vers une démarche de carte stratégique

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vers une démarche de carte stratégique
dossier :
It Gouvernance
Le Balanced Scorecard pour l’informatique
Vers une démarche de carte stratégique
la connaissons aujourd’hui. Du premier Balanced Scorecard de General
Electric en 1950, à la Balanced
Scorecard de Kaplan & Norton en
1992, date de leur premier article
dans la Harvard Business School, il y
a bien des différences qu’il est
important de rappeler.
Patrick Jaulent
Président du club Balanced Scorecard France
Les premières Balanced Scorecard,
présentées sous la forme d’un
tableau de bord comportant quatre
dimensions (finance, clients, processus et organisation apprenante) ont
été utilisées par General Electric
dans les années 1950 pour piloter
environ 150 centres de profit, et par
la société Analog Devices en 1980
lors d’une évaluation Baldrige de
son système de management de la
qualité. (cf. The first Balanced Scorecard :
• La revue n° 79 - Juin 2005
balanced scorecard
P. Norton, 2002).
4
report
by
David
En 1990, Nolan Norton Institute,
l’unité de recherche de KPMG, décida
de sponsoriser, pendant un an, une
étude intitulée « Mesurer la performance dans l’organisation du futur. »
David Norton directeur de recherche
chez KPMG et Robert Kaplan, professeur à la Harvard Business School,
ont dirigé cette étude, qui a abouti à
la Balanced Scorecard telle que nous
En 1950, l’objectif pour General
Electric était de concevoir un
tableau de bord équilibré à partir de
mesures (ou indicateurs) existants,
d’où l’idée de répartir ceux-ci selon
quatre dimensions ou perspectives :
finance, clients, processus, organisation apprenante.
En 1992, pour Kaplan et Norton (que
nous noterons K & N) l’objectif n’est
pas de concevoir un tableau de bord
prospectif équilibré mais de formaliser la vision (1) du manager pour
l’organisation qu’il pilote. Comment
devra être mon organisation dans 3
ans, 5 ans, 10 ans ?
Pour K & N, la vision du manager doit
être formalisée afin que celle-ci soit
communiquée et appropriée (2) par
l’ensemble du personnel de l’organisation. Pour ce faire, le manager doit
établir un « plan » : une carte stratégique.
Pour piloter l’organisation vers sa destination (3), son manager peut concevoir un tableau de bord équilibré à
partir de la carte stratégique ou piloter
directement à partir de la carte stratégique sans passer par un tableau de
bord (ce que nous conseillons). Le
tableau de bord prospectif équilibré (que nous noterons TABPE) n’est
pas la finalité de la démarche : il
devient optionnel.
Il serait d’ailleurs, souhaitable de
parler de démarche carte stratégique (4) plutôt que de démarche
Balanced Scorecard.
Nous vous proposons d’illustrer la
démarche carte stratégique, à travers un exemple, une direction des
systèmes d’information (notée DSI)
imaginaire, créateur de valeur pour
l’entreprise.
Démarche carte stratégique
Toute démarche de carte stratégique
commence par la clarification de la
mission et de la vision de l’entité,
pour notre exemple une DSI fictive.
La mission
La mission identifie la raison d’être
de l’entité. Quelle est la mission de
notre DSI ?
La mission de la DSI est de rendre ses
clients (internes) plus performants en
délivrant des produits et des services
informatiques qui satisfassent leurs
besoins et attentes.
La mission est pilotée à court terme
à l’aide d’un tableau de bord
composé d’indicateurs opérationnels.
La vision
Pour le Directeur de la DSI, définir la
vision a pour objet d’indiquer la
« destination d’un voyage qui durera
plusieurs années ». La vision exprime
l’image d’un futur que le DSI veut
créer pour sa DSI.
(1) En 1961, John Fitzgerald Kennedy reprit à son compte une idée suggérée par les dirigeants de la Nasa pour annoncer sa vision : « Avant la fin de cette décennie, un
homme marchera sur la lune ». Cette vision personnelle de John Kennedy fut partagée collectivement par tout un peuple pour aboutir, en 1969, au succès du vol
d’Apollo 11 avec Armstrong, Collins et Aldrin.
(2) L’appropriation est le plus long et le plus difficile à obtenir.
(3) La vision du manager.
(4) Carte stratégique est une marque commerciale déposée.
It Gouvernance dossier
Pour son Directeur, la DSI doit être
reconnue comme un acteur majeur de
l’entreprise. Ses objectifs stratégiques
en accord avec le PDG sont :
--> Réussir le déploiement des normes (5)
IFRS et Sarbanes-Oxley (ou LSF au
niveau français) à coûts et délai
maîtrisés.
--> Accroître la collaboration entre les
différentes directions de x % / an.
--> Développer la valeur ajoutée des
projets stratégiques de la DSI de
x % / an.
--> Réduire les coûts de la DSI de
x % / an.
La vision est pilotée à l’aide d’une
carte stratégique et « éventuellement »
d’un tableau de bord stratégique.
La carte stratégique
K & N proposent un cadre générique (6)
de carte stratégique composé de
deux « dimensions résultats » et de
deux « dimensions leviers ». Chaque
dimension comporte des objectifs
stratégiques reliés entre eux par un
lien de cause à effet ou lien de
contribution.
Les dimensions
regroupent :
LEVIERS
OPÉRATIONNELS
CLÉS de la DSI
LEVIERS
STRUCTURELS
CLÉS de la DSI
clés
• les objectifs stratégiques liés aux
systèmes / processus clés de l’organisation : les leviers opérationnels
clés,
• les objectifs stratégiques liés à
la structure apprenante clé de
l’organisation : les leviers structurels clés tels que le capital humain,
le capital informationnel,…
• les objectifs stratégiques liés aux
résultats financiers clés ;
Objectifs stratégiques,
indicateurs et liens
• les objectifs stratégiques liés aux
propositions de valeur pour les
clients : les résultats ciblés pour le
client de la DSI.
La figure 1 ci-dessous montre la carte
stratégique partielle du CIO composée d’objectifs stratégiques reliés
entre-eux.
(F3)
Maîtriser les coûts
informatiques
RÉSULTATS CLÉS
sur les FINANCES ...
Résultats clés
sur les CLIENTS
de la DSI
résultats
Les dimensions leviers clés regroupent :
(C8)
Renforcer la qualité de service
(O10)
Accroître l’efficience
du support clients
(*DRH)
Développer et soutenir
les compétences humaines
À chaque objectif de la carte stratégique est associé un ou plusieurs indicateurs (7). Naturellement, si les objectifs sont
reliés entre-eux par un lien de contribution il en est de même des indicateurs, condition nécessaire pour piloter à partir
d’une carte stratégique. Le pilotage s’effectue à partir des objectifs de la carte et/ou des indicateurs de la carte.
(5) Dans notre exemple, CEO et CIO considèrent que le déploiement des nouvelles normes comptables (IFRS x) est un projet stratégique pour l’entreprise.
(6) Le cadre générique proposé par K & N peut être modifié.
(7) Un seul indicateur par objectif toutefois, un ratio de 1.2 est acceptable.
• La revue n° 79 - Juin 2005
Figure 1.
5
dossier :It Gouvernance
La figure 2 ci-après montre la carte stratégique partielle du CIO composée d’objectifs et d’indicateurs reliés
entre-eux.
RÉSULTATS CLÉS
sur les FINANCES ...
(l4) % de réduction des
coûts de maintenances
RÉSULTATS CLÉS
sur les CLIENTS
de la DSI
(l29) % de clients de la
DSI avec avis global
TRÈS SATISFAIT
(F3)
Maîtriser les coûts
informatiques
(C8)
Renforcer la qualité
de service
(O10)
Accroître l’efficience
du support clients
LEVIERS
OPÉRATIONNELS
CLÉS de la DSI
LEVIERS
STRUCTURELS
CLÉS de la DSI
(*I44) % de personnel de la
DSI formés à ITIL intégrés au
déploiement des exigences
réglementaires
(*DRH)
Développer et soutenir
les compétences humaines
(l10) % d’actions de
maintenance soldées
dans un délai > à une
référence
(l16) % de personnel de
la DSI perçus comme
expert en maintenance
Figure 2.
Les cibles
Vous devez maintenant fixer les cibles à atteindre pour chaque indicateur en commençant par les indicateurs
appartenant aux perspectives résultats (finance et client).
Vous êtes désormais prêt à piloter à partir de la carte stratégique comme vous pouvez le constater par les figures
3 et 4 ci-dessous.
RÉSULTATS CLÉS
sur les FINANCES ...
(l4) % de réduction des
coûts de maintenances
RÉSULTATS CLÉS
sur les CLIENTS
de la DSI
(l29) % de clients de la
DSI avec avis global
TRÈS SATISFAIT
(F3)
Maîtriser les coûts
informatiques
(C8)
Renforcer la qualité
de service
(O10)
Accroître l’efficience
du support clients
• La revue n° 79 - Juin 2005
LEVIERS
OPÉRATIONNELS
CLÉS de la DSI
6
LEVIERS
STRUCTURELS
CLÉS de la DSI
(*I44) % de personnel de
la DSI formés à ITIL intégrés
au déploiement des exigences réglementaires
(*DRH)
Développer et soutenir
les compétences humaines
(l10) % d’actions de
maintenance soldées
dans un délai > à une
référence
(l16) % de personnel de
la DSI perçus comme
expert en maintenance
Figure 3.
Les plans d’actions
Pour atteindre les cibles il sera sans doute nécessaire de mettre en place des plans d’actions uniquement sur les indicateurs appartenant aux perspectives leviers (leviers opérationnels et leviers structurels). Avec une démarche carte
stratégique on pilote par rapport à une cible et non par rapport à un écart.
It Gouvernance dossier
RÉSULTATS CLÉS
sur les FINANCES ...
(Corporate)
Renforcer la performance de l’entreprise (F23)
Renforcer l’alignement
de la DSI sur la stratégie
de l’entreprise Contribution
Crédibilité
RÉSULTATS CLÉS
sur les CLIENTS
de la DSI
(C10)
Renforcer la transparence
et la sécurité financière (*DSI)
Accroître le
déploiement des exigences
réglementaires Compétence
(C8)
Renforcer la qualité
de service (*DSI)
Améliorez la productivité
dans le business Moyen terme
Une couverture optimale des
besoins du business
(O24)
Améliorer la mise en œuvre
des applications orientées
business ☺
Long terme
Un support aux exigences
réglementaires...
LEVIERS
OPÉRATIONNELS
CLÉS de la DSI
Moyen terme
(F3)
Maîtriser les coûts
informatiques Court terme
Une qualité de services
(O10)Accroître
l’efficience du support
clients
Court
terme
(O4) Renforcer la
compréhension des besoins stratégiques des directions ☺
Pilotage stratégique... Décentralisation des décisions... Compétences du personnel
LEVIERS
STRUCTURELS
CLÉS de la DSI
(S7)
Renforcer l’alignement de
la stratégie de la DSI sur son
organisation ☺
(*DF) Améliorer la prise
de décision (*DRH)
Développer et soutenir les
compétences humaines Figure 4.
Conclusion
Le management stratégique (comité
de direction, PDG, DSI), en contact
permanent avec les actionnaires
(stakeholders) et les managers opérationnels, doit « prendre de la hau-
teur pour voir plus loin ». Pour ce
faire, il maîtrise et utilise la Balanced
Scorecard (BSC) telle que présentée
dans l’article pour définir, formaliser,
communiquer et animer son pilotage
stratégique. Sa vision est globale et à
long terme. Cette démarche illustre
la pensée linéaire.
Le manager opérationnel est en
contact permanent avec le management stratégique et les opérateurs. Il
maîtrise la Balanced Scorecard qu’il
traduit sous la forme d’une Dynamic
Balanced Scorecard (DBSC) car son
approche n’est pas linéaire mais faite
de boucles de contre-réaction. Sa
vision est locale, à moyen et court
terme. La DBSC construite à partir de
boucles causales permet de définir,
formaliser et piloter les interfaces et
interactions entre les différents processus de l’organisation. Mais ceci
est une autre histoire qui fera éventuellement l’objet d’un nouvel
article.
• La revue n° 79 - Juin 2005
Le budget
Un plan d’actions a un coût. Vous
pouvez calculer le budget associé à
un plan d’action en mettant en
œuvre la méthode ABB (Activity
Based Budgeting).
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