi la fleur de narcisse pousse-t-il près d’une
étendue d’eau ? 1
Par [email protected]
Le trouble de personnalité narcissique est un trouble
qui peut laisser paraître un certain bien-être chez la
personne qui le vit. Par contre, plusieurs aspects
sous-jacents sont présents et non négligeables.
Malgré les apparences, cette personne souffre
beaucoup. Présentement, le trouble de personnalité
narcissique se range parmi les dix troubles de personnalité diagnostiqués selon le DSM IV. L’origine
du nom « narcissique » est attribuée à une légende.
Dans la mythologie grecque, Narcisse était le fils
d’un dieu et d’une nymphe. La beauté exceptionnelle de Narcisse, ainsi que sa vanité, le rendait
célèbre : il ne s’intéressait qu’à lui-même et repoussait avec mépris les avances des jeunes filles. Écho
était une nymphe qui ne pouvait plus se servir de sa
voix, sauf pour répéter les derniers mots qu’elle
entendait. C’était une punition que lui avait infligée la
déesse Héra, épouse de Zeus, pour avoir tenté de la
distraire en bavardant pendant que Zeus entretenait
des liaisons avec d’autres nymphes.
Un jour, Écho fit la rencontre de Narcisse et tomba
amoureuse de lui. Mais sans hésitation, celui-ci la
rejeta. Le cœur brisé, elle se laissa dépérir, jusqu’à
ce qu’il ne reste d’elle que sa voix. Les autres
nymphes se plaignirent auprès de Némésis, la
déesse grecque de la Vengeance. Lors d’une
chasse en forêt, Némésis poussa Narcisse à aller se
désaltérer dans une source d’eau. Il vit son reflet et
tomba amoureux de lui-même. Il resta de longs jours
près de la source à se contempler et finit par dépérir.
À l’endroit où il mourut, poussa une fleur blanche, le
« narcisse ». Cette légende a donné le mot « narcissique » (quelqu’un qui s’aime lui-même).
C’est ce qui explique que le narcisse pousse près de
l’eau.
Les narcissiques sont des personnes qui se considèrent comme des personnes très importantes,
grandioses et qui entretiennent de grands rêves. Ils
se croient différents des autres, parfaits et tout-puis-
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sants. Leurs amis, les personnes qu’ils côtoient doivent également être des personnes exceptionnelles,
du moins à leurs yeux. Ils ne prêtent guère d’importance aux droits d’autrui ainsi qu’à certaines normes
sociales et valeurs morales. De plus, il leur arrive
souvent de penser que les autres veulent les provoquer ou les contrarier. Contrairement à ce qu’ils peuvent laisser paraître, ils ont souvent des pensées
négatives envers eux-mêmes, par exemple, ils
croient n’être bons en rien et n’avoir aucune valeur.
Les personnes ayant un trouble narcissique se sentent toutes-puissantes et invulnérables vis-à-vis du
monde extérieur. Par contre, leur manque d’estime
de soi les amène à se sentir enragées, vexées
lorsqu’elles échouent. Elles ont peur de perdre la
Pourquoi la fleur de narcisse pousse-t-il près d’une
étendue d’eau ? 2
face et cela peut les hanter constamment, ce qui les
pousse souvent à avoir ces comportements narcissiques. Lorsqu’elles sont critiquées par les autres,
elles ont honte et se sentent humiliées. Elles doutent d’elles-mêmes, mais n’aiment vraiment pas ressentir ce sentiment. Elles préfèrent ressentir un sentiment de puissance et d’assurance. Par conséquent, elles envient souvent ceux qu’elles estiment
ou surestiment.
Pour illustrer davantage la situation, on peut imaginer une personne arrogante, qui veut toujours avoir
gain de cause, qui est intolérante aux critiques, qui
semble s’autosuffire, qui a de grands projets pour
elle-même et qui les fait valoir, qui se met en vedette
en étant souvent compétitive et ambitieuse, qui
recherche les traitements de faveur et qui exagère
ses réussites et ses performances. De plus, du côté
social, cette personne utilise les autres pour satisfaire ses propres besoins et les contrôler. Elle refuse
l’aide des autres et leur fait sentir qu’elle n’a pas
besoin d’eux. Elle accorde de l’importance seulement aux gens qu’elle l’admire. Dans le cas
contraire, elle pourrait se replier sur soi ou couper le
contact. Son comportement risque de devenir hautain et dénigrant. On peut remarquer dans plusieurs
cas, que côté amour et sexualité elle a un comportement pathologique à cause d’un manque d’engagement à l’égard autrui. Finalement, lorsque son
estime de soi est menacée, elle peut avoir des réactions agressives intenses.
Il est important de savoir que l’on ne naît pas avec
le trouble narcissique, mais on le développe.
Plusieurs causes ont été avancées sur l’origine de
ce trouble. Il se pourrait qu’il provienne d’un échec
profond et précoce dans le développement de l’enfant à intégrer et imiter les comportements empathiques des parents. Il est aussi possible que cela
provienne tout simplement de l’incapacité pour l’enfant ou ses parents d’avoir un comportement empa-
thique vis-à-vis d’autres personnes. Également,
l’origine de ce trouble peut être lié à une structure
défensive de l’enfant en réaction à des abus ou des
traumatismes. Finalement, ce problème peut venir
d’un dysfonctionnement vécu dans l’enfance, soit à
cause d’un coucounage excessif ou à cause de très
fortes attentes des parents envers l’enfant. Il arrive
dans certains cas que des parents, étant euxmêmes narcissiques, projettent leurs propres
attentes sur leur enfant, ce qui laisse à celui-ci très
peu de marge de manœuvre. La deuxième possibilité est complètement à l’opposé de la première et
s’oriente davantage vers les abus, la négligence des
parents ou des personnes proches de lui, comme
les camarades de l’école. Cela peut se traduire par
des critiques sévères, du rejet, de l’exclusion. C’est
alors que le narcissisme se développe en guise de
protection. Plusieurs hypothèses sont ainsi avancées, mais il n’existe aucune certitude pour le
moment.
Vivre avec une personne présentant ce trouble est
possible. Par contre, il y a certaines conditions à
respecter.
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Pourquoi la fleur de narcisse pousse-t-il près d’une
étendue d’eau ? 3
• Il faut d’abord bien connaître la nature vulnérable
de la personne qui souffre du trouble de personnalité narcissique afin de développer une
tolérance aux attitudes égocentriques qu’elle
manifeste.
• Tout en apprenant à tolérer ces attitudes, il faut
apprendre à s’affirmer adéquatement, par exemple, ne pas la critiquer ou seulement lorsque c’est
nécessaire en n’oubliant pas de lui démontrer l’effet de son comportement sur autrui (empathie). La
critique doit être précise, c’est-à-dire qu’elle doit
reposer sur des faits. Il est important toutefois de
ne pas revenir sur des situations passées. Les critiques doivent être faites seulement lorsque c’est
indispensable.
• Les attitudes de la personne étant souvent très
dérangeantes pour autrui, il est important de ne
pas oublier de la féliciter pour ses bons coups,
sans toutefois exagérer la note. Lorsque l’on
perçoit de la sincérité dans ses paroles ou ses
gestes, il faut lui montrer notre approbation.
• Comme la personne narcissique pense qu’elle
mérite plus que les autres, il est important de
demeurer discrets sur nos réussites, nos avantages et nos privilèges. Sinon, elle ressentira un
sentiment d’injustice et pourrait avoir des attitudes
dérangeantes, ce qui risque d’avoir un impact sur
notre relation.
• Même si son attitude peut devenir insupportable,
il faut éviter de la contredire et de s’opposer à elle,
malgré notre besoin d’intervenir. Sinon, notre relation pourrait devenir intolérable.
• L’empathie réelle et constante est la règle d’or
pour transiger avec le narcissique dans l’intimité.
Un traitement est possible pour ce trouble, mais cela
s’avère plutôt difficile, car dans la plupart des cas, la
personne narcissique se croit supérieure à son thé-
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rapeute. Donc, le lien de confiance entre l’aidant et
l’aidé ainsi que la crédibilité du thérapeute est remis
en cause. Il peut arriver aussi que la personne qui
présente ce trouble soit traitée pour dépression, car
elle est vulnérable en cas d’échec et il n’est pas rare
qu’elle traverse plusieurs épisodes de déprime ou
de dépression durant une année. C’est donc l’une
des raisons qui la pousse souvent à aller consulter.
Un congédiement ou un divorce serait également
une autre raison de consulter plus directement reliée
au trouble narcissique. Le fait de vive une grosse
perte peut favoriser la remise en question sur soi et
par conséquent l’amener à consulter.
Ce trouble n’est pas toujours évident à déceler pour
l’entourage, car ces personnes ne laissent rien
paraître. Il est important de se rappeler que les personnes qui sont atteintes par ce trouble peuvent être
irritables et avoir des comportements détestables,
mais qu’il peut y avoir plusieurs raisons à leur comportement comme cela a été mentionné précédemment. L’empathie sera le meilleur outil si l’on côtoie
une personne atteinte. Cela signifie que l’on peut
comprendre leurs comportements et leurs attitudes,
mais pas nécessairement les tolérer. Il est primordial
de s’informer davantage sur ce trouble afin d’intervenir de façon efficace. Cela évitera non seulement de
provoquer ou de confronter la personne atteinte,
mais d’être soi-même blessé ou de s’épuiser.
Références bibliographiques :
LELORD F., et C. André. Comment gérer les personnalités difficiles, Éditions Odile Jacob, mars 2000.
www.maladiesmentales.org
www.minddisorders.com
www.mayoclinic.com
Les petites annonces et
activités de l’Alpabem
Fermeture des bureaux
L’ALPABEM sera fermée les vendredis 24 juin et 1er juillet pour la fête Nationale du Québec et la fête du
Canada. Bon repos à tous!
Horaire estival
Pour la période estivale, nos bureaux fermeront dès midi les vendredis et ce du 8
juillet au 19 août inclusivement.
Au besoin, vous pouvez contacter un des CSSS de Laval suivants :
•
•
•
•
CSSS
CSSS
CSSS
CSSS
des Mille-Iles, 450 661-2572
du Marigot, 450 668-1803
du Ruisseau-Papineau, 450 687-5690
Sainte-Rose de Laval, 450 622-5110
En cas d’urgence, contactez la division urgence
sociale : DIVISION URGENCE SOCIALE
450 662-4595 du lundi au vendredi de 8 h à 17 h 30
Après les heures d’ouverture, composez le 911.
Fête des pères
Dimanche le 19 juin
Les membres du C. A. et les employés de l’ALPABEM profitent de l’occasion pour souhaiter une joyeuse
fête des Pères à tous les papas!
Merci à Diane Plouffe
L’ALPABEM tient à remercier Mme Diane
Plouffe, membre de l’ALPABEM, pour son
implication dans la correction des textes de la
revue Oxygène.
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Les petites annonces et
activités de l’Alpabem
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Les petites annonces et
activités de l’Alpabem
Les quilles
De retour à l’automne
Les quilles feront relâche cet été et seront de retour à l’automne.
Merci à tous pour votre participation !
Résultats de l’année 2010-2011
Le champion 2010-2011 est M. Daniel Major qui a terminé la saison avec 45
points sur 49. Il succède à Mme Francine Godin, championne 2009-2010.
Mentions honorables à Mme Lilianne Major et à Mme Suzanne Lemerise
pour leur deuxième et troisième place respectivement.
Merci à tous les participants.
Nous aurons quelques places de disponibles l’ an prochain
PROGRAMME PIAP
Programme d’Information et d’Accueil aux Proches
Les vendredis 8 et 15 juillet 2011 de 9h30 à 16h30
Le programme d’accueil aux proches a été révisé et est maintenant offert aux clients de l’ALPABEM
depuis février 2010. Ce programme d’une durée de 2 jours, s’adresse aux membres de l’entourage
d’une personne atteinte de maladie mentale.
Il a pour objectif de permettre aux membres de l’entourage de mieux reconnaître les symptômes reliés
à la maladie mentale d’un proche, développer leurs sentiments de compétence et les outiller pour mieux
gérer le stress causé par leur nouvelle réalité d’accompagnateur.
Les dates n’étant pas encore déterminées pour la prochaine présentation du programme et les places
étant limitées, nous vous invitons à communiquer avec nous afin de vous inscrire sur la liste d’attente.
Pour information et inscription, communiquez au 450-688-0541
Coût : Gratuit (dépôt de 20$ requis qui sera remboursé à la fin de la formation)
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CONSEIL D’ADMINISTRATION 2011-2012
Présidente:
Francine ROBILLARD
Vice-président : Daniel MAJOR
Secrétaire :
Dominique CLOUTIER
Trésorière :
Sylvie PICHÉ
Administrateur : Céline PAQUIN
Administratrice: Brigitte CÔTÉ
L’ÉQUIPE
Directeur général :
Adjointe administrative :
Intervenants :
Conseiller clinique:
Patrice MACHABÉE
Sylvie ROUSSEL
Jorge MONTERROSO
Cynthia BERTRAND
Alexandra KÖNIG
Janie MORIN
Yves LARDON
RÉDACTEUR EN CHEF
Patrice MACHABÉE
ÉQUIPE DE RÉDACTION
Jorge MONTERROSO
Alexandra KONIG
Janie MORIN
Cynthia BERTRAND
Francine ROBILLARD
Patrice MACHABÉE
Sylvie ROUSSEL
Stéphanie AVOINE (Stagiaire)
Benjamin GAUBERT (Stagiaire)
MEMBRES HONORAIRES
Suzanne
Jean-Guy
Pierre
Arnold
Pierre
Suzanne
Robert
Gloria
Flore
Catherine
Jean-Marc
Armand
Denyse
Gilles
Lise
Fernando
Georges
Monique
Fernande
Claudette
BÉCHARD
BLANCHETTE
CHAMBERLAND
DRAPEAU (décédé)
COUSINEAU, psychologue
DE LA DURANTAYE
GIROUARD
HENRIQUEZ
LAFRENIÈRE
LAZURE (Décédée)
LÉGARÉ
LEMIEUX
PAQUET
PERREAULT
PERREAULT
SEGUEL
ST-ARNAUD
STEVENSON
THOUIN
WOLFF
INFOGRAPHIE ET MISE EN PAGE
Alexandre Mc Grath, Votre Média
[email protected]
514.816.4101
CORRECTION
Diane PLOUFFE ([email protected])
Sylvie ROUSSEL
IMPRESSION
ALPABEM
Le journal Oxygène
Volume 2, numéro 8, juin 2011
Dépôt légal
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
ISSN 0840-5530
Rendu possible grâce à la participation financière de nos partenaires
DU GRAND MONTRÉAL
www.ALPABEM.qc.ca
1772 boulevard des Laurentides
Vimont, Laval (Québec)
H7M 2P6