DominiqueA_Nouvelliste_18052015

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DominiqueA_Nouvelliste_18052015
“LUNDI 18 MAI 2015 ““
19
dc - jh
MUSIQUE
DOMINIQUE A Joli retour du Français, avec «Eléor», son onzième album studio, tout en dépouillement,
qui évoque souvent les voyages. Le chanteur établi à Bruxelles dit avoir besoin de grands espaces.
«Je ne pars plus au front comme avant»
ENTRETIEN
JOËL JENZER
Trois ans après le succès de
«Vers les lueurs», Dominique A
présente ce printemps son onzième album studio. Fidèle à son
habitude d’explorer différents
créneaux, sur «Eléor», l’auteur,
compositeur et chanteur français
installé à Bruxelles revient à un
style plus calme et minimaliste
que sur son disque précédent. Il
livre douze titres, pour la plupart
courts, qui évoquent souvent le
voyage et les élans du cœur. Des
chansons qu’il défendra sur scène
– notamment au Crochetan en
novembre – avec une formation
réduite, histoire de rester dans le
dépouillement qui fait la richesse
de ce disque plus abordable pour
le grand public que certains de
ses anciens albums.
Votre album fait référence à
divers lieux. Evoque-t-il des
voyages que vous avez faits?
Globalement, c’est rattaché à
des expériences vécues, à des
souvenirs. Après, la chanson titre, «Eléor», ça, c’est de la divagation totale autour du mot, plus
qu’autour du lieu. Mais chaque
chanson qui évoque un lieu est
rattachée au moins à une expérience liée à ce lieu, une expérience de vie ou touristique
même. J’ai besoin d’avoir traîné
mes guêtres dans un endroit
pour l’évoquer.
Vous semblez avoir besoin
d’espace, comme lorsque
vous évoquez «L’océan». Estce quelque chose qui est lié à
la création?
Oui, et c’est quelque chose qui
est lié aussi à mon équilibre mental, qui est lié à Bruxelles, qui est
une ville assez fermée, un peu en
cuvette. Je pense que si j’ai autant
évoqué les grands espaces, c’est
que, ces dernières années, j’ai vécu dans un espace très étriqué. A
la fin, cela devient un réflexe de
survie. Quand je voyage, je me
tourne vers des lieux à l’opposé
de ça, des lieux qui ne sont globalement pas urbains et où il y
a une vraie idée d’horizontalité,
d’horizon, tout simplement, de
dégagement du ciel, du paysage.
C’est aussi rattaché à l’enfance:
d’une certaine façon, c’est une
idéalisation des paysages de l’enfance, qui étaient très ouverts
aussi, comme une plaine. Mais
ces paysages étaient aussi comme
une prison, parce qu’il y avait
la plaine, mais rien d’autre.
Aujourd’hui, l’horizon évoque
tout autre chose pour moi, c’est
chargé de positif, c’est synonyme
d’ouverture, tout simplement.
Dans ce disque, les chansons
sont courtes, tout est épuré.
Une simplicité que vous retranscrivez aussi en tournée…
On est quatre sur scène, donc
c’est assez restreint. C’est un peu
le lot de beaucoup de gens aujourd’hui, pour des raisons économiques, mais, au-delà de ça,
c’est vrai qu’il n’était pas conce-
Dominique A propose douze chansons, tout en nuances. Des titres à découvrir en concert au Théâtre du Crochetan au mois de novembre. RICHARD DUMAS
vable, pour moi, de revenir sur
scène avec une formation plus
lourde. J’avais envie de rester
dans les eaux – c’est le cas de le
dire – du disque, avec les musiciens de base, qui ont collaboré
au projet… L’intérêt de la scène,
au-delà du fait de rejouer les
chansons que les gens ont envie
d’écouter, c’est le plaisir de taper
dans le vieux stock (rires.)
nieur du son, où on fait vraiment
un travail sur la matière sonore.
Ce sont des moments où j’ai l’impression que je suis à ma place,
véritablement. Après, je ne dirais
pas que sur scène je ne me sens
pas à ma place, mais c’est une
chose à laquelle j’accorde moins
de crédit. Pour moi, c’est plus important de réussir une chanson
que de réussir un concert. Je n’en
Pour moi, c’est plus important
«de réussir
z
une chanson que de
réussir un concert.»
DOMINIQUE A CHANTEUR, AUTEUR, COMPOSITEUR
Vous dites quand même préférer créer en studio que vous
produire sur scène…
Oui, c’est la conception, la naissance d’une chanson qui me plaît
le plus souvent. A la fois le stade
de l’écriture, au moment où la
chanson est écrite dans sa forme
initiale la plus basique, et le moment où elle prend forme en studio avec les musiciens ou l’ingé-
mène pas large quand je foire un
concert, mais je dirais qu’une
chanson ratée, elle est ratée pour
toujours, tandis qu’un concert raté est balayé par celui d’après.
Mais un concert, c’est juste l’instant présent, et moi j’aime ce qui
reste.
Miossec a collaboré avec
Johnny Hallyday. Vous avez
travaillé avec Calogero. Ce
sont des chanteurs éloignés
de vos univers. L’avez-vous
fait par réel intérêt artistique?
C’est l’occasion d’aller sur des
terrains qui m’étaient étrangers
avant de le faire. On est dans une
chanson plus populaire, on
s’adresse à plus de gens, en le sachant. Mais je n’ai pas l’impression de baisser complètement
ma garde. Le dernier texte que
j’ai écrit pour Calogero, je le lui ai
envoyé parce que je me disais
que ça pouvait peut-être lui
plaire et l’amuser, et il en a fait
une chanson. Sur ses albums
précédents, c’était une demande
plus précise, sur des thèmes. Je
trouve que c’est un type qui a de
la valeur, qui écrit de belles mélodies, qui est un bon chanteur.
Alors, dans une certaine mesure, on est loin de mes débuts,
où je disais que je ne travaillerais
jamais avec ce genre de personnes, mais je suis aujourd’hui plus
ouvert musicalement.
Vous êtes sur le devant de la
scène depuis 25 ans. Pensezvous que le fait d’être plus
mûr aujourd’hui a un impact
sur votre manière d’écrire des
chansons?
Oui, tout à fait. Mais pour moi,
les chansons d’aujourd’hui ne
sont pas meilleures que celles
d’hier. Je pense que mes dernières
chansons sont dans une continuité. Par contre, la façon de les présenter, de les défendre – je n’aime
pas beaucoup ce mot – ça a changé: je suis beaucoup plus souple, je
suis moins à cran, je ne pars plus
au front comme avant, quand j’y
allais avec la rage au cœur, même
quand les chansons étaient douces, avec cette volonté de ne pas
me fourvoyer. A partir du moment où les chansons sont ce
qu’elles sont et qu’on est ce qu’on
est face aux médias, il n’y a pas
de raison de se fourvoyer. Il faut
juste apprendre à se comporter et
à être soi. }
+
INFO
«Eléor», Cinq7/Wagram.
m.
En concert le samedi 300 mai à la Fête
de l’espoir à Genève et au Théâtre
du Crochetan à Monthey, le vendredi
20 novembre. www.crochetan.ch
+
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«O sacrum convivium! Œuvres
chorales sacrées françaises»,
Chandos 10842