CAMELIA JORDANA. C`est un feeling pop

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CAMELIA JORDANA. C`est un feeling pop
CAMELIA JORDANA.
C’est un feeling pop déstabilisant qui vous saisit le corps, l’esprit et vous laisse avec des
images de paradis perdus mélodiques. C’est la certitude d’être tombé (de haut) sur une voix
singulière, mais aussi sur le meilleur écrin à chansons pour que cette voix reste en totale
liberté. « Si j’écoute de la musique c’est pour une voix, un texte, ou une mélodie qui
fonctionnent tous ensemble »
Camelia Jordana a aujourd’hui 17 ans. Elle n’a rien d’une créature étrange. Sensible,
spontanée, curieuse de tout, déstabilisée par les premiers chagrins d’amour qui viennent
(presque) toujours au mois d’août. Pourtant son premier album est impossible à dater. Il
affiche une sacrée conscience du passé, mais aussi un vrai devoir de modernité. Il joue avec la
pop architecturée, le lyrisme, les tragédies intimes, la profondeur de champs mélodique, le
folk pour les cowgirls qui ont le blues sur la route.
Revient en mémoire la découverte de Camélia-Jordana. Un choc pour ceux qui regardent la
musique à la télé avec un reste de dédain un peu hors de propos. Février 2009. Les auditions
filmées à Marseille pour l’émission musicale phare de M6, « Nouvelle Star ». Une jeune fille
portant d’épaisses lunettes de vue Ray Bans s’avance face au jury. Elle a 16 ans. Avant elle
chantait devant sa glace dans des imitations de Britney Spears « Depuis que je suis toute
petite, je rêve d’une carrière dans la chanson. C’était un fantasme. Maintenant je me dis que
c’est la vie idéale. Je pourrais passer toute mon existence entre le studio et la scène. Je me
sens enfin épanouie ! » On lui trouve une dégaine à la « Ugly Betty ». A cappella la révélation
paraît évidente. Quand Camélia chante le standard « What a wonderful world » de Louis
Armstrong, un frisson parcourt le jury de l’émission et aussi le téléspectateur. On entend dire
à propos de Camelia Jordana : « Mademoiselle, vous pourriez devenir notre petite Amy
Winehouse ! » (André Manoukian). De février jusqu’à juin et son élimination en demi-finale
du programme qui a, les années précédentes, révélé Julien Doré, Amandine Bourgeois et
Christophe Willem, Camelia Jordana promène sa voix étrange et un peu cassée sur des
reprises de Carla Bruni, Blondie, Britney Spears, Rolling Stones, Louise Attaque. Toujours
avec le même mélange de naturel et d’émotion à vif plutôt soufflante venant d’une si jeune
personne. En plus des habitués du programme, la presse culturelle dans un élan d’unanimisme
(Libération, Télérama, VoxPop) plébiscite Camélia Jordana. On parle à son propos de
mélange vocal « entre Barbara et Cat Power ». Le milieu de la chanson française se met au
diapason de l’intérêt. Elle ne gagnera pas l’émission, mais rien de dramatique : « Avant que je
sois éliminée j’avais la certitude qu’on allait me donner la chance de faire un album. J’étais
extrêmement excitée de tenter cette aventure ! »
Camelia Jordana est née en 1992. Elle a passé son enfance et adolescence dans le Var (La
Londe-Les Maures, une ville située à quelques kilomètres de Hyères). Elle est, comme le
diraient certains sociologues de comptoir, une enfant de notre siècle 2.0 : présence sur internet
et ses réseaux sociaux, blogs, participation à une émission de radio crochet à la télé,
découverte de la pop en mode lecture aléatoire sur l’iPod. Elle touche un peu aux cours de
théâtre. Elle se passionne pour le cinéma doux-amer de Christophe Honoré (« Dans Paris »,
« Les chansons d’amour »). Elle rêve à une vie dans une grande ville. Lily Allen, Herman
Düne, Coco Rosie, Kate Nash (« Mes quatre piliers principaux»), Emily-Jane White, Britney
Spears et Rihanna font partie de ses jalons pop. « Mes références générationnelles ça reste le
deuxième album de Lily Allen, « It’s not me, it’s you », et le premier disque de Kate Nash.
Leurs voix à toutes les deux, ça devient un instrument. Elles ont l’air de s’amuser en
chantant. Je suis sensible à ça. Le côté spontané de la musique. Le truc qui fait que tout à
l’air facile et naturel ! » Et la jeune femme d’ajouter : « Sur mon disque, je ne voulais surtout
pas faire la Lily Allen française. À 17 ans, cela aurait été limité. Alors je me suis mise à
chercher des textes. Des choses qu’on aurait pu m’écrire avec les mots desquels je me
sentirais à l’aise ! C’est très important pour moi de pouvoir m’approprier les mots et de m’en
faire un costume !»
En amont de l’enregistrement du premier album, des rencontres ont lieu entre la jeune
chanteuse et ceux qui pourront lui fournir textes et mélodies. Certains noms vont vite
s’imposer. Surprise, c’est un casting d’auteurs compositeurs plus à l’aise dans les registres de
la chanson sophistiquée plutôt que ceux de la variété toute prête à être consommée. Babx,
Mathieu Boogaerts, Doriand, Jean Felzine (leader de Mustang), Abel K1, la probable
révélation L. Même Camélia-Jordana y va de sa première chanson (texte et musique) avec le
charmant et Lily Allenien « Little Monster ». Tous vont travailler au studio Pigalle à Paris
sous la direction de Séverin et de Babx. L’enregistrement dure trois mois. Une grande partie
du mixage final de l’album est confié à Stéphane « Alf » Briat, un des grands artisans du son
labélisé french touch (Phoenix, Air, Arnaud Fleurent-Didier), l’autre à Jérôme Poulain (Studio
Pigalle, équipier de Babx). Camélia fait maintenant partie d’une équipe à la même sensibilité
pop avec tous ceux qui ont participé à son disque.
Camelia Jordana n’a pas connu en direct le cinéma de la nouvelle vague des Truffaut et
Godard. Pourtant, c’est la même urgence dans les sentiments, la même jeunesse lancée aux
trousses de l’amour en fuite que l’on entend sur des titres comme « La vie en solitaire » et
« Les mois d’août à Paris ». Elle n’a pas vu Barbara chanter « L’Aigle Noir » au théâtre de
Passy. Néanmoins, il plane un parfum de tragédie habillée en robe du soir sur
l’impressionnant piano voix en forme d’introspection post télé crochet qu’on entend sur le
bloc de fragilité, « Lettera » (reprise poignante d’une chanson originale de Babx): « Mon
amour tu me manques, j’ai comme envie de chialer (…) Ici pas une planque pour s’asseoir et
pour pleurer. En travelling au zapping, je serais pas belle à regarder ». Et puis il y a quelque
chose d’encore plus sensuel qui flirte en périphérie de ces 13 titres. Quelque chose qu’on
n’attend pas forcément d’une jeune fille pas encore majeure. Un fantôme. Camelia Jordana est
arrivée au monde un an après l’album « Osez Joséphine » d’Alain Bashung. Et voilà qu’à
travers « Calamity Jane » et « Tombée de haut » repassent les caravanes, les road movie folk,
l’Amérique vue du bord de la route dans un désert, les mademoiselle qui rêvent élégamment à
des « nuits blanches en satin ».
Il y a tout ça sur son premier album. Tout ça, mais adapté à l’époque, chanté avec la voix de
quelqu’un qui a développé une sensibilité à fleur de peau et une intelligence instinctive de
l’interprétation. « C’est une amie du lycée qui m’a envoyé un SMS pour me dire que mon
premier single était programmé à la radio. Je suis désolée, mais là j’ai fondu en larmes toute
seule. C’était mon rêve d’entendre ma voix dans le poste ! » À 17 ans, Camelia-Jordana
comprend qu’elle n’en est qu’au début de quelque chose qui pourrait bien s’inscrire sur le
long terme : « Je suis maintenant consciente de ce que l’on me disait avant, quand on me
parlait de ces personnes qui ont la chance d’avoir un métier qui leur correspond. J’ai enfin
trouvé ma place ! »