Texte de l`hommage à Anne Marie Barat

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Texte de l`hommage à Anne Marie Barat
Concert à la mémoire d’Anne Marie Barat – Eglise St Louis de Fontainebleau le 29/11/2015
Chers amis,
C’est avec un pincement au cœur que nous sommes aujourd’hui réunis pour
célébrer la mémoire de cette brillante musicienne qu’était Anne-Marie Barat.
Voici déjà 25 ans (très exactement le 20 décembre 1990), cette bellifontaine de
naissance nous quittait brutalement à l’âge de 42 ans. Elle est partie comme elle
a vécu, toujours active et spontanée mais aussi prête à rendre service. Après
avoir donné ses cours à l’Ecole de musique de Fontainebleau elle rentrait chez
elle, espérant pouvoir se reposer au cours de ces vacances de Noël. S’élançant
vers un automobiliste en difficulté sur la route de Nemours pour lui porter
assistance, elle fut frappée de plein fouet par une voiture venant en sens
inverse !
Tous ceux qui l’ont connue se rappellent de cette petite femme brune,
dynamique au rire si caractéristique, se cachant derrière ses épaisses lunettes
fumées et descendant de sa voiture qu’elle conduisait comme un pilote de
course, passion qu’elle aimait faire partager à ses élèves. Aimant la vitesse, sa
voiture était son second domicile où trainait toujours un paquet de gâteau car sa
vie trépidante, ne lui permettait pas toujours de prendre le temps de s’assoir à
une table même si elle appréciait les bons petits plats. Elle aimait aussi se
ressourcer lors de séjours dans la presqu’île de Crozon où son plaisir était de
contempler la mer face au vent du large.
Mais Anne-Marie Barat vivait avant tout pour l’amour de la musique qu’elle a
cultivé si patiemment, si fidèlement, si obstinément tout au long de son enfance,
de son adolescence, de sa jeune vie d’adulte. Elle confiait : « La musique, c’est
ma vie, j’y ai tout consacré, c’est beaucoup mieux qu’un langage puisque c’est
universel ! C’est beaucoup plus impalpable que la peinture ou la sculpture,
puisque fugitif. Malgré les disques, les casettes, les magnétophones, rien ne
remplacera l’atmosphère d’un concert ». Cette passion de la musique l’a
conduite à quitter l’école Jeanne d’Arc de Fontainebleau où elle suivait sa
scolarité. A l’âge de 11 ans, elle intégrait le Conservatoire National Supérieur de
Paris et à accumuler les plus hauts diplômes et distinctions. Elle fut la dernière
élève d’André Marchal. Sa passion pour l’orgue n’a fait que croître, c’était pour
elle une véritable vocation qui l’attirait à quelque chose qui ressemblait à un
vœu de religion. Elle avait aussi bien compris son rôle d’organiste au sein de la
communauté paroissiale et l’impact de l’orgue pour accompagner la prière au
cours des offices. Elle souffrait parfois que la liturgie d’aujourd’hui ne lui
permettait pas de retrouver l’essence qu’elle rencontrait dans le chant grégorien
mais elle acceptait de servir cette liturgie car elle savait que la messe et les
offices n’étaient pas des laboratoires de l’art mais de la prière et voulait aider la
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communauté à prier. Tous ceux qui l’ont approchée étaient toujours
impressionnés par cette foi qui l’animait et sa volonté de servir. Ne disait-elle
pas dans la Revue de l’orgue : « Le vœu que je formulerai est que chacun ait
l’esprit plus large et plus ouvert, dans l’amour de la musique, de l’orgue en
particulier, dont la fonction est de porter à la prière et la recherche constante
du Beau ».
Cette passion, elle la transmettait à ses élèves pour lesquels elle donnait le
meilleur d’elle-même avec compétence et ardeur. Sa joie était de partager avec
ses élèves son amour de l’orgue qui, pour elle, était le roi des instruments. Tous
ses élèves étaient sa famille tant ceux de Fontainebleau que ceux de Marly-leRoi ; elle parlait d’eux avec affection et s’inquiétait parfois pour leur avenir
musical et leur vie future. Son plaisir était de leur faire découvrir de nouveaux
instruments. Sur son rôle d’enseignante, elle le définissait ainsi : « Le professeur
se doit d’être rigoureux mais disponible, d’intéresser les élèves à tout ce qui
concerne notre instrument. Le contact humain aussi bien que la rigueur sont
indispensables. Enfin l’enseignement force à aller plus loin dans la recherche de
son art pour pouvoir la transmettre à un élève ». L’orgue instrument
volumineux et complexe émoustillait sa curiosité et elle n’hésitait pas à entrer
dans ses entrailles même pendant les offices à Fontainebleau lorsque ce dernier
donnait parfois des signes de faiblesse.
Elle travailla avec ardeur pour doter Fontainebleau d’un orgue permettant de
jouer tous les répertoires. Elle y dépensait une énergie folle. Elle avait tout fait
pour lancer les travaux, collaborer à la préparation du dossier d’appel d’offres
sans rien laisser au hasard. Malheureusement, elle n’était plus là lorsque les
travaux ont commencé et que le nouvel orgue a sonné pour la première fois ;
sans doute eut elle été heureuse de voir le résultat de ses efforts.
Comme le disait le Père Duhamel dans son homélie le jour de ses funérailles :
«J’ai beaucoup admiré que cette grande artiste aux mains fines savait
s’enfoncer dans les entrailles de notre orgue pour le réaccorder, remettre des
tuyaux en place, décoincer les commandes ; elle en ressortait pleine de
poussière avec un sourire satisfait. L’orgue est de tous les instruments le plus
volumineux, le plus complexe, le plus délicat, et Anne-Marie avait le sens de son
instrument, et de tous ces gros instruments en général, comme un ouvrier a soin
de ses outils. Son âme d’artiste savait s’incarner dans le corps de ses orgues, et
ensuite, il était saisissant de voir son engagement physique et moral total dans
son exécution des pièces les plus difficiles, et parfois sur les instruments les plus
prestigieux, tel l’orgue de Notre-Dame de Paris où elle nous avait invités un
jour pour l’audition d’une symphonie de César Franck. Sa passion parfois
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dérangeante pour obtenir un orgue complet à Saint-Louis de Fontainebleau
s’inscrit dans cette conviction qui était la sienne qu’une belle musique d’orgue
s’achète au prix d’instruments de qualité bien construits et bien entretenus. »
Aujourd’hui ses amis musiciens sont réunis pour lui rendre un vibrant hommage.
En tribune Éric Lebrun qui fut un de ses élèves et dont la carrière serait,
aujourd’hui pour elle, une fierté et Myriam Tannhof qui lui a succédé mais dont
elle avait déjà repéré le talent musical. Ils seront accompagnés par Serge Garcia
au violon, collègue et ami d’Anne-Marie à l’école de musique de Fontainebleau,
Bénédicte Rostaing (harpe) et Laure Lemonnier (violoncelle).
Anne-Marie nous ne t’oublions pas et cet orgue que tu as tant désiré chante
aujourd’hui pour toi !
Maryvonne
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