vol au-dessus d`un nid de coucou

Transcription

vol au-dessus d`un nid de coucou
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DOSSIER PEDAGOGIQUE
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production et distribution
Résumé et propos
Note d’intention de mise en scène
Explication du titre
Description des personnages
Biographie de Ken Kesey
Biographie de Dale Wasserman
Aperçu de la folie à travers l’Histoire
Glossaire de la pièce
Quelques définitions
A propos des électrochocs
A propos de la lobotomie
La folie en citations
Quelques thèmes de réflexion autour de la pièce
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VOL AU-DESSUS D’UN NID DE COUCOU
Un spectacle produit par Caravane
en coproduction avec le Théâtre André Malraux de Rueil-Malmaison
et avec le soutien de l’ADAMI, du Rabelais à Meythet-Agglo d’Annecy, de l’Arcal à Paris, du
CCJB à Villebon s/Yvette et du Sud-est Théâtre de Villeneuve-St-Georges.
Une pièce de Dale Wasserman*
D’après le roman de Ken Kesey
Adaptation
Jacques Sigurd
Mise en scène
Stéphane Daurat
Scénographie et création lumière
Jean-Luc Chanonat
Régie
Guillaume Giraudo
Design graphique
François Kenesi
Distribution
Chef Bromden
Patrick Mc Murphy
Dale Harding
Charles Cheswick
Billy Babbitt
Anthony Martini
Miss Ratched
Aide Williams
Miss Flinn
Docteur Spivey
Candy
Sandy
Olivier Baucheron
Arnaud Perrel
Olivier Deville
Patrick D’Assumçao
Thierry Jahn
Stéphane Daurat
Catherine Hauseux
Richard Leroussel
Céline Ronté
Pierre Giraud
Céline Ronté
Gwenaël Ravaux
*L’auteur est représenté dans les pays de langue française par Dominique Christophe/L’Agence, Paris, en
accord avec The Marton Agency, New York.
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Résumé
Au sein d’un hôpital psychiatrique, l’arrivée d’un nouveau pensionnaire,
Patrick Mc Murphy, va perturber l’apparente tranquillité qui y règne.
Une histoire bouleversante. Un vent de liberté.
Le narrateur du roman et fil conducteur de la pièce, est le Chef Bromden, le plus ancien
pensionnaire de l’hôpital, qui souffre de catatonie et dont tout le monde pense qu’il est
sourd et muet. Oscillant entre réalité et cauchemars éveillés, il est souvent en proie à des
hallucinations terrifiantes.
L’établissement est dirigé par l’infirmière en chef, Miss Ratched, une femme froide et
méticuleuse, aux gestes étudiés et à l’attitude calme et mécanique.
Patrick McMurphy, qui purgeait une peine dans une ferme d’Etat pour escroquerie et voies
de fait, est transféré à l’hôpital afin que sa santé mentale y soit analysée.
Dès son arrivée dans l’établissement, Mc Murphy se rebiffe contre les règles établies et défie
l’autorité inflexible de Miss Ratched, dont il pense que l’objectif n’est pas tant de soigner
que de neutraliser les forces vitales. Par là même, il bouleverse le quotidien des autres
pensionnaires - des hommes en marge, internés volontairement, et ayant renoncé à toute
forme d’expression - leur permettant de sortir de leur torpeur et de retrouver un peu
d’humanité et de dignité.
Propos
L’histoire est celle d’un combat entre des individus et un système qui cherche à les
normaliser, broyant leur identité. Au-delà de la critique visant un système psychiatrique
répressif, le roman de Kesey apparait comme une dénonciation de tout système totalitaire à l’ idéologie unique, entretenant la terreur, encourageant la délation et contrôlant les
possibilités de pensée, d'expression, de création et de réunion.
Le personnage de Mc Murphy, à travers la dimension humaine et fraternelle qu’il introduit,
permet au récit d’osciller entre drame et humour, entre noirceur et optimisme.
La pièce se conclut sur la note d’espoir portée par le Chef Bromden.
Dans un monde aseptisé et conformiste, Vol au-dessus d’un nid de coucou fait souffler le
vent de la liberté.
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Présentation du projet
& note d’intention de mise en scène
« Vol au-dessus d’un nid de coucou » est une pièce à facettes, dont on peut aborder et
considérer le contenu de bien des façons ; ce qui en fait sa richesse, pour l’équipe artistique
et pour les spectateurs. Elle est, à la fois, une histoire rayonnante d’humanité, et une
critique acerbe de notre société, dépassant largement le cadre de l’institution psychiatrique.
L’adaptation cinématographique a popularisé « Vol au-dessus d’un nid de coucou », mais il
est important de rappeler qu’initialement il s’agit d’un roman de Ken Kesey adapté pour la
scène par Dale Wasserman. Bien que le roman et la pièce datent des années 60, de
nombreux thèmes abordés résonnent fortement en 2010. C’est ce qui, comme metteur en
scène, m’intéresse et ce que la compagnie Caravane envisage à travers ses projets : des
textes qui, tout en divertissant, renvoient chacun à sa propre histoire, à son expérience et au
monde dans lequel il vit. Nos choix et notre travail tendent toujours à faire résonner de
façon universelle et intemporelle les spectacles que nous concevons.
S’il est question en toile de fond du pouvoir et de ses excès, de l’enfermement, de
l’oppression, de la normalisation, de la mise en place de moyens de coercition divers et
insidieux, cette pièce traite aussi d’amitié, de solidarité, d’amour, d’espoir et surtout de
liberté.
A l’instar du roman, le personnage du Chef Bromden est le personnage central de la pièce,
c’est le témoin/narrateur de ce qui se joue dans cet hôpital psychiatrique. Ses interventions
ponctuelles, entre réflexions, rêveries et hallucinations, nous plongent au cœur de la pièce,
de ce qui s’y joue derrière les apparences, de ce qui s’y trame « dans les sous-sols », et de
comment la Machine réduit les hommes au silence.
Le déroulement de l’histoire joue sur deux tableaux : un ancrage dans le réel à travers
ce lieu qu’est l’hôpital psychiatrique où cohabitent patients et personnel soignant, où tout y
est pragmatique ; allégorie d’une société qui pourrait être celle dans laquelle nous vivons.
Et d’autre part une dimension imaginaire, introduite par le Chef Bromden, ayant comme
catalyseur la Machine qui transforme les hommes et les formate comme l’Organisation le
désire. C’est le fil conducteur qui nous mène à travers l’inconscient des personnages, leur
ressenti, la représentation de leurs angoisses, de leurs peurs, leurs failles, leur souffrance.
Pour faire cohabiter ces univers, j’utiliserai, comme dans la plupart de mes mises en scène,
un dispositif scénique simple et non réaliste, qui a l’avantage de ne pas enfermer la vision
du spectateur dans quelque chose de figé mais au contraire de faire travailler son
imagination pour le rendre actif.
Le décor s’articule autour de trois symboles : pouvoir, enfermement et liberté.
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Le pouvoir est représenté par la cabine du personnel soignant, aquarium intégré au reste du
décor. Il renferme tout ce qui est nécessaire au fonctionnement de cette partie de l’hôpital.
C’est là que l’on archive, que l’on surveille, que l’on ordonne, que l’on décide, que l’on
contrôle.
L’enfermement est symbolisé par une fenêtre grillagée verrouillée de la pièce principale
unique où les scènes de l’histoire se jouent. Cette fenêtre donne sur le jardin de l’hôpital.
C’est le seul moyen d’avoir un contact avec l’extérieur et de garder une notion du temps qui
passe.
Enfin, la notion de liberté est symbolisée par les pans de murs « ouverts » qui forment le
décor. Ce qui donne également un sentiment de profondeur et d’espace. Le choix d’avoir
des murs qu’on peut traverser, enjamber ou à travers lesquels on peut voir, souligne le fait
que la plupart des patients sont internés de manière volontaire. D’un point de vue de la mise
en scène, cela offre aussi un espace de jeu pour faire exister les visions hallucinatoires du
Chef Bromden.
La lumière et le son tiendront une place importante dans ce dispositif, véritable appui de jeu
pour faire ressentir le réel et l’irréel, l’extérieur et l’intérieur, l’enfermement et la liberté.
En ce qui concerne la direction d’acteur, il s’agit, plus que jamais, de rechercher la sincérité.
En effet il n’est pas question de caricaturer la folie ou les fous, ni le personnel hospitalier,
mais de réussir à faire exister une communauté de personnes qui, au terme d’un parcours
individuel particulier, partagent désormais un quotidien commun. On retrouve l’importance
de la notion de groupe et de troupe propre au travail de Caravane.
Nous souhaitons un spectacle qui ne peut pas, ne doit pas, laisser indifférent.
Un spectacle qui interroge, dérange, bouleverse, bouscule, encourage et réveille les consciences.
La force de cette pièce, c’est l’énergie libératrice qui s’en dégage et nous engage à lutter
contre toute forme d’oppression.
Stéphane Daurat
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Explication du titre
Le titre original de l’œuvre, « One flew over the cuckoo’s nest », est tiré d’une comptine
enfantine populaire :
Wire, briar, limber lock,
Three geese in a flock.
One flew east,
And one flew west,
And one flew over the cuckoo's nest.
Fil de fer, bout d’bruyère, boucle en soie,
Dans la bande il y avait trois oies.
Une vola vers l’est,
Une vola vers l’ouest,
Et l’autre s’envola au-dessus du nid de coucou.
A noter : cuckoo en anglais signifie aussi ˝niais˝ – to go cuckoo : devenir loufoque
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Description des personnages
PATIENTS DE L’HOPITAL_____________
LE PERSONNEL____________________
Chef Bromden:
A moitié indien par son père, il est le plus
ancien patient du service. On le croit
sourd et muet depuis toujours, jusqu’à ce
qu’un incident provoqué par McMurphy
révèle le contraire. Le récit qu’il nous livre
de ses hallucinations et de son ressenti est
le fil conducteur de la pièce.
Williams: Assistant du personnel médical
dans le service.
Harding:
Il est le président du comité des malades.
Il est dominé par un sentiment
d’impuissance sexuelle vis-à-vis de sa
jeune femme démonstrative.
Billy :
31 ans, il paraît plus jeune et bégaie
lorsqu’il s’exprime. Infantilisé par sa mère,
il nourrit un sentiment constant de
culpabilité. Il a fait plusieurs tentatives de
suicide au sein de l’hôpital.
Cheswick:
Il est le premier parmi les malades à
soutenir McMurphy lorsque celui-ci
s’oppose au règlement et à l’autorité de
Ratched.
Martini:
Victime d’hallucinations, il visualise et
s’adresse régulièrement à des
personnages imaginaires.
Randall Patrick McMurphy:
35 ans, bagarreur, joueur invétéré, un
électron libre. Condamné à plusieurs
reprises pour divers délits, il effectue des
travaux forcés dans une ferme d’état. Au
vu de son comportement turbulent, il est
envoyé à l’hôpital afin que sa santé
mentale y soit analysée.
Miss Ratched:
L’infirmière en chef, une femme à l’âge
indéterminé, qui dirige le service dans
lequel Mc Murphy est interné. Autoritaire
et froide, elle agit avec une confiance
sereine et ne tolère aucune incartade au
règlement.
Une main de fer dans un gant de velours.
Miss Flinn:
Jeune infirmière puritaine et effacée, qui
seconde Miss Ratched.
Dr. Spivey:
Docteur principal en charge du service. Par
faiblesse, lassitude et lâcheté, il en a
abandonné les rênes au profit de
l’imposante Miss Ratched.
VISITEUR_________________________
Candy:
Prostituée et amie de longue date de Mc
Murphy. Elle lui rend visite une première
fois, puis revient lors de la fête organisée
par celui-ci comme « cadeau » pour le
jeune Billy.
Sandra:
Une amie de Candy, prostituée également,
qui l’accompagne lors de la fête organisée
par Mc Murphy.
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Biographie de Ken Kesey
Ken Kesey est un écrivain américain né en 1935 et mort en 2001, auteur de plusieurs
romans, d’une pièce de théâtre et de livres pour enfants.
Publié en 1962, Vol au-dessus d’un nid de coucou est son premier et son plus célèbre roman.
Il a connu un succès considérable dans les années 60 et fut adapté à l'écran par Milos
Forman en 1975.
Kesey est également connu pour être l'un des inspirateurs les plus importants du
mouvement psychédélique des années 60.
En 1959, Kesey est étudiant à l'Université de Stanford. A cette époque, il expérimente
diverses drogues dont le LSD. Les effets procurés par celui-ci - qui, alors, n'est guère connu
que dans certains milieux scientifiques - lui laissent entrevoir une expérience nouvelle du
monde. C'est un vrai choc. Kesey a la sensation d'avoir trouvé la grande clé qui permettra à
l'homme d'ouvrir son esprit et d'étendre son champ de conscience au-delà de tout ce qu'on
aurait pu imaginer.
A partir de 1963, Kesey va se constituer un groupe autour de lui et, surtout, autour du LSD
(toujours aussi méconnu à l'époque) : les Merry Pranksters (littéralement « les joyeux
lurons »).
Durant l’été 1964, les Pranksters traversent le continent américain à bord d’un vieux bus
scolaire repeint à la Day-Glo; sorte d’épopée psychédélique, de San Francisco à New York,
que retrace un texte légendaire de Tom Wolfe.
Le LSD n'est pas encore interdit, et c'est pour possession de marijuana que Kesey sera
inculpé à plusieurs reprises et condamné à 90 jours de prison et 6 mois de travail dans un
établissement pénitentiaire.
En 1966, l'aventure des Pranksters est terminée. Une fois sa peine purgée, Kesey s'installe
avec sa femme Faye et ses enfants dans la ville où il a grandi, à Springfield, Oregon, où il se
remet à écrire.
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Biographie de Dale Wasserman
Je suis né, cela ne fait aucun doute, mais quant à savoir où
et quand, c’est beaucoup plus hasardeux. Ne possédant
aucun certificat de naissance, je ne peux même pas être sûr
de mon âge.
Très jeune, j’ai choisi de quitter l’école et de prendre la route.
J’ai passé des années à sauter d’un train de marchandises à
l’autre, obtenant mon diplôme de Trimardeur haut la main.
Entraîné un jour dans le milieu du théâtre, j’en ai pratiqué tous
les métiers, me tournant finalement vers l’écriture, un acte
d’une monstrueuse impertinence.
J’ai écrit un peu plus de quarante pièces pour la télévision,
quinze longs-métrages et une douzaine de pièces et de comédies musicales pour la scène.
Pour ce qui est des récompenses, j’ai reçu mon lot de Tonies, Emmies, Robbies, Ellies et peutêtre même une paire de Kaspars et Hausers ; je ne pourrais le certifier, n’assistant jamais à
toutes ces remises de prix.
Je n’ai aucun cursus universitaire, et détiens cependant des Doctorats de trois Universités,
une singularité que ceux que cela interpelle peuvent chercher à élucider.
J’ai choisi de vivre en Arizona parce que c’est le seul Etat qui refuse d’adopter « l’heure
d’été ». Je vis dans une oasis là-bas avec ma femme, Martha Nelly Garza, qui reste
merveilleusement sereine face à tout ce qui m’agite.
Dale Wasserman
Dale Wasserman est américain. Ses pièces les plus célèbres sont L’Homme de la Mancha et
Vol au-dessus d’un nid de coucou. Elles lui ont permis de devenir un des auteurs dramatiques
américains les plus joués au monde. Adapté du roman original de Ken Kesey en 1963, Vol audessus d’un nid de coucou a été joué six ans à San Francisco avant de tenir l’affiche à
Chicago, New York, Boston,… mais aussi à Paris, Londres, Mexico, en Suède, en Argentine, au
Japon et dans le monde entier.
Son adaptation, qui conserve le point de vue de Bromden en narrateur de l’histoire comme
dans le roman, n’est pas celle qui a été utilisée pour le scénario du film de Milos Forman, où
le point de vue est celui de Mc Murphy.
Dale Wasserman est décédé en décembre 2008.
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Aperçu de la folie à travers l’Histoire (1)
Primitivement, la folie était considérée comme une catégorie du sacré, une possession par
les mauvais esprits, qu’il fallait chasser pour guérir le malade.
Fin du Moyen Âge, lorsque la lèpre disparut, la folie devint le nouveau fléau qui lui succéda
dans les peurs séculaires et suscita comme elle des réactions d’exclusion ; c’était la nouvelle
incarnation du mal.
A la Renaissance, elle fascine par son ambiguïté : le fou, rejeté hors de l’enceinte des villes,
vit dans l’errance et est celui qui rappelle à chacun sa vérité.
Vers la fin du XVIème siècle, avec le rationalisme, naît l’expérience classique de la folie : elle
n’est plus que l’envers de la raison, et tributaire de celle-ci.
La folie est ensuite muselée, réduite au silence par le « grand enfermement » édicté par
Louis XIV qui fait mettre à l’Hôpital et en prisons, les aliénés et autres déviants : pauvres,
vagabonds, assassins, indigents, gâteux…
Le XVIIIème siècle, pourtant siècle des Lumières, laisse l’incurabilité de la folie bien établie
dans l’opinion générale. On ne craint pas pour les aliénés, mais pour les biens portants qui
pourraient se trouver mêlés à eux.
Le début du XIXème siècle marque une étape importante grâce à Pinel, un grand psychiatre,
qui entreprend de séparer les fous, qui sont des malades que l’on doit soigner, des autres
déviants enfermés avec eux. Le fou commence à être assisté, mais il est considéré comme un
être à part, irresponsable. Ce n’est donc qu’en l’enfermant, en le privant de sa liberté, que
l’on pense le guérir, le désaliéner – autrement dit le rendre libre… Et c’est sur ce paradoxe
qu’est né l’asile, issu à la fois de la ségrégation et de l’assistance médicale.
Au XXème siècle, les progrès de la biologie, l’avènement de la psychanalyse et des sciences
humaines, ont permis une meilleure compréhension des maladies mentales, ainsi que
l’amélioration de leur traitement.
Deux courants évoluant conjointement permettent de transformer la condition du malade
mental. Le développement de la neuro-psychopharmacologie moderne rend possible la
sortie de patients plus ou moins chronicisés; d’autre part, le courant de la psychiatrie sociale
développe le désir d’humaniser les institutions, d’éviter les hospitalisations et d’en finir avec
les mesures d’internement arbitraires. L’idée d’une psychiatrie nouvelle est portée par la
prise de conscience du rôle des facteurs relationnels et socio-économiques dans la genèse
des troubles psychologiques.
Dans les années 60, apparaît la volonté de mettre en place un nouveau dispositif de
traitement de la maladie mentale, dont l’esprit est caractérisé par le refus de l’exclusion du
malade mental, de son isolement, de son maintien dans l’institution dont on dénonce les
effets de chronicisation. Ce dispositif privilégie les prises en charge qui restaurent la
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personnalité du sujet au lieu de l’écraser, luttent contre la passivité et pour la promotion du
travail d’équipe et poussent la psychiatrie à se remettre en question.
« L’’hôpital psychiatrique restera un lieu d’exclusion quelle que soit la qualité des soignants
et sa valeur thérapeutique, aussi longtemps que la folie restera exclue de notre culture et de
notre ordre social. » (4)
(1) extraits du livre de Marie-Noëlle Besançon : « On dit qu’ils sont fous et je vis avec eux »
(2) R.Gentis, « Les murs de l’asile » 1970
(3) extrait du JT de France 3
(4) R.Diatkine, « Réflexions d’un psychanalyste sur la participation des infirmiers à la
psychothérapie »1975
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Glossaire de la pièce
Aigu : Maladie aiguë, qui évolue
rapidement. CONTR. : chronique.
Psychopathe : Personne atteinte de
psychopathie. cour.: malade mental.
Ambulatoire : Se dit d’un acte médical ou
chirurgical qui ne nécessite pas
d’hospitalisation prolongée.
Psychopathie : Personnalité pathologique
se manifestant essentiellement par des
comportements antisociaux.
Catatonie : Syndrome de certaines formes
de schizophrénie, associant notamment le
négativisme, l’opposition, la catalepsie et
les stéréotypies gestuelles.
Psychotrope : Se dit d’une substance
chimique (alcool, médicament, etc.) qui
agit sur le psychisme.
Chronique : MED. Se dit d’une maladie qui
évolue lentement et se prolonge. CONTR. :
aigu.
Egocentrisme : Tendance à centrer tout
sur soi-même, à juger tout par rapport à
soi ou à son propre intérêt.
(Recharger) les accus: Fam.
Accumulateurs électriques – recharger les
accus.: reconstituer ses forces.
Subconscient : Se dit d’un état psychique
dont le sujet n’a pas conscience mais qui
influe sur son comportement.
Thérapie : Traitement médical.
Gogues : Très Fam. : Lieux d’aisances ;
latrines.
Hallucination : MED. Trouble psychique
dans lequel le sujet a la conviction de
percevoir, par la vue, l’ouïe ou l’odorat, un
objet qui n’existe pas.
Mutisme : Attitude de celui qui ne veut
pas exprimer sa pensée, qui garde le
silence. MED. : Absence d’expression
verbale, en particulier d’origine
psychiatrique.
Thérapeutique : Partie de la médecine qui
étudie et pratique le traitement des
maladies. Adj. : Relatif au traitement des
maladies.
Tranquillisant: Médicament psychotrope
faisant partie soit des anxiolytiques, soit
des neuroleptiques.
Voie de fait : acte produisant un
dommage corporel ; acte de violence.
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Quelques définitions
FOLIE : 1. Affection mentale grave telle qu’une psychose - 2. Caractère de ce qui échappe au
contrôle de la raison, du bon sens - 3. Acte déraisonnable, excessif - 4. Goût excessif pour
une chose.
RAISON : 1. Faculté propre à l’homme par laquelle il peut penser – perdre la raison : devenir
fou - 2. Ensemble des principes, des manières de penser permettant de bien juger - 3. Ce qui
s’oppose à l’intuition, au sentiment ; ce qui ramène à la réalité - 4. Ce qui est conforme à la
justice, à l’équité.
ALIENATION : Etat de l’individu dépossédé de lui-même par la soumission de son existence à
un ordre de choses auquel il participe mais qui le domine. Aliénation mentale : nom donné
aux troubles psychiatriques qui nécessitent l’hospitalisation permanente du malade.
PSYCHOSE : Affection mentale caractérisée par une altération profonde de la personnalité et
des fonctions intellectuelles, et par le fait que le sujet n’a pas conscience de son état. Les
principales psychoses sont la psychose maniacodépressive, la paranoïa et la schizophrénie.
NEVROSE : Affection psychique perturbant la personnalité et la vie sociale, et dont le sujet
est conscient. On distingue classiquement les névroses d’angoisse, obsessionnelle, phobique
et hystérique.
PSYCHIATRIE : Spécialité médicale dont l’objet est l’étude et le traitement des maladies
mentales, des troubles psychologiques. • Les causes des désordres mentaux sont mal connues et
discutées, mais, semble-t-il, multiples (biochimiques, psychologiques, sociales, etc.) et
différentes d’un cas à un autre.
PSYCHANALYSE : Méthode de psychothérapie inventée par S.Freud vers 1895 et reposant
sur la découverte de l’inconscient psychique.
CATALEPSIE : Perte momentanée de l’initiative motrice avec conservation des attitudes, le
corps restant figé dans son attitude d’origine.
PARANOIA : Comportement de quelqu’un qui a tendance à se croire persécuté ou agressé.
A noter : Dans la classification des troubles de l’esprit*, on trouve aussi : la dépression,
l’anorexie mentale, l’alcoolisme ou encore les toxicomanies.
* « Ces maladies mentales nommées folie » - éditions Les Essentiels Milan
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A propos des électrochocs
 La sismothérapie, ou électrochoc ou électroconvulsivothérapie (ECT) est une
méthode de traitement des dépressions graves et de certaines psychoses, qui
consiste à provoquer des convulsions épileptiques par le passage bref de courant à
travers le cerveau.
 A travers l’histoire, les scientifiques ont souvent noté (affirmation maintenant
controversée) que très peu d’épileptiques étaient schizophrènes. Au début des
années 30, un psychiatre hongrois, Ladislas Joseph von Méduna (1896-1964),
convaincu de l’existence d’un antagonisme clinique entre schizophrénie et épilepsie,
eut l'idée d'engendrer artificiellement ces crises par l'injection de pentetrazole. En
1938, Ugo Cerletti, un neurologiste italien reprit l'idée du choc au pentetrazole en le
remplaçant par le choc électrique.
 Les résultats des ECT sont peu concluants et même incertains dans le traitement des
psychoses, mais très positifs dans le traitement des mélancolies.
 La technique a pu donner lieu à des abus : on réprimait parfois bien plus qu'on ne
soignait et ceci quelquefois de manière explicite. Dans les années 1950 - 60 - 70,
beaucoup de médecins ont connu ou pratiqué des pseudo-indications pour des
patients réfractaires qu'on souhaitait plus punir qu'autre chose.
 Si les approches psychothérapeutiques, les différents antidépresseurs et autres
médicaments psychotropes ont remplacé progressivement les électrochocs, cette
technique fait néanmoins un retour en force ces dernières années dans l'approche
de la "psychiatrie biologique".
 Ses indications actuelles sont les états dépressifs sévères, pour l'essentiel. Le
consentement éclairé du patient doit désormais être obtenu et son entourage
informé. Ce geste est maintenant réalisé sous anesthésie générale, avec curarisation
profonde, ce qui évite les complications mécaniques: fractures vertébrales, luxations.
 Même si la technique a beaucoup évolué, ce traitement garde une image brutale,
entretenue par la non connaissance précise de ses effets réels et de ses mécanismes
d'action. Nombre de psychiatres refusent de l'effectuer.
 Les adversaires de l’ECT l’accusent de causer de graves dommages au cerveau, avec
perte de mémoire et affaiblissement de l'intelligence.
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A propos de la lobotomie
 La lobotomie est une opération chirurgicale du cerveau qui consiste à sectionner des
fibres nerveuses qui unissent un lobe du cerveau aux autres régions pour traiter des
troubles psychiatriques. On parle aussi de leucotomie pour décrire une lobotomie
partielle.
 La leucotomie est expérimentée en 1936 par le neurologue portugais Egas Moniz. Son
opération consiste à percer de petits trous dans l’os de la tempe, puis à y introduire un
instrument long et fin, le leucotome, pour sectionner les faisceaux de fibres qui relient les
lobes préfrontaux au reste du cerveau. À cette époque où n’existe aucun traitement
contre les psychoses sévères, la méthode d’Egas Moniz est accueillie comme une avancée
médicale majeure, comme en témoigne l’attribution au chercheur, en 1949, du prix
Nobel de médecine « pour sa découverte de la valeur thérapeutique de la leucotomie
dans certaines psychoses ».
 La leucotomie d’Egas Moniz est à l’origine d’une technique de psychochirurgie plus
radicale, mise au point par le neurologue américain Walter J. Freeman. En 1946, Freeman
met au point un mode opératoire plus facile à mettre en œuvre, et plus rapide : la
lobotomie transorbitaire frontale. Radicale et imprécise, cette méthode consiste à
introduire au-dessus de chaque œil, entre le globe oculaire et la paupière, un leucotome
(surnommé « pic à glace » en raison de sa forme) pour pénétrer dans les lobes frontaux.
La théorie sous-tendant cette méthode est que les maladies mentales sont dues à une
suractivité émotionnelle et peuvent donc être guéries par la destruction des centres
cérébraux impliqués, ne laissant intact que le cerveau « rationnel ».
 Nombreuses et diverses sont les indications qui conduisent à ces lobotomies : maladies
psychotiques, anxiété paroxystique chronique, agitation et insomnie, névrose
obsessionnelle, mélancolie (au sens psychiatrique du terme), mais aussi comportements
sociaux réprouvés (violence, agressivité, etc.), dépression postnatale, etc.
 La lobotomie est ainsi pratiquée de façon massive dans les années 1940 et jusqu’au
début des années 1950. Elle connaît un développement très important non seulement
aux États-Unis (entre 1936 et la fin des années 1950, on estime qu’entre 40 000 et
50 000 lobotomies ont été pratiquées aux États-Unis), mais aussi au Canada, ainsi qu’en
Europe, bien que, sur ce continent, l’adhésion à la lobotomie soit moins enthousiaste.
 Les effets secondaires de la lobotomie présentent des variations importantes selon les
patients, les interventions étant pratiquées « à l’aveugle », et les centres préfrontaux
détruits variant donc selon les patients. La plupart montrent une perte totale de leur
personnalité, de leur autonomie et de leurs acquis sociaux et intellectuels. Beaucoup
présentent une apathie permanente ou une euphorie puérile, et il est nécessaire de leur
réapprendre tous les gestes élémentaires du quotidien, comme manger ou se laver.
 C’est l’arrivée sur le marché, en 1952, du premier neuroleptique, puis, à partir de 1957,
des premiers antidépresseurs, qui signe l’abandon progressif de la lobotomie.
 Cette opération irréversible et mutilante est désormais interdite dans de nombreux pays,
dont la France. Parallèlement, des interventions détruisant des portions de tissu cérébral
plus restreintes et précises, ont été développées : ces techniques constituent la
neurochirurgie fonctionnelle. Cette dernière, proposée pour certaines pathologies
mentales sévères résistant à toute thérapeutique chimique et comportementale (certains
cas de troubles obsessionnels compulsifs [TOC] majeurs par exemple), n’est toutefois
mise en œuvre qu’en dernier recours.
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L a folie en citations
« C'est bien la pire folie que de vouloir être sage dans un monde de fous. »
Didier Erasme
« Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'on croit. »
François de La Rochefoucauld
« Il n'y a point de génie sans un grain de folie. »
Aristote
« Penser contre son temps c'est de l'héroïsme. Mais le dire, c'est de la folie. »
Eugène Ionesco
« Les folies sont les seules choses qu'on ne regrette jamais. »
Oscar Wilde
« La folie est quelque chose de rare chez l'individu ; elle est la règle pour les groupes, les
partis, les peuples, les époques. »
Friedrich Nietzsche
« Le champ de bataille ne fait que révéler à l'homme sa folie et son désespoir, et la victoire
n'est jamais que l'illusion des philosophes et des sots. »
William Faulkner
« La folie est souvent la logique d'un esprit juste que l'on opprime. »
Oliver Wendell Holmes
« Un peu de folie est nécessaire pour faire un pas de plus. »
Paulo Coelho
« Nous sommes tous obligés, pour rendre la réalité supportable, d'entretenir en nous
quelques petites folies. »
Marcel Proust
« Folie : désertion à l'intérieur. »
Pierre Véron (écrivain français 1831 -1900)
« Le monde appelle fous ceux qui ne sont pas fous de la folie commune. »
Madame Roland (Ministre de l’intérieur française 1754-1793)
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Quelques thèmes de réflexion autour de la pièce
 Qu’est-ce qui, dans le comportement ou les propos de Mc Murphy, peut laisser
penser qu’il est fou ?
 Qu’est-ce qui, dans le comportement des autres patients, dénotent qu’ils souffrent
d’une maladie mentale ?
 Pourquoi la plupart des patients sont-ils volontaires pour être internés ?
 Quels qualificatifs correspondent selon vous à l’infirmière Ratched, et pourquoi ?
 Le pouvoir qu’elle exerce vous semble-t-il justifié ?
 Comment imaginez-vous le brouillard dont parle Chef Bromden lorsqu’il est seul ?
 Décrivez la relation entre Chef Bromden et Mc Murphy.
 Comment Mc Murphy évolue-t-il au cours de la pièce ?
 Qu’est-ce que l’Organisation dont parle Bromden ? Que fait-elle ?
 Si l’on imagine que le service hospitalier dans la pièce est à l’image de la société en
dehors de l’asile, comment peut-on interpréter les paroles de Chef Bromden lorsqu’il
parle de l’Organisation qui dirige le service et le monde ?
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