Naturalisations

Transcription

Naturalisations
Naturalisations
Etat des lieux dans le Chablais
Table des matières
p.2Préambule
p.3
Documentation et références
p.4Résumé
p.6
Dans le Chablais
Points communs et différences
Propositions
p.16 Etude « La naturalisation en Suisse »
Evolution, de 1848 à nos jours
Statistiques
Eléments influents
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Préambule
La naturalisation des étrangers est un acte politique fort, confié
pour sa part la plus importante à la responsabilité des autorités
communales. Du côté du migrant, le désir de se faire naturaliser
correspond au souci d’être perçu comme un membre à part entière
de la société d’accueil. Il est le signe qu’une personne se sent
comme un membre de la société dans laquelle elle vit. Du côté de
la société d’accueil, la naturalisation signifie la reconnaissance de
l’immigré en tant que membre à part entière de celle-ci. Elle
témoigne de l’ouverture de ladite société face à l’immigration.
En 2010, 1,7 millions d’étrangers vivaient en Suisse, dont
350’000 nés en Suisse. Cette année-là, 38’700 personnes
acquéraient la nationalité suisse. Ce chiffre est-il faible ou élevé ?
A quoi correspond-il ? Les personnes responsables des procédures
de naturalisation sont souvent tiraillées entre la peur de la caricature
des « Faiseurs de Suisses » et l’envie de ne pas brader le passeport à
croix blanche. Y a-t-il des éléments intéressants à partager, aidant à
la pratique ?
Afin de tenter de répondre aux interrogations exprimées par
plusieurs municipalités du Chablais, l’équipe du projet agoris s’est
proposé de faire un point de la question et de compiler ses résultats
à l’attention des communes du Chablais.
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Documentation
et références
Le présent «Etat des lieux » repose sur l’analyse du questionnaire
adressé par agoris aux 28 communes du Chablais, fin octobre 2012,
(13 d’entre elles y ont répondu) ainsi qu’à la lecture de la documentation cantonale et fédérale.
Plus particulièrement, en 2011 et 2012, la Commission fédérale
pour les questions migratoires (CFM) a publié deux études ainsi que
des propositions et recommandations :
-Les marges de manœuvre au sein du fédéralisme :
la politique de migration dans les cantons (2011)
-La naturalisation en Suisse – Evolution 1992 – 2010 (2012)
-Naturalisation – Propositions et recommandations
pour un droit de cité contemporain (2012)
La présente brochure reprend et résume les principaux propos et
conclusions de ces trois documents.
L’analyse du contenu de la rubrique « naturalisation » des sites internet des cantons de Vaud et du Valais a également été réalisée.
3
Résumé
Le présent document analyse les pratiques en matière de naturalisation dans le Chablais, à l’aune des études fédérales et des directives cantonales.
Les études fédérales renseignent sur l’évolution de la naturalisation à travers le temps ainsi que sur les facteurs influençant positivement et négativement la procédure. On apprend ainsi que la
procédure était extrêmement simple en 1847 et que la loi actuelle
trouve ses racines en 1952. On apprend que depuis 1992, grâce à la
possibilité d’avoir une double nationalité, les étrangers sont beaucoup plus nombreux à faire les démarches de naturalisation.
On découvre les principaux facteurs influençant positivement la
naturalisation dont la qualité de l’information donnée aux migrants,
la professionnalisation de la procédure et l’existence d’une procédure simplifiée pour la 2ème et la 3ème génération. On apprend que
les migrants sont plus nombreux à faire les démarches de naturalisation à l’adolescence, lorsqu’ils proviennent d’un pays hors UE et
lorsqu’il y a peu de chances d’un retour au pays d’origine.
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Dans les facteurs influençant négativement la décision, on peut
citer, du côté du candidat, un faible niveau de formation, une activité professionnelle de type peu qualifié, le fait d’être au chômage
ou au bénéfice d’une rente invalidité, le fait d’être originaire de la
Turquie, de l’ex-Yougoslavie ou d’être de religion musulmane, le fait
de détenir un permis B au moment de la demande, le fait d’avoir
une dette d’aide sociale. Ces facteurs négatifs révèlent une difficulté
constante pour les personnes pratiquant les auditions, de ne pas
transformer la procédure de naturalisation en test d’intelligence et
de ne pas se laisser influencer par les stéréotypes.
Le dépouillement des questionnaires chablaisiens a révélé la difficulté pour les communes de 1000 - 1500 habitants de mettre en
place une procédure routinière. Ces communes, qui représentent
la moitié des communes du Chablais, sont en effet confrontées à
moins de deux dossiers par année, ce qui rend difficile l’installation
de la pratique.
Une harmonisation des pratiques et une mise en commun des
moyens d’information seraient faciles à réaliser, sous l’égide d’une
plate-forme comme agoris. agoris pourrait également proposer
une formation et une supervision aux communes intéressées.
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Dans le Chablais
A cheval sur les cantons de Vaud et du Valais, le Chablais doit toujours composer avec des réalités différentes, selon qu’on soit d’un
côté ou de l’autre du Rhône.
De prime abord, le canton du Valais est l’un des plus restrictifs, avec
un taux de naturalisation standardisé à 1,3% (avant-dernier rang
suisse) alors que le canton de Vaud est un des plus permissifs, avec
un taux standardisé de 2,8% (6ème rang).
A l’échelle des districts, les différences sont cependant moins importantes. Le district d’Aigle se situe entre 2 et 2,49% et celui de
Monthey entre 1,4 et 1,99%. La Ville de Monthey atteint même un
taux standardisé* de 2,36% sur la période 2005-2010.
Points communs et différences
Conditions générales
Les conditions générales étant les mêmes pour toute la Suisse, la
procédure ne devrait pas connaître de différences à ce niveau-là :
-Respecter l’ordre juridique suisse
-Ne pas compromettre la sûreté intérieure ou extérieure
de la Suisse
-Etre accoutumé au mode de vie et aux usages suisses
-Etre intégré dans la communauté suisse
Pourtant, c’est dans la compréhension des intitulés « être accoutumé au mode de vie et aux usages suisses » et « être intégré dans
la communauté suisse» que l’on trouve le plus de marge d’interprétation.
* Le taux de naturalisation standardisé se calcule en divisant le nombre de naturalisations
effectives par le nombre d’étrangers au bénéfice d’un permis de séjour B ou C.
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Selon les communes et les cantons, « être accoutumé au mode de
vie et aux usages suisses » signifie peu ou beaucoup. Le Tribunal
Fédéral a débouté la commune qui avait utilisé le motif d’un nonraccordement au réseau fixe de téléphonie comme preuve de nonaccoutumance. On comprend le TF ! Mais on voit par là que la marge
de manœuvre des cantons et des communes est importante.
En entretien, la plupart des communes du Chablais posent des
questions relatives à la géographie, à l’histoire, à la culture,
au sport et à l’organisation politique, le tout au niveau local,
régional et fédéral. La plupart des communes interrogent également les candidats sur leur parcours de vie et leurs motivations.
S’il est approprié de poser de telles questions, celles-ci ne
doivent cependant pas se révéler un test d’intelligence et laisser sur le carreau les personnes les moins formées. L’information donnée au préalable aux candidats est importante ; ils
doivent pouvoir se préparer !
Pour ce qui est de l’intégration, les communes devraient utiliser la
définition de l’intégration présente dans l’ordonnance sur l’intégration des étrangers (OIE) datant de 2008, et vérifier :
a. le respect de l’ordre juridique et des valeurs de la Constitution fédérale
b. l’apprentissage de la langue nationale parlée sur le lieu
de domicile
c. la connaissance du mode de vie suisse
d. la volonté de participer à la vie économique et d’acquérir
une formation
A noter que la participation à la vie sociale et politique ne figurent
pas dans cette définition ! Elles ne devraient donc pas être exigées du
candidat. Les connaissances géographiques et historiques ne sont
pas non plus clairement demandées. Elles sont toutefois admises
comme nécessaires par les cantons de Vaud et du Valais. En attendant des directives plus précises de la Confédération, il semble donc
justifié d’avoir des attentes vis-à-vis des candidats dans ces domaines.
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L’absence de dettes n’est pas une exigence non plus. Pourtant de
nombreuses communes tiennent compte de ce critère. Une dette
d’aide sociale peut se justifier, notamment lorsque le migrant est
arrivé par le biais de l’asile. Là encore, il est important de prendre en
compte le parcours du migrant, de tenir compte des efforts entrepris et de la dynamique dans laquelle se trouve le candidat.
Toutes les communes du Chablais vérifient la connaissance du
français par un entretien. Cette méthode est bonne.
Certaines communes (hors Chablais) ont introduit des tests écrits
ou des niveaux minimums de français à atteindre. Ces méthodes ne
tiennent pas compte des parcours de vie et des efforts réellement
consentis par le candidat. Un test écrit mettrait en échec quasiment
tous les travailleurs arrivés dans les années 50-60 et qui n’ont pas
pu bénéficier des mesures actuellement mises en place pour l’intégration. Dans la vérification de l’apprentissage de la langue, il faut
tenir compte des parcours de vie, en Suisse et dans le pays d’origine
(années de scolarisation, traumatismes, etc.) ainsi que des structures d’intégration qui existaient (ou qui n’existaient pas) durant ce
parcours.
Procédure
Les différences entre les cantons de Vaud et du Valais ne se
situent donc pas tant au niveau des exigences (semblables)
qu’au niveau de la procédure.
Dans toute la Suisse, les demandes peuvent être individuelles ou
familiales. Le canton de Vaud définit un âge minimal pour les demandes individuelles : 11 ans révolus. Le Valais ne définissant pas
de telle limite inférieure, les communes l’ont fixée dans leurs règlements communaux, allant ainsi de 12 à 16 ans. Une unification de
cette limite minimale serait bienvenue. Les communes valaisannes
pourraient se calquer sur le modèle vaudois et fixer à 11 ans révolus la limite inférieure pour les demandes individuelles.
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Dans les deux cantons, les étranger(e)s marié(e)s à un(e) Suisse bénéficient de la naturalisation facilitée fédérale ; la procédure est
la même dans toute la Suisse. Pas de différence donc d’un canton
ou d’une commune à l’autre.
La principale différence se situe au niveau des jeunes (2ème génération) et des étrangers nés en Suisse (3ème génération). Le canton
du Valais n’a pas de procédure facilitée pour les jeunes nés en
Suisse ou de deuxième génération, alors que le canton de Vaud a
signé un concordat dans ce sens en 1994. Dans le canton de Vaud,
les étrangers nés en Suisse et résidant depuis 2 ans au moins dans le
canton, ainsi que les jeunes de 14 à 24 ans révolus ayant accompli
5 ans de scolarité obligatoire en Suisse et résidant en Suisse depuis,
réalisent dans leur commune de domicile une procédure purement
administrative (ni audition, ni rapport de police). Comme c’est à
l’adolescence que les étrangers se naturalisent le plus, cette différence a des conséquences importantes.
Pour la procédure ordinaire, les différences se situent au niveau
des durées de résidence, des coûts et des démarches (cf. tableaux
ci-dessous). A tous les niveaux, les choses sont un peu plus simples
ou un peu moins onéreuses dans le canton de Vaud que dans celui
du Valais.
Durées de résidence
Vaud
Valais
12 ans de résidence en Suisse
12 ans de résidence en Suisse
3 ans de domicile dans le canton de Vaud
5 ans de domicile en Valais
1 à 3 ans de domicile dans la commune
actuelle ou 2 ans dans une commune antérieure
3 ans de domicile dans la commune actuelle
Rester domicilié en Suisse le temps
de la procédure
Rester domicilié dans la commune le temps
de la procédure
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Coûts
Vaud
Valais
CHF 250.- à 400.- à la Commune
CHF 500.- à 1000.- à la Commune
CHF 350.- à 450.- au Canton
CHF 350.- à 550.- au Canton
CHF 50.- à 150.- à la Confédération
CHF 50.- à 150.- à la Confédération
Démarches
Vaud
Valais
Formulaire au greffe communal
Formulaire à l’office d’Etat civil régional
Contrôle des pièces par le SPM
Envoi du dossier aux communes
Rester domicilié en Suisse le temps
de la procédure
Rester domicilié dans la commune le temps
de la procédure
Rapport par la police communale
Rapport par la police communale
Audition devant une commission communale,
octroi de la bourgeoisie
Audition devant une commission communale,
octroi du droit de cité
En cas de refus, recours possible au Tribunal
administratif
En cas de refus, recours possible au
Conseil d’Etat / Tribunal Cantonal dès le 01.01.2013
Vérification du dossier par le canton
Vérification du dossier par le canton
Envoi du dossier à l’Office fédéral des migrations
pour octroi de l’autorisation fédérale
Audition devant une commission
du Grand Conseil
Décision du Conseil d’Etat
Décision du Grand Conseil
Envoi du dossier à l’Office fédéral des migrations
pour octroi de l’autorisation fédérale
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Cérémonie d’assermentation Cérémonie d’assermentation
En cas de refus, recours possible au Tribunal
administratif
En cas de refus, recours possible au
Conseil d’Etat / Tribunal Cantonal dès le 01.01.2013
Commentaire
La procédure vaudoise se réalise d’abord entièrement dans la commune du candidat alors qu’en Valais, le candidat doit d’abord constituer un dossier cantonal. Le greffe municipal vaudois rencontre les
candidats au départ et a la responsabilité de leur fournir documents
et conseils afin qu’ils se préparent dans les meilleures conditions. En
Valais, les offices d’Etat civil sont régionaux et n’ont pas la mission
d’aider et d’informer les candidats.
Le canton de Vaud ne convoque pas les candidats pour un second
entretien ; le Conseil d’Etat statue sur la base du dossier constitué
par les communes. Le canton du Valais confie aux communes le
rapport de police et le premier entretien mais renouvelle l’entretien au niveau cantonal (seconde audition par la sous-commission
« naturalisations » du Grand Conseil).
Jusqu’au 31.12.2012, la procédure de recours était plus claire dans
le Canton de Vaud que dans celui du Valais (Tribunal administratif
versus Conseil d’Etat). Le Canton du Valais a rectifié cet élément par
un amendement de sa loi, valable dès le 1er janvier 2013.
Propositions
1. Regroupement et Professionnalisation de la procédure
Avec un taux moyen de 20% d’étrangers et, parmi ceux-ci, un taux
moyen de naturalisations de 2%, il faut compter une moyenne de 4
naturalisations par année, soit 1 famille pour 1000 habitants.
Sur les 28 communes du Chablais, 13 communes ont moins de
1500 habitants, donc moins de 6 naturalisations par année, soit 3
familles tous les 2 ans. Difficile dans ces conditions d’établir des procédures précises, d’avoir des points de référence, d’être sûr de « faire
juste ».
Beaucoup de communes n’ont pas de police communale alors que
les enquêtes de proximité doivent être effectuées par cette instance.
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Les « petites communes » auraient la possibilité de se regrouper et
de confier leurs procédures de naturalisation à une instance intercommunale, comprenant au minimum un élu par municipalité
(obligation légale). La police municipale étant responsable des enquêtes de proximité, un regroupement similaire aux organisations
de polices intercommunales semblerait judicieux.
Ce regroupement permettrait de professionnaliser la procédure.
En effet, parmi les pratiques susceptibles d’influencer positivement
la naturalisation figure la professionnalisation de la procédure.
Les grandes communes devraient également tendre à cette professionnalisation.
En nommant une commission de naturalisation locale ou intercommunale et en lui adjoignant des forces administratives, il est
possible de prévoir des formations et des supervisions. Cellesci pourraient être proposées par agoris dès l’automne 2013. Elles
contribueraient à une harmonisation des pratiques sur le Chablais.
2. Harmonisation au niveau du Chablais
Des réponses aux questionnaires, il ressort de grandes disparités
entre les communes, quant à la forme et la durée des entretiens,
ainsi que l’information donnée.
Concernant l’information par exemple, les communes d’Aigle et
de Champéry envoient la liste des questions aux candidats avant
l’audition. La commune de Bex organise des visites de commune
et des séances d’information « civisime ». La commune de Monthey
tient une permanence « info-natus » une fois par mois. La commune
d’Ollon remet une brochure informant sur l’histoire, la géographie
et le civisme. La commune de Lavey-Morcles envoie une liste de
documentation possible avec la convocation. La commune de Collombey-Muraz remet aux candidats le jeu HelvetiQ Chablais.
Une forme unifiée sur le Chablais permettrait de communiquer sur
celle-ci plus facilement et de garantir une plus grande égalité de
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traitement. Celle-ci pourrait être discutée dans le cadre d’agoris
puis communiquée par le biais de la plate-forme.
a. Information
La qualité des informations données aux étrangers fait partie
des facteurs influençant le taux de naturalisation. Celle-ci n’est
donc pas à négliger. Plusieurs moyens d’information peuvent être
cumulés : prospectus, site internet, formation du personnel de guichet, etc.
Dans les communes vaudoises, comme les formulaires sont à
retirer puis à rendre au greffe municipal, celui-ci est un interlocuteur privilégié. D’autant plus qu’il participe la plupart du temps aux
entretiens et connaît donc bien les conditions et les procédures.
Dans les communes valaisannes, les formulaires sont à retirer
auprès de l’office d’Etat civil régional (à Monthey pour toutes les
communes sauf Evionnaz, rattachée à Martigny). Les entretiens se
déroulent ensuite dans 14 communes différentes, l’officier d’état
civil ne participe pas à la procédure et n’est donc pas un aussi bon
interlocuteur que le greffe municipal. Il doit toutefois sensibiliser les
candidats aux connaissances attendues.
Les communes valaisannes devraient nommer un répondant
aux questions de naturalisation afin de compléter l’information
donnée par l’officier d’Etat civil et ce, le plus tôt possible dans la
procédure. Elles devraient s’organiser avec le canton pour pouvoir
contacter les candidats le plus tôt possible. En effet, le temps de la
procédure devrait pouvoir être mis à parti pour préparer l’entretien,
voire prendre des cours de français.
b. Moyens d’information
Les permanences « info-natus » testées par la commune de
Monthey font appel à des bénévoles et sont un bon moyen de
permettre non seulement la connaissance « scolaire » des contenus
mais également la création de liens sociaux entre les participants.
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Les bénévoles sont d’anciens élus, des enseignants, des passionnés
d’histoire ou de géographie… Ils transmettent, avec le contenu,
leur enracinement profond et leur passion.
Les visites de communes sont également un moyen intéressant
de transmettre les informations tout en permettant leur appropriation par le candidat. Elles peuvent sembler inutiles, en regard du
fait que le candidat doit habiter la commune depuis au moins 1
an. Ceci dit, la réalité des entretiens montre qu’elles sont fort appréciées et fort nécessaires pour beaucoup de candidats.
La mise à jour des sites internet permettrait au candidat d’avoir
les informations justes en tout temps. Pour l’exemple, il est difficile
de trouver l’information du nombre de députés au Grand Conseil
valaisan. Le site du Grand Conseil ne le mentionne pas ! Les personnes qui font les sites ne pensent pas toujours à donner ce genre
d’informations qui leur semblent trop basiques. Il est de la responsabilité des personnes qui posent les questions de vérifier que leurs
réponses sont accessibles aux candidats.
Les listes d’ouvrages de référence sont intéressantes pour les
informations au niveau Suisse. Au niveau communal et régional, il
faut par contre souvent donner d’autres moyens ou créer les ouvrages de référence…
D’une manière générale, les candidats à la naturalisation devraient
être au clair avec les attentes de la commune au moins deux mois
avant la convocation à l’entretien, qu’ils aient le temps de se préparer.
c. Durée et forme des entretiens
Pour la durée et la forme des entretiens, il y a quasi autant de
modèles que de communes : de 10 à 30 minutes, de 3 personnes
à l’entier de la municipalité, avec une majorité autour de 15-20 minutes et 4 personnes. La plupart des communes ont une commission nommée pour réaliser les entretiens (commission de naturalisation) et ne réalisent donc pas un tournus. La commune de
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Monthey a confié à une équipe administrative la responsabilité des
entretiens. La plupart des communes ont des équipes mixtes : élus
et administration pour le support. Les communes de Monthey et
de Corbeyrier séparent les couples.
Pour qu’il se réalise dans des conditions idéales, l’entretien devrait
durer au moins 15 minutes, que le candidat ait le temps de dépasser la peur du premier contact et d’être à l’aise. Les personnes
réalisant l’entretien devraient être au moins 2, pour garantir l’objectivité, mais maximum 5, pour ne pas faire peur. L’équipe ne
devrait jamais changer et comprendre au moins un membre de
l’administration (idéalement « formé »). Le local, la disposition des
chaises, etc. devraient être accueillants, de façon à ce que le candidat ne soit pas trop impressionné et ne perde pas ses moyens. Si
les couples sont auditionnés ensemble, il est important de faire en
sorte que les attentes de l’un ne pèsent pas sur l’autre et que chacun réponde à sa part de questions.
d. En cas de réussite partielle
La loi vaudoise prévoit une possibilité de mise en attente. Si la
municipalité estime que toutes les conditions ne sont pas remplies
mais qu’elles pourraient l’être dans un délai d’un an, elle informe le
candidat de la suspension de la procédure. Il appartient alors au
candidat de reprendre la procédure dans le délai imparti. S’il ne le
fait pas, le dossier est classé.
La loi valaisanne ne dit rien à ce sujet. Certaines communes mettent
donc les dossiers en attente. D’autres statuent de façon négative.
Les communes du Chablais valaisan pourraient reprendre la formule du canton de Vaud et mettre les dossiers en attente, avec obligation pour le candidat de reprendre contact dans le délai d’un an.
e. Formation du personnel
Le canton de Vaud propose une formation pour les personnes
menant les entretiens. Celle-ci a pour thèmes : faire de l’audition
une rencontre de valeur, clarifier les buts de l’audition et du péri-
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mètre des connaissances et de l’intégration à considérer, accueillir
et impliquer le candidat, structurer l’interview : nature et ordre des
questions, interviewer à plusieurs, formuler des questions ouvertes
et fermées neutres pour des réponses riches, partager les « bonnes »
questions sur les divers thèmes, approfondir un sujet sans intrusion,
clarifier les malentendus, dépasser les gênes et résistance.
Une telle formation pourrait être organisée dans la région du Chablais et être ouverte aux communes valaisannes. Elle pourrait être
suivie de supervisions pour partager autour des dossiers difficiles.
La formation, offerte à Lausanne par le CEP, pourrait être organisée
dans le Chablais et suivie de supervisions régulières.
Etude « La naturalisation
en Suisse »
Evolution, de 1848 à nos jours
A la fondation de l’Etat fédéral, la procédure de naturalisation
était du ressort des cantons ; qui était citoyen d’un canton était citoyen suisse. Avec la révision de la Constitution en 1874, la naturalisation devint une procédure fédérale. Il suffisait toutefois de faire
état d’un domicile fixe en Suisse pour obtenir la nationalité.
En 1903, la révision de la loi introduisit une durée de résidence de
2 ans. A partir de 1920, la durée de résidence s’allongea à 6 ans.
Les étrangers nés en Suisse et qui y vivaient au moins 10 ans pendant leurs 20 premières années accédaient à la naturalisation sans
condition.
En 1952, la loi sur l’acquisition et la perte de la nationalité fut
introduite. Elle amena la distinction entre trois modes de naturalisation : la naturalisation ordinaire, la naturalisation facilitée et la
réintégration. La loi de 1952 – régulièrement amendée – est toujours la loi en vigueur aujourd’hui.
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Depuis 1952, la naturalisation ordinaire fut accessible après une
durée de résidence minimale de 12 ans. Un test d’aptitude fut
introduit. Il fut placé sous la responsabilité des communes.
La naturalisation facilitée fut introduite pour les enfants de mères
d’origine suisse ayant perdu leur nationalité par mariage. La réintégration concernait les femmes mariées à un étranger.
De 1983 à 1992, les femmes étrangères mariées à un Suisse acquéraient automatiquement la nationalité suisse. Cette disposition fut
remplacée en 1992 par la naturalisation facilitée pour les hommes
et les femmes se mariant à une personne de nationalité suisse. (On
entre dans l’ère de l’égalité homme-femme).
Depuis 1984, les enfants de mères suisses obtinrent automatiquement la nationalité suisse.
Depuis 1992, les candidats à la naturalisation obtinrent le droit à
la double nationalité. Cette nouvelle disposition eut des conséquences fondamentales pour nombre d’étrangers, qui n’ont plus eu
à choisir entre leur nationalité d’origine et leur nationalité d’adoption.
En 1994, la proposition d’inscrire dans la Constitution la naturalisation facilitée pour les personnes ayant grandi en Suisse échoua en
votation populaire. Les cantons de Zürich, Bern, Fribourg, Genève,
Jura, Neuchâtel et Vaud se regroupèrent au sein d’un Concordat,
prévoyant une procédure simplifiée au niveau cantonal pour
les jeunes nés et scolarisés en Suisse. Le Valais est le seul canton
francophone extérieur à ce concordat.
En 2003, le Tribunal Fédéral jugea discriminatoires les naturalisations par les urnes. Les refus devront dorénavant être motivés.
Depuis 2006, les émoluments ne peuvent plus couvrir que les
frais administratifs. Ce nouvel article a mis fin à une pratique de
taxes élevées dans certaines communes et poussé les bourgeoisies
– notamment valaisannes – à renoncer aux procédures de naturalisation au profit des administrations publiques.
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En 2013, les chambres fédérales devraient statuer sur une nouvelle
loi sur la nationalité. Celle-ci prévoit que la durée de séjour minimal en Suisse soit ramenée de 12 à 8 ans, dont 3 dans le canton
de domicile. Le candidat à la naturalisation devrait être au bénéfice
d’un permis C au moment du dépôt de la demande. L’examen de
ce projet de loi par les chambres fédérales a durci la proposition :
le délai serait de 10 ans et les années de l’enfance ne compteraient
plus double. Ce délai ramené à 10 ans devrait augmenter le nombre
de « naturalisables » alors que l’obligation du permis C et la fin des
années doubles pour les jeunes le diminuerait. L’un dans l’autre, le
nombre de naturalisations annuelles devrait diminuer.
Statistiques
L’étude de la Confédération éditée en août 2012 porte sur les années allant de 1992 à 2010.
Des données importantes manquent pour renseigner sur les pratiques, notamment le nombre de demandes rejetées, reportées
voire retirées par les personnes concernées elles-mêmes. Seules
sont connues les naturalisations effectives.
Il n’y a pas de statistiques des refus et des abandons de procédures. Les motivations des candidats sont également peu étudiées
et par conséquent peu connues.
Entre 1992 et 2006, la naturalisation a connu une forte hausse,
les taux de naturalisation étant passés de 0,9% à 3,2% de la population étrangère bénéficiant d’un permis B ou C.
En 2006, on a dénombré 46’000 naturalisations. La Suisse est ainsi
sortie du peloton de queue des taux de naturalisation européens
pour se placer dans la moyenne, avec des chiffres supérieurs à ceux
de ses principaux voisins (exception faite de la France).
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Différents facteurs ont conduit à l’accroissement des taux de naturalisation depuis 1992 : l’autorisation de la double nationalité, la
baisse des coûts, l’accroissement de la proportion de ressortissants
hors UE dans les ressortissants d’origine étrangère, l’accroissement
de la « valeur » du passeport suisse pour les ressortissants hors UE
suite à la ratification des accords bilatéraux avec l’UE, le jugement
du Tribunal Fédéral de 2003 obligeant à motiver les refus.
Depuis 2007, le taux de naturalisation a baissé pour atteindre
2,6% en 2010, soit 38’700 personnes.
Cette baisse peut se justifier par un climat politique peu accueillant
suite au rejet de l’initiative de 2004 (naturalisation facilitée pour les
jeunes de la 2ème génération et automatique pour ceux de la 3ème)
et aux résultats positifs de deux initiatives populaires peu encourageantes pour les étrangers : l’initiative contre la construction des
minarets en 2009 et celle pour le renvoi des étrangers criminels en
2010. Bien que le taux standardisé en Valais n’ait pas encore atteint
la moyenne nationale, il a fortement augmenté depuis 2004, depuis
que des émoluments administratifs ont remplacé les taxes bourgeoisiales.
Eléments influents
La naturalisation est plus fréquente parmi les étrangers nés en
Suisse ou arrivés en Suisse pendant la période préscolaire. Le
taux de naturalisation est ainsi le plus élevé à l’adolescence, autour
des 15 ans (7%). Il diminue ensuite autour des 20 ans pour s’accroître à nouveau entre 35 et 50 ans. Ce deuxième pic s’explique par
les migrants arrivés en Suisse en début de vie active.
Certains flux migratoires dont l’origine est un conflit politique sont
suivis d’une naturalisation quasi-systématique (boat people vietnamiens par exemple) alors que les travailleurs européens (Italiens,
Espagnols, Portugais) sont rares à se naturaliser.
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L’attachement au pays d’origine, les possibilités ou non de
retour, l’utilité ou non du passeport suisse pour circuler en
Europe, sont autant de facteurs influençant le choix de la naturalisation.
Parmi les pratiques susceptibles d’influencer positivement la naturalisation figurent les informations données aux étrangers répondant aux critères, la professionnalisation de la procédure et l’introduction de la naturalisation ordinaire facilitée pour les jeunes.
Parmi les facteurs influençant négativement la décision, on peut
citer un faible niveau de formation, une activité professionnelle de
type peu qualifié, le fait d’être au chômage ou au bénéfice d’une
rente invalidité, le fait d’être originaire de la Turquie ou de l’ex-Yougoslavie, d’être de religion musulmane ou de détenir un permis B
au moment de la demande.
Enfin, comme facteurs d’influence importants, figurent la commune et le canton dans lesquels le candidat à la naturalisation
réside. Bien que la procédure soit unifiée au niveau suisse, avec des
conditions minimales communes, chaque canton a sa propre loi,
laquelle encadre la pratique de communes dotées également de
règlements communaux propres. Les candidats à la naturalisation
ne sont donc pas seulement face à 26 régimes différents mais bien
face à une pléthore de pratiques et de procédures différentes.
Rédaction: Aude Joris, février 2013
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