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> 1916 > Le 16 octobre 1916 : Poincaré décore des personnalités du Nord-Pas-de-Calais - Le 08 février 2017 - 07h54
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Le 16 octobre 1916 : Poincaré décore des personnalités du
Nord-Pas-de-Calais
Le 16 octobre 2016
(
http://www.archivespasdecalais.fr/var/satellites/storage/images/mediatheque/archives/images/chroniques-de-la-guerre/a-l-ecoute-des-temoins/1916/16-10-18_visite-president/1083541-1-f
)
Ce 16 octobre 1916, Raymond Poincaré, accompagné d’une délégation ministérielle, entreprend une tournée dans les pays du Nord dévastés.
Armentières est la première ville à les accueillir. Brièvement occupée par les Allemands du 10 au 17 octobre 1914, elle est délivrée par les
Britanniques qui y demeurent jusqu’aux nouvelles offensives de 1918. À leurs côtés est aussi resté le maire Henri Chas (1872-1940), en
fonction depuis 1905. Lors de l’invasion, il est arrêté et retenu en otage avec dix-neuf personnalités de la ville. Pour son courage, Poincaré lui
remet la Légion d’honneur.
D’autres figures du Nord, ayant toutes été retenues en otage, sont également honorées par le président. C’est le cas de Jean-Baptiste Lebas
(1878-1944), maire de Roubaix, arrêté et déporté en mars 1915 au camp d’Holzminden pour avoir refusé de livrer aux Allemands la liste des
jeunes gens qui devaient être envoyés au travail forcé en Allemagne. Incarcéré à la prison de Rastadt jusqu’en janvier 1916, il est libéré pour
raison de santé.
Denis Jacomet (1858-1929), procureur général de la cour d’appel de Douai occupée le 2 octobre 1914, est lui aussi envoyé à la prison de
Rastadt le 8 juin 1915, avant d’être transféré le 5 décembre au château de Celle (Hanovre). Il est finalement échangé contre des prisonniers
allemands à la frontière suisse le 17 janvier 1916. En 1919, à la fin des hostilités, il est nommé premier président à la cour d’appel de Douai et
conseiller à la cour de cassation.
Enfin, Poincaré décore le préfet du Nord Félix Trépont (1863-1949) et son secrétaire général Emmanuel Borromée. Pris en otage le 13
octobre 1914 et incarcérés à la citadelle de Lille, ils ont été accusés d’avoir facilité la reproduction et la diffusion d’articles de journaux français.
Après leur condamnation, ils sont déportés en Allemagne. Félix Trépont est rapatrié en janvier 1916 à Dunkerque d’où il tente de réendosser ses
fonctions. Emmanuel Borromée est également libéré après une année d’emprisonnement.
()
Le Président de la République dans le Nord
Paris, 17 octobre (contrôlé)
Le président de la République a quitté Paris dimanche soir avec M. (Monsieur) Viviani, garde des Sceaux,
M. (Monsieur) Malvy, ministre de l’Intérieur, M. (Monsieur) Ribot, ministre des Finances, M. (Monsieur) le
général Roques, ministre de la Guerre, et M. (Monsieur) Denys Cochin, ministre d’État, pour aller visiter,
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dans les départements du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme, les populations de plusieurs villes
bombardées par l’ennemi.
Il est arrivé à Armentières lundi à 8 heures et demi du matin et en a suivi les rues les plus dévastées. Il a
été reçu par les autorités civiles et par les officiers anglais. Il a remis, au cours de cette première visite,
les décorations suivantes :
La cravate de commandeur de la Légion d’honneur à M. (Monsieur) Trépont, préfet du Nord.
La rosette d’officier à M. (Monsieur) Jacomet, procureur général à la cour de Douai.
La croix de chevalier à M. (Monsieur) Borromée, secrétaire général de la préfecture du Nord, à M. (
Monsieur) Chas,
maire d’Armentières, et à M. (Monsieur) Lebas, maire de Roubaix.
D’Armentières, le président et les ministres se sont rendus à Béthune, dont ils ont parcouru à pied les
quartiers les plus endommagés par le bombardement.
La croix de la Légion d’honneur a été remise à M. (Monsieur) Bonnefoy-Sibour, sous-préfet.
Des croix de guerre ont été décernées à des soldats anglais ainsi qu’à des pompiers français qui ont
opéré de périlleux sauvetages sous le feu de l’ennemi. Les troupes anglaises rendaient les honneurs.
L’après-midi, le président et les ministres sont allés à Arras, dont ils ont longuement visité tous les
quartiers. Ceux des habitants qui sont restés dans la ville, malgré les bombardements continus, leur ont
fait l’accueil le plus reconnaissant. Sur une des promenades de la ville, a eu lieu, au milieu des ruines,
en présence d’officiers anglais et de quelques soldats français, une nouvelle remise de décorations que
nous avons donnée hier matin.
Le président a également remis des croix de guerre à des soldats anglais et français.
D’Arras, le président et les ministres sont allés à Amiens où ils se sont rendus au palais de justice pour
remettre la cravate de commandeur à M. (Monsieur) Regnault, procureur général.
Le président et les ministres ont visité deux ambulances et se sont notamment arrêtés au chevet de
plusieurs habitants blessés la nuit précédente par des bombes d’avions.
Dans chacune des villes où il a passé, le président a laissé aux maires des secours pour les pauvres et
pour les blessés.
(Havas)
()
Le Télégramme, mercredi 18 octobre 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 9/26.
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La délégation ministérielle gagne ensuite le Pas-de-Calais et s’arrête à Béthune pour rencontrer Adrien Bonnefoy-Sibour (1881-1966),
sous-préfet depuis le 12 janvier 1914. N’écoutant que son courage, celui-ci est resté en poste dans son arrondissement en dépit du danger et
notamment jusqu’aux terribles bombardements du printemps 1918. Après guerre, il est nommé préfet de l’Aisne.
Faisant une nouvelle halte au milieu des ruines arrageoises, le président distribue de nouvelles distinctions honorifiques aux résistants du
Pas-de-Calais.
Dans l’ordre de la Légion d’honneur, sont honorés le préfet Léon Briens (1859-1918) au titre de commandeur de la Légion d’honneur, puis
Jules Gerbore (1863-1929), vice-président du conseil de préfecture du Pas-de-Calais, Charles Godefroy, juge d’instruction au tribunal
de première instance d’Arras, et Pierre Proteau, procureur de la République au tribunal de première instance d’Arras, tous en qualité de
chevaliers de la Légion d’honneur.
Pour avoir donné à tous un magnifique exemple de calme, de sang-froid, d’énergie et du devoir pleinement accompli sous la menace de
l’ennemi () […], Monseigneur Lobbedey, évêque d’Arras (
http://www.archivespasdecalais.fr/Anniversaires/24-decembre-1916-deces-d-Emile-Lobbedey-eveque-d-Arras-Boulogne-et-Saint-Omer) ,
est lui aussi promu
chevalier.
()
S.G. (Sa Grandeur) Mgr (Monseigneur) Lobbedey chevalier de la Légion
d’honneur
Les meilleures nominations, a-t-on dit, ne sont pas celles que l’opinion publique ratifie ; ce sont celles
que spontanément elle a devancées.
À ce titre, la promotion que nous sommes heureux d’enregistrer est excellente ; cet acte de justice était
depuis longtemps dans les vœux de tous nos lecteurs ; et les circonstances qui ont accompagné sa
promulgation ne peuvent qu’ajouter à son prix.
La décoration de Monseigneur l’évêque d’Arras a en effet, un caractère militaire ; M. le Président de la
République, accompagné de cinq ministres, a bien voulu la conférer de ses mains au vaillant prélat ; et
c’est la ville d’Arras qui a été choisie, avec beaucoup d’à-propos, comme cadre de cette cérémonie.
Il ne déplaira pas, j’en suis sûr, à Monseigneur Lobbedey, de tenir de M. le ministre de la Guerre sa
croix de la Légion d’honneur. L’évêque d’Arras est homme d’Église, certes ; mais il aime l’armée, et il
en est aimé ; il sait parler à un auditoire militaire ; il a une certaine façon de braver le danger et
d’envisager le devoir qui en font à la fois un soldat et un chef. Il porte la crosse comme d’autres portent
l’épée.
Et c’est un signe des temps que M. Poincaré en personne, suivi de MM. les ministres de la Guerre, de
l’Intérieur, des [lacune] [Co]chin, ministre d’État, ait décoré, sur le même champ de manœuvre, un
général, un préfet, un évêque, un conseiller de préfecture, deux magistrats et deux religieuses (#) [note
1(
http://www.archivespasdecalais.fr/Activites-culturelles/Chroniques-de-la-Grande-Guerre/A-l-ecoute-des-temoins/19162/Le-16-octobre-1916-Poincare-decor
) ].
Toutes les forces de la nation étaient représentées là comme en raccourci ; et, en vérité, leur
concours est-il de trop pour les tâche[s] d’aujourd’hui et les reconstructions de demain ?
Et tous les Atrébates, sans distinction d’opinions ni de partis, seront heureux que leur évêque soit à
l’honneur là où il fût à la peine.
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Il y a des noms qui, dans la fièvre de cette guerre, ont pris, aux yeux des peuples, une signification
symbolique. Arras a ce douloureux privilège. Il marquera la limite inexorable où se sont brisées depuis
deux ans les vagues de l’invasion allemande ; il représentera tout ce qu’il y a, dans notre Artois, de
ténacité, de froide résolution, de patriotisme ardent et continu. Il convenait, vraiment, que le blason
épiscopal sur lequel figure le Lion des Flandres fût orné de la Légion d’honneur là où gît, invaincu, le
Lion d’Arras.
Ch. Guillemant.
()
La Croix du Pas-de-Calais, jeudi 19 octobre 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, PE 135/18.
Né en 1856 à Bergues, Émile Lobbedey arrive au diocèse d’Arras en mai 1911. Durant la guerre, il a beaucoup œuvré pour venir en aide aux
plus démunis, notamment aux réfugiés qui avaient tout perdu. Brutalement décédé le 24 décembre 1916, il est enterré à Boulogne-sur-Mer où il
s’était expatrié.
Le jour de cette remise de décoration, Mgr (Monseigneur) Lobbedey est accompagné du vicaire général Guillemant, de l’archiprêtre de
Notre-Dame, Mgr (Monseigneur) Lejeune, et du doyen de St-Nicolas, le chanoine Sellier. D’autres membres du clergé d’Arras, restés sous les
obus, entourent cette délégation : le chanoine Milléquant, et les prêtres Miseron et Ducrocq.
()
À l’évêché
Monseigneur l’Évêque a reçu jeudi les hommages de félicitations du clergé. Au discours délicatement
éloquent où M. (Monsieur) le chanoine Delattre commentait et complétait la citation officielle, Sa
Grandeur a répondu par les paroles suivantes :
Chers Messieurs,
Je remercie M. (Monsieur) le Doyen du Chapitre qui vient de me haranguer avec tant d’éloquence en son
nom et au vôtre.
J’aurai donc désormais deux croix à porter : celle de l’Évêque et celle du Patriote.
La première, je la tiens depuis dix ans des mains de Pie X (dix) , pontife d’illustre mémoire.
La seconde, je l’ai reçue hier des mains du Chef de l’État.
Ces deux Croix sont des symboles. Elles signifient les deux amours qui se partagent mon cœur :
l’amour de l’Église et l’amour de la France.
L’honneur qui m’a été fait lundi dernier, permettez-moi, chers Messieurs, de le reporter tout entier sur
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les prêtres vaillants dont je suis fier d’être le Chef et dont l’élite est devant moi.
Dans ce diocèse dévasté et envahi, labouré de fer et de feu, inondé de sang et de larmes, j’ai trouvé des
collaborateurs puissants, des travailleurs infatigables. Comment, d’autre part, pourrai-je assez louer mes
prêtres mobilisés ? On les a vus partout sous le vent, sous la pluie, dans l’isolement, dans la mêlée, là
où l’on court, là où l’on crie, là où l’on tue, là où l’on meurt. Au front, sur les champs de bataille, dans
les hôpitaux, dans les ambulances, dans les trains sanitaires, ils ont fait preuve de courage, d’endurance,
de dévouement, d’héroïsme.
Quelle gerbe de distinctions, de décorations, de citations, n’ont-ils pas recueillis ! Gloire à nos héros :
l’Église et la France les exaltent à l’envi, et ce sont de belles pages d’histoire qu’écrit, depuis deux ans,
le diocèse d’Arras.
Qu’il me soit permis d’associer à ces éloges les nobles fils de St. (Saint) Ignace et de St. (Saint) Alphonse.
Eux aussi comptent des héros. Ont-ils tardé un seul instant à répondre, quand la patrie appelait tous ses
fils à son aide ? Ont-ils hésité à consentir les sacrifices demandés ? Prêtres et religieux, nous voulons
être de la race des preux dont la tête ne se courbe que lorsqu’elle tombe.
Chers Messieurs, je vous remercie avec effusion de votre démarche qui m’honore et dont je garderai un
long souvenir.
En terminant je veux vous nommer tous mes exécuteurs testamentaires. Cette croix de la Légion
d’honneur, qui est un bien commun, qui est un bien diocésain, promettez-moi, quand je ne serai
plus, d’aller la porter à ma Légataire universelle d’Arras, N.D. (Notre Dame) des Ardents, sub tutela
Mariae. Notre Dame de Boulogne n’en sera pas jalouse. En retour de son hospitalité vraiment
maternelle je me suis permis déjà de jeter un annel dans sa barque, et à la prochaine station à St (Saint)
-Omer, en souvenir du 16 octobre 1916, j’attacherai un joyau à la robe de la Madone des Miracles. Un
Fils ne doit-il pas tous ses bonheurs à sa Mère ?
Adieu, chers et vénérés Messieurs, comptez sur moi. Je compte sur vous : cor unum et anima una.
[…]
()
La Croix du Pas-de-Calais, dimanche 22 octobre 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, PE 135/18.
()
Notes
(#) [note
1(
http://www.archivespasdecalais.fr/Activites-culturelles/Chroniques-de-la-Grande-Guerre/A-l-ecoute-des-temoins/19162/Le-16-octobre-1916-Poincare-decore-des-personnalites)]
Il a décerné une médaille d’or à M. (Monsieur) Latour, interne de l’hôpital, une médaille l’argent de 2ième classe aux sœurs St-Marcel et
St-Léonard, de la Congrégation des Augustines, attachées depuis de longues années à l’hôpital d’Arras et la croix de guerre à plusieurs soldats
() .
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La France du Nord, dimanche 5 novembre 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 16/95.
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