La Sant Jordi, fête du livre et de la rose

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La Sant Jordi, fête du livre et de la rose
La Sant Jordì,
fête du livre & de la rose.
Raymond Matabosch
La Sant Jordì,
fête du livre & de la rose.
I
La Sant Jordì,
fête du livre et de la rose.
La Sant Jordì, fête institutionnelle catalane, se déroule le 23
Avril, jour de la Saint Georges. La tradition veut que, comme une
deuxième Saint Valentin, un livre ou une rose soient offerts à son
courtisan.
Mais les festivités ne se résument pas à un tête-à-tête
amoureux. Ce jour, représente, de manière très symbolique, après de
longs mois d’hiver, l’arrivée du printemps et célèbre la langue et les
us et coutumes catalanes. Et date anniversaire de la mort, en 1616,
de Cervantes, de Shakespeare et d’Inca Garcilaso de la Vega, elle est
devenue, sous l’égide de l’UNESCO, en 1996, la « Journée
Mondiale du Livre » ce dont les Catalans, leur grande fête devenant
universelle, peuvent se sentir légitimement fiers.
Fête de l’esprit mais aussi de tous les sens, après la
bénédiction des roses, le dragon étant mort en son nom, chaque
place de village, les éditeurs, les écrivains et les libraires s'y donnant
rendez-vous, se transforme, lors, en une immense librairie de plein
air. Et réminiscences d'un marché médiéval, les producteurs et
artisans locaux proposent leurs produits régionaux typiques, les
boulangers fabriquent, pour l’occasion, du pain, des gâteaux et des
coques, - fougasses -, et les viticulteurs font couler leur vin.
Et, pour les catalans, la Sant Jordì, « est l'expression de notre
peuple, la journée de la convivialité, du civisme et de la culture ; en
définitive, c’est la manifestation de notre respect pour toutes les
personnes, les peuples et les cultures ».
La tradition et la symbolique du livre et de la rose en
terres catalanes.
La légende de Saint Georges tuant le dragon représente la
victoire du savoir et de la connaissance sur l’obscurantisme. Cette
conquête de la liberté de pensée s’acquiert à travers la langue, la
poésie et la musique. D’où la symbolique du livre. La rose rouge,
quant à elle, n’est rien d’autre que la représentation du sang qui
s’écoule du corps meurtri du dragon. Elle signifie l’espoir placé par
les hommes en un monde meilleur.
Depuis le Moyen-Âge, cette tradition du livre et de la rose a
été perpétuée, surtout en terres catalanes où les rois et le
Gouvernement de Catalogne, la Generalitat de Catalunya, impulsent
la célébration de la fête de Sant Jordì dans tous les Pays catalans. En
1343, à Valence, c'est déjà une fête populaire. En 1407, Majorque la
célèbre publiquement. En 1436, le Gouvernement de la Generalitat
de Catalunya propose au Parlement catalan, les Corts catalanes,
réuni à Montsó, de commémorer officiellement et obligatoirement la
Sant Jordì. Et, en 1456, le Parlement de Catalogne, assemblé en la
Cathédrale de Barcelone, édicte une constitution, comprise dans le
code des Constitutions de Catalogne, ordonnant les festivités.
Le mouvement littéraire de la Renaissance, pendant la
deuxième moitié du XIXe siècle, fait de Sant Jordì le symbole de
l’identité catalane. En 1926, la Chambre des Libraires de Barcelone
crée, le plaçant sous le triple signe de la rose, du livre et du pain, le
Jour du Livre pour le 23 Avril, jour du Saint Pitoubi.
Il est plus difficile de déterminer, avec précision, la date à
laquelle a débuté la tradition populaire catalane d'offrir des roses
pour la Sant Jordì. Des documents attestent la célébration de la Foire
des Roses pour la Sant Jordì dès le XVe siècle. Cette ancienneté
pourrait également indiquer l'existence d'une relation entre cette
tradition populaire et le symbolisme de l’amour courtois représenté
par la rose. Mais, au delà des théories pouvant éventuellement
expliquer la naissance de cette tradition, le plus important est qu'elle
se soit maintenue vive et qu'elle constitue un symbole indiscutable
de la Catalogne.…...............................
II
L’histoire de la Sant Jordì
remonte à la nuit des temps.
Saint patron de la Catalogne, rattaché aux événements des
pays catalans pendant les croisades, sa croix vermeille veillant à la
protection des guerriers sur tous les champs de bataille, Sant Jordì
est devenu le fervent ennemi des forces du mal. Comme le
représente le peintre et graveur allemand, Albrecht Dürer, au XVe
siècle, terrassant le dragon et venant à bout du démon, symbole de
l’obscurantisme, le preux chevalier sacralise l'éclosion des fleurs de
la culture, du savoir et la liberté de pensée.
Côté historique, les données, sur Sant Jordì ou Saint
Georges, militaire romain, et chrétien martyrisé au IVe siècle, sont
ténues. Il est seulement référencé dans certains livres, comme le
palimpseste « Acta Sanctorum », Ve siècle, le « Georgslied », IXe
siècle et, XIIIe siècle, la légende populaire, écrite par Iacopo da
Varazze(1), archevêque de Gênes et chroniqueur italien du Moyen
Âge, dans « la légende dorée », narrant « sa victoire sur le dragon
du sang duquel jaillit un rosier. Il cueillit une rose et l’offrit à sa
princesse. En retour, elle lui offrit un livre comme témoignage de
son amour pour lui. Dès lors tout le peuple se convertit au
christianisme. » …...............................
Vie et biographie de Sant Jordì.
Sant Jordì serait né à Diospolis, en Palestine, vers 270/280,
et serait décédé à Nicomédie, en Bithynie, le 23 Avril 303. Il aurait
été soldat romain converti au christianisme et serait mort en martyr
en refusant de renoncer à sa foi. Devenant l'un des saints les plus
populaires, surtout durant le Moyen-Age, il est vénéré par la plupart
des confessions chrétiennes et par l'Islam. Cependant, son historicité
est contestée et il n'est, probablement, qu'une figure légendaire.
La tradition catholique veut que Georgios de Lydda soit le
fils de Gérontius, officier romain Cappadocien en poste à Diospolis,
aujourd'hui Lod, - en Israël -, et de Polychronia, une palestinienne.
A l'âge de la majorité, suivant les traces de son père, il
embrasse la profession des armes, devient tribun de l’armée
impériale et appartient à la garde personnelle de l'empereur
Dioclétien .
En 303, l'empereur Dioclétien promulgue des édits contre les
chrétiens et leur persécution mais, sa foi ne pouvant être ébranlée,
l'officier Georges refuse d'obtempérer aux ordres. Lors, il est
emprisonné, enchainé et livré à de nombreux supplices. Il subit un
martyre effroyable auquel il survit miraculeusement et finit par être
décapité.
La tradition dit que l'épouse de l'empereur, Alexandra, et
Athanase, un prêtre païen, en voyant l'exemple de Georges, se
convertissent au christianisme, mais, peu après, ils sont tous deux,
de même, martyrisés.
Le corps du persécuté est inhumé à Lydda, - Lod -, en
Palestine où son sépulcre le rend très populaire parmi les croisés
occidentaux et où chrétiens et musulmans croient qu’il se trouve
encore, dans une crypte, sous l’autel. .Sur sa tombe, quelques années
plus tard, sur les conseils d'Eusèbe de Césarée, l'empereur
Constantin fait édifier une église en son honneur.
Sant Jordì est canonisé, par le pape Gelase I, en 494.
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Historicité.
Pour retracer la vie des martyrs et déterminer leur historicité
l'existence d'un « acta matyrum » valide est fondamental : Au sens
strict, les Actes des martyrs sont des procès-verbaux rédigés par les
notaires de la cour. Dans un sens plus large, cependant, le titre est
appliqué à tous les récits de procès des martyrs et de leur mort.
Dans le cas de Saint-Georges ces documents, dressés à une
date postérieure à celle de son martyre, ont été soumis à une
manipulation de rédaction de différents types et leur fondement,
décrire les événements, imprégnés d'un air légendaire et plus ou
moins fiables, est d'ordre littéraire.
Son « Acta Martyrum », est romancé, rédigé autour de
quelques faits conservés dans la tradition populaire ou littéraire et
est bâti sur la base d'œuvres de pure imagination ne contenant pas de
faits réels.
Les premiers écrits rapportent que son père, Gérontius, un
noble persan qui adorait les idoles, vînt d’Arménie en Cappadoce où
naquit Georges, - on dit que ce fut en 270 -. Elles ajoutent que sa
mère, Polychronia, chrétienne à l’insu de son mari, instruisit son fils
des vérités de la religion. Georges, disent-elles encore, fut baptisé
dès sa jeunesse.
Cappadocien noble et riche, ayant grandi en tant que
chrétien, tribun de l’armée impériale, Georges s’emploie à
combattre le culte des idoles, les brisant dans les temples, tuant leurs
prêtres, et vit dans le péché avec une veuve.
Quand l'empereur Dioclétien, afin d'éradiquer le
christianisme qui se propage, rétablit le culte des idoles et oblige
tous les habitants de l'empire romain à se vouer au culte d'Apollon,
Il renie ses engagements militaires, distribue ses richesses et refuse
d'obtempérer aux ordres de l'empereur qui l'exhorte à offrir un
sacrifice aux Dieux.
Face au refus de Georges, Dioclétien le fait cruellement
frapper et ordonne qu’on l’emprisonne dans une geôle obscure et
putride, avec une énorme pierre sur la poitrine. Le lendemain,
Georges est torturé mais un ange le guérit de ses blessures et le
délivre.
Georges revient devant l’Empereur qui offre un sacrifice à
Apollon. A nouveau arrêté, il convertit deux stralétates qui sont
immédiatement condamnés à mort. L’impératrice Alexandra se
déclare chrétienne et se retire du palais.
Georges est jeté dans une fosse remplie de chaux vive. Il s'en
extrait, trois jours après, sain et sauf. Condamné à marcher avec des
chaussures garnies de pointes rougies au feu, il est, à nouveau, guéri
miraculeusement de ses blessures. Une série de supplices, - brûlé,
ébouillanté, broyé sous une roue hérissée d'épées, etc... -, se
succèdent, ensuite, jusqu’à ce que Dioclétien ordonne, le 23 avril
303, sa décapitation. …...............................
Notes.
(1) Jacques de Voragine,- Iacoppo da Varazze, Jacobus da
Varagine -, né à Varazze, vers 1228 et mort à Gênes le 13 Juillet
1298, était un chroniqueur italien du Moyen Âge, archevêque de
Gênes et auteur de la Légende dorée, célèbre ouvrage racontant la
vie d'un grand nombre de saints et saintes, martyrs chrétiens, ayant
subi les persécutions des Romains. Il est aussi l'auteur d'une
Chronique de la cité de Gênes, de plusieurs recueils de sermons, et
de quelques autres opuscules. …...............................
III
Le martyre de Sant Jordì.
Selon certains auteurs, le martyre de Jordì aurait duré sept
jours et, selon certains autres, sept ans. Durant ce laps de temps, sept
jours ou sept ans, il serait mort brûlé, coupé en deux par une roue
hérissée d'épées et empoisonné, et aurait ressuscité trois fois. Les
auteurs rajoutent, aux résurrections, une pléiade de supplices : coups
de marteau, grill rouge, sandales cloutées ou garnies de pointes
rougies au feu., plomb fondu, lit ou fosse de chaux vive, pierres
entreposées sur la tête, colonnes pesant sur son corps, etc... Et
malgré tous ces sévices, Jordì trouvait assez de forces pour
accomplir des miracles. Finalement, avant même d'avoir eu le temps
de voir ses bourreaux être dévorés par un feu céleste, il mourut
décapité.
A chaque nouvel écrit publié, - il figurait dans le
martyrologe occidental de Saint Jérôme bien avant qu'en Orient et
en Grèce il ne fut appelé « megalomartyros », ou le grand martyr,
que fussent écrits ses Actes, par Pasicrares, au VIe siècle et qu'il ne
devint un personnage mythique dans la Légende dorée de Jacques
de Voragine datant du XIIIe siècle -, la passion de Sant Jordì
s'amplifiait en invraisemblances.
Son martyre serait advenu à la fin du IIIe siècle ou au début
du IVe siècle à Diospolis, qui prit nom de Georgiopolis et,
maintenant, Lod, près de Tel-Aviv. Il se serait produisit, pour
certains, sous Datien, empereur des Perses, ou Dacianus, - Dacien -,
proconsul romain, représentant, dans la péninsule Ibérique et en
Aquitaine, les empereurs Dioclétien et Maximien, au début du IVe
siècle. et pour d'autres, sous Gaius Aurelius Valerius Diocletianus
Augustus, - Dioclétien -, empereur romain, et Marcus Aurelius
Valerius Maximianus Herculius, - Maximien -, empereur romain
adjoint.
Pour les uns, Datien convoqua septante-deux rois pour
décider des mesures à prendre contre les Chrétiens et des supplices à
leur infliger …...............................