La cote japonaise prête à repartir après 30 ans de baisse
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La cote japonaise prête à repartir après 30 ans de baisse
La cote japonaise prête à repartir après 30 ans de baisse Par Guillaume Bayre | Publié le 13/06/2012 à 08:18 | Mise à jour le 13/06/2012 à 08:18 Après trois décennies perdues pour le marché nippon, les entreprises japonaises cotées présentent aujourd’hui une valorisation attrayante et des perspectives de croissance davantage axées sur l’international. Taku Arai est spécialiste produits de l’expertise en gestion actions japonaises de Schroders. Cette firme britannique, cotée, est une des principales sociétés indépendantes de gestion d’actifs avec 225 milliards d’euros d’actifs sous gestion. Sur le Japon, les encours représentent 5 milliards. LE FIGARO BOURSE - Vous affirmez votre confiance dans les perspectives des sociétés japonaises, dont le parcours boursier pourrait connaître un point d’inflexion. Sur quelles bases? Taku Arai - Pour un observateur européen qui constate que le Topix (l’indice large de la Bourse de Tokyo, baromètre auquel les gérants spécialisés se mesurent plus volontiers qu’au Nikkei, ndlr) a signé au début du mois un plus bas depuis 1983, ce n’est pas forcément intuitif! Bien que l’archipel demeure la troisième économie au monde, il est vrai qu’au plan boursier l’indice japonais a été marginalisé, les investisseurs redoutant les conséquences du retournement démographique, des pressions déflationnistes, et se tournant vers d’autres économies asiatiques à plus forte croissance. À cela, nous répondons d’abord que nous n’investissons pas dans l’économie japonaise mais dans des entreprises japonaises… Or aujourd’hui celles-ci génèrent davantage de profits à l’export. En 2004, les deux tiers des profits des 400 plus grandes firmes japonaises (hors banques) étaient encore issus du marché domestique. Aujourd’hui, la majeure partie est réalisée à l’international, dont 30 % dans le reste de l’Asie et d’abord en Chine, premier partenaire commercial, et 18 % aux États-Unis. Quant à l’exposition aux économies européennes en difficulté, elle est minime. Les entreprises japonaises ont subi pendant des décennies un environnement local très compliqué, elles se sont aujourd’hui largement transformées… Par ailleurs, l’économie locale a connu au premier trimestre 2012 une accélération inattendue, soit une hausse de 4,1 % du PIB… En effet, après le grand tremblement de terre de Tohuku, on assiste à un essor de la construction qui soutient l’économie. Il faut bien voir que les dépenses de reconstruction commencent seulement à se répercuter, on n’est qu’au début de cette phase car il faut toujours du temps pour que les projets d’infrastructures se mettent en place. Par ailleurs, la composante de la consommation dans le PIB trimestriel s’est montrée très solide. Alors que le marché de l’emploi commence à se redresser, c’est de bon augure pour les revenus des ménages et donc pour la consommation, nous incitant à détenir des enseignes de distribution. Sans compter que la Bank of Japan a rehaussé en avril son programme de rachat d’actifs. Au total, nous jugeons que l’économie japonaise offre un tableau peut être pas fantastique mais en tous cas suffisamment correct pour ne pas peser sur les actions. La phase de redressement des résultats des firmes nippones nous semble solide. Conjuguée à la contre-performance de la cote jusqu’à présent, cela nous amène un grand nombre d’idées d’investissement à très bon marché. Pouvez-vous citer quelques unes de ces idées? Par exemple, nous apprécions des constructeurs comme Honda et Nissan qui profitent du redressement de la demande d’automobiles notamment aux États-Unis, ou des acteurs spécialisés comme Isuzu (véhicules commerciaux) et Daihatsu. Nous apprécions moins Toyota en raison de sa politique consistant à beaucoup produire au Japon car cela l’expose à un risque de change plus important. Nous détenons des «trading houses», ou conglomérats, comme Itochu, Mistuhi ou Mitsubishi… La politique de gestion de ces grandes entreprises diversifiées est beaucoup plus stricte que par le passé et leurs marges s’améliorent. Nous nous concentrons par ailleurs sur le segment des petites et moyennes capitalisations, actives dans les secteurs des machines-outils, des composants électroniques, de la chimie, souvent avec un fort biais à l’export. En Europe, nous connaissons souvent bien les produits japonais, mais les investisseurs connaissent mal vos entreprises, dont les subtilités de gouvernance nous échappent un peu. Si elles exportent beaucoup, les sociétés japonaises semblent peu ouvertes à l’investisseur… Peut-on espérer que cela change, comme le suggère l’entrée récente d’un groupe étranger au capital de Sharp? Personnellement, je suis convaincu que les entreprises japonaises vont connaître une plus grande intégration à l’extérieur. Traditionnellement c’est vrai l’actionnariat était majoritairement composé d’actionnaires «dormants» comme les banques, les sociétés d’assurances, et verrouillé par le phénomène des participations croisées. Cela a beaucoup changé, notamment au cours de la dernière décennie: les fonds d’investissement, les fonds de pension et les actionnaires non-japonais, qui imposent au management davantage d’attention, forment désormais la principale cohorte des actionnaires. Cela s’accompagne d’ailleurs d’une croissance tendancielle des sommes distribuées par les dividendes et les rachats d’actions. Je remarque aussi que nos entreprises recrutent de plus en plus largement de diplômés et de professionnels étrangers et cela contribuera à évoluer vers plus d’ouverture.