Résumé et analyse d`articles sélectionnés

Transcription

Résumé et analyse d`articles sélectionnés
revue de la littérature internationale
résumé
et
a n a ly s e
d’articles
sélectionnés
■ Coordinateur : F. Beygui
Le traitement par statines réduit le risque
de mortalité chez l’insuffisant cardiaque
Le traitement par statines
réduit le risque de mortalité
chez l’insuffisant cardiaque
La meilleure façon de ne pas
reprendre du poids :
se peser et voir des soignants
en “face-à-face”
régulièrement
Régimes à faible teneur
en hydrates de carbone
et risque de maladie
coronaire chez la femme
Le ramipril ne prévient pas
le diabète
mais favorise le retour
vers la normoglycémie
chez les patients intolérants
aux hydrates de carbone
Résumé. Il s’agit d’une étude de cohorte qui a
pour objectif d’évaluer l’intérêt d’un traitement
par statines dans une population d’insuffisants
cardiaques jusqu’alors non traités par statines
mais qui théoriquement devaient bénéficier de
ce type de traitement. La médiane de suivi de
cette cohorte comprenant 24 598 patients a été
de 2,4 ans. Après l’inclusion dans l’étude, 51,4 %
des patients ont été traités par statines, selon
la prescription de leurs médecins. Les caractéristiques suivantes étaient plus fréquemment
retrouvées chez ceux traités par statines : maladie coronaire, diabète, hypertension artérielle
(HTA), taux initiaux de cholestérol total et de
LDL plus élevés, visites plus fréquentes chez
le cardiologue, traitements plus fréquents par
inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC),
inhibiteurs de l’angiotensine II (ARA 2), hypolipémiants autres que les statines, vasodilatateurs
et dérivés nitrés.
Les taux de mortalité et d’hospitalisation pour
insuffisance cardiaque observés chez les patients
traités et non traités par statines, ajustés sur l’âge
et le sexe, étaient respectivement de 14,5 versus
25,3 et de 21,9 versus 31,1 pour 100 patientsannées (p < 0,001 pour les deux comparaisons).
Cette différence était identique que l’étiologie de
l’insuffisance cardiaque soit ischémique ou non.
En analyse multivariée, ajustée à 34 covariables
potentielles (âge, sexe, race, maladie coronaire,
comorbidités cardiovasculaires, hépatiques ou
rénales, cancer, dysthyroïdie, taux de cholestérol,
traitements associés, infection VIH, etc.), le traitement par statine était associé à une réduction
de la mortalité (HR = 0,76, [0,72-0,80]) et des
hospitalisations pour insuffisance cardiaque (HR
= 0,79 [0,74-0,85]).
Commentaire. Si l’on ne dispose d’aucune étude
randomisée démontrant l’intérêt des statines
chez l’insuffisant cardiaque, cette étude de
cohorte plaide en faveur de ces molécules chez
les patients qui ont une “raison” de recevoir ce
type de traitement. Ce bénéfice, aussi important
en termes de mortalité que d’hospitalisation
pour insuffisance cardiaque, est indépendant
de toutes les caractéristiques de base, y compris l’étiologie de l’insuffisance cardiaque et
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le taux de cholestérol. Notons que des études
randomisées (CORONA, GISSI-HF) sont en cours
pour déterminer si l’insuffisance cardiaque à
elle seule peut être une indication au traitement
par statines.
❐ Go AS, Lee WY, Yang J et al. Statin therapy and risks for death and
hospitalization in chronic heart failure. JAMA 2006;296:2105-11.
La meilleure façon de ne pas reprendre du poids :
se peser et voir des soignants en “face-à-face”
régulièrement
Résumé. Cette étude a randomisé 314 patients
ayant perdu en moyenne 19,3 kg dans les 2 ans
précédant la randomisation, afin d’évaluer
trois stratégies :
– le groupe contrôle (n = 105), recevant uniquement
des lettres d’information trimestrielles,
– le groupe “face-à-face” (n = 105), avec autopesée
quotidienne, notification du poids hebdomadaire par
téléphone, réception de messages verts, jaunes ou
rouges en fonction des prises de poids et réunions
régulières avec des soignants,
– le groupe “Internet” (n = 104), avec la même
stratégie que le groupe “face-à-face”, mais par
Internet.
La prise de poids à 18 mois était respectivement
de 4,9 ± 6,5 kg, 2,5 ± 6,7 kg et 4,7 ± 8,6 kg dans
les trois groupes. La différence était significative
entre le groupe “face-à-face” et le groupe contrôle
(p = 0,05). Une prise de poids supérieure à 2,3 kg
était rapportée chez respectivement 72,4 %,
45,7 % (p < 0,001) et 54,4 % (p = 0,008) des
patients dans les groupes contrôle, “face-à-face”
et “Internet”.
Commentaire. Le problème majeur dans le traitement de l’obésité reste la reprise de poids après
la perte initiale. Cette étude montre qu’une autorégulation du poids, combinée à une prise en
charge simple mais régulière, de préférence en
face-à-face avec des soignants, permet de faire
baisser le taux d’échec (reprise de poids > 2,3 kg
en 18 mois), celui-ci passant de 72 % à 45 %.
L’intérêt et le rapport coût/efficacité d’une telle
stratégie devraient être évalués face aux nouvelles
molécules telles que le rimonabant – et éventuellement en association avec elles.
❐ Wing RR, Tate DF, Gorin AA et al. A self-regulation program for
maintenance of weight loss. N Engl J Med 2006;355:1563-71.
Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. IV - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2006
revue de la littérature internationale
résumé
Régimes à faible teneur en hydrates de carbone
et risque de maladie coronaire chez la femme
Résumé. Il s’agit d’une nouvelle publication
portant sur la cohorte des infirmières de la
Nurses’ Health Study. Au cours d’un suivi de
20 ans, sur 82 802 infirmières, 1 994 nouveaux
cas de maladie coronaire (infarctus fatal ou
non) ont été rapportés. Les infirmières avaient
répondu à des questionnaires d’évaluation
nutritionnelle permettant de quantifier les
apports d’hydrates de carbone (HC), de graisses et de protéines d’origine animale ou végétale, de même que la charge glycémique totale
(quantité d’HC multipliée par l’index glycémique de chaque aliment). Des scores ont été
calculés en fonction de la quantité totale d’HC
consommés, avec des analyses comprenant la
quantité totale mais aussi l’origine, animale ou
végétale, des graisses et protéines. Après ajustement sur l’âge, l’index de masse corporelle,
les facteurs de risque cardiovasculaires ainsi
que la prise d’aspirine et de vitamines, une
analyse multivariée portant sur les déciles des
scores a été réalisée. Cette analyse comparant
les déciles 1 et 10 montre que, globalement,
le régime faible en HC n’est pas associé à la
survenue d’événements coronaires (RR = 0,94,
p = 0,19). De plus, si l’on tient compte également de l’origine animale ou végétale des
protéines et graisses, les régimes faibles en
HC associés aux apports élevés en protéines et
graisses d’origine végétale sont associés à un
risque plus faible de survenue d’une maladie
coronaire (RR = 0,70, p = 0,002). La charge
glycémique est associée à un risque plus élevé
de survenue d’une maladie coronaire en analyse multivariée, et la consommation de graisses d’origine végétale à un risque plus faible
(RR = 1,90 [p = 0,003] et RR = 0,75 [p = 0,006]
respectivement pour les déciles 10 et 1).
et
a n a ly s e
d’articles
Commentaire. Cette étude s’est donné pour
objectif de vérifier le caractère délétère ou bénéfique des régimes amaigrissants, déconseillés
par la communauté médicale et néanmoins très
à la mode outre-Atlantique, recommandant la
surconsommation de protéines et de graisses,
et la limitation, voire l’exclusion, des HC. Bien
que ces régimes ne semblent pas être associés
à des taux plus élevés de maladie coronaire et
semblent même être plutôt bénéfiques lorsque
les protéines et graisses sont d’origine végétale, il persiste de nombreux points d’ombre.
L’étude est en particulier limitée par le fait que
les autres pathologies potentiellement létales
– les cancers par exemple – n’ont pas été étudiées, de même que les données biologiques
– les lipides et la fonction rénale par exemple.
Globalement, on peut penser qu’une plus faible charge glycémique et une réduction des
apports de graisse animale sont à l’origine
de ces résultats.
❐ Halton TL, Willett WC, Liu S et al. Low-carbohydratediet score and the risk of coronary heart disease in women.
N Engl J Med 2006;355:1991-2002.
Le ramipril ne prévient pas le diabète
mais favorise le retour vers la normoglycémie
chez les patients intolérants aux hydrates
de carbone
Résumé. L’étude randomisée en double
aveugle DREAM a inclus 5 269 patients avec
des critères d’intolérance aux hydrates de
carbone mais sans diabète (glycémie à jeun
1,10 à 1,26 g/l ou glycémie entre 1,40 et 2 g/l,
2 heures après charge glycémique per os) et
sans maladie cardiovasculaire. Un plan factoriel 2 x 2 était réalisé pour étudier l’intérêt
du ramipril (objectif de 15 mg/j) d’un côté
et de la rosiglitazone de l’autre, comparés
Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. IV - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2006
sélectionnés
au placebo. Les résultats portant sur l’effet
bénéfique de la rosiglitazone sur le critère
primaire de jugement (HR = 0,40, p < 0,001)
ont déjà été publiés (Lancet 2006;368:1096105). L’étude DREAM concerne les effets du
ramipril. Après un suivi médian de 3 ans,
la survenue du critère principal de jugement (diabète ou décès) était comparable
(p = 0,15) dans les groupes ramipril (18,1 %)
et placebo (19,5 %), de même que ses composants (diabète : 17,1 % versus 18,5 % et
décès : 1,2 % dans les deux groupes). En
revanche, le ramipril était associé à un taux
plus élevé de normalisation de la glycémie
à jeun ou post-charge glycémique (critère
secondaire de jugement) [42,5 % versus
38,2 % (p = 0,001)]. Il n’y avait aucune interaction entre les effets du ramipril et de la
rosiglitazone.
Commentaire. Des analyses post hoc de différentes études portant sur les IEC ou les ARA 2
(HOPE, ALLHAT, LIFE, VALUE, etc.) avaient suggéré un effet bénéfique de ces molécules en termes de prévention du diabète. L’étude DREAM
était spécifiquement conçue pour étudier cette
hypothèse. Elle diffère des précédentes, qui
avaient inclus des patients avec des maladies
cardiovasculaires, un diabète méconnu, et
comparaient différentes thérapeutiques entre
elles. La population à plus faible risque et le suivi
plus court de l’étude DREAM peuvent expliquer
l’absence d’effet sur le critère primaire de jugement. L’effet bénéfique sur la régression vers
la normoglycémie ne doit néanmoins pas être
négligé puisque même les élévations modérées
de la glycémie sont associées à un surrisque de
morbimortalité à long terme.
❐ The DREAM Trial Investigators. Effect of ramipril on the
incidence of diabetes. N Engl J Med 2006;355:1551-62.
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