Lire la déclaration intégrale du Maire d`Istres en séance du Conseil

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Conseil Municipal
Déclaration intégrale du Maire d’Istres en séance du Conseil Municipal du 25
septembre 2014 à propos de la fausse rumeur du manège des allées JeanJaurès.
“Vous vous souvenez de l’histoire des 3 petits cochons que nos parents nous ont
contés lorsque nous étions enfants… Il était une fois 3 petits cochons qui vivaient
avec leur maman dans une petite chaumière. Un jour, la maman appela ses trois fils
et leur dit qu’elle ne pouvait plus les élever parce qu’elle était trop pauvre. “Je
voudrais que vous partiez d’ici et construisiez votre maison, dit-elle, mais prenez
garde qu’elle soit bien solide pour que le grand méchant loup ne puisse entrer et
vous manger »… etc. Vous connaissez la suite, c’est un classique des histoires
enfantines qui ont bercé notre enfance et qu’aujourd’hui encore nous racontons à
nos enfants et petits- enfants.
Nous pouvons toutefois retenir et comprendre l’alerte de la mère des 3 petits
cochons car chez nous, à Istres, le loup est entré dans la bergerie… pour grignoter
et prospérer sur les esprits fragiles avec une nouvelle version d’une histoire de petit
cochon, revisitée par des esprits malveillants, bien loin de la candeur enfantine.
Dans sa volonté d’animation et de dynamisation du Cœur de Ville, la ville d’Istres a
décidé l’implantation d’un carrousel au Portail d’Arles.
Cette installation était souhaitée pour le mois de juin 2013, date de fin des travaux de
piétonisation des Allées Jean Jaurès.
Dès le mois de Décembre 2012 les services municipaux travaillent sur cette
commande.
Par Marché à procédure adaptée, en date du 7 mai 2013, la ville d’Istres acte la
commande d’un manège type 1901, avec sujets, décor chapiteau et images
spécifique à Istres.
Mai 2013, le fournisseur informe les services municipaux que le manège prévu pour
une livraison en juin, ne sera en réalité pas prêt et nous propose la livraison d’un
manège de substitution, ce que nous acceptons avec soulagement sans imaginer la
suite rocambolesque qui s’enchaine.
Ce manège comporte, des sujets divers, des chevaux et… un petit cochon !
Alors nous y voilà. Le petit cochon fait son entrée à Istres, n’en finit pas d’alimenter
les discussions et en devient le tube de l’été !
Pendant ce temps, les mois s’écoulent paisiblement pour le plus grand bonheur de
nos chérubins, qui chevauchent gaiement les sujets sans se soucier de savoir s’ils
sont sur un âne, une voiture, ou un petit cochon !
En réalité, personne ne détaille la nature des sujets qui composent ce manège, à
l’exception de quelques personnes, qui remarquent la présence d’un cochon.
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Arrive enfin la date de livraison du manège initialement commandé. Nous sommes le
7 Novembre 2013, à la veille de la période de Noël et nous accueillons enfin avec
satisfaction l’arrivée de notre Carrousel.
Seulement voilà, les mêmes esprits mal intentionnés, ceux qui avaient soulevé la
présence du petit cochon, remarquent son absence sur le nouveau manège.
Voilà le point de départ d’une histoire beaucoup moins drôle. Il faut attendre le mois
de février pour voir fleurir sur certains blogs indignes de ce nom ou plutôt spécialisés
en fausses rumeurs, pour entendre parler du petit cochon. A cette époque, certains
s’emparent de ces bruits pour introduire dans l’esprit des Istréens, l’idée que j’aurais
volontairement demandé le retrait du Petit Cochon, sous la pression de la
communauté musulmane.
L’opprobre est jeté. Ils vont plus tard rajouter, pensant sans doute s’attirer la
sympathie des anti-corridas, que je l’aurais fait remplacer par un taureau… Et oui, il
n’y a pas de petits profits !
Affabulation ! mensonge !
Non seulement c’est un mensonge éhonté, mais c’est une insulte envers cette
communauté et envers moi-même. Les istréens, qui me connaissent, savent que la
pression, d’où qu’elle vienne, n’a pas de prise sur mes décisions.
Nous y sommes donc, nous voilà en campagne électorale.
Tous les candidats le savent, moi peut-être plus que les autres par expérience
d’abord, mais surtout parce que j’ai souvent été pris pour cible, il est inutile de réagir
à tout durant ces périodes.
Généralement, lorsque les élections sont passées, les rumeurs se taisent et les
esprits se calment.
J’ai donc pris cette histoire avec dérision tellement elle était grotesque et avec le
recul nécessaire, du à cette période particulière.
Seulement voilà, 6 mois après, la rumeur est toujours bien présente. Elle prend de
l’ampleur, elle inquiète, elle affole. Le Maire serait-il devenu fou ?
Elle dépasse les frontières d’Istres, elle se traduit pas des courriers, des mails, des
appels téléphoniques de toute la France dans les services municipaux, de
particuliers anonymes ou pas, même d’élus.
Les gens crient au scandale, à la honte, me demandent des explications. Certains
me menacent de mort, si je ne remets pas immédiatement le Cochon sur son
manège.
Ils tiennent des propos racistes, s’indignent de l’islamisation de notre pays, bref, le
but est atteint par les auteurs de la rumeur.
Istres est la Honte de la France,
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Istres a cédé à la communauté musulmane,
Bernardini a vendu Istres aux arabes !
Voilà en réalité ce qui se cache derrière la triste histoire du petit cochon d’Istres :
instiller la peur dans l’esprit des Istréens grâce à des réseaux savamment organisés,
faire s’élever les populations entre elles, faire qu’une ville comme la nôtre qui évolue
paisiblement avec ses diversités dans le « Bien Vivre Ensemble » que nous avons
souhaité Nicole Joulia et moi, avec ses communautés qui se respectent, cède à son
tour à cette peur.
Oui nous avons à Istres une communauté maghrébine et nous l’assumons parce ces
personnes ont prévalu aussi à la construction de notre Ville.
Elles en sont une composante à part entière au même titre que la communauté
asiatique, les Kurdes, les Turcs, les Juifs, mais aussi les Italiens et les Espagnols,
les Arméniens et les Portugais, comme les autres ressortissants européens.
Oui Istres n’échappe pas à la règle de la diversité et cela n’exclut aucunement
l’harmonie et la tranquillité.
Je ne nie pas le contexte national et la question de la radicalisation de l’Islam dans
notre Pays.
Je ne pratique pas la politique de l’Autruche en laissant croire que tout va pour le
mieux dans le meilleur des mondes.
L’hommage rendu à Hervé Gourdel nous plonge dans l’horreur de la radicalisation de
barbares qui sèment la terreur et tuent au nom d’un Etat Islamique.
Je suis aussi conscient et lucide sur les problèmes de société qui existent en France,
mais aujourd’hui, j’ai honte d’avoir à m’expliquer sur cette rumeur, fausse et infondée
et j’espère que ceux qui ont été tentés d’y croire m’entendront.
Je m’adresse à ceux qui auraient la naïveté ou la crainte de penser que les Istréens
ne sont pas traités sur le même pied d’égalité, à ceux qui oublient, ou ne savent pas
peut-être, que depuis ma toute première élection, je me bats avec force et conviction
pour ma population, toute ma population et que notre Art de Vivre que beaucoup
nous envient, n’est pas né de l’incitation à la haine de l’autre, mais bien au contraire,
d’un traitement équitable entre toute la population d’Istres.
Je leur demande de ne pas faire d’amalgame, de rester objectifs, de se poser les
vraies questions.
Pensez-vous un seul instant que j’en sois réduit à des actes infantiles d’un tel niveau
pour conserver la sympathie de mes administrés ?
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Pensez-vous que la qualité de vie à Istres ne soit pas suffisante pour me permettre
de me présenter devant les Istréens la tête haute ?
Pensez-vous que je n’ai pas accompli suffisamment pour cette ville et que je n’ai pas
encore les ressources nécessaires pour la porter plus loin pour avoir recours à des
balivernes de trottoirs ?
Alors j’ai bien sûr échangé avec les représentants de cette communauté avec
laquelle j’ai toujours entretenu des rapports fraternels, empreints d’estime et de
respect.
Je suis heureux d’être suivi et conforté dans ma demande fraternelle par tous les
responsables religieux de notre Ville qui officient, échangent couramment faisant
taire les frontières des différences.
Il faut vivre la laïcité avec toutes ses valeurs de tolérance qui contribuent
efficacement à notre harmonie de vie.
Ils sont attristés par cette histoire, à tel point que l’Imam de la Mosquée, par
l’intermédiaire de M. Djamel Bedra, Président de l’Association Musulmane d’Istres,
m’a confié un message à lire devant vous ce soir :
“Monsieur le Maire,
Nous venons vers vous, suite à l’affaire du manège pour enfants qui semble prendre
une triste tournure.
En effet, cette histoire qui au début n’était qu’une simple petite rumeur, nous amène
aujourd’hui à revoir notre position sur notre silence, en allant déposer une plainte
contre X.
Comme vous l’avez peut-être vous-même constaté, une forme de communication,
particulièrement sur certains sites web, prennent parfois une tournure discriminante,
mensongère et qui risque de glisser insidieusement vers une nouvelle forme de
violence, celle de la division et de la discorde entre les citoyens en touchant aux
valeurs individuelles et collectives des personnes et voir remettre en cause, les
principes même de la laïcité qui est destinée à garantir les valeurs de la liberté, de
l’égalité et de la fraternité.
Nous restons malgré tout confiants, sur la maturité des Istréens et sur le travail que
nous avons tous mené ensemble, à travers votre posture et mandats successifs de
Maire de cette Ville, pour aboutir à une très bonne relation humaine entre les
différents cultes et diversités culturelles de votre commune.
Enfin, faites savoir aux concernés de cette affaire, que les manèges sont faits pour
faire rêver tous les enfants du monde et que le personnage du petit cochon est
présent dans le monde entier ainsi que dans les pays musulmans.
Très respectueusement.
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Mes chers collègues, je n’avais pas pensé qu’un jour, j’aurai à faire une si longue
intervention sur une rumeur d’une telle bassesse.
Et j’aurai encore moins imaginé être seul à défendre l’image d’Istres, notre ville, sur
un sujet aussi grave alors que certains n’hésitent pas à la salir et à la dégrader pour
faire avancer leurs idées dans l’unique but de se faire élire.
Je rappelle que siègent ici-même dans cette salle des représentants “officiels“ de
partis politiques, qui n’oublient pas d’afficher leur étiquette et de revendiquer leur
“légitimité“ : certains se prétendent vraiment de gauche, d’autres pensent incarner
mieux que quiconque les valeurs de notre République.
Mais je n’ai pas entendu une seule fois une parole d’indignation sur les attaques
faites à leur ville.
Alors me direz-vous, je me sens un peu moins seul et même en bonne compagnie
depuis que Madame Najat Vallaud-Belkacem a été elle aussi été victime d’une
rumeur sur le même sujet : la Ministre de l’Education aurait imposé dans le cadre de
la Réforme des Rythmes Scolaires, une heure hebdomadaire consacrée à la
découverte de la langue arabe !
Ils osent tout, même s’attaquer à l’école. Tout est permis dans leur méthode.
C’est par peur du loup que la mère des 3 petits cochons leur conseillait de construire
leur maison.
Serge Regiani chantait, lui, “Les Loups sont entrés dans Paris“ pour rappeler les
heures sombres de l’occupation.
À Istres, la rumeur rampante, lancinante, permanente répand les troubles
psychologiques. Elle suscite la nausée, elle bouleverse les consciences, elle
travestit les réputations, elle distille sciemment les divisions en instaurant la peur, en
secrétant les germes de haine.
C’est un goutte-à-goutte qui s’apparente à une avalanche et qui a comme signature
l’immense épaisseur de la médiocrité de ceux qui l’anime.
Mes chers collègues, il est couramment dans mes habitudes de toiletter les
évènements pour bien faire la différence entre l’important et l’accessoire… même
avant que ce dernier n’atteigne le dérisoire. C’est ma philosophie de vie qui me
permet de me concentrer sur l’essentiel, sur le primordial plutôt que de me perdre
dans des méandres futiles.
Pourtant aujourd’hui je change de cap, car je considère que le dérisoire bouscule
l’important. Pire, il essaie de lui ravir la place.
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C’est pourquoi malgré ma complaisance tournée vers le dialogue plutôt que le
contentieux, contrairement à d’autres qui se vautrent dans un climat judiciaire, j’ai
décidé que cela avait assez duré.
Je dois maintenant sonner la fin de la récréation et mettre un terme à ces
tombereaux de bassesse qui s’abattent sur moi et qui pourrissent l’ambiance et
l’attrait de notre Ville en la salissant sans vergogne.
Aussi j’ai déposé une plainte pour diffamation avec constitution de partie civile en
mon nom et au nom de la Commune.
Une enquête va maintenant être ouverte, elle nous permettra de remonter jusqu’à
l’auteur des faits.
Bien sûr toutes les personnes qui m’ont interrogé sur cette histoire seront
destinataires de cette déclaration et tenues informées des résultats de l’enquête en
cours“.
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