Ça c`est vraiment toi

Transcription

Ça c`est vraiment toi
LA LUCARNE
Ça c’est vraiment toi !
Un téléfilm de Claire Simon
Avec les élèves du Théâtre National de Strasbourg
00.25
Mercredi 3 Janvier 2001
Contact presse : Grégoire Mauban / Priscilla Bertin - 01 55 00 70 46 / 70 48
[email protected]
LA COLLECTION GENERATION T.N.S.
Conçue pour les élèves-comédiens de l’Ecole Supérieure
d’art dramatique du Théâtre National de Strasbourg, cette
collection, initiée en 1995 par Jean-Louis Martinelli
(directeur du T.N.S.), bouleverse les schémas traditionnels
de réalisation. Chaque réalisateur imagine ici un scénario
original, à partir de sa rencontre avec les élèves-acteurs,
utilise des éléments de leur vie, de leur travail, etc. Parti
pris de la réalité pour Pascale Ferran, intrigue dramatique
pour Cédric Kahn, large place à l’improvisation sur le
thème de la naissance même d’une fiction pour Nicolas
Philibert et histoire d’amour à deux personnages et onze
acteurs pour Claire Simon qui clôt ainsi cette collection.
Les téléfilms de la collection :
L’âge des possibles de Pascale Ferran
diffusé le 3 mai 1996
Culpabilité zéro de Cédric Kahn
diffusé le 16 décembre 1997
Qui sait ? de Nicolas Philibert
diffusé le 26 mai 1999
Ca c’est vraiment toi de Claire Simon
diffusé le 3 Janvier 2001
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Dans la cacophonie du Parlement européen, Antoine et Cléo vont-ils
réussir à s’aimer à nouveau ? Claire Simon (Coûte que coûte) réalise
la quatrième fiction de la collection “Génération TNS” avec les
jeunes comédiens de l’École du Théâtre national de Strasbourg.
Antoine vient de terminer ses études de sciences politiques à Paris et cherche du
travail. Il décide de se rendre à Strasbourg avec l’espoir de devenir assistant au
Parlement Européen. En fait, Antoine veut surtout retrouver Cléo, qui travaille à
Strasbourg comme monteuse pour la télévision.
Les choses ne vont pourtant pas s’avérer si simples car Cléo a très mal vécu leur
séparation. Furieuse, elle cherche à l’éviter et les députés pensent plus à la guerre du
Kosovo qui fait rage et aux élections européennes qui s’annoncent, qu’à se trouver un
nouvel assistant.
Pendant cette semaine de session parlementaire, Antoine découvre le théâtre de la
démocratie et de l’amour, il mesure les angoisses de l’engagement qu’il soit politique
ou amoureux.
Dans l’Âge des possibles, Pascale Ferran avait multiplié les rôles ; Claire Simon, au
contraire, imagine un dispositif audacieux : les deux personnages principaux sont
incarnés successivement par des comédiens différents ! Six garçons jouent Antoine et
cinq filles Cléo, parfois au cours de la même scène. En gardant les mêmes vêtements,
et, surtout, les mêmes soucis. Car il n’y a bien qu’un seul Antoine, et qu’une seule Cléo,
dont les tourments amoureux font la trame de la fiction.
La multiplicité des comédiens renvoie ainsi à un jeu de miroir des sentiments
amoureux. Mieux encore, le Parlement européen n’est pas qu’une toile de fond : son
fonctionnement, ses intrigues, ses querelles font aussi écho à cette question de
l’identité.
En faisant intervenir les députés dans leurs propres rôles (Aline Pailler, Daniel CohnBendit, Catherine Lalumière…), Claire Simon inscrit son histoire dans les débats les plus
aigus du moment : fédéralisme, nationalisme, guerre du Kosovo, question kurde,
homosexualité… Bref : peut-on rester le même en devenant un autre ?
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LISTE ARTISTIQUE
Alexandre Zloto ................................ Antoine
Ismaël Ruggiero................................ Antoine
Sébastien Bravard............................ Antoine
Olivier Constant ................................ Antoine
Thomas Nedelkovitch ..................... Antoine
Yann Policar ....................................... Antoine
Stéphanie Pasquet ........................... Cléo
Sophie Rodrigues ............................. Cléo
Marie-Eléonore Pourtois................. Cléo
Claire Delaporte ................................ Cléo
Marika Peyronne ............................... Cléo
Jean-Henri Roger.............................. le journaliste
Manon Garcia..................................... Annette
Aline Pailler ........................................ Aline P.
Claude Michel .................................... Claude l’assistant parlementaire
Pierre Berriau .................................... le plombier
Michel Toesca.................................... homme St Odile
Sylvie Milhaud ................................... femme St Odile
Jeanne Bosson .................................. enfant St Odile
Et les députés européens : Catherine Lalumière, Nicole Fontaine, Luciana
Castellina, Brian Crolew, Jean-Louis Bourlanges, Daniel Cohn-Bendit,
Marie-Noëlle Linemann.
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LISTE TECHNIQUE
Réalisation.............................................. Claire Simon
Scénario.................................................. Jean-François Goyet, Claire Simon
Image...................................................... Katell Djian
Son.......................................................... Olivier Schwob
Création des costumes.......................... Monic Parell
Musique.................................................. Jésus “Chocho” Valdès
Montage.................................................. Catherine Quesemand
Mixage.................................................... Jean-Pierre Laforce
Producteur délégué................................ Gilles Sandoz / AGAT FILMS & Cie
Unité de programmes Fictions
ARTE France.........................................
Pierre Chevalier
Une coproduction................................... ARTE France, AGAT FILMS & Cie
(France - 1999 - 1h56)
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LA REALISATRICE
Claire Simon
Elle écrit et réalise des documentaires et des films de fictions depuis une dizaine d’années
et a également écrit et mis en scène une pièce de théâtre Objet d’amour en 1998.
Elle est, entre autres, auteur et réalisatrice des documentaires : Récréations (1992) diffusé
sur ARTE et sorti en salles en octobre 1994, Coûte que coûte en 1994/1995, également
diffusé sur ARTE et sorti en salles, Grand prix du documentaire au festival de Potsdam
1995, Prix Louis Marcorelles au festival du réel 1995, Prix de l’ONF au festival de Montréal
1995…
Elle réalise son premier long métrage pour le cinéma en 1997, Sinon, oui, avec Catherine
Mendez, Emmanuel Clarke, Lou Castel…et obtient le Grand prix du scénario de la SACD.
ENTRETIEN AVEC CLAIRE SIMON
Votre film est un oiseau un peu bizarre : à la fois fiction et documentaire, avec
deux héros joués par onze acteurs. Qu’est-ce qui vous a guidée dans sa
réalisation ?
J’ai voulu faire un film du paradoxe et du pari. Le pari, c’était de mêler les genres en tournant
au Parlement européen de Strasbourg avec une partie documentaire, des scènes improvisées
avec de vrais députés, notamment Daniel Cohn-Bendit, les débats, les votes, l’ambiance des
couloirs et des bureaux. Et une partie fiction qui met en scène l’histoire sentimentale de deux
jeunes gens. Pourquoi ? Il y a une chose que je trouve toujours assez déprimante au cinéma,
c’est que les personnages n’y vivent qu’une partie de leur vie. Ils sont par exemple soit
amoureux, soit ambitieux : ils n’ont pas le droit à l’ambivalence, ils ne sont jamais le théâtre de
plusieurs passions. C’est pourtant comme ça que ça se passe dans la réalité. J’ai donc choisi
d’illustrer le double parcours, professionnel – ou politique – et amoureux d’un diplômé de
Sciences-Po, Antoine.
Et le paradoxe ?
C’était de faire jouer le même personnage par plusieurs acteurs. Et ce dans une histoire d’amour
où l’être qu’on aime, l’être qui aime, est unique et irremplacable. Voir si c’est possible de faire
exister quelqu’un à travers de multiples visages. Explorer l’idée que l’on peut être un et plusieurs
à la fois. ARTE m’avait imposé la contrainte de tourner à Strasbourg, avec les comédiens du
TNS. J’ai pensé que c’était l’occasion de mener une expérience inédite, et d’essayer de leur
faire incarner les différentes façettes des deux héros, Antoine et Cléo, sa petite amie. Buñuel
avait ouvert la voie, dans Un obscur objet du désir, ou la femme était jouée par deux actrices,
j’ai eu envie de voir si ça pouvait marcher autant pour le masculin que pour le féminin.
Cette versatilité des personnages jette une lumière nouvelle sur le rapport
amoureux. Ça, c’est vraiment toi est-il un film d’amour ?
C’est un film sur la chamaillerie amoureuse. Une histoire de retrouvailles. Antoine et Cléo se sont
connus à Sciences Po. Elle l’aime. Il la quitte en lui piquant de l’argent. Deux ans plus tard, ils
se revoient par hasard à Strasbourg. Que vont-ils faire ? Vont-ils pouvoir “se retrouver” ?
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Mais se sont-ils jamais “trouvés “ ? Ils se présentent sans cesse l’un à l’autre avec un visage
nouveau, ils se découvrent toujours différents. C’est un jeu de séduction : vouloir changer
d’image pour attiser le désir, ne pas rester captif d’un regard. C’est aussi un jeu d’esquive. Je
n’ai pas voulu montrer le changement comme une chose abstraite, mais comme une émotion
physique. C’est au contact l’un de l’autre, dans le dialogue, dans l’attirance et la répulsion, que
les deux personnages se renouvellent. Le fait de changer d’acteur, et pas seulement de jeu
d’acteur, permet de traduire, sans médiation, sans métaphore, cette mouvance des sentiments.
En fait, la question que pose votre film c’est : qui aime-t-on quand on croit
aimer ?
L’objet aimé est unique et multiple à la fois, là est tout le paradoxe de l’amour. Comment aimer
quelqu’un qui change ? Aime-t-on toujours la même personne ? Quand on trahit, n’est-ce pas
le même autre que l’on poursuit à travers des visages différents ? Et finalement, est-ce l’autre
qu’on aime ou, simplement, le fait d’aimer ? Si Antoine veut Cléo, Cléo veut son amour. Elle veut
un serment, elle veut des mots qui font peur à Antoine. Car même si ce ne sont que des mots
il a peur de rester ensuite prisonnier de sa parole. Là aussi est tout le prix - et le sens - de
l’engagement.
Le film parle de la difficulté de l’engagement amoureux, mais aussi de celle de
l’engagement politique.
Face à l’Europe, c’est la même chose. On a peur de s’engager, on a peur de perdre notre
identité. Mais, en politique aussi, ne peut-on être un et plusieurs à la fois ? Le Parlement
européen, c’est quinze pays et onze langues. C’est une tentative unique dans l’histoire de créer
une communauté où les pays ne sont pas représentés en tant que pays, nationalisme et petit
drapeau en avant, mais de façon transversale à travers des groupes politiques. Plutôt que de
se monter la tête sur ce que l’on pourrait perdre, on ferait bien de penser à ce qu’il faut qu’on
gagne. Quinze pays qui parlent ensemble ont toutes les chances de devenir plus intelligents.
Pourtant, le Parlement européen a plutôt mauvaise presse...
En effet. En France, les journalistes se complaisent à donner une vision anecdotique du
Parlement Européen, ils sont un peu perdus parce qu’on y trouve peu de stars de la politique et
la chronique des ambitions personnelles y est plus difficile à faire que sur la scène nationale.
Mais ici en France, on ne sait toujours pas à quoi ça sert et ce qu’on y fait.Les journalistes n’ont
sans doute pas la possibilité de nous montrer la politique en train de se faire. Quand on suit le
JT, on a l’impression de regarder les bandes-annonces de films qu’on ne verra jamais. En
tournant au Parlement Européen j’ai découvert et essayé de transmettre une autre vision du
travail politique. J’étais impressionnée par les débats, plus surprenants qu’en France parce que
menés par des gens de pays différents dont les positions ne nous sont pas connues d’avance,
impressionnée aussi par cette énorme machine démocratique qui fabrique les lois communes
de l’Europe, un peu comme si on reprenait tout à zéro. Et c’est justement sur ces lois qu’on ne
nous dit pas grand chose alors qu’on s’occupe beaucoup de savoir combien gagnent les
députés. Bien plus présents et surveillés que ceux de l’Assemblée Nationale soit dit en passant.
Ce qui est très grave et très dangereux c’est que les citoyens soient absents de ce Parlement
et qu’ils n’en comprennent pas les enjeux politiques. Pourtant, c’est un projet qui nous importe
depuis longtemps : la naissance d’une démocratie véritablement transversale, la réalisation
d’une utopie dont les philosophes rêvent depuis le Moyen Âge.
Propos recueillis par Emmanuelle Paroissien
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