Texte court_Radiothérapie_ Névralgie du trijumeau_Tome V

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Texte court_Radiothérapie_ Névralgie du trijumeau_Tome V
TEXTE COURT DU RAPPORT D’ÉVALUATION TECHNOLOGIQUE
PLACE DE L’IRRADIATION INTRACRÂNIENNE EN CONDITIONS STÉRÉOTAXIQUES
(RADIOCHIRURGIE ET RADIOTHÉRAPIE STÉRÉOTAXIQUE)
DANS LE TRAITEMENT DE PATHOLOGIES NON CANCÉREUSES
TOME V
: LA NÉVRALGIE DU TRIJUMEAU
Novembre 2011
Service évaluation des actes professionnels
Service évaluation économique et santé publique
Irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques : la névralgie du trijumeau – Texte court du Tome V
L’argumentaire scientifique de cette évaluation
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Ce texte court a été validé par le Collège de la Haute Autorité de Santé en novembre 2011.
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Irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques : la névralgie du trijumeau – Texte court du Tome IV
ÉQUIPE
Pour la partie clinique, le texte court a été réalisé par Mme Nadia ZEGHARI-SQUALLI, chef de
projet au Service évaluation des actes professionnels, sous la responsabilité de M. Denis-Jean
DAVID, adjoint au chef de service, et de Mme Sun-Hae LEE-ROBIN, chef de service.
Pour la partie médico-économique, le texte court a été réalisé par Mme Anne-Isabelle POULLIE,
économiste de la santé, chef de projet au Service évaluation économique et santé publique,
sous la responsabilité de M. Olivier SCEMAMA, adjoint au chef de service et de Mme Catherine
RUMEAU-PICHON, chef de service.
Une partie de l’évaluation concernant l’analyse des données publiées et l’enquête de pratiques a
été réalisée avec la contribution des prestataires externes : pour la littérature scientifique et
médicale, Mme Agnès CHARLEMAGNE de la société CEMKA-EVAL et pour la partie
économique, M. Stève BENARD de la société ST[È]VE CONSULTANTS.
La recherche documentaire a été effectuée par M. Philippe CANET, documentaliste, avec l’aide
de Mme Sylvie LASCOLS, sous la responsabilité de Mme Christine DEVAUD, adjointe au chef de
service, et de Mme Frédérique PAGES, chef de service.
L’organisation des réunions et le travail de secrétariat ont été réalisés par Mme Stéphanie
BANKOUSSOU et Mme Sabrina MISSOUR.
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Irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques : la névralgie du trijumeau – Texte court du Tome IV
TABLE DES MATIÈRES
ÉQUIPE ...................................................................................................................................3
TEXTE COURT DU RAPPORT D’EVALUATION « PLACE DE L’IRRADIATION
INTRACRANINNE EN CONDITIONS STEREOTAXIQUES (RADIOCHIRURGIE ET
RADIOTHERAPIE STEREOTAXIQUE) DANS LE TRAITEMENT DE PATHOLOGIES NON
CANCEREUSES – TOME V : LA NÉVRALGIE DU TRIJUMEAU » ........................................5
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Irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques : la névralgie du trijumeau – Texte court du Tome IV
TEXTE COURT DU RAPPORT D’ÉVALUATION « PLACE DE
L’IRRADIATION
INTRACRÂNIENNE
EN
CONDITIONS
STÉRÉOTAXIQUES (RADIOCHIRURGIE ET RADIOTHÉRAPIE
STÉRÉOTAXIQUE) DANS LE TRAITEMENT DE PATHOLOGIES NON
CANCÉREUSES – TOME V : LA NÉVRALGIE DU TRIJUMEAU »
INTRODUCTION
Irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques
L’irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques (IICS) comprend : la radiochirurgie
stéréotaxique (RC), qui consiste à délivrer une dose élevée en une session unique et la
radiothérapie stéréotaxique intracrânienne fractionnée (RTSIF), qui consiste à délivrer une dose
totale fractionnée sur plusieurs séances d’irradiations en doses réduites.
Les principaux types d’appareils utilisés pour l’irradiation intracrânienne en conditions
stéréotaxiques se différencient principalement par leurs sources de rayonnement, photon X ou
photons gamma.
Leksell Gamma Knife (GK) : est un système dédié à la radiochirurgie stéréotaxique : il utilise des
photons gamma émis par de multiples sources de rayonnement du cobalt 60, et dont les
faisceaux convergent vers un foyer unique.
Les accélérateurs linéaires : émettent des photons X, ils peuvent être utilisés pour l’IICS et pour
la radiothérapie conventionnelle. Pour l’IICS les différents types d’accélérateurs linéaires qui
peuvent être utilisés sont :
- l’accélérateur linéaire adapté ;
- l’accélérateur linéaire dédié ;
- le CyberKnife.
Demande et champ d’évaluation
L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), suite à divers accidents d’exposition de patients à des
doses excessives de rayonnements, a saisi la HAS afin d’évaluer l’efficacité et la sécurité des
deux modalités de traitements (radiochirurgie et RTSIF) ainsi que celles des différentes
techniques d’irradiation, photons X ou photons gamma, dans les indications non cancéreuses.
Concernant la description des pratiques en France, les données sont issues de l’analyse des
données de la base PMSI et de l’enquête exhaustive réalisée par la HAS. Peu de patients sont
traités par IICS pour des pathologies intracrâniennes non cancéreuses (1 516 patients en tout
pour l’année 2009), et seuls quelques centres regroupent la quasi-totalité des traitements. Les
méningiomes, les adénomes hypophysaires, les schwannomes vestibulaires, les malformations
artério-veineuses cérébrales (MAVc) et les névralgies du trijumeau représentent 90,6 % de ces
pathologies.
Selon la pathologie, la proportion de patients traités par IICS (radiochirurgie et RTSIF
confondues) est variable : elle est de 0,94 % pour l’adénome hypophysaire, de 6,80 % pour le
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Irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques : la névralgie du trijumeau – Texte court du Tome IV
méningiome, de 9,34 % pour la névralgie du trijumeau, de 17,4 % pour les MAV et de 30,50 %
pour le schwannome vestibulaire.
Les principales indications non cancéreuses retenues dans le cadre de cette évaluation
sont donc :
- les méningiomes ;
- les malformations artério-veineuses ;
- les schwannomes vestibulaires ;
- les adénomes hypophysaires ;
- les névralgies trigéminales.
Chacune de ces indications fait l’objet d’un rapport d’évaluation spécifique. Le présent document
est consacré à la névralgie du trijumeau.
Dans ce contexte pathologique qui fait appel à la neurochirurgie fonctionnelle, la seule modalité
d’irradiation admise est la radiochirurgie, la radiothérapie stéréotaxique fractionnée ne sera par
conséquent pas traitée dans ce rapport.
Névralgie du trijumeau
La névralgie du trijumeau se caractérise par une douleur intense, brutale, à type de broiement
ou de décharge électrique, qui évolue par salves qui durent de quelques secondes à quelques
minutes. Cette douleur se situe dans le territoire du nerf trijumeau (5e nerf crânien). Le territoire
douloureux est fonction de la branche sensitive du nerf qui est atteinte :
- maxillaire supérieur pour la branche moyenne ou nerf maxillaire (cas le plus fréquent) ;
- maxillaire inférieur pour la branche mandibulaire ;
- périorbitaire pour la branche ophtalmique.
Dans de nombreux cas, il existe des zones gâchettes, c'est-à-dire des zones dont la stimulation
va déclencher la crise (mastication, rasage en particulier).
Les névralgies du trijumeau sont classées en deux groupes :
-
essentielles ou idiopathiques : caractérisées par l’absence de signes neurologiques
associés, les examens de neuro-imagerie ne permettent d’identifier une cause que dans au
plus 15 % des cas ;
-
secondaires : qui accompagnent une maladie ou une lésion sous-jacente (tumeur, sclérose
en plaque, traumatisme ou postinfectieuses (zona, syphilis), et qui représentent environ
20 % des cas des névralgies du trijumeau.
La névralgie du trijumeau est plus fréquente chez la femme (3 femmes pour 2 hommes), et
son incidence augmente avec l’âge, avec une moyenne d’âge de survenue dans la sixième
décade.
Suivant les publications, l’incidence rapportée de la névralgie du trijumeau varie entre 5 et 27
pour 100 000 habitants et par an. Une enquête, conduite au sein d’une base de données de
médecine générale aux Pays-Bas, entre 1996 et 2006, retrouve une incidence de la névralgie
du trijumeau de 12,6 pour 100 000 personnes-années et une augmentation avec l’âge de 6,8
pour 100 000 personnes-années entre 18 et 29 ans et de 30,6 pour 100 000 personnesannées au-delà de 80 ans.
La maladie a un impact fort sur la qualité de vie des personnes atteintes.
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La névralgie essentielle du trijumeau n’est en général ni sensible aux traitements antalgiques
usuels, ni à la morphine. Le traitement médical de référence est un antiépileptique : la
carbamazépine ou d’autres antiépileptiques.
En cas d’intolérance, d’effets secondaires ou de manque d’efficacité des antiépileptiques, le
traitement peut faire appel à certains neuroleptiques tels que lévopromazine ou halopéridol,
ou certains anxiolytiques ou antidépresseurs (clomipramine ou amitryptiline).
Dans les névralgies secondaires, l’efficacité des traitements médicaux n’est pas démontrée.
Le traitement neurochirurgical des névralgies du trijumeau fait appel à plusieurs techniques :
- les méthodes percutanées ;
thermolésion percutanée du nerf trijumeau,
injection de glycérol dans la citerne trigéminale,
microcompression par ballonnet du ganglion de Gasser ;
- l’abord chirurgical conventionnel direct, qui consiste principalement en la décompression
vasculaire microchirurgicale (intervention de Jannetta), agissant sur le conflit vasculonerveux au niveau de l’émergence du nerf trijumeau dans l’angle ponto-cérébelleux ;
- la radiochirurgie.
Ces trois techniques ont fait la preuve de leur efficacité, avec des durées d’efficacité plus ou
moins longues selon la technique. Il semblerait qu’une plus longue durée d’efficacité soit
obtenue avec les techniques de décompression vasculaire microchirurgicale par rapport aux
autres techniques.
Objectifs de l’évaluation
1 - Évaluer les bénéfices de la radiochirurgie dans le traitement de la névralgie du trijumeau
selon les principaux critères de jugements suivants : le contrôle de la douleur et la qualité de
vie.
2 - Évaluer les risques en termes d’incidence des effets indésirables post-traitement.
3 - Comparer la balance bénéfice-risques si les données le permettent, entre :
- la radiochirurgie et les traitements conventionnels de référence ;
- les différents appareils de radiochirurgie (Gamma Knife, accélérateurs linéaires, CyberKnife).
MÉTHODE D’ÉVALUATION
La méthode utilisée pour ce rapport d’évaluation s’est appuyée sur l’analyse critique des
données de la littérature scientifique et sur la position de professionnels réunis dans un groupe
de travail.
Analyse de la littérature
L’analyse critique de la littérature a été réalisée à partir d’une recherche documentaire en langue
française et anglaise, effectuée par interrogation systématique des bases de données
bibliographiques médicales et scientifiques (période de recherche : janvier 2005–mars 2011).
Pour l’évaluation de l’efficacité et la sécurité de la radiochirurgie dans le traitement de la
névralgie du trijumeau, 41 articles ont été sélectionnés, dont la majorité correspond à des séries
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de patients traités par Gamma Knife (32 articles), 3 études décrivent des séries traitées par
accélérateur linéaire et 6 études des séries traitées par CyberKnife.
Concernant la comparaison de la radiochirurgie aux autres méthodes chirurgicales invasives,
9 articles, dont 5 comparent la radiochirurgie par Gamma Knife à la technique de
décompression vasculaire microchirurgicale, une étude compare la radiochirurgie par Gamma
Knife à l’injection rétrogassérienne de glycérol par voie percutanée et 3 études comparent la
radiochirurgie à plus de deux techniques à la fois.
Sur le plan méthodologique, les études qui évaluent l’efficacité et la sécurité comprennent
4 études prospectives et 37 études rétrospectives qui sont en majorité descriptives, portant sur
des séries monocentriques non contrôlées. Elles présentent dans leur ensemble des limites
méthodologiques qui ne permettent pas de conclure avec un niveau de preuve élevé. Les
études sont très hétérogènes, notamment en ce qui concerne des populations étudiées, la cible
irradiée, la dose d’irradiation, la méthode d’évaluation et des scores utilisés, du mode d’analyse
des perdus de vue et de la durée de suivi des patients.
Les études qui comparent les différentes techniques de traitement le font soit sur des données
observationnelles rétrospectives, soit sur des séries prospectives non randomisées, présentant
des biais de sélection en termes de différence : d’âge, d’état de santé, de durée de suivi entre
les groupes, d’effectifs. Toutes ces séries comparatives sont de faible niveau de preuves.
Consultation des professions et spécialités concernées
La position des professionnels de santé a été recueillie au sein d’un groupe travail, constitué à
partir d’une liste d’experts fournie par les différents organismes représentatifs des
professionnels. La synthèse des données de la littérature a été présentée et discutée lors de la
réunion du groupe de travail constitué de 17 experts. L’avis des experts a été recueilli et reporté
dans le document final, après validation de tous les membres présents.
ANALYSE DE LA LITTÉRATURE
L’analyse des données de la littérature montre que l'âge médian des patients se situe entre
52 et 75 ans. Selon les études, l’antériorité de la maladie est comprise entre 5 et 10 ans en
moyenne ou en médiane. Les patients sont tous en échec d’un traitement médical préalable. La
radiochirurgie est réalisée soit après échec du traitement médical, soit après échec d’un
traitement chirurgical ou percutané, le taux de patients avec chirurgie antérieure dans les études
varie de 22 à 60 %. La durée moyenne ou médiane de suivi des patients varie de 12 à 76 mois.
L’efficacité du traitement est évaluée principalement sur le critère de contrôle de la douleur qui
est défini par « un soulagement de la douleur sans nécessité de traitement médicamenteux
antalgique ». Il est le plus souvent exprimé de manière qualitative (contrôle excellent ou
rémission complète, contrôle bon ou rémission partielle). Les résultats présentés dans les
études sont exprimés en termes de pourcentage de patients ayant répondu au traitement.
La qualité de vie est très peu évaluée, seules 3 études rapportent des données de qualité de
vie, en général l’outil utilisé pour évaluer ce critère est le SF-36 ; une étude française utilise pour
évaluer la qualité de vie un outil plus spécifique de l’épilepsie, « the Epilepsy surgery
inventory ».
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Efficacité de la radiochirurgie
Radiochirurgie par Gamma Knife
Dans les études analysées, les doses médianes ou moyennes utilisées pour le traitement par
Gamma Knife varient de 80 à 90 Gy.
Les taux de rémission complète (ou réponse excellente) sont obtenus chez 32 à 92 % des
patients, selon les études et les taux de contrôle bon ou partiel chez de 50 à 97 % des patients.
Le soulagement de la douleur est en général rapide. Il est acquis dans un délai de 6 jours à
6 mois, mais son taux semble en revanche diminuer dans le temps. Le taux de rechutes décrit
dans les études varie de 5 à 52 %, avec un délai médian se situant entre 6 et 48 mois.
À l’analyse des études, les facteurs qui semblent influencer les résultats en termes de contrôle
de la douleur sont en premier lieu le type de névralgie. Les névralgies trigéminales typiques
répondent généralement mieux au traitement radiochirurgical que les névralgies atypiques ou la
névralgie du trijumeau qui s’inscrit dans le cadre d’une sclérose en plaque.
Plusieurs études montrent également un meilleur contrôle de la douleur avec la radiochirurgie
lorsqu’il n’y a pas eu de traitement chirurgical préalable.
Suivant les études, l’effet de la dose sur l’efficacité ne semble pas être clairement établi. Selon
certains auteurs, plusieurs facteurs peuvent être à l’origine d’un succès thérapeutique : une
dose élevée au niveau de la cible rétrogassérienne (80 à 90 Gy), une dose faible (< 15 Gy) au
niveau du tronc, un petit volume de traitement du nerf ipsilatéral, une petite distance entre le
milieu de l’isocentre et l’émergence anatomique du nerf.
En ce qui concerne les résultats en termes de qualité de vie, ils sont rapportés uniquement dans
quatre études qui montrent toutes des améliorations significatives sur la majorité des critères
(douleur, santé globale, vitalité, fonctionnement social, fonctionnement émotionnel, santé
mentale).
Radiochirurgie par Gamma Knife en deux sessions
Les résultats d’efficacité de la radiochirurgie par Gamma Knife en deux sessions sont rapportés
dans quatre études. Les données montrent que la deuxième session est réalisée généralement
après un délai médian de 17 à 19 mois, en particulier chez des patients ayant eu des résultats
insuffisants ou une rechute après une première session de Gamma Knife. Les doses
d’irradiation utilisées sont plus faibles lors de la deuxième session, de manière à ne pas
dépasser un maximum de 150 Gy en dose totale d’irradiation.
Les études montrent qu’il est possible d’avoir une efficacité supplémentaire avec la deuxième
session, mais les chiffres de rémission complète obtenue ne dépassent pas 40 %.
Radiochirurgie par CyberKnife
Dans les études de radiochirurgie par CyberKnife, le traitement est réalisé avec une dose
maximale médiane variant de 73,5 à 78 Gy, avec des longueurs de nerf traitées de 3 à 8 mm.
L’efficacité est rapportée pour les névralgies essentielles dans 3 études, le taux de contrôle
excellent est de 67 à 90 %, chez des patients ayant ou non reçu un traitement chirurgical.
Deux études rapportent les résultats d’efficacité obtenus chez des patients traités par
radiochirurgie n’ayant pas eu de chirurgie préalable, le taux de contrôle excellent est de 27 et
88 % respectivement. Le faible taux de contrôle de la douleur rapportée par l’une des études
(27 %) s’explique par une période de suivi médiane des patients plus longue (23 mois vs 6 mois
pour l’autre étude), ce qui souligne la perte d’efficacité dans le temps,
L’efficacité est obtenue en quelques jours à quelques mois (4 à 6 mois). Le taux de rechutes
varie de 15 à 33 % avec un délai qui varie de 4 à 9 mois.
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Concernant les facteurs qui semblent influencer l’efficacité, une seule étude rapporte de
meilleurs résultats chez les patients qui ont un angle d’émergence du nerf du trijumeau à partir
du tronc cérébral compris entre 150 et 170 degrés par rapport à l’horizontale.
Il n’a pas été démontré de différence d’efficacité en fonction de la dose maximum, ni de la dose
marginale, ni de la longueur de nerf traité.
Il n’y a pas de données de qualité de vie décrites dans les études de radiochirurgie par
CyberKnife.
Radiochirurgie par accélérateur linéaire
L’efficacité de la radiochirurgie par accélérateur linéaire est rapportée dans 3 études qui utilisent
toutes des outils de mesure différents pour évaluer la douleur, les résultats sont exprimés en
termes de contrôle de la douleur. Un contrôle excellent ou complet est obtenu chez 49 à 67 %
des patients. L’efficacité est atteinte dans un délai médian d’environ 1 mois (rapporté dans 2
études). Le taux de rechutes varie entre 16 et 46 % et une seule étude présente un délai médian
de rechute qui est de 12 mois.
Une seule étude retrouve, en analyse univariée et multivariée, la sensibilité au traitement
anticonvulsivant comme facteur associé au succès du traitement.
Il n’y a pas de données de qualité de vie décrites dans les études de radiochirurgie par
accélérateur linéaire.
Sécurité et complications
Dans les séries sur la radiochirurgie par Gamma Knife ou par Cyberknife, la principale
complication rapportée est l’engourdissement facial, avec une fréquence qui varie de 43 à 76 %,
suivant les séries analysées. Il est décrit en général comme léger à modéré ou non gênant
(dans près de ¾ des cas), et apparaît le plus souvent chez des patients chez qui un contrôle de
la douleur a été obtenu.
Dans les études sur la radiochirurgie par accélérateur linéaire, l’engourdissement facial n’est
pas mentionné.
D’autres complications telles les des dysesthésies, hypoesthésies ou hyperesthésies, qui
peuvent être notifiées indépendamment de l’engourdissement facial, sont répertoriées dans les
études. Elles apparaissent avec une fréquence qui varie de 4 à 49 % avec le Gamma Knife, de
2 à 27 % avec le Cyberknife et de 8,5 à 66 % dans les séries de radiochirurgie par accélérateur
linéaire.
Dans la majorité des études, le degré de sévérité de même que le caractère transitoire ou
permanent des complications ne sont pas renseignés.
Dans les séries de radiochirurgie par Gamma Knife, plusieurs études montrent qu’une dose
d’irradiation élevée et/ou l’utilisation de plusieurs isocentres augmenteraient le taux de
complications, sauf une seule étude qui ne retrouve pas d’augmentation des complications avec
des doses supérieurs à 85 Gy. Deux études rapportent que l’utilisation de méthodes de ciblages
spécifiques ou de plugs permet de diminuer le taux de complications.
Avec le CyberKnife, une équipe a montré que des doses élevées au niveau du tronc cérébral
sont associées à un risque plus élevé d’anesthésie faciale (p = 0,01), une autre rapporte un lien
entre la survenue d’un engourdissement, la longueur du segment de nerf traité et la dose reçue,
une troisième rapporte une fréquence d’engourdissement plus importante quand la longueur de
nerf traité augmente.
En ce qui concerne le risque de cancer radio-induit après radiochirurgie, à l’analyse de
l’ensemble des séries (28 séries Gamma Knife, 3 séries Linac et 6 séries CyberKnife), aucune
cancérisation secondaire n’est relevée et aucune tumeur radio-induite n’est décrite, quelle que
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soit la technique. Il est cependant important de noter que très peu d’études portent sur des
suivis suffisamment longs pour pouvoir voir apparaître ce type de tumeur.
Comparaison des traitements
Il n’a été identifié dans la littérature aucune étude qui compare les différents appareils de
radiochirurgie (Gamma Knife, accélérateurs linéaires et CyberKnife).
Radiochirurgie versus décompression vasculaire microchirurgicale
Quatre études prospectives de faible niveau de preuves comparent la radiochirurgie par Gamma
Knife à la décompression microvasculaire. Les résultats semblent être meilleurs avec la
décompression microvasculaire, le contrôle initial étant obtenu chez de 58 % à 77 % des
patients avec la radiochirurgie, et chez 68 % à 100 % des patients avec la chirurgie. Cependant,
plus de complications sont enregistrés chez les patients traités par décompression
microvasculaire (fuite de LCR, infection, complications générales), en comparaison à la
radiochirurgie pour laquelle la complication principale est l’engourdissement facial, le plus
souvent peu gênant.
Radiochirurgie versus injection rétrogassérienne de glycérol par voie percutanée
Une seule étude rétrospective non comparative, compare le traitement par radiochirurgie à
l’injection rétrogassérienne de glycérol par voie percutanée. Le taux de contrôle de la douleur
rapporté pour la radiochirurgie est de 92 % au terme d’un suivi moyen de 29 mois, contre 86 %
avec l’injection rétrogassérienne de glycérol au terme d’un suivi moyen de 34 mois (différence
non significative). Le taux de rechutes est respectivement de 41 % et 53 % pour la radiochirurgie
et l’injection rétrogassérienne de glycérol, mais le soulagement de la douleur est moins rapide
pour la radiochirurgie, 3 semaines contre 24 heures pour l’injection rétrogassérienne de glycérol.
Comparaisons de plus de deux techniques
Une seule étude compare la radiochirurgie à toutes les autres techniques (la thermocoagulation,
l’injection percutanée de glycérol et la décompression microvasculaire), sur la base d’une série
rétrospective de 800 patients suivis sur une période de 1 à 32 ans et d’une revue de la littérature
non exhaustive et avec une méthodologie non précisée. Cette étude conclut qu’en termes de
soulagement, la radiochirurgie est moins efficace que les autres techniques, mais que son
avantage principal est le plus faible concernant le taux d’événements indésirables.
Place de l’IICS dans la stratégie thérapeutique
Concernant la définition de la place de la radiochirurgie dans la stratégie thérapeutique, aucune
donnée bibliographie ne permet actuellement de préciser clairement la place de la radiochirurgie
stéréotaxique dans le traitement de la névralgie du trijumeau. Ce traitement devant toujours être
décidé de manière pluridisciplinaire avec une analyse du bénéfice attendu et des risques des
différentes options thérapeutiques.
En 2009, sur la base d’avis d’experts et sur une analyse d’une littérature de faible niveau de
preuves, l’International Radiosurgery Association (IRSA) a émis un consensus d’experts sur la
pratique de la radiochirurgie dans le traitement de la névralgie du trijumeau typique, les
principales recommandations sont les suivantes :
- les patients, présentant une névralgie du trijumeau typique chez qui un traitement
médicamenteux adéquat n’a pas permis une amélioration, peuvent se voir proposer un
traitement par radiochirurgie ; en particulier les patients âgés ou les patients qui présentent
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des comorbidités ou des risques d’effets secondaires avec des traitements utilisant des
méthodes percutanées ;
- la dose optimale doit être comprise en 75 et 90 Gy ;
- cette dose est la même pour les patients traités après échec d’un autre traitement
chirurgical ;
- Il n’y a pas d’élément permettant de définir un intervalle de temps de sécurité entre
l’intervention chirurgical et la radiochirurgie ;
- après radiochirurgie, un bilan de la douleur doit être effectué à 3 mois, à six mois, puis tous
les ans ;
- en cas de rechute ou d’efficacité partielle après radiochirurgie, une seconde séance avec une
dose comprise en 50 et 70 Gy peut être administrée après un intervalle de sécurité de
6 mois.
La Société de neurochirurgie de langue française a par ailleurs édité, en 2009, un arbre
décisionnel pour le traitement neurochirurgical de la névralgie du trijumeau. Il définit, sur la base
d’un consensus d’experts, les différents critères auxquels doit obéir la décision de traitement :
-
le caractère essentiel de la névralgie ;
-
l’échec du traitement médicamenteux bien conduit et/ou intolérance à celui-ci.
Dans les centres pouvant avoir recours aux différentes variétés de techniques chirurgicales, le
consensus selon les situations cliniques est généralement le suivant :
- privilégier chez le patient en bon état général, en première option, la décompression
vasculaire microchirurgicale ;
- si la décompression vasculaire microchirurgicale ne paraît pas souhaitable ou si elle n’est pas
investie favorablement par le patient, une méthode d’interruption percutanée ou la
radiochirurgie peuvent être indiquée ;
- Si le patient est âgé et/ou en état général précaire, ou chez lequel la névralgie du trijumeau
est secondaire à une maladie démyélinisante, une méthode percutanée est préférable. La
radiochirurgie peut être une alternative aux méthodes percutanées.
Conclusion de l’analyse de la littérature
L’évaluation de l’efficacité et de la sécurité de la radiochirurgie, toutes techniques confondues
(Gamma Knife, Linac et CyberKnife) dans le traitement des névralgies du trijumeau, repose sur
41 études (4 338 patients), dont 4 séries prospectives et 37 séries rétrospectives. Il s’agit de
séries monocentriques avec des multiples facteurs d’hétérogénéité, notamment en ce qui
concerne les caractéristiques des patients, la modalité et la durée de suivi, les échelles de
mesure de la douleur. La majorité des études présentent par ailleurs des biais méthodologiques
qui ne permettent pas de conclure avec un niveau de preuves élevé.
Le critère d’efficacité est le contrôle de la douleur, il est évalué pour chaque patient par rapport à
la douleur avant traitement. Le contrôle de la douleur est le plus souvent défini de manière
qualitative (contrôle excellent ou rémission complète, contrôle bon ou rémission partielle. Les
outils (échelles) de mesure de la douleur sont différents d’une étude à l’autre.
Les résultats, présentés dans les études sont exprimés, en termes de pourcentage de patients
ayant répondu au traitement.
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La radiochirurgie par Gamma Knife est la technique la plus documentée avec 28 études (3 815
patients), la radiochirurgie par CyberKnife est décrite dans 6 études (251 patients) et la
radiochirurgie par Linac dans 3 études (147 patients).
En général, et toutes techniques de radiochirurgie confondues, l’efficacité observée varie entre
50 et 97 % de contrôle bon ou excellent, avec des différences entre les études en fonction du
recul et des caractéristiques initiales des patients, notamment leurs antécédents de chirurgie.
Pour une durée de suivi moyenne comprise entre 12 et 76 mois dans les études analysées, on
obtient avec le Gamma Knife un pourcentage de patients présentant un contrôle excellent ou
une rémission complète compris entre de 32 et 92 % ; avec le Cyberknife, il varie de 67 à 90 %
et avec le Linac de 49 à 67 %. Quelle que soit la technique, l’efficacité n’est pas immédiate,
l’obtention d’un soulagement survient dans un délai médian compris entre 6 jours et 6 mois. Le
soulagement n’est pas durable dans le temps, et le taux de rechutes enregistré varie de 5 à
75 %, avec des délais médians qui varient de 4 à 48 mois. Les taux et les délais médians de
rechute sont mal connus, car dépendants de la durée de suivi des patients dans les études.
Les facteurs prédictifs de réponse restent mal évalués : l’efficacité augmente avec la dose, mais
un compromis doit être trouvé pour ne pas augmenter le risque des complications. La technique
de ciblage devrait être adaptée afin de respecter une dose élevée au niveau du plexus
triangulaire (80 à 90 Gy) et des doses faibles au niveau du tronc cérébral (< 80 Gy).
Certains auteurs observent une meilleure efficacité dans les névralgies trigéminales typiques et
une moins bonne dans les névralgies atypiques ou secondaires à une sclérose en plaque.
D’autres rapportent une meilleure efficacité en l’absence de traitement chirurgical préalable.
Les données en termes de qualité de vie sont très peu rapportées dans les études, seules
3 études décrivent des améliorations significatives sur la majorité des critères (douleur, santé
globale, vitalité, fonctionnement social, fonctionnement émotionnel, santé mentale).
L’événement indésirable le plus fréquent est l’apparition ou l’aggravation d’un engourdissement
facial, dont la fréquence atteint 46 à 76 %, mais il est le plus souvent non gênant. Selon
certaines études, cet effet s’observe le plus souvent lorsque le traitement est efficace. D’autres
études montrent un risque d’apparition de paresthésies et dysesthésies dans 4 à 66 % des cas.
La fréquence de ces complications augmente avec les doses fournies et dépend également des
techniques de ciblage, mais la littérature sur ce sujet est encore peu abondante et, dans la
majorité des études, le degré de sévérité de même que le caractère transitoire ou permanent
des complications ne sont pas renseignés.
Aucun cas de cancer radio-induit n’est décrit dans la littérature. Il est cependant important de
noter que très peu d’études portent sur des suivis suffisamment longs pour pouvoir voir
apparaître ce type de tumeur.
Concernant la comparaison des techniques de radiochirurgie, aucune étude n’a été identifiée
dans la littérature comparant l’efficacité et la sécurité du Gamma Knife, du CyberKnife et du
Linac.
Il n’existe par ailleurs aucune étude randomisée qui compare de façon rigoureuse les différents
traitements de la névralgie du trijumeau. Les quelques études identifiées dans la littérature
(radiochirurgie vs décompression microvasculaire et radiochirurgie vs injection rétrogassérienne
de glycérol par voie percutanée) sont de bas niveau de preuve ; elles comparent les techniques
sur des données observationnelles rétrospectives. Il est par conséquent impossible de conclure
quant à l’équivalence ou à la supériorité d’une modalité de traitement par rapport à une autre
avec les éléments actuellement disponibles.
Concernant la définition de la place de la radiochirurgie dans la stratégie thérapeutique, aucune
donnée bibliographie ne permet actuellement de préciser clairement la place de la radiochirurgie
stéréotaxique dans le traitement de la névralgie du trijumeau. Ce traitement devant toujours être
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Irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques : la névralgie du trijumeau – Texte court du Tome IV
décidé de manière pluridisciplinaire, avec une analyse du bénéfice attendu et des risques des
différentes options thérapeutiques.
Sur la base de l’analyse des documents édités par l’IRSA et par la Société de neurochirurgie de
langue française, tous les deux reposant essentiellement sur avis d’experts, il est néanmoins
possible de dégager des points communs concernant la décision de traitement interventionnel
de la névralgie du trijumeau. Ces points peuvent se résumer comme suit :
- le caractère essentiel de la névralgie du trijumeau de même que l’échec d’un traitement
médicamenteux adéquat doivent être avérés avant tout traitement neurochirurgical ;
- si le patient est jeune et en bon état général, il faut privilégier en première option la
décompression vasculaire microchirurgicale ;
- si le patient est âgé, ou qu’il présente des comorbidités, ou des risques d’effets secondaires
avec les méthodes de traitement percutanés, la radiochirurgie peut être indiquée.
SYNTHÈSE DE LA POSITION DES PROFESSIONNELS
Le groupe d’experts rappelle que la névralgie du trijumeau est une indication qui relève de la
neurochirurgie fonctionnelle et qui requiert un savoir-faire des équipes, particulièrement
important dans le choix des techniques de traitement et dans les résultats d’efficacité attendus.
Les experts recommandent d'établir une distinction claire entre la névralgie trigéminale
essentielle et la névralgie trigéminale secondaire à de nombreuses étiologies. Cette distinction
diagnostique doit être établie sur des critères séméiologiques indiscutables, notamment liés aux
caractéristiques de la douleur et à l'existence de signes associés (paresthésie, dysesthésie,
hypoesthésie, allodynie, hyperalgésie, etc.).
Une distinction claire doit notamment être établie entre une douleur de type névralgique pouvant
éventuellement justifier un geste de neurochirurgie fonctionnelle (décompression vasculaire
microchirurgicale, thermolésion percutanée du nerf trijumeau, microcompression par ballonnet
du ganglion de Gasser, radiochirurgie stéréotaxique [Gamma Knife ou Linac]) et une
neuropathie trigéminale, signifiant une lésion du nerf trijumeau (post-thermolésion, posttraumatique, postopératoire, post-zostérienne, postAVC, etc.), pour laquelle le recours à l'un des
gestes précédents ne se conçoit absolument pas.
Critères de jugement de l’efficacité
L’objectif du traitement dans la névralgie du trijumeau est de vivre « sans médicaments et sans
douleur ». Selon les experts du GT, la mesure du contrôle de la douleur n’est pas évidente. La
Barrow Neurological pain Scale apparaît comme un bon outil.
Selon les experts, l’évaluation de la qualité de vie est intéressante, mais ils soulignent que
l’amélioration de la qualité de vie peut être autant liée à l’efficacité du traitement chirurgical ou
radiochirurgical qu’à l’arrêt des traitements médicamenteux, souvent très mal supportés.
Il existe aujourd’hui des échelles spécifiquement élaborées pour l’évaluation de la qualité de vie
chez les patients douloureux.
Efficacité de la radiochirurgie
De consensus général, le gold standard est la décompression vasculaire microchirurgicale, la
radiochirurgie est actuellement complètement acceptée en France comme traitement
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interventionnel pour la névralgie du trijumeau. Elle fait partie, avec la décompression vasculaire
microchirurgicale, des deux gestes réalisés en priorité dans cette indication.
L’un des points faibles de la radiochirurgie, selon les experts, est l’obtention d’un effet antalgique
différé sur une période moyenne de 6 semaines à 2 mois. En revanche, l'un de ses avantages
essentiels est l’obtention d’un effet antalgique sans créer de perturbation évidente des
sensibilités élémentaires, ce qui réduit ainsi de façon majeure le risque de créer une
désafférentation sensitive, pouvant aboutir à la constitution de douleurs neuropathiques.
Par ailleurs, à l'heure actuelle, il semble que le pourcentage de succès obtenu par la
radiochirurgie est plus important lorsque ce traitement est proposé en 1re intention plutôt qu'au
décours d'autres gestes de neurochirurgie fonctionnelle.
En ce qui concerne les risques de rechute, quelle que soit la technique utilisée, les experts
considèrent que le risque de récidive est sensiblement identique.
À propos des séries de la littérature qui décrivent les patients ayant eu deux sessions de
traitement par radiochirurgie, les membres du groupe considèrent que cette attitude témoigne
d’une dérive de prise en charge médicale des patients aux USA et en Asie.
En France, l’attitude habituellement recommandée en cas d’échec de la radiochirurgie est de
proposer une autre modalité thérapeutique que la radiochirurgie et, de ne retenir celle-ci une
seconde fois qu’en cas de contre-indication absolue des autres méthodes.
Sécurité – complications de la radiochirurgie
Selon les membres du GT, les complications dépendent beaucoup du savoir-faire et des
techniques, du volume irradié, du ciblage. Une dose plus élevée peut être mieux tolérée quand
on s’éloigne du tronc cérébral.
Dans les séries publiées dans la littérature, les résultats en termes de complications sont
différents selon les techniques (Gamma Knife, CyberKnife et accélérateur linéaire), mais les
experts notent également des cibles radiochirurgicales différentes.
Les experts considèrent que parmi les complications, une distinction doit être établie entre une
impression transitoire d’engourdissement, là où l’examen clinique n’objective pas de
perturbation évidente des sensibilités élémentaires et les cas où le patient se plaint de
paresthésies ou de dysesthésies avec, à l’examen clinique, une franche hypoesthésie tactile et
douloureuse intéressant le territoire du nerf trijumeau.
Les dysesthésies sont plus gênantes et se rapprochent de la douleur neuropathique (à type de
brûlure) : neuropathie trigéminale post-thérapeutique. Quand on a une douleur neuropathique, le
traitement est plutôt médical ou éventuellement par stimulation corticale lorsqu’il s’agit d’une
douleur de déafférentation avérée pharmaco-résistante.
Les hypoesthésies se rapprochent des douleurs de désafférentation et sont très difficiles à
traiter.
Efficacité comparée des techniques
Dans la littérature analysée, il n’y a pas de séries qui comparent les différentes techniques entre
elles et, selon les experts du GT, il semble difficile aujourd’hui de mettre en place des essais
comparatifs dans cette indication.
En ce qui concerne la radiothérapie stéréotaxique fractionnée, la névralgie du trijumeau n’est
pas une indication pour cette modalité de traitement.
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Indications et arbre décisionnel
Le choix thérapeutique repose sur plusieurs paramètres, mais doit surtout tenir compte de l'âge
du patient, de la topographie des douleurs, de l'intensité et de la fréquence des douleurs.
Les recommandations de l’IRSA apparaissent obsolètes pour le groupe de travail qui
recommande de se référer à un rapport de la Société de neurochirurgie de langue française de
2009.
L’arbre de décision proposé par les membres du groupe est le suivant :
S’il s’agit d’une névralgie secondaire :
La priorité doit être donnée au traitement de la cause.
Néanmoins, il faut établir une distinction pour la névralgie trigéminale qui évolue dans un
contexte de sclérose en plaques. Elle présente de nombreuses similitudes avec la névralgie
trigéminale essentielle, les possibilités de neurochirurgie fonctionnelle sont identiques à
l’exception du recours à la décompression vasculaire.
S’il s’agit d’une névralgie trigéminale essentielle :
La définition des indications est fonction de l'âge du patient, de la topographie des douleurs et
de l'accessibilité au traitement.
- Si le sujet est âgé : la radiochirurgie est proposée en première intention, notamment si la
névralgie intéresse le territoire du nerf ophtalmique de Willis.
- Si le sujet est jeune : la décompression vasculaire microchirurgicale et la radiochirurgie
entrent en compétition. En cas d’échec de l’une ou l’autre de ces techniques, un geste
percutané peut être préconisé si la névralgie trigéminale n’intéresse pas le territoire du nerf
ophtalmique de Willis.
Les experts du GT considèrent que si l'on se situe dans un contexte d'état de mal névralgique, il
convient de donner la priorité soit à une décompression vasculaire (notamment si le conflit
artère-nerfs est confirmé sur l'IRM), soit à un geste percutané (microcompression par ballonnet
ou thermocoagulation) du nerf trijumeau ; le délai d’action de 2 mois obtenu avec la
radiochirurgie reste trop long dans ce cas de figure.
Conclusion du groupe de travail
De consensus général, le gold standard actuel est la décompression microvasculaire. C’est
encore un challenge de démontrer que la radiochirurgie fait aussi bien sur le long terme.
Mais la radiochirurgie reste néanmoins un traitement accepté qui peut être envisagé dans un
contexte multidisciplinaire en tenant compte des facteurs liés au patient.
Les experts du GT recommandent de favoriser la prise en charge des patients par des équipes
regroupant les compétences techniques et humaines nécessaires à la pratique de toutes les
alternatives interventionnelles (que sont le débouclage microvasculaire, la radiochirurgie et les
gestes percutanés), afin que le choix de la technique soit essentiellement fait en fonction de
l’intérêt du patient et de son terrain, plutôt que la disponibilité de telle ou telle technique ou
compétence humaine.
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CONCLUSION GÉNÉRALE ET PERSPECTIVES
En s’appuyant sur l’analyse critique des données de la littérature (faible niveau de preuve,
comportant des biais importants) et notamment sur la position du groupe de travail, la
radiochirurgie stéréotaxique1 apparaît comme une modalité possible de traitement de névralgies
du trijumeau essentielles pour lesquelles le traitement médicamenteux bien conduit a été un
échec.
Dans cette situation clinique, le traitement interventionnel peut également consister en une
décompression vasculaire microchirurgicale ou en un traitement percutané.
Les éléments à en prendre en compte pour choisir entre ces différentes modalités sont
principalement les caractéristiques du patient et de la douleur :
- si le sujet est âgé (pour lequel la décompression vasculaire microchirurgicale est peu
pratiquée), la radiochirurgie est préférentiellement proposée si la névralgie intéresse le
territoire du nerf ophtalmique de Willis, ou si le sujet présente des comorbidités ou des
risques d’effets secondaires avec les traitements percutanés ;
- si le sujet est jeune, la radiochirurgie est la modalité à privilégier au même titre que la
décompression vasculaire microchirurgicale ;
- dans le cas d’un mal névralgique, la radiochirurgie n’est pas retenue en raison de son
efficacité retardée dans le temps.
La radiothérapie peut également s’envisager en deuxième intention, suite à un échec d’une
décompression vasculaire microchirurgicale ou d’un traitement percutané.
Un second traitement par radiochirurgie suite à l’échec d’un premier n’est pas indiqué, sauf en
cas de contre-indication absolue aux autres techniques.
Il existe peu des données sur la sécurité à long terme de l’utilisation de cette technique. Un suivi
régulier et à long terme des patients traités est recommandé, notamment pour acquérir plus de
donnés sur les tumeurs pouvant apparaître en territoire irradié.
Enfin, quel que soit le choix thérapeutique retenu pour traiter une névralgie du trijumeau, il
devrait être fait :
- en prenant en compte des caractéristiques du patient (âge, comorbidités, etc.) et de la
douleur (topographie, intensité, fréquence, etc.) ;
- dans un cadre multidisciplinaire (notamment neurologues, neurochirurgiens, radiophysiciens,
etc.) ;
- dans un centre permettant la réalisation des différentes modalités thérapeutiques
(médicamenteuse, décompression, radiochirurgie et techniques percutanées notamment),
afin que ce choix ne se fasse par défaut de disponibilité humaine ou technique.
Compte tenu du faible niveau de preuves des études, du caractère rétrospectif de la majorité
des études publiées, il est nécessaire de réaliser des études prospectives multicentriques avec
un protocole clair qui définit, pour la névralgie du trijumeau, les critères d’inclusion des patients,
les critères de jugement de l'efficacité, de la sécurité et des coûts, ainsi que les outils
spécifiques d’évaluation de l’efficacité.
1
L’autre modalité de l’irradiation intracrânienne en conditions stéréotaxiques, la radiothérapie stéréotaxique
intracrânienne fractionnée n’est pas envisagée dans la névralgie du trijumeau.
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Toutes les publications de la HAS sont téléchargeables sur
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www.has-sante.fr
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