Le Journal du Dimanche - 31 Janvier 2016 - entree
Transcription
Le Journal du Dimanche - 31 Janvier 2016 - entree
www.lejdd.fr I 31 janvier 2016 I N° 3603 I 2 € (JDD + Version Femina) L’enquête qui inquiète VIVrE EnsEmblE Antisémitisme et peur de l’islam au cœur d’une étude Ipsos Pages 14-15 Exclusif Ces 23 architectes qui vont réinventer Paris Pages II-III Taubira en toute liberté M 00851 - 3603 - F: 2,00 E 3’:HIKKSF=VUWUUU:?n@q@a@d@a"; b Notre enquête sur son départ du gouvernement b Sondage Ifop-JDD : la cote d’avenir des dirigeants de gauche b Jean-Luc Mélenchon : « La situation Pages 2 à 5 est pire que sous Sarkozy » Vendredi, deux jours après sa démission, Christiane Taubira participait à une conférence à la faculté de droit de New York devant un amphithéâtre comble. S. Lenhof/CryStaL PiCtureS Family Day Mariage pour tous à l’italienne Page 8 france métropolitaine : 2 € REMO CASILLI/REUTERS PhILIPPE STERC/PAnORAMIC Jacqueline sauvage Yannick noah Page 13 Page 36 Trois filles pour la grâce d’une mère JB AUTISSIER/PAnORAMIC/STARfACE « Avec l’âge, je suis moins souple » six nations BPI/ICOn SPORT Samedi, un Stade de France post-attentats Page 37 2| L’événement jdd | 31 janvier 2016 Exécutif Bousculé par la démission de Christiane Taubira et par une partie de la gauche qui veut François Hollande sur le fil U DominiquE DE montvalon @demontvalon1 ne étape a été franchie… » François Hollande sait que le chemin sera encore très long avant que députés et sénateurs se retrouvent à Versailles pour que soit votée la révision constitutionnelle. Une révision qui élargira le champ de ceux qui, condamnés pour terrorisme, risqueront demain la déchéance de nationalité. Mais un ministre, déjà, s’emballe : « Cette histoire est réglée, et on s’en sort par le haut. » Et de souligner que les socialistes membres de la commission des lois, jusqu’ici hostiles, ont été unanimes à approuver jeudi la nouvelle mouture du texte gouvernemental, ce qui constitue un tournant. Cependant, tout n’est pas joué. Certains à droite, notamment au Sénat, où fillonistes et juppéistes sont majoritaires, peuvent vouloir contrarier le soutien ostensible qu’apporte Nicolas Sarkozy à cette initiative de François Hollande. D’autres à gauche, outre Jean-Luc Mélenchon et les frondeurs, continuent de s’interroger sur l’ampleur et les conséquences du virage sécuritaire pris par l’exécutif pour répliquer à un défi terroriste que le Président, en privé, évoque souvent et avec gravité. Il n’empêche : voici la machine gouvernementale désembourbée. Des progrès ont été faits, confirme-t-on à Matignon. De fait, mercredi seront présentés en Conseil des ministres deux textes clés : sur la prolongation de l’état d’urgence et sur le crime organisé. Le Président entre soulagement et prudence Adossé aux institutions de la Ve République, François Hollande – dont 69 % des sympathisants du PS interrogés par l’Ifop (lire page 4) souhaitent qu’il joue un rôle important « dans les années à venir » – est partagé aujourd’hui entre soulagement et prudence. Soulagement car, au-delà des effets de manche des frondeurs, il a le sentiment que l’opération « révision constitutionnelle » est désormais sur les rails depuis qu’il n’est plus question, Manuel Valls, François Hollande et Christiane Taubira, à l’élysée, en septembre dernier. Nicolas KoVaRiK/RéseRVoiR Photo dans le texte qui va être soumis au vote des parlementaires, de distinguer entre « mononationaux », comme dit Nathalie KosciuskoMorizet, et binationaux. Mais Hollande, qui prévoit de ne s’adresser aux Français sur le fond que fin février, quand tout se sera décanté, est aussi prudent. Les frondeurs relancent l’idée – approuvée par 74 % des sympathisants du PS – d’une primaire à gauche. Et, dans leur esprit, ce serait sans… Hollande. « Il y a des lignes rouges qui ne peuvent être franchies », avertit un ministre. « Tout cela relève de la science-fiction », juge Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop. À l’Élysée, on explique, un peu pincé, qu’on a « suffisamment de travail » pour que la présidentielle ne soit pas, « à ce stade », un sujet de préoccupation. Un seul mot d’ordre : « Bosser, bosser, bosser ». Ce n’est pas tout : voici qu’à peine Christiane Taubira partie – « avec dignité et retenue », juget-on unanimement –, la tension déjà perceptible entre Manuel Valls et le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, a pris de l’ampleur. Alors qu’un proche de Macron assure que les relations entre les deux hommes se sont « énormément détériorées », on dit à l’Élysée que cette tension est « surinterprétée ». Un ministre proche de Valls l’admet : oui, Macron a pu « énerver » dans sa façon de « sortir de son couloir » et de, parfois, « télescoper » ceux qui courent à ses côtés. Mais c’est pour assurer que, clarifications faites, le Premier ministre, d’accord avec 95 % des idées de Macron, ne s’opposerait pas à ce que l’homme de Bercy, si le président le décidait, « prenne du galon ». Il est vrai qu’Emmanuel Macron s’est senti, peut-être à tort, personnellement visé quand Valls s’en est pris jeudi à la cantonade à ceux qui s’abandonnent à « l’égocentrisme et au narcissisme ». « On ne peut pas ubériser tous les Français du jour au lendemain », réplique un élu vallsiste. Manuel Valls conforté Une certitude : tout sera fait côté Matignon pour que la tension ne tourne pas au clash. Si Valls a été conforté par les derniers arbitrages présidentiels et aussi par le départ de Christiane Taubira, il sait en effet que son avenir n’est pas de diriger un gouvernement « rétréci ». Converti – provisoirement ? – à la stratégie qui fut celle de Jacques Pilhan auprès de François Mitterrand (plus la parole est rare, plus elle est forte), François Hollande observe et entretient le mystère : petit ou grand remaniement ? Qui au Quai d’Orsay ? Michel Sapin ? Qui à la tête d’un super-Bercy ? Macron ? Valls sait que, à gauche, Hollande a en main le destin de tous : il faut que la révision constitutionnelle passe le cap du Congrès de Versailles et que son gouvernement ne soit pas vallso-vallsiste. Car l’homme de l’Élysée, convaincu que le réformisme gagne en profondeur du terrain à gauche, a besoin que sa base électorale, à l’approche de 2017, soit la plus large possible. Il le redit à tous : une gauche divisée pourrait faire une croix sur le second tour de 2017. g Macron, problème ou solution ? ses dissensions avec manuel valls sont publiques. mais le ministre de l’économie n’entend pas se taire, ni partir nicolas PrissEttE @NicolasPri7 Il reste mais il ne va pas se taire. Emmanuel Macron, privé par François Hollande d’une deuxième loi, promet de « lancer des débats » durant les seize mois qui mènent à la présidentielle, comme il l’a expliqué à la presse vendredi. Pas question pour lui de baisser d’un ton… Le ministre de l’Économie entend plancher sur des réformes qu’il veut les plus radicales possible. Il souhaite aussi se consacrer à un nouveau projet de société, qu’il dit rêver forte, juste et ouverte. « La sécurité n’est pas un projet politique » a-t-il martelé – une nouvelle pique à l’adresse de Manuel Valls. Macron a, un temps, envisagé de quitter le gouvernement. En décembre, au moment des premières décisions de ses patrons sur sa deuxième loi – qui sera ventilée dans d’autres textes – il a craint que ses propositions ne soient édulcorées. Il aurait alors claqué la porte. Il considère aujourd’hui que la direction reste la bonne même si elle ne va pas aussi loin qu’il aurait voulu, et qu’il reste utile à son poste. Utile mais par forcément agréable pour son chef. Vendredi à Bercy, le ministre a publiquement déploré les « préarbitrages » qui auraient atténué certaines de ses mesures. Il s’est aussi plu à rappeler son analyse des origines franco-françaises du terrorisme djihadiste – des propos qui avaient fait bondir Manuel Valls. Emmanuel Macron, vendredi, à Bercy. Un ministre populaire La veille, le chef du gouvernement avait confirmé son arbitrage sur les 35 heures – défavorable au ministre – en estimant que « dans la vie politique, il faut mettre de côté un certain narcissisme, un certain égocentrisme, pour se consacrer essentiellement à l’intérêt général ». Combien de temps cette tension lioNel BoNaVeNtURe/aFP durera-t-elle ? Macron n’y voit pas une question de personnes mais l’animation d’un débat de fond. Valls et Hollande, pour leur part, ont face à eux un ministre populaire, comme le souligne notre sondage Ifop-JDD, plus apprécié que d’autres fortes personnalités qui ont quitté le gouvernement. Il est le seul, dans la liste que nous avons testée, à recueillir une opinion majoritaire à gauche et à droite. Le remaniement sera-t-il l’occasion d’un apaisement ou d’une clarification ? Emmanuel Macron ne souhaite pas partir. Il ne demande pas non plus à prendre du galon. Dans les scénarios insistants des mouvements à venir, Michel Sapin, ministre des Finances, pourrait être nommé au Quai d’Orsay. Le ministre de l’Économie ne revendique pas de prendre sa succession et de cumuler avec son maroquin actuel. L’idée du « Grand Bercy » ne le séduit pas. François Hollande a encore quelques jours pour trancher. g l’événement | 3 jdd | 31 janvier 2016 lui imposer une primaire, le Président marque des points avec la révision constitutionnelle Le Jdd revient sur ces jours où la ministre de la Justice a pesé le pour et le contre… avant de finalement jeter l’éponge. tout s’est précipité entre samedi dernier et mercredi matin LaurEnt VaLdiguié @Valdiguie « Parfois résister c’est rester, parfois résister c’est partir. » Le Tweet a claqué à toute volée mercredi matin. Une phrase avec trois verbes. Résister. Rester. Partir. Une phrase avec une alternative : dedans ou dehors. Une phrase pour résumer ce dernier mois où la ministre de la Justice a finalement décidé de claquer la porte, après 1 351 jours passés Place Vendôme… Le JDD reconstitue les 5 actes de la pièce. Acte 1 Comment faire un nœud… « Nous devons pouvoir déchoir de sa nationalité française un individu condamné pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation […] même s’il est né français. » Prononcée devant le Congrès à Versailles le lundi 16 novembre, la formule passe alors comme une lettre à la poste. Le discours du Président avait été peaufiné avec Manuel Valls et Bernard Cazeneuve. Christiane Taubira n’était pas autour de la table. Depuis les attentats de janvier, la ministre de la Justice n’est plus du tout dans le « premier cercle ». « Elle n’est pas à l’aise devant le dispositif sécuritaire qui se met en place. Elle est hantée par l’idée que l’on puisse laisser à d’autres des outils législatifs potentiellement dangereux », confiait en décembre un des proches de la garde des Sceaux. La déchéance de nationalité va tout cristalliser. Pendant les premières semaines, le sujet couve… « François a tout laissé ouvert, comme d’habitude », raille un poids lourd de la majorité. Puis, le 22 décembre, en déplacement en Algérie, Christiane Taubira annonce qu’elle n’y est « pas favorable »… «C’est le premier paradoxe de l’histoire, confie une source gouvernementale. Quand elle fait cette déclaration sur la radio algérienne, Taubira croit que Valls est sur la même ligne qu’elle. À l’époque, Valls et Cazeneuve pensent que la déchéance ne sert à rien en matière de lutte contre le terrorisme. Même Urvoas pense alors la même chose ! » Sauf que l’annonce de Taubira va tout crisper. À l’Élysée, François Hollande, pourtant alerté par plusieurs dignitaires socialistes, dont Jean-Christophe Cambadélis, décide de ne pas reculer. Au Conseil des ministres du 23 décembre, quand le président lance le bal, la ministre de la Justice avale son chapeau sans broncher, Christiane Taubira à l’université de New York, vendredi. Jonathan alpeyrie/polaris pour le JDD Taubira, une démission en cinq actes dans le silence du salon Murat… À la conférence de presse qui suit, au côté de Manuel Valls, Christiane Taubira, renfrognée, réaffirme sa loyauté. « C’est ce jour-là qu’elle aurait dû partir », analyse-t-on aujourd’hui à Matignon. Acte 2 François Hollande retourne la situation « Christine Taubira est quelqu’un d’extrêmement légitimiste », explique Manuel Valls dans le JDD du 27 décembre. « Une partie de la gauche s’égare au nom de grandes valeurs », ajoute le Premier ministre, croyant siffler la fin d’une récréation. Chez la garde des Sceaux, il n’est alors « pas question de démission », insiste un de ses proches. « Résister c’est rester », doit encore penser la ministre, qui part en Guyane pour les fêtes. Son premier rendez-vous de l’année en tête à tête avec le Président a lieu à son retour, le 7 janvier. À 16 h 30 ce jour-là, un an après Charlie, François Hollande et Christiane Taubira se retrouvent à l’Élysée. « Tu es indispensable », lui assure François Hollande. À aucun moment, selon nos sources, il n’est question de la nommer à la Culture. « Elle était en poste à la Justice ou rien », confirme-t-on à l’Élysée. « Ce 7 janvier, François l’a encore récupérée comme il sait le faire », raconte un socialiste. « Ce jour-là, il a bien senti qu’elle avait envisagé le départ… Mais il a cru qu’il l’avait convaincue de rester », confirme un ministre. Avait-elle pourtant déjà pris sa décision ? A-t-elle, lors de ses vacances en Guyane, rédigé un texte expliquant sa rupture ? Pour l’heure, un livre est annoncé en mars, Être ministre, reprenant le texte d’une conférence tenue en novembre. Selon plusieurs sources, Christiane Taubira, au cours d’« une nuit d’insomnie » comme elle en connaît tant, aurait mis noir sur blanc les raisons de sa volonté de « résistance ». Mais ce 7 janvier, dans le bureau du président, il n’en est pas encore question… Acte 3 La grosse colère de Manuel Valls Ce 7 janvier, Taubira sort même de l’Élysée avec un feu vert pour se rendre à iTélé enfoncer le clou de sa loyauté. La phrase a même été répétée avant l’émission : « La parole du président est la première et la dernière, c’est de lui que tout émane, c’est lui qui a été élu. » Sauf que, interrogée sur la déchéance de nationalité ce soir-là, la ministre réaffirme son désaccord, même si elle en minimise la portée : « Nous sommes à un moment où nous pouvons exprimer cela », croit-elle encore. « Valls a piqué une colère homérique, confie au JDD un ministre. Il l’a appelée le soir même et le ton est monté. » À Matignon, on ne dément pas l’épisode : « Le Premier ministre lui a effectivement dit son incompréhension », pondère-t-on. Façon de reconnaître à demi-mot qu’elle aurait bien pu être « démissionnée » à ce moment-là… A-t-elle, le soir de ce coup de fil, compris qu’il n’y avait plus d’espace, à l’intérieur, pour la critique ? De leur côté, François Hollande et Manuel Valls, à la fois persuadés qu’elle restera mais conscients du « danger Taubira », mettent sur pied un nouveau « système » pour avancer la déchéance de nationalité sans elle… La décision est prise de faire soutenir le texte au Parlement par Manuel Valls lui-même. « C’est un autre paradoxe, décode un socialiste. Alors que tout le monde a dit que c’était pour l’enfoncer, c’était en fait pour la protéger… Et elle, elle l’a pris pour une nouvelle humiliation. » Dans la foulée, en fin de semaine dernière, Claude Bartolone fait aussi savoir discrètement qu’il envisage de nommer au Conseil constitutionnel une juriste de l’Hôtel de Lassay. Pas Taubira, contrairement à ce que dit la rumeur depuis des mois. Certains pensent que cela a pu jouer un rôle dans sa décision… Acte 4 Visite secrète à Matignon Elle annonce sa démission, mercredi, à Paris. éric Dessons/JDD Elle quitte le ministère de la Justice, mercredi. éric Dessons/JDD Samedi dernier, dans la matinée, la garde des Sceaux tourne avec Michel Denisot une émission prévue de longue date. Matignon n’a pas été prévenu. « Je suis en train de défaire un nœud », dit-elle devant la caméra. En aparté, elle aurait confié à l’animateur que sa décision était prise « de quitter le gouvernement ». Ce même samedi 23 janvier, à 17 heures, avant de s’envoler pour l’Inde, François Hollande téléphone à sa ministre. « Elle lui a annoncé qu’elle partait », confie-t-on à l’Élysée. À la demande du chef de l’État, Christiane Taubira accepte de patienter jusqu’à mercredi pour officialiser sa rupture. Selon nos informations, ce samedi 23 janvier en fin de journée, la garde des Sceaux se rend à Matignon pour une longue explication en tête à tête avec le Premier ministre. « Cela a été chaleureux, mais très clair sur son départ, confie l’entourage de Manuel Valls. Tout le désaccord porte sur la question de la déchéance de nationalité. Elle n’a rien évoqué d’autre, ni sur la loi pénale ni sur la loi renseignement… » Pourtant, dernier paradoxe, le texte sur la déchéance est encore remanié durant le dernier week-end : Pour donner des gages à gauche, il n’est plus question des binationaux… et pour donner des gages à droite, à la demande de Sarkozy, il est question d’étendre la déchéance aux délits de terrorisme. « Je suis persuadé que cela n’a rien changé, qu’elle avait déjà pris sa décision », avance un proche du président. « C’est même un comble, puisque dans la dernière version du texte il n’est plus question des binationaux ! Elle aurait pu avoir une autre attitude », soupire-t-on à Matignon. Acte 5 Un « désaccord politique majeur » avec le sourire Ce mardi 26 janvier, la garde des Sceaux est à Amsterdam. « Elle a passé la journée avec l’ambassadeur de France à parler diplomatie américaine et à préparer son voyage du lendemain en visite officielle aux États-Unis », confie, incrédule, une source gouvernementale. « Soit elle n’avait pas totalement décidé de démissionner, soit elle a donné le change à tout le monde », décode un ministre. De fait, mercredi matin à 8 heures, Christiane Taubira arrive à l’Élysée. « Le secret de son départ a été gardé par trois personnes durant le week-end », explique-t-on à la présidence. Même Jean-Jacques Urvoas n’a appris sa nomination que mercredi matin, un peu avant 9 heures. « Confidentialité oblige », dit-on à la présidence. À moins que François Hollande, une dernière fois, ait eu l’espoir de la faire changer d’avis. Quoi qu’il en soit, quand il les rejoint, à 8 h 30, Manuel Valls constate que c’est fini… « Il n’y a eu aucun éclat. Elle avait l’air détendue en sortant », dit une source. « C’est un divorce par consentement mutuel », analyse l’entourage de Valls. De fait, à 15 h 30 ce mercredi, quand elle fait sa dernière déclaration de ministre, citant Césaire (« nous ne livrerons pas le monde aux assassins d’aubes »), Christiane Taubira est effectivement radieuse. « Je pars sur un désaccord politique majeur », dit-elle. Souriante. Comme soulagée avant de s’envoler pour les États-Unis… en voyage privé. Un nœud en moins pour elle. Un nœud en plus pour le Président… g 4 | l’événement JDD | 31 janvier 2016 Pour chacune des personnalités suivantes, souhaitez-vous qu’elle joue un rôle important au cours des prochaines années ? Ensemble des Français 61% 50% Nicolas Hulot 49% 45% Emmanuel Macron 49% 59% 54% 50% 37% 31% Martine Aubry Manuel Valls Christiane Taubira 31% 30% Ségolène Royal 49% 48% 46% Jean-Luc Mélenchon 36% 27% Arnaud Montebourg 26% 33% 21% François Hollande Cécile Duflot Sondage IFOP pour le JDD réalisé du 29 au 30 janvier 2016 auprès d'un échantillon de 1.009 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus (méthode des quotas). Interviews réalisées par téléphone. Photos : Sipa, Visual, JDD Sympathisants de gauche À gauche, les Français veulent Hulot SONDAGE IFOP-JDD L’écologiste est plébiscité pour jouer un rôle important à l’avenir, comme Valls et Macron. Il n’y a pas d’effet Taubira après sa démission. Une majorité de sympathisants de gauche aimerait une primaire NIcOLAS PrISSETTE @NicolasPri7 Les électeurs de gauche rêvent d’une primaire, mais pas forcément des mêmes candidats… Selon notre sondage Ifop-JDD, une immense majorité des sympathisants écologistes (80 %), du Front de gauche (81 %) et de socialistes (74 %) se dit favorable à un scrutin rassemblant toute la gauche (ce qui n’était pas le cas en 2007 et 2012) pour désigner son ou sa champion(ne) pour 2017. L’initiative menée par un collectif d’une trentaine de personnalités, rallié hier par les députés frondeurs (lire page XX), suscite ainsi un grand intérêt. Les défaites aux régionales, menées dans la désunion, sont une motivation, mais les partisans de ce processus réclament aussi un changement de ligne politique et une alternative à François Hollande. L’éventualité d’une primaire reste néanmoins très hypothétique, la direction PS y étant hostile et le chef de l’État se situant hors de ce terrain – ce que rappelle son entourage avec constance. Martine Aubry devance largement Christiane Taubira Dans le même temps, les sympathisants de gauche sont divi- sés sur les personnalités dont ils souhaitent qu’elles jouent un rôle important à l’avenir. Selon notre enquête Ifop-JDD, Nicolas Hulot apparaît comme celui qui aurait la plus grande capacité à rassembler. L’écologiste, battu chez EELV par Eva Joly en 2011, bénéficie d’une aura renouvelée après sa mission élyséenne de trois ans, qui a contribué à l’issue positive de la COP21. Son nom circule pour le remaniement attendu mi-février, si Ségolène Royal quittait le ministère de l’Écologie. Mais Hulot, qui a ouvertement écarté l’idée de participer à une primaire pour la présidentielle, n’est pas le favori des seuls sympathisants PS, où il pointe derrière un trio de tête composé de Manuel Valls (72 %), François Hollande (69 %) et Emmanuel Macron (63 %). C’est un enseignement de notre sondage : si les électeurs socialistes se disent d’accord pour choisir un candi- Souhaitez-vous que la gauche — c’està-dire le Parti socialiste, Europe ÉcologieLes Verts, le Parti communiste et le Parti de gauche — organise une primaire pour désigner son candidat à l’élection présidentielle de 2017 ? Ensemble des Français Non 35 % Oui 65 % dat, ils soutiennent toutefois ceux qui incarnent la ligne réformiste sécuritaire de l’exécutif. Pour une autre ligne, plus à gauche, c’est Martine Aubry qui est la mieux placée : elle réalise un score élevé pour l’ensemble de son camp et au sein du seul électorat PS (62 %). La maire de Lille, qui n’aura pas occupé de poste ministériel durant le quinquennat, a conservé son capital à gauche malgré l’échec de son candidat aux régionales dans le Nord-Pasde-Calais-Picardie. Elle devance largement Christiane Taubira dont la démission ne semble pas insuffler d’élan. L’ex-garde des Sceaux, malgré son statut d’icône, fait un score minoritaire dans l’électorat PS (47 %) – qui n’est pas son parti. Elle apparaît moins en mesure d’incarner une relève. Pas plus que Jean-Luc Mélenchon. Arnaud Montebourg et Cécile Duflot ferment la marche de notre classement. Les deux voix fortes de la gauche sous le gouvernement Ayrault portent moins haut aujourd’hui. g Les frondeurs se rallient à l’idée des primaires De christian Paul à Benoît Hamon, l’aile gauche du PS ne fait pas de Hollande leur candidat automatique Et maintenant, la gauche du PS ! Après l’appel à une primaire de la gauche et des écologistes lancé dans Libération, de nouveaux adeptes viennent grossir les rangs. Hier, la gauche du PS – environ 30 % du parti – a demandé une large consultation citoyenne pour désigner son prochain candidat. Pointant « les renoncements accumulés », « le repli défensif, sécuritaire et identitaire », les « choix opérés dans la solitude du pouvoir » – autant d’amabilités adressées à un François Hollande qu’ils ont la délicatesse de ne jamais nommer –, ils assurent qu’« il n’y a pas de candidature automatique en 2017 ». Et, ajoutent-ils, les statuts du PS font de la primaire une « obligation », « pas une option ». « La gauche ne peut pas se laisser enfermer dans un imagi- naire de guerre civile. L’état de la démocratie, de la gauche, la poussée du FN, tout pousse à une primaire », appuie le député de la Nièvre Christian Paul, qui espère encore des primaires allant « de François Hollande à Jean-Luc Mélenchon ». Problème : aucun des deux n’en veut. « La primaire fait figure de ballon d’oxygène » « Il faut des primaires de projet, pas des primaires qui soient le tribunal populaire de François Hollande », pointe Jérôme Guedj. « Ce qui détone, ce n’est pas que nous soutenons les primaires, c’est que 30 % des socialistes ne souhaitent pas la candidature de François Hollande. Il s’inscrit dans une vague libérale et sécuritaire, nous devons construire une autre candidature et un autre projet avec en son cœur l’écologie, l’égalité et la démocratie », avance pour sa part le député Pouria Amirshahi. Par la voix de Cécile Duflot, le PCF et les écologistes s’étaient déjà montrés intéressés par ces primaires initiées par Daniel Cohn-Bendit, Yannick Jadot, Thomas Piketty et Michel Wieviorka. « Plus Hollande et Valls asphyxient la gauche, plus la primaire fait figure de ballon d’oxygène », se réjouit Jadot. Dès demain, les communistes organiseront le premier débat du cycle « porte ouverte pour 2017 », et mercredi, Cohn-Bendit et les autres tiendront une réunion publique à Paris sur le thème des institutions. Enfin, le 11 février, les initiateurs de l’appel doivent rencontrer le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, pour sonder ses intentions. Entre ceux qui réclament une primaire d’alternative à Hollande (comme le PCF et Duflot) et ceux qui l’incluent (comme les frondeurs et les initiateurs de l’appel), le madré Cambadélis ne devrait pas trop peiner pour expliquer que, faute de clarification, il ne peut pas répondre. A.N. « François Hollande tripatouille la Constitution » NATHALIE KOScIUSKO-MOrIzET Minoritaire à droite, elle refuse toute « différence » entre binationaux et mononationaux IntervIew cHrISTINE OLLIVIEr @Chr_Ollivier ET DOMINIqUE DE MONTVALON @Demontvalon1 Approuvez-vous la prolongation de l’état d’urgence ? J’y mets deux conditions : réformer notre dispositif ordinaire, hors état d’urgence, pour plus de sécurité, et préparer la sortie de l’état d’urgence, qui ne doit pas être repoussée sine die. J’ai voté en décembre pour l’état d’urgence et je ne le regrette pas. Les procédures lancées dans ce cadre étaient utiles, même si beaucoup ne relèvent pas strictement du terrorisme. Personne ne peut se plaindre qu’on aille enfin chercher les armes dans les cités. Mais je ne me résous pas à ce que, pour aller chercher ces armes, il faille l’état d’urgence. On ne devrait pas avoir besoin d’une procédure dérogatoire pour le faire. Certaines dispositions doivent être intégrées dans notre droit de manière permanente. Par ailleurs, tout le monde dit en chœur que l’état d’urgence ne peut pas être un état permanent, mais personne ne définit clairement les conditions de sortie. Quand Manuel Valls nous dit qu’on en sortira quand on aura définitivement vaincu Daech, cela ne me satisfait pas. Dans la loi de prolongation de l’état d’urgence, je souhaite donc qu’on fasse le bilan des trois derniers mois, qu’on recadre les dispositifs prévus dans la première loi et qu’on prépare les conditions de la sortie. adopte une sanction qui puisse être la même pour tous. Si on ne peut pas appliquer la déchéance à tous les terroristes, allons vers une solution du type de l’indignité nationale, comme je l’ai proposé dès le mois de décembre, qui vaudrait pour tous sans exception. Pourquoi êtes-vous hostile à l’introduction de la déchéance de nationalité dans la constitution ? Cela ne sert à rien, il y a bien d’autres urgences. Et je suis hostile à la démarche qui consiste à faire la différence entre binationaux et mononationaux. C’est un symbole négatif que de mettre en place une peine différente pour un même Au total, allez-vous voter la réforme constitutionnelle ? Nathalie Kosciusko-Morizet, vendredi, à Paris. Bernard Besson pour le Jdd crime. Au nom de quoi un terroriste, parce qu’il a le seul passeport français, serait-il exempté d’une peine de déchéance ? Je souhaite qu’on En l’état, je ne la voterai pas. Parce que ce texte est inutile, et que le symbole qu’il véhicule est dangereux. Malgré les changements introduits par le gouvernement ? Mais cela ne change rien en réalité ! C’est du rhabillage du même l’événement | 5 jdd | 31 janvier 2016 Jean-Luc méLenchon À ses yeux, le départ de Taubira marque « une étape spectaculaire dans le processus d’isolement sectaire de François Hollande » IntervIew aRthuR nazaRet @ArthurNazaret Hollande aura réussi à disqualifier jusqu’au mot de « gauche » lui-même. Aujourd’hui, les gens n’ont plus de repères politiques : pour eux, droite et gauche sont deux blocs faisant la même politique. Le clivage est davantage entre le peuple et la caste des puissants. En France, la misère est devenue muette, et personne ne parle en son nom. Dans notre pays, toutes les peurs se cumulent pour donner un état d’esprit résigné. Le paradoxe est terrible car les Français, d’après un sondage, sont le peuple le plus anticapitaliste du monde, celui où seulement 15 % de la population pense que ce système marche bien. Nous avons élu François Hollande pour nous débarrasser de la politique de Sarkozy. Un an avantla fin du quinquennat, sur tous les marqueurs de l’époque – et au premier rang le chômage – la situation est pire que sous Sarkozy. Quant aux dommages moraux, ils sont vertigineux. François Hollande est le nom de toutes nos misères et de toutes nos désillusions. pascale Boistard (ps) : L’Interview politique du 7/9 du week-end, France Inter, à 8 h 20. g christian paul (ps) : L’Invité de Claude Askolovitch, iTélé, à 8 h 50. g stéphane Le Foll (ps) : Le Grand Rendez-Vous, Europe 1/Le Monde/ iTélé, à 10 heures. g éric Woerth (LR) : Bureau politique, LCI, à 10 h 30. g hervé mariton (LR) : Agora, France Inter/ L’Obs, à 12 heures. g olivier Besancenot (npa), thomas Guénolé (politologue), Gaspard Koenig (directeur du think tank Génération Libre) : Flash Talk, LCPAssemblée nationale, à 13 heures et 23 h 35. g Frédéric Lefebvre (LR) : Le Brunch politique, Sud radio, à 12 heures. g François Bayrou (modem) : 12/13 dimanche, France 3, à 12 h 10. g Gilles de Kerchove (coordinateur de l’union européenne pour la lutte contre le terrorisme) : Internationales, TV5 Monde/RFI, à 12 h 10. g Jean-Yves Le drian (ps) : Le Grand Jury, RTL/ Le Figaro/LCI, à 12 h 30. g Jean-François copé (LR) : Le Supplément, Canal+, à 12 h 55. g Luc chatel (LR) : Forum, Radio J, à 14 h 20. g thierry mandon (ps) : Rue des Écoles, France Culture, à 17 heures. g myriam el Khomri (ps) : BFM politique, BFM TV/ Le Parisien Aujourd’hui en France/ RMC, à 18 heures. g ségolène Royal (ps) : C politique, France 5, à 18 h 35. g éric coquerel (pG) : Soir 3, France 3, à minuit. g dans quel état est la gauche aujourd’hui ? nicolas sarkozy veut revenir sur les 35 heures, supprimer l’isF… continuez-vous à penser que François hollande est « pire » que sarkozy… Les invités poLitiques du dimanche « Les dégoûtés partis, il reste les dégoûtants » Jean-Luc Mélenchon, à Paris, hier matin, dans un café du 10e arrondissement. Éric dessons/Jdd est partie dégoûtée. Maintenant que tous les dégoûtés sont partis, il ne reste que les dégoûtants. Robert Badinter a présenté les grandes pistes d’une prochaine réforme du code du travail. La cFdt n’y voit pas une remise en cause de ce code. et vous ? S’attaquer au Code du travail parce que le chômage augmente est à peu près aussi Le départ de christiane stupide que de vouloir supprimer le Code de la route taubira est-il un tournant ? quand il y a des accidents. Le départ de Christiane Taubira est une étape spectaLe Code du travail est voluculaire dans mineux ? Heule processus reusement, cela d’isolement « La primaire veut dire qu’il sectaire de a de nombreux est précis. Ceux François qui prétendent Hollande. Il points communs le simplifier veulent juste divise tout avec le PMU » s’attaquer aux et tout le monde : le acquis sociaux. mouvement social, la gauche, Nous vivons une période sa propre majorité, son goud’obscurantisme social. Dans vernement. Maintenant, il cette cour des miracles qu’est nomme comme nouveau le gouvernement, M. Gattaz garde des Sceaux quelqu’un joue le chef des capons, ces qui a proposé de fusionner mendiants d’autrefois qui le ministère de la Justice et faisaient les poches dans les le ministère de l’Intérieur, lieux publics. Il encaisse les et qui traitait les frondeurs milliards du gouvernement, de « djihadistes ». Taubira sans que cela ne réduise en dispositif. D’ailleurs, je n’aime pas la façon dont le président de la République tripatouille la Constitution sur un coin de table, en fonction des circonstances. On dit souvent que ce n’est pas bien de faire des lois de circonstance. Là, on fait de la Constitution de circonstance. On ne peut pas jouer comme ça avec notre loi fondamentale. Finalement, François Hollande continue à faire le Premier secrétaire. Il nous propose pour la Constitution ce qu’il a toujours fait pour le PS : une motion de synthèse qui cache, comme toujours, des désaccords. Le débat sur la nationalité mérite mieux que cela. Imagine-t-on un autre pays où on rien le nombre de chômeurs et, dès que les coffres sont pleins, il retend sa sébile. En France, le grand patronat est une classe d’assistés très parasitaire. Le gouvernement a modifié son texte sur la déchéance de nationalité. il n’y fait plus référence aux binationaux. Êtes-vous satisfait ? La formulation actuelle réalise le pire de ce que l’on craignait. C’est une honte. Car dans les faits, seuls les binationaux pourront être déchus. En revanche, ce qui est plus grave qu’avant, c’est que cette déchéance peut s’étendre à tous les délits. L’état d’urgence devrait être prolongé. tant que la menace terroriste n’est pas écartée, n’est-ce pas légitime ? Les terroristes font peser sur notre société une menace de mort mais aussi une menace politique. Ils ont un but : déstabiliser la démocratie et diviser le peuple français. Il ne faut donc l’aider ni à l’un ni à l’autre. L’état d’urgence était pleinement justifié dans les premières heures suivant le massacre de novembre car il permettait des interventions débattrait de cette manière-là de l’article qui traite des conditions de la nationalité dans la Constitution ? Cela témoigne de la part de François Hollande beaucoup de désinvolture et un grand cynisme. mais il s’agit aussi pour le chef de l’état de tendre la main à la droite… C’est l’intérêt général qui doit présider à nos choix. Pas les arrangements tactiques du moment. Et cela vaut pour tous, droite ou gauche : la question n’est pas de savoir s’il faut rendre service au président de la République ou à tel ou tel dans l’opposition, mais ce qui est bien pour le pays. À la place de christiane taubira, rapides. Mais dans la durée, cela fait reculer nos libertés collectives, sans aucun gain en termes de sécurité. duflot, montebourg, hamon, taubira sont sortis du gouvernement. pouvez-vous travailler à une alternative à hollande avec eux ? Ceux qui veulent travailler à une alternative sont les bienvenus. Mais il ne faut pas confondre le collectif et l’entre-soi. L’agora oui, le loft non ! Il n’y a pas entre nous de programme commun spontané. En 2017, il ne peut pas y avoir d’ambiguïté : un nouveau traité européen sera présenté, et il y aura une élection en France et en Allemagne. Ce doit être l’occasion d’un tournant total sur les politiques européennes d’où viennent nos malheurs. Toutes les personnes citées ont fait partie d’un gouvernement qui a fait adopter le traité budgétaire européen. Ils doivent dire qu’ils regrettent ! Mais les derniers arrivés ne peuvent pas dicter leurs conditions aux premiers combattants. Les frondeurs ont appelé à une primaire. Y a-t-il des qui a démissionné cette semaine, auriez-vous fait la même chose ? Je trouve qu’il y a de la dignité dans le geste. Et c’était une clarification nécessaire. On peut trouver que ça arrive bien tard, mais au moins, elle le fait. Ceci dit, si je respecte la personne, j’ai des désaccords sur sa politique. Son bilan, ce sont des avocats en colère, des magistrats désabusés, le personnel pénitentiaire démotivé et une politique pénale que je déplore. D’ailleurs peut-on parler de bilan ? Christiane Taubira n’a pas vraiment été garde des Sceaux. Elle a été ministre des valeurs de la gauche et garde de… ce qu’il en restait. lejdd.fr Lire l’interview intégrale. conditions auxquelles vous pourriez y participer ? Participer à une primaire que François Hollande pourrait gagner ? Non. Pour une raison simple : je n’accepterai pas le résultat car je suis en désaccord total avec ce qu’il propose. De même une primaire de « toute la gauche » qui inclut des partisans des traités budgétaires européens ne peut pas me concerner. Par ailleurs, l’expérience montre que les exclus, les chômeurs, le peuple profond ne votent pas aux primaires. La primaire a de nombreux points communs avec le PMU : on vote pour le mieux placé, davantage sur des personnes que sur des idées. Hollande et Sarkozy comptent qu’il n’y ait pas de vrai deuxième tour grâce à la peur de Le Pen. Ils voudraient bien qu’il n’y ait pas de premier tour non plus grâce au « vote utile » dans les primaires… serez-vous candidat en 2017 ? Je vois bien qu’il va falloir que je me décide, ne seraitce que pour éviter d’avoir à répondre à cette question à chaque interview. g 6 | instantanés JDD | 31 janvier 2016 Les indiscrets Le top 5 twitter Hervé morin joue Fillon « Je vous fais un pari. Souvenez-vous-en. Ce sera François Fillon le prochain président de la République, a lâché mercredi l’ancien ministre et président du Nouveau Centre, Hervé Morin, devant une poignée de journalistes. Dans les milieux économiques, on entend beaucoup deux choses : le rejet de Nicolas Sarkozy et l’adhésion au programme de François Fillon. » Le dircab de Le Foll cherche ailleurs Stéphane Le Foll sera-t-il du prochain remaniement ou sera-t-il exfiltré afin de préparer 2017 ? Après le départ de plusieurs collaborateurs importants à l’automne dernier, Philippe Mauguin, son fidèle directeur de cabinet, cherche un point de chute. Après avoir tenté, en vain, de prendre la tête d’un organisme de recherche sous tutelle du ministère de l’Agriculture, Mauguin essaie désormais de récupérer la direction de la grande agence de santé publique qui doit naître de la fusion entre l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) et l’Institut de veille sanitaire (InVS). Bertrand et estrosi, « chefs des trains » Nicolas Sarkozy n’a guère apprécié les critiques de Xavier Bertrand et Christian Estrosi, nouveaux présidents de région, auxquels il prédit une disparition rapide des radars médiatiques : « Ils se croyaient mini-présidents de la République. En fait, ils sont chefs des trains et des lycées », a-t-il ironisé devant un proche. mesrine fine fourchette L’ex-patron du Raid, Jean-Louis Fiamenghi (photo), ne se contente pas d’avouer dans son livre Dans le secret de l’action qu’il est l’auteur du tir mortel contre Jacques Mesrine en 1979. Il raconte également sa première rencontre, six ans plus tôt, avec le futur « ennemi public numéro 1 ». Échange de cigarettes et dialogue surréaliste alors que ce dernier passait la nuit en garde à vue : « Sans que je ne sache comment il en est arrivé là, [Mesrine] a commencé à me parler… de la recette du gigot de sept heures. […] Il l’a fait avec beaucoup de talent puisqu’il est arrivé à me faire saliver en donnant force détails… » Dîner d’État à l’Élysée en l’honneur du président cubain, Raúl Castro. g Le juge des tutelles de Reims examine la demande de mise sous protection de Vincent Lambert, dans un état végétatif depuis 2008. g Le guide Michelin France présente son palmarès 2016. g Le chanteur salue le bilan de l’ex-ministre de la Justice @benoithamon Toute mon affection à @ChTaubira, toute ma reconnaissance pour son action à la Chancellerie, tout mon respect pour ses convictions. 4 Le premier secrétaire La découverte de Le Drian Jean-Yves Le Drian a été particulièrement touché par l’enquête de Caroline Fontaine et Laurent Valdiguié, Mon grand-père était un poilu (Taillandier, 240 p., à paraître le 11 février). Le ministre de la Défense a découvert que son grand-père paternel, dont il ne savait rien sinon qu’il était « mort de boisson », était un authentique héros de 14-18. Incorporé au 2e régiment d’infanterie coloniale de Brest, Joseph Le Drian combattit en première ligne de l’Argonne aux Dardanelles en passant par Verdun. Il ne rentra à Lorient que le 3 septembre 1919, survivant d’un régiment qui avait perdu 20.000 hommes. MAthIEu ZAZZO / PASCO Laporte garderait novès Guy Novès, le nouvel entraîneur du XV de France, a passé cette semaine un coup de fil au manager de Toulon, Bernard Laporte, pour l’informer de son intention de sélectionner le joueur varois Maxime Mermoz. La conversation a roulé sur la rumeur insistante qui prête à Laporte l’intention de se débarrasser de Novès, s’il était élu président de la FFR fin 2016. « Bernard a démenti, ils en ont tous les deux plaisanté », assure un proche de l’ex-ministre. Police-gendarmerie, la polémique continue Visé par les syndicats de police qui, dans la foulée des attentats, ont dénoncé des « manœuvres de déstabilisation » orchestrées pour faire le jeu « d’un acteur mineur du champ de la sécurité » (lire JDD du 24 janvier), le directeur général de la gendarmerie a répliqué sur son blog. « Fait-on peur à ce point ? », s’interroge le général Denis Favier. « Touché » par ces « sous-entendus » et ces « contre-vérités », l’ex-patron du GIGN promet que « la seule volonté de la gendarmerie est […] d’occuper sa place, rien que sa place, mais toute sa place ». à suivre cette semaine Lundi 2 Dans la foulée, Benoît Hamon Ibrahimovic a participé au concert des Enfoirés, lundi. La star du PSG a croisé Sébastien Chabal. @Ibra_official Legend ! I thought I was the only beast in France… Les Républicains tiendront, après leur conseil national de mi-février, une convention clé sur la fonction publique et l’État, qui doit notamment permettre d’identifier les réformes de 2017-2022. Éric Woerth, secrétaire général de LR, en charge du projet, mettra à l’ordre du jour la fin de l’emploi à vie, l’assouplissement du secteur contractuel et la rémunération au mérite. Si Nicolas Sarkozy pousse la candidature de son conseiller politique pour la présidence du conseil national des Républicains, poste où il succéderait à Jean-Pierre Raffarin, Luc Chatel pourrait trouver un obstacle sur sa route : Michèle Alliot-Marie. L’ancienne ministre est en effet candidate et l’a fait savoir. Du coup, « rien n’est tranché », explique un proche de Sarkozy. son départ du gouvernement, mercredi. @ChTaubira Parfois résister c’est rester, parfois résister c’est partir. Par fidélité à soi, à nous. Pour le dernier mot à l’éthique et au droit. ChT 3 Pour la première fois, Zlatan Woerth et l’emploi à vie mam vs chatel 1 Christiane Taubira commente Marc Lavoine (photo) inaugure son double de cire au musée Grévin. Mardi Laurent Fabius à Rome pour la réunion du Groupe restreint de la coalition internationale contre Daech. g Manifestation des salariés du laboratoire Servier contre le plan de suppression de plus de 600 emplois. Lagarde au concert du PS, Jean-Christophe Cambadélis, s’insurge après l’attaque du site du parti par le groupe Anonymous, qui proteste contre l’état d’urgence. @jccambadelis Tentative d’attaque du site du @partisocialiste. Les dictateurs sont ceux qui portent atteinte au droit d’expression des partis. 5 Pour la première fois en cinquante-six ans d’existence, Barbie va voir ses formes évoluer. De quoi agacer Robert Ménard. @RobertMenardFR #Barbie sera désormais grosse et de toutes les couleurs… À quand une Barbie transgenre ? Le top 5 Google tendances de recherches du 22 au 28 janvier (plus fortes progressions) Jeudi soir au Carnegie Hall de New York, Christine Lagarde a assisté, en compagnie de Mathieu Gallet, à l’un des six concerts qu’a donnés l’Orchestre national de France cette semaine au Canada et aux États-Unis. L’orchestre symphonique qui ne s’était pas produit dans cette salle depuis 2004 a joué sous, la direction de Daniele Gatti, Debussy, Chostakovitch et Tchaïkovski. Tous les sujets France Personnalités politiques 1. Omar Sy 2. PSG vs Toulouse 3. Ophélie Meunier 4. Sandrine Kiberlain 5. Top Chef 1. Christiane Taubira 2. Nicolas Sarkozy 3. François Hollande 4. Najat VallaudBelkacem 5. Emmanuel Macron Nos classements et analyses sur lejdd.fr retrouvez à suivre cette semaine ce matin entre 6 h et 10 h dans Week-end Première sur Mercredi Jeudi Vendredi 22e édition du festival de musique classique La Folle Journée sur le thème de la nature, à Nantes. g Ouverture du salon des entrepreneurs de Paris. g 18e édition du festival des créations télévisuelles de Luchon. g Début du Toulouse Onco Week, le congrès mondial de cancérologie. Journée mondiale de lutte contre le cancer. g Signature à Auckland (Nouvelle-Zélande) de l’accord de partenariat transpacifique (TransPacific Partnership, TPP), qui va créer la plus grande zone de libre-échange au monde. g Conférence humanitaire sur les réfugiés syriens, à Londres. g Carnaval de Cologne. g Bal de l’Opéra de Vienne. Le groupe pétrolier américain Schuepbach réclame des millions d’euros d’indemnités à l’État français après l’abrogation de son permis de recherche de gaz de schiste. g Début du carnaval de Rio de Janeiro. g Congrès annuel du parti de Vladimir Poutine (photo), Russie unie, à Moscou. g Ouverture du 38e festival international ÉRIC DESSONS/JDD ; FRÉDÉRIC DugIt/MAXPPP ; IMF/BEStIMAgE ; twIttER/@IBRA_OFFICIAl ; JÉRôME MARS POuR lE JDD ; AlEXEI NIkOlSky/AP/SIPA du court métrage, à Clermont-Ferrand. Samedi Manuel Valls inaugure la gare Rosa-Parks sur la ligne du RER E, à Paris. g France – Italie, premier match du Tournoi des Six Nations. g Grand slam de judo, à Paris. g Inauguration du grand orgue de la Philharmonie de Paris. Dimanche François Hollande et Angela Merkel se retrouvent à Strasbourg pour un dîner informel à l’invitation du président du Parlement européen, Martin Schulz. g Les Denver Broncos affrontent les Carolina Panthers pour le Super Bowl, finale du championnat de football américain, à Los Angeles. 8| InternatIonal jdd | 31 janvier 2016 ITALIE Selon les organisateurs du Family Day, ce sont quelque deux millions de personnes qui auraient manifesté hier contre le projet d’union civile du gouvernement Renzi face à la fronde catholique scout, père de trois enfants, a décidé de faire ce qu’aucun président du Conseil avant lui n’a réussi en trente ans. Romano Prodi a échoué en 2007, une défaite qui lui avait même coûté son poste. Ce qui pose le plus de difficultés dans le texte actuel, c’est la mesure complémentaire au projet de loi, concernant l’adoption de l’enfant du conjoint. ROME (ITALIE) CORRESPONDANCE VIRgINIE RIVA L e Circus Maximus, haut lieu de la civilisation romaine, n’a jamais réussi à accueillir plus de 500.000 spectateurs. Les responsables de la méga-manif anti-union civile en revendiquent au moins le double mais, en l’absence de chiffres officiels, ce sont bien des centaines de milliers de personnes, majoritairement catholiques, qui sont venues hier de toute l’Italie… Réunies dans une ambiance à première vue bon enfant, entre un alléluia chanté au son de la guitare et des tambours et une chanson du répertoire napolitain interprétée par un prêtre en soutane. Et pourtant, difficile de parler avec les manifestants, seuls les porte-parole s’expriment, selon la consigne du comité d’organisation. « Les homosexuels peuvent s’aimer, mais ils n’ont ni à bénéficier de droits ni à avoir de famille », clame pourtant Anna, une grand-mère qui ose braver les ordres des chefs. Le texte actuel propose d’instaurer une union entre personnes de même sexe et personnes hétérosexuelles, enregistrée par un officier d’état civil, avec engagement à une vie commune, à la fidélité, et à une assistance morale et matérielle réciproque. « C’est hypocrite, en fait il s’agit d’une substitution de mariage. Il y a des articles qui sont Des prêtres donnent de la voix contre le projet d’union pour les personnes de même sexe, hier à Rome. exactement ceux qui régulent le mariage dans le Code civil comme le droit d’hériter », commente le père Gonzalo Mirando. L’Italie est l’un des derniers pays européens à ne pas accorder aux couples homosexuels des droits identiques à ceux dont bénéficient les ménages hétérosexuels, alors que la Cour européenne des droits de l’homme a sommé, en juillet dernier, l’Italie d’accélérer sur ce sujet. « Il est interdit de mettre à la casse la famille », pouvait-on lire Remo Casilli/ReUTeRs en grosses lettres sous l’estrade du show de la manifestation d’hier. Un message directement adressé à Matteo Renzi, dont la promesse est de mettre « à la casse » la vieille classe politique italienne. Lui le catholique pratiquant, ancien Une bataille compliquée pour Renzi Le Parti démocrate de Matteo Renzi tente une médiation, notamment avec son aile catholique – hostile à cette mesure et qui représente une trentaine de parlementaires – ainsi qu’avec les membres du parti du centre droit, avec lequel il gouverne. La majorité ne lui est pas encore totalement acquise au Sénat alors que la procédure de vote doit commencer cette semaine. Si l’adoption pour l’enfant du conjoint est retoquée, le Mouvement 5 étoiles, grand ennemi de Renzi, menace de ne pas voter la loi. Selon les derniers sondages, l’opinion publique semble de son côté favorable à l’instauration d’unions civiles mais se montre très réservée sur la question de l’adoption. Les quinze prochains jours vont être compliqués pour le jeune leader italien, le vote final au Sénat étant prévu à la mi-février, avant celui de la Chambre des députés, à condition que le projet ne soit pas vidé de sa substance dès son passage au Sénat. g Daech et Zika : Rio en alerte avant les JO BRÉSIL À six mois des Jeux olympiques, le Brésil va commencer à mobiliser cette semaine plus de 160.000 soldats et policiers pour tenter d’enrayer l’explosion du virus Zika et assurer la sécurité de cet événement sportif mondial RIO DE JANEIRO (BRÉSIL) CORRESPONDANCE ADÈLE SMITH Depuis les attentats du 13 novembre à Paris, l’agence brésilienne de renseignements (Abin) est en alerte alors qu’au moins un demi-million de visiteurs et 10.500 athlètes sont attendus du 5 au 21 août prochain à Rio. Pays le plus durement touché par le virus Zika, avec 1,5 million de cas selon l’OMS, le Brésil a recensé près de 3.500 cas suspects de microcéphalie depuis octobre dernier contre 150 cas confirmés en 2014. De plus en plus de pays déconseillent aux femmes enceintes de se rendre au Brésil, dont le ministre de la Santé a déclaré cette semaine que le pays était déjà « en train de perdre la bataille » contre Zika. L’OMS s’attend à 3 à 4 millions de cas sur le seul continent américain cette année. Cette crise sanitaire intervient au pire moment pour un Brésil en pleine récession, alors que les ventes de billets pour les JO sont en dessous des attentes. Le terrorisme s’est hissé en tête d’une dou- zaine de menaces recensées par les autorités. Quelques jours après les attaques de novembre à Paris, l’un des bourreaux présumés de Daech, Maxime Hauchard, avait explicitement menacé Rio dans ce tweet : « Brésil, vous êtes notre prochaine cible. » Le journal O Globo a publié jeudi une enquête sur un vaste réseau de trafic présumé de faux passeports brésiliens et européens impliquant des citoyens syriens qui projetaient de se rendre en Europe et aux États-Unis. Une évolution « préoccupante », selon Paulo Storani, consultant international en sécurité. « Rien n’empêche des cellules de terroristes de s’infiltrer parmi les réfugiés et de rester incognito dans le pays », explique-t-il. De source diplomatique européenne, aucune menace avérée n’a été signalée à ce jour, mais sous la pression occidentale, le Brésil a accepté de renforcer sa coopération internationale sécuritaire. Un centre antiterroriste, qui n’existait pas pour la Coupe du monde, verra le jour prochainement à Rio. « Nous avons le sentiment que le Brésil a pris conscience du danger, qu’aucun aspect n’est négligé », souligne cette même source. Les services de renseignements intérieurs, et non plus seulement extérieurs, échangent leurs informations avec leurs homologues occidentaux notamment. La coopération purement opérationnelle (recherche Pendant la Coupe du monde de football 2014, au Brésil. PhoToshoT/iCon sPoRT d’explosifs, armes biologiques, etc.) s’est aussi fortement améliorée. Dix délégations particulièrement ciblées Le directeur général de l’Abin, Wilson Trezza, a évalué à dix le nombre de délégations sportives considérées comme des cibles « hautement sensibles » dont celles de la France, des États-Unis, de la GrandeBretagne et d’Israël. « La tenue d’un événement aussi global et médiatique fera de Rio une cible idéale pour les terroristes, mais la ville sera aussi probablement la plus sûre au monde », tempère Fernando Brancoli, professeur en relations internationales à l’université fédérale de Rio de Janeiro. Plus de 80.000 forces de l’ordre à Rio cet été, ce sera le double de Londres. Plus qu’une attaque de l’État islamique, c’est en réalité un « loup solitaire » que l’Abin redoute le plus. Le phénomène de radicalisation sur Internet a prouvé en France et aux États-Unis qu’il est particulièrement difficile à détecter. Or, le Brésil ne s’est toujours pas doté, à ce jour, d’une loi sur le terrorisme. Résultat : manque de cadre légal, d’expérience et de moyens, selon les experts brésiliens et étrangers. « Il est très facile de se procurer les ingrédients pour fabriquer une bombe artisanale à Rio », souligne Fernando Brancoli. En revanche, les écoutes administratives autorisées en France sous conditions, ne le sont pas au Brésil. Les quelques 17.000 kilomètres de frontières – particulièrement poreuses – constituent l’autre grande faiblesse du pays. « Les terroristes peuvent emprunter les mêmes routes que les trafiquants de drogue et d’armes », rappelle Paulo Storani. g 10 | InternatIonal JDD | 31 janvier 2016 Le milliardaire Donald Trump (à gauche) brise les codes des campagnes électorales américaines pendant que le croyant Ted Cruz (à droite) met la religion au cœur de son discours. Paul sancya/aP/sIPa, Brendan HoFFman/getty Le populiste contre le radical ÉTaTS-uniS Le caucus de l’Iowa, premier scrutin des primaires pour la présidentielle, va départager les deux candidats en tête des sondages chez les républicains, Donald Trump et le sénateur du Texas, Ted Cruz Images/aFP deS MoineS (ioWa, ÉTaTS-uniS) ENVOYÉE SPÉCIALE Karen laJon @karenlajon Rater un débat avant les fameux caucus de l’Iowa relevait de la folie. Un homme s’était pourtant déjà autorisé cette entorse aux bonnes règles des primaires, l’acteur candidat Ronald Reagan ! On peut affirmer sans trop se tromper que Donald Trump aime le rock and roll. En bande-son, à chacune de ses interventions, on retrouve la gouaille d’un Mick « Rendre sa grandeur à l’Amérique » Jagger, la voix d’un Elvis Presley remasterisé, ou encore celle du Donald Trump ne doit rien à très sexy Bon Jovi. On peut aussi personne. Il se paye sa campagne affirmer avec certitude que Donald électorale, « ce qui m’évitera ces Trump a un faible pour les créasordides calculs de renvoi d’ascentures féminines. Il suffit de voir seur, une fois que je serai élu », et débarquer son épouse, sa fille et ses se moque de la couverture médiatique des journalistes. Sans parler belles-filles, toutes haut perchées sur des escarpins Louboutin, pour de ses concurrents. Au cours de sentir le frémissement de ravisseson meeting, il ne cite son rival ment des mâles dans l’assistance. Jeb Bush que pour mieux l’huEnfin, on peut aussi affirmer que le milier. Pas un mot sur cet autre milliardaire voue une passion sans adversaire qu’il a épargné longlimite à l’argent. « Money, money, temps, le sénateur du Texas Ted money », le terme a été prononcé Cruz. Il faut dire que Cruz lui un million de fois, mardi, dans la fait de l’ombre dans cet État très petite ville de Marshalltown, dans conservateur de l’Iowa. Redoul’Iowa, une soirée placée sous le table personnage que ce Donald signe de la provocation made in Trump dont l’existence politique Trump. n’a pris forme qu’il y a quelques Trop fort le milliardaire ! Non mois et qui refuse toujours d’être seulement le candidat républicain considéré comme un « politicien ». Avec lui, s’est dispensé de la forme prime p a r t i c i p e r a u « Je ne veux pas sur le fond : débat de son parti qu’il s’agisse de qui avait lieu au de généraux l ’a r g e n t q u ’ i l même moment qui viennent a a m a s s é, d e s à quelques kilocoups tordus m è t r e s d e l à , couiner sur tous des lobbyistes mais en plus il les plateaux télé » de Washington s’est offert le luxe de lever plus de Donald Trump qu’il a utilisés et 6 millions de dolqu’il dénonce aulars au profit des anciens combatjourd’hui avec le plus parfait des tants de l’armée, lors d’une réunion cynismes, ou du fameux mur qu’il entend bien faire construire entre quasi improvisée dans l’auditorium de la très solennelle Drake Unile Mexique et les États-Unis. « Et versity. La veille, tout le monde ce sont les Mexicains qui paieront, parlait déjà de suicide politique. croyez-moi. » Hillary au coude-à-coude avec Bernie Selon le dernier Sondage d’intentions de vote pour les caucus démocrates de l’Iowa qui se déroulent demain, Hillary Clinton et son principal rival, le sénateur du Vermont Bernie Sanders, seraient quasiment à égalité, avec 45 % pour ce dernier et 48 % pour l’ancienne secrétaire d’État. Il y a huit ans, Barack Obama avait remporté ce premier scrutin des primaires contre Hillary Clinton, ce qui avait déclenché une dynamique en sa faveur. Mais l’ex-First Lady reste la favorite au niveau national pour la nomination avec plus de 20 points d’avance sur Sanders. K.l. « My whole thing is to bring America great again » (« mon objectif est de rendre sa grandeur à l’Amérique »). Voilà ce que Donald Trump répète à l’envi, et les vétérans qui sont là ne veulent pas entendre autre chose. « Quelqu’un doit remettre ce pays en état et Trump est l’homme de la situation. » La même phrase est répétée par Vincent Meek, 59 ans, six ans dans l’armée de l’air américaine, ancien de l’opération Tempête du désert pendant la première guerre du Golfe, ou encore par Roy Brad-bury, 73 ans, ancien de la légion américaine, ex-maire d’une bourgade proche de Saint-Louis dans le Missouri voisin. Ils s’accordent à dire que le bonhomme a eu bien raison d’éviter le débat. « Il n’a besoin de personne, il dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas. » Flatter la virilité de l’homme, Trump sait y faire. Le vétéran John Wayne (un homonyme, ça ne s’invente pas), né un 4 juillet (le jour de la fête nationale, ça ne s’invente pas davantage) a été amené de son Texas natal, afin de démontrer que l’Américain n’est jamais Monsieur Tout-le-Monde mais un héros, mieux un surhomme. La preuve, John Wayne parcourt la scène en long et en large sans boiter. Et pourtant, cet ex-béret vert ami de Chris Kyle, ce soldat dont le film American Sniper a raconté la légende, a perdu une jambe en 2008, lors d’une bataille féroce en Afghanistan. Le petit bonhomme au visage encore juvénile raconte qu’il a porté une partie de ce membre déchiqueté, tout en grimpant la montagne afghane. Un héros comme Donald les aime, lui qui réclame à cor et à cri des généraux de la trempe de Patton, et pas de ceux qui « viennent couiner et révéler comment fonctionne notre armée sur tous les plateaux télé ». « Nous ne gagnons plus », s’énerve le candidat, « même cet accord nucléaire iranien, regardez un peu ce que fait ce Rohani. Il signe avec la France, l’Italie, et nous l’Amérique, qu’estce qu’on a ? » L’argent, toujours, Donald Trump ne connaît peutêtre pas grand-chose aux questions de politique étrangère mais il sait lire et compter. « Cent quarante Airbus, voilà ce que l’Iran a acheté à la France. » attaque Donald Trump pour s’être défilé, il se moque : « Oh Donald a l’âme fragile, il n’a pas compris que cette campagne électorale, c’est un entretien d’embauche qui dure des Le vote évangélique mois. » Il lui propose même un et l’héritage de Reagan face-à-face. Las, le jour du débat, Et il sait avancer ses pions, Trump parade non loin, comme s’il refuser la lumière quand il le faut. narguait son adversaire en étant Quitte à ce que cela paraisse profitoujours là où personne ne l’attend. ter à son adversaire le plus sérieux Trump triomphant et Cruz affaipour ce scrutin de l’Iowa, l’ultrabli ? Perdre l’Iowa, où le sénateur conservateur Ted Cruz, 44 ans. texan semblait être favori grâce au En refusant de débattre avec lui vote ultra-conservateur, le mettrait et ses autres challengers, Trump en difficulté pour la suite et rendrait a projeté Cruz sous les feux de la la nomination républicaine plus rampe et bouscule ce candidat enfacile pour Trump, selon certains combrant qui semblait avoir consiobservateurs. Cela viendrait comdéré comme acquis le fameux vote pliquer les trois primaires suivantes évangélique, vital pour remporter la de février, dans le New Hampshire, victoire côté républicain. Tout était la Caroline du Sud et le Nevada, puis pourtant plutôt bien le Super Tuesday du 1er mars parti pour le Texan. « Donald n’a pas Sa performance très lors duquel une huilée mercredi compris que cette dizaine d’États se prononcesoir, à Des Moines, campagne, ront, dont le en compagnie de Texas, évideml’ex-gouverneur du c’est un entretien ment crucial Texas Rick Perry, sur d’embauche un mode ultra-bipour Ted Cruz. blique, était encou- qui dure des mois » La stratégie inérageante. Ted Cruz Ted Cruz dite et illisible de a affiché ses fortes son rival Trump, convictions conseret qui semble lui vatrices devant un auditoire acquis. réussir, rend le dénoument électoral « Le droit à la vie est fondamental, des caucus de l’Iowa demain soir le mariage concerne un homme et compliqué. Deux hommes, égaleune femme, et le deuxième amenment rivaux dans la course répudement n’est pas fait pour chasser blicaine à la Maison-Blanche, sont mais un choix donné par Dieu pour venus soutenir Donald Trump lors défendre sa famille et ses enfants. » de sa récolte de fonds pour les vétéEt le voilà qui cite Ronald Reagan, rans cette semaine : Mike Huckabee l’ancien président que chaque canet Rick Santorum. Tous deux ultradidat républicain veut s’approprier. conservateurs avaient gagné l’Iowa, Une femme approuve dans le premier en 2008 et le second en l’assistance. « Il a raison, et d’ail2012 mais avaient très vite chuté leurs j’ai voté deux fois pour ce grand dans les étapes suivantes. Un signe homme, Reagan, en 1980 et 1984. » de mauvais augure pour Donald BJ Parker, 83 ans, fait partie des Trump ? Il y a fort à parier que ce volontaires qui travaillent pour le rappel historique a traversé l’esprit candidat. Elle est venue avec sa fille, de Ted Cruz. g mariée à un soldat, et qui affirme avoir souffert de l’Obamacare, la www.lejdd.fr réforme de l’assurance santé, en perdant son travail. Ça tombe retrouvez notre infographie des bien, Cruz attaque l’Obamacare, primaires USa 2016. clamant haut et fort que cette loi dès mardi, le blog a mis sur la paille des millions de Bureau ovale gens. Qu’importe l’inexactitude, il saison 3 de attaque tous azimuts, Ted Cruz. Il François Clemenceau InternatIonal | 11 jdd | 31 janvier 2016 L’Europe du chacun pour soi miGraNts Confiscation des biens des réfugiés, expulsions, nouveau mur… L’UE vient de vivre une nouvelle semaine folle dans la crise migratoire Camille Neveux @camille_neveux Un enchaînement de chiffres, d’articles de loi et de procédures complexes qui, mis bout à bout, en dit long sur l’état de l’Union européenne. Cette semaine a été marquée par l’adoption et l’annonce de mesures « tantôt ridicules, parfois odieuses, toujours impuissantes », regrette le député européen (PPE, droite) Alain Lamassoure. Le JDD retrace le récit de cette folle semaine. b luNdi, Bruxelles meNaCe de sortir la GrèCe de sCheNGeN Réunis à Amsterdam, les ministres de l’Intérieur de l’UE plaident pour une procédure inédite : le recours à l’article 26 du code de Schengen, destiné à protéger certaines frontières intérieures pour deux ans. Estimant qu’Athènes a « sérieusement négligé ses obligations », la Commission européenne leur emboîte le pas et lance le processus en trois étapes, toutes soumises à une validation politique des États. Ce qui pourrait aboutir de fait à la suspension de la Grèce de l’espace Schengen… « Il s’agit du même jeu politique que lors de la crise de l’euro, observe Dimitris Skleparis, spécialiste des questions migratoires à la Fondation hellénique pour la politique européenne et étrangère. Chaque pays pense à son intérêt national en cherchant un bouc émissaire. Il s’agit de faire pression mais au fond, tout le monde sait que la Grèce créera plus de problèmes hors de Schengen : son sauvetage financier serait mis en danger, les migrants trouveraient une manière de continuer leur chemin illégalement et le parti d’extrême droite Aube dorée en profiterait. » b merCredi, le daNemark saisit les effets des miGraNts Ce n’est pas un vote, mais un plébiscite : à une écrasante majorité, le Parlement danois adopte une réforme du droit d’asile, qui prévoit de saisir les biens de valeur des migrants, de diminuer leurs droits sociaux et d’allonger les délais du regroupement familial. Des mesures que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés accuse de « nourrir la peur et la xénophobie ». « On essaie de se débarrasser de la pire crise humanitaire que l’Europe ait connue depuis la Seconde Guerre mondiale avec des mesures scélérates et une stratégie d’endormissement des consciences, regrette François Gemenne, chercheur à l’université de Liège et à Sciences-Po Paris. C’est le début de la dislocation de l’Union européenne comme espace politique. » b Jeudi, expulsioNs eN suède et eN fiNlaNde Deux avions charter pour l’Irak sont déjà prêts. La Suède annonce l’expulsion de 60.000 à 80.000 demandeurs d’asile déboutés (163.000 demandes ont été déposées l’année dernière), la Finlande 20.000. Les Pays-Bas, qui assurent la présidence tournante de l’UE, proposent de renvoyer en Turquie les migrants fraîchement arrivés en Grèce, en échange de l’installation de 250.000 réfugiés venus de Turquie. Un chassé-croisé critiqué par les ONG, qui pourrait même être contraire à la Convention de Genève… Dans le même temps, l’Allemagne durcit à son tour les conditions du regroupement familial, ainsi que les conditions d’asile pour les ressortissants algériens, marocains et tunisiens. Ces pays sont désormais considérés comme « sûrs » - c’est-à-dire suffisamment stables pour qu’ils y retournent par Berlin. « Partout en Europe, les états sont en compétition pour être le moins attractif possible, résume Anders Hellström, chercheur à l’Institut de recherche sur les migrations de l’université de Malmö (Suède). En Scandinavie, notamment, les sociétés sont fortement polarisées, avec une majorité qui veut apporter sa contribution auprès des réfugiés et une autre frange réticente. Les hommes politiques sont débordés. » L’appel lancé le même jour à Paris par Filippo Grandi, le nouveau haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, est tombé à plat. « L’Europe doit mettre en œuvre ses propres décisions, plaide-t-il. Les événements tragiques de Paris ou de Cologne ont jeté une lumière négative sur sujet. Mais les réfugiés sont des êtres humains avec un énorme potentiel. » Suite au Conseil européen de la mi-octobre, sur les 98.000 migrants à relocaliser de la Grèce et de l’Italie vers un autre État membre, seuls 414 avaient été pris en charge fin janvier, dont 62 en France… « Bien gérée, leur arrivée peut devenir un investissement et contribuer au futur de nos sociétés, renchérit le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurría. Les leaders européens ne peuvent pas fermer les yeux sur cette crise. » b veNdredi, la hoNGrie réfléChit à uN Nouveau mur Après avoir fermé sa frontière avec la Serbie et la Croatie, Budapest reconnaît songer maintenant à construire une nouvelle clôture avec la Roumanie. La conférence humanitaire de Londres sur les réfugiés syriens, qui doit se tenir jeudi, puis le Conseil européen des 18 et 19 février s’annoncent tendus. « Comme avec la crise de l’euro, nous avions les moyens de traiter la question de la politique migratoire et d’asile en amont, déplore le député européen Alain Lamassoure. Mais les dirigeants nationaux ne mettent en place les politiques européennes que lorsqu’ils sont au bord du gouffre. Les états doivent se ressaisir pour appliquer les décisions qu’ils ont eux-mêmes prises. Le national-égoisme ne fonctionne pas. La solution est européenne. » b samedi, Nouvelle traGédie eN mer éGée Le matin, le chef du gouvernement italien Matteo Renzi déclare qu’il ne « laissera pas faire ceux qui veulent détruire Schengen et l’Europe ». Au même moment, au moins 37 réfugiés – dont des enfants – trouvent la mort dans un nouveau naufrage en mer Égée. g Des gendarmes turcs transportent le corps sans vie d’une des 37 victimes du naufrage d’hier. Ces Syriens, Afghans et Birmans venant de Turquie tentaient de rallier l’Europe par la Grèce. Ozan KOse/aFP 12 | Autour du monde Syrie Genève III est-il condamné à l’échec ? lejdd.fr Le grand angle diplo de François Clemenceau : « Poutine plombé par son pétrole » Le Palais des Nations à Genève n’en est pas à ses premières négociations de paix. Indochine, Afghanistan, Bosnie, et déjà Syrie en 2012 puis en 2014. Cette fois-ci, l’hôte des lieux s’appelle Staffan de Mistura, un diplomate suédo-italien qui vient de fêter lundi ses 69 ans, le troisième médiateur des Nations unies depuis le début de la guerre en Syrie, après Kofi Annan et Lakhdar Brahimi, deux vétérans de la diplomatie mondiale qui ont jeté l’éponge sur le dossier syrien. Vendredi soir, Staffan de Mistura a d’abord reçu la délégation du régime de Damas présidée par Bachar Al-Jaafari, l’ambassadeur syrien aux Nations unies depuis dix ans, « la voix de son maître » selon un diplomate français. Hier soir, le médiateur a fini également par accueillir la délégation de l’opposition syrienne. Dirigée par le général Al-Zoubi, un ancien officier de l’armée d’Assad qui a fait défection pour rejoindre l’Armée libre de Syrie dont il a pris la tête du commandement Sud, elle rendra compte de ses travaux à Riad Hijab, le président du haut-comité de négociation, un ancien Premier ministre de Bachar lui aussi passé, depuis 2012, dans le camp de l’insurrection. « Sa voix est de plus en plus écoutée au sein de l’opposition », raconte une source diplomatique JDD | 31 janvier 2016 Staffan de Mistura et Bachar Al-Jaafari, vendredi à Genève (Suisse). rEUtErS selon laquelle les différents courants de la sphère antirégime jugent Hijab « crédible » dans sa posture de fermeté face à tous ceux qui le supplient de faire des compromis à Genève. Diplomatie de la navette « Mistura est pris au piège des Américains et des Russes qui veulent lui dicter les termes de la médiation », signale un officiel français informé des tractations en cours. Mais l’émissaire de l’ONU a tenu bon jusqu’à présent sur la revendication clé de Washington et de Moscou qui voulaient inclure, au grand dam de la Turquie, une représentation kurde dans la délégation de l’opposition. Mistura n’a rien cédé non plus à l’opposition qui exigeait l’arrêt immédiat des bombardements de populations civiles avant d’entamer toute discussion. Il a refusé également que le sort politique de Bachar El-Assad soit une condition sine qua non de toute poursuite des débats. Mistura parie sur une diplomatie de la navette et des contacts informels plutôt que de compter les invectives entre les deux délégations si elles devaient se retrouver face à face. Pour amadouer les Russes, il a accepté que des opposants tolérés par Damas et appuyés par Moscou travaillent en coulisses des négociations sans y prendre part. Le processus est prévu pour durer six mois. Beaucoup dépendra de la situation sur le terrain. Hier, MSF mentionnait la mort de faim de 16 nouveaux habitants de Madaya, toujours assiégée par l’armée syrienne. Par dépit ou pour conjurer le pire à Genève, la délégation de l’opposition s’est installée à l’hôtel de la Paix. François ClemenCeau @Frclemenceau dernière heure algérie La présidence a confirmé hier la création d’une nouvelle organisation des services secrets née de la dissolution du tout-puissant Département du renseignement et de la sécurité, qui depuis vingt-cinq ans régentait la vie politique et sécuritaire du pays. Désormais, les renseignements seront supervisés par trois entités, coordonnées par un proche du président Bouteflika, qui poursuit depuis plusieurs mois une stratégie de concentration des pouvoirs. AFP 4 C’est, en milliards de dollars, la somme qui aurait été détournée par l’État malaisien au détriment du fonds souverain 1MdB, selon la justice suisse. Le Premier ministre, Najib Razak, est soupçonné d’être impliqué dans ce vaste scandale financier, après la découverte en juillet d’un versement de 700 millions de dollars (635 millions d’euros) sur ses comptes personnels. Raúl Castro à Rome, en mai 2015. CAmillA morANdi/rEX /SiPA Le Leader de La SeMaine Qu’elle est loin l’époque où le Líder Máximo, dans son uniforme vert olive, déambulait pour la première fois de sa vie dans la Ville Lumière, ou sillonnant les vignes un verre de chablis à la main… Alors qu’il quittait l’Élysée, Danielle Mitterrand avait froissé le protocole en embrassant le vieux barbudo sur les deux joues. Raúl Castro n’a clairement pas le charisme de son frère aîné. N’est-ce pas François Hollande qui avait avoué avoir senti le « vent de l’Histoire » en renIl est arrivé hier en France contrant Fidel en pour la première visite mai à La Havane ? d’État d’un président Même si le cubain depuis celle de Fidel président français Castro il y a vingt et un ans tutoie Raúl, la relation franco-cubaine est devenue moins « romantique », plus professionnelle. Lors de la rencontre bilatérale qui aura lieu demain après-midi à l’Élysée, deux hommes seront présents autour du Président : Jean-Pierre Bel, l’ancien patron du Sénat, marié à une Cubaine et émissaire spécial de François Hollande pour l’Amérique latine, et Matthias Fekl, étoile montante du Quai d’Orsay, chargé du commerce extérieur et du tourisme, qui compte déjà deux voyages à Cuba à son actif pour doper les investissements français, alors que les relations commerciales plafonnent à 200 millions d’euros, ce qui « n’est pas à la hauteur des ambitions », dit-on côté français. François Hollande a été le premier chef d’État occidental à se rendre à La Havane l’an passé. Barack Obama devrait s’y rendre à son tour d’ici à la fin de l’année. Avec ou sans levée de l’embargo par le Congrès à majorité républicaine, le commerce va refleurir entre Cuba, les États-Unis et l’Europe. Le département du Trésor a opportunément allégé mardi certaines sanctions dans le domaine des exportations et des voyages d’affaires. Cuba, terre de business : la compétition ne fait que commencer. F. C. Raúl CastRo Chine Les États-Unis ont reconnu hier avoir envoyé vendredi un navire de guerre croiser à proximité d’une île à la souveraineté contestée en mer de Chine méridionale. Le destroyer multirôle lance-missiles Wilbur s’est approché à moins de 12 milles de l’île Triton, dont la Chine, Taïwan et le Vietnam réclament la propriété. Pékin, qui a dénoncé une violation de ses eaux territoriales, revendique la quasitotalité de cette zone maritime, véritable carrefour stratégique. US NAVY/EPA Turquie Les autorités turques ont accusé, hier, l’aviation russe d’avoir violé la veille leur espace aérien. Selon Ankara, un bombardier Su-24 aurait décollé de la Syrie voisine en fin de matinée et pénétré dans l’espace aérien turc. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a averti la Russie qu’elle devrait faire face aux « conséquences de ses actes irresponsables ». Le ministère russe de la Défense a répondu qu’il s’agissait de « propagande sans fondement ». Fin novembre, un Su-24 russe avait été abattu par des chasseurs turcs. La phraSe « aucun policier ne veut tirer sur un réfugié, je ne le veux pas non plus. Mais en dernière instance, on doit pouvoir avoir recours aux armes » Frauke petry, présidente du parti populiste allemand afd, dans un entretien à un quotidien régional hier société jdd | 31 janvier 2016 | 13 VIoLENCES La décision de François Hollande est imminente. Les filles de Jacqueline Sauvage n’en doutent pas, le chef de l’État va libérer leur mère La grâce, elles y croient CHRISTEL DE TADDEo @cdetaddeo « Elle est sortie ! » Dans le cabinet des avocates de Jacqueline Sauvage, ses trois filles font « comme si » pour les besoins d’un shooting avec un photographe du magazine Elle. Il est 18 h 30 hier soir lorsqu’elles sortent asséchées de la séance après vingt-quatre heures de marathon médiatique. Attrapent leur manteau dans le hall d’entrée sans desserrer la mâchoire, pressées de rentrer chez elles. Au lendemain de leur entrevue avec François Hollande, il semble acquis que leur mère sera graciée dans les prochains jours. D’ailleurs, Pascale Boistard, la secrétaire d’État aux Droits des femmes, a opportunément rejoint le comité de soutien de Jacqueline Sauvage hier après-midi. Une preuve de plus que le vent a tourné. Hollande les a « considérées comme de véritables victimes » Vendredi, à la sortie d’une entrevue qui aura duré plus d’une heure avec le président de la République à l’Élysée, Sylvie, Carole et Fabienne Marot avaient du mal à contenir leur joie. François Hollande leur a confié dans un sourire complice que ce n’est pas tous les jours qu’il a un consensus sur une question délicate. « Elles ont eu le sentiment de ne pas être jugées, pour une fois », explique Me Janine Bonaggiunta. « Pendant les procès, leur parole a été mise en doute, on leur a reproché leur silence, leur inertie, on les a accusées de ne pas avoir protégé leur mère, explique Me Nathalie Tomasini. François Hollande les a écoutées avec bienveillance. Il les a considérées comme de véritables victimes. » Il aura néanmoins fallu ce formidable élan populaire pour que le chef de l’État français accueille leur douleur. Il leur dira qu’il a été « extrêmement sensible » à ce qu’il décrit comme des « circonstances exceptionnelles », laissant entendre qu’il allait accéder à leur requête. Les filles de Jacqueline Sauvage, vendredi soir devant l’Élysée, après leur entrevue avec François Hollande. PhiliPPe STeRC/PanoRamiC Derrière le cas d’espèce pourtant, Jacqueline Sauvage, 68 ans, condamnée à dix ans de réclusion pour le meurtre de son mari après quarante-sept ans de sévices, est devenue un symbole. Elle n’est pas devenue une icône pour les femmes victimes de violences, même si beaucoup de femmes battues lui ont écrit en prison. Elle incarne la faillite d’un système. N’en déplaise au magistrat honoraire qui a fustigé cette semaine « l’émotion de l’ignorance », la justice est parfois aveugle quand elle ne se bande pas les yeux. « Une bonne victime est une victime morte », martèle l’actrice Eva Darlan, qui a lancé le comité de soutien à Jacqueline Sauvage, rappelant que 118 femmes sont décédées sous les coups de leur conjoint ou ex en 2014. Elle qui a fait campagne pour François Hollande encaisse mal le refus de Ségolène Royal de prendre position « sur un fait divers ». Et le mutisme de Najat Vallaud-Belkacem ou de la secrétaire d’État chargée des Droits des femmes, Pascale Boistard, qui s’est enfin manifestée hier. La prise de position de la maire (PS) de Paris, Anne Hidalgo, au Grand Jury de RTL dimanche dernier a été un déclencheur. Les soutiens poli- tiques se sont multipliés, surtout à droite : Valérie Pécresse, François Fillon, Nathalie KosciuskoMorizet ou encore Valérie Boyer, vice-présidente des Républicains à l’Assemblée nationale, qui a réuni plus de 50 parlementaires. « Policiers et magistrats ne sont pas formés… » « On touche à un sujet tabou », estime Carole Arribat, assistante de direction de 39 ans, l’une des initiatrices de la pétition en soutien à Jacqueline Sauvage. « Les violences faites aux femmes, c’est une question très sensible et cela remet énormément de choses en cause, mais cela parle à l’opinion publique. » Pour Eva Darlan, « la prise en charge des victimes est catastrophique » : « Policiers et magistrats ne sont pas formés… Nous ne sommes pas protégées. C’est aussi une violence de la société. » Hier à 20 heures, la pétition citoyenne demandant la grâce présidentielle pour Jacqueline Sauvage réunissait 430.335 signatures. Le comité de soutien n’abandonne pas « le combat ». Pour l’instant, rappelle Eva Darlan, Jacqueline Sauvage « est toujours entre quatre murs ». g Un « banquier » du Hezbollah écroué à Paris BLANCHIMENT Cinq Libanais, soupçonnés de collecter l’argent du trafic de cocaïne au profit des cartels colombiens, mis en examen. D’autres arrestations en Allemagne, en Belgique et en Italie. Révélations sur l’opération Cedar STépHANE JoAHNy Le communiqué, en apparence anodin, est tombé jeudi. Au titre de la lutte contre le terrorisme, le département du Trésor américain indique avoir gelé les avoirs aux États-Unis d’une société libanaise – Trade Point International – et de ses deux dirigeants dont l’homme d’affaires de 41 ans Mohamad Noureddine. Drôle de coïncidence : ce jeudi également à Paris, ce même Noureddine était écroué après avoir été mis en examen, avec quatre de ses compatriotes, pour « blanchiment de trafic de stupéfiants, blanchiment de crime ou délit en bande organisée et association de malfaiteurs »… Tout démarre un an plus tôt. En février 2015, la puissante DEA (Drug Enforcement Administration, l’agence américaine de lutte contre la drogue) transmet un « tuyau » à ses homologues français. Selon les informations recueillies par les agents américains, la collecte, à l’échelle européenne, d’argent de la revente de la cocaïne colombienne par un groupe de Libanais a d’importantes ramifications en France. L’OCRGDF (Office central pour la répression de la grande délinquance financière) prend le relais. La Jirs ( juridiction interrégionale spécialisée) de Paris nomme deux magistrats, les juges Gachon et Thouvenot. L’opération Cedar, « cèdre » en français, comme l’arbre emblématique du Liban, peut commencer. Un hasard du calendrier diplomatique Depuis quelques années, les dossiers de blanchiment d’argent de la drogue basé sur un système de compensation se succèdent chez les juges parisiens : sur fond de fraude fiscale avec la Suisse dans l’opération Virus en 2012, de trafic d’or vers l’Inde avec Rétrovirus en 2014 ou en s’appuyant sur l’opacité du business de la diaspora chinoise avec le dossier Fièvre jaune en 2015. Cette fois encore, l’enquête prend un carac- tère international. Une vaste coopération sous l’égide d’Europol se met en place. Plusieurs objectifs sont en effet identifiés en Italie, en Belgique et surtout en Allemagne. Selon une source proche de l’enquête, des collecteurs s’activent dans toute l’Europe. Puis l’argent, rapatrié à Paris, prend la direction du Liban. Physiquement dans des valises de passeurs ou encore via le système de compensation traditionnel de l’« hawala ». Des bureaux de change et autres courtiers contrôlés par Mohamad Noureddine et sa société Trade Point International prendraient ensuite le relais pour faire transiter les millions du trafic de coke vers l’Amérique du Sud, où la communauté libanaise est solidement implantée et où le Hezbollah est régulièrement accusé de s’aco- quiner avec les narcotrafiquants. La milice chiite libanaise prélèvet-elle sa dîme sur les prestations financières de Noureddine ? Les juges et les policiers français ne se seraient pas aventurés sur ce terrain-là. « Le Hezbollah a besoin d’individus comme Mohamad Zaher Noureddine pour blanchir les produits du crime et financer le terrorisme et la déstabilisation politique », soutenait jeudi un porte-parole du Trésor américain à propos de l’homme d’affaires arrêté cette semaine à Paris à sa descente d’avion alors que, hasard du calendrier diplomatique, le président iranien, dont le régime est considéré comme le principal sponsor et mentor du Hezbollah libanais, entamait une visite historique en France… g * 14 | société JDD | 31 janvier 2016 La grande peur des juifs de eXCLUsif La Fondation du judaïsme français a commandé à l’Ipsos une grande enquête sur le « vivre ensemble ». Le JDD publie les C Marie-Christine tabet @mc_tabet ’est une enquête hors norme. Par sa nature et son ampleur. Pendant dix-huit mois, Ipsos a sondé les Français sur le « vivre ensemble » en n’éludant aucun sujet : religion, racisme, antisémitisme, terrorisme… Particularité supplémentaire de cette étude : elle donne la parole aux juifs et aux musulmans. La Fondation du judaïsme français, institution reconnue d’utilité publique, qui œuvre au rayonnement de la culture juive, a tout d’abord commandé une étude sur la « perception et les attentes de la population juive », puis a décidé de l’étendre aux musulmans de France… Mais comment interroger des juifs ou des musulmans dans un pays qui refuse de découper sa population en catégories ethnicoreligieuses ? « Il n’existe aucune définition parfaite de qui est juif ou musulman et de qui ne l’est pas, tant ces groupes sociaux ne se définissent pas uniquement par la religion, explique Brice Teinturier d’Ipsos. La meilleure façon de procéder est de partir de la définition par l’interviewé lui-même, quels que soient les critères qu’il mobilise pour cela : religieux, culturels, familiaux… C’est ce que nous avons fait et c’est ce qui permet d’obtenir l’échantillon le plus représentatif, le moins biaisé et qui reste très significatif même sur une base réduite. » Les premiers entretiens ont débuté en juillet 2014 et se sont achevés en juin 2015. Avant et après la tuerie de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher (lire note technique). « Ce n’est pas un coup médiatique, renchérit Ariel Goldmann, le président de la Fondation du judaïsme français, nous pourrions mettre en place un baromètre. Notre enquête ne prend pas en compte les effets des attentats du 13 novembre. Quels en ont été les effets ? Des rangs resserrés ? Une défiance accrue ? » DES PRÉJUGÉS TENACES Pour chacune des propositions suivantes, dites si elle correspond tout à fait, plutôt, plutôt pas ou pas du tout à ce que vous pensez. (Réponses exprimées en %) 66 pensent que dans la vie on % ... ne peut pas faire confiance à la plupart des gens 54 estiment que l’immigration % ... n’est pas une source d’enrichissement pour la France 53 estiment qu’on en fait plus % ... pour aider les immigrés que pour aider les Français 49 considèrent que les chômeurs % ... ne font pas de réels efforts pour trouver un travail 39 % 30 % ... considèrent que la pauvreté n’est pas la principale cause d’insécurité, c’est l’immigration... ... considèrent qu’une réaction raciste peut se justifier Vous même, au cours de l’année, avez-vous personnellement rencontré des problèmes (insultes, agressions...) avec une ou plusieurs personnes issues des groupes suivants ? Des personnes d’origine maghrébine Des Roms 29 % 26 13 Des personnes de confession catholique Des personnes d’origine asiatique 8 4 2 * subsaharienne ENQUÊTES RÉALISÉES PAR IPSOS POUR LA FONDATION DU JUDAÏSME FRANÇAIS : - Population globale : échantillon national représentatif de 1.005 personnes, interrogé via notre panel online du 15 au 24 juillet 2014. Méthode des quotas (sexe, âge, profession de la personne de référence au sein du ménage, région et catégorie d’agglomération). - Répondants juifs. Phase qualitative : 45 entretiens semi-directifs approfondis en Île-de-France, à Toulouse et Strasbourg. Phase quantitative : il n’existe pas de définition satisfaisante de qui est juif et qui ne l’est pas. Il n’existe pas non plus de statistiques permettant d’appliquer des quotas. La méthode utilisée a été celle de l’autodéfinition par les personnes elles-mêmes. Est juif celui ou celle qui se considère comme tel. À partir de plusieurs dizaines de milliers de panélistes interrogés, on a ainsi pu extraire un échantillon de 313 personnes se déclarant comme juif ou juive, auquel le questionnaire a été administré du 24 février au 8 juin 2015. Cette méthode a l’avantage de limiter les biais que l’on rencontre lors de recrutement « dans la rue » ou à proximité de lieux de culte. - Répondants musulmans : pour les mêmes raisons, il a été procédé exactement de la même façon que pour les répondants juifs. Un échantillon de 500 personnes se déclarant musulmans ou musulmanes extrait de notre panel online a ainsi été interrogé du 24 février au 9 mars 2015. b La MéfianCe généraLe… aux musulmans, 41 % d’entre eux Les résultats révèlent une disent avoir essuyé personnelleFrance de la méfiance, qui dans sa ment des remarques ou des insultes. grande majorité n’a pas confiance Des résultats vertigineux. en son avenir (61 %) et encore b Le ChoC des reLigions… moins en l’autre. Ils sont 66 % à penser qu’« on ne peut pas faire 49 % des Français interrogés confiance à la plupart des gens » et par Ipsos pensent que « les catho54 % que « l’immiliques représentent moins de la gration n’est pas une source d’enri- Depuis le début moitié de la popuchissement ». Un des années 2000, lation » mais que tiers des Français « les musulmans pèsent pour plus considère qu’« une l’époque « des situation raciste cousins » est révolue de 20 % et les juifs peut se justifier ». pour 10 %. Les Un juif sur dix dit études sur le sujet, avoir été personnellement victime notamment celles de l’Institut nad’une agression physique. Quant tional d’études démographiques Les musulmans victimes de rejet « QU’EST-CE QU’ON A FAIT AU BON DIEU ? » Les états d’âme des Verneuil, Christian Clavier et Chantal Lauby, un couple de provinciaux anéanti par le mariage de leurs quatre filles avec un juif, un musulman, un Asiatique et un Noir, ont fait rire la France entière. Ipsos a posé la question : « Si votre fils ou fille épousait… » Les Français se révèlent plus ouverts que les Verneuil. Ils réagiraient majoritairement bien dans la plupart des situations : 87 % ne trouveraient donc rien à redire à un mariage avec un athée, 80 % avec un Asiatique, 71 % avec un juif, 66 % avec un Noir et 53 % avec un homme d’origine maghrébine. En revanche, ils prendraient mal les mariages de leurs fils (52 %) et de leurs filles (56 %) avec un(e) musulman(e). Une hiérarchie qui traduit la confusion, dans l’esprit des Français, entre islam et fondamentalisme. Les juifs et les musulmans ont été soumis aux même questions. Plus attachés à la religion, ils apparaissent moins enclins aux mariages mixtes. Pour les juifs, la « pire » configuration serait le mariage d’un enfant avec un musulman (77 % réagiraient mal), et, pour ces derniers, ce serait l’union avec une personne de même sexe (74 %). Les musulmans et les juifs placent rétrospec- tivement au sommet de leurs préoccupations « le racisme et le terrorisme » et « l’antisémitisme et le terrorisme » quand la population globale répond le chômage. Au passage, les musulmans expriment une difficulté à vivre leur religion en France. Or le sondage d’Ipsos montre une véritable intolérance vis-à-vis des religions et de l’islam en particulier. Moins de 30 % des Français pensent que les personnes de confession musulmane sont bien intégrées… Le simple voile qui laisse apparaître le visage suscite l’agacement ou le rejet d’un Français sur deux. Ils sont 30 % à être également hostiles au port de la kippa. Si 53 % d’entre eux approuvent la construction de mosquées, ils sont franchement opposés aux menus spécifiques (63 %), aux dérogations d’absence pour cause de fêtes religieuses (71 %)… Dans leur grande majorité, les musulmans, comme le reste de la population française, rejettent sans ambiguïté l’État islamique (78 %) et condamnent les départs en Syrie (77 %). Les 16 % qui refusent de se prononcer sur Daech et les 10 % qui déclarent « comprendre les candidats au voyage en Syrie », par la terreur et l’incompréhension qu’ils inspirent, occupent le devant de la scène et l’imaginaire collectif. M.-C.t. 91 % 90 ... sont très soudés entre eux 56 ... ont beaucoup de pouvoir Des personnes d’origine africaine* Des personnes de confession juive Répondants population globale Répondants musulmans Oui 27 Des personnes de confession musulmane Voici un certain nombre d’opinions que l’on entend parfois à propos des juifs. Pour chacune d’entre elles, pensez-vous qu’elle est tout à fait vraie ? Les juifs... ... sont globalement plus riches que la moyenne des Français 56 66 53 62 ... sont plus attachés à Israël qu’à la France 41 ... sont un peu trop présents dans les médias ... sont souvent plus intelligents que la moyenne 25 26 ... ne sont pas vraiment des Français comme les autres 24 29 13 18 Il y a un peu trop de juifs en France 31% Pour de la population globale, 5 à 8 de ces préjugés sont vrais (Ined), tendraient à montrer que ces deux communautés seraient en réalité entre trois et six millions, soit moins de 10 % de la population. Si une majorité de Français concèdent qu’en France, les différentes religions « coexistent plutôt bien », plus d’un sur quatre ne voit pas « l’intégrisme religieux » comme un phénomène marginal. Pis, 23 % des personnes interrogées confient avoir assisté, au cours de l’année, à des agressions contre des personnes en raison de leur religion… b L’antiséMitisMe en progression… L’étude de la Fondation du judaïsme montre que les juifs sont 74 67 51% Pour des répondants musulmans, 5 à 8 de ces préjugés sont vrais à la fois considérés comme « des Français comme les autres », plutôt « bien intégrés » (90 %). Pourtant, six Français sur dix prêtent aux juifs « une part de responsabilité dans l’antisémitisme ». Pour la grande majorité des sondés (42 %), cette part est certes « minime », mais on constate que ces derniers adhérent majoritairement à la plupart des stéréotypes antisémites. Plus de 40 % des ouvriers et… 32 % des cadres prennent pour acquis au moins cinq de ces préjugés. Ce bruit de fond « antisémite » n’est pas nouveau mais il se révèle résistant et particulièrement répandu dans la population de culture musulmane. Fruit d’un étrange mélange, entre LE MARIAGE MIXTE ACCEPTÉ Personnellement, comment réagiriez-vous si vous étiez confronté aux situations suivantes ? Répondants population globale Si votre fils épousait une catholique Si votre fille épousait un catholique Si votre fils épousait une athée Si votre fille épousait un athée Si votre fils épousait une femme asiatique Si votre fille épousait un homme asiatique Si votre fils épousait une juive Si votre fille épousait un juif Si votre fils épousait une Noire Si votre fille épousait un Noir Si votre fils épousait une personne du même sexe Si votre fille épousait une personne du même sexe Si votre fils épousait une femme d’origine maghrébine Si votre fille épousait un homme d’origine maghrébine Si votre fils épousait une musulmane Si votre fille épousait un musulman Bien 93 % 92 87 87 81 80 72 71 67 66 55 57 55 53 48 44 Mal 7% 8 13 13 19 20 28 29 33 34 45 43 45 47 52 56 société | 15 * jdd | 31 janvier 2016 France principaux résultats de ce sondage sur la façon dont se perçoivent et sont perçues les communautés juive et musulmane en France Me Ariel Goldmann, président de la Fondation du judaïsme français IntervIew MarIE-ChrIStInE tabEt avec un tel sondage, ne redoutez-vous pas de jeter de l’huile sur un feu déjà ardent ? B. Bisson pour le JDD « Nous voulons lancer un cri d’alarme » Je dois avouer que nous avons attendu et même hésité avant de le rendre public. Nous voulions éviter que ses conclusions ne soient détournées à des fins politiques pendant la campagne des élections régionales. Mais les réactions à l’agression d’un enseignant juif à Marseille ont été un détonateur. Lorsqu’un responsable juif enjoint les juifs à ne plus porter la kippa dans la rue, c’est que la situation est très grave. Au lieu de le blâmer, il faut comprendre ce qui se passe et cette étude le montre… Le 8 janvier 2015, au lendemain de l’attentat contre « Charlie Hebdo », un rassemblement silencieux rend hommage aux victimes, place de la République, à Paris. lionel preAu/reservoir photo concurrence communautaire, sentiment de proximité culturelle et de détestation d’Israël… « Je constate avec regret que l’antisémitisme ne fait pas que s’étendre dans la communauté musulmane, analyse Boualem Sansal, l’auteur de 2084, la fin du monde, il se fait âpre. Il se construit, se radicalise en même temps que l’islamisme se développe et se radicalise lui-même. » Pour l’écrivain algérien, « l’antisémitisme, qui, jusque-là se tenait un peu dans le vague, se donne, chez des jeunes en rupture avec la culture et l’identité françaises, de plus en plus d’images précises sur lesquelles prospère tout un discours d’exécration : le Crif, la Licra, des personnalités juives ou sup- posées telles, et même des synagogues. Il se donne aussi des héros connus pour leur position antisioniste, antiIsraël, et supposés viscéralement antisémites – Dieudonné, Soral, Houria Bouteldja… ». L’époque des « cousins » est révolue. « Le point de rupture se situe au début des années 2000, décrypte Bernard Godard, spécialiste de la question musulmane en France, il date de la deuxième Intifada. Auparavant, il y avait une volonté des deux communautés de se rapprocher. Quant à savoir si l’islam est antisémite, c’est une question très complexe. Le Coran contient des textes clairement antisémites et d’autres, au contraire, très respectueux. Les prédicateurs actuels LE TERRORISME L’ ANTISÉMITISME Diriez-vous que vous avez une bonne ou une mauvaise image de l’État islamique, de Daech ? Répondants musulmans Avez-vous le sentiment que depuis ces cinq dernières années l’antisémitisme en France... Répondants juifs Très bonne image Assez bonne image 1% ... a beaucoup diminué 1% Assez mauvaise image Je ne le connais pas assez pour me prononcer ont tendance à islamiser l’antisémitisme à leur profit… » Le sondage met en exergue cette ambiguïté. 90 % des musulmans estiment partager « beaucoup de choses en commun » avec les juifs. Ils sont 71 % à affirmer vouloir « faire changer d’avis » une personne qui « tiendraient » des propos « violents et répétés » contre les juifs. Soit une large majorité. Mais qui n’est pas entendue par la communauté juive. Après les attentats de janvier 2015, si une majorité des juifs a trouvé que les autorités musulmanes avaient suffisamment condamné les tueries, ils sont 61 % à avoir regretté le manque de réaction de la population musulmane… g 1% 1% 4% 16 % ... a peu augmenté 78 % ... est resté stable ... a peu diminué 6% 25 % Très mauvaise image 67 % ... a beaucoup augmenté 77 % des musulmans ne comprennent pas les départs en Syrie et y sont opposés 10 % des musulmans ne sont pas opposés aux départs et considèrent que c’est un choix 26 % des juifs déclarent étudier sérieusement une option de départ vers Israël ou ailleurs, à l’étranger des trente années écoulées, notamment au sein de nos écoles, là où la tolérance s’apprend et est mise en pratique. Selon notre enquête, 56 % des Français, et parmi eux 66 % des musulmans, considèrent comme acquis que les juifs sont plus riches que la moyenne… Quel échec ! Sur une communauté de 450.000 à 500.000 individus, nous comptons près de 40.000 personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté… Est-ce rattrapable ? Rien n’est jamais perdu. Lorsque les hommes politiques s’engagent, il y a un impact. Notre enquête montre une fracture nette au moment de l’affaire Ilan Halimi. La communauté juive s’est sentie Quels enseignements en tirez-vous ? abandonnée comme lors des maniLa confirmation de ce que festations propalestiniennes de l’été nous percevions. Les Français tra2014 au cours desquelles on a crié versent une crise « Mort aux juifs ! » de confiance qui a En revanche, la mobilisation des des répercussions « Nous avons pouvoirs publics sur leur rapport échoué à faire au moment de à l’autre. Ils se l’affaire Merah sentent parfois reculer les et surtout de en minorité dans préjugés » leur quartier, ont l’Hyper Cacher a l’impression que immédiatement leur pays recule et se replient rassuré la communauté juive, qui sur eux-mêmes. Cette défiance a continué à fréquenter ses lieux se transforme en une méfiance à de culte et ses écoles… l’égard de l’autre avec la conviction Plus de juifs quittent la France… de vivre un choc des religions. Plus de 70 % des juifs veulent Vous risquez de creuser un peu plus rester dans ce pays car ils estiment à juste titre que c’est leur pays. Face le fossé entre les communautés… Cette étude n’est ni accusatrice, ni à l’accumulation des agressions, généraliste. Elle est une mesure des des drames et des morts, les juifs maux qui nous rongent en tant que veulent surtout tenter autre chose ! Français. Elle est destinée à tous ceux Nous avons constaté, après l’affaire qui veulent combattre les préjugés. Merah, que de nombreuses familles Nous voulons lancer un cri d’alarme juives quittaient Toulouse. Il n’y a et appeler à un sursaut. L’enquête pas de statistiques mais on constate, est sérieuse. Elle a été réalisée sous par exemple, que les écoles juives le contrôle scientifique de Domienregistrent une baisse d’effectifs. nique Schnapper, de l’École des En Seine-Saint-Denis, il y avait, hautes études en sciences sociales, dans des villes comme Le Blancet de Chantal Bordes-Benayoun, Mesnil ou Drancy, des communaudu CNRS. L’institut Ipsos a pris tés juives florissantes qui se sont toutes les précautions pour éviter étiolées. Ces alyahs sont, avant tout, les biais. Nous nous attardons sur motivées par la peur. Parmi les 26 % l’antisémitisme car nous sommes qui envisagent sérieusement de la Fondation du judaïsme français, partir, 67 % disent vouloir quitter la mais cette enquête va bien au-delà. France en raison de l’accumulation Elle montre surtout une défiance des drames dont les juifs ont été victimes. L’idée d’Israël s’impose entre les juifs et les musulmans… Lorsqu’on interroge les Français compte tenu de la place séculaire juifs sur leurs principaux sujets d’inet théologique de Jérusalem dans le quiétude, ils évoquent le terrorisme cœur des juifs. Pourtant, il ne faut et l’intégrisme quand le reste de la pas croire que toutes ces émigrapopulation parle chômage, insécutions se passent bien. rité économique et intégrisme. Et les Le Fn ne constitue pas un parti juifs ont le sentiment que l’antisémirefuge pour les juifs... tisme a particulièrement augmenté La majorité des juifs de France chez les musulmans au cours des connait le passé xénophobe et antisécinq dernières années. Pourtant ils mite de ce parti composé à l’origine savent aussi qu’une large majorité d’anciens collabos. Ses dirigeants actuels n’ont jamais prononcé les des musulmans souhaite bien vivre en France avec toutes les compoparoles de son fondateur, Jean-Masantes de la société. rie Le Pen, mais d’anciens membres Vous mettez en cause du GUD encadrent toujours Marine Le Pen. Le FN essaie de faire croire à les pouvoirs publics ? Non, mais nous avons échoué à un vote juif en leur faveur. C’est une faire reculer les préjugés au cours supercherie ! g * 16 | société JDD | 31 janvier 2016 Libertés De nombreuses associations de défense des droits ont hier appelé à manifester à Paris et en province télex Disneyland Comparution demain pour l’homme aux pistolets Marie Quenet « Oui, oui, à la liberté ! Non, non, à l’État policier ! » En scandant des slogans de ce type, des milliers de personnes ont manifesté hier à Paris et dans des dizaines de villes en France – Bordeaux, Toulouse, Lyon, Nantes… – pour dénoncer l’état d’urgence, qui devrait être prolongé, et le projet de déchéance de nationalité. Dans la capitale, 5.500 personnes selon la police, 20.000 selon les organisateurs, ont ainsi bravé la pluie entre la place de la République et le Palais-Royal, à l’appel des collectifs Nous ne céderons pas et Stop état d’urgence. « Quelqu’un a des nouvelles de la gauche ? » « Nous ne voulons pas de ce marché de dupes, sécurité contre liberté ! », martèle Françoise Dumont, présidente de la Ligue des droits de l’homme. « C’est une atteinte massive au principe de séparation des pouvoirs puisque l’exécutif peut prononcer seul des L’état d’urgence mobilise Hier, à Paris, face au Conseil d’État. ALAIN JOCARD/AFP mesures de privation de liberté », s’alarme Laurence Blisson, secrétaire générale du syndicat de la magistrature. « En trois mois, il y a eu plus de 3.000 perquisitions administratives et à peine cinq enquêtes antiterroristes ouvertes. Cela montre que l’état d’urgence est inefficace et produit des dérives. » Dans la foule, des pancartes émergent parmi les parapluies : « L’islamophobie d’État ? Stop », « Hollande nous trahit » ou en encore « Quelqu’un a des nouvelles de la gauche ? » « L’état d’urgence risque même d’être contre-productif », estime Rémi. « Une mesure comme la déchéance de nationalité, qui vise les personnes d’origine étrangère, crée une discrimination d’État qui ne peut qu’engendrer un ressentiment envers la France. » Tandis que Tiphaine s’inquiète : « Quand on voit la montée du FN, il faut faire très attention aux outils qu’on peut laisser aux suivants… » Les collectifs prévoient déjà une nouvelle mobilisation, vendredi, devant l’Assemblée nationale. Seul incident notable, deux militaires en civil, hors service, ont été agressés en marge de la manifestation par un groupe d’individus masqués et cagoulés. g Le « bébé du double espoir » souffle ses cinq bougies MéDeCine Mis au monde pour sauver sa sœur via des cellules-souches de son cordon, umut est désormais un bambin sans histoire. Mais dans sa famille, une nouvelle prouesse médicale est tentée pour sauver son frère… Dans L’ain EnvoyéE spécialE anne-Laure barret @AnneLaureBarret La fièvre l’a empêché de souffler ses cinq bougies le 26 janvier. Umut, petit brun aux prunelles en amande, se rattrapera bientôt. Même affaibli, le garçonnet distribue, ce jeudi, des sourires espiègles, se faufile sous la table, réclame l’attention de son aînée Asya, 7 ans, et de sa mère Leyla, 29 ans. Il sait qu’on est venu pour parler de lui, que l’histoire de sa venue au monde ne ressemble à aucune autre. « Umut, c’est-à-dire Espoir en turc, a guéri sa sœur », résume sa mère. La gamine aux beaux cheveux longs et épais sourit : « Avant, j’étais très malade. » Une famille frappée par le sort En 2011, le faire-part de naissance du « bébé du double espoir » a fait la une des JT. À la baguette magique, René Frydman, père médical d’Amandine, premier bébé-éprouvette français. Le célèbre obstétricien raconte avoir simplement voulu « aider une famille frappée par le sort ». Le cauchemar de Leyla a commencé quelques jours après son premier accouchement. On lui annonce que Mehmet, aujourd’hui âgé de 10 ans, est atteint de thalassémie, une grave maladie génétique du sang. Pour lutter contre cette ané- mie sévère, il faudra le transfuser forme un duo historique avec René toutes les trois semaines. Le sort Frydman. « Elle m’a portée de bout s’acharne à nouveau trois ans plus en bout, par ses encouragements, ses tard : la petite fille dont elle est coups de fil, ses SMS. » enceinte souffre du même mal. Cette dernière n’oubliera « ja« C’était pire pour Asya. Son taux mais » la naissance d’Umut, « un d’hémoglobine était encore plus beau bébé de 3,6 kg », ni sa maman bas. La première transfusion a été si « courageuse ». Après l’annonce faite en urgence. Il a fallu l’attacher de cette prouesse médicale à l’hiver tellement c’était douloureux », se 2011, les critiques sont tombées souvient la mère. drues : « Bébé objet », « bébé médiLeyla, qui a dû lâcher son travail cament », ont raillé certains. « Quel en usine pour s’occuper de ses enenfant n’a pas une place particulière fants malades, commence à accepdans une famille ? » interroge la ter l’idée qu’elle n’aura pas d’autres sage-femme. Frydman, lui, confesse bébés lorsqu’une pédiatre évoque avoir eu envie de « pleurer » : « Les la possibilité d’un double diagnosparents voulaient le meilleur pour tic préimplantoire leurs enfants (DPI). Cette techmalades. » « On nique très lourde Après l’annonce n’a pensé qu’à permet, après une de cette prouesse n o s e n f a n t s, fécondation in quels parents ne vitro, d’identifier un médicale à l’hiver feraient pas le embryon sain (DPI 2011, les critiques maximum pour classique) mais égaleur santé ? », lement compatible sont tombées drues soupire Leyla. avec l’aîné malade. Sur le tapis du salon, ce « L’enfant peut être jeudi, Asya donneur pour son dessine une chambre d’hôpital aîné. C’est indolore puisqu’on utià deux lits. Une fillette brune, lise les cellules-souches sanguines avec un masque sur la bouche, contenues dans son cordon ombilical », détaille Arnold Munnich, le est debout au centre du dessin, le bras accroché à une perfusion. Sa généticien de l’hôpital Necker qui a travaillé en tandem avec Frydman, maman se tient derrière elle, les à l’époque chef de service à l’hôpital bras ouverts. Un grand soleil brille Antoine-Béclère. derrière la fenêtre. « Six mois après Nombreux voyages à Paris dela naissance d’Umut, ma fille a été puis les contreforts du Jura avec son greffée avec le sang de son frère », mari, incessantes prises de sang, poursuit la mère. Après avoir supdernières semaines de grossesse porté l’enfermement en chambre à l’hôtel en banlieue parisienne… stérile, des douleurs intenses et la Leyla assure qu’elle n’aurait jamais perte de ses cheveux, la petite est eu le courage de traverser cette rentrée à la maison. « Elle est guérie nouvelle épreuve sans le soutien de mais il lui faut toujours une prise Violaine Kerbrat, la sage-femme qui de sang chaque année. » Asya, elle, dit qu’elle n’est « plus malade ». La preuve, elle fait de la lutte à l’école et adore les « batailles » à la récré avec filles et garçons. « Cette technique a des chances de succès très réduites » Son frère aîné, en revanche, a toujours une santé fragile. Après Asya, Leyla a bien donné naissance à des jumelles, Sila et Nihal, conçues après DPI mais aucune n’a pu être donneuse pour Mehmet. « À ce jour, un seul bébé du double espoir est né en France. Cette technique très lourde a des chances de succès très réduites, seul un embryon sur cinq est indemne et compatible. Et la loi interdit un second DPI tant que des embryons congelés restent transférables », précise Arnold Munnich. René Frydman, lui, se réjouit que cette première scientifique ait contribué à mettre fin à la pénurie de sang de cordon : « Les prélèvements sont fréquents. » « Désormais, à chaque fois qu’un bébé indemne est en gestation, de manière naturelle, dans une famille avec un enfant malade, on recherche une éventuelle compatibilité et on récupère le sang de cordon, confirme Arnold Munnich. Grâce à Umut, une culture de la greffe familiale s’est imposée ». Mehmet, lui, devra compter sur le donneur anonyme trouvé dans une banque de sang italienne. La greffe douloureuse devrait être pratiquée en mars. Leyla sait que les risques de rejet sont plus élevés qu’avec un frère ou une sœur. Pourtant, elle s’accroche à l’espoir. « Les médecins nous ont déjà fait un cadeau formidable. Pourquoi pas un autre ? Dans notre malheur, on a eu de la chance. » g Arrêté jeudi dans un hôtel de Disneyland Paris, l’homme de 28 ans, en possession de deux pistolets et d’un Coran, devrait être jugé demain en comparution immédiate pour transport et détention d’armes et de munitions. Placé en détention provisoire jusqu’à sa comparution, il encourt une peine de cinq ans de prison et de 75.000 € d’amende. Les enquêteurs avaient vite écarté la piste terroriste. Jihadistes Un francophone dans une vidéo d’exécution Le groupe État islamique (EI) a mis en ligne hier une vidéo d’exécution par balles dans laquelle un bourreau cagoulé profère en français des menaces contre « les mécréants », évoque des ennemis de l’EI « en pleine débâcle » et les prévient de s’attendre à quelque chose qui leur fera oublier le 11-Septembre « et les attentats de Paris ». boues rouges Manif à Marseille Hier à Marseille, un millier de personnes ont dénoncé le « scandale des boues rouges ». Fin novembre, l’industriel Alteo, qui produit de l’alumine à Gardanne (Bouches-du-Rhône), a obtenu l’autorisation de poursuivre les rejets d’effluents en Méditerranée, dans les eaux du parc national des Calanques. Collège La réforme divise la FCPE Si la direction nationale de la FCPE, première fédération des parents d’élèves, a toujours dit qu’elle soutenait la réforme du collège, les choses se compliquent au niveau local. Les FCPE des Bouches-du-Rhône et de la Seine-Maritime ont en effet lancé un appel contre ce projet qui « conduira inévitablement à une mise en concurrence déloyale des établissements et sera source d’inégalités entre élèves ». Il serait déjà approuvé par une quinzaine de FCPE départementales… Gaz de schiste L’État fait appel Ségolène Royal a annoncé hier faire appel d’une décision prise jeudi par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise) d’annuler l’abrogation d’un permis de recherches de gaz de schiste de Total dans la région de Montélimar (Drôme). La ministre de l’Écologie réaffirme par ailleurs sa « détermination à faire respecter strictement l’interdiction de la fracturation hydraulique ». société | 17 jdd | 31 janvier 2016 « Il faut penser la vie après le cancer » Santé À la veille de la Journée mondiale contre le cancer, le 4 février, Martin Hirsch, le patron des hôpitaux parisiens, promet une meilleure prise en charge des patients IntervIew anne-Laure Barret @AnneLaureBarret Comment mieux soigner les malades du cancer ? Nous cherchons à être parmi les « meilleurs élèves » du plan cancer national, lancé il y a exactement deux ans par le président de la République. L’AP-HP traite, grâce à une offre extrêmement complète, de nombreux patients atteints de cancer. Premier souci, la rapidité de prise en charge, car tout temps perdu est aussi une perte de chances. D’où, d’ici à la fin de l’année, la possibilité de prendre rendez-vous en ligne, directement ou via son médecin traitant. Deuxième priorité : penser d’emblée à la vie après le cancer. En pratique, cela se traduit par deux avancées majeures dès maintenant : la garantie pour toute femme de pouvoir bénéficier d’une reconstruction mammaire sans reste à charge, alors qu’une femme sur cinq doit actuellement y renoncer pour des raisons financières. Et depuis janvier, autre avancée : toute d’euros de créances. Aujourd’hui, personne traitée par des médicanous pouvons repartir sur des ments anticancéreux menaçant la bases plus saines, plus confiantes, fertilité pourra voir ses gamètes prémaintenant que ce contentieux est servés. Cela laissera ouverte la posapuré. Les efforts ont payé. sibilité d’avoir des enfants. Et puis, Mais cette somme semble nous garantissons à tous d’être pris dérisoire quand on la rapporte en charge dans les quarante-huit aux 120 millions d’euros de dette heures, toute l’année, vacances d’été étrangère… incluses. Notre taille est un atout Les créances accumulées au fil pour mieux soides années nous gner, avec un nuont conduits à méro unique pour « Tout le monde changer notre pole rendez-vous. À doit avoir accès litique : maintecela nous ajoutons nant, les patients une expérience de à nos hôpitaux, qui viennent se garde d’enfants sur sans qu’il y ait faire soigner, sauf un premier site garanties autres, pour les mamans de privilège pour doivent payer q u i v i e n n e n t patients fortunés » d’avance. Nous régulièrement à ne reproduirons l’hôpital pour un plus ces montraitement. tagnes de dettes. Où en est le dossier de l’accueil de patients étrangers ? Nous avons commencé par solder le lancinant problème de la dette de l’Algérie et de l’Arabie saoudite, en le mettant comme préalable à la poursuite de l’accueil des patients adressés par les gouvernements de ces deux pays. La dette augmentait d’année en année. Nous avons récupéré 8 millions allez-vous créer un hôpital pour les étrangers, comme à Berlin ? Absolument pas. Ce n’est pas notre conception de la médecine. Tout le monde doit avoir accès à nos hôpitaux, sans qu’il y ait de privilège pour patients fortunés. Ce qui différencie la France de nombreux pays, c’est que l’accès aux meilleurs médecins et aux meilleurs équipements ne dépend pas du statut Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP, le 15 janvier, dans le bureau de la directrice du musée de l’hôpital Saint-Louis. ÉRIC BAUDET / DIVERGENCE POUR LE JDD social, mais du besoin médical. C’est une valeur pour nous intangible. Plus d’un mois après le suicide d’un professeur de cardiologie à l’hôpital Georges-Pompidou, y voyez-vous plus clair ? Le rapport d’étape de la mission diligentée par le doyen et moimême apporte un premier éclairage et confirme la nécessité de repenser la gestion des ressources humaines médicales et la prévention des situations délicates. Ma ligne reste fixée sur quatre principes. Un : laisser les enquêtes se déployer sans entrave et sans influence. Penser le contraire, c’est mal me connaître. Deux : aider ce magnifique hôpital, globalement si performant, à tourner définitivement la page de ces quelques conflits qui émaillent son histoire depuis sa création. Trois : maintenant que la communauté a pris conscience de la nécessité de changements profonds, les mettre en œuvre sur l’ensemble de l’APHP ; ainsi rétablir les conseils de service où l’on peut s’exprimer, per- mettre un entretien annuel pour chaque médecin où l’on fait le point sur ce qui va bien et moins bien, s’assurer des compétences managériales préalablement à l’exercice de responsabilités. Quatre : être du côté de l’immense majorité qui aspire à la justice et à la sérénité et rappeler aux quelques-uns qui l’ignorent qu’on ne s’autoproclame pas procureur, parce qu’on aurait des comptes à régler. Pourquoi avez-vous tant de mal à renégocier les 35 heures dans les hôpitaux parisiens ? Parce que derrière la question des horaires, il y a la question de la qualité de vie au travail et la conciliation d’une vie professionnelle parmi les plus exigeantes et d’une vie familiale, difficile en région parisienne. Nous mettons l’accent sur le logement des personnels soignants, aidés par la loi qui nous permet de redonner à notre parc immobilier sa vocation première : loger nos personnels et non pas des personnes qui n’ont rien à y faire… g 18 | sciences JDD | 31 janvier 2016 La réalité virtuelle pour mieux soigner le vertige C’est Un projet expérimental appelé Ctrlstress. il est mené sur des personnes atteintes d’acrophobie, la peur des hauteurs : vertige sur des balcons, des ponts, en randonnée… pour elles, l’angoisse est telle qu’elle devient invalidante. pris en charge à l’hôpital de la Conception (apHm) à marseille, ces patients sont traités par la relaxation, la gestion de leurs émotions, la thérapie cognitive… on les immerge ensuite, grâce à un casque de réalité virtuelle, dans un environnement « hostile ». placés à 10 m de hauteur sur une terrasse, 50 m sur une passerelle, ils doivent alors tenter d’appliquer ce qu’ils ont appris. mais la nouveauté est ailleurs, sur le campus de la faculté des sciences de luminy. là, une soixantaine de ces phobiques, âgés de 18 à 60 ans, sont tour à tour placés dans une pièce de 27 m³ où les murs et même le sol sont tapissés d’écrans géants. Des images en 3D les plongent alors dans des situations extrêmes : pont suspendu, plate-forme au-dessus d’un canyon… « Le patient n’est plus encombré par le casque et peut se déplacer physiquement », explique le Dr éric malbos, psychiatre à la Conception. Des capteurs permettent de détecter la position complète du corps dans l’espace et d’analyser les mouvements effectués. « Si la personne croit qu’elle est au bord d’un gouffre, elle va avoir tendance à écarter les jambes ou à se raidir pour ne pas a Un patient placé en situation tomber, à se redresser, à serrer ses coudes le long du thorax, ajoute le médecin. L’environnement virtuel est suffisamment réaliste pour provoquer cette anxiété, condition pour qu’une thérapie soit efficace. » menée dans le cadre de l’institut des sciences du mouvement, une unité de recherche associant le Cnrs et aixmarseille Université, cette expérience, qui associe réalité virtuelle et imagerie cérébrale, est une première en europe. « L’imagerie permet de détecter les zones du cerveau les plus sollicitées dans l’environnement virtuel et de comparer l’effet de la thérapie sur ces zones, explique éric malbos. On traite les patients tout en faisant de la recherche. » Histoire de démontrer aussi que la réalité virtuelle, en stimulant les mêmes zones que la réalité, trompe nos sens. « Le monde est-il une illusion ? C’est un vrai débat », souligne le Dr malbos. de stress grâce à la 3D. dr RichaRd Bellet La voix, maîtresse des émotions Triste, joyeux, anxieux, le son de notre voix est le signal émotionnel auquel nous sommes le plus réceptifs. Des chercheurs de l’Ircam ont créé un outil informatique capable de modifier ce signal avec des résultats étonnants @juliettedemey Pourquoi sommes-nous tristes en écoutant le Requiem de Mozart et joyeux au son des Quatre Saisons de Vivaldi ? Comprendre ce mécanisme, c’est le doux rêve de Jean-Julien Aucouturier, chercheur CNRS au laboratoire Sciences et Technologies de la musique et du son à l’Ircam*. Il dirige le projet Cream (Cracking the Emotional Code of Music), qui cherche à mettre en évidence ce qui, dans les signaux musicaux, déclenche en nous des émotions. Avec une hypothèse : si la musique nous touche, c’est peut-être parce qu’elle « piège » notre cerveau en lui faisant croire qu’il s’agit d’une voix humaine… C’est dans ce cadre que son équipe vient de publier une étude rafraîchissante explorant les liens entre voix et émotions**. Au cœur de ces recherches, la question du « retour émotionnel ». « Dans les années 1890, William James, le père de la psychologie américaine, s’interrogeait déjà : est-ce l’expression d’une émotion ou bien l’expérience de cette émotion qui la fait naître en nous ? », raconte Jean-Julien Aucouturier. Il prenait l’exemple suivant : un homme croise un ours dans la forêt, il crie, son rythme cardiaque s’accélère. Cette réaction de survie lui permet d’alimenter rapidement en sang ses muscles pour être capable de courir. « James avait cette intuition : ce n’est pas parce qu’on a peur qu’on court, mais parce qu’on court qu’on a peur ! » L’émotion découlerait du réflexe et non l’inverse… Un logiciel qui rend la voix plus gaie ou plus triste Depuis, nombre d’études ont montré combien notre expression de l’émotion influe sur notre ressenti. Ainsi, si l’on place un stylo à l’horizontale entre ses dents, les zygomatiques dessinent un sourire, renvoyant au cerveau le signal que l’on est joyeux. Ce mécanisme de rétroaction, « nous nous sommes demandé s’il était valable pour d’autres signaux. Or, le son de notre voix est le signal émotionnel auquel nous prêtons le plus attention. Il indique immédiatement si quelqu’un doute ou est fatigué », poursuit le chercheur. L’équipe du laboratoire a donc passé six ans à développer un outil Distance record entre une planète et son étoile Des astronomes ont découvert le plus grand système planétaire jamais observé, avec une planète qui navigue si loin de son étoile qu’elle met environ 900.000 ans pour en faire le tour, selon une étude publiée dans Monthly Notices de la Royal Astronomical Society. Nommée 2MASS J2126, cette planète, dont la masse est estimée entre 11,6 et 15 fois celle de Jupiter, était jusqu’alors considérée comme « flottante », sans étoile parente. Des chercheurs lui ont en ont finalement trouvé une, mais éloignée d’environ 7.000 fois la distance Terre-Soleil. Du coup, l’orbite parcourue par cette planète devient la plus large connue à ce jour. L’étoile et sa planète étaient identifiées depuis huit ans, mais le lien entre elles n’avait jusque-là pas été établi. Jeu de go : l’intelligence artificielle gagne informatique unique à ce jour, capable de modifier en temps réel l’émotion d’une voix neutre***. Différents algorithmes sont employés. Pour apporter une tonalité triste, la hauteur de la voix est abaissée et le débit ralenti. Pour la joie, elle est rendue plus aiguë, filtrée et dynamique. Pour l’anxiété, elle tremblote, envoyant au cerveau le signal d’un état instable. L’outil réussit à effectuer ces transformations complexes en 20 millisecondes. Un impératif : « Entre le moment où l’on parle et celui où l’on entend sa voix modifiée, le délai doit être inférieur à 50 millisecondes, sinon le cerveau le perçoit et on se met à bégayer ! » L’équipe a ensuite demandé à des volontaires de lire un texte. Chaque participant entendait sa voix dans un casque audio, sans savoir que celle-ci était manipulée pour la rendre plus gaie, triste ou effrayée. Résultat ? En évaluant leur état émotionnel avant et après lecture, les chercheurs ont fait une découverte étonnante. « D’abord, une personne qui s’entend avec une voix plus joyeuse que celle qu’elle produit ne perçoit pas cette modification, même si elle est importante ! Encore plus étonnant : cette écoute influence son humeur, elle devient plus joyeuse. » Non seulement nous alignons nos émotions sur la façon dont nous nous entendons, mais nous écoutons notre voix pour savoir comment nous nous sentons. « Nous faisons plus confiance à notre voix qu’à notre ressenti intime. C’est la première démonstration d’un effet de rétroaction dans le domaine auditif », s’enthousiasme Jean-Julien Aucouturier. Des applications pour traiter la dépression Si, comme les chercheurs le pensent, ce mécanisme est à l’œuvre toute la journée, les applications seraient nombreuses. « Le ton de la voix des patients en dépression est plus lent, monocorde. Or ils l’entendent toute la journée. Résultat, moins ils vont bien, moins leur voix est positive, moins ils vont bien… », résume-t-il. Pour briser ce cercle vicieux, l’équipe, en collaboration avec l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, pourrait expérimenter un protocole inédit : faire écouter à ces patients leur propre voix transformée pour agir sur leur état. L’idée pourrait aussi s’appliquer au traitement du syndrome de stress post-traumatique. « Ces patients souffrent d’une association entre un souvenir et une émotion traumatique, qui ressurgit au moindre stimulus. En s’entendant raconter cet épisode désagréable avec un ton dénué d’anxiété, on pourrait peut-être parvenir à affaiblir ces troubles. » g * STmS (CNRS/Ircam/uPmC). ** Publiée dans PNAS, collaboration STmS avec les universités de Bourgogne (Dijon), de lund (Suède), de Tokyo et de Waseda (Japon). *** logiciel à télécharger sur cream.ircam.fr b « Nous faisons plus confiance à notre voix qu’à notre ressenti intime. C’est la première démonstration d’un effet de rétroaction dans le domaine auditif », s’enthousiasme Jean-Julien Aucouturier, chercheur à l’Ircam. photo Bernard Bisson pour le jdd lejdd.fr retrouvez en vidéo l’interview de jean-julien aucouturier à l’ircam GooGledeepMind JulIeTTe Demey @richardbellet1 Une étUDe publiée dans la revue britannique Nature vient de révéler qu’AlphaGo, un programme informatique développé par Google DeepMind, a battu à plate couture (sur le score de 5 à 0) le champion d’Europe du jeu de go, un joueur professionnel chinois installé en France. Une victoire de l’intelligence artificielle sur l’humaine dans un jeu très intuitif, où chacun essaie sur un plateau d’occuper le plus d’espace possible en bloquant peu à peu les pions de l’adversaire et en les capturant. Des règles très simples mais « le jeu le plus complexe inventé par l’homme », selon le directeur exécutif de DeepMind. Pour faire face à la multitude des combinaisons du go, les équipes de DeepMind ont associé des méthodes d’intelligence artificielle avancées avec des réseaux neuronaux ayant appris 30 millions de mouvements exécutés par des humains. Le système a aussi découvert de nouvelles stratégies en disputant des millions de parties. Il lui reste maintenant à démontrer que les algorithmes peuvent aussi vaincre le meilleur joueur mondial, un Sud-Coréen de 32 ans. Le tournoi aura lieu en mars à Séoul. économie jdd | 31 janvier 2016 | 19 TRANSPORTS Menacées de rupture de leur contrat, les sociétés d’autoroutes ont obtenu d’augmenter leurs tarifs. En vue, plus de 3 milliards de travaux et 8.200 emplois annuels Très chères autoroutes L SYLVIE ANDREAU @SylvieAndreau e 1 février est traditionnellement une date marquée de rouge dans le calendrier des automobilistes. Après un gel l’an dernier, les tarifs des péages repartiront demain à la hausse sur les 9.000 kilomètres du réseau privatisé : + 1,12 % en moyenne. Selon l’association 40 Millions d’automobilistes, sur dix ans, le prix moyen du kilomètre aura bondi de 16,4 %. En échange d’un ticket plus cher, les sept sociétés d’autoroutes, dont Vinci, Sanef ou APRR, se sont engagées à investir 3,27 milliards d’euros dans des dizaines de chantiers formalisés au sein « d’un plan de relance ». Elles y ont gagné un allongement de la durée de leurs concessions. L’essentiel des travaux sera lancé dans les trois années. Mais déjà, bulldozers et pelleteuses ont commencé leur ballet avec une double promesse : plus de fluidité du trafic et du travail pour les entreprises de travaux publics. Le chantier le plus pharaonique s’élèvera à 600 millions d’euros. Pour ce montant, les 7 kilomètres de la sortie du tunnel de Toulon passeront sur trois voies d’ici à 2024. Le Grand Sud concentre une demi-douzaine de ces projets à plus de 200 millions. Parmi eux, l’élargissement de la voie pour les derniers kilomètres avant l’Espagne, au niveau du Perthuis, ou l’aménagement d’un échangeur dans les Landes qui a déjà démarré. À Grenoble, la traversée devrait être plus fluide, grâce à des travaux au nord de la commune. Sur l’A13, vers la Normandie, un nouveau viaduc à hauteur de Guerville est déjà à l’œuvre. er Plus de transparence dans les appels d’offres Les créations d’emplois ont été estimées par les concessionnaires à 8.200 par an, de 2016 à 2024. L’État a voulu s’assurer que leurs propres filiales de travaux publics ne soient pas les principales bénéficiaires de ces marchés. Il a souhaité plus de LES 10 PLUS GRANDS CHANTIERS A29 Création de bande d’arrêt d’urgence Montant estimé : 33 M€ Calais A13 Guerville/Création d’un nouveau viaduc Montant estimé : 47 M€ A10 Mise à 2x4 voies et bifurcation Montant estimé : 219 M€ St Quentin Rouen Paris Rennes Mulhouse Orléans Nantes A36/N1019/D437 Réalisation d’un dispositif d’échanges Montant estimé : 120 M€ Tours A75 Mise à 2x3 voies Montant estimé : 170 M€ Poitiers A10 Aménagement du terre-plein central et mise à 2x3 voies Montant estimé : 305 M€ Clermont-Ferrand Bordeaux Bayonne A63 Mise à 2x3 voies Montant estimé : 313 M€ Toulouse Grenoble Valence Aix-en-Provence Montpellier Toulon Perpignan A9 Mise à 2x3 voies Montant estimé : 180 M€ A48/A480 Traversée de Grenoble Montant estimé : 300 M€ A57 Mise à 2x3 voies de la sortie du tunnel de Toulon Montant estimé : 600 M€ Source : ASFA Confiées à des opérateurs privés, 23 zones de travaux s’échelonneront d’ici à 2024 sur les autoroutes. La carte ci-dessus reprend les plus importants sur l’ensemble du territoire. Un chantier sur quatre correspond à un montant supérieur à 200 millions d’euros. S’y ajouteront des aménagements environnementaux et de rénovation (pour un total d’environ 300 millions) qui ne sont pas inclus dans le plan de relance. transparence dans les appels d’offres qui seront lancés pour les projets de plus de 500.000 €. Il s’est donc engagé à ce qu’une autorité indépendante garde un œil sur les pratiques des gestionnaires du réseau. Un geste bien modeste pour les très nombreux opposants qui s’étaient manifestés lors des discussions sur la prolongation de la durée des concessions, comme le député Jean-Paul Chanteguet (lire ci-contre). Quatre mois d’âpres négociations entre l’État et les sociétés d’autoroutes, qui assurent s’être « fait tordre le bras » mais ont finalement eu gain de cause sur l’ensemble des points soulevés. Cette mission a été confiée au gendarme du rail, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, l’Arafer. Elle débute demain, même si les concessionnaires ont obtenu qu’elle ne mette pas son nez dans leur politique tarifaire. « C’est un contrôle assez modeste », reconnaît Pierre Cardo, son président. Son rôle se bornera à vérifier la conformité des appels d’offres ; 55 % de ces marchés ne doivent pas être attribués à des entreprises affiliées aux concessionnaires. Elle veillera aussi à ce que les commissions d’attribution comportent bien des membres indépendants… Un travail colossal au vu du nombre de chantiers à venir. Or, l’Arafer a refait ses calculs : pas un euro de plus ne sera versé à son budget malgré l’extension de ses prérogatives aux autoroutes, mais aussi, autre nouveauté, aux autocars. « Autant dire que l’on va regarder passer les trains… », soupire Pierre Cardo. g Jean-Paul Chanteguet, député PS* « Des centaines de millions de surprofits » Les autoroutes françaises sontelles une rente ? L’an dernier, nous avons eu l’occasion de dénoncer les contrats et de remettre tout à plat. L’État ne l’a pas saisie. Je maintiens que les sociétés affichent une rentabilité nette exceptionnelle. Leurs surprofits se chiffrent à plusieurs centaines de millions d’euros par an. Elles ont même obtenu de l’État de pouvoir augmenter les péages, en cas de modification ou de création d’impôts, taxes ou redevances. Vous estimez que les concessionnaires sont sortis gagnants des dernières négociations ? Ils ont obtenu un allongement de la durée des concessions existantes, de deux ans à quatre ans et deux mois. Ils vont aussi bénéficier de l’élargissement de leur périmètre, ce qui a été décidé dans la plus grande discrétion. Deux tronçons font ou vont faire l’objet de travaux puis seront exploités par des concessionnaires sans qu’aucune mise en concurrence n’ait été lancée. L’État a quand même obtenu de leur part le versement d’une nouvelle contribution… L’abandon de l’écotaxe représente un manque à gagner pour l’État de 800 millions d’euros par an. Les sociétés d’autoroutes vont effectivement verser 100 millions pendant trois ans, mais seulement 60 après. Sur cette contribution, 40 millions vont servir à indemniser la société Ecomouv. Leurs concessions courent aujourd’hui jusqu’à 2031 pour Sanef et même 2036 pour ASF. Les sociétés ont déjà dans leurs tiroirs un plan pour réclamer un nouvel allongement. Il reste 2.600 kilomètres d’autoroutes non concédées, plus 4.200 kilomètres de routes nationales, qu’elles aimeraient bien récupérer. RECUEILLI PAR S.A. * Président de la commission du développement durable à l’Assemblée. Taxis-VTC : un nouveau front s’ouvre CONFLIT L’accord conclu jeudi à Matignon est déjà contesté : à son tour, une catégorie de chauffeurs VTC appelle à manifester mercredi à Paris GUILLAUME REbIèRE La tension n’est pas près de retomber. En nommant un médiateur et en renforçant le contrôle des VTC (véhicules de transport avec chauffeur), après trois heures de difficiles négociations jeudi soir à Matignon, Manuel Valls a temporairement éteint la colère des taxis, qui restent circonspects sur l’application des mesures. Pis, il lance dans le conflit une catégorie de VTC, qui appelle, à son tour, à un mouvement de grève à partir de mercredi. Une première manifestation est programmée à Paris, entre Montparnasse et les Invalides. En cause, une lettre envoyée vendredi par le secrétaire d’État chargé des Transports, Alain Vidalies, à 20 plates-formes de réservation, comme Uber ou Allocab. Dans le viseur, les sociétés de transport dites Loti (pour Loi d’orientation des transports intérieurs) qui détourneraient leur usage tel qu’il est prévu par la réglementation. 20.000 salariés concernés La licence Loti s’applique au transport collectif de deux à dix personnes, pas à celui d’un parti- culier. Elle est moins contraignante que celle des VTC, qui devaient, jusqu’à fin 2015, effectuer une formation de deux cent cinquante heures. Mais elle oblige à avoir des chauffeurs salariés alors que le statut d’autoentrepreneur est majoritaire chez les VTC. Il est explicitement demandé par le secrétariat d’État aux transports que les sociétés qui assurent cette activité soient déréférencées des plates-formes de réservation. « Elles nous assurent 60 à 70 % de notre chiffre d’affaires, c’est notre mort assurée et des licenciements à la clé », affirme Joseph François, le président de l’association Alternative mobilité transport (AMT), qui regroupe un millier de Mardi, porte Maillot, des chauffeurs de taxi en colère bloquent la circulation, en faisant brûler des pneus. Matthieu de Martignac/ MaXPPP chauffeurs Loti. Lui-même emploie 136 personnes en CDI ; il y aurait environ 20.000 salariés concernés au total selon ses estimations. C’est AMT qui appelle à la grève à partir de mardi. « Nous ne voulons pas discuter avec le médiateur [le député PS Laurent Grandguillaume], qui est un fossoyeur, s’emporte Joseph François. Nous en appelons au président de la République pour ouvrir une vraie négociation. Sinon c’est un plan social massif qui s’annonce. Le plan Valls ! » Prête à bloquer Paris s’il le faut, l’organisation espère d’abord que le mouvement va s’étendre à toute la corporation Loti. Pour refondre complètement un système qui s’enfonce dans la crise et dans la confusion. g 20 | économiE Réveiller l’envie d’entreprendre sOnDaGe Le premier indice entrepreneurial de l’aPCe révèle qu’un Français sur trois est tenté par la création d’entreprise Pas loin de six ministres, dont Manuel Valls, défileront au Salon des entrepreneurs de Paris à partir de mercredi. Le président de l’Agence pour la création d’entreprises (APCE, qui va devenir AFE, Agence France entrepreneur, dans quelques semaines) profitera de la manifestation pour lancer le premier indice entrepreneurial français. Un instantané de l’appétence des Français pour l’entrepreneuriat que le JDD livre en avant-première. « C’est plus qu’un sondage sur l’envie de se mettre à son compte. C’est un outil qui doit servir à développer cette dynamique dans tous les territoires, y compris les plus fragiles », explicite Dominique Restino, qui s’est inspiré d’une initiative lancée au Québec. La peur de l’échec L’indice de l’APCE croise deux types de données : celles qui émanent de la population qui entreprend – ceux qui veulent devenir leurs propres patrons et ceux qui ont vécu cette experience – et celles des Français en général qui pointent les craintes qui les dissuadent. On apprend ainsi qu’un Français sur trois de plus de 18 ans, soit 15 millions de personnes, est entré à un moment donné dans cette chaîne économique. Cet écosystème compte toujours plus d’hommes que de femmes et attire avant tout les actifs en milieu de carrière. Toutes professions confondues, 68 % des sondés définissent l’entrepreneur comme un « professionnel autonome dans son travail ». Les principaux freins sont la peur de l’échec (24 %) et la complexité administrative (17 %). Le signe pour l’Apce qu’il faut renforcer les mesures d’accompagnement qui pérennisent les projets. B.B. JDD | 31 janvier 2016 Contrats casse-tête avec l’Iran COMMerCe La France a engrangé cette semaine une moisson d’accords avec Téhéran. Un succès sous haute surveillance américaine Bruna Basini @BrunaBasini Tapis rouge et… caviar ! Moins de quinze jours après la levée officielle des sanctions contre l’Iran, le 16 janvier, la visite à Paris de son président, Hassan Rohani, a livré toutes ses promesses. Les Iraniens ont signé une vingtaine d’accords avec Airbus, PSA Peugeot Citroën, Total, Bouygues, Vinci ou encore ADP. Les Français espèrent prendre pied sur un marché de 80 millions d’habitants, sevré d’infrastructures et d’investissements par des années d’embargo. « Le forum organisé jeudi au Medef en présence de Manuel Valls a connu une affluence exceptionnelle. La dynamique est vraiment enclenchée », ponctuait Yves-Thibault de Silguy. En septembre, le vice-président de Medef International avait accompagné dans un tout autre climat près de 150 patrons à Téhéran. Le plus dur reste à faire. Toutes les sanctions applicables aux entreprises qui veulent renouer ou travailler avec l’Iran n’ont pas été levées. Celles dites « primaires » (pour activités terroristes, blanchiment d’argent et atteintes aux droits de l’homme) sont maintenues. Elles interdisent toujours aux Américains de commercer avec l’Iran. Les sanctions dites « nucléaires », visant les non-Américains, sont, elles, supprimées. Un avantage compétitif pour les Européens ? Un blanc-seing qui a fait dire à Hassan Rohani que la France « n’a besoin de la permission d’aucun autre pays » pour investir en Iran ? Pas tout à fait. Une sanction levée peut en cacher une autre Les principes directeurs publiés par l’Ofac (Office of Foreign Assets Control), l’agence du Trésor américain chargée de gérer les embargos commerciaux, restent un casse-tête de 40 pages, à la portée extraterritoriale. Premier filtre, les listes noires américaines et européennes de personnes et sociétés avec lesquelles il est toujours interdit De gauche à droite et de haut en bas, la signature de contrats avec l’Iran par les entreprises Airbus, Sanofi, ADP et CMA-CGM. S. DE SAKUTIN/AFP de faire des affaires. « On y trouve certaines entités liées aux Gardiens de la révolution, qui trustent près de 10 % de l’économie iranienne dans des secteurs comme la construction, l’ingénierie et le pétrole. Il est donc crucial de s’associer avec des partenaires légitimes », prévient Nigel Coulthard, qui a longtemps travaillé en Iran et conseille aujourd’hui des entreprises attirées par ce marché. Autre mécanisme, encore plus diabolique, les mesures dérogatoires et le flou de certains concepts. « L’Ofac tient la clé du dispositif à travers les autorisations qu’elle peut accorder ou pas pour commercer avec l’Iran. Elle va devenir la tour de contrôle de tout ce qui se fait là-bas. C’est aussi elle qui aura le dernier mot sur l’interprétation des notions de “personne ou entité américaine” ou, pire, de “personne liée aux ÉtatsUnis” », pointe l’avocat JacquesAlexandre Genet, du cabinet Archipel. « Vous devez obtenir une licence, par exemple, si vous utilisez le dollar dans vos échanges avec l’Iran, si les biens, services ou technologies que vous exportez sont d’origine américaine à plus de 10 %, si les dirigeants ou employés qui travaillent sur ces transactions sont américains, résidents permanents compris », détaille Prosha Dehghani, du même cabinet. Prudent, Fabrice Brégier, président d’Airbus, qui vient de signer une commande de 118 appareils, a déjà fait savoir qu’il allait demander « une licence américaine ». D’autant que l’Ofac ne badine pas avec les infractions aux embargos décidés par Washington. « C’est le corps d’élite du Trésor américain, opaque, endoctriné et intouchable. Il est le bras armé de notre sécurité nationale et de notre politique étrangère », résume un avocat de Washington, fin connaisseur de cette institution. « C’est une arme de guerre économique au service des intérêts américains, requalifie Michel Makinsky, directeur géné- ral du cabinet de conseil Ageromys, très actif en Iran. Et la seule façon de parer à cette mécanique, c’est que les Européens jouent collectif dans le cadre du forum de négociation du traité transatlantique. » De fait, John Smith, un pur produit maison aujourd’hui à la tête de cette agence, conçoit sa mission comme une croisade. « Nous continuerons à être implacables, dans l’application de nos sanctions », déclarait-il en juin dernier devant un parterre de décideurs américains. C’est l’Ofac qui fut à l’origine de l’amende record de 8,9 milliards de dollars contre BNP Paribas pour violation de plusieurs embargos. Entre 2009 et 2015, l’agence a transigé avec une vingtaine de grandes banques, moyennant de lourdes pénalités. Autant de rappels à l’ordre qui traumatisent encore la communauté bancaire et la dissuadent aujourd’hui de participer à la ruée vers l’eldorado iranien. g Bras de fer entre Orange et Bouygues TÉLÉCOMs L’État conservera une minorité de blocage dans l’opérateur public. Bouygues Telecom doit revoir ses ambitions à la baisse MaTThieu PeChBerTy @mpechberty Le rachat de Bouygues Telecom par Orange connaît ses premières embûches. Les protagonistes assurent que les discussions « se passent bien ». Mais elles sont entrées dans le dur cette semaine et prennent plus de temps que prévu. L’annonce, d’abord fixée au 16 février, jour des résultats annuels d’Orange, est repoussée d’une semaine. La date butoir du 24 février, jour des résultats de Bouygues, est désormais visée. Du côté de l’État, des voix s’élèvent contre les demandes trop ambitieuses du groupe de BTP. D’abord sur le prix de 10 milliards d’euros, tiré à la baisse à 9,5 milliards. Ensuite sur les ambitions de Bouygues de détenir au moins 15 % du capital, ce qui réduirait la part de Le mariage des deux opérateurs risque de provoquer moins de concurrence sur le marché. clAUDE PArIS/AP/SIPA l’État à 19,7 % et tout juste un tiers des droits de vote en assemblée générale. C’est un casus belli pour les pouvoirs publics. « Nous voulons conserver une minorité de blocage grâce aux votes doubles de la loi Florange », justifie-t-on à Bercy. De plus, Orange estime que l’État doit garder au moins 20 % pour assurer le soutien des agences de notation, qui, en deçà, pourraient dégrader la note de l’opérateur, ce qui pèserait sur le coût de sa dette. Ce seuil convient à Bercy, qui disposerait alors de souplesse avec 38 % des droits de vote en assemblée générale et conserverait aussi trois sièges au conseil d’administration. La Banque publique d’investissement (BPI), qui porte des parts de l’État, émet aussi des réserves. « À la prochaine opération, l’État deviendra minoritaire », reconnaîton à la BPI. « Orange a besoin de pacifier le marché français avant de se lancer en Europe », décrypte un concurrent. En ligne de mire, un rapprochement avec Telecom Italia reste dans toutes les têtes. « Cela veut dire que l’État est prêt à lâcher Orange », conclut un autre. Du coup, Bouygues récupérerait environ 11 % d’Orange seulement. Reste à négocier l’engagement qu’il ne monte pas davantage. « Ça fait partie de la négociation, reconnaît un proche du groupe familial. Cela dépendra des valorisations… » Le PDG de Bouygues Telecom a déjà renoncé à diriger l’intégration chez Orange. Olivier Roussat, qui ne participe pas aux négociations, retournera chez Bouygues. Certains estiment qu’il pourrait hériter, à terme, de la direction générale pour lancer la succession de Martin Bouygues. Free et SFR s’engageront sur l’emploi Cet équilibre fragile dépendra aussi des montants que Free et SFR débourseront pour racheter des actifs de Bouygues Telecom à Orange. SFR devrait reprendre les abonnés mobile « low cost » B & You et des clients avec des box Internet pour environ 1,5 milliard d’euros, ainsi que des fréquences pour environ 500 millions. Free, qui se montre toujours coriace, dépenserait environ 2,5 milliards d’euros pour des fréquences, des clients mobile et Internet. Il reprendrait également, pour une somme faible, la majorité des 550 boutiques de Bouygues Telecom et leurs 2.500 à 3.000 salariés, ainsi que son réseau d’antennes. Les deux opérateurs s’engageront à une stabilité de leurs effectifs sur trois ans. Free sera en tout cas le grand gagnant d’une consolidation du marché français à trois opérateurs. Le régulateur va durcir les conditions pour Orange, déjà leader d’un secteur où il se renforcera. Comme sur la fibre, où il est en position dominante : le régulateur pourrait l’obliger à coïnvestir avec Free et lui ouvrir le marché. Il pourrait aussi fixer des prix plus bas pour les entreprises où Orange et SFR seront en duopole. En revanche, il pourrait empêcher Free de poursuivre le partage du réseau de Bouygues avec SFR. « Il se peut qu’une grande partie du réseau de Bouygues disparaisse petit à petit », pronostique un opérateur. g économie | 21 * jdd | 31 janvier 2016 À l’affiche STX/MSC CRUISES Deux nouveaux paquebots pour Saint-Nazaire Emmanuel Macron ne devrait pas regretter son déplacement, demain, à Saint-Nazaire. Il devrait repartir avec la promesse de deux nouvelles commandes de la part de MSC Croisières. La cérémonie autour du 13e paquebot Le chiffre de l’armateur, le Meraviglia, actuellement construit par les chantiers STX, sera l’occasion d’une annonce très attendue. Si un 14e paquebot est en commande, les deux suivants, de la même catégorie, n’avaient pas été confirmés. Ils seront bien construits à Saint-Nazaire, assurant au moins quatre ans d’activité à STX. Le Meraviglia, lui, sera prêt pour sa première traversée, à l’été 2017. S.A. 450 Coulisses C’est, en millions d’euros, le montant de l’augmentation de capital que préparerait Vallourec. Le spécialiste des tubes sans soudure pour l’industrie pétrolière et gazière a suspendu son cours de Bourse vendredi, après que l’agence Bloomberg a révélé qu’il préparait une levée de fonds massive. Vallourec est valorisé 550 millions d’euros alors que son titre a plongé de 14 % vendredi. Avec la chute des cours du pétrole, le groupe a perdu 923 millions d’euros en 2014 et sera encore en perte en 2015. L’an passé, 1.000 suppressions de postes ont été annoncées en Europe. Tandis que le pétrole n’en finit pas de chuter ces derniers mois, Vallourec a annoncé qu’il réexaminerait son plan social. M.P. Picard contre le Fooding Les surgelés Picard n’ont pas froid aux yeux. Depuis le début du mois, la marque utilise le terme « fooding » dans sa campagne publicitaire pour des plats de recettes du monde. Un « emprunt » non autorisé, selon Alexandre Cammas, fondateur du guide Fooding et dépositaire du nom (en 2000) : « Nous leur avons signalé le problème mais la campagne est toujours affichée dans leurs 1.000 enseignes, sur les Abribus et dans la presse. » Picard avance qu’« à ce stade, rien n’interdit d’exploiter les termes “globe fooding” », qu’il qualifie d’anglicisme. « Nous n’avons rien contre Picard mais nous défendons plutôt les artisans restaurateurs et les produits frais », rappelle le fondateur qui, pour empêcher toute confusion, envisage de porter l’affaire en justice. C.L. L’esthétique médicale fait sa belle SANTÉ Au-delà des laboratoires, des industriels comme Nestlé ou Unilever se ruent sur un secteur en croissance de 8,5 % cette année SyLvie ANDreAU Médecins et chirurgiens ne sont plus les seuls à se presser au premier rendez-vous mondial de l’esthétique, l’Imcas, qui se termine ce soir à Paris. Depuis trois jours, en marge des présentations de nouvelles techniques d’injection ou de traitements laser, des industriels sont venus faire leur marché. Des grands laboratoires pharmaceutiques qui veulent leur part d’un gâteau de 7 milliards d’euros et crédité de 8,5 % de croissance cette année encore. Des industriels comme Nestlé ou Unilever qui veulent investir l’univers de la santé. Mais aussi des groupes chinois, conscients de l’explosion de la demande asiatique. En fin d’année dernière, le rapprochement entre Pfizer et Allergan a secoué le marché. Le fabricant du Viagra a déboursé 160 milliards de dollars pour s’offrir l’inventeur du Botox. L’opération a rallumé des étoiles au-dessus de tous les petits laboratoires qui développent des produits ou des technologies de pointe. « Il existe en Europe un très grand nombre de petites entreprises très innovantes, à la recherche de partenariats », reconnaît Jean-Yves Coste, banquier d’affaires spécialisé dans le secteur. Face à la flambée des valorisations, seuls LeS FrANçAiSeS Ne SoNT PLUS CLieNTeS Notre pays est en train de prendre du terrain dans la course mondiale à l’augmentation de la taille des poitrines féminines. Avec une maigre croissance de 2 %, deux fois inférieure à la progression mondiale, le boom des prothèses mammaires se dégonfle. Le coût de l’intervention est pourtant moins élevé en France qu’ailleurs, ce qui affecte le chiffre d’affaires de la pratique, plafonné à 18 millions d’euros. De plus, de nouvelles techniques moins invasives se développent pour donner du volume aux seins. « On assiste à un recul global de tout ce qui a trait à la chirurgie pure », reconnaît la dernière étude de l’Imcas. S.A. de gros acteurs sont susceptibles de se payer ces petis labos qui se négocient entre six et vingt fois leur chiffre d’affaires, des multiples que n’atteignent même pas le luxe ou la technologie. Bayer, GSK et plusieurs autres ne cachent plus leurs ambitions dans ce qu’ils appellent « la médecine de confort ». Le britannique Sinclair, spécialiste des fils pour remodeler le menton, s’est séparé fin 2015 de sa partie médicaments pour créer une entité 100 % esthétique et donc plus sexy. « Nous pesons 50 millions d’euros mais nous aurons bientôt l’agrément pour notre produit aux États-Unis », insiste le représentant du labo en France, candidat à un mariage. C’est avec Nestlé que le spécialiste français de la dermatologie a topé : Galderma est passé sous pavillon suisse même si sa toxine botulique est toujours fabriquée par le français Ipsen. « Nestlé veut grandir dans le soin de la peau. C’est cohérent avec sa stratégie dans le bien-être », remarque Alexandre Brennan, vice-président de Galderma. L’annonce de nouveaux lasers Nestlé a fait des émules. Entre ses soupes Knorr et son dentifrice Signal, Unilever aussi veut garnir son portefeuille de produits esthétiques comme il l’a déjà fait en se rapprochant du fabricant de laser Syneron. Selon les statistiques de l’Imcas, ce type de matériel va connaître un nouveau boom. « Après un gros développement il y a une dizaine d’années, de nouveaux lasers arrivent sur le marché avec un fort potentiel thérapeutique », témoigne le docteur Maryna Taieb, l’une des praticiennes françaises les plus reconnues dans l’esthétique. Le français Vivacy, champion du comblement de rides avec son acide hyaluronique, a lui choisi de se tourner vers la Chine. Il vient d’ouvrir son capital à Bloomage, société cotée à Hongkong. D’autres asiatiques sont à l’affût comme le géant de l’e-commerce Alibaba, qui distribue depuis peu la marque française de produits esthétiques Filorga, ou Fosun, le nouveau propriétaire du Club Med, dont la division pharmaceutique est avide d’acquisitions. On les comprend. « L’Asie sera le premier marché de l’esthétique dans six ans », prévoit Waldemar Kita, fondateur de Vivacy. g Devanture d’un grand magasin à Paris. VInCEnT JaRoUSSEaU | hanSLUCaS.CoM « Star Wars » au secours de Disney LoiSirS « Le Réveil de la Force » a généré 1,5 milliard de dollars de revenus. Mais le géant américain souffre du déclin de ses activités de télévision MArie NiCoT @marie_nicot Les héros de Star Wars ont rempli leur mission. Début janvier, Han Solo et Poe Dameron ont rapporté 1,5 milliard de dollars. Ils menacent de battre le record mondial détenu jusqu’à présent par Titanic et Avatar. D’autant que pour la première fois, la saga de George Lucas a fait son entrée avec succès en Chine. Rien qu’en France, le septième opus sorti en décembre a attiré 10 millions de spectateurs, générant 80 millions d’euros de recettes de billetterie. Et le film reste diffusé dans 650 salles. Star Wars est plus qu’une épopée intergalactique. C’est une marque comme l’inoxydable Reine des neiges, Cars (Pixar) et Spiderman (Marvel). Jeux vidéo, livres pour enfants, produits alimentaires, vêtements, timbres, cartables, poupées : les héros Disney se déclinent à l’infini via des partenariats avec Lego, Joué club, Kiabi, ou encore Carrefour. « À Noël, les ventes sous licence du groupe Disney ont augmenté de 24 % par rapport à 2014, précise Jérôme Le Grand, vice-président de Disney France. C’est beaucoup plus que le marché français du jouet sous licence qui est à + 14 %. La saga Star Wars continuera en décembre prochain avec le nouveau long métrage : Rogue One, consacré à l’alliance rebelle. » De fait, le géant de Burbank en Californie a programmé les sorties planétaires d’une dizaine de films – autant qu’en 2015 – dont beaucoup réveillent des classiques : Le Livre de la jungle, Alice au pays des merveilles ou encore Mickey and the roadster racers, dans lequel la célèbre souris devient pilote de course. Le cycle est sans fin : en 2017, Disney signera le retour de La Belle et la Bête. La chaîne du sport ESPN a perdu 7 millions d’abonnés Les studios tournent à plein régime, mais les films et les produits dérivés ne représentent que 12 milliards de dollars sur les 52 milliards de chiffre d’affaires de The Walt Disney Company. Près de la moitié de l’activité est assurée par les chaînes de télévision aux États-Unis, qui ne sont plus les cash-machines du passé. Selon une note de la banque Barclays que le JDD s’est procurée, « la magie commence à disparaître ». Ces deux dernières années, la chaîne cablée ESPN, spécialisée dans le sport, a perdu 7 millions d’abonnés. L’hémorragie devrait continuer. La concurrence des plateformes de streaming comme Netflix est rude. Les jeunes générations veulent visionner des programmes à la demande, et non en flux continu. ESPN dépense des fortunes très compliquées à rentabiliser pour diffuser les grands championnats, notamment celui de basket, la fameuse NBA. Selon l’analyste Rich Greenfield (BTIG) : « ESPN devra payer plus de 6 milliards de dollars en droits sportifs cette année. » Confronté à une rupture technologique, le groupe dirigé par Bob Iger diffuse désormais une partie de ses contenus en streaming. Disney attend beaucoup de l’ouverture de son parc d’attractions à Shanghai en juin 2016. Mais là encore, les experts de Barclays sont dubitatifs. Ils redoutent que cette nouvelle destination ne concurrence les Disneyland de Hongkong et Tokyo, fréquentés par les touristes chinois. Décidément, les temps sont durs pour Mickey. g 22 | regards Rouge vif Anne Roumanoff @anne_roumaoff Lettre de François à Christiane JDD | 31 janvier 2016 Ma chère Christiane, Cinq jours déjà que tu es partie et déjà j’ai mal à ma gauche. Pourquoi m’as-tu quitté comme ça si brutalement ? Normalement, avec les femmes, c’est moi qui pars le premier. Les autres ministres, Batho, Ayrault, Montebourg, Hamon, Filippetti, je les avais virés sans ménagement comme on coupe une branche morte quand on n’en a plus l’usage. Christiane, avec toi, c’était différent, j’étais prêt à tout pour que tu restes jusqu’en 2017 mais tu n’es pas une femme de compromis et tu as claqué la porte brutalement. Pendant ces trois années que nous avons passées ensemble, j’ai admiré la force de tes convictions lors du vote de la loi pour le mariage pour tous. J’ai apprécié ton éloquence, ton amour de la langue française, ta dignité face aux attaques violentes dont tu as été l’objet. Quand on est ministre de la Justice, on vous tient curieusement pour responsable et coupable de tous les actes délictueux commis dans le pays. On t’a accusée de laxisme alors que tu n’as fait qu’appliquer les lois votées par les précédents gouvernements. Bien sûr, les relations étaient un peu tendues entre nous depuis quelque temps à cause de cette maudite loi sur la déchéance de la nationalité mais j’espérais que nous parviendrions à surmonter nos différends. Tu agaçais un peu Manuel comme l’agacent tous ceux qui ne sont pas d’accord avec lui mais moi, je t’ai toujours soutenue. Tu étais la caution de gauche de ce gouvernement, la femme debout, celle qui déborde du cadre, qui résiste. Quel ministre maintenant va ruer dans les brancards ? Ségolène qui semble ne plus penser qu’à poser avec des people pour sauver la planète ? Emmanuel Macron qui prend un malin plaisir à multiplier les sorties provocatrices pour ensuite déclarer qu’on a mal interprété ses propos ? Ton tweet était élégant « Parfois résister, c’est rester. Parfois résister, c’est partir », c’est mieux que « je ne peux plus voir ta gueule ». J’ai apprécié aussi, ma chère Christiane, que, lors de ta conférence à New York, tu aies affirmé ta loyauté à mon égard : « Le président de la République mérite de l’estime. » J’espère que, comme tant d’autres, À la dérive depuis cinq jours après avoir chaviré au large de La Rochelle, le cargo Modern Express n’avait toujours pas pu être remorqué hier dans la soirée à cause d’une forte houle et d’une mer déchaînée. Pendant trois heures, des équipes de secours ont tenté de fixer un câble pour tracter ce cargo de 164 mètres de long qui transporte 3 .600 tonnes de bois et des engins de travaux. Ses 22 hommes d’équipage ont été évacués et la situation du navire était, hier, à peu près stabilisée à environ 200 km de l’embouchure de la Gironde. MARINE NATIONALE La photo de la semaine Opinion Sir Peter Ricketts Ambassadeur du Royaume-Uni à Paris « J’ai vu une France qui change… » A près quatre années extraordinaires à Paris, je repars à Londres avec le sentiment que la France est parfois trop dure dans son autocritique. Sur le plan économique, vos grandes entreprises et start-up sont reconnues à travers le monde. À titre d’exemple, l’accord avec EDF pour la construction de deux EPR à Hinkley Point, qui sera, je l’espère, signé prochainement, marquera le début de la rénovation de la totalité du parc nucléaire britannique par des leaders français du secteur de l’énergie. J’ai vu aussi une France qui change, avec un appétit plus prononcé pour la réforme. Souvent difficile, celle-ci peut néanmoins porter ses fruits comme ce fut le cas chez nous. En effet, la crise de 2008-2009 nous a obligés à réformer et David Cameron a été élu sur un mandat d’austérité qui continue aujourd’hui. Nous avons supprimé 400.000 emplois de fonctionnaires et réduit les déficits publics et les impôts. Le chômage est désormais inférieur à ce qu’il était avant la récession grâce à la création d’emplois dans le privé. À chacun son modèle et j’ai confiance dans le fait que la France est en train de trouver le sien. J’admire aussi la France pour ses initiatives sur la scène internationale. L’intervention militaire au Mali a été un véritable succès. Les forces armées françaises et britanniques sont les seules en Europe capables d’intervenir loin de leurs frontières. Aujourd’hui, elles sont actives ensemble en Afrique et au Moyen-Orient. Le prochain sommet franco-britannique va approfondir cette coopération. Suite aux attentats à Paris, la France s’est montrée formidablement résiliente. Nous sommes solidaires car nous sommes amis et nous savons très bien que la même chose peut arriver chez nous. La frégate britannique HMS St Albans soutient le groupe aéronaval français dans le golfe arabo-persique autour du porte-avions Charlesde-Gaulle et nous avons récemment doublé le nombre de nos avions sur la base de Chypre d’où ils partent en mission en Irak et en Syrie. Désormais, nos deux pays frappent Daech jour et nuit, tout en participant à la recherche d’une solution politique en Syrie. Beaucoup de choses ont été dites en France ces derniers mois sur le fameux Brexit, une expression que je n’aime pas. Car notre intention n’est pas de quitter l’Union européenne mais de la voir se réformer. Notamment dans quatre domaines : la compétitivité, la gouvernance de la zone euro afin que ceux qui n’en sont pas membres voient leurs intérêts protégés, la flexibilité pour mon pays de se distancier de l’ambition d’une « Union toujours plus étroite », et la possibilité d’adapter nos systèmes d’allocations sociales, tout en acceptant le principe de libre circulation des travailleurs européens. Le Premier ministre est convaincu que si l’on trouve des bonnes solutions sur ces quatre points, il y aura une majorité dans le référendum pour le maintien du Royaume-Uni dans l’UE réformée au bénéfice de tous. C’est un énorme privilège d’avoir travaillé quatre ans à l’approfondissement de la coopération entre deux peuples qui, j’en ai la conviction, s’apprécient profondément. g «… avec un appétit pour la réforme et une formidable résilience après les attentats de Paris » tu ne céderas pas aux sirènes d’un éditeur parisien qui te proposera sans doute un pont d’or pour raconter l’envers du décor. Tu as déclaré que 2017 ne t’intéressait pas, en voilà une bonne nouvelle ! Je suis bien conscient que tu pourrais mobiliser sur ta personne ces 3 ou 4 % de voix qui pourraient m’empêcher d’accéder au second tour. Aussi je suis prêt à te recevoir pour te proposer des postes la hauteur de ton talent. Hormis ton départ, la semaine a été bonne, j’ai été accueilli comme un pacha en Inde. Je leur ai presque vendu des Rafale, c’est-à-dire qu’on a signé un accord mais qu’ils n’ont pas d’argent pour les payer. Ça change des Mistral où c’est nous qui avons payé pour ne pas qu’on nous les achète. Nous avons vendu 118 Airbus à l’Iran. Je sais bien que ça n’est pas un pays irréprochable mais j’ai tellement besoin de croissance et puis, si on ne leur vend pas, d’autres le feront. Ma chère Christiane, tu es partie en vélo, rayonnante et libérée. Moi, il m’est avis qu’entre les chauffeurs de taxi, les agriculteurs, les frondeurs et tous les mécontents, je n’ai pas fini de pédaler. g Déchiffrage Axel de Tarlé La claque espagnole F rance - Espagne : 1 - 3. Ce n’est pas le résultat d’un match de football, mais du match de la croissance entre nos deux pays. Vendredi matin, la France annonçait fièrement une croissance de 1,1 % pour 2015, « l’année de la reprise » s’est félicité Michel Sapin, le meilleur chiffre depuis quatre ans. Sauf que dans la foulée, notre voisin espagnol annonçait une croissance de 3,2 %. Trois fois mieux ! L’EsPAgnE est devenue une machine à créer des emplois ; 651.000 emplois en deux ans, à comparer avec 57.000 en France. Onze fois plus ! Certes, on pourra rétorquer que le taux de chômage y est deux fois plus élevé. Oui, mais Madrid a totalement « inversé la courbe », pour reprendre une célèbre expression. En trois ans, le taux de chômage a diminué de cinq points en Espagne, passant de 26,3 % à 20,9 %, alors que, chez nous, on ne cesse de voir gonfler les statistiques de Pôle emploi. FinALEmEnt, mAdRid nous inflige une leçon d’optimisme. En France, nous sombrons dans le fatalisme : « On ne peut rien contre le chômage. Nous sommes condamnés à la croissance molle. » Les Espagnols, eux, n’ont pas renoncé. En 2012, le gouvernement Rajoy a courageusement réformé le marché du travail, en introduisant de la souplesse à la fois sur les salaires et les licenciements. Bien sûr, ces lois ont été impopulaires. Et Mariano Rajoy vient d’en payer le prix dans les urnes. Un parcours à la « Gerhard Schröder » qui – après avoir réformé l’Allemagne en 2003 – a perdu les élections en 2005 face à Angela Merkel. mAis L’Ex-PREmiER ministRE espagnol peut se regarder dans la glace en se disant qu’il laisse derrière lui un pays qui repart de l’avant. Tout un symbole : l’Espagne est devenue le deuxième pays producteur de voitures en Europe, derrière l’Allemagne, mais devant la France, avec 2,4 millions de voitures produites contre 1,6 million en France. Encore un match remporté haut la main par l’Espagne. D’ailleurs, ils nous ont même piqué Zidane ! Olé ! g jdd | 31 janvier 2016 Guy Novès Allons enfants de l’Ovalie Dans les veines du sélectionneur du XV de France coule du sang bleu-blancrouge. Dans une France post-attentats, ce fin psychologue motive ses troupes en faisant vibrer la fibre patriotique I Stéphane Colineau @StephColineau l est 17 h 12, le 26 décembre 1994, lorsque le GIGN lance l’assaut contre l’Airbus A300 d’Air France cloué sur le tarmac de l’aéroport de Marignane par quatre preneurs d’otages du GIA (Groupe islamiste armé). C’est une scène de guerre qui glace le sang, les balles claquent en rafale. Les terroristes sont abattus, neuf supergendarmes, treize passagers et trois membres de l’équipage sont blessés. Comme des millions de Français, Guy Novès a l’œil rivé sur son téléviseur. Il lance à son fils Vincent, alors âgé de 16 ans : « Si je n’avais pas eu le rugby, j’aurais aimé faire partie du GIGN. » Quand on s’enquiert du patriotisme de son père, Vincent Novès rapporte spontanément cette anecdote, si éclairante à ses yeux. Le nouveau sélectionneur du XV de France est homme à défendre son pays les armes à la main. « J’aime beaucoup mon pays, le sentiment d’appartenance, j’aime prendre la défense des autres », confirme-t-il, confiant compter quelques amis chers dans les rangs policiers. Ses proches connaissent depuis toujours l’épaisseur de sa fibre patriotique. Un atout pour celui chargé de remettre d’aplomb une sélection au bilan catastrophique, et à l’image abîmée par une Coupe du monde désolante. En conférence, en interview, il invoque « l’honneur de représenter le peuple de France », le « combat collectif » mené « avec le soutien de la nation ». Symboliquement, il n’y a pas si loin des champs de bataille au rugby. Dans sa bouche, les rugbymen deviennent presque de la chair à ballon. « On ne fait pas du canoë ou du vélo, sports que je respecte beaucoup », insistet-il, regrettant amèrement d’avoir passé l’âge, à 62 ans vendredi, de descendre en personne sur le pré. « Dans ma carrière de joueur, j’ai été suspendu quatre fois, toujours après des bagarres pour aider des copains. Aujourd’hui encore, je suis toujours prêt à sortir le premier de la tranchée. C’est mon rôle. D’ailleurs, ça me désole de demander aux gars de se battre en les regardant depuis le haut de la colline. Cette position me gonfle. » Il n’est pas anodin que Guy Novès actionne ce ressort dans une France post-attentats. La période est à pavoiser les rues de bleu-blanc-rouge et à faire chanter les coqs. « Comme tous les Français, ma sensibilité s’est encore accentuée avec ce qu’on vient de subir, lance Novès. J’ai aimé la réaction des Français, comme ils se sont resserrés les uns aux autres. » Ses jeunes joueurs ne font pas exception à la règle. Novès s’amuse que certains d’entre eux aient déjà repris à leur compte son discours. « Quand on le défie, le Français se surpasse, c’est ainsi, se réjouit-il. Regardez l’attitude de nos handballeurs, de nos volleyeurs ou de nos basketteurs. On est quand même le peuple qui a fait la Révolution. » Un patriote d’action et de tempérament Même si des différends ont pu l’opposer à Novès, Jean Glavany, député PS des Hautes-Pyrénées, ancien ministre et grand amateur de rugby, salue la stratégie : « Faire du maillot la base d’un patriotisme, c’est malin, et ça me plaît. À l’école, on apprend beaucoup à respecter nos différences et c’est bien, mais pas assez à construire ensemble. » Énigmatique, Guy Novès confie que plusieurs personnalités se sont fendues d’un coup de fil pour encourager ses sorties cocardières. « Ce sont des gens que j’apprécie beaucoup, mais je ne donnerai par leurs noms. Je serai heureux d’honorer certains rendez-vous après le Tournoi. » Il serait tentant de voir chez ce petit-fils de républicains espagnols un zèle de converti, de lire dans son amour du pays sa reconnaissance à la patrie accueillante. Ce serait faire fausse route, assure l’intéressé. Il n’est pas un patriote d’héritage, même s’il se souvient avec tendresse des récits de deux oncles maquisards. Il n’est pas non plus un patriote de livres d’histoire, ne convoque ni Jeanne d’Arc ni Napoléon. Il est un patriote d’action et de tempérament, un homme d’honneur qui épouse ses causes à la vie à la mort. Ses joueurs le ressentent dans leur chair, ce qui fait sa force. Novès tient son buste droit, il a le port de tête d’un général, le visage émacié de celui qui ne se laisse jamais aller. « C’est parce que son comportement est impeccable et ses mots sincères que les joueurs Guy Novès, vendredi à Toulouse, au Grand Hôtel de l’Opéra. Ulrich lebeUf /M.Y.O.P POUr le JDD adhèrent », loue Jean Fabre, ancien président du Stade Toulousain. « Si j’ai voulu devenir un leader, c’est parce que lui en est un grand », confie Vincent, 37 ans, devenu maire de Balma, en banlieue toulousaine, conseiller régional. Homme fier, il n’hésite pas à inspirer la crainte. Son ton est volontiers cassant avec les importuns, il émane parfois de lui une violence contenue. « Dans ma carrière de joueur, j’ai été suspendu quatre fois, toujours après des bagarres pour aider des copains » 1954 Naissance à Toulouse (Haute-Garonne) 1975-1988 Joueur du Stade Toulousain et du XV de France (1977-1979) 1989-2015 Entraîneur-manager du Stade Toulousain 2016 Nommé sélectionneur du XV de France « La plupart des jeunes d’aujourd’hui sont fantastiques » Vincent Novès, un « Républicain » modéré, tendance Bruno Le Maire plutôt qu’Éric Ciotti, flaire le piège de la caricature. « Mon père n’est pas un nationaliste », prévient-il. Claude Hélias, ami de toujours et ancien dirigeant toulousain, abonde : « Ce qui importe à Guy, c’est la défense du pays, de l’égalité, de la possibilité de réussir par le travail. Il pense que la France permet ça et il voudrait que ça perdure. » Fils d’un électricien et d’une secrétaire, Guy Novès a décroché un bac scientifique et enseigné le sport. Une de ses filles est avocate, l’autre médecin. Il est un homme de droite, mais ne se mêle jamais de politique, pas même pour soutenir son fils en campagne. Légende à Toulouse qu’il a mené dix fois au titre de champion de France et quatre fois à celui de champion d’Europe, il sait même s’y montrer œcuménique. Lorsque le conseil municipal a baptisé une place à son nom, il a précisé que sa plus grande joie était de constater que les élus de tous bords avaient soutenu l’initiative. Plus jeune, à l’âge des engagements, il n’a jamais versé dans l’excès. Son service militaire au bataillon de Joinville ne lui a pas laissé de souvenirs enfiévrés. Il a aimé les marches et les séances de tir, mais il confesse avoir porté son pyjama sous l’uniforme au lever du drapeau, pour retourner plus vite se coucher. Joueur, ses sept sélections en équipe de France, alors qu’il était ailier au Stade Toulousain, ne l’ont pas davantage fait verser dans l’outrance cocardière. « À 23 ans, j’avais la fierté de représenter ma famille, mais pas conscience que je représentais beaucoup plus avec ce maillot bleu. Je ne voudrais pas que mes jeunes joueurs commettent cette erreur. Je veux qu’ils sachent qu’on représente une foule que l’on ne voit pas, qui crie, se lève, estime-t-il avec une tolérance inattendue envers la jeunesse. La plupart des jeunes d’aujourd’hui sont fantastiques. Ils peuvent avoir des carences éducatives et des comportements différents des nôtres, mais on ne peut pas le leur reprocher. C’est nous qui les avons construits. » Il sera un peu plus de 15 heures, samedi, quand la première Marseillaise de l’ère de Guy Novès retentira sur la pelouse du Stade de France. Elle sera reprise par des dizaines de milliers de spectateurs, certains d’entre eux agiteront sans doute des drapeaux. Pour le nouveau sélectionneur, ce ne sera pas rien. g 24 | météo regards « À l’aube, je me suis levée pour regarder par la fenêtre minuscule de quel gris était la pluie. Des rouleaux d’écume se pourchassaient sur la plage en contrebas. » Extrait de « La Touche étoile » Hommage à Benoîte Groult née le 31 janvier 1920 Brest 7 13 Lille 5 11 Abbeville 7 14 Rennes 12 14 11 15 Nantes 12 14 Ensoleillé Éclaircies Nuageux Couvert 5 12 Cherbourg Paris Nancy Strasbourg 4 Dijon Tours 9 14 5 12 Clermont-Ferrand Dimanche 31 janvier Indice de confiance 5/5 11 15 9 14 Bordeaux 9 13 Besançon 6 12 Lyon Grenoble 12 15 Biarritz 10 4 11 Toulouse 9 14 -10°/0 1°/5° 6°/10° 11°/15° 16°/20° 20°/25° 26°/30° 31°/35° 36°/40 6 12 10 Nice 18 Marseille 9 Bastia 18 9 19 Lundi 1 février 5/5 er 10 Nord 14 Sud 11 16 Mardi 2 5/5 8 Nord 12 Sud 8 14 Pluie Orages Neige Les livres de la semaine D ans son fameux abécédaire de 1988, le philosophe Gilles Deleuze estimait qu’être de gauche, c’est percevoir d’abord l’horizon, en déduire éventuellement son nombril ; quand être de droite, c’est considérer d’abord son univers proche, en déduire éventuellement le lointain. Cette définition géographique pourra paraître désuète ou manichéenne, elle Égalité, identité, spiritualité a le mérite de placer le débat sur le plan éthique, bien loin des vicissitudes politiques : après tout, tel électeur de droite pourra se découvrir philosophiquement de gauche et inversement. Un plaidoyer pour le retour du clivage gauche-droite Le dernier essai de Gilles Finchelstein est un vigoureux (et fort lisible) plaidoyer pour le retour du clivage gauchedroite. Nourri par de nombreux travaux permis par sa double activité (directeur des études chez Havas Worldwide, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès), il analyse la crise actuelle de la démocratie, sa dangereuse illisibilité (dans la foulée de Pierre Rosanvallon) ; l’effacement progressif depuis 1981 de la césure gauche-droite et son remplacement par une opposition peuple-élites. Un « brouillard idéologique » expliqué par l’intensité des mutations en cours (mondialisation, migrations, digitalisation, transitions énergétiques…). Finchelstein s’inquiète de la montée des populismes (violence verbale, recherche de boucs émissaires) mais aussi du repli de la revendication égalitaire au profit de la question identitaire. Gauchedroite, c’est clair, chacun a la liberté de choisir. L’identité, c’est plutôt « présentez vos papiers », rien n’est plus dangereux. L’intellectuel qui a accompagné nombre de campagnes à gauche (Jospin, DSK, Hollande) fait des propositions afin de refonder le couple égalité-identité. Sur l’égalité, il s’agit de dessiner un nouvel équilibre entre sécurité économique et sécurité sociale, risque et mérite ; passer de la redistribution (le pouvoir actuel bute sur ses limites en matière d’acceptabilité fiscale) à la prédistribution (école, formation, santé…). Sur l’identité, il s’agit de « trouver un consensus républicain sur JDD | 31 janvier 2016 l’immigration et la laïcité » qui refuserait d’« hystériser ces questions ». Un tel pacte suppose que la gauche en finisse avec sa cécité sur l’identité et que la droite accepte de réfléchir à de nouvelles formes d’égalité. Dans le climat actuel, c’est loin d’être gagné. Le fantôme du vieux Karl (Marx) Sur la difficulté qu’a la gauche à penser les questions identitaires et religieuses, les choses sont peut-être en train de bouger, Daech n’y est pas pour rien. Jean Birnbaum, en tout cas, a recherché les raisons de ce « silence religieux ». Dans un essai précis et documenté, le patron du « Monde des livres » se situe aux antipodes de ces intellectuels néoréactionnaires pour qui tout, de la crise économique au terrorisme, est la faute de la gauche. Il dresse une analyse détaillée de cette difficulté qu’a la gauche française à penser la/les religions et le porte-à-faux dans lequel elle se trouve aujourd’hui sous l’effet fameux du « retour du refoulé ». Birnbaum expose aussi bien les circonstances atténuantes comme cette louable attention de ne pas « stigmatiser l’islam » que les raisons plus profondes : au premier rang, le fantôme du vieux Karl (Marx), pour qui la religion n’était pas seulement « un opium du peuple » mais aussi le stigmate de son aliénation. Et puis le souvenir de la guerre d’Algérie, « non-dit fondateur », l’immense culpabilité et la peur rétrospective de tout néocolonialisme. Dans cette histoire vieille d’un demi-siècle dont l’une des étapes cruciales fut la révolution iranienne, l’auteur montre comment certains courants de gauche placèrent leurs espoirs dans ces révoltes des opprimés (pas seulement Michel Foucault en 1979) avant de connaître une cruelle désillusion. Le constat est aujourd’hui cruel : là où l’islamisme a triomphé, la cause des peuples, des femmes, des minorités a connu des revers considérables, et pourtant seul le djihadisme incarne encore une forme d’internationale contestant l’existant (« Après Marx, Allah », écrit Régis Debray). Il y a urgence à refonder l’idéal démocratique. g Patrice traPier Piège d’identité. réflexions (inquiètes) sur la gauche, la droite et la démocratie, Gilles Finchelstein, Fayard, 224 p., 17 €. Un silence religieux. La gauche face au djihadisme, Jean Birnbaum, Stock, 240 p., 17 €. dimancheculture jdd | 31 janvier 2016 | 25 Omar Sy interprète le clown Chocolat, premier artiste noir devenu célèbre à la Belle Époque, avant de retomber dans la misère et l’oubli « Se battre pour être libre de ses choix » I IntervIew STépHanie BelpêCHe @StephBelpeche l a gardé son sourire et sa modestie. César du meilleur acteur en 2012 pour Intouchables, Omar Sy incarne aujourd’hui Chocolat (18681917), dans le film éponyme de Roschdy Zem. Il y forme avec James Thiérrée un duo magnifique. Rencontre avec la star, qui partage désormais son temps et sa carrière entre Paris et Hollywood. duos comiques. Moi le premier, je suis un de ses héritiers, pour avoir joué pendant des années avec mon complice Fred Testot. Chocolat n’a jamais cessé de se battre pour être libre de ses choix. Jusqu’à causer en partie sa propre perte, car il avait aussi des dettes de jeu. On a voulu le mettre en cage, l’humilier, lui faire courber l’échine. Mais sa conscience politique s’est éveillé. À lui tout seul, il est une révolution. il rêvait d’interpréter Shakespeare. et vous, un drame ? C’est la première fois que je m’aventure dans un registre aussi grave, avec des costumes, des décors, des performances scéExactement la première question que je me suis posée quand niques, James Thiérrée… Rendre j’ai lu le scénario ! Qui était Rafael hommage à Chocolat m’a motivé. Padilla ? Malgré toutes les inforIl a obtenu une plaque commémations que j’ai pu glaner, je n’ai morative avec Footit sur la façade toujours pas la de l’hôtel Mandaréponse. Peut- « On m’a dit que rin, à Paris. C’est être a-t-il été oulà que se situait le blié à cause de la j’étais le premier Nouveau Cirque, guerre ? Ce n’est artiste nOir de où ils se produipas le cas de son saient chaque binôme, George la scène française soir. Footit, qui a mar- à avOir autant Comment qué davantage les avez-vous de pOpularité. mémoires. travaillé pourquoi l’existence du clown Chocolat demeure-t-elle méconnue ? Une des conséquences du racisme de l’époque ? un cOnstat un peu inquiétant » Forcément. Et du déséquilibre entre Chocolat et Footit : la société ne les considérait pas de la même façon, ce qui a créé une distance entre eux. Personne n’a eu l’idée d’enquêter sur Rafael Padilla, excepté l’historien Gérard Noiriel, qui m’a aidé grâce à ses recherches. J’ai été surpris par la popularité de Chocolat, né esclave à Cuba, qui affichait tous les signes extérieurs de richesse, de célébrité et d’intégration : une automobile, une statue au musée Grévin, un certain succès auprès des femmes. Même les frères Lumière l’ont filmé ! Propulsé vedette, il s’est embourgeoisé et a développé une addiction pour les jeux d’argent. Sans papiers, il a été dénoncé et jeté en prison, où il a subi des mauvais traitements car il se prenait au sérieux et ne savait pas rester à sa place. en quoi son parcours vous touche-t-il ? Il a imaginé avec Footit le concept de l’auguste et du clown blanc sur la piste, la base de tous les votre expression corporelle avec James Thiérrée ? On s’est enfermés pendant quatre semaines pour apprendre les numéros. James, qui assurait la chorégraphie, les a un peu modernisés. D’ordinaire, je me sers plus du verbe que du corps pour m’exprimer. Et je suis très raide ! [Rires] Pour atteindre ce niveau de complicité, on s’est appréhendés dès le départ en se touchant, même en se sentant. On a fait connaissance avec de la sueur, de la douleur et des tensions aussi. Mon regard sur le cirque a changé. Au contact de James, j’ai découvert un monde festif et coloré, fait de grandeur et d’exubérance. pensez-vous que ce long métrage a une valeur pédagogique ? À partir du moment où il traite de l’Histoire, oui. Et c’est important de réhabiliter Chocolat. Il a ouvert des brèches, mais on les a colmatées derrière lui. Joséphine Baker lui a succédé un peu après. À mes débuts, on m’a dit que j’étais le premier artiste noir de la scène française à avoir autant de popularité. Un constat un peu inquié- Pour relancer son numéro de clown, Footit (James Thiérrée) va s’associer avec Chocolat (Omar Sy). prod tant. Je suis une exception et je me sens bien seul. La France va mal pour plein de raisons. Nous devons réparer les injustices une à une et ouvrir les yeux. Comme dans le film avec la pub Banania, vous avez joué des clichés sur les noirs à vos débuts ? Évidemment. J’avais des personnages avec l’accent africain au SAV avec Fred. Ça m’amusait parce que depuis on a inventé le second degré. Vous êtes une des personnalités préférées des Français, bankable, entre paris et los angeles. Comment vivez-vous votre célébrité ? C’est vraiment cool ! Je suis touché d’être apprécié pour mon travail et ce que je suis. Je fonctionne au présent, selon les envies et les opportunités. À la base, je suis parti aux États-Unis pour prendre une année sabbatique. Puis j’ai décroché des rôles, je me suis senti bien. La vie est surprenante, il faut être attentif et s’adapter. Si on me propose des franchises comme X-Men et Jurassic Park, je me vautre dedans, je prends du plaisir. Comme je suis avec ma famille, je n’ai pas forcément fait ami-ami Chocolat iiif De Roschdy Zem, avec Omar Sy, James Thiérrée, Clotilde Hesme et Olivier Gourmet. 1 h 50. Sortie mercredi. À la fin du XIXe siècle, Rafael Padilla joue au cannibale africain avec un chimpanzé dans un cirque qui sillonne les routes de France. À l’issue d’une représentation, le directeur d’une salle de spectacle parisienne le recrute pour devenir le partenaire du clown blanc George Footit. À peine lancé, le tandem comique fait des étincelles et le public en redemande. Rafael, surnommé Chocolat, devient riche et célèbre… En retraçant le destin avec les stars. J’ai appris l’anglais et mes enfants, âgés de 6 à 15 ans, plus vite que moi. En six mois, ils étaient bilingues. Tout rentre plus facilement, leur disque dur est encore vide ! Comment avez-vous réagi face aux attentats ? Je n’étais pas à Paris pour Charlie Hebdo. Par contre, le 13 novembre, oui. J’ai d’abord eu du mal à le croire, puis j’ai eu peur pour la France et nos enfants. Ensuite, tragique du premier artiste noir de la scène française, Roschdy Zem parle d’une époque qui organisait des expositions coloniales où ceux que l’on appelait alors les « sauvages » étaient exhibés comme des animaux de foire au Jardin d’Acclimatation. Mais aussi de notre société, où le racisme, la discrimination, la liberté et l’égalité sont plus que jamais au cœur des préoccupations. Le drame, très documenté, vaut pour le numéro de duettistes extraordinaire exécuté par Omar Sy et James Thiérrée, au service d’un récit nécessaire et émouvant. S.B. je me suis demandé pourquoi. Et comment régler ça. Il faut préserver ce qu’on est en train de perdre. Ça se tiraille entre les extrémités et on doit faire attention aux dérapages, se rappeler qu’on est heureux de vivre ensemble. Je le dis haut et fort. On ne s’exprime en général que lorsqu’il est presque trop tard, dommage. Il faut continuer de vivre, d’avancer, de créer. C’est ça être Français. Notre liberté n’est pas atteinte, il en faudra plus. g 26 | culture | cinéma JDD | 31 janvier 2016 On aime Passionnément iiii Beaucoup iiif Bien iiff Un peu ifff Pas du tout ffff Danny Boyle a bien fait son Jobs Le réalisateur de « Slumdog Millionaire» propose un biopic non consensuel et brillant sur la personnalité complexe du fondateur d’Apple BARBARA THéATe David Fincher a préféré jeter l’éponge, mais Danny Boyle, lui, a tenu bon. Pas plus effrayé que ça à l’idée d’écorner l’image d’une icône planétaire. « Steve Jobs est vénéré par des millions de gens. Certes, il a changé le monde et notre façon de communiquer en faisant entrer les ordinateurs dans notre quotidien. Mais ce n’est pas seulement un grand homme. S’il avait une aptitude à galvaniser ceux qui l’entouraient, il pouvait aussi se montrer cruel et insensible. Comme il l’avait fait avec Mark Zuckerberg dans The Social Network, Aaron Sorkin a eu le courage de montrer une nouvelle fois la part sombre du génie. » Sans jamais mettre en doute le côté visionnaire du créateur d’Apple, le scénariste d’À la Maison-Blanche souligne l’ambivalence d’un homme qui a vécu le fait d’être abandonné par sa mère non mariée (il a été adopté par les Jobs à sa naissance) comme un drame, et dont la carrière n’a eu qu’un seul but : ne plus jamais perdre le contrôle. « En parlant à sa fille Lisa Jobs et à ses anciens collaborateurs, Aaron Sorkin a vu un être humain qui se croyait défectueux et qui a cherché à concevoir des produits parfaits qui pousseraient les gens à l’aimer, ajout le cinéaste. Il brosse un portrait impressionniste de Steve Jobs, en mélangeant faits réels et imaginaires autour de trois moments décisifs de sa carrière, où il retrouve les mêmes interlocuteurs avec lesquels il est en conflit, à quelques années d’intervalle. Une astuce d’écriture qui permet de montrer l’évolution du personnage. » DiCaprio a refusé de jouer ce type qu’il n’aime pas Et qui exige du metteur en scène des trésors d’ingéniosité afin d’éviter le côté répétitif du huis clos. Parce que Aaron Sorkin aime à faire marcher ses protagonistes en En sallEs mErcrEdi La Marcheuse iiff De Naël Marandin, avec Qiu Lan, Yannick Choirat. 1 h 20. À Paris, Lin, Chinoise clandestine, est à la fois garde-malade d’un vieil homme qui l’héberge, avec sa fille de 14 ans, et prostituée. Un jour, un voisin marginal pénètre dans l’appartement pour échapper à ceux auxquels il doit de l’argent. Lin lui propose le mariage afin d’obtenir des papiers. On se laisse embarquer par ce scénario jamais manichéen qui déroule son histoire très simplement. En effet, 1.300 prostituées chinoises arpenteraient les rues de la capitale d’après le réalisateur, bénévole à Médecins du monde depuis sept ans, qui a eu envie de montrer le quotidien de l’une d’elles, sans sacrifier la dramaturgie. Son regard bienveillant débouche sur un film efficace et sensible. D.A. Steve Jobs (Michael Fassbender) et sa fille Lisa, à 9 ans (Ripley Sobo). Prod Steve Jobs iiif De Danny Boyle, avec Michael Fassbender, Kate Winslet. 2 h. Sortie mercredi. Hors norme, brillant, audacieux. Ce nouveau film sur Steve Jobs est à la hauteur de son sujet. Plutôt qu’un biopic hagiographique comme le Jobs de Joshua Michael Stern (2013), le scénariste Aaron Sorkin choisit de suivre le fondateur d’Apple quelques minutes avant les lancements de trois produits phares de sa carrière : le Macintosh en 1984, le NeXTcube en 1988 et l’iMac en 1998. Des moments de stress même temps qu’ils parlent, Danny Boyle leur fait arpenter tous les recoins possibles des théâtres où se déroulent les lancements des nou- intense révélant un homme multiple, aussi peu humain que ses ordinateurs. Et engendrant des joutes verbales dantesques, où le génie visionnaire règle ses comptes avec ses proches tout en arpentant les couloirs. La mise en scène de Danny Boyle se cale sur la vitesse fulgurante du cerveau de Steve Jobs. Face à Kate Winslet, dans la jupe de la très compréhensive assistante, Michael Fassbender, caméléon et glaçant, confirme son immense talent à incarner les types pas franchement aimables. On sort épuisé de ce film très dense, mais totalement bluffé. B.T. veaux ordinateurs : les couloirs interminables menant aux coulisses, la scène, la fosse d’orchestre, la salle… « Je voulais faire un film d’action où les mots remplacent les coups de poing. Le fait de tourner dans l’ordre chronologique, ce qui est très rare, a permis aux comédiens de prendre progressivement la dimension de leurs personnages et d’évoluer en même temps qu’eux. » Trouver l’acteur capable de se glisser dans le pull à col roulé de Steve Jobs ne fut d’ailleurs pas simple. Pressenti, Leonardo DiCa- prio refuse de jouer un type qu’il n’aime pas. Tom Cruise est à un moment envisagé. C’est finalement Michael Fassbender qui accepte de s’y coller, même s’il ne nourrit pas non plus une grande admiration pour un homme qu’il connaît mal. Il se passe en boucle tous les discours et interviews du patron d’Apple trouvés sur YouTube, cherchant l’incarnation plutôt que l’imitation. « Ils se ressemblent tous les deux : ils ont la même intransigeance, un désir d’excellence, une capacité à inventer dans l’instant. À la différence que Michael ne parle mal à personne et a, lui, beaucoup d’humour. » Steve Jobs n’a pas eu le même succès dans les cinémas que sur le marché high-tech. Universal a d’ailleurs choisi de ne sortir le film que dans un petit réseau de salles aux États-Unis. Anticipant le fait que les nombreux fans de la marque à la pomme bouderaient un biopic qui égratigne leur héros ? « Notre but n’était pas de casser le mythe, juste de montrer qu’il reste humain, avec les névroses de sa trop grande intelligence. » Les nominations à l’oscar de Michael Fassbender et Kate Winslet pourraient bien relancer la carrière du film. « Je n’ai aucune amertume, dit Danny Boyle. La preuve, je n’ai pas balancé mon iPhone ! » g Un film français titré à Gérardmer ? ET SI LE grAND PrIx du festival de gérardmer revenait cette année à un film français ? Présenté hier matin, Évolution, de Lucile Hadzihalilovic, la compagne de gaspar Noé, a toutes ses chances lors de la cérémonie de clôture qui se déroule ce soir à 19 heures. Ce conte crépusculaire avait déjà fait le buzz à Toronto avec son sujet audacieux. Sur une île isolée, des femmes élèvent leurs enfants, uniquement des garçons. Parmi eux, Nicolas, 11 ans, est convaincu que sa mère lui ment. Chaque soir, elle lui fait avaler un mystérieux médicament qui le rend malade. Les copains de son âge reçoivent le même traitement. L’un après l’autre, ils sont conduits à l’hôpital, duquel ils ne reviennent pas. Nicolas se pose des questions… La scène d’ouverture donne le ton : la photographie sublime d’un paysage méditerranéen et de ses fonds sous-marins qui dissimulent l’horreur. La réalisatrice dissémine ses indices avec subtilité pour aborder la question de la manipulation génétique et du cycle de la vie dans une atmosphère hypnotique. Une œuvre insolite et poétique qui vous hantera longtemps. S.B. lejdd.fr Chroniques et palmarès du Festival. La Terre et l’Ombre iiff De César Acevedo, avec Haimer Leal, Hilfa Ruiz. 1 h 37. Un vieil homme revient au chevet de son fils sur la terre qu’il a abandonnée des années plus tôt. Confronté à son ex-femme, sa belle-fille et son petit-fils, il découvre comment la monoculture intensive de la canne à sucre a défiguré son pays, la vallée du Cauca, grenier à sucre de la Colombie… Le premier film de César Acevedo, Caméra d’or à Cannes, entrelace à petit pas plusieurs drames inextricables, intimes et sociaux. Agencées de façon parfois trop hiératique sous forme de tableaux léchés, ses images n’en restent pas moins prégnantes. Son propos, mû par une saine colère à l’encontre de ceux qui spéculent aux dépens de la terre et du peuple, prend une dimension âpre mais poignante. AL.C. Le Temps des rêves ifff D’Andreas Dresen, avec Merlin Rose, Julius Nitschkoff. 1 h 57. C’est l’histoire d’une bande de copains pris dans les remous de l’Histoire. Lors la chute du mur de Berlin, des ados de Leipzig trompent leur ennui à la bière, au vandalisme et à la techno. Tiré d’un roman de Clemens Meyer, Le Temps des rêves dépeint une jeunesse désenchantée mais éprise de liberté, sans s’étendre sur les raisons de son déchaînement. Ici, la lumière ne pénètre jamais et ces gamins suscitent rarement la sympathie. Trop de rixes avec des néonazis, de virées dans des voitures volées et d’excès en tout genre. Pourtant ce film ne manque pas de rythme et témoigne de la difficulté à trouver sa place dans un monde nouveau, pas forcément meilleur. BA.T. cinéma | culture | 27 jdd | 31 janvier 2016 en salles mercredi Alvin et les Chipmunks – À fond la caisse ifff Une sublime anomalie De Walt Becker, avec Jason lee, Kimberly William-paisley. 1 h 32. Persuadés que leur père adoptif va se marier, Alvin et ses deux frères craignent d’être abandonnés. Avec la complicité du fils de la future épouse, un ado trop antipathique pour être heureux, les trois tamias s’échinent alors à empêcher l’union d’avoir lieu. Dans ce quatrième volet, les bestioles chanteuses sillonnent les États-Unis à un train d’enfer, gratifiant ceux qu’elles croisent de leur pénible voix. On sourit parfois en dépit de gags souvent lourds. Pour les moins de 10 ans. Ba.t. Mini et les voleurs de miel iiff Le choix neutre des physiques de Michael et Lisa, les deux héros du film, ont été inspirés de modèles réels afin que les spectateurs s’identifient facilement aux personnages. PROD Charlie Kaufman coréalise une fable d’animation tragi-comique pour adultes nominée aux Oscars De Jannik hastrup. 1 h 15. Stéphanie BelpêChe PROD À l’occasion de son retour au village, Mini, le scarabée rondouillard, se produit avec ses camarades du cirque. Mais lors du spectacle, il renverse une acrobate qui danse sur un fil. Par peur d’être réprimandé, l’insecte s’enfuit dans la forêt, où il rencontre un gang de voleurs. Avec ses dessins simples, ses couleurs vives et sa musique jazzy, la suite des Deux Moustiques véhicule des valeurs d’honnêteté et d’amitié. Au royaume de l’infiniment petit, même les méchants finissent par revenir dans le droit chemin. Les plus jeunes feront leur miel de ce conte charmant. Ba.t. Dofus – livre i : Julith ifff D’anthony Roux et Jean-Jacques Denis. 1 h 47. Joris, orphelin, vit au côté de son tuteur dans la paisible cité de Bonta. L’arrivée d’une sorcière maléfique va bouleverser leur vie. Après le jeu de rôle en ligne, la BD et la série télévisée, Dofus se décline sur grand écran. Pas de méprise, en dépit d’un style graphique proche des mangas, ce long métrage d’animation destiné aux ados est français. Dommage que ses personnages soient trop archétypaux et que leur humour manque de finesse. On pense aux japonaiseries du Club Dorothée. Mais l’univers Dofus à ses fans. Ici, les qualités esthétiques restent indéniables et le film regorge de péripéties. Ba.t. @StephBelpeche Un homme et une femme. Une rencontre dans un hôtel. Une parenthèse enchantée, hors du temps. La passion survivra-t-elle au lendemain ? À coup sûr, Claude Lelouch va adorer Anomalisa. À partir d’une situation sans cesse revisitée, Charlie Kaufman et Duke Johnson signent un long métrage d’animation d’une folle originalité. Un outsider dans la course aux Oscars. « On devrait pouvoir concourir dans la catégorie meilleur film. Au lieu de ça, on se retrouve face à Vice-Versa et à Shaun le mouton. Nous ne nous adressons pas vraiment au même public ! [Rires.] On raconte une histoire pour les adultes en employant un langage cru et une scène de sexe très explicite. » Ce projet atypique est né d’une pièce de théâtre pour la radio interprétée il y a dix ans par ceux qui reprennent leurs personnages aujourd’hui, David Thewlis et Jennifer Jason Leigh. Sauf que cette fois il s’agit de stop motion, d’animation image par image de figurines dans des décors à leur échelle, une technique fastidieuse déjà employée par le studio britannique Aardman et par Tim Burton. Un financement participatif qui a mobilisé 6.000 donateurs Charlie Kaufman et Duke Johnson ont gardé l’aspect brut du visage et du corps de leurs marionnettes manipulables. « On ne voulait pas cacher les coutures ni la véritable nature de nos héros, Michael et Lisa, très fragiles, indique Charlie Kaufman. J’aime cette technique car le monde qu’elle dépeint est en trois dimensions et imparfait. On a choisi des physiques communs pour que le public se projette plus facilement. » Anomalisa a vu le jour grâce à Kickstarter, entreprise de financement participatif qui a mobilisé 6.000 donateurs, plus un mécène privé. Huit millions de dollars plus tard, le film est né. « Avec un budget aussi restreint, nous avons travaillé pendant trois ans avec 120 techniciens qui se relayaient en permanence, fabriqué 150 poupées et pris environ 120.000 photos, pour un film de 90 minutes. À raison de huit images par jour, il fallait s’armer de patience. Des décors inondés ou qui s’effondraient, des bras cassés et c’était la panique sur le plateau. » Le syndrome de Fregoli Charlie Kaufman se refuse à donner la moindre interprétation à son scénario. « Pour ne pas gâcher l’expérience du spectateur. Après, je voulais aborder le syndrome de Fregoli. Le sujet, frappé de paranoïa, dit qu’il est persécuté par une personne qui change souvent d’apparence. Une métaphore pour évoquer l’incapacité de Michael à interagir avec les autres. Je suis un observateur de la nature humaine, dont j’essaie de rendre compte de la manière la plus honnête possible. Il ne faut pas avoir peur d’être vulnérable. Notre temps est compté. Un moment extraordinaire peut modifier à jamais une trajectoire et la perception du monde. » g Anomalisa iiif De Duke Johnson et Charlie Kaufman, avec les voix de David thewlis, Jennifer Jason leigh (VO). 1 h 31. Sortie mercredi. Michael, célèbre écrivain, part en voyage d’affaires à Cincinnati, loin de la morosité de sa vie, qu’il ne supporte plus. À son arrivée, il remarque Lisa, représentante en pâtisserie. Coup de foudre. Chaque minute compte… Une sublime anomalie que ce premier long métrage d’animation de Charlie Kaufman, scénariste de Michel Gondry et de Spike Jonze. Il s’associe avec Duke Johnson pour réaliser cette fable pour adultes d’une acuité bouleversante sur la solitude de l’individu. On oublie que les rôles principaux sont tenus par des figurines tant le film se révèle captivant. Le tandem raconte le miracle de la rencontre amoureuse avec une sensibilité rare. Mais aussi la standardisation des hôtels et des rapports humains, qu’il faut bousculer pour échapper à la banalité, à l’ennui et au désespoir. Grand prix à la Mostra de Venise, cette œuvre inclassable est résolument unique. Traversées de parenthèses surréalistes et oniriques, sa clairvoyance et sa mélancolie frappent droit au cœur. S.B. Les marionnettes ont été modélisées grâce à des imprimantes 3D. 28 | culture | théâtre | eXPO JDD | 31 janvier 2016 Dernière conversation sans chichis À 91 ans, Jean Piat partage ses souvenirs avec le public dans « Pièces d’identité », un spectacle fait de tirades et d’anecdotes. L’ultime de sa carrière BarBara ThéaTe Mardi dernier, Jean Piat avait bien envie d’utiliser sa canne pour faire marcher les autres droit. Gêné par les haut-parleurs des manifestants venus clamer leur mécontentement devant le ministère de la Santé, au coin de la rue. « Cela arrive souvent. Pour mon grand malheur, Mme Marisol Touraine n’est pas très appréciée du corps médical… Mais aujourd’hui, on ne s’entend même plus parler ! » Ce matin-là, cela tombe mal car le comédien a décidé de répéter tranquillement chez lui Pièces d’identité, le texte de souvenirs qu’il a écrit et qu’il jouera sur la scène des Bouffes-Parisiens dès aujourd’hui. « À 91 ans, il faut exercer plus que jamais sa mémoire. J’ai de la chance : chez moi, la tête fonctionne encore plutôt bien. C’est la mécanique qui déraille ! Mes jambes ne répondent plus. J’ai dû gérer toute ma vie des problèmes de dos, mais désormais j’ai beaucoup de mal à marcher. Alors tant qu’on le peut encore, il faut être lucide, et accepter de tirer le rideau. » À 14 ans, il imite Maurice Chevalier Ce nouveau spectacle, Jean Piat l’a donc conçu comme une espèce d’adieu. Ou plutôt comme un au revoir, « pour utiliser un mot moins définitif ». Une dernière conversation nostalgique, afin de prolonger celle entamée avec le public voilà déjà soixantedouze ans, jalonnée de textes qu’il aime, d’anecdotes sur sa vie. Il raconte ce jour où, à 14 ans, il monte sur la scène d’un casino de province pour un radio-crochet et imite Maurice Chevalier ; comment sa mère, avant de mourir quand il n’a que 17 ans, le pousse à entrer à la Comédie-Française afin de rassurer son père, « puisqu’on y était fonctionnaire ». « J’y suis entré par la petite porte, sur audition, mais j’y ai passé vingt-cinq merveilleuses années. » Jean Piat prend plaisir à revenir sur les grands rôles de sa carrière : ce Cyrano de Bergerac dont il a Jean Piat sur la scène des Bouffes-Parisiens, à Paris. MARTIN BUREAU/AFP « mis 400 fois le nez » et qui lui compliments de ma carrière : a valu un soir 49 rappels ; ou le à l’époque, c’était Dieu ! » Robert d’Artois des Rois maudits, Pour son dernier moment de « pour lequel Maurice Druon cherthéâtre, Jean Piat n’a surtout rien chait un Burt Lancaster français ». voulu de prétentieux. À l’image de Dans Pièces d’identité, il évoque ce qu’il est : un comédien transles personnalités porté sur les planches mais qu’il a croisées : Sacha Guitry, le « C’est un privilège discret à la ville. « maître », dont de pouvoir dire « Je suis né timide il a fréquenté et je le suis resté. enfant les mêmes qu’on a véCu J’ai réussi à me é c o l e s , « u n de sa passion » défouler à travers signe », et qui des personnages, l’invite, tout jeune comédien, à car ils n’étaient pas moi. Pièces découvrir ses précieuses cold’identité, c’est ma façon d’inviter lections théâtrales. Madeleine les gens à une petite causette, sans Renaud, qui lui dit n’avoir jamais chichis et entre amis. Car c’est cela, vu un Figaro aussi franc et humain la scène : la rencontre avec un public que le sien. « Un des plus beaux qui, comme disait Guitry, est un peu notre pays. Quelle noble mission que de chercher à l’émouvoir ou à le faire rire ! Jouer la comédie m’a rendu très heureux. Le hasard m’a poussé vers le théâtre, et je l’en remercie car j’étais fait pour ce métier. C’est un privilège de pouvoir dire qu’on a vécu de sa passion. » Nous, acteurs, avons la chance de nous amuser avec la mort Pour autant, Jean Piat n’envisage pas de mourir sur scène. Même s’il l’a fait très souvent et avec une certaine délectation. « Parce que chacun pense forcément à sa propre fin, il y a à ce momentlà dans la salle une écoute exceptionnelle : plus personne ne tousse, plus un fauteuil ne craque… Nous, acteurs, avons la chance de nous amuser avec la mort avant de la connaître. » Aujourd’hui, le nonagénaire ne la craint pas, mais n’est pas pressé qu’elle arrive. L’existence, il l’a toujours prise du bon côté, en en savourant pleinement chaque instant. Du coup, pas de regrets, « du moins fondamental ». Même pas le cinéma ? « J’ai commis l’erreur de croire que la télévision m’y mènerait. Je n’avais pas compris que les gens qui m’avaient gratuitement sur leur petit écran n’avaient aucune envie de payer pour me voir sur le grand ! » g Pièces d’identité, Bouffes-Parisiens, Paris (75002), jusqu’au 30 avril. rés. : 01 42 96 92 42 et bouffesparisiens.com Joe, ce robot qui ausculte vos réactions Utilisé pour des recherches scientifiques sur le public, cet androïde, au cœur de l’exposition « Persona » au Quai Branly, est capable de sourire ou de se renfrogner face aux visiteurs ou aux œuvres Marie-anne KleiBer MUséE dU qUAI BRANly/CyRIl ZANNETTACCI @Makleiber Son nom : Berenson. Un clin d’œil au critique d’art américain Bernard Berenson, spécialiste de la Renaissance italienne au début du XXe siècle. Son prénom, Joe, pour la touche sympathique. Joe Berenson, âgé de 4 ans, a la taille d’un adulte, porte une veste noire sur son squelette métallique et se déplace doucement sur des roulettes. Ce robot coiffé d’un melon noir a l’air de s’être échappé d’une toile surréaliste de Magritte. L’engin est présenté depuis cette semaine au musée du Quai Branly à Paris, dans l’exposition « Persona, étrangement humain » (lire l’encadré). Il devrait également se balader dans les collections permanentes du 17 au 27 avril 2016, comme il l’a déjà fait plusieurs fois depuis 2012, le temps de campagnes de recherches sur le terrain. « Il passe cependant l’essentiel de son temps en laboratoire de robotique, où il est perfectionné », précise l’anthropologue Denis Vidal, de l’Institut de recherche pour le développement, qui fait partie de l’équipe pluridisciplinaire travaillant sur ce projet depuis 2011*. « C’est un petit exploit en soi que ce robot puisse se déplacer et “survive” dans un milieu ouvert pendant plusieurs heures. » Berenson a été conçu d’abord comme un premier pas vers de futurs robots-médiateurs intervenant auprès du public dans les musées. Doté de deux caméras glissées dans les yeux, il enregistre dans un premier temps les réactions – rejet ou attraction – des visiteurs. Les résultats montrent que les curieux s’approchent de lui, cherchent à dénicher ses capteurs et ensuite se comportent comme avec une personne : ils essaient de le faire sourire, lui disent au revoir… On nage en plein anthropomorphisme, pour la plus grande joie du public. « Nous retrouvons un des thèmes abordés dans l’exposition “Persona”, dit Denis Vidal*. On voit dans le parcours comment les groupes de population définissent ce qui est humain et nonhumain ; comment certains objets se situent à la frontière des deux et sont considérés comme des êtres vivants, dans certaines cultures. » Des goûts esthétiques en évolution Joe a été doté, en plus, d’un « sens esthétique artificiel » grâce à un algorithme. Non seulement il reconnaît des sculptures qu’il aime et se déplace vers l’œuvre – quand ça ne lui plaît pas, il se renfrogne carrément et s’en va –, mais il est également capable de culture | 29 jdd | 31 janvier 2016 Torreton joue les prolongations Le comédien s’affiche dans deux reprises, « cyrano de Bergerac » bipolaire d’un côté, slameur de la poésie d’allain Leprest de l’autre aLexis caMPion Thank You Shakespeare ! Tel est le titre du livre de Philippe Torreton à paraître le 24 février chez Flammarion. Il fera suite à Mémé, un portrait de sa grand-mère, qui l’avait placé en tête des ventes, et à Cher François, un essai adressé au président Hollande sous forme de supplique pour une gauche retrouvée. Cette fois, promis, il revient à son métier. « C’est un livre assez court, j’y témoigne de ce que Shakespeare m’a fait éprouver dans mon cœur, ma chair », dit l’intéressé, connu pour avoir incarné sur scène Henri V, Richard III et Hamlet. « Je voulais dire à quel point cet auteur est plus populaire qu’on ne le pense. Tout le monde le connaît mais le grand public hésite trop souvent, s’attendant à tort à un théâtre compliqué. » Crâne rasé et limite pathologique Dans l’immédiat, ce mardi, c’est au cœur du théâtre privé que l’ancien sociétaire du Français reprend du service, dans un rôle qu’il habite depuis déjà trois ans avec près de 180 représentations : Cyrano de Bergerac, le chef-d’œuvre d’Edmond Rostand. Créé en 2013 au Théâtre national de Bretagne, à Rennes, le spectacle surprend avec son Cyrano crâne rasé, bipolaire à la limite pathologique. Il a rencontré un tel Cyrano de Bergerac iiif avec Philippe Torreton, Maud Wyler. Après avoir triomphé à l’Odéon et partout en France, la mise en scène de Dominique Pitoiset arrive à la Porte-Saint-Martin, qui vit la création de la pièce en 1897. Cette fois, Edmond Rostand vole au-dessus d’un nid de coucous. Cyrano, couturé de partout, règne sur une bande d’éclopés. Univers froid de la psychiatrie ; juke-box crachant Piaf et les Beatles ; dialogue du balcon joué par l’intermédiaire de Skype… Cette actualisation ne prétend pas décrypter certains traits de votre visage et d’y réagir par un sourire ou par une moue ! Dans une étape suivante, Denis Vidal veut étudier l’influence de Joe et de ses goûts sur le comportement des visiteurs. Les entraînera-t-il dans son sillage, par exemple pour partager ses coups de cœur ? Mieux, comme il apprend en permanence, Berenson devrait affiner son sens de l’esthétique avec le temps. De là à imaginer Joe en commissaire d’exposition dans quelques années… Affaire à suivre ! g * Un travail partagé avec le roboticien Philippe Gaussier, de l’etis (Équipes traitement de l’information et systèmes), université de cergy-Pontoise. * aux frontières de l’humain, Denis Vidal, alma editeurs. succès dans les salles subventionnées qu’il se permet, aujourd’hui, une renaissance sous les auspices du privé. Une situation peu courante « mais louable », remarque le comédien. « Car paradoxalement, nous sommes nombreux à nous battre pour qu’entre ces deux mondes, les frontières n’existent plus d’un point de vue de l’orthodoxie artistique ! En fait, j’avais prévu de jouer dans Othello, de Luc Bondy. Lorsqu’il est mort, on a parlé de ma disponibilité au directeur de la PorteSaint-Martin, qui était intéressé par Cyrano. J’ai dit oui tout de suite. » « Un traitement dramaturgique fort » Pour cette reprise, la production accueille trois nouveaux comédiens, dont Julie-Anne Roth dans le rôle de Roxane, et prévoit de tenir l’affiche jusqu’en avril. « Ce qui arrive à ce Cyrano me réjouit d’autant plus que le metteur en scène, Dominique Pitoiset, lui offre un traitement dramaturgique fort. On ne s’autorise pas toujours assez de telles libertés avec les grands classiques. Et là, malgré le parti pris clinique de départ, la pièce est totalement investie dans ses moindres recoins, les passages les plus drôles, les plus noirs et les plus secrets. » Un plaisir que le public ne demande qu’à partager, il en est convaincu. « Cyrano, plus on le joue, plus on amène des gens nouveaux vers les théâtres. Je me souviens revisiter les enjeux de ce sommet romantique, elle offre une épaisseur, une fragilité portées à haut niveau par un époustouflant Philippe Torreton : un corps bedonnant en marcel et moustache de beauf, une laideur transcendée par la précision de la langue, une banalité luttant contre la tonitruance des tirades. On aime cette humanité chancelante débarrassée de toute fanfaronnade. Au fond, chacun a droit à l’élégance morale, même au plus près de la chute. PaTrice TraPier Philippe Torreton, en Cyrano de Bergerac, entouré de Bruno Ouzeau et de Nicolas Chupin. Brigitte enguerand/ divergence qu’à l’époque de Richard III, j’avais proposé qu’on le donne dans moins de villes mais plus longtemps. Cela a fonctionné : le public répondait à l’appel. Sachant qu’à peine 5 % des Français vont au théâtre, je me dis qu’exploiter un spectacle, c’est beau, ce n’est pas mercantile. » Cela ne l’empêche pas de nourrir des projets parallèles qui rencontrent, eux aussi, le public, à l’instar de ce Mec !, le spectacle hommage qu’il a créé en 2014 avec un percussionniste, Edward Perraud, pour faire résonner la poésie du parolier chanteur Allain Leprest, décédé en 2011. Joué près de soixante fois, ce solo proche du slam, parlé et non chanté, a fini par faire l’objet d’un disque qui sort ces jours-ci. « Cela a été un succès inattendu, jusque dans les festivals de jazz. Du coup, nous prévoyons de repartir en tournée, envisageons même de le jouer aux États-Unis, indique Torreton. Lorsque l’ancien producteur de Leprest m’a contacté pour défendre ses textes à nu, sans musique, j’étais épaté : il ne savait même pas que je connaissais bien Allain. Je l’avais découvert quand j’étais encore lycéen à Rouen, j’avais tout de suite été sous le choc de son écriture puissante et accessible, à la fois hypertravaillée et simple, caractérisée par un sens de la concision et de l’image, assez jouissif. » Les thèmes chers à Leprest, comme les ivrognes et leurs chiens, les injustices, les gens qui rament et les fauchés, sont également chers au comédien, connu pour revendiquer ses origines populaires et ses engagements à gauche. « Cet univers a la vertu de nous dire ce que sont les petites retraites, les vies marquées Humain mais pas trop ! Foisonnante et étonnante, l’exposition « Persona » mélange œuvres d’art premier, arts contemporain et robotique comme ce bébé phoque articulé à visée thérapeutique, ou cette poupée sexy, la Love Doll (photo)… Très dense, le parcours aborde différentes notions scientifiques, telle la tendance innée que nous avons à l’anthropomorphisme. Impossible de ne pas voir des figures humaines dans des monolithes sculptés du Mali (IIIe au VIIe siècle), difficile de ne pas imaginer une poursuite entre un triangle et un cercle dans une vidéo (l’expérience de Heider et Simmel datant de 1944). La salle de La Vallée de l’étrange revient sur doll Story l’idée que les robots doivent nous ressembler, jusqu’à un certain point au-delà duquel ils nous mettent mal à l’aise. Humain, mais pas trop, quand même. Persona, étrangement humain, jusqu’au 13 novembre 2016, musée du Quai Branly, Paris (75015). par l’alcool, les bistrots, les ouvriers, les marchands ambulants ou encore les quartiers anciens que l’on démolit pour en faire des logements sociaux tout neufs… Sa façon de décliner la nostalgie, l’enfance et le mal de vivre qui vient de là, me touche particulièrement. » g cyrano de Bergerac, mise en scène de Dominique Pitoiset, Théâtre de la Porte-saint-Martin, Paris (75010), à partir de mardi. réserv. : 01 42 08 00 32 et Portestmartin.com Mec ! avec edward Perraud, le 15 février à la cigale, Paris (75018). réserv. : 01 49 25 89 99 et lacigale.fr 30 | culture | lire JDD | 31 janvier 2016 Jane Deuxard et Deloupy S’aimer, quand même Le duo de journalistes s’est rendu clandestinement en Iran, afin de recueillir les faits et les rêves de la jeunesse du pays. Un reportage dessiné n’avait pas consommé d’alcool. Aujourd’hui, elle est passée de la peur imer aujourd’hui en Iran. à la haine : « Je les hais encore plus Les journalistes étranque je n’en ai peur. » L’ex-Premier gers ont rarement été les ministre Mir Hossein Moussavi a bienvenus en Iran. La suscité une immense vague d’espoir situation s’est aggravée lors de la présidentielle de 2009. depuis les manifestations qui ont Les Iraniens étaient convaincus de suivi la réélection à la présidence sa victoire. L’élection de Mahmud de Mahmud Ahmadinejad en Ahmadinejad a enterré leurs rêves 2009. Jane Deuxard (un duo de de changement. Les manifestations journalistes et un couple à la ville) de rue, pour s’insurger contre les se rend régulièrement en Iran de fraudes, ont été réprimées dans le manière clandestine. Le voile et sang. L’angoisse est sans cesse là : ils le manteau trois-quarts sont oblisont épiés, surveillés par des yeux gatoires, dans les espaces publics, amis et ennemis. pour les femmes. Les deux coscéLes patrouilles de police et naristes se fondent dans le paysage. les Bassidji sont partout, mais les Ils vont à la rencontre de jeunes deux journalistes poursuivent leur gens Iraniens, entre 20 et 30 ans, investigation. On rencontre Saviosh pour converser avec eux. Comment (20 ans). Il gagne sa vie dans un café vit-on dans une République islachic, mais habite dans un quartier mique ? On veut aimer, sortir, boire, populaire. La musique autre que rire, comme toutes religieuse n’a pas les jeunesses du « AvAnt, on priAit droit de cité en monde, mais on Iran. Saviosh aime ne le peut pas. Les à l’intérieur les Pink Floyd, jeunes Iraniens et on buvAit à joue de la guitare sont écrasés entre électrique, aimela peur du régime l’extérieur. Depuis rait être musicien. et le poids de la lA révolution, on On rencontre Vahid (26 ans). tradition. Les maIl incrimine ses riages arrangés, les prie à l’extérieur parents. Eux ont certificats de virgi- et on boit à fait la révolution nité, les contrôles de 1979, lui vit incessants. Ils sont l’intérieur ! » pris en étau entre un Iranien dans une Répula famille et la loi. blique islamique. Les deux jourOn rencontre Omid (25 ans). Pour s’inscrire à nalistes ne plaquent pas leurs regards d’Occidentaux sur les mœurs l’université américaine, il a besoin iraniennes. L’époux doit subvenir d’une copie officielle de son diplôme aux besoins de la femme. La jolie iranien. Il traduit bien les choses : Zeinab (20 ans) est sincèrement s’il veut partir étudier à l’étranger, il ravie de cette situation. Elle interdoit rembourser ses études. On renpelle, à Ispahan, la journaliste : « La contre Soban (28 ans) à Mashhad. vie des femmes est bien plus facile C’est la deuxième ville du pays. Il en Iran. Dans les pays occidentaux, est médecin et ne peut pas choisir on attend de vous, les femmes, que la femme de sa vie. Il fréquente vous subveniez à vos propres beune infirmière depuis quatre ans, soins. » Mais bien d’autres, ici, ont mais ne la connaît pour ainsi dire d’autres rêves. Saeedeh (30 ans) pas. On rencontre Ashem (20 ans) a pensé qu’elle pouvait échapper et Nima (20 ans). Ils découvrent à la chape de plomb de son pays. lors de la discussion qu’ils ne sont Elle veut quitter Téhéran et partir d’accord sur rien. Ils se voient si à l’étranger. peu. Les femmes et les hommes ne sont pas libres de se donner rendez-vous comme ils veulent L’angoisse est sans cesse là : ils sont épiés, surveillés dans l’espace public. On rencontre Du vert : des pelouses, des arbres, Jamileh (29 ans). Elle profite du des buissons. On rencontre Gila et régime grâce à sa situation et voyage Mila dans le centre de Téhéran. Ils en Europe. forment un véritable couple. Les relations sexuelles, avant le mariage, Le bonheur est-il interdit pour la jeunesse iranienne ? sont officiellement interdites. Elle a voulu prendre le risque de faire Ce qui frappe : l’absence d’expél’amour et il l’a convaincue de ne rience. Les jeunes Iraniens n’ont pas passer à l’acte. Ils sont ensemble pas le droit de se tromper avant de depuis huit ans. Ils ont des rapports se lancer dans la vie conjugale. Le uniquement oraux ou anaux, car la poids de la tradition est encore plus femme doit arriver vierge au malourd que le poids du régime. Les riage. Elle raconte comment, lors filles qui ont des relations sexuelles d’une fête avec des amis, la police avant le mariage se font reconsa débarqué. Peut-être une dénontruire l’hymen. Le phénomène est courant malgré le coût de l’opéraciation d’un voisin. Les filles ont été emmenées au poste. Son père tion. Les journalistes s’interrogent : a été victime d’une crise cardiaque le bonheur est-il interdit pour la en venant la chercher. Heureusejeunesse iranienne ? Ailleurs, Sament, elle portait son voile et elle viosh aurait été musicien. Leila MarIe-Laure DeLorMe A Planche extraite de « Love Story à l’iranienne », de Jane Deuxard, dessins de Deloupy. DR (26 ans), une coiffeuse, dit : « Les jeunes ont la vie rude en Iran. Les gens qui le comprennent sont tristes et déprimés. Ceux qui sont heureux sont aveugles. » L’humour, sous toutes ses formes, est présent. Les dessins de Zac Deloupy sont prégnants, évocateurs, poétiques. Scénaristes et dessinateur racontent le courage, la lassitude, la rage. Les jeunes gens se montrent, pour la plupart, pragmatiques, réalistes. La raison remplace le cœur, pour survivre, pour s’extraire, pour s’en sortir, en Iran. Tous les milieux, tous les discours. Les deux journalistes se rendent dans les hautes sphères iraniennes. Soirée huppée. L’un des convives : « Avant, on priait à l’intérieur et on buvait à l’extérieur. Depuis la révolution, on prie à l’extérieur et on boit à l’intérieur ! » Le fruit de leur enquête est simple : aucun assouplissement. Malgré l’accord sur le programme nucléaire (juillet 2015) et un président considéré comme réformateur (Hassan Rohani), la liberté reste un rêve inatteignable pour les jeunes Iraniens. Ils ne tentent plus de s’opposer au régime des mollahs, comme s’ils avaient définitivement perdu la bataille. On les écoute : Ils aimeraient parler d’amour, ils parlent de politique. Le sentiment est un luxe hors de prix. Les cigarettes sont là tout du long. Elles sont écrasées de peur d’être prises sur le fait ; elles sont fumées comme on inhale un peu d’espoir. Parmi les dernières images : la coiffeuse Leila jette une cigarette d’un balcon de Téhéran, la nuit, comme pour tenter de mettre un peu de lumière dans son avenir. On n’arrive pas à distinguer si la cigarette est allumée ou éteinte. g Love Story à l’iranienne, Jane Deuxard (scénaristes) et Deloupy (dessinateur), Delcourt/Mirages, 150 p., 17,95 €. sélection JDD 5 LIvres françaIs La renverse, Olivier Adam, Flammarion. L’autre Joseph, Kethevane Davrichewy, S. Wespieser. envoyée spéciale, Jean Echenoz, Minuit. La splendeur dans l’herbe, Patrick Lapeyre, POL. Histoire de la violence, Édouard Louis, Seuil. 5 LIvres étrangers Le nouveau nom, Elena Ferrante, Gallimard. La route étroite vers le nord lointain, Richard Flanagan, Actes Sud. City on fire, Garth Risk Hallberg, Plon. eileen, Ottessa Moshfegh, Fayard. tous les vivants, Jayne Anne Phillips, L’Olivier. lire | culture | 31 jdd | 31 janvier 2016 Les ouvriers dans le Chaudron Chef de la rubrique football de L’Équipe, Vincent Duluc ne se contente pas de raconter, après de l’académie Goncourt moult confrères, l’histoire d’un @bernardpivot1 club mythique qui a fait chavirer le cœur des fervents du football. Le journaliste s’est fait écrivain. ouze mai 1976 : date Même si, parfois, il torture un historique. Ah, oui, peu trop sa phrase pour lui pourquoi ? Vous ne vous donner un tour littéraire, il rappelez pas ? Allez, je vous possède un réel talent de aide. C’était à Glasgow, au conteur, abondant et agile, Hampden Park. C’est un stade ? virtuose d’observations Oui, le stade où les Verts de inattendues. Avec les mots, il sait Saint-Étienne ont perdu la dribbler. Mais, surtout, il a eu finale de la Coupe d’Europe l’ambition de dépasser des clubs champions contre le le football pour faire le portrait Bayern Munich. Une défaite de l’époque et y remettre, avec imméritée par 1 but à 0. Quand humour, le garçon qu’il a été. même une défaite ? Oui, mais, Pour les rares lecteurs comme souvent en France, plus du JDD qui l’ignoreraient, historique que si ça avait été rappelons que, depuis belle une victoire. D’ailleurs, lurette, les clubs de foot de président, entraîneur et joueurs Saint-Étienne et de Lyon ne ont défilé le lendemain sur les peuvent pas se pifer. Une Champs-Élysées, sous les vivats rivalité trop souvent limite de la foule. Triomphe de donne lieu à des derbys l’admiration compassionnelle. toujours revanchards. Or, Un printemps 76 s’achève sur Vincent Duluc, le récit de cette qui, depuis incroyable L’histoire d’un trente ans, écrit prouesse plus sur les matches psychologique cLub mythique de l’Olympique que sportive. Mais « l’épopée qui a fait chavirer lyonnais, fait l’aveu d’une des Verts » avait Le cœur ascendance commencé bien stéphanoise avant, quand ils des fervents et d’« une retournaient du footbaLL adolescence dans leur stade et portrait verte ». fétiche de Cornélien ! Geoffroyde L’époque Mais, avec Guichard des « manu » sang-froid et des situations bonne humeur, compromises il assume son sur les pelouses arrière-grandde leurs père qui essayait les vélos à la adversaires européens. Vincent Manu, son grand-père et son Duluc, l’auteur du livre, avait père qui avaient l’accent 13 ans. Il était « au premier rang « gaga », et ses enfants lyonnais, contre le grillage qui a zébré supporteurs de l’OL. Lui, [son] nez acnéique et froid, ce fils d’un prof nommé à soir de mars 1976, lorsque Bourg-en-Bresse, c’est dans le Dominique Rocheteau a marqué 01000 qu’il a grandi. Il avoue contre le Dynamo Kiev ». avoir été un cancre. « J’ai Victoire légendaire qui a plus rapidement aimé le foot et la fait pour la gloire de presse du foot : à partir du Saint-Étienne que la victoire moment où j’avais décidé de ne de Taillebourg sur Henri III pas travailler au lycée, il fallait d’Angleterre pour la gloire bien que je m’occupe. […] Pour de Saint Louis. Bernard Pivot D Mordecai Richler nos vies alanguies, les Verts étaient une tempête. » Il a dû en essuyer de moins agréables, car « il n’était pas facile pour un fils de profs d’être un cancre ». Mais il y avait les chansons, les filles, les copains, le foot du mercredi, les flippers. Tout cela est joliment restitué. Mais l’essentiel était à Saint-Étienne, ville où le football flambait alors que le travail se raréfiait. Les mines fermaient les unes après les autres ; les mineurs perdaient leur emploi et leur prestige. La cité du charbon et de l’acier s’enfonçait déjà dans la nostalgie. Le stade Geoffroy-Guichard, entouré de cheminées, avait été appelé le Chaudron. Le nom lui est resté, mais il y a longtemps que les cheminées ne fument plus ou qu’elles ont disparu. Aux apprentis footballeurs, qui logeaient autrefois au stade, les éducateurs montraient la grisaille des alentours et leur promettaient d’y passer le restant de leur vie s’ils ne mouillaient pas le maillot. Le nom de Manufrance était inscrit sur celui des professionnels alors que l’entreprise sombrait déjà. « La classe ouvrière mourait en chantant “Qui-c’est-les-plus-fortsévidemment-les-Verts” », écrit Vincent Duluc, cruel mais juste. Le football, opium du peuple qui souffre. Le dernier derby a eu lieu, il y a deux semaines, dans le Chaudron. Saint-Étienne a battu Lyon. Victoire imméritée par 1 but à 0. Le contraire de Glasgow. Commentaire de Vincent Duluc dans L’Équipe : « Les supporteurs des deux camps savent qu’il n’y a rien de mieux que de remporter un derby quand on ne le mérite pas. » g Un printemps 76 Vincent Duluc, Stock, 216p., 18 € Le nom de Solomon Gurski L’écrivain canadien Mordecai Richler avait écrit « Solomon Gurski Was Here » en 1989. Suzanne Langevin Quinze ans après la disparition du célèbre écrivain montréalais, les Éditions du sous-sol publient dans une nouvelle traduction cinq de ses romans les plus emblématiques, dont « Solomon Gurski » Laëtitia Favro Province de la Saskatchewan, Canada, 1908. À la sortie de l’école, un bambin de 9 ans est embarqué dans le traîneau de son grand-père, ancien escroc reconverti en prédicateur millénariste chez les Inuits, et s’évanouit dans le blizzard en direction du Grand Nord et de son incroyable destin. Quarante ans plus tard, Moses Berger est lui-même enfant lorsqu’il entend pour la première fois parler de celui « qui deviendrait pour lui une quête et une malédiction » : Solomon Gurski, le père disparu de son plus fidèle ami, Henry. Fils d’un poète sans le sou, lui-même écrivain raté radié de la Société de l’Arctique et de l’université de New York pour « turpitude morale », Moses noie ses échecs successifs dans l’alcool et dans son obsession pour la famille Gurski, aux origines aussi obscures que riches en histoires fabuleuses. De la dernière expédition de Franklin en terre boréale aux ultimes soubresauts de la conquête de l’Ouest, des balbutiements de l’ère industrielle au Montréal des seventies, la destinée de cette dynastie d’émigrés juifs embrasse l’histoire mondiale sur près d’un siècle et demi, témoignant des plus belles réalisations de l’homme comme de ses pires inventions. Gargantuesque et foisonnant, cet étonnant roman avale son lecteur avant de le recracher au gré des pays et des époques hantées par l’insaisissable aventurier, au fil d’un jeu de piste orchestré de main de maître, où chaque coin de rue pourrait afficher, comme un pied de nez, Solomon Gurski Was Here, le titre original de l’œuvre. Le ton, mordant, unique en son genre, relève à la fois de l’humour juif et de l’humour anglais et paraît s’adapter aux lieux où se déroule l’action, palliant l’absence de transitions par une irrésistible légèreté. Une course enfiévrée autour du globe Réputé pour ses saillies n’épargnant ni le milieu des juifs anglophones montréalais (dont il était issu) ni les Québécois francophones, Mordecai Richler semble avoir traduit dans chacun de ses personnages – faibles, menteurs, corrompus, arrivistes, adultères, dépravés – tout le mal que lui inspiraient ses congénères, mais également toute la tendresse suscitée par certains travers humains. Course enfiévrée autour du globe tout autant que portrait d’une famille naviguant sur six générations au gré des aléas de l’Histoire et des revers de fortune, Solomon Gurski est une invitation au voyage, une main tendue que l’on regrette parfois d’avoir saisie, bringuebalés à tout vent, mais qu’on ne voudrait plus jamais lâcher. g Solomon Gurski, Mordecai Richler, trad. Lori Saint-Martin et Paul Gagné, Éditions du sous-sol, 608 p., 24 € (en librairies jeudi). 32 | personnalités JDD | 31 janvier 2016 Alexandre Giesbert Ginette Kolinka, parole d’honneur « Mon père n’a pas son mot à dire en cuisine » Plutôt que de faire journaliste comme papa, il a préféré se lancer dans la « food ». À 31 ans, le fils de FOG a déjà ouvert trois restaurants à Paris et s’apprête à inaugurer le quatrième dans l’ancienne boutique de Jean Paul Gaultier INTERVIEW LUDOVIC PERRIN @LPJDD Devenir journaliste, ce n’était pas plus simple pour vous ? C’est ce que n’ont cessé de me répéter durant des années les attachées de presse en me caressant la tête : « Ah, toi, tu vas être journaliste ! » Ben non. J’adore mon père, mais je n’ai jamais eu envie de me comparer à lui. Pourquoi un fils ne pourrait-il pas exister par lui-même ? On vous a beaucoup parlé de votre père ? Oui. À l’école, les profs me demandaient toujours : « Vous êtes bien le fils de Franz-Olivier Giesbert ? » Inconsciemment, ça a dû jouer chez moi. Même si ça ne l’a jamais été, je ne voulais pas que ça devienne un problème. « Fils de » n’est pas une vocation. La maman du batteur de Téléphone, rescapée des camps de la mort, était décorée mercredi par la ministre de l’Éducation nationale pour son action contre l’oubli de la Shoah dans les écoles Aujourd’hui, mon père est très fier de moi mais je sais qu’il n’a pas son mot à dire en cuisine. Enfant, que souhaitiez-vous faire comme métier ? Alexandre Giesbert chez lui, jeudi. JuliEN DE FONtENAy POur lE JDD Archéologue, galeriste, commissaire-priseur et finalement Enfant, je suis beaucoup allé dessinateur. Je suis fan de BD. au restaurant. Mes parents s’étant Dernièrement, je suis retombé sur séparés quand j’avais 10 ans, mon les dessins que je faisais pendant père m’y emmenait tous les sameles cours au lycée. Franchement, dis. Nous allions dans une pizzeria, c’est pas mal. Dans l’appartement Da Pietro. C’était la fête : je retrourue de Rennes où j’ai grandi, il y vais mon père. Parfois, nous chanavait des BD de Wolinski dans gions de décor. Mon père m’emles toilettes. Outre la sexualité, menait dans ses salons du livre, ça m’a éveillé au Brive ou Sablet. J ’a d o ra i s ç a . dessin. Ma mère, a r t i s t e d a n s « “Fils de” Tout le monde se l’âme, m’emme- n’est pas retrouvait joyeunait beaucoup au sement, Bernard musée. Et quand une vocation » Weber, Jacques j’allais voir mon Faizant… Le respère au Figaro, je pouvais rencontaurant reste pour moi associé à trer Dobritz, un dessinateur que cet esprit convivial. j’adore. J’allais dans les sous-sols, Où nous trouvons-nous à l’imprimerie, aux archives, où en ce moment ? j’escaladais les piles de journaux. Dans une ancienne boutique Ça mesurait plusieurs mètres de pour enfants. En mai 2015, avec haut. J’ai beaucoup de souvenirs mon associé, Julien [Ross, un andans ce journal. cien de chez Costes], nous avons décidé d’ouvrir un restaurant Tout ça ne nous dit pas comment kebab. On en a beaucoup mangé, votre passion pour la cuisine ados. Mais on a décidé de le faire est née… avec des viandes fermières et françaises, avec du ketchup maison. Ça a été chaud : deux jours après l’ouverture, ma femme accouchait. Là, j’ai donné les clés à mes acolytes. Vous vous débrouillez sans moi. Ma fille a maintenant 8 mois. Vous arrivez à dormir un peu ? Je ne sais pas si c’est politiquement correct de dire ça, mais j’aime énormément travailler. Le restaurant, ce sont, en effet, de grosses journées. Après l’école Ferrandi, puis mes classes chez Vernet et Pierre Gagnaire, je me suis lancé. J’adore les fins de semaine où, crevé, on boit un verre avant la fermeture. Jeudi, Ginette Kolinka fêtera ses 91 ans et elle s’est déjà promis d’assister aux concerts que donnera prochainement son fils Richard Kolinka avec ses anciens acolytes du groupe Téléphone pour leurs retrouvailles en musique. C’est dans sa cave du 11e arrondissement que les membres du célèbre groupe de rock français ont fait leurs débuts, il y a quarante ans. Elle a toujours aimé les écouter en concert. « On se laissait vite entraîner par le rythme », dit-elle aujourd’hui. À l’époque, Ginette Kolinka vendait des bonnets sur les marchés. Maintenant, elle est à la retraite Après le Roca, le Roco, le Rococo, comment s’appellera votre prochain restaurant ? Le Daroco. C’est un gros chantier. Nous avons repris l’ancienne boutique de Jean Paul Gaultier, galerie Vivienne : 400 m². Il y aura 25 personnes. Ça ouvrira en mai 2016. g perso Capuçon monte le son É. DESSONS/JDD En novEmbrE, il jouait sur le disque-hommage de Patrick bruel à barbara. Cette semaine, il a fêté ses 40 ans à Salzbourg avec l’orchestre philharmonique de vienne dans une interprétation de L’Arbre des songes, d’Henri Dutilleux. « Je suis un musicien classique qui s’offre parfois des parenthèses, explique le violoniste renaud Capuçon. Chez moi, tout part de rencontres. Pour les Enfoirés, par exemple, je suis tombé par hasard sur Jean-Jacques Goldman dans un hôtel à Aix-en-Provence. » Le temps d’une séquence avec la danseuse étoile marie-Agnès Gillot, il a signé la première intrusion classique dans la troupe des restos du cœur. Christian Clavier était allé écouter renaud Capuçon à Londres dans des sonates de beethoven. « Le lendemain, il m’a appelé pour jouer dans Les visiteurs. Je ne savais pas qu’il était un grand fan de classique. Les enfants de ma femme n’en sont pas revenus.» L.P. Dutilleux, Paavo Järvi & l’Orchestre de Paris, avec Renaud Capuçon, CD (Erato/ Warner Music), 14,99 €. Ginette Kolinka, un témoin précieux. AmAt michEl/mAXPPP mais ses journées sont tout aussi remplies. Tant qu’elle le pourra, elle témoignera sur ce que fut sa jeunesse à elle. En 1944, à l’âge de 19 ans, la fille issue d’une lignée de petits artisans juifs d’origine russe et roumaine est arrêtée et embarquée avec les hommes de sa famille par la Gestapo et la Milice. Sur dénonciation. La fille qui a tenu tête aux miliciens est envoyée dans les camps de la mort. Elle ressortira quinze mois plus tard d’Auschwitz avec le typhus, 30 kg en moins (28 kg), les cheveux rasés et un regard vide quand elle arpentait les pistes de dancing. « Un jour où je dansais et où mon n° 78.599, jusque-là caché sous ma manche, s’est découvert, un danseur m’a dit : “Vous avez peur d’oublier votre numéro de téléphone ?” Je n’ai pas répondu mais je n’ai jamais redansé avec lui. Il est vrai qu’en 1947, on ne parlait pas trop. » « Prévention des crimes contre l’humanité à l’école » Mercredi dernier, c’était le 71e anniversaire de la libération d’Auschwitz par l’Armée rouge. Dans les salons du ministère de l’Éducation nationale, la petite femme qui a gardé ses cheveux courts était élevée au grade de commandeur de l’Ordre du mérite par Najat Vallaud-Belkacem. Puis la ministre a retrouvé Manuel Valls au Mémorial de la Shoah pour signer une convention afin de « renforcer les connaissances des génocides et la prévention des crimes contre l’humanité à l’école ». Entre-temps, Ginette Kolinka aura encore parlé aux jeunes. La mère du batteur de Téléphone a toujours eu leur oreille. L.P. téléVision | 33 jdd | 31 janvier 2016 On aime Passionnément iiii Beaucoup iiif Bien iiff Un peu ifff Pas du tout ffff Jamais sans ma fille Ciné dimanChe Un téléfilm de Xavier Durringer aborde, avec finesse, la radicalisation d’une étudiante à Sciences-Po c In the Air iiif Un spécialiste du licenciement (George Clooney), quelque peu misanthrope, n’a d’autre passion que collecter les miles aériens. Une jolie réflexion sur la solitude. 20.50, HD1. a Comme t'y es belle ! iiff Tranches de vie de quatre amies liées par leur famille. Un « Cœur des hommes » au féminin. 20.55, NT1. Le désarroi des parents de Chama (Lina Elarabi, au centre) lorsqu’ils découvrent que leur fille de 17 ans s’est mariée, en secret, à un djihadiste. Prod Éric Mandel Une jeune fille modèle. Belle, intelligente, au-dessus de tout soupçon. Chama fait la fierté de ses parents, divorcés mais aimants. La mère est médecin, le père informaticien. Voilà pour le côté pile. Mais Chama cache un lourd secret. Son grandoral pour Sciences-Po à peine terminé, elle enfile son voile pour se rendre dans un cybercafé et se marier religieusement via Skype avec un djihadiste parti combattre en Syrie. Tout est prévu. Elle le rejoindra très vite pour vivre son grand amour dans le califat. Lors d’une soirée pour fêter l’admission de sa fille à l’IEP, sa mère reçoit la visite inopinée d’un homme venu l’avertir de l’impensable, photos à l’appui. Chama s’apprête à rejoindre son conjoint en Syrie… Il « déstigmatise la communauté musulmane » On pouvait redouter le pire. Un téléfilm sur un fait de société brûlant, diffusé sur le service public, avec une ambition pédagogique revendiquée. Comment éviter les simplifications, les stigmatisations, le politiquement correct ? La fiction télé ne s’était d’ailleurs jamais aventurée à traiter cette problématique sensible. Ne m’abandonne pas évite tous ces écueils grâce à un scénario habile et un casting impeccable, à commencer par le talent brut de Lina Elarabi. Une révélation. « Elle est instinctive, réactive, dans la sincérité de son personnage. Sans elle, le film n’aurait sans doute pas pu se faire », souligne Xavier Durringer (La Conquête). La jeune actrice, également étudiante en journalisme, premier prix de violon et danseuse classique, incarne avec une intensité impressionnante cette adolescente dans toute sa complexité : intelligente et naïvement idéaliste, irréprochable et manipulatrice, fragile et animale dans sa radicalité. Les deux scénaristes, Aude Marcle et Françoise Charpiat, ont su écrire une histoire absolument crédible, inspirée de faits réels : « Nous avions été interpellés par le cas de cette jeune fille étudiante à Sciences-Po partie faire le djihad en Syrie. Nous voulions rappeler que ces cas d’embrigadement peuvent arriver à tout le monde », insiste Aude Marcle. « Le scénario prend le contre-pied de tous les poncifs sur cette question : la banlieue, la délinquance… Il déstigmatise la communauté musulmane trop souvent montrée du doigt », poursuit Durringer. La mère de Chama (remarquable Samia Sassi) s’épanouit dans son travail de médecin urgentiste, mais n’a pas réussi à refaire sa vie, à la différence de son mari, qui fréquente la mosquée sans être forcément un barbu (Sami Bouajila). La grandmère est attachée à la tradition et résolument moderne. Quant à l’amoureux de Chama, il est un converti blond aux yeux bleus, fils d’un antiquaire bourgeois inconsolable incarné par Marc Lavoine. La solitude d’une famille face à l’impensable Le film s’intéresse moins au processus de radicalisation, évoqué par petites touches (une mère trop étouffante, un grand-père victime de racisme, la quête d’idéal…), qu’au désarroi des parents. « Nous voulions aborder ce fait de société dans son versant intime », souligne la productrice, Joëy Faré. Ne m’abandonne pas dit la solitude d’une famille face à l’impensable et les oppositions sur la stratégie à suivre pour sauver leur fille. Le père veut alerter la police, la mère refuse craignant de voir sa fille fichée comme terroriste. Elle décide de régler le problème ellemême. Commence alors une longue période de « déradicalisation » dans une maison isolée : « On se retrouve dans la situation d’un sevrage pour un toxicomane ou du “désenvoûtement” d’une personne possédée », commente une des coscénaristes, Françoise Charpiat. Un huis clos à la violence psychologique bouleversante, des jeux de manipulation, des moments de tendresse également, le tout ponctué de touches d’humour rares et d’accélérations dignes d’un thriller. Ne m’abandonne pas sera suivi d’un débat animé par Julien Bugier sur le thème : « Qui sont les jeunes qui partent faire le djihad ? » g ne m’abandonne pas, mercredi à 21.00, France 2. Français ? Oui, mais… ELLE EST AVOCATE et juive. Il est réalisateur et musulman. Isabelle Wekstein-Steg et Mohamed Ulad parcourent, depuis une dizaine d’années, les lycées de la région parisienne avec une mission : nouer un dialogue avec des adolescents issus de l’immigration sur des questions comme l’identité française, les clichés racistes… Ils en ont tiré un documentaire fort, parfois dérangeant, souvent passionnant. Durant une heure, on se retrouve avec les élèves d’une classe de terminale du lycée professionnel Théodore-Monod à Noisy-le-Sec. Ceux-ci racontent les stigmatisations dont ils sont victimes et qu’ils finissent par intégrer dans une forme d’autodépréciation, au point de s’appeler « macaques » ou « sales Arabes ». Sans jamais les juger ni les flatter, les deux intervenants écoutent cette parole brute pour mieux déconstruire les préjugés, notamment antisémites, proférés par certains qui avouent d’ailleurs connaître peu de juifs… S’ils ont tous la nationalité française, peu se sentent français. Lesquels seraient forcément « des blonds aux yeux bleus ». Ou des « chrétiens », dit une jeune femme devant sa mère, qui la corrige immédiatement : « Quand on est née en France, on est français, peu importe ta religion. » Pas d’excuse sociale Comment en est-on arrivé là ? Le regard des autres, les discriminations bien réelles vécues au quotidien… Une jeune musulmane pointe aussi les prêches dans certaines mosquées : « On nous dit que notre religion n’est pas aimée, alors beaucoup se referment. » On voit aussi des débats s’engager : une lycéenne revendique son identité française, refusant toute excuse sociale. Un jeune homme du Bangladesh, réfugié politique, dit son bonheur de devenir un jour français. Malgré quelques maladresses (commentaires parfois succincts, séquence avec un coach en bonnes manières superflue), le documentaire trouve le ton juste pour ausculter le malaise identitaire, sans angélisme ni défaitisme. e.M. les Français, c’est les autres, mercredi à 23.30, France 2. c Camping iiff Premier opus des aventures c Retour à Cold Mountain iiff L’histoire du play-boy dijonnais Patrick Chirac (Franck d’un amour absolu entre Nicole Kidman et Jude Dubosc) aux Flots bleus. 20.55, France 2. Law. Une fresque romanesque. 20.45, Arte. Votre soirée 17.05 Sept à huit. 20.00 Journal. 20.55 Malavita ifff Film américano-français de Luc Besson (2013). Un ancien membre de la mafia new-yorkaise, désormais sous protection du FBI, s’installe dans un petit village de Normandie. Avec Robert De Niro, Michelle Pfeiffer. 23.05 Mentalist. 0.45 Les Experts : Manhattan. D8 21.00 L’Autre vie de Richard Kemp iiff Film français de Germinal Alvarez (2013). 17.30 Stade 2. 18.50 Vivement dimanche prochain : Michel Bouquet. 20.00 Journal. 20.40 Parents, mode d’emploi et D’art d’art. 20.55 Camping iiff Film français de Fabien Onteniente (2006). Michel Saint-Josse, chirurgien esthétique à Paris, se retrouve coincé dans un camping trois étoiles sur la côte Atlantique. Avec Franck Dubosc et Gérard Lanvin. 22.35 Faites entrer l’accusé. NT1 20.55 Comme t’y es belle ! iiff Film français de Lisa Azuelos (2005). TMC 20.55 Les Experts : Miami. Série. Gulli 20.50 Le Masque de fer iiff Film franco-italien de Henri Decoin (1962). 17.55 Le Grand Slam. 19.00 Le 19/20. 20.25 Zorro. 20.55 Les Enquêtes de Vera. Série britannique (2014). À une amie HD1 20.50 In the Air iiif blessée ; Des vérités cachées. 0.00 Soir 3. 0.20 Le mort Film de Jason Reitman (2009). qui marche iiff Film américain de Michael Curtiz (1936). 6ter 20.55 Deep Impact ifff 16.15 Toulon-Stade Français. Rugby. Top 14, Film américain de Mimi Leder 14e journée. 18.10 Canal rugby club. 19.10 (1998). Canal football club. 20.55 Saint-Étienne-Paris S-G. Football. Ligue 1, 23e journée. En direct du stade Geoffry-Guichard. 22.55 Canal Numéro 23 20.50 Taking Lives, football club. 23.15 L’Équipe du dimanche. 23.30 Le Journal des destins violés ifff Film améjeux vidéo. 0.00 Strike Back. Série. ricain de D.J. Caruso (2004). 18.35 C politique. 20.00 In Vivo, l’intégrale. 20.25 Avis de sorties. 20.40 Une carotte presque parfaite. Documentaire français d’Anne-Fleur Delaistre (2016). Les 4/5e des carottes consommées aux États-Unis sont produites en Californie. 21.30 Cholestérol, le coupable idéal. 22.25 La parole est au garde des Sceaux. 23.15 La Grande Librairie. 17.45 Si la musique m’était contée. 19.15 Cuisines des terroirs. 19.45 Arte Journal. 20.00 Karambolage. 20.15 Vox Pop. 20.45 Retour à Cold Mountain iiff Film américain d’Anthony Minghella (2003). Pendant la guerre de Sécession, un soldat sudiste déserte dans l’espoir de retrouver sa bien-aimée. Avec Jude Law, Nicole Kidman, Renée Zellweger. 23.15 South Pole. Opéra. 16.45 66 Minutes : le doc. 17.20 66 Minutes. 18.40 66 Minutes : grand format. 19.45 Le 19.45. 20.10 E = M6. 20.55 Zone interdite. Artisans et apprentis : la fierté du savoir-faire français. L’orientation en CAP a longtemps été une voie de garage. Mais aujourd’hui, devenir menuisier, pâtissier ou cordonnier, c’est le choix d’une nouvelle génération de jeunes enthousiastes et passionnés. 23.00 Enquête exclusive. États-Unis : la folie des armes à feu. Paris Première 20.45 Lie to Me. Série. RTL 9 20.40 The Blind Side : l’éveil d’un champion ifff Film américain de John Lee Hancock (2009). Téva 20.40 The Good Wife. Série. TCM Cinéma 20.40 Un silencieux au bout du canon ifff Film américain de John Sturges (1974). FX 20.50 Les Maîtres de l’univers ffff Film américain de Gary Goddard (1987). OCS Géants 20.40 Vacances à Venise iiff Film américanobritannique de David Lean (1955). session de rattrapage du Jdd aVec Le top des 3 programmes à revoir aujourd’hui sur Internet a Divertis. Alacaline, Ibrahim Maalouf France 2 a Doc Pollution des sols, le scandale caché France 5 a Film Affreux, sales et méchants Arte 34 | JEUX JDD | 31 janvier 2016 il en fait des tonnes deux de carreau d U d 2 Y [email protected] vallée par l’eau un temps avalée d’aucuns s’y reposent, elle s’y active d d Y Y évoque lee en général a de l’atout et une un fauteuil longueur pour deux à trèfle Y d 3 U b un reni ou une rêne a tourné dans les temps modernes on le branlera s’il nous demande une faveur d U 8 10 appel au calme ici, en alerte là 11 actium rejoué dans le latium d 13 14 débouché à grande eau d d qu’on peut entendre de vachement loin commission causant des ennuis aux sans-papiers a U supérieur à l’homme dans l’étreinte toucha un organe courant russe LE JOURNAL DU DIMANCHE est édité par : Hachette Filipacchi Associés SNC au capital de 78 300 €, siège social 149 rue Anatole France 92534 Levallois-Perret cedex. RCS Nanterre B 324 286 319. Associé : Hachette Filipacchi Presse. Renseignements lecteurs 01 41 34 63 40. fait suite à une descente trop brutale haut en couleurs d du fret, mais pas du frais mère porteuse une partie de la main Gérant-Directeur de la publication Philippe Pignol. Président d’honneur Daniel Filipacchi. éditeur édouard Minc. éditrice adjointe Anne-Violette Revel de Lambert. Communication Nawal Hocine, Anabel Echevarria. Ventes Frédéric Gondolo et Katia Parent 01 41 34 64 78. Diffusion Presstalis Réassortiments 06 68 08 16 67. Imprimé en France par Paris Offset Print Travail exécuté par les ouvriers syndiqués mène en premier league il a pu b dont léonard savait l’art défunte de guerre b des génisses en gémissent d d b d b courant allant croissant degré ou grade b d jolies femmes autrefois en iraq le cercle au pied de la croix du compte à base de plomb et d’argile sudoku éclipse périodiquement vénus b réduire le cercle par la croix Loto d b solution des jeux Mots croisés Keno b b agent qui a infiltré le mossad b difficile d marchands d’huiles dans la mettais b cinquantaine dans au bout l’enveloppe ni le thallium, ni même le thulium;-) b d chevale en pages et en ligne b d vers début novembre ou dans l’hiver sans effets b d 93120 La Courneuve, CIMP Toulouse, MOP Vitrolles, CILA Nantes, CIRA Lyon et Nancy Print. N° de Commission paritaire 0420 C 86 368. Numéro ISSN 0242-3065. Dépôt légal : à parution. © HFA 2015 Hachette Filipacchi Associés est une filiale de Lagardère Active SAS. Président du directoire Denis Olivennes Service abonnement CS 50002 – 59718 Lille Cedex 9. Tél. : 02 77 63 11 36 (France / Dom Tom et étranger). Tarif France Le JDD + Version Femina (Ile-de-France) : 1 an, 99 € ; JDD (hors Île-de-France) : 1 an, 79 €. Tarif étranger nous consulter. Abonnements au journal en ligne www.lejdd.fr Tirage du 24 janvier 2016 : 270.260 exemplaires. b d b Solution du numéro 3602 Publicité : Lagardère Publicité, 10, rue Thierry le Luron, 92300 Levallois-Perret. Tél. : 01 41 34 90 00. Fax : 01 41 34 90 01. Présidente Constance Benqué. Directeur général Philippe Pignol. Directrice de la publicité Frédérique Vacquier. Tél. : 01 41 34 92 46 nettement plus osé qu’elle le kid de las vegas Solution la semaine prochaine Directeur Jérôme Bellay. Directeur adjoint de la rédaction Patrice Trapier. Rédacteurs en chef François Clemenceau, Dominique de Montvalon, Cyril Petit (éditions), Guillaume Rebière, Brigitte Suffert (directrice artistique), Laurent Valdiguié. Secrétaire général adjoint Robert Melcher. Rédacteurs en chef adjoints Danielle Attali, Richard Bellet, Stéphane Joby, Pierre-Laurent Mazars, Didier Siberchicot. Chef du service économie Bruna Basini. Chef du service photo Aurélie Chateau. b d U verticalement 1. Estomac qui permet tous les abus. Eut un geste gracieux. - 2. Complément de fine pour terminer. Pompe à injection. Sans motif apparent. 3. Témoin lumineux. Bouffée en grillant. Sortent des vacheries. - 4. N’est plus mais est PLU. Marqués pour être remarqués. - 5. Objectif lunaire. Casse la graine entre les repas. - 6. Déformée pour paraître plus belle. Entraîne le pas. Exposition de meubles. - 7. En attente d’acquittement. Partie de croquet. Sollicitent l’estomac. - 8. Pourris lorsqu’ils sont frais. Piaf à ses débuts. A renvoyer s’il est cassé. - 9. Entre deux lisières. Il montre spathe blanche. Exprime des vœux. - 10. Pris en compte. Partie de corde. - 11. A l’adresse d’un ami. C’est très personnel. Auront de beaux restes. - 12. Peut, en toute conscience, accuser le coup. Petites poches intérieures. - 13. L’être non affranchi. Qui s’y frotte s’y pique. Dans les pommes. - 14. Déclaration de peste. C’est proprement une qualité. Sixième sur douze. - 15. Feu rouge. Sorti de rien. Pronom personnel. eut ses entrées aux invalides U horizontalement 1. La fleur au fusil (trois mots). Note de lecture. - 2. Ouvre la porte des cabinets. Une personne quelconque. Un modèle pour César. - 3. Belle plante du genre volubile. Pain au Levant. - 4. Etre à tu et à toi. Raid pour un homme d’action. Pêche de Méditerranée. Mystère qui plane. - 5. Du vin et du pin. Prises par les sentiments. - 6. Révolutionnaire avec ça. Provoquer la chute. Joue un rôle sur les planches. - 7. Revêtement de cuir. Taillé en pointe. De mauvais pieds. - 8. Poussées à partir pour les colonies. Et même… - 9. S’occupe de ses affaires. Chanteurs grecs. Montant au plafond. - 10. Demande de situation. Blanc aux ongles. Monter sur les planches pour descendre. 11. Se fait chatte. Mis au propre. 12. Poussé à l’action. Elles tenaillent enclume et marteau. Un autre rimbaldien. - 13. N’ont plus rien à perdre. Un endroit où ce n’est pas le chef qui commande. - 14. Jouer du piston. Têtes blondes. - 15. Femme de métier. Rouge à lèvres. des tas d’états vieille parfois sourde b U 15 gloire passée d b U 12 ont tendance à grossir b U grisonne dès sa naissance U 9 b horizontalement 1. Infranchissable. - 2. Mai. Iode. Etire. - 3. Esse. Menu. Ave. - 4. Agrée. Rit. Divas. - 5. Ta. Rêve. Erigé. - 6. Irresolution. Va. - 7. Eden. Menée. Emir. - 8. Négative. Nasal. - 9. Tr. Dé. Psi. Glu. - 10. Oléifère. Maman. - 11. Ubu. Nu. Errata. - 12. Legitimement. Du. - 13. Emut. Lentigo. - 14. ENS. Rebute. Samu. - 15. Si. Pesée. Sièger. verticalement 1. Impatient. Ulves.- 2. Na. Garde-robe. Ni.- 3. Fier. Reg. Luges.- 4. Sérénade. Im.- 5. Aisees. Teinture.- 6. Noé. Vomi. Fuites.- 7. Cd. Relevée. Be.- 8. Hemi. Une. Réélue.- 9. Etête. Permet.10. Sen. Riens. Rênes.11. Studio. Aimant.- 12. Ai. Ignes. Attise.- 13. Brave. Magma. Gag.- 14. Leva. Villa. Dome.- 15. Espar. Unau. Ur. Mots fléchés Sudoku c l u e 7 d c v o e p T e r i d e l o s l u i e a d u r e s d n e c v e n e u l e l a m g i x e r o s s 6 c soldat portant béret ça sent l’alsace b l o u p e s émanant de moïse bombe sexuelle p c i k o e u s u n s g u e f n u g l r e e s n T a r a g o g e p a i s d e s a i n a 5 chef de gouvernement à londres... ou à paris b b a l e i n o p T e r e la fille à la réception ou la femme de service 4 Y femme portée sur la bagatelle c h n e y m p c h o n a i u r m e a c i h i s e i T r e 1 fait passer en préfère afghanistan, crever à au pakistan petit feu que et tout claquer tout le bataclan d’un coup Albert Varennes c a r T e 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 mots fléchés a n e e s [email protected] k a l v o a r o r g i n c o p i n e s u e x c l b o a k r g a i n s k e o mots croisés Jean-Paul Vuillaume tendances | 35 jdd | 31 janvier 2016 Mise en place au restaurant Passage 53, passage des Panoramas à Paris, où officie le chef Shinichi Sato, fier de ses deux étoiles. Maurice rougeMont/ epicureans Michelin va-t-il sacrer les chefs japonais ? L’édition 2016 du Guide est lancée demain. Les talentueux cuisiniers nippons, installés en France par dizaines, n’ont encore jamais reçu les fameuses trois étoiles ChaRLotte LangRanD @Chalangrand Plus qu’une nuit et ils sauront. Demain, l’édition 2016 du Guide Michelin dévoilera son palmarès des restaurants en France, sanctifiant les uns, sanctionnant les autres. Ils ne sont que 25 à pouvoir se targuer d’avoir touché le Graal, les trois étoiles. Le monde de la gastronomie spécule donc sur les favoris du cru 2016: Alain Ducasse au Plaza Athénée vat-il récupérer sa troisième étoile ? Le Grand Restaurant de Jean-François Piège passera-t-il d’abord par les deux étoiles ? La Grande Maison bordelaise de Joël Robuchon, dont les cuisines sont tenues par le japonais Tomonori Danzaki, sera-t-elle consacrée ? Au-delà du suspense, une question demeure justement : le fameux Guide va-t-il une nouvelle fois oublier les talentueux chefs japonais ? Aucun n’a jamais obtenu les trois étoiles alors que les critiques et le public ne cessent d’encenser ces tables toujours remplies, que ce soit pour déguster des sushis haut de gamme ou de la cuisine franco-japonaise raffinée. Vingt et un d’entre eux ont été distingués d’une étoile, dont Kei Kobayashi (Kei, Paris 1er), Koji Aida (Aida, Paris 7e) ou Toshitaka Omiya (L’Agapé, Paris 17 e) ; en régions, on trouve Fumio Kudaka (Breizh Café à Cancale) ou Keigo Kimura (L’Aspérule à Auxerre). Le seul à avoir décroché deux étoiles est Shinichi Sato du Passage 53 (Paris 2e). « Quand nous les avons obtenues, il y a eu plus de retombées au Japon qu’en France, sourit Guillaume Guedj, l’associé du chef. Là-bas, Shinichi Sato est devenu une star. Les Japonais font de la cuisine de très haut niveau. » « Ceux qui ont le mieux compris la cuisine française » Pourtant rien n’y fait, les trois étoiles tardent à tomber. « D’ici à cinq ans, elles seront forcément décernées, il y a un tel vivier de talents, espère Ezechiel Zerah du site Atabula. S’il doit y en avoir un, ce sera un chef qui cuisine français, car le Guide reste assez conservateur et ses lecteurs attendent une cuisine française. » De nombreux anciens seconds de prestigieux étoilés français ont ouvert leurs propres restaurants : Kei Kobayashi a appris au Plaza Athénée auprès de Jean-François Piège et Christophe Noret ; Riuji Teshima (Pages) auprès d’Alain Senderens… « Les chefs japonais sont ceux qui ont le mieux compris la cuisine française, confirme Ezechiel Zerah. Ils ont une technique énorme doublée d’une touche sophistiquée, dans le goût et le dressage. » Ces toques savent s’affranchir du poisson, à l’image de « Teshi » chez Pages, qui manie le barbecue japonais à merveille. « N’évolue en cuisine que celui qui maîtrise le geste, constate le chef étoilé Thierry Marx. Les Japonais sont très observateurs, ils sont des artisans avec une rigueur industrielle : grâce à des recettes écrites minutieusement, ils peuvent reproduire le même plat 365 jours par an. C’est une rare mécanisation de l’excellence. » Entre les deux pays, les échanges gastronomiques sont légion depuis les années 1970. Tokyo est la ville la plus étoilée au monde par le Michelin. « Ces deux gastronomies sont construites sur l’excellence du produit, même si la cuisine japonaise est plus spirituelle, poursuit Thierry Marx. Les chefs français y ont puisé les menus séquencés, les services à l’assiette très graphiques et y ont épuré leur cuisine. » Le guide Fooding vient d’élire le restaurant Dersou, du japonais Taku Sekine, meilleure table de 2016. Il ne manque que des étoiles pour mettre tout le monde d’accord. g Taste of Paris, deuxième édition Pendant quatre jours, la nef du grand Palais, à Paris, se transforme en restaurant gastronomique géant Du 11 au 14 février, elles brilleront au Grand Palais. Dix-huit chefs, des toques étoilées à la jeune génération, ont répondu présent pour la deuxième édition de Taste of Paris. Créé il y a onze ans à Londres et décliné dans le monde entier, l’événement propose, au déjeuner et au dîner, les plats des chefs en mini bouchée. Ainsi, chaque participant devra « envoyer » trois plats à chaque repas, pendant quatre jours, à près de 300 ou 400 convives. Préparés en amont dans leurs restaurants, ils sont ensuite acheminés au Grand Palais pour y être finalisés. Les étoilés sont donc de la partie, dont Guy Savoy, Frédéric Anton, Alain Ducasse… « Montrer la diversité, éviter la morosité » « Je participe à cet événement pour montrer la diversité de la restauration française et pour éviter la morosité, poursuit Thierry Marx. La France vient de vivre une période difficile, les Français sortent mais les touristes ont peur. Nous devons montrer que nous ne sommes pas en état de siège. Ce sera festif et positif. » Taste of Paris sera aussi pluridisciplinaire et transgé- nérationnel. Les chefs de la nouvelle gastronomie parisienne y participent, tels Ryuji Teshima (Pages), Sébastien Gravé (Pottoka), le pâtissier Yann Couvreur ou Pierre Sang Boyer, dont la bonne humeur avait mis l’ambiance l’année dernière, il cuisinait en dansant devant le public. Des artisans et des producteurs viendront aussi présenter les produits de leurs terroirs, entre des performances gastronomiques, des cours de cuisine et le bar à champagne. C.L. 11-14 février, grand Palais, Paris (75008). tarifs : déjeuner 15 € ; dîner 18 €; plats de 5 à 12 €. Passe de 45 à 138 €. tasteofparis.com Vive le mélange des genres Les marques collaborent entre elles et sortent de leur univers pour susciter l’étonnement Messieurs, pourquoi ne pas vous raser à… la bière ? Ou déguster une bière concoctée par une marque qui, d’habitude, produit des crèmes glacées ? Voici la dernière idée marketing en vogue : sortir de son domaine de prédilection. C’est Carlsberg qui a ainsi présenté une gamme de cosmétiques élaborée à partir de ses produits premium. La composition du shampooing, du démêlant ou de la lotion pour le corps bénéficieraient ainsi des propriétés du houblon et du blé, à savoir protéines, vitamines et autres antioxydants… Non disponibles en France mais vendus sur Internet, les produits, réalisés en partenariat avec l’enseigne danoise de beauté Urtegaarden, viennent de s’enrichir de produits pour l’entretien de la barbe. Les crèmes glacées Ben & Jerry’s se sont, elles, associées avec New Belgium pour sortir une recette de bière aromatisée au caramel beurre salé et au brownie, disponible aux États-Unis uniquement. En Europe, la mode est aussi au décloisonnement : Dolce & Gabbana a créé une ligne de maquillage ; le chef des souliers de luxe, Christian Louboutin, s’est lancé également dans la beauté, avec des vernis à ongles et des rouges à lèvres présentés dans des écrins rappelant les talons qui ont fait sa réputation. Des boots au look inspiré du continent africain Le cobranding est en plein essor, l’occasion de lancer des collections « capsules » uniques, exclusives ou en édition limitée, qui peuvent devenir collector. La marque de prêt-à-porter Comptoir des cotonniers créait ainsi des vernis à ongles avec Nailmatic ; Gérard Darel, une ligne de vêtements avec les chanteuses du groupe Brigitte ; les chaussettes Stance, une collection avec la star Rihanna ; les maillots de bain Undiz déclinaient les logos Stars Wars ; Eleven Paris, ceux de Disneyland Paris. Agnès b. a décidé de soutenir l’initiative Tara Expéditions, qui organise des missions scientifiques sur l’impact du réchauffement climatique, en créant des vêtements avec les codes couleurs du bateau, gris et orange. L’année 2016 prolonge le concept avec la collaboration de la Maison Robert Clergerie et du groupe Lili Wood and The Prick pour des boots au look inspiré du continent africain. En avril, H & M fera même le trait d’union entre fast fashion et histoire de l’art en sortant une collection directement inspirée des archives… du musée des Arts décoratifs de Paris. C.L. dans l’air rétromobile Deux ventes d’exception La vente aux enchères officielle du salon Rétromobile, organisée par Artcurial Motorcars, est l’une des plus importantes au monde pour les voitures de collection. En 2015, l’événement avait été marqué par la dispersion de la collection Baillon : la vente avait totalisé 46 millions d’euros. Cette année, 172 automobiles seront proposées aux enchères, à partir de vendredi. Parmi elles, la légendaire Ferrari 335 Sport Scaglietti de 1957 provenant de la collection du célèbre industriel Pierre Bardinon. Elle est estimée entre 28 et 32 millions d’euros. Le lendemain, la vente Citroën annonce près d’une cinquantaine de voitures, dont une sélection provenant de la collection d’André Trigano. Rétromobile proposera aussi nombre d’expositions et d’animations, dont celle d’automobiles de 100 ans qui roulent toujours ! Salon Rétromobile, hall 2.2, parc des expositions porte de Versailles, Paris (75015). Du 3 au 7 février. Citroën B12 limousine woody (1925). 36 | dimanchesport jdd | 31 janvier 2016 YANNICK NOAH Après la polémique Monfils, le capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis affirme avec «Avec l’âge, je suis moins sou A INTERVIEW DAMIEN BURNIER @initialsDB pas arrêter le tennis social… Si on a un peu de pouvoir, il faut aider les gamins des cités. Il y a vingt ans, certains m’avaient vu jouer. Ceux d’aujourd’hui se disent qu’ils ont tapé des balles avec un chanteur, mais quelle importance ? Tout ce qui peut les stimuler m’intéresse. Et arriver vers eux en tant que capitaine, ça le fait. u départ, c’était une belle journée de tennis pour Yannick Noah. Un quart de finale de Grand Chelem avec un Français à suivre, à Melbourne, puis un rendez-vous d’échanges à Grigny (Essonne) Comment avez-vous vécu l’Open avec des enfants de Fête le Mur, d’Australie, rendez-vous majeur l’association qu’il a fondée pour avant votre retour sur la chaise ? faciliter l’accès aux courts dans J’ai vu tous les matches des Français. J’ai veillé mais j’ai les zones urbaines sensibles. Rien à voir a priori, sauf que les deux l’habitude. Avec Joakim [son fils, événements, mercredi, ont fini par basketteur aux Chicago Bulls] et se télescoper. Après la signature ses 90 matches par an entre 3 et d’une convention avec Thierry 5 heures du matin, je gère. J’ai Braillard, le secrétaire d’État aux échangé aussi avec Cédric [Pioline, Sports, l’ambiance était polluée par son adjoint], qui était sur place. Ou la sortie de Gaël Monfils, tout juste encore avec Guy [Forget, capitaine éliminé de l’Open d’Australie par de 1998 à 2012], qui commentait. Milos Raonic. En cause : le choix Pendant le quart de Gaël, on s’ende la Guadeloupe pour stopper le voyait des textos. Des conneries Canada de Raonic, justement, au comme des trucs plus sérieux. 1er tour de la Coupe Davis (4 au La sortie de Monfils, vous l’avez 6 mars). Selon Monfils, « 80 % vue venir ? des joueurs ne voulaient pas aller Je ne suis pas surpris. Je savais jouer là-bas » parce que cela comque ça pouvait arriver. Si on m’a pliquait leur calendrier et Noah rappelé après tout ce temps, c’est avait « pris la décision que quelque chose n’allait pas. Ce qui seul ». Pour le JDD, le se passe, ce sont les nouveau capitaine des « Je ne suis Bleus, 55 ans, a pris le pas surpris. restes de la façon de temps de se poser pour fonctionner, de coms’expliquer sur la polé- Là, c’est Gaël ; muniquer, de tout ce mique de la semaine. une prochaine que vous voulez. Là, c’est Gaël ; une profois, ce sera Vous avez créé Fête le chaine fois, ce sera un autre. À une époque, Mur l’année de votre un autre » c’était Tsonga qui dernière victoire en a dit ça, puis c’était Coupe Davis, en 1996. Gasquet qui n’a pas Depuis, l’association a fait ci, Simon qui a raconté ça. Ce été votre lien le plus fort avec qu’on a à améliorer est très précis. le tennis, non ? Pendant un moment, c’était Mon boulot va commencer quand même le seul. À cela se sont ajoutés je vais décider de ceux qui jouent. des petites collaborations poncMais votre boulot, c’est aussi tuelles et quelques matches de qu’on ne sorte plus du cadre… vieux. Mais s’agissant de tennis, Oui, le but est qu’on parle d’une mon énergie, c’était Fête le Mur. même voix. La com’ est hyper importante, c’est l’ère du temps. Quand j’allais dans les ministères ou à la fédération, c’était pour Quand on a gagné en 1991, il y avait parler de ça. Pour avoir ensuite la interdiction d’acheter la presse penpossibilité de passer du temps avec dant le stage. Aujourd’hui, tu dis un les mômes. Car j’adore ça. truc, c’est sur Twitter trois secondes À la FFT, on vous parlait aussi après. Mais ça et les « facebookeries », on peut gérer. Tout le monde, Coupe Davis ces dernières années ? Seulement au détour des sans exception, m’a dit : « On est conversations. Mon propos était content que tu sois capitaine. » J’ai ailleurs : « Pendant Roland-Garros, une conviction : si on est à 100 % vous ne pourriez pas filer un stand – pas à 80 % –, on la gagne, cette à Fête le Mur ? Nous donner un peu Coupe Davis ! Dès cette année. Mais il faut être prêt, physiqueplus à la journée Benny-Berthet [journée caritative la veille du tourment, mentalement. Et organiser noi] ? » Tous les ans, il faut relanun environnement adéquat. cer car ce n’est pas automatique. Vos méthodes à succès d’il y a C’est à se demander si, le jour où vingt ans sont-elles transposables je vais casser ma pipe, on ne va avec cette génération ? Yannick Noah, mercredi à Grigny, au milieu des enfants de son association Fête le Mur, qui regroupe une trentaine de sites dans les quartiers prioritaires. pingouin Ou c’est transposable et on gagne. Ou ça ne l’est pas et on perd. Je peux me planter, c’està-dire ne pas réussir à leur faire comprendre ce que j’ai envie de faire passer. Pour certains, ça commence à rentrer. Mais ça doit se voir sur le court. Ou quand le réveil va sonner à 6 h 30 pour aller courir… Là, ce ne sont que des mots. Gaël va m’appeler, on va parler. Mais quand on sera sur place avec les joueurs sélectionnés, peut-être avec Gaël, peut-être pas, on va bosser. Quand je lis ce que disent les responsables des sélections qui réussissent, Onesta ou Deschamps, on n’est pas au Club Med. Mais tu as des mecs, parfois à cause de l’entourage, qui ont pris l’habitude de se faire ENCORE RATé pour Serena Williams. Le record de Steffi Graf (22 titres du Grand Chelem remportés) attendra. Et c’est justement une compatriote de l’Allemande qui a changé le scénario. À 28 ans, pour sa première finale en Majeur, a remporté l’Open d’Australie au bout d’une partie sublime (6-4, 3-6, 6-4). « J’ai vécu deux semaines de folie. Au 1er tour, j’ai sauvé une balle de match. En demi-finale, je bats pour la première g. WooD/AFp ANgELIQUE AUx ANgEs fois Azarenka. Et maintenant Serena… », s’extasie la gauchère, en passe d’atteindre le 2e rang mondial. Déjà battue en demi-finale du dernier US Open, Williams préfère relativiser : « Tout le monde s’attend à ce que je remporte tous mes matches. Mais je ne suis pas un robot. » À propos de machine à gagner, Novak Djokovic tentera ce matin (9 h 30, Eurosport) d’empocher son 11e Grand Chelem – le 6e à Melbourne, ce qui égalerait le record de Roy Emerson. En face, Andy Murray, pour un remake des finales 2011, 2013 et 2015. Toutes remportées par le Serbe. D.B. caresser dans le sens du poil. Comment communiquez-vous avec les joueurs entre les rencontres ? [allusion à l’audit mené par la FFT pour préparer la succession de Clément]. Mais est-ce la forme qui compte le plus ? Avant, si je voulais parler à Guy, je prenais un avion et je le trouvais dans Avec l’âge, y a-t-il une chance que le vestiaire. Maintenant, il y a 10 mecs votre managérat soit plus souple ? autour du joueur. Je vais donc parler Non. C’est horrible, je pense même que je suis différemment. Si je dois parler à Jo de « Je suis peut-être moins souple ! Je fonce, je rentre del’approche tactique dans… Mais j’ai Cédu match, c’est un malade mais mieux que je ne j’ai l’impression dric avec moi. Dans la passe pas par son forme, il va apporter un équilibre. agent. Si je l’ai dix que je peux tous jours et que je peux les transcender » Vous avez dit, lui dire quelque en décembre, chose au dej’ après dans Tennis l’entraînement, je Magazine, avoir suis persuadé que ça va défoncer. songé à démissionner… Sinon, ils sont dans leurs tournois Un soir avant de dormir, j’y ai et mes gars regardent. Et ceux qui pensé. Mais c’est anecdotique. Je ont envie viennent vers nous. J’ai me disais : « Je suis bien avec ma des appels. Et puis ces joueurs-là, meuf et mes gamins, je reviens pour je les connais aussi à travers mes essayer de donner du bonheur aux prédécesseurs. Quand Guy était en gens et on me casse les couilles ! » poste, je savais tout ce qui se passait. Qui ? Aviez-vous aussi des retours Tout le monde ! Et notamment vous [les médias]. Avant même la via Arnaud Clément ? Non. Parce qu’à aucun moment Guadeloupe [et les réticences à y je n’ai pensé redevenir capitaine. organiser la rencontre], sur le fait Jusqu’à ce que quelqu’un de l’intémême que je sois capitaine, que rieur me dise : « Il y a le feu ! » Je je voulais revenir parce que ça me manquait. N’importe quoi ! dirai peut-être qui c’est, un jour dans mon bouquin, mais ce n’est C’est pourtant simple : on m’a dit pas un joueur et peu importe. « Tu peux le faire, Yann ? » « Oui je L’important, c’est que l’équipe ne crois, je vais essayer ». Les joueurs marchait pas. Après, quelqu’un étaient partants. Et je n’ai même pas signé de contrat. s’est trompé sur la forme, OK sport | 37 jdd | 31 janvier 2016 force ses principes ple !» Retour au Stade de France ruGBY Le France-Italie du Tournoi des Six Nations, samedi, sera le premier match depuis les attentats. Autour du stade, l’activité reste en berne SOleN CHerrIer @SolenJDD À première vue, il ne reste plus aucune trace. Mais à y regarder de près, les indices s’accumulent. Un boulon coincé dans une grille, un trou dans un store, une éraflure sur un dossier de chaise… L’Events a refait sa devanture et a rouvert le 4 janvier. C’est devant ce restaurant de l’avenue Jules-Rimet, face à la porte D du Stade de France, que le premier des trois kamikazes de Saint-Denis s’est fait exploser le 13 novembre, tuant l’unique civil de cette opération ratée qui a donné le coup d’envoi des attentats parisiens. Assis à une table, le gérant, M. Zarai, fait défiler sur son smartphone les photos de son établissement après le passage de la police scientifique : un chaos de morceaux de verre, de sang, de chair. Après des nuits blanches, il a essayé d’oublier alors que l’enceinte dionysienne s’apprête à accueillir son premier événement depuis la tragique soirée, FranceItalie en ouverture du Tournoi des Six Nations. « Comme il y a un peu de psychose, j’imagine que tout le monde va regarder autour de lui pour voir s’il n’y a pas quelqu’un de bizarre avec un gros blouson, anticipe-t-il. Nous, on va être plus vigilant à l’entrée. Il y aura quelqu’un pour rassurer le personnel. Mais le rugby, ça reste paisible. » S’il n’a pas peur, assure-t-il, une autre réalité l’accapare. L’UEFA et « le mur de la honte » Déjà guère florissante avant, l’activité a chuté depuis les attentats. Une baisse de 20 à 30 % du chiffre d’affaires, comme pour tous les commerces de cette artère qui longe le Stade de France, où les loyers rivalisent avec ceux des quartiers huppés de Paris. Les employés des bureaux voisins sortent moins à l’heure du déjeuner, l’arrêt des visites du SdF a asséché le flot de touristes et le seul match qui devait y avoir lieu depuis a été déplacé à Colombes (RacingToulouse, le 28 novembre). « J’ai trouvé ça dommage qu’ils l’annulent. Ça aurait été un vrai pied de nez », soutient Olivier, le gérant du France, qui a tourné la page des attentats et est surtout préoccupé par « le mur de la honte ». C’est la grande affaire dans le quartier : l’UEFA va ériger un mur autour du Stade de France pendant l’Euro. Dès leur sortie du métro et du RER, les spectateurs pénétreront à l’intérieur d’un périmètre où les sponsors officiels de l’UEFA écouleront leurs produits et tireront seuls profit de la compétition. Les commerces de l’avenue Jules-Rimet s’apprêtent, quant à eux, à être exclus de la fête au moment où ils imaginaient faire fructifier leurs investissements. « C’est une double peine », se désole Karim, gérant du restaurant La 3e Mi-Temps. « On a vu le mec se faire exploser » Ce qui le réjouit, c’est que des supporters du rugby l’ont appelé pour prévenir qu’ils feraient « la fête à fond » comme d’habitude samedi prochain. « Le Tournoi va nous faire du bien », admet-il. Juste à côté, le Novotel Suites a pourtant des chambres disponibles le week-end prochain. À l’intérieur de l’hôtel, on fait savoir qu’on n’a pas le droit de s’exprimer depuis les attentats. Pour la venue de l’Italie, le Stade de France ne sera pas plein non plus mais c’est l’affiche qui est en cause, pas la psychose. Les autres matches affichent complet. « Avec les nouvelles mesures de sécurité, on risque d’avoir des restrictions au dernier moment », craint Engin, gérant de l’Events Café, situé porte H, là où le deuxième kamikaze s’est fait sauter. Il se remémore la violence de l’explosion et la « chance » qu’il n’y ait pas eu de morts. Mais, du coup, Engin a « un sentiment d’abandon » : « C’est comme si rien ne s’était passé alors qu’il y a eu beaucoup de blessés. On est des victimes, même si on n’a pas été touché. On a vu le mec se faire exploser. Le lendemain, on a ramassé son rein, son foie… Un boulon a traversé le bonnet d’un client, j’ai retrouvé ses cheveux sur mon frigo. » Il a beau relativiser, les perspectives le rendent amer. Les travaux lui ont coûté cher, son activité a été divisée par deux, il a dû se séparer d’un employé et l’Euro s’annonce catastrophique. g Fouilles, snipers et chiens démineurs StéPHANe COlINeAu ressentez-vous une forme de désamour autour de cette équipe ? Oui. La dernière fois que j’ai ressenti ça, c’est quand je me suis occupé du PSG en 1996. J’étais leur préparateur vaguement psychologique avant la finale [de Coupe des Coupes, remportée contre le Rapid Vienne]. Toute la France espérait que l’équipe perde. On disait déjà que les joueurs gagnaient trop d’argent. Aujourd’hui, on dit qu’ils [les tennismen] habitent tous en Suisse. C’est hallucinant ce que je peux entendre dans la rue : « Ben alors, putain, tu vas les bouger ? » Comment en est-on arrivé là ? Parce qu’il y a des relais, dans la presse. Et que les joueurs sont responsables. Ce sera donc à eux de faire face, sans se cacher. Moi, j’ai juste envie qu’ils gagnent. Qu’ils vivent ça une fois. La photo de la Coupe dans leurs chiottes, j’ai envie d’être dessus. Depuis combien de temps on ne gagne plus rien ? On gagne en judo, très bien, mais moi je suis tennisman. Quand je vais crever, on mettra le film de papa me sautant dans les bras à Roland-Garros. Plutôt que moi avec les gamins ou en train de chanter au Stade de France. Je suis peut-être un malade mais ces gars-là, j’ai l’impression que je peux tous les transcender. Pour certains, je vois déjà comment. Pour d’autres, je me dis qu’il y aura des beaux échanges. C’est monstrueux comme j’y crois ! g « Les spectateurs arrivant tardivement risquent donc de rater le début du match », prévient l’excommissaire Robert Broussard, patron de la sécurité à l’intérieur du stade pour la Fédération française de rugby. Celle-ci conseille aux spectateurs de ne pas porter de « sac à dos, sac de sport, casque de moto ou autres objets encombrants, lesquels seront placés en consigne ». @StephColineau Les quelque 60.000 spectateurs attendus pour France-Italie, samedi (15 h 25), seront les premiers à expérimenter les mesures de sécurité de l’Euro 2016. Alors qu’un match de rugby mobilise habituellement 100 policiers et 730 agents de sécurité, ils seront cette fois 250 représentants des forces de l’ordre et 850 agents. Et davantage si François Hollande ou Manuel Valls accompagnent les ministres des Sports à cette rencontre d’ouverture du Tournoi, devenue hautement symbolique depuis le 13 novembre. « Nous passons d’un dispositif tourné vers la gestion de la foule et le hooliganisme à un dispositif destiné à parer des attentats », résume le commissaire Laurent Simonin, qui pilote la sécurité autour de l’enceinte pour la préfecture de police de Paris. Principale nouveauté, l’accès à l’esplanade du stade sera verrouillé par sept barrages filtrants, mis en place trois heures trente avant le match. Les spectateurs Au Stade de France, le 13 novembre. ReuteRs devront se soumettre à une première palpation sommaire, ouvrir manteaux et sacs. L’objectif est d’empêcher l’intrusion d’armes aux abords du stade, mais aussi d’éviter de trop longues files d’attente, difficilement contrôlables, aux portes d’entrée. Le deuxième niveau de filtrage, celui des grilles d’entrée, s’annonce extrêmement rigoureux, avec palpations et fouilles minutieuses. « Que les gens viennent en confiance » Les parkings seront aussi très surveillés. Si les coffres seront comme d’habitude vérifiés, conducteurs et passagers devront sortir du véhicule pour se soumettre aux fouilles. La sécurité sera aussi beaucoup plus sourcilleuse avec les livraisons en amont du match. L’identité des employés sera vérifiée, les camionnettes déchargées en présence d’un agent. Des snipers, des unités mobiles et des chiens démineurs, compléteront le dispositif. « Notre objectif est que les gens viennent en confiance », résume Robert Broussard. g Le Zlatan du trot rêve d’Amérique HIPPISMe Star en Suède avec ses 6.000 victoires, Björn Goop aimerait enfin remporter la course reine de Vincennes StéPHANe JOBY @JobyJdd Il apparaît dans des publicités pour un fabriquant de bières et de sodas. Le samedi, ses pronostics du V75, jeu phare consistant à donner les vainqueurs de toutes les courses d’une réunion, sont très attendus sur le Web. En Suède, Björn Goop est une star qu’on arrête dans la rue. Le trot attelé y est un vrai sport populaire, presque autant que le football et le hockey. Il y a même une option trot au programme scolaire. Goop, prénommé Björn en hommage à Borg, a été le plus jeune driver à passer le cap des 2.000 puis 3.000 victoires. À 39 ans, il en compte désormais « 6.020, je crois », plus un bon millier comme entraî- Bjôrn Goop et son cheval Timoko. JLL-LetROt neur. Il fait partie des dix sportifs préférés des Suédois dans le sillage de l’incontournable Zlatan Ibrahimovic. « Lui, il est à part, c’est le deuxième roi de Suède, sourit Goop. Comme tous mes compatriotes, il est fan de chevaux. Et il a vécu à 300 mètres de l’hippodrome de Malmö. » Le driver n’a jamais rencontré le footballeur mais il était dans les loges du Parc l’année dernière pour la venue de Chelsea. Si Ibra court en vain après le Ballon d’Or, Goop collectionne les Casques d’Or, le trophée qui récompense le pilote au plus grand nombre de succès en Suède (l’équivalent du Sulky d’or français) : 12 de rang jusqu’en 2015. Le dernier car il a décidé de « privilégier la qualité à la quantité en 2016 ». Mis aux enchères, son ultime casque est parti à 100.000 couronnes (environ 11.000 €) vendredi. Celui qui passe son temps entre la Suède et la France, où il possède une écurie de 30 boxes à Grosbois (Val-deMarne), ne se voit pas raccrocher pour autant : « Mon père (Olle) a bien piloté jusqu’à 72 ans. Alors tant que je serai capable et passionné… » Lionel, comme Messi Cet après-midi (16h20), sous les yeux de l’ambassadeur de Suède à Paris, Björn Goop s’attaque au Prix d’Amérique. Ce championnat du monde du trot est la seule épreuve qui manque à son palmarès et à celui de son compagnon, Timoko (18). Le crack à la robe baie va courir son 5e Prix d’Amérique, comme le légendaire Ourasi. 3e en 2015, il reste le plus suivi sur les réseaux sociaux. Il possède même une tulipe à son nom. Du haut de ses 9 ans, il est le trotteur français le plus riche (3,5 M€ de gains) en activité. « Il est magnifique, il sait tout faire », lance Goop. Ce ne sera peut-être pas suffisant face au favori Bold Eagle (10), fils du grand Ready Cash, double lauréat à Vincennes. Un drôle d’outsider pourrait créer la surprise : Lionel (4), un Alezan baptisé en référence à la star du Barça Lionel Messi ! Derrière lui dans le sulky, on retrouve encore un Suédois, Orjan Kihlström. La Suède, le trot, le foot, on y revient. g 38 | sport JDD | 31 janvier 2016 23e journée L’ASM a été balayée par l’incroyable promu angevin Monaco se troue angers 3 Monaco 0 N’Doye (19e, 43e), Yattara (55e) Didier Dinart vendredi lors de France-Danemark. Newspix/icoN sport Comment Dinart prépare l’avenir HanDbaLL L’échec à l’euro pourrait retarder le passage de témoin. Mais l’adjoint d’Onesta a des idées cracOvie (POLOgne) Envoyé spécial MickaëL carOn @CARONJDD Pour les dirigeants de la fédération, c’est clair : Didier Dinart doit succéder à Claude Onesta, au plus tard après le Mondial 2017 en France. Rien n’est encore signé, si ce n’est un contrat classique de préparation olympique. S’il a provoqué des tensions entre le sélectionneur et son adjoint, l’Euro en Pologne (5e) ne génère pas de changement majeur du scénario le plus probable. Tout juste peut-il être retardé de quelques mois. Mais l’ancien défenseur a déjà des idées pour prolonger la domination française. b trOuver Les ajusteMents avec Onesta Le staff se réunira début avril pour une analyse musclée de l’Euro. Onesta a déjà fait savoir que les défaites contre la Pologne (25-31) et la Norvège (24-29) seraient décortiquées, tout comme le fonctionnement du staff. C’est d’abord une autocritique car il n’a pas toujours laissé la place nécessaire à son adjoint. Mais c’est aussi une pierre dans le jardin de Dinart, secoué à plusieurs reprises pendant la compétition. « Il n’y a pas de remise en cause, assure pourtant le DTN, Philippe Bana. Nous continuons d’ac- Objectif eurO 2022 La france envisage de monter un dossier pour l’organisation de l’Euro 2022 conjointement avec l’Espagne et la Belgique. Le président de la fédération, Joël Delplanque, a eu une première réunion jeudi à Cracovie avec ses deux homologues. La France organise déjà le prochain Mondial, en 2017, ainsi que l’Euro féminin en 2018. M.c. compagner Didier très fort. » Mais quel rôle pour Onesta après 2017 ? Un poste de manager, en retrait du terrain mais pas des hommes ; ou un rôle auprès des partenaires et des entreprises, une compétence dont il a tiré un bénéfice personnel et qu’il pourrait mettre au service de la fédération. b un étranger Dans Le staff ? En même temps qu’Onesta partiront plusieurs membres de son staff : le manager Michel Barbot et peut-être le préparateur physique Alain Quintallet. À Didier Dinart, le DTN aimerait associer Vincent Griveau, conseiller technique régional en Midi-Pyrénées et analyste vidéo des Bleus depuis 2004. Marqué par le tandem Talant Dujshebaev et Raúl González, qui a permis à son club espagnol de Ciudad Real de dominer l’Europe, le Guadeloupéen songe plutôt à travailler avec un technicien étranger, capable de le seconder dans le domaine technique, pas seulement dans le management. b DéfenDre sans karabatic En Pologne, les limites physiques de Nikola Karabatic ont amoindri la force de frappe. À plusieurs reprises, Dinart l’a décalé sur l’aile en phase défensive pour l’économiser. À bientôt 32 ans et avec le calendrier démentiel du PSG, il ne peut plus attaquer et défendre pendant 60 minutes. À l’avenir, il pourrait se concentrer davantage sur la construction. C’est le sens de la participation à l’Euro de Ludovic Fabregas, le plus gros talent français en défense, qui a peu joué mais beaucoup appris. Onesta pensait l’intégrer en 2017 mais Dinart a insisté, « ébloui » par son potentiel. L’ancien roc défensif est aussi celui qui mènera la génération 1997, celle de Melvyn Richardson, vers l’équipe de France à l’horizon des JO 2020. En mars, il aura une séance particulière à Chambéry avec le fils de Jackson. Sur la proximité technique avec les hommes, Dinart incarnera un style nouveau. g Ses dauphins patinent tellement que le PSG n’a pas besoin de jouer pour conforter son avance. Même s’ils venaient à s’incliner à SaintÉtienne ce soir, les triples champions de France conserveraient un matelas extra-moelleux de 21 points après la débâcle de Monaco à Angers. Ce trou béant est autant la conséquence de l’absolutisme parisien que de la médiocrité de la concurrence. Il faut remonter treize ans en arrière pour trouver un deuxième du championnat avec un nombre de points (39) aussi faible à ce stade de la saison : mais à l’époque, Lyon, Nice et Marseille ne comptaient qu’une longueur de retard sur le leader, Auxerre. Le naufrage de l’ASM est révélateur : le club de la Principauté restait sur neuf matches sans défaite en L1 et n’a pas existé contre le SCO, giflé une semaine plus tôt au Parc (5-1). À chaud, Andrea Raggi a déploré « l’arbitre scandale » au micro de Canal+. L’Italien était à côté de la plaque comme sa défense pendant les 90 minutes qui avaient précédé. Son entraîneur Leonardo Jardim a été plus lucide, évoquant « un match complètement raté […] sans l’intensité nécessaire pour jouer dans cette L1 ». Monaco a joué avec son maillot rouge d’entraînement et a effectivement été un gentil sparring-partner. Pic de L’anecdote En six mois, stephan el shaarawy n’avait pas mis un but en championnat avec Monaco. Pour son premier match avec la Roma, où il a atterri cet hiver, il a marqué. Le serial buteur angevin N’Doye avait à cœur d’inscrire un doublé. FraNck Dubray/Maxppp l’humiliation, le public angevin a chambré sans modération. Avant de communier avec son équipe au coup de sifflet final. Moulin : « un moment historique » Le promu est aujourd’hui en course pour la Ligue des champions. Mais les Bianconeri de l’Anjou apprécient surtout de « se rapprocher du maintien », comme l’indique le gardien Alexandre Letellier, qui a avantageusement remplacé Ludovic Butelle, parti en Belgique cet hiver. Stéphane Moulin vit, lui, « un rêve et un moment historique » après ce « match référence ». Avec plus de Classement Le chiffre 2 Comme le nombre de penalties ratés par Wissam ben Yedder lors des deux derniers matches de Toulouse. Contre Guingamp, il a égalisé… sur penalty avant de buter sur Lössl à sa seconde tentative. Brandao (69e) Lyon 1 0 À L’ancienne À Lyon, la lumière n’arrive toujours pas. On résume. Depuis fin octobre, pas le moindre succès en déplacement. Et encore, c’était à Troyes donc ça ne compte pas vraiment. En attaque, c’est le vide. « Et pas seulement à cause du manque de soutien pour Alex (Lacazette) », soupire Génésio, aussi engourdi que ses troupes. La défense ? « Fébrile. Je ne sais même pas s’il ont eu deux occasions en face, mais ils marquent quand même. » En plus, c’est signé Brandao, camouflet ultime. Bruno marche seul et l’OL s’embourbe au classement. Pas faute de faire tourner la gonfle pourtant (63 % de possession). Mais hier, il en fallait plus pour calmer Bastia, qui avait retrouvé ses « vraies valeurs », selon l’étendard Jean-Louis Leca. Comprendre qu’il ne fallait pas trop s’attarder dans les duels. En même temps, sans la moitié des titulaires out, difficile d’amuser la galerie. Surtout quand on vient de changer de coach. Voilà donc « trois points inespérés » pour la promotion de Ciccolini. François 1er, déjà adoubé par Leca, qui tient visiblement à garder sa place : « Je suis très content pour lui, il va nous faire énormément de bien. » Lorient 2 toulouse 1 reims 0 guingamp 2 Touré (15e, 51e), ajaccio 0 Montpellier 4 Yatabaré (15e), Martin (41e sp), Dabo (51e, 57e) Ben Yedder (64e sp) Sankharé (12e), Briand (72e) 0 nantes 1 Vendredi : Marseille-Lille n p bp bc diff. 60 22 19 j 3 0 56 10 46 2 Monaco 39 23 10 9 4 33 28 5 3 angers 37 23 10 7 6 24 18 6 4 nice 36 22 10 6 6 37 26 11 5 rennes 34 22 8 10 4 32 25 6 saint-etienne 33 22 10 3 9 25 25 0 7 caen 33 22 10 3 9 24 28 -4 8 nantes 32 23 8 8 7 21 22 -1 9 Marseille 31 23 7 10 6 33 24 9 10 Lyon 30 23 8 6 9 28 27 1 11 Lorient 30 23 7 9 7 32 32 0 12 bordeaux 30 22 7 9 6 27 30 -3 13 bastia 28 23 8 4 11 22 27 -5 14 guingamp 27 23 7 6 10 22 30 -8 15 Lille 26 23 5 11 7 18 19 -1 16 gazélec-ajaccio 26 23 6 8 9 24 31 -7 17 Montpellier 25 23 7 4 12 27 29 -2 18 reims 23 23 5 8 10 23 32 -9 19 toulouse 20 23 4 8 11 25 41 -16 20 troyes 11 23 1 8 14 16 45 -29 7 Meilleurs buteurs 17 buts : Ibrahimovic (PSG) ; 12 buts : Batshuayi (OM) ; 11 buts : Moukandjo (Lorient) ; 10 buts : Ben Arfa (Nice) , Cavani (PSG); 8 buts : Di Maria (PSG), Ben Yedder +1 (Toulouse) ; 7 buts : Ndoye +2 (Angers), Delort (Caen), Lacazette (Lyon), Germain (Nice). aujourd’hui Caen-Nice Stade Michel d’Ornano (14 h, beIN) Bordeaux-Rennes Stade Matmut Atlantique (17 h, beIN) troyes Gillet (41e) g 1 Paris sg Pts Pour Lyon, ça se corse bastia tact et d’élégance que son président (Saïd Chabane), l’entraîneur du SCO pondère les critiques émises (par Hatem Ben Arfa) sur sa stratégie défensive : « On n’a pas 37 points par hasard. On ne peut pas être mauvais même si on n’a pas toujours été à ce niveau. On a été pas mal décrié, ça n’a pas été toujours juste. » Angers a offert son plus grand festival offensif depuis 35 ans en L1. Le capitaine Cheikh N’Doye y a été de son doublé. Pas sûr que la belle saison de l’ancienne idole d’Épinal laisse insensible les recruteurs de Premier League à 48 heures de la clôture du mercato… s.c. 1-1 24e journée Mardi 2 février : Monaco-Bastia (19 h, beIN); Montpellier-Marseille (21 h, Canal+). Mercredi 3 : Lille-Caen; Lyon-Bordeaux; Guingamp-Troyes; Nice-Toulouse; Nantes-Ajaccio; Reims-Angers (19 h, beIN). Paris SG-Lorient (21 h, beIN). jeudi 4 : Rennes-Saint-Étienne (21 h, Canal+). football | sport | 39 jdd | 31 janvier 2016 chrisTOPhe GalTier L’entraîneur stéphanois, le plus ancien au même poste en L1, revient sur les petites histoires qui ont nourri sa carrière Mais tout le monde pense que je veux le frapper et cette histoire ressort. Je n’ai jamais recroisé Gallardo mais c’est devenu un grand entraîneur ; quand j’ai lu qu’on l’annonçait à Lyon, j’ai imaginé le derby avec nous deux. Ça m’a fait sourire… @SolenJDD C’est un excellent communicant qui s’épanche peu sur lui-même. Entre une conférence de presse sur le gril et un déjeuner détendu avec les médias, Christophe Galtier, 49 ans, a pourtant pris du temps pour se raconter. En poste depuis décembre 2009, il doit défier la thèse de l’année de trop alors que ses Verts ne tournent pas rond. « Piqué », le challenge le motive. « Un jour, il y aura une fin, dit-il. Ça peut être dans quatre mois comme dans longtemps, à la manière d’un Christian Gourcuff à Lorient. » … alain Perrin m’a affranchi Quand Alain Perrin est limogé [15 décembre 2009], les dirigeants de Saint-Étienne me proposent le poste. Je refuse car, dans mon esprit, je dois partir avec lui, comme à Lyon un an plus tôt. Mais ils ont insisté et j’ai dit que j’allais voir avec Alain. Le lendemain, ça a duré deux minutes : « Ne te pose aucune question, c’est toi qui dois prendre la place. » Ça m’a ouvert une porte mais c’est surtout son attitude qui a tout débloqué : il a été dans le vestiaire et a légitimé la transition auprès du groupe. S’il ne m’avait pas affranchi, le regard des joueurs aurait été différent, la suite aussi. » … J’ai pris une soufflante avec canto Avec Eric Cantona, on était deux garçons un peu turbulents au collège, à Marseille. En sport, on ne voulait jouer qu’au foot. Or, notre prof de gym nous imposait du volley, du hand, du saut en longueur. Du coup, on perturbait son cours. Un jour, il nous a traités de bons à rien qui n’arriveraient à rien. Il s’est trompé mais il a eu raison de le faire. J’étais plus clown qu’Éric, qui était timide. Mais on était complémentaire. On est devenu champion d’Europe Espoirs ensemble (1988). On a fait des choses bien pires que la virée des Espoirs en 2012 mais il n’y avait pas la même exposition médiatique. La veille d’un match qualificatif, on est sorti jusqu’à 4h30. Le sélectionneur, Monsieur Bourrier, l’a su et nous en a mis plein la gueule. Mais on a gagné… Heureusement qu’on est con à cet âge-là ! J’accepte les erreurs. Pas qu’on les renouvelle. … Je suis devenu un entraîneur qui gagne Christophe Galtier vendredi au centre d’entraînement de l’ASSE à l’Étrat. R. QUADRINI poUR le JDD À 18 ans, j’ai disputé une finale de Coupe de France avec l’OM : perdue dans les prolongations (2-1 contre Bordeaux en 1986). Je me suis dit que cette opportunité allait se représenter. L’année d’après rebelote : pas grave, ça reviendra… Mais non, ça n’est plus revenu. Alors quand, entraîneur, la finale de Coupe de la Ligue contre Rennes s’est présentée en 2013, je l’ai préparée comme si c’était la dernière. Sans cette victoire (1-0), je ne suis pas à côté de Carlo Ancelotti aux trophées UNFP. Me retrouver au même rang que ce grand monsieur me l’a confirmé : gagner change la vie. Ça décuple la confiance et la légitimité. « Le jour où... » ... J’ai dû quitter l’OM Le 24 juin 1987, je suis à la plage. Quand je rentre chez moi, message de la direction de l’OM sur mon répondeur : « Tu es prêté à Lille. » Le lendemain, je me retrouve dans le Nord : nuages, pluie, envie de pleurer… Comme dans Bienvenue chez les Ch’tis. Et comme dans le film, j’ai pleuré en repartant trois ans plus tard ! Je comprenais la position de l’OM : Tapie arrivait, des stars débarquaient. Moi, je badais Alain Giresse. Lors du premier gros match de la saison 1986-1987, contre Monaco, je me retrouve devant lui dans le tunnel du Vélo- drome. Je n’ai pas 20 ans, je suis tendu. Il y a 52.000 spectateurs et je suis une erreur de casting dans cette équipe. Je me retourne et je vois Gigi. Livide, comme moi. Ça m’a rassuré. ... J’ai perdu 7 kg En 1998, j’ai une opportunité en Chine [au Liaoning Yuandong]. Après 17 heures de voyage, je rejoins l’équipe en stage. Les structures sont plus que limites. L’entraîneur m’ausculte en me tâtant partout. J’appelle ma femme – ça m’a coûté 500 francs – pour lui dire que je rentre. Je suis finalement Paris à la chasse aux canaris saint-Étienne Stade Geoffroy-Guichard (21 h, Canal+) Paris sG s’il ne Perd Pas à Saint-Étienne, le PSG rejoindra dans l’histoire le FC Nantes, qui avait aligné 32 matches de championnat sans défaite en 1994-1995. Paris reste sur 28 victoires et 3 nuls depuis sa défaite à Bordeaux le 15 mars 2015 (3-2, 29e journée). Reste que les Canaris de Coco Suaudeau avaient réalisé l’exploit sur une seule saison, ce que le PSG a encore la possibilité de faire. Les Parisiens visent même un sans-faute inédit en France, sur le modèle des « invincibles » d’Arsenal en 2003-2004 en Angleterre. En poursuivant leur cadence infernale, ils auraient aussi de grandes chances de battre le record de points (89 par eux-mêmes en 2013-2014), de différence de buts (+ 63, Reims en 1959-1960) et d’écart avec leur dauphin (17 points, Lyon en 2006-2007). À Geoffroy-Guichard, Laurent Blanc sera privé de Thiago Silva, Pastore, David Luiz, Lavezzi et Sirigu. Marquinhos et Verratti sont de retour. En ce qui concerne la prolongation de contrat de l’entraîneur, celui-ci a indiqué qu’« il y aura du nouveau la semaine prochaine ». resté neuf mois et je me suis régalé dans cette petite ville de 3 millions d’habitants, Jinzhou, qui grouille 24 heures sur 24. J’ai une capacité d’adaptation supérieure à la moyenne. J’ai quand même eu du mal avec la nourriture : j’ai perdu 7 kg. Toute expérience mérite d’être vécue. C’est comme ça que je me suis retrouvé entraîneur de l’Aris Salonique (2001-2002). Làbas, j’ai appris le mot grec avrio : demain. « Demain, on te donne ton salaire. » J’ai attendu six mois. Et je n’ai presque rien touché quand j’ai été viré ! … Gallardo a dit que je l’avais frappé Suite à l’affaire du tunnel [le 7 avril 2000, Marseille-Monaco], j’ai été injustement suspendu six mois. Il n’y a pas une image, juste des déclarations après une bagarre. Marcelo Gallardo a dit que je l’avais frappé. Ce n’était pas moi, il le sait. On m’a chargé alors que je n’ai tapé personne. J’ai assumé, mais il y a eu beaucoup de fantasmes. Ça a été très difficile à vivre, mais aussi été une grande motivation pour montrer que je n’étais pas l’homme qu’on dépeint. Malgré tout, au moindre dérapage, on me le remet dans la gueule. En début de saison à Toulouse, je fais un geste avec la main au-dessus de Pesic après son tacle sur Perrin. Je veux juste lui faire comprendre que je suis abasourdi par son geste. Foot Thauvin is back ! Même si Michel évoquait hier une « hypothèse », le retour de Florian Thauvin à l’OM se confirme. Vendu 17 M€ à Newcastle l’été dernier, le milieu offensif reviendrait sous forme de prêt sans option d’achat jusqu’à la fin de saison. Du côté de Bordeaux, on s’apprête à accueillir le gardien de Troyes, Paul Bernardoni (18 ans), moyennant 3 M€. Intraitable Barça En battant l’Atletico Madrid (2-1, buts de Messi et Suarez), Barcelone a frappé un grand coup en tête de la Liga, prenant trois longueurs d’avance sur son dauphin, réduit à neuf. Troisième, le Real Madrid de Benzema, dans une forme « phénoménale » selon Zidane, ne devra rien céder à l’Espanyol Barcelone aujourd’hui. rugby Clermont déprime La crise est ouverte à Clermont, battu pour la troisième fois consécutive à domicile, du jamais vu.Cette fois, c’est Montpellier s’impose en Auvergne (19-15), lors de la 14e journée du Top 14. Du coup, le Racing et Toulouse, faciles contre Oyonnax (26-3) et Pau (54-3), prennent leurs distances en tête. Patinage Danse avec les médailles … J’ai vomi après une défaite Après Reims dimanche dernier (1-1), je suis rentré à la maison et j’ai pleuré. Besoin d’évacuer la frustration. Certains joueurs ont pu penser que j’avais établi une liste noire [après qu’il eut déclaré que « certains [allaient] prendre la porte », six noms sont sortis dans L’Équipe]. Ça me fait mal, je ne suis pas comme ça. Mais le regard des joueurs vous renvoie leurs doutes. Quelque chose ne va pas dans le contenu des matches, je dois trouver la solution. Le seul responsable, c’est moi. Et j’ai horreur de me sentir fautif. Il y a deux ans, après l’élimination à Cannes en Coupe, j’ai vomi. C’est peutêtre parce que je me mets dans ces états que je suis toujours là. Dans ce métier, la joie est éphémère. Je me suis revu à la télé après avoir sorti Karabükspor en tour préliminaire de la Ligue Europa (août 2014) : un truc de fou alors qu’on avait juste éliminé des inconnus aux tirs au but ! Mais on s’investit tellement que parfois, la soupape lâche. Il faut faire attention à son hygiène de vie, faire du sport pour évacuer. J’ai arrêté de fumer. Parfois, j’étais aphone en plein match. » g SAMUel KUBANI/AFp l’ÉTraT (lOire) Envoyé spécial sOlen cherrier télex Les Français Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron, 20 et 21 ans, ont conservé leur titre de champions d’Europe en danse sur glace, à Bratislava. « Regagner, c’est encore plus cool ! C’était stressant de rejouer la première place mais on a réussi », savoure Cizeron. cyclisme Un moteur dans le vélo ? L’Union cycliste internationale (UCI) a « saisi » hier un vélo aux Championnats du monde de cyclo-cross, à Zolder (Belgique). Dans l’épreuve Espoirs, la Belge Femke Van den Driessche est suspectée d’avoir utilisé un vélo équipé d’un moteur. Vue comme la favorite, elle a abandonné sur ennui mécanique. dimancheparis jdd | 31 janvier 2016 |i environneMent Après Fontainebleau, le massif boisé de Sénart va devoir s’équiper d’un système de photosurveillance. Les dépôts sauvages augmentent de 20 % chaque année Forêts, halte aux ordures ! D @Makleiber es appareils photos ultrasensibles cachés dans les sous-bois : ils se déclenchent au moindre mouvement, de jour comme de nuit. Leur cible ? Ni les cerfs majestueux, ni les sangliers sortant en harde le soir mais un intrus inattendu, difficile à débusquer… Ces dispositifs espions traquent en effet les êtres humains indélicats qui vident leur cave le soir sous le grand chêne, ou les artisans qui jettent leurs gravats incognito dans les clairières. Aux grands maux, les grands remèdes. Face aux pollueurs des sous-bois, l’Office national des forêts (ONF) sort la photosurveillance. Car il est bien difficile de prendre les contrevenants sur le fait, et impossible de cacher un garde derrière chaque arbre. Ce nouveau procédé vient d’être testé dans la forêt de Fontainebleau : les agents de l’ONF ont d’abord cartographié les zones les plus touchées. Une vingtaine de lieux servant de dépôts sauvages ont été répertoriés il y a dix-huit mois. Puis des appareils équipés de puces (en cas de vol) y ont été dissimulés de telle sorte qu’ils permettent d’enregistrer plaques automobiles et visages. De quoi porter plainte ensuite. Bien sûr, les gardeforestiers doivent faire le tri, jetant les photos d’animaux pris sur le vif, et ne gardant aucune photographie plus de trente jours, conformément aux instructions de la Cnil, la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Vingt-cinq plaintes ont été déposées en quelques mois. « Le processus judiciaire est long », précise-t-on à l’ONF. Un riverain de la forêt de Fontainebleau, qui avait pris l’habitude de jeter sa poubelle tous les matins par la fenêtre de sa voiture en traversant les bois, a été condamné à Sentier aménagé dans le sous-bois de Fontainebleau que des millions de promeneurs arpentent chaque année. CRISTOFANI/BNT/SIPA 1.500 € d’amende. Un autre particulier, qui avait vidé son grenier, a écopé en novembre dernier de la même amende, et de 3.000 € à titre de dédommagement. Plus de 200 tonnes d’ordures ont été ramassées Après les 25.000 hectares de Fontainebleau, la forêt de Sénart, ancien terrain de chasse royale de 3.000 hectares, sera également équipée de ces « nasses » photographiques à partir d’avril. Ces deux domaines sont tous les deux très fréquentés (11 millions de visites annuelles pour le plus grand, 3 millions pour l’autre). Et les promeneurs se plaignent tout particulière- ment de la saleté. À Fontainebleau, en 2014, plus de 200 tonnes d’ordures ont été ramassées ! Mais ces deux grands bois ne sont pas les seuls concernés par cet incivisme grandissant : toutes les futaies d’Île-de-France, Meudon, Marly-le-Roi, Rambouillet, affrontent ce problème. « Depuis 2013, le nombre de tonnes de déchets ramassés par nos agents augmente chaque année de 20 %, explique Guillaume Larrière, porte-parole de l’ONF en Île-de-France. La collecte et le traitement de ces ordures ont un coût, cela représente près de la moitié des dépenses d’entretien. Cet argent devrait être consacré exclusivement à l’aménagement des aires d’accueil GIlleS ROlle/ReA Vers le « zéro déchet » à Paris ? AU P RO C H A i N Conseil de Paris du 15 au 17 février, un plan de propreté devrait être présenté par la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui a fait de ce thème l’une des priorités de sa mandature. Fin 2012, un classement établi par le site TripAdvisor classait Paris à la 24e place des grandes métropoles mondiales quant à la propreté de ses rues. Trois ans plus tard, les crottes de chiens, les sacs-poubelle éventrés sur les trottoirs restent un sujet d’agacement chez les Parisiens et les touristes ; une impression subjective, puisqu’il n’y a pas de baromètre officiel pour mesurer la saleté parisienne. Depuis 2014, plusieurs actions ont été mises en place : « Nous avons par exemple déployé 35.000 corbeilles de rue, avec cendrier incorporé », tient à rappeler Mao Peninou, adjoint à la maire de Paris chargé de la propreté et du traitement des déchets (photo). « Nous avons renforcé le plan de collecte estivale d’avril à octobre, sur les sites très fréquentés aux beaux jours, comme le canal Saint-Martin. Il nous faut tenir compte des nouveaux usages de la ville, dont l’espace public – la place de la République, les berges de Seine – est réinvesti par les Parisiens. Aujourd’hui, on a tendance à rester à des endroits où l’on ne faisait que passer auparavant et cela engendre du nettoyage. » Un nouveau plan propreté annoncé Depuis octobre dernier, autre changement : le fait de jeter un mégot par terre peut vous valoir une amende de 68 €. Une centaine d’agents en civil ont déjà distribué plus de 1.000 en trois mois à des fumeurs négligents. « En plus des 40.000 cendriers de poche déjà distribués, 125.000 autres vont l’être dans les mois qui viennent, via le Crous, les syndicats de restaurateurs et la RATP et la SNCF » ajoute Mao Peninou. Concernant les dépôts sauvages, à Paris, ils sont « stabilisés depuis deux ans » : 60 % d’entre eux ont été signalés et évacués dans la demi-journée. L’application DansMaRue a permis 60.000 signalements, contre 15.000 en 2013, et la version 2 de l’appli va être lancée d’ici à juin prochain. Une brigade contre les incivilités entrera aussi en action dans les mois à venir. Quant au plan de propreté qui sera annoncé dans les jours prochains, il devrait faire la part belle à l’engagement des citoyens, déjà mobilisés l’an passé lors de l’opération Paris, fais-toi belle. « Il faut impliquer les habitants dans la notion de propreté, il leur faut arrêter de jeter par terre, et aussi moins jeter tout court », annonce l’adjoint. Le plan devrait mettre l’accent justement sur le « zéro déchet ». M.-a.K. et des parcours de promenade, ou à la coupe d’arbres dangereux. » Les accès des domaines forestiers sont bloqués le soir À la Région, qui gère via l’AEV, l’Agence des espaces verts d’Île-deFrance, 17.000 hectares de forêts (Ferrières, Verneuil, La RocheGuyon, etc.), le phénomène des déchets sauvages est aussi pris en compte. Un fonds de propreté, destiné à aider les communes à nettoyer – un engagement de campagne de la nouvelle présidente (LR) Valérie Pécresse – devrait être rapidement mis en place. Et début 2017, Chantal Jouanno, la vice-présidente chargée de l’écologie et du développement durable, devrait présenter un plan régional déchets. « Nous allons aussi demander à l’État de verbaliser et d’agir », ajoute-t-on. Des discussions avec les professionnels (artisans, entreprises du BTP…) doivent aussi être lancées, pour définir des actions de fond. Les deux tiers des déchets collectés dans les domaines forestiers par l’ONF sont en effet constitués de gravats et de restes de chantier, qui normalement devraient finir en déchetterie – au coût pour du « mélange » de 80 € environ le mètre cube HT dans les sites privés, moitié moins pour les sites publics. Or, selon l’Apur, l’Atelier parisien d’urbanisme, qui vient de rendre une étude sur les abords autoroutiers eux aussi victimes de dépôts sauvages (lire l’encadré), l’offre de déchetteries dans la métropole du Grand Paris est « insuffisante, disparate, peu lisible et peu adaptée aux petits artisans ». Pour un indépendant, passer par la case déchetterie n’est « économiquement supportable qu’à partir d’un volume de 5 m³ ». En attendant, un jour, un réseau de traitement de ces ordures plus efficace, à Sénart, les garde-forestiers bloqueront les accès de la forêt le soir venu, grâce à des portiques anticamionnettes et des bornes escamotables en cours d’installation. Et, la nuit tout au moins, les appareils photos cachés dans les fourrés et les arbres frissonnants, ne devraient plus prendre que des clichés de cerfs ou de sangliers… g Des moutons en borD D’autoroute L’an passé, la Dirif, direction des routes d’Île-de-France, a lancé une grande opération de nettoyage sur les abords des autoroutes du Nord de Paris, où les déchets pullulaient. De mars à juin, plus de 25.000 tonnes ont été enlevées des bordures autoroutières (pour un montant de 15 millions d’euros). Une campagne d’affichage a également été lancée, interpellant les automobilistes d’un « La route n’est pas une poubelle ! » Mercredi dernier, l’Apur, l’Atelier parisien d’urbanisme a rendu publique une étude sur « l’insertion urbaine et paysagère PlAINPICTuRe/S. ShePheRd Marie-anne Kleiber des autoroutes dans le Grand Paris », dans laquelle des pistes d’action sont données pour certains sites transformés en décharge, des « délaissés » autoroutiers. Les urbanistes proposent d’y planter des arbres fruitiers, d’y mettre des ruches, ou des moutons. M.-a.K. ii | paris JDD | 31 janvier 2016 Urbanisme, le grand pari d’Anne H eXcLUSIF L’opération Réinventer Paris, l’un des plus ambitieux concours d’architecture en Europe, s’est achevée cette semaine. Le nom choisies parmi les 75 «projets urbains innovants », sera dévoilé mercredi. Le JDD a pu assister à l’un des jurys. Coulisses Bertrand Gréco Le 3 février, Anne Hidalgo dévoilera le nom des 23 lauréats de l’opération Réinventer Paris ; et l’événement fera du bruit. Car les vainqueurs de ce vaste et inédit « appel à projets urbains innovants » ont une mission d’importance : dessiner la « métropole du futur » et « préfigurer ce que pourrait être Paris demain », comme l’annonce la maire de la capitale. La Ville a identifié 23 sites lui appartenant – terrains nus, bâtiments des années 1970, friches industrielles, hôtels particuliers, franchissements du périphérique… –, qui seront vendus ou loués aux équipes lauréates menées par des promoteurs et des architectes. Tout au long du mois de janvier, 23 jurys – un par site – se sont réunis pour départager les trois ou quatre finalistes. La série de concours s’est achevée jeudi avec la présentation des projets pour l’immeuble Morland (4e). Exceptionnellement, le JDD a pu assister à l’un de ces jurys, soumis à des règles de stricte confidentialité. Mardi, 14 h 30, une fébrilité palpable règne dans les sous-sols de l’Hôtel de Ville. Quatre équipes pluridisciplinaires, composées chacune d’une douzaine de personnes, attendent leur tour pour passer leur grand oral. Elles ont planché depuis des mois sur leur proposition, forcément spectaculaire, puisqu’il s’agit de construire un « immeuble-pont » enjambant le périphérique – aujourd’hui non couvert à cet endroit – sur près de 4.000 m² porte des Ternes, (17e), à deux pas du palais des Congrès. Deux heures plus tôt, le même jury avait désigné un gagnant pour le site adjacent, entre la porte des Ternes et la porte Maillot (lire l’encadré). Dans les coulisses, la tension est à son comble. Les concurrents s’épient du coin de l’œil. Crispés ou concentrés, ils dissimulent dans de grands cartons mystérieux leur précieuse maquette censée impressionner les membres du jury. Deux des quatre projets en lice pour le site Ternes-Villiers (17e) en surplomb du périphérique : la « Ville multistrates » de Jacques Ferrier (BNP Paribas), à gauche, et celui de Sauerbruch Hutton (Foncière des Régions), à droite. JFa-ChaRtieR dalix / saueRbRuCh hutton Celui-ci est présidé – dans la bonne humeur – par Jean-Louis Missika, l’adjoint de la maire, chargé de l’urbanisme, de l’architecture et du Grand Paris. À sa droite, la maire LR du 17e, Brigitte Kuster. À sa gauche, un adjoint du maire de Neuilly-sur-Seine (92), commune riveraine. Une vingtaine d’autres personnes font partie du jury : un élu de chaque groupe politique, des adjoints ou leur représentant, mais aussi des « experts », comme l’architecte allemand André Kempe, le designer Marc Aurel, Robin Chase, fondatrice américaine de Zipcar, Dominique Alba, directrice de l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), des enseignants chercheurs ou encore des responsables de la direction de l’urbanisme de la Ville. « Nous vous présentons du rêve, un projet jamais encore réalisé » Chaque équipe dispose de vingt minutes de présentation, suivies de dix minutes de questions-réponses. Dans un coin, les secondes s’égrainent sur un grand écran affichant le compte à rebours. À l’opposé, dans une minuscule cabine, deux interprètes font de la traduction simultanée. Pour chaque audition, le rituel est le même. La maquette, tantôt petite et démontable, tantôt immense et lumineuse, est installée au milieu du jury, disposé en U. Un petit film montre le projet sous son plus beau jour. Puis, le grand oral démarre, au cours duquel s’expriment le promoteur, l’architecte et des spécialistes de l’écoconstruction, de l’agriculture urbaine, de la restauration solidaire, de l’hôtellerie, du coworking, etc. Le premier candidat du site Ternes-Villiers s’appelle « Nouvelle Scène ». Le projet est porté par la Compagnie de Phalsbourg et dessiné par l’agence française Loci Anima Architecture. « Nous vous présentons du rêve, un projet jamais encore réalisé », s’enthousiasme Philippe Journo, le patron du groupe, prêt à investir 30 millions d’euros HT. Et de vanter les mérites de son équipement culturel (18.800 m²) dédié au spectacle vivant et aux « shows contemporains à fort contenu technologique ». La salle modulaire d’environ 2.000 places et sa scène centrale pourraient accueillir le Cirque du Soleil, des concerts ou des comédies musicales. S’y ajoutent une « black box », une résidence hôtelière pour artistes, des bureaux réservés au monde de la création artistique, un restaurant et un potager de 600 m² sur le toit. La façade « bioclimatique », constituée de lames d’aluminium blanc nacré qui laissent pénétrer ou stoppent la lumière, évoque un rideau de scène. Avec ses cheveux verts, le botaniste Patrick Blanc – l’inventeur du mur végétal urbain – décrit le « nuage vert » qu’il imagine derrière les lames, constitué de « végétation moussue et à très petites feuilles ». Le deuxième projet, répondant au nom de « Ville multistrates », est défendu par BNP Paribas, avec le concours du fonds souverain de Norvège – le plus important du monde, disposant de plus de 800 milliards d’euros – et du bailleur social 3F. Investissement : 44 millions d’euros HT. L’architecte français Jacques Ferrier a conçu un « paysage-pont », comprenant une nouvelle place publique, entourée de 4 bâtiments à ossature en bois (17.900 m²), arborant des façades végétalisées et reliés à leur sommet par des passerelles légères. « Radicalement le contraire d’un immeuble Un immeuble-pont au-dessus du périphérique SéPARé DU SITE TERNESVilliers par l’avenue de la Portedes-Ternes, le terrain Pershing (17e) a fait l’objet d’un jury mardi matin. Ici aussi, un immeublepont va s’ériger au-dessus du périphérique, empiétant sur l’actuel parking à autocars de la porte Maillot. Les candidats souhaitent tous construire un hôtel, des bureaux, des espaces de coworking, des logements (dont 30 % sociaux), une crèche, des commerces et une gare routière repensée… Piloté par Unibail-Rodamco, le projet « Playground » consiste en un ensemble immobilier mixte conçu par l’agence danoise 3XN comme une « grande serre vitrée et luxuriante » ; il comprend aussi un marché, un bar rooftop… Le projet « Mille Arbres » (Compagnie de Phalsbourg) propose un bâtiment à énergie positive, présenté comme une « forêt habitée », œuvre du Japonais Sou Fujimoto. Outre les 391 arbres en « Playground » par l’agence danoise 3XN (Unibail-Rodamco). 3xn toiture et les 503 arbres au premier niveau, l’architecte a dessiné une « rue gourmande de chefs étoilés » et un « food court » designé par Philippe Starck. Le troisième candidat, « PXP » (Gecina), a fait appel à l’illustre architecte néerlandais Rem Koolhaas (OMA) pour imaginer un immeuble de 50.000 m², où s’implanterait une annexe de la Pinacothèque, et 7.000 m² destinés à l’agriculture urbaine. Enfin, « La Ville plurielle et généreuse » (BNP Paribas) et l’architecte Jacques Ferrier présentent un « paysage-pont habité », abritant une auberge de jeunesse et une terrasse belvédère à côté des jardins et potagers sur le toit. B.G. Bonnes taBles ouverts le dimanche la redécouverte Le Corot (92), séquence évasion L’envie nous vient de célébrer une bonne nouvelle à deux en dehors du brouhaha de la ville. Surgit l’idée d’une table de qualité, calme et inventive, nichée aux bords des étangs de Corot, à Ville-d’Avray. À quinze minutes (en voiture) de la capitale, nous voilà bien installés le long de la baie vitrée avec vue sur la jolie petite cour intérieure. La pièce accueille quelques tables bien espacées, le service est efficace. L’ancien relais de chasse est orné par endroits de grands panneaux rappelant l’œuvre du peintre. Le menu dégustation frôle les 100 € mais comparé à ces Le restaurant met en scène son passé de pavillon de chasse. R. valeRio cantines parisiennes qui se croient « incontournables »… Et puis, c’est soir de fête et le chef propose une cuisine justement couronnée d’une étoile. Va pour le foie gras rôti, l’anguille fumée avec sa blette et consommé de betterave, délicieux mélange de saveurs. L’aiguillette de saint-pierre poêlée et sa sauce aux supions fondent dans la bouche. Nous poursuivons par une (petite) selle d’agneau rôtie, avec pulpe d’aubergines 8/10 et jus d’agneau au Xérès qui fait sourire les babines. Repus, nous nous privons de fromage pour mieux apprécier l’épatante carotte des sables et le sorbet carotte-clémentine. Allez, un p’tit verre de champagne, une belle balade digestive le long des plans d’eau magnifiquement givrés, et notre évasion culinaire est couronnée de succès. Le corot, 55, rue de Versailles, Ville-d’avray (92), hôtel-spa et restaurants. du mercredi soir au dimanche. tarifs : menu dégustation 95 € ; menu déjeuner 48 € (j., v., s.). tél. : 01 41 15 37 00. Chez Astier (11e), à l’ancienne Marre des dînettes avec leurs tables d’écoliers dépareillées et autres bistrots-couloirs bondés? Alors, venez respirer dans cet établissement au cœur du « vrai » Paris. Il a été récemment redécoré : le carrelage gris, les murs boisés, la serviette à carreaux en tissu, et le sourire des serveurs vous annoncent la (jolie) couleur : bienvenue chez Astier, où le pot de sardines et sa petite assiette de pommes de terre vinaigrette vous replongent dans un autre temps, celui des plats tradis simplement bons, sans complexes ni arrière-pensées. Au diable la tyrannie des calories, le plat chronométré… Alors, va pour 7/10 la bavette saignante et délicieusement filandreuse qui cède doucement sous la coupe et qui se marie agréablement aux petites pommes de terre rissolées. On prend son temps. Au dessert, on tente l’autoproclamée « fameuse crème aux œufs d’Astier, ananas Condé » (8 €). Eh bien, elle peut frimer, la crème parce qu’elle est dangereusement addictive. Seul le café réussira à nous en désengager. Pas goûté les verres de vin (à 6, 7 €) mais nos voisins ont apprécié le tursan. Comme quoi, il faut redonner du temps au temps, parfois… chez astier, 44, rue Jean-Pierretimbaud (11e). 7j/7 midi et soir. tarifs : entrée-plat-dessert à 35 €. tél. : 01 43 57 16 35. paris | iii jdd | 31 janvier 2016 Hidalgo des 23 équipes lauréates mastodonte, comme le palais des Congrès. ». Le programme inclut des bureaux (11.000 m²), un incubateur de start-up, des logements privés et sociaux (30 %), des commerces en rez-de-chaussée, un restaurant, une école d’horticulture, du maraîchage, ainsi qu’une… plantation de thé sur le toit. L’idée est de produire, transformer et vendre sur place le « premier grand cru de thé parisien ». Une « ferme dans le ciel » ouverte à la promenade. Un « pont habité » de 20.500 m² avec hôtel et espaces verts Troisième postulant : « Les Arches Maillots ». Le projet de Foncière des Régions propose – pour 39,3 millions d’euros HT – un « pont habité » de 20.500 m² conçu par le studio allemand Sauerbruch Hutton. Pierre angulaire d’un espace public animé sur deux niveaux – destiné à accueillir plus de 3.000 personnes par jour –, une « agora » abrite des restaurants (« de 9 à 25 € le déjeuner ») et des commerces de bouche, en partenariat avec l’association des Cuisiniers de France et des associations d’insertion. L’endroit est aussi doté d’une « microcrèche » et d’un centre de loisirs, d’une salle de fitness et d’un lieu dédié à l’art contemporain géré par le Frac. Le tout surmonté d’un hôtel de 210 chambres (100 € la nuit), d’un espace de coworking et de 6.000 m² de surfaces végétalisées consacrées à l’agriculture urbaine (Topager) et au circuit court. Autant d’espaces verts en toiture accessibles au public. Enfin, baptisé « Équilibre », le projet du quatrième et dernier candidat est financé – à hauteur de 47 millions d’euros HT – par Hertel Investissement. Ce bâtiment de 18.500 m² tout en transparence, dessiné par l’architecte japonais Riken Yamamoto, ambitionne d’être Vue d’artiste de la « forêt habitée » au-dessus du périphérique, signée de l’architecte japonais Sou Fujimoto (Compagnie de Phalsbourg) et baptisée « Mille Arbres », sur le site Pershing (17e). SOu FuJimOTO le « premier écosystème citadin », un modèle déclinable ailleurs. Le projet se présente comme un « nouveau passage parisien ouvert à tous ». Cette rue intérieure bordée de commerces comprend aussi un restaurant solidaire (Marie Cocotte), un café littéraire animé par Acte Sud, une ressourcerie et une conciergerie 2.0. L’immeuble abrite une auberge de jeunesse de 250 lits (79 € la chambre), 10.000 m² de bureaux et 50 logements bureaux inventés par Riken Yamamoto, qualifiés de Dans les coulisses, Home Business Units (HBU), ainsi la tension que de nombreux est à son comble. espaces partagés. Sans oublier les concurrents l’indispensable s’épient Du coin ferme urbaine sur les toits (1 hecDe l’œil… tare), agrémentée de serres de production et de « terrasses agricoles partagées ». Après les présentations, les équipes doivent répondre aux questions des membres du jury. Sans surprise, chacun joue son rôle selon ses priorités. L’adjoint aux finances, Julien Bargeton (PS), parle « gros sous » : « Votre proposition financière me semble un peu faible, pourriez-vous faire un effort supplémentaire ? », ou encore « Votre offre est satisfaisante ; est-elle intangible quoi qu’il arrive ? » La maire de l’arrondissement, Brigitte Kuster, se préoccupe de la desserte en transports en commun, de l’absence de parking ou de l’ouverture aux riverains. Jérôme Dubus, conseiller de Paris LR du 17e, s’inquiète des logements sociaux et des emplois créés. L’adjointe EELV aux espaces verts veut en savoir plus sur la végétalisation. Les écologistes se demandent comment prémunir les fermes urbaines de la pollution du périphérique et des métaux lourds. DE FONTENAY JuliEN POuR lE JDD les Puces des batignolles (17e) Déjeuner « plan B » après avoir trouvé porte close à La Félicité (18e), bistrot qui a du mal annoncer qu’il est fermé à midi. Parquet et tables en bois, deux salles mignonnes avec banquettes rouges, étagères rigolotes et accueil très correct. On tente l’œuf croustillant sur lit de légumes, c’est intéressant mais pas assez chaud. La raie pochée est de bonne facture et ses légumes agréables. En face de nous une belle salade, copieuse, à base de chèvre qui est tombée amoureuse d’un roquefort costaud. 6/10 Mousse de marrons pour gourmands, beau fromage blanc aux fruits rouges et une note – légèrement bizarre – facturant un verre de vin non existant. C’est parce qu’on a regardé (c’est tout !) la jolie sélection de vins au verre à 4,50 € ? L’ambiance est sympa le soir, nous dit-on. Si vous êtes dans le quartier… Les Puces des Batignolles, 110, rue Legendre (17e). Ouvert tlj, midi et soir. Tarifs : formule 2 plats 14 €; avec dessert : 17 €. Tél. : 01 42 26 62 26. Puis, vient le temps des délibérations. Informelles, d’abord. Des petits groupes se rassemblent par affinité politique et parlementent en chuchotant. Jusqu’à ce que Jean-Louis Missika s’exclame : « Les jeux sont faits, rien ne va plus ! » Le directeur de l’urbanisme de la Ville de Paris résume les points forts et les points faibles de chaque projet. L’avis de l’architecte des bâtiments de France est énoncé. Et chacun y va de son commentaire. Le jury passe alors au vote, pour désigner le lauréat, mais aussi le 2e, puis le 3e. Et le vainqueur est… Réponse le 3 février. g DU 6 AU 14 FÉVRIER propriétaire À BoULoGNe NorD venez déCOuvrir nOs Offres Week-end Portes ouvertes uniques ! les 6 et 7 février “Mise en seine” (2) FraiS De Notaire À 1€ poUr LeS 5 preMierS réSerVataireS RobeRt MelcheR Quant à Bernard Gaudillère (PS), président de la commission du Vieux Paris, il n’est obsédé que par l’église Notre-Damede-Compassion, située juste en face, entre le périphérique et le boulevard des Maréchaux. Cette chapelle construite en 1843 – en hommage au prince héritier Ferdinand-Philippe d’Orléans, fils aîné du roi Louis-Philippe –, avait déjà été déplacée en 1974 lors de la construction du palais des Congrès. Classée monument historique, avec des vitraux dessinés par Ingres, les porteurs de projet doivent en prendre le plus grand soin. (1) Au calme, proche des bords de Seine et au pied du futur parc anna Jacquin. Des appartements de standing du studio au 5 pièces. Des balcons, de grandes terrasses ou des jardins privatifs pour certains. déMarrage des travaux eSpaCe De VeNte 25, quai du 4 Septembre 92100 Boulogne-Billancourt iV | Paris | quE FairE aujourd’hui JDD | 31 janvier 2016 En famille À l’extérieur À l’intérieur UniqUe Ça commence Dernier joUr en famille rois dE la pErcussion la chinE d’aujourd’hui MusiquE Et tEchnologiE Espoirs du cirquE parce que Stomp est de retour à Paris. Depuis vingt-quatre ans, ce grand show de percussions sur des objets du quotidien a été applaudi par des millions de spectateurs. Casino de Paris (9e), M° Liège. À 13 h et 17 h. Tarifs : de 34,50 € (réduit) à 67,50 €. casinodeparis.fr parce qu’une douzaine d’artistes chinois racontent leur pays à travers leurs œuvres, rassemblées pour l’exposition « Bentu : la terre natale ». Fondation Louis-Vuitton (16e), M° Les Sablons. De 11 h à 20 h. Tarifs : 14 €, 10 € (réduit). fondationlouisvuitton.fr parce que la musique, ça s’écoute, mais pas seulement. Le Paris Musique Club est une exposition interactive conçue comme une expérience sensorielle. Concerts à 360°, réalité virtuelle, installations vidéo, etc. Gaîté lyrique (3e), M° Réaumur-Sébastopol. De 12 h à 19 h. Tarif : 7 €. gaite-lyrique.net parce que des jeunes talents du monde entier participent au Festival mondial du cirque de demain : jonglerie, équilibre, mât chinois, funambulisme, contorsion, trapèze, etc. Cirque Phénix (12e), M° Liberté. À 15 h. Tarifs : de 20 € à 72 €, 25 € (– 16 ans). cirquededemain.paris 8e Le génie de Vinci 14e Pinacothèque, M° Madeleine. Des fragments du Codex Atlanticus, recueil de dessins énigmatiques et de notes de travail de Léonard de Vinci, sont présentés dans le cadre de l’exposition « Léonard de Vinci, Il Genio ». Le parcours présente aussi des maquettes d’inventions. Dernier jour. Brocante Boulevard Edgar-Quinet, M° Raspail. Une centaine d’exposants, professionnels de l’antiquité-brocante, attendus sur le boulevard Edgar-Quinet pour cette brocante. Objets d’art, décoration, etc. 11e De 7 h à 19 h. Gratuit. spam.fr danse contemporaine Théâtre de la Bastille, M° Bastille. Avec Relative Collider, le trio de danseurs explore les possibilités des chorégraphies répétitives, comme de gracieux automates. Dans le cadre du festival Les Faits d’hiver. 19e À 17 h. Tarifs : 24 €, 17 € (réduit). faitsdhiver.com De 10 h 30 à 18 h 30. Tarifs : 13 €, 11 € (réduit). pinacotheque.com 15e 3e Parc des expositions, M° Porte-de-Versailles. Trois salons destinés à l’orientation sur le même site. Gros plan sur les métiers du numérique et de l’informatique, sur les formations artistiques et tous les conseils pour partir étudier à l’étranger. De 10 h à 18 h. Tarif : 6 €. letudiant.fr 14 Vide-greniers Rue de Bretagne, M° Temple. Plus de 300 exposants, professionnels de la brocante et habitants du quartier, sont attendus pour ce rendez-vous annuel des chineurs. Meubles, déco, vêtements, etc. De 8 h à 18 h. Gratuit. mairie3.paris.fr 19e ViVe Le jazz ! Théâtre de la Cité internationale. Trio jazz avec des rois de l’impro : le saxophoniste Michel Portal, le pianiste Bertrand Lubat et le batteur Hamid Drake. En première partie, la pianiste Ève Risser, accompagnée de neuf musiciens mêle le jazz et la musique savante dans son White Desert Orchestra. Dans le cadre du festival Sons d’hiver. À 17 h. Tarifs : 22 €, 11 € (réduit). sonsdhiver.org 4e Grande Halle de la Villette, M° Porte-de-Pantin. Développement personnel, médecines douces, méditation et relaxation au programme du salon Vivez nature, sur le bio, nature et bien-être. Près de 150 exposants attendus. Conférences, expositions, dégustations et conseils. De 10 h 30 à 18 h. vivez-nature.com 15e saLon de « L’étudiant » e ViVre Bio on joue au ping-pong ? Halle des Blancs-Manteaux, M° Saint-Paul. Du matériel de tennis de table est à disposition pour les joueurs de tous les âges et de tous les niveaux. Jeu libre le matin et tournoi à partir de 14 h (inscriptions au tournoi avant 12 h 30). À partir de 10 h. Gratuit. mairie04.paris.fr chagaLL et La musique Philharmonie de Paris, M° Porte-de-Pantin. Pour comprendre l’importance de la musique dans l’œuvre du peintre Marc Chagall, aussi bien ses influences que les thèmes évoqués ou le processus de création lui-même. L’expo « Marc Chagall, le triomphe de la musique » présente 250 œuvres et installations. Dernier jour. De 10 h à 20 h. Tarifs : 10 €, 8 € (réduit). philharmoniedeparis.fr 3e Les citoyens s’engagent Carreau du Temple, M° Arts-et-Métiers. Le Forum « La France s’engage », destiné au grand public, va présenter une soixantaine de projets sociaux innovants et permettre la rencontre avec des personnalités du monde associatif et de l’entrepreneuriat social. Un speed dating du service civique sera organisé pour les jeunes qui veulent s’engager. De 10h à 17h. Gratuit, s’inscrire au préalable sur lafrancesengage.fr 12e prix d’amérique Hippodrome de Vincennes, M° Château-deVincennes. Sept courses hippiques au programme dont le prestigieux Prix d’Amérique à 16 h 20. À 15 h 45, défilé de cavaliers du carrousel des lances avec les musiciens de la garde républicaine. Navettes gratuites depuis le métro ou le RER Joinville-le-Pont. De 11 h à 19 h. Tarif : 6,80 €. prix-amerique.com En ÎlE-dE-FrancE 78 91 92 93 94 Femmes du grand siècLe Vide-greniers La Fête au conserVatoire métiers de L’aéronautique photo urBaine Musée Promenade, Louveciennes. L’exposition « Être femme sous Louis XIV » s’intéresse à la condition féminine au XVIIe siècle. Cent œuvres d’art et pièces de décoration composent le parcours. Gros plan sur des femmes de pouvoir, des intellectuelles comme Madame de La Fayette ou Madame de Sévigné. De 14 h à 17 h 30. Tarifs : 4 €, 3 € (réduit). musee-promenade.fr Brétigny-sur-Orge et Baulne. Deux vide-greniers d’importance aujourd’hui dans l’Essonne. Plus de 500 exposants sont attendus sur le parking d’Auchan à Brétigny-sur-Orge. Et 300 exposants s’installent pour une autre brocante, route de Corbeil, à Baulne. De 8 h à 18 h. Gratuit. Conservatoire départemental Edgar-Varèse, Gennevilliers. Pour la réouverture du conservatoire après travaux, concerts et animations musicales toute la journée. Danses flamenco, concert de tango, quintette à deux violoncelles de Frantz Schubert, récital de piano (Debussy, Bartok, Bach, Beethoven, Brahms) et musiques orientales. De 15 h 30 à 18 h 30. Gratuit. ville-gennevilliers.fr Musée de l’Air, Le Bourget. Gros plan sur les études qui forment aux métiers de l’aéronautique : pilote, hôtesse de l’air et steward, ingénieur, contrôleur aérien, mécanicien, ingénieur, métiers militaires, etc. À cette occasion, la visite du musée est gratuite. De 10 h à 17 h. Gratuit. salondesformationsaero.fr Maison de la photographie Robert-Doisneau, Gentilly. Début de l’exposition « Henri Salesse – Nouveau Monde 1945-1977 », consacrée au travaux du photographe Henri Salesse autour de la reconstruction de la France après-guerre. Trois décennies de métamorphose des villes en photos. De 13 h 30 à 19 h. Gratuit. maisondoisneau.agglo-valdebievre.fr