dossier special musique toujours - parceque le magazine qui dessine
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Un petit vent Arc-en-cielThe Les nonnes joyeuses Angry Hedwig musique toujours Les Brigitte Monsieur Lune Les festivals de l'été Britney, objet de désir et puisqu'on surveille sa ligne, l'ete approchant Les pâtes à tartiner : LE TEST VÉRITÉ dossier special la Magie Nouvelle PARCEQUE#3 / Mai-Juin 2011 / EDITO / 03 PARCEQUE,le magazine qui dessine Rédactrice en chef : Carole Sertimoun. Articles : Clémentine Brissi, Augustin Fontanier, Anne Laueffer, Sarah Bk, Camille Walter, Angela Bonnaud, Gilles Seiller, Margaux Perez, Léa C. Bouvet, Mister Fly, Rémi Meunier, Bartholomé Girard, Thibaut Coquerel, Atrus Princeps, Coline Poulette, Soeur Marilyn Von Tears, Sophie Carrez, Laura Pigeon, Carole Sertimoun. Illustrations : -Agathe Parmentier (Les news) agatheparmentier.ultra-book.com -Friederike Wolf (dessin edito et sommaire, Bébé médecin) frolleinwolf.tumblr.com -Marine Hardouin (Angry Hedwig, Les Brigitte) everybodyelsewasfine.com -Léa C. Bouvet (Short story, Les festivals) leachamsbouvet.tumblr.com -Tristan Domenjus (Ave Cesar, i love PAT) tdomenjus.blogspot.com -Coline Poulette (les Jeux) -Tim (Résomophobie, Sidaction) www.acupoftim.com -Camille Walter (Monsieur Lune) mangezdestartes.blogspot.com -Anne Laeuffer (La Magie d'aujourd'hui) -Rougerune (Mangez des moules, Les Nonnes Joyeuses, Fauroscope) www.rougerune.com -Julie Olivier (Chômage, je te quitte) www.julie-o.fr -Marius Guiet (Pub Ikea, Facebook, Culture Classique et Homosexualité) Guillaume Jamet (Pub l'Intermède) guillaume-jamet.com -Sebastien Rost (Pub Monsieur Lune) www.sebastienrost.com -Carole Sertimoun (Pub Paris de Vents, Pub Ni putes ni soumises, Britney) Maquette : Carole Sertimoun Couverture : “Blue Rene”, par Robert M. Hoover, 12 x 12”, acrylique sur toile, 2010, inspiré d’une photographie de Gerald DeHaan. Les images digitales de Mr. Hoover ne peuvent pas être copiées, distribuées ou publiées pour quelque média que ce soit sans accord écrit de l'auteur. Tous droits réservés© Marius Guiet Créa et gestion du site parceque.org : Sarah Bk Pour nous contacter : [email protected] EDITO Par Carole Sertimoun Ca y est, le printemps est bien là, l’été pointe du nez, on sort les ventilos, les arbres fleurissent, les oiseaux batifolent, c’est donc un moment tout à fait approprié pour fêter l’amour sous toutes ses formes. Vous aurez donc dans ce numéro 3 haut en couleurs l’occasion de surfer par-ci-par-là sur la vague gay-friendly telle qu’elle nous est venue, à nous autres homos comme hétéros. Même Ikea est là -oui, évidemment, il est toujours là, on sait plus quoi en faire par moment-, en bref tous les éléments sont réunis pour l’apéro-autour d’une table LACK-mais c’est pas possible qui n’a jamais eu cette table chez lui ? C’est une invasion -en même temps toi même tu sais, lecteur en dech de PARCEQUE qu’une table basse neuve à 5€ ça court pas les rues ! -Non non on fait pas de pub, d’ailleurs elle est pourrie sinon elle coûterait pas le prix d’un grec- pour passer ces deux prochains mois ensoleillés dans la joie et la bonne humeur, en attendant le prochain numéro. Sur ces bonnes paroles teintées de suédois, je vous souhaite, comme à l’accoutumée, une bonne lecture et un bon vent ! PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / SOMMAIRE / 5 Sommaire À PROPOS DE 06 Robert Hoover, notre couverture ACTU 08 Les news vues par la rédaction SOCIÉTÉ 10 Les Nonnes Joyeuses 12 Résomophobie 14 Itinéraire d'un bébé médecin 16 Chômage, je te quitte 18 Comment se faire larguer sur Facebook en 10 leçons CINEMA 22 Angry Hedwig 24 Ave Cesar MODE 26 Short Story ON TESTE POUR VOUS 30 I love P.A.T (pâte à tartiner) ARTS 32 La Magie d'aujourd'hui 38 Culture classique et homosexualité MUSIQUE 42 Britney, cet obscur obet du désir 48 Monsieur Lune 51 Les Festivals de l'été 52 Une+Une=Brigitte LES JEUX 54 par Coline Poulette ASTRO 56 Fauroscope 06 / A PROPOS DE / PARCEQUE#3 PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / À PROPOS DE / 07 / A propos de Robert Hoover CE MOIS-CI, c’est encore un peintre américain qui fait notre couverture : Robert Hoover. Robert M. Hoover a grandi dans le Nord de l’Etat de New York, diplômé de l’Université de Binghamton en littérature anglaise. Puis il a travaillé pendant 31 ans à la publication du New York City Magazine comme directeur artistique, et comme directeur de création et de production. Il a attendu un moment avant de saisir le pinceau et cela fait maintenant 7 ans qu’il travaille comme peintre. L’essentiel de son travail s'inspire de l’expérience émotionnelle et sensuelle qu’il peut avoir au quotidien. Le titre de sa prochaine exposition qui débutera en Août 2011 s’intitule «Artist with Three Children: Abstract, Portraits, Collage» («un artiste à trois enfants : l’abstrait, le portrait et le collage»). En effet, il ne peut désormais travailler sur l’un sans faire intervenir les deux autres, ce qui engendre une grande variété de résulats. Très impliqué dans l’arène politique américaine, il défend avec ferveur les droits des homosexuels comme des droits civiques. C’est un amoureux de tous les arts, en particulier la musique, le théâtre et la poésie moderne. Il a fait don de son travail à plusieurs fondation dédiées à la recherche médicale : Guardian Brain Cancer Foundation, American Cancer Society, Reflex Sympathetic Dystrophy Syndrome Association et à la National Perinatal Association. Tout son travail est visible à l’adresse suivante : www.flickr.com/ photos/roberthoover/ Boutique en ligne : www.roberthoover.etsy.com Contact: [email protected] PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / NEWS / 09 Les news vues par la redaction Illustrations : Agathe Parmentier & Carole Sertimoun Aux armes etc...! Par Angéla 30 ans qu'est mort Bob Marley. "Mai" en ce moment, tout le monde parle d'une victoire, de LA victoire. D'un côté si l'un a marqué ma jeunesse musicale, l'autre a marqué mon enfance politique. Celui qu'on appelait "tonton", encore heureux, car il y a tellement de François en politique - et ailleurs - qu'on s'y serait perdu. Pourtant, quand j'ai commencé à avoir un peu de conscience politique, les 14 années venaient de passer, et ce court moment socialo-gauchiste avait déjà pris fin, je n'ai donc pu pas juger de moi même ce que cela donnait. De ce que j'en ai entendu, ça avait l'air mieux que les années "Jacques ou Nicolas". Alors, tout en rappelant aux journalistes et aux politiques que les présidentielles ne sont pas cette année, se serait peut être pas mal que chacun - dans son isoloir - se souvienne de cette date, mais dans un an. Histoire de changer un peu l'histoire, et de voir ce que ça peut donner. Non ? La Terre est une orange bleue, par Bartholomé Le photographe allemand Robert Piontek débarque dans un parc, un aéroport ou au beau milieu d'un parc d'attractions, et photographie tout autour de lui. Puis il assemble les images, les étire, les fond et les tournicote les unes dans les autres pour qu'elles ne forment plus qu'une : des mini-planètes sur lesquelles tous les éléments se déploient autour d'un même globe. On dirait Le Petit Prince, mais en vrai (et en mieux). Chaque semaine, il crée de nouvelles planètes. Sa galaxie est à découvrir sur http://tinyplanetphotography.com. Kill them all, par Margaux La communauté internationale est indignée par le nouveau projet de loi ougandais visant à durcir les mesures de répression contre les homosexuels. Le parlement s'apprête en effet à voter un projet de loi prévoyant l'exécution de tout citoyen reconnu coupable de certains actes homosexuels. Ce projet contraire aux droits de l'homme a été dénoncé par de nombreuses ONG, notamment Amnesty International. Dans ce pays déjà fortement touché par les cas de discrimination, de détentions arbitraires et de violences envers les gays et lesbiennes et transgenres, il reste à espérer que les sessions parlementaires de la semaine prochaine ne donneront pas raison à l'homophobie. La Frontière de la honte, par Laura La France, l'Italie et maintenant le Danemark veulent rétablir les contrôles aux frontières face à "l'afflux" de migrants en provenance de Tunisie, de Syrie et des autres pays en pleine révolte. Rétablir les contrôles aux frontières, c'est remettre en cause les accords de Schengen, qui permettent la libre circulation au sein de l'espace du même nom (grosso-modo, l'Europe). Fermer les frontières. Reconstruire les murs qui ont été abattus. Et pourquoi ? Pour 25 000 personnes, 25 000 réfugiés qui fuient la guerre en laissant tout ce qu'ils ont derrière eux. 25 000 humains, dans une Europe qui en compte 500 millions. L'humanisme s'arrête là où commence le populisme. Odd future: violence hip-hop, par Gilles Le 5 mai, au social club, Odd Future Wolf Gang Kill Them All, le collectif de jeune gens californien, ont donné un show littéralement destructeur. Des bouts de plafonds sont tombés dans la foule et Tyler, le leader, est reparti avec une coupure au niveau de l'oeil. Un show dément que je recommande vivement. "Justice est faite !" Par Mathieu Oussama Ben Laden, LE Grand Méchant du XXIème siècle est mort (du moins, c'est ce qu'on nous dit). Mort, assassiné par l'armée Américaine. Alors oui, personne ne va se lamenter sur son sort ... moi le premier, dans mon fort intérieur, lorsque j'ai appris la nouvelle, je n'ai pu réprimer un "justice est faite". Mais... dans le fond, de quelle justice parle-t-on ? Celle qui consiste, par les armes, sur un sol étranger à se faire vengeance ? Quelles que soient les meurtrissures du peuple américain, il n’est de justice dans un État moderne que celle rendue à l’issue d’un procès, où la défense a elle aussi la parole (aussi monstrueux que soient les crimes reprochés). Les crimes les plus odieux de la seconde guerre mondiale ont pour partie été jugés à Nüremberg. C’est sans doute la meilleure façon de tourner la page. Car un procès est le lieu où s’explore en détail la mécanique du crime. C’est un lieu où l’on explique et où l’Histoire – la vraie – pas celle des spin doctors, s’écrit. Friendly Keldéo, par Coline Mes très chers amis, en ce numéro spécial, j’ai l’honneur de vous annoncer la naissance d’une créature fabuleuse… Le premier pokémon gayfriendly au monde. Il est légendaire, il est beige et bleu ciel, il a des cheveux orange, de petits sabots teigneux, il a l’œil à la fois mignonet bagarreur, plein de vitalité, c’est un petit poulain de licorne, il scintille, je vous demande une ovation pour… Keldéo ! Vous noterez, toujours dans la vague de non-imagination ou de wtf chez Pokémon depuis rubis et saphir, le n’imp de ce nom. Il ne veut rien dire. Nan mais vraiment, à part évoquer un difficile choix sur le déodorant, ce truc ne veut rien dire. Ceci était un message pour la remise en ordre du bon goût pokémonien originel. S’il vous plait, arrêtez avec les bestioles trop concept Monsieur Tajiri. Pour plus de revendications sur la qualité des créatures en question, allez voir Le Point Culture Pokémon : http://www.youtube.com/watch?v=NYVj3gv848I Attention, ça crie un peu parfois. Minuit Chez Getrude Stein, par Carole À bien y réfléchir, il fallait bien un jour qu’il passe par là, Woody. Ça devait le démanger depuis un moment d'aborder l'effervescence culturelle des années vingt. Il n’y a qu’à écouter la musique de tous ses génériques. Incarné cette fois en Owen Wilson, qui n’a, comme tant d’autres avant lui, pas échappé à la woodyallenisation, le réalisateur nous embarque comme souvent dans une comédie de la vie ordinaire, mêlée d’une fantaisie déroutante. On n’embarque pas dans la DeLorean de Doc et Marty, le modèle est un peu plus chic, mais on découvre, avec les mêmes yeux hallucinés que le protagoniste, un Paris d’après guerre où il est si naturel de croiser une orange bleue prenant la forme d’un rhinocéros. Ne cherchez pas, c’est surréaliste. Midnight in Paris, dans les salles depuis le 11 mai 2011 06 / SOCIÉTÉ / PARCEQUE#3 Les Nonnes Joyeuses Je m’appelle Marilyn von Tears et suis Soeur de la Perpétuelle Indulgence. J’appartiens à un Ordre pauvre, agnostique et dérisoire de folles radicales. Nous sommes une communauté d’intentions unie par des vœux d’amour, de paix (pet?) entre les communautés, d’indulgence à l’égard de son prochain et nous avons fait le serment de promulguer la Joie Multiverselle de part le vaste monde. Texte : Soeur Marilyn Von Tears // Illustration : Rougerune EN SUBSTANCE, je suis devenue Sœur parce que je trouve qu’ont pas toujours le moral qu’il y a toujours une jolie fleur que nos villes et nos campagnes souffrent d’un manque cuiquelque part pour s’émerveiller de la beauté de l’univers. sant de coquelicots et de pâquerettes. Je suis devenue une Après tout c’est vrai que j’ai déjà pleuré beaucoup face à la fleur du bitume et des sex-clubs pour inciter à l’amour. Une misère humaine. Mais je voudrais pas qu’on se trompe : je ne fleur ça ne parle pas tellement : c’est pour ça qu’en tant que pleure pas sur les gens que j’aide, je pleure de voir que notre Sœur j’offre à qui veut une oreille attentive et aimante. Je me société accepte parfois la violence gratuite, le mépris de son lave bien les oreilles donc parce qu’on ne se confie pas à des prochain, la haine des différences sexuelles ou identitaires. oreilles pleines de cerumen. Quand je me rends dans un sex Je suis aussi Sœur pour dire aux gens que ça fait du bien de club avec une ou deux autres Sœurs, c’est aussi pour rappepleurer, que ça fait du bien d’admettre ce qui nous touche, ler aux gens qu’on attrape encore le VIH si on ne se protège ce qui nous fait du mal. On ne soigne jamais un mal qu’on pas. Bien sûr, chacun il fait ce qu’il veut mais j’essaie d’aider refuse d’admettre. les gens à comprendre que c’est un acte d’amour que de se Je suis toujours très heureuse de sortir. Les gens que je renprotéger et de protéger les autres. Je ne suis pas là pour les contre me remercient quelquefois pour ce que je fais et c’est fouetter s’ils ne sont pas complaisants – il y a tout un tas de là sans doute un de mes sujets de réDominateurs qui manient le fouet bien mieux que moi (encore que je monte des œufs en « Ca me rend toute chose de flexion favoris. On me trouvera très alneige comme personne !). Bien sûr, il y a savoir que je repousse les li- truiste au regard d’un monde que l’on plein d’endroits où on peut apporter de la mites du possible quand, dans décrit comme celui de l’Individualisme et de la Consommation. Mais je n’ai pas fraîcheur et où les gens ont envie d’amuuur. la rue, je croise des regards tant de prétention que ça. Je crois qu’on Alors je me rends aussi dans des soirées festives, dans des festivals (on est aux Soli- ébahis de voir sur le trottoir ne partage pas beaucoup quand on se days par exemple), dans des raves parties, une Sœur avec autant de ma- sent coupable d’y trouver son compte. dans les endroits où le trottoir est pour quillage et d’aussi belles pe- Il y a beaucoup de culpabilité ici ou là à jouir de ce qu’on aime. Et il y a tout certains/-nes un lieu de travail (parce que tites chaussures ! » autant de jouissance sans goût quand les prostitué/-es elles sont aussi beaucoup on se sent pas à l’aise. Peut-être même discriminées et que nous la discrimination on est contre), que le paradoxe tient à ça : moins vous vous sentez légitimes dans des lieux aussi parfois insolites… en fait n’importe où de faire ce que vous voulez faire et plus vous en faites un où j’estime pouvoir promulguer cette joie de vivre. genre de Graal. Je voudrais dire aux gens qui me lisent là On comprend peut-être pas toujours très bien ce que sont que le Graal c’est tous les jours si on veut. Vous pouvez au les Sœurs et c’est vrai que c’est pas commode de faire enmoins essayer : demandez-vous ce qui vous fait kiffer dans tendre aux gens qu’être citoyen c’est aussi revendiquer le la vie, j’veux dire ce qui vous fait vraiment triper genre « droit de s’improviser l’identité qu’on veut avoir. Ca me plaît ouuuuaaaah ! j’prends mon pied grave ! » et demandez-vous d’être une Sœur parce que j’aime beaucoup Sœur Emanuelle aussi pourquoi vous ne pourriez pas le faire. Il ne s’agit pas qui a grave la pêche et qui m’a beaucoup appris à travers seulement de cul. Si vous voulez ne rien faire c’est aussi son amour. Je ne suis peut-être qu’une petite goutte dans possible mais je vous incite à cette décadence morale vis-àun cocktail mais si je n’y étais pas au final je manquerai, vis de cette société. comme la vodka dans le Cosmo... Il faut de tout pour faire Considérez simplement qu’être Sœur de la Perpétuelle Inun monde et quand les gens parviennent à s’ouvrir à cette dulgence c’est à mon sens une manière qui me plaît de faire différence là, aaaaah ! ça me plaît ! Ca me rend toute chose la folle et de m’amuser avec tout l’humour qu’il faut pour de savoir que je repousse les limites du possible quand, dans aborder le sérieux de la vie. Tout le reste n’est que vanité. la rue, je croise des regards ébahis de voir sur le trottoir une Sœur avec autant de maquillage et d’aussi belles petites Soeur Marilyn von Tears, chaussures ! On est des Sœurs pas très traditionnelles c’est La Marie Chienlit des Anges, évident et c’est amusant de montrer cette beauté au monde. dite Tchendukua. Je n’exige de personne d’être d’accord avec moi parce que je n’avance aucune belle idée de ce qu’il faudrait être ou de ce qu’il serait délicieux de penser. C’est pour rire tout ça. Un rire sérieux diraient certains théoriciens de l’humour… Je veux bien croire qu’il y a quelque chose de sérieux à se préoccuper de personnes atteintes ou concernées par le VIH/SIDA, à se soucier des laissés pour compte et de ceux qui se laissent aussi pour compte tous seuls, à vouloir montrer aux gens CONTACT : Sœurs de la Perpétuelle Indulgence, Couvent de Paname www.couventdepaname.org [email protected] facebook : Couvent de Paname - Les Soeurs de la Perpétuelle Indulgence PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / SOCIÉTÉ / 13 "Vous etes maintenant connectes au Resomophobe, bienvenue" L’homophobie, fléau à la vie longue et prospère, a été décrite par bien des hommes, à d’innombrables époques. Et toi, public occidental du XXIeme siècle, enfermé dans ta bulle numérique à longueur de journée, à quoi penses-tu à l’évocation de ce mot ? Texte : Thibaut Coquerel // Illustration : Tim JE SUIS PERSUADÉ que si l'on vous demande de décrire les formes d'homophobie, celles-ci ressemblent à des actes du quotidien, comme la ségrégation au travail ou dans la rue, en passant par certains clichés véhiculés par nos radios ou téléviseurs bien-pensants ; bien souvent des propos ou des gestes déplacés, de la part d’inconnus ou de personnalités, qu’ils soient animateurs, artistes ou politiques, et qui créent délibérément ou non la polémique. C’est aussi mon cas. D’ailleurs, cette représentation simple et dangereusement généraliste de l’homophobie a fini par se banaliser dans notre inconscient collectif. sageries instantanées, plus récemment dans le contenu de blogs bien souvent orientés, et maintenant via nos réseaux sociaux. Ce qui l’a rendu à mon sens préoccupant, c’est l’ampleur qu’a pris ce message homophobe au travers des réseaux sociaux. Vous allez alors me rétorquer que les formes de ségrégation, dont fait partie l’homophobie, ont toujours existé, ce qui est juste. Mais cette nouvelle portée sur le web rend leur expression différente. Derrière la furtivité du monde en ligne, tout un chacun peut tenir des propos homophobes Aujourd’hui, contrai- sans réellement craindre de répercussions, Seulement voilà, j’appartiens à l’espèce rement à bien des ce qui laisse beaucoup de sites d’informacontemporaine du geek, passant une bonne idées reçues, le plus tion confrontés aux phrases parfois acides de part de mes journées à arpenter les dédales du gros pourcentage de leurs membres. Mais ces hébergeurs sont-ils net. L’homophobie telle que je la côtoie le plus réellement des victimes? La faute leur revientsouvent prend une forme étonnante pour cer- plaintes liées à l’ho- elle ou concerne-t-elle plutôt les internautes provient ? À mon sens un peu des deux, car Internet tains. En effet, en suivant l’évolution du multi- mophobie média et des moyens de communication, celle-ci bel et bien d’Internet possède cette particularité de nous rendre tend continuellement vers de nouveaux usages [...]. Même les inci- tous acteurs de ce qui s’y passe : à nous utiou supports, et aujourd’hui, contrairement à dents du monde du lisateurs d’abord à cause de notre anonymat, bien des idées reçues, le plus gros pourcentage travail se font désor- mais aussi à ces sites justement, qui ne font de plaintes liées à l’homophobie provient bel et pas forcément le nécessaire pour limiter ces bien d’Internet, qui en regroupait à lui seul 16% mais devancer par la abus. Que cela soit volontaire de leur part ou l’an dernier. Même les incidents du monde du Toile. non, les commentaires restent l’une des leurs travail se font désormais devancer par la Toile. principales sources médiatiques, et les laisser peut potentiellement créer du débat et augmenter leur trafic ; « générer Evidemment, le phénomène n’est pas nouveau non plus et le buzz », même si cela n’est pas très politiquement correct. s’est forgé en plusieurs temps, tout comme l’Internet luiDe plus, la législation est elle-même coupable à son tour, en même. Si vous êtes un internaute de longue date comme conservant cet anonymat des données dans le cadre du soimoi, vous avez déjà pu le croiser de différentes manières : disant respect de la vie privée. Peut-on pour autant parler de au début sur certains sites, puis par vos mails et les mes« respect de la vie privée » lorsque l’on porte de tels propos ? Où trouver la limite ? anti-homophobes, qui trouvent encore le moyen de pointer du doigt d’une part le manque de vigilance des portails d’acEn effet, au-delà de la vie privée, il y a l’espace public. Avant cès mais surtout l’irresponsabilité ou les mauvaises intend’être confidentielle, la Toile est un lieu de partage de moins tions des personnes qui y sont inscrites. Ces deux reproches en moins intime, et je crois que peu d’entre nous ont déjà s’appliquent plus largement à l’ensemble du net, le web assimilé la frontière fictive entre ces deux web à l’heure acsocial n’étant qu’un petit miroir dans lequel nous pouvons tuelle. Cela se voit en particulier sur les réseaux sotous apercevoir le reflet du World Wide Web. ciaux qui, en plus d’être le point culminant des infos Revendiquer, c’est En mélangeant ces carences, la boucle est superficielles et pseudo-confidentielles, deviennent encore plus au- bouclée et nous revenons donc au début de les principales cibles de l’homophobie. La retrouver jourd’hui prendre l’ensemble du raisonnement, en le prenant ici ne surprend pas compte tenu de leur popula- le risque d’être at- cette fois dans l’autre sens. Ainsi, nous tourité et de leur diversité d’utilisation, au travers des chons à un problème récurrent contre lequel taqué et touché. groupes ou événements sur Facebook par exemple, il semble difficile de trouver gain de cause, et ou par les tweets, ces petits messages de 140 caractères qui n’a jamais été éradiqué même par l’éducation : la corgénéralement d’ordre public. Dans ces réseaux à l’intérieur ruption humaine. du réseau, je suis convaincu que les comportements des usagers varient actuellement peu avec le reste du net. Du simple En réfléchissant plus globalement, la véritable interrogation point de vue de ces portails, les précautions techniques sont n’est-elle pas de savoir pourquoi l’homophobie aurait été pourtant prises pour lutter contre elle, et les options pour réellement moins présente dans les esprits à l’époque, pluy remédier existent officiellement. C’est le cas de Facebook tôt que de vouloir démontrer sans justification que celle-ci qui a autorisé récemment les statuts d’union homosexuelle. se développerait avec Internet aujourd’hui ? Le simple fait Est-ce un vrai pas en avant ? Tout laisse à penser que oui, de la voir dans nos ordinateurs ou Smartphones ne la rend mais le revers de la médaille peut aussi transformer ces pupas plus importante, d’autant plus que les personnes qui blications en une source d’homophobie pour ceux qui crirevendiquaient leur homophobie dans le passé étaient surtiquent cette officialisation. Revendiquer, c’est encore plus tout moins mises en avant ou préféraient tout simplement se aujourd’hui prendre le risque d’être attaqué et touché. cacher de la bienséance, à défaut d’avoir des moyens pour partager facilement leurs idées. C’est pour cela qu’au lieu de C’est à mon sens l’explication majeure qui fait que, malgré stigmatiser Internet sans cesse, nous devrions au contraire tous les paramètres de confidentialité mis en place jour le remercier d’avoir exposé ces points noirs au grand jour. après jour par les réseaux sociaux, ces derniers sont toujours les cibles des plaintes d’associations antiracistes et T.C. Itineraire complique d'un Bebe Medecin: episode 1 Les médecins sont comme nous : avant d’être grands, ils ont été bébés. Pas au sens physique du terme. La médecine est une drôle d’école où il est déconseillé de perdre le contrôle, au risque de perdre des vies. Voyons un peu ensemble les bases de ce qui fait mon quotidien de bébé médecin. Texte : Sophie Carrez // Illustration : Friederike Wolf commencent les stages hospitaliers. En d’autres termes : comment se frayer un chemin dans l’incompréhension générale. D’abord on éprouve une fierté infinie, un contentement énorme d’être là, d’être dans la cour des grands même si justement on n’a pas encore le droit de jouer. On apprend d’abord la sémiologie médicale. La sémiologie, c’est en gros tous les symptômes que présente un malade que l’on observe ou que l’on déduit de l’interrogatoire, indices qui nous permettent de trouver quel méchant « C’est donc une sorte est à l’origine de tous ses problèmes. Enfin, La médecine m’a fait naître et m’a réanimée ; de jeu de Cluedo géant, quand ce n’est pas un gang de méchants alors cela m’a toujours paru évident que je la sauf que notre patient qui causent tous ces désordres intérieurs. porte un peu, si peu à bout de bras. Pourquoi C’est un peu comme une enquête policière. personnifier la médecine ? Parce qu’elle est un est bien vivant et que On relève des indices, des faits, des blesprotagoniste quotidien de mon existence, une le but est de le mainte- sures, et tout cela intégré dans le contexte, nir en cet état. » amie mais parfois aussi une ennemie. nous permet de retrouver le virus criminel, l’articulation coupable, le nerf délinquant. C’est donc Les études de médecine ne peuvent pas se décrire en une sorte de jeu de Cluedo géant, sauf que notre patient quelques mots. On y apprend tant, on y apprend tout. Apest bien vivant et que le but est de le maintenir en cet état. prendre des cours à longueur de journée, plus de 25 bouÉtrange conception ? Mais cette quête de ce qui dérange ou quins de 500 pages à savoir par coeur au mot près, (c’est perturbe notre être, c’est sûrement ce qui fait tout l’intérêt pour ça que ça dure longtemps d’ailleurs, ça je l’avais pas de la médecine. Et essayer de résoudre l’énigme et donc de compris en m’engageant...). On travaille partout : à la fac, à préserver la vie, c’est ce qui nous pousse à ingurgiter tant l’hôpital, à la maison, dans le train, dans son sommeil. de savoirs développés par tous ces enquêteurs avant nous. À l’hôpital justement : en 2ème année (P2 pour les intimes!) JE SUIS NÉE dans la médecine un jour de mars. Je n’en ai absolument aucun souvenir bien évidemment, mais j’imagine aujourd’hui les différentes sensations. Un cri puis le néant et le respirateur qui respire pour moi. Les bips incessants qui m’entourent et saluent mon retour à la vie. La douleur ou la gêne crée par tous ces tuyaux qui m’entravent dans mes mouvements. Et juste le bonheur d’être là. Salut c’est moi, et ma décision est prise : je serai un bébé médecin. Dans 24 ans. PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / SOCIÉTÉ / 15 On apprend aussi à «mettre sa blouse blanche» pour examiner quelqu’un. C’est compliqué d’examiner quelqu’un. Car, pour la première fois de notre vie, on va toucher un autre être humain, que l’on ne connaît pas du tout, non pas pour l’embrasser, ni pour le remercier ou pour le saluer, mais pour essayer de le sauver (bon ok ça fait un peu grandiloquent sauver mais c’est ce qu’on ressent quand on est un nouveau-né médecin, on est impressionnable quand on est jeune… et surtout plein d’illusions). Et là on comprend qu’être étudiant en médecine, c’est se sentir très seul. Seul face à son ignorance, seul face au patient qui nous pose des questions auxquelles on ne sait pas répondre ou qui refuse de nous parler, ou face au chef qui nous interroge et qu’on ne sait plus tant on est perdu, seul quand on doit examiner quelqu’un mais que l’on ne sait pas du tout comment faire… Les patients nous regardent avec une certaine appréhension mêlée Ce premier jour en stage restera gravé dans ma mémoire d’un amusement non feint, mais ce qu’ils ignorent c’est que comme le jour où j’ai compris qu’il me faudrait d’abord apnous on a encore plus peur qu’eux ! Alors on est fier avec prendre à parler le médecin. Ce langage à part entière se notre belle blouse trop grande et notre stéthoscope, mais trouve être un mélange savant de termes scientifiques alliés on n’en mène pas large. Par exemple comment ça s’écoute à quelques mots rescapés de la langue française classique. un coeur ? Bah ça s’écoute pas en vrac à gauche devant Rapide petit tour du service et présentation des cas. Voilà en mais à quatre foyers d’auscultation définis, spécifiques où gros ce que j’ai compris: « monsieur untel présente l’on peut entendre plein de choses un cas typique de Bip avec Bip de Bip compliqué de « Ce langage à part entière différentes et plein d’autres petits Bip et Bip donc est traité par Bip Biiiiiiiiiiiiiiip!!! » en se trouve être un mélange endroits en fonction de ce qu’on gros les mots de coordination…« Vous m’arrêtez si savant de termes scienti- entend... oui pas de doute examivous ne comprenez pas un mot… » Oui pas de profiques alliés à quelques ner quelqu’un ça s’apprend ! blème mais c’est peut-être abuser si je vous coupe mots rescapés de la lan- Ainsi la P2 est une année charentre chaque mot non?... gue française classique. » nière, un moment de bonheur abBon c’est pas grave on s’accroche on prend un air solu, de découverte incessante, entendu et intéressé et on note frénétiquement en phonéune utopie où on se sent totalement perdu, mais totalement tique chaque mot que l’on cherchera le soir sur internet… heureux, où la vie nous apparaît comme si simple et prometSyringomyélie, loase, méningite à listeria monocytogenes, teuse. Mais bientôt la médecine allait m’apprendre la peur, le neuro-paludisme à falciparum, tuberculose urinaire, mal de sommeil perdu et des émotions si fortes et si paradoxales. Pott, infection opportuniste type pneumocystose ... Autant La médecine allait m’apprendre la vie tout simplement. de mots et de maladies qui me semblaient tout droit sorAlors à la prochaine fois pour la suite des aventures (ou ties d’un film de science fiction ! Aujourd’hui, 5 ans après des mésaventures, ça dépend du point de vue) d’un bébé je connais et j’emploie chaque jour ce type de mot et j’ai médecin ! réellement l’impression d’avoir appris une nouvelle langue étrangère! S.C. PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / SOCIÉTÉ / 17 Chomage, je te quitte. Texte : Gilles Seiller // Illustration : Julie Olivier J'AI RIEN FAIT POUR, crois-moi, mais c’est arrivé. Alors que j’étais tranquillement en train de devenir incollable sur les deux premières saisons dont une incomplète de Community, que j’allais enfin passer capitaine de la Fiorentina avec Caesar, mon avant-centre espagnol, que j’étais parfaitement reposé grâce à mes heures de sommeil qui par nuit atteignaient systématiquement les 8 recommandées voire les dépassaient, que je vivais chaque sortie au bar, chaque séance de sport, chaque rencontre fortuite comme un événement majeur avec un enthousiasme irréductible, et tout ça grâce à toi, voilà, venue de nul part, une proposition d’embauche. Le choix était vite fait, je te l’avoue. La pression sociale, l’avarice de ce connard de Paul Emploi et ses tentatives de me déporter à Bordeaux pour une tâche ingrate, et surtout les allusions à peine dissimulées de mes parents qui semblent résolument décidés à ne plus subvenir à mes besoins alors que ça a toujours été ainsi, m’ont forcé à dire oui. Oui, entreprise dont je tairais le nom, je viendrais passer du temps chez vous, au détriment de mes siestes de mi-journée. Oui, chers collègues, je vais venir déjeuner avec vous, au détriment des aventures de Jeff Winger. Oui, monsieur patron, je vais rester concentré sur mon écran professionnel à défaut d’être concentré sur celui de ma console. Donc je te quitte, chômage. Adieu. Enfin, à la prochaine, soyons optimiste. On se reverra peut-être, la crise aidant, au détour d’une erreur de trop, ou d’un manque de discrétion lorsque je gâche ouvertement le temps de l’entreprise. Tu me manqueras, j’avais appris à t’aimer. Très calme en hiver, j’ai eu la chance de voir ton visage de printemps, jovial, et je sais que nous sommes faits pour nous entendre. Chômage, tu resteras dans mon coeur comme une période bénie à la liberté que je n’avais pas retrouvée depuis l’été succédant à mon année de terminale S, il y a de ça bientôt 7 longues années. Soyons honnête, tu n’as pas toujours été agréable. Tantôt ennuyeux, tantôt angoissant, tu m’as donné bien du souci. Je ne te l’ai jamais dit, mais mes potes, ma famille, mes anciens collègues, tous, critiquaient notre relation ouvertement. «Tu dois te faire chier», «Mais t’arrives encore à sortir ?», «Faut pas que ça dure !», «Je comprends pas». Mes réponses ne semblaient pas leur convenir, malgré leur sincérité et leur enthousiasme. Je ne t’oublierai jamais, chômage. Reste le même. Comment se faire larguer sur Facebook en dix lecons Il existe des centaines de manières de larguer, mille et un motifs de rupture. Aujourd’hui grâce à Facebook, élargissez votre panel de connaissances. Texte : Sarah Bk // Illustration : Marius Guiet IN A RELATIONSHIP WITH Ça arrive le matin avant le petit dèj’, ou le soir en rentrant du travail selon le degré d’addiction à Facebook. Ça ne prévient pas. Ça s’affiche outrageusement sur votre page d’accueil. « Jules est passé de en couple à célibataire ». Vous admettez que les « Mon aaaannge », « Mon suuucre » et autres sobriquets à syllabes allongées se faisaient rares mais la rupture, ça non, vous ne l’aviez pas anticipée. Ni vos 367 amis Facebook d’ailleurs, qui l’apprennent en même temps que vous. Variante : - Vous n’aviez pas pris la peine de vous mettre « en couple » sur Facebook, votre chère et tendre non plus qui n’affichait aucun statut « marital ». Pourtant vous découvrez soudainement que votre Juliette est « maintenant célibataire ». - Vous cherchez à aller sur le profil de votre « n’ange » mais il semblerait qu’elle ne fasse plus partie de vos amis. Avantage : Pas besoin de briefer tous ses amis un par un sur votre rupture ni de leur demander de ne plus prononcer LE prénom sous peine de vider leur paquet de kleenex et/ou la bouteille de Vodka. DITES "CHEESE" ! « Non ce soir je dois bosser sur mon dossier sur la conjoncture économique au Soudan. » Vous êtes sceptique ou non, ce qui est sûr, c’est que ce soir vous ne vous verrez pas. Pourtant quelques jours plus tard « Jules apparaît dans l’album de Kara Thrace ». Vous parcourez l’album immédiatement : une soirée dont vous n’auriez pas été mise au courant ? Sur la troisième photo, derrière ce type en caleçon aux yeux rouges gorgés de tech’ paf’ en train de fumer un cigare, vous distinguez une silhouette familière. Non il n’est pas en train de soutenir l’un de ses potes ivre mort. Son bras est bel et bien enroulé autour de la taille d’une petite brune et son nez est bien à 2 millimètres de son front. Vous vérifiez la date de publication de l’album, la date de ladite soirée, la liste des personnes taguées pour un futur interrogatoire des témoins oculaires. Vous vous sentez tout à coup savante et cultivée. À présent vous comprenez parfaitement la conjoncture économique au Soudan. Variante : Il vous avait juré de ne plus jamais revoir son ex. Pourtant c’est bien elle là, dans l’album photo de son weekend « entre potes », sur le banc à côté de lui, en robe blanche légère et toute bronzée. Avantage : Preuve d’adultère irréfutable. En cas de divorce, gain de temps et d’argent considérable. NIAIZBOOK «Tu as vu mon choubichou, j’ai mis la photo de nous deux de cet été à Barcelone en photo de profil !! On est beaux hein hein ?» «Tu as vu mon n’aaaange le message que j’ai posté sur ton mur aujourd’hui ?» «Non ? Mais tu t’en fous ou quoi?» «Pourquoi moi je suis jamais sur tes photos de profil?» «Et pourquoi tu postes jamais rien à propos de moi ?» «Tu veux pas qu’on sache qu’on est ensemble c’est ça ?». Il a beau essayé de se montrer compréhensif, votre homme n’est pas connecté 21h/24 par jour sur Facebook et ne comprend pas votre acharnement. Mais pour vous, chaque absence de réaction, de like, de commentaire est synonyme de mépris. Et c’est comme ça qu’une absence de changement de photo de PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / SOCIÉTÉ / 19 20 / SOCIÉTÉ / PARCEQUE#3 profil devient motif de rupture. Variante : « Écoute il faut qu’on parle. Je comprends pas pourquoi tu as eu 2 semaines et moi 15 ans au test «Combien de temps votre couple va-t-il durer ? » Avantage : Dépistage précoce d’une niaiserie non désirée. TAG-ALIBI Sur votre page d’accueil, un de vos nombreux amis communs vient de poster un statut : « Merci pour hier soir @Mathieu @John @Franck @Caro @Fly […] @Guillaume : soirée énorme !!! ». Mathieu n’est pas votre mec, John non plus, d’ailleurs vous ne connaissez pas réellement tous ces gens. Ce qui est sûr, c’est que Guillaume vous a affirmé être chez son beau-frère hier soir à défaut de vous faire un massage aux huiles essentielles. Variante : Fonctionne aussi avec un commentaire: « C’est pas Guillaume qui te dira le contraire, vu comment il a fini hier soir… » sans oublier l’application Facebook « places » qui vous permet de vous localiser vous et vos amis : «Guillaume était : chez Etienne avec Mathieu, John, Franck, Caro… » Avantage : Voir chapitre « Dites cheeeeese ! » PRIVATE JOKE ON THE WALL Qui est cette Jennifer qui poste tant de liens sur son mur entrecoupés de private jokes « Fais des babouches t’auras moins mal LOL ! » ? Vous aimeriez bien en rire, seulement, vous ne connaissez pas les tenants et encore moins les aboutissants de cette plaisanterie, ni des 50 précédentes. Ce que vous savez, c’est que vous ne l’aimez pas, ni la plaisanterie ni son auteur ni les babouches. Variante : Le lendemain d’une soirée pyjama télé Sex & the City/Häagen-Dazs vous lisez sur le mur de votre bien-aimé le message de l’un de ses amis : « Alors hier soir ? T’as fini seul dans le taxi ou pas !?..... » Avantage : Capacité de surveillance illimitée. Vous connais- PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / SOCIÉTÉ / FACEBOOK / 21 sez absolument tout son cercle d’amis, d’exs, de peut-êtrefuturs-mais-qui-n’a-rien-donné, et de peut-être-j’hésitemais-j’ai-une-nana-quand-même-oh. EX-PHOTOS Elle a beau être cachée en 36ème position d’un album de vacances daté de l’année dernière, la photo de son ex le teint halé en maillot de bain entrain de galoper sur la plage vous pique le bas ventre chaque fois que vous visitez (fouinez NDLR) son profil Facebook. Ce que vous ne comprenez pas, c’est qu’il ne la supprime pas. Ni celles du mariage de son frère, où ladite ex habillée en Belle au Bois Dormant pose souriante de toutes ses dents à côté du reste de la famille. Variante : «On peut savoir pourquoi tu as encore dans tes amis Facebook ton ex de primaire qui t’a embrassé sur la bouche en échange d’une sucette quand tu avais 12 ans??» Avantage : L’aubaine pour les grands jaloux, leurs crises peuvent être enfin justifiées par des preuves tangibles. LE MÉPRIS 2.0 Ce dossier d’analyse financière comparée que vous devez rendre le soir-même ne vous botte pas réellement et vous passez votre journée à lui envoyer des mots doux sur sa boîte mail privée Facebook (plutôt que sur son mur, parce que vous ne faites pas partie de la catégorie niaizbook). Il ne répond à aucun d’eux. Vous vous persuadez qu’il doit enchaîner les réunions, les tournages, les clients... Pourtant sur son mur se succèdent toutes les heures ses publications de lien. À cet instant ce qui est sûr, c’est que la vidéo de Régis qui boit de la bière-tagada dans une tondeuse, ça ne vous fait pas rire du tout. L'INTRUS Mais qui est cette Sophie Lefort qui semble littéralement passer ses journées à cliquer frénétiquement sur le bouton like sous chacune des photos de profil de votre homme et à commenter toutes ses publications (pour ne rien dire, en général) ? Après dissection de son profil Facebook, non, cette Sophie ne semble pas être une ex. Mais alors d’où sort-elle-celle-là ? Vous pouvez essayer de lui demander à votre chouchou/ loulou : toute tentative de justification sera vaine. S’il vous dit que c’est une amie d’ami, « mais je ne l’ai vue que quelques fois » vous lui demanderez de la supprimer, ce qu’il refusera dans la majorité des cas. (Voir chapitre « Les ex-photos »), soit il vous dira que c’est une très bonne amie et vous trouverez plus suspect encore de ne pas la connaître. Variante : Votre propre profil est inondé de like et de commentaires d’un ami de primaire que vous n’avez pas revu de chair et d’os depuis 15 ans et qui vous trouve « vraiment très charmante dans ce petit top moulant ». Mais votre homme aimerait beaucoup que ce qui se cache en dessous dudit top lui appartienne de manière exclusive. Avantage : La prochaine fois, vous ne poserez pas la question. LES CODES D'ACCÈS « Chérie tu peux te connecter à ma boîte mail ? J’ai pas Internet ici dans ma rase campagne et j’ai vraiment besoin de vérifier un truc ! » « Je te fais confiance ! » Il a tort… Il ne le sait pas encore mais demain, à la même heure vous saurez comment il a dragué puis quitté son ex il y a 3ans et 28 jours. Vous saurez qu’il parle culture & cinéma avec une inconnue depuis 11 jours et qu’il comptait vous offrir un weekend en thalasso à St Malo pour la St Valentin. Variante : Il ne commente pas vos statuts, vos messages sur son mur, votre super vidéo de buzz que vous avez enfin réussi à poster avant tout le monde. Soit il l’apprend et le mot « confiance » sera rayé de son vocabulaire et nous de sa vie. Soit manque de chance, un mail plus que suspect attire notre attention au milieu de ses 389 autres… Avantage : Dépistage précoce d’une désinvolture possiblement aggravée. Variante : Il ne sait toujours pas que vous connaissez toute sa vie de ses 4 dernières années mais pour élucider le mystère de « l’intrus » (voir précédemment), vous décidez de vous faire passer pour lui… On parle d’une semaine en moyenne avant d’être découverte. Avantage : Méthode efficace pour saisir rapidement le sens des concepts de « jardin secret » et de « confiance ». MAINTENANT QU'ON EST ENSEMBLE, TU VEUX ÊTRE MON AMI ? Vous faites partie de ces rares spécimens à ne pas avoir commencé par être amis Facebook avant de vous rouler votre première pelle. Voilà plusieurs semaines que vous avez dépassé le stade du baiser. Pourtant, vous ne figurez toujours pas dans sa liste d’amis Facebook. Pire, il refuse votre invitation lorsque vous lui envoyez en ajoutant avec ses yeux de chat Potté : « Je sais le mal que ça peut faire Facebook dans un couple. Je pense qu’il vaut mieux qu’on ne soit pas amis tu comprends. ». N’ayant pas encore lu mon article, vous ne comprenez pas les raisons de ce refus. Il est inconcevable qu’un pan de sa vie vous échappe, aussi virtuel soit-il. D’imaginer que certains de vos amis puissent être au courant avant vous de son activité quotidienne vous rend malade, même s’il s’agit d’une vidéo de Régis en train de boire sa bière-tagada dans une tondeuse. Et puis, comment ses 289 amies Facebook vont-elles savoir qu’il n’est plus célibataire si vous ne pouvez même pas être taguée dans la même photo que lui, si vous ne pouvez pas même liker ses publications ou poster quoi que ce soit sur son mur ? Variante : Vous étiez amis Facebook parfois même depuis plusieurs années. Mais depuis que vous êtes ensemble, il a préféré vous supprimer. Avantage : Là vous avez le droit de regretter votre rupture, de finir la bouteille de vodka et la boîte de kleenex. Cet homme avait tenté de sauvegarder votre couple. 20 / CINÉMA / PARCEQUE#3 Passons à table et commençons avec Le Banquet. Platon raconte dans Le discours d'Aristophane, qu'à l'origine, chaque être était double. Deux hommes, deux femmes, un homme et une femme. Mais Zeus, effrayé par leur pouvoir et leur connaissance, et par crainte de voir un jour un mortel rivaliser avec les dieux, les sépara. Depuis ce jour, chacun cherche son autre moitié. Texte : Camille Walter // Illustration : Marine Hardouin HEDWIG AND THE ANGRY INCH (comprendre en français "Hedwig et le pousse en colère") nous raconte l'histoire de Hansel, un petit garçon de Berlin-Est, dont l'enfance est tourmentée, mais qui rêve d'une vie meilleure qui fleure bon Jésus, le MacDo, Kant, David Bowie, Iggy Pop et Lou reed. C'est alors qu'il rencontre Luther Robinson, sergent dans l'armée américaine. Ils tombent amoureux et décident de se marier, ce qui permettrait à Hansel de quitter l'Allemagne de l'est. Mais pour ce faire, il lui faudra passer un examen médical complet. Sa mère lui donne son passeport, son nom et trouve un chirurgien pour remédier au problème. Mais une fois son opération sabotée, Hansel s'envole vers ses rêves avec ses perruques, ses seins d'argile et l'identité de sa mère: Hedwig. La première fois que j'ai croisé Hedwig Schmidt ça devait être au début de l'année 2002. Elle était pleine de paillettes, de couleurs et négligemment posée sur une étagère au fond du vidéoclub de mon quartier. Je venais tout juste d'avoir 16 ans et je venais rendre Mulholland Drive de Lynch, auquel je n'avais strictement rien compris. Dans un élan de rébellion adolescente mais néanmoins d'avant-gardisme, je m'emparai du dvd et m'empressai de rentrer le jeter au visage de mes parents. Car oui, j'avais Angry Hedwig PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / CINÉMA / 23 eu le culot de rapporter un film classé dans les comédies musicales glam et homo, à regarder en famille le dimanche soir. Dubitative, ma mère lança le lecteur et passa toutes les bandes annonces. Et enfin, les premières notes du générique de débuts retentirent. Des fausses notes, du rock'n'roll en train de s'accorder sur fond d'hymne américain vaguement approximatif, un lettragre pop et une sculpturale blonde loufoque. Amour, difficultés amoureuses, qui suis-je?, dans quel état j'erre?... le film pourrait facilement verser dans le pathos sentimentaliste comme savent si bien faire les Américains. Mais il n'en est rien. Pour sa première réalisation, John Cameron Mitchell pose ces thèmes sur la table mais tout en subtilité, en suggestions, mais aussi avec douceur et décalage. On est très proche de l'enfance, de l'enfance nostalgique, celle à laquelle on veut se rattacher lorsque qu'on sent qu'on a foiré sa vie, et à laquelle se rattrape le spectateur lorsqu'il voit ces petits moments d'animations naïfs et émouvants (sur "Origin of Love"), ou lorsqu'il chante avec Hedwig grâce à un petit karaoké (sur "Wig in a box"). Mais l'enfant devient vite ado et rebelle. John Cameron Mitchell (accompagné de Stephen Trask pour les chansons) nous livre un film, une comédie musicale même! (n'ayons pas peur du mot), un space-opera punk et trash sur la quête de soi. Comment peut-on faire, comment doit-on faire pour devenir quelqu'un, s'aimer, s'estimer? Doit-on se chercher un double? Car oui, Hedwig c'est un film glam, ultra glam même, à grand renfort de paillettes, de fringues ringardes des années 80 et de rock'n'roll énervé. Mais on est loin du Rocky Horror Picture Show ou de Priscilla folle du désert. On est loin des homo grandes folles qui se pavanent en robe. On prend le thé avec les transgenres et Platon. On trempe des biscuits, oui, mais en lisant le Banquet, et en aucun cas on rentre dans les schémas de sodomie mucile du cinéma d'auteur français qui essaie de faire réfléchir. Bref, ce film est devenu culte et Hedwig demeure la rockeuse la plus méconnue de l'histoire du rock. C.W. Hedwig and the Angry Inch, un film écrit et réalisé par John Cameron Mitchell musiques, paroles et bande originale de Stephen Trask séquences animées et dessinées par Emily Hubley Ave Cesar, (ceux qui vont mourir te saluent) PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / CINÉMA / 25 « La grande famille du cinéma ça n’existe pas. C’est un milieu où tout le monde se déteste » scandent certains acteurs. Pourtant par de multiples facéties, on essaie de nous faire croire que cette famille existe, avec le soutien et le respect qui la caractérisent. Mais nous ne sommes pas dupes, mais plutôt lucides, ultra lucides. Texte : Angéla Bonnaud // Illustration : Tristan Domenjus PLUS LES ANNÉES PASSENT, et plus on entend qu’il faut démocratiser la culture. Le cinéma, considéré comme le 7ème art, en fait partie. Et plus les années passent plus le prix de la place augmente. Les réductions existent pour que les jeunes et les chômeurs puissent se cultiver, mais ça ne fait pas tout. Pour aller au cinéma quand on est dans la catégorie « carte de réduction », il faut y avoir goûté avant avec parents, grands parents, parrains, marraines, amis de la famille quand on était enfant, ado. Et forcément là, ça coince parce que ça coûte un bras d’y aller en famille au cinéma. Ça devient une sortie de luxe, et puis comme Bourdieu l’a conclu, comprendre et aimer l’art, cela se fait dans la socialisation. Cette longue introduction, quelque peu révoltée, pour vous parler de cette cérémonie qui rend soit-disant accessible le cinéma français : la cérémonie des Césars. Accessible à tous ? Pour sûr, puisqu’en clair sur Canal+ ! Mais creusons un peu, histoire de comprendre ce que l’on peut y voir. On a une assemblée de gens, tous de la classe aisée, qui ont bien l’air de se faire chier, et bizarrement tous les autres « acteurs » les intermittents, les techniciens de plateau – ne sont pas là, pourtant je suis certaine qu’ils auraient le sourire eux, fiers et reconnaissants d’être conviés à une telle soirée. « Non mais oh ! Réveillez-vous là ! Vous êtes des privilégiés assis là, et vous tirez la tronche ». Tellement envie de les secouer ! Ainsi en février dernier a eu lieu la énième cérémonie des Césars. Je dis « énième » pour souligner l’incessante répétition. Certes les films nominés changent chaque année (heureusement !), les primés aussi changent (mais restent souvent les mêmes !) ou encore le présentateur change (Lemercier, De Caunes, Gad Elmaleh tournent !), mais reste que la célébration du cinéma français est rentrée depuis 36 ans dans une bien triste routine. Dans ma famille, regarder chaque année la cérémonie des Césars tous ensemble était une tradition qui me plaisait beaucoup. Depuis, j’ai gardé cette habitude de réserver ma soirée. Ca permet de se rappeler les quelques bons films que l’on a pris le temps d’aller voir sur la grande toile, de constater que l’on a même pas vu la moitié des films nominés, et aussi de sentir que l’on reste connecté avec cet art si étranger pourtant. Pendant cette cérémonie, on n’a d’yeux que pour les acteurs plus que pour le cinéma. Sauf que l’acteur a besoin du film, et aux Césars on cite le nom des films (souvent les 10 mêmes nominés plusieurs fois, alors qu’il y a environ 230 films français par an !), mais si on ne l’a pas vu, on ne peut voir que 30 secondes de chaque, autant dire que cela nous laisse « en dehors ». Soit vous avez vu, soit vous n’avez aucune chance de suivre vraiment la cérémonie, et c’est foutu ! Et en plus, en même temps que l’on met à jour sa pseudo-culture, on assiste toujours à peu près au même spectacle. La salle rit peu, on peut même dire que beaucoup font la gueule. Ce n’est pas vraiment la faute des présentateurs, qui essaient en vain, les années se suivant, de faire toujours plus d’âneries, de blagues… mais la salle ne réagit pas. Certains, voire la plupart, ont même l’air abattu ; non pas abattu de ne pas avoir eu de César, non. Abattu d’être là. Célébrer le 7ème art, ça devrait être gai ! Non, c’est stoïque. Naïvement, on pourrait penser que c’est le moment de se souvenir des acteurs décédés pendant l’année qui plombe l’ambiance, mais non : ce passage n’arrive que vers la moitié. Ce que l’on retrouve aussi chaque année c’est l’acteur/actrice qui est récompensé mais qui aurait mieux fait de ne pas trop parler au moment de la réception du césar. Un discours face à cette assemblée constipée, ni décalé, ni déplacé, simplement inintéressant, ou juste pour se rendre intéressant afin que l’ensemble des journalistes le lendemain en parle! Il y a aussi toujours celle à qui on a oublié de dire de mettre une robe « pratique » et qui par malheur reçoit un César. Et ce ministre… Quoiqu’il en soit, les Césars restent pour beaucoup un mythe ; et fin février 2012, sûrement je regarderai. Le lendemain, plusieurs personnes dont je ne me doutais pas qu’ils regar- daient eux aussi, me diront : « C’était pas top, mais y a eu LE passage avec tel humoriste où on s’est bien marré ». Même le discours après-Césars ne change donc pas. Alors, si l’art est source de création, d’innovation ; notre chère cérémonie des Césars ne peut elle pas elle aussi s’inventer – nouvelle salle, nouveau format ? Non. On n’aime pas le changement, le connu ça rassure, même si ce n’est pas « top », on continue ! A.B. 26 / MODE / PARCEQUE#3 Short-Story Le temps est de plus en plus clément, les bras se dénudent et le soleil ramène du monde au balcon. Nos jambes ne sont pas en reste puisque épilées ou pas, masculines ou non elles ont aussi droit à minimum de fraicheur. C’est aux hommes que je lance un appel, si nos t-shirts nous rendent parfois bien des services, le short demeure notre allié de l’été. Faut-il encore bien le choisir. Sujet bien souvent traité, décrié et hué il est aujourd’hui indispensable de bien cerner la panoplie « short et Cie » et c’est en vous prenant par la main, messieurs et pour le plus grand plaisir des dames que je m’apprête à jeter un court pavé dans la marre ! Suivez le guide. Texte : Rémi Meunier // Illustration : Léa C.Bouvet L’heure est grave. Nous avons pu constater 30° en plein mois d’avril. WTF ? Bon ok, les tornades par ici, les tsunamis par là, le réchauffement climatique etc. Je peine à croire que ces 30°C veille de Pâques sont dus à tout ça ! Remercions plutôt un charmant anticyclone qui nous a plutôt arrangé la mise. Certains et certaines on pu profiter du temps pour griller au soleil, pique-niquer sur des quais bondés style Bombay, tremper leur pieds encore témoins des crevasses hivernales (j’exagère) dans quelque fontaines du pays, se ronger les ongles dans les allées des Tuileries en scrutant ces touristes japonais avides d’air pur et de soleil naissant et persistant. Mais cette poussée estivale et soudaine nous a surtout mis au pied du mur : beau temps = chaleur, sueur, envie de frai- PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / MODE / SHORT-STORY / 15 cheur, ventilateur, brumisateur et j’en passe. C’est alors que chacun d’entre nous a rangé son manteau de laine : l’hiver ayant capitulé il est temps de sortir nos vêtements estivaux, chapeaux, lunettes et tout le tralala. Néanmoins, même si l’odeur du sable chaud ne va pas tarder à titiller les narines des plus chanceux (voire autre chose) j’aimerais rectifier certains points. J’en vois déjà certains prêts à me sauter à la gorge en me traitant de dictateur fashion. Mais mettez votre égo de côté et lisez attentivement ce qui suit. J’ai pu constater des choses, qui auraient dû rester au fin fond de vos songes hivernaux, des choses que même le retour du soleil ne peux pas accepter. C’est un cri d’alarme que j’ai envie de pousser un grand « STOP » dédié à tous ces faux-pas que certains peuvent faire dès qu’un rayon de soleil berce la ville. Dans ma ligne de mire, il y a plusieurs choses à éradiquer. Je sais, j’y vais fort. Mes prochains mots s’adressent à vous, messieurs, mes amis, à qui, lisant ma rubrique avec amusement et frivolité, il arrive néanmoins, par des températures affolantes de ne pas savoir quoi vous mettre sur le dos, quelle longueur de short il faut adopter... ou s’il faut adopter un short en fait. Le dilemme de la chaussures/chaussette, la chaussure sans chaussette, la chaussette sans chaussure… Tant de questions qui restent sans réponses. C’est en fait très simple, nous, les hommes nous avons droit au short en ville, mais je pense qu’il est nécessaire de garder une certaine retenue face à ce dernier. N’oublions pas que nous ne sommes guère en bord de plage à manger des glaces qui dégoulinent sur nos t-shirt et donc, le short en ville ne doit pas paraître « Estivalotouristicocamping ». L’idéal : le short en jean, je dirais même plus le bermuda, celui qui arrive juste au-dessus du genou, stylisé par un ourlet négligé. On le porte « à la cool » avec un simple t-shirt col rond, col bateau ou bénitier, on évite le col V qui risque de nous donner un côté trop « kikou lol » et tout bijou superflu. Le short se suffit à lui-même. Pour ce qu’il est des chaussures, c’est tout aussi simple ! Plusieurs choix s’offrent à nous. Privilégiez la chaussure bateau, la petite basket basse, style Vans ou Converse bien usée, ou encore les mocassins, mais pas trop « Nappy » du 16e. On évite aussi le nu-pied façon Quechua ou les espèces de chaussures ouvertes en cuir style Gladiateur faussement « fashion ». Si l’envie vous en dit, je suis d’avis d’essayer la basket montante, type Converse toujours, ou des Nike Blazer de couleur vintage. Et oui, il faut ABSOLUMENT mettre des chaussettes dans ses chaussures. Ce qui nous évitera de chopper mycoses ou autres verrues et impuretés dues à la chaude macération de la transpiration dans nos baskets plus si cool que ça ! Et puis ça nous évitera surtout les odeurs peu chaleureuses. Optez pour des chaussettes courtes ou des « protège-pieds » (ces mini chaussettes bien serviables qui protègent la voûte plantaire et passent inaperçues). Cependant on peut, avec parcimonie, tenter la socquette de couleur sobre et bien placée qui donnera un côté décalé à votre tenue estivale. C’est la seule solution que je peux vous proposer. Il n’y en a pas des milliers puisque le short plus bas que le genou c’est panoplie Papi : nu-pieds, chaussettes et gourde à la main, et que le short trop court c’est panoplie Poppy : mèche dans le vent, démarche de starlette et sac à main (on est loin des lettres de noblesse masculine) ! Mais surtout quoi qu’il puisse se passer on évite absolument, même sous la torture la plus extrême de mettre des TONGS. La tong en ville est strictement interdite. De n’importe quelle matière qu’elle soit, la tong ne peut fouler l’asphalte citadin. C’est d’abord une question de style mais aussi une question de sécurité hygiénique. Franchement, avec quoi va la tong ? Et je ne vous parle pas des claquettes FILA ! Donc la tong reste à la maison, on peut l’emmener en vacances puisqu’elle dépanne quand même au bord de la page (et encore). Même si vos doigts de pieds sont fabuleux, je vous assure que la tong n’est pas le bon moyen d’avoir du style en ville. Mesdames, généralement vous faites preuve de sans fautes (excepté parfois les mauvaises longueurs de jupes et autres t-shirt ou short bien trop étriqués), les pieds d’une femme sont toujours plus séduisants que ceux des hommes, les nupieds sont donc, pour vous, les bienvenus. Une envie de m’adresser à la gent masculine aujourd’hui, je pense que nous avons aussi le droit d’avoir du style en ayant chaud. Dieu sait que je mets ma fierté masculine de côté mais franchement, si les hommes pouvaient porter de grandes robes fluides ça nous éviterait d’avoir les bonbons qui collent tout en gardant le sourire ! Une idée comme les autres, à ne pas suivre au pied de la lettre messieurs ! R.M. PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / ON TESTE POUR VOUS / 31 I love P.A.T. C’est en dégustant une tartine de beurre de cacahuète recouverte d’une fine couche de miel que je me suis demandé ce que mettaient les autres personnes sur leurs tartines. Je suis alors parti en quête avec mon acolyte Miss P. (Poulette pour les intimes) des pâtes à tartiner (PAT) existant de par le monde ! Texte : Mister Fly & Coline Poulette // Illustration : Tristan Domenjus Nous en avons sélectionné une dizaine dont nous allons vous faire la présentation si vous ne les connaissez pas encore, et vous donner notre avis, totalement subjectif, sur celles-ci. Nous avons commencé par quelque chose de curieux : •Pâte de Cajou (Côte d’Ivoire) –Ethiquable Il ne faut pas se laisser démonter par la couche d‘un centimètre d’huile qui surnage le mélange et se lancer ! Pour tartiner sur du pain on a connu mieux, la consistance est très épaisse et peu engageante, voire même fade. Mais il faut admettre que le parfum de noix de cajou est bien là et délicieux. Personnellement je le recommanderais en cuisine, par exemple en remplacement de la cacahuète dans un mafé si on n’aime pas celle-ci. Note Globale : Sans plus •Beurre de cacahuète –Skippy Smooth Onctueux, il fond en bouche, contrairement a ses concurrents d’autres marques qui ont plus tendance a étouffer, bien que ça reste du beurre de cacahuète, donc ça colle. On appréciera néanmoins ses arômes qui se dégagent quand on en laisse fondre une noisette sur la langue. Délectable ! Note Globale : Miam •Beurre de cacahuète –Skippy Crunchy C’est l’homologue du précédent dans sa version croquante. C'est-à-dire qu’il est rempli d’éclats de cacahuète qui craquent sous la dent. Etrangement on le préfèrera a la petite cuillère ou tartiné sur un prince au chocolat. Note Globale : Miam •Speculoos Normal Il y a peu c’était une trouvaille ! Maintenant on en tartine de façon blasée et l’on s’étonne de découvrir des personnes qui ne le connaissent pas. Mais il reste tout de même une sacrée trouvaille ! On retrouve dans sa texture la sensation de poudre de biscuits dont il est fait. Délicieux sur des princes vanille ou plus simplement sur du pain brioché. •Fluff Mais quelle est cette chose ?!! Tout droit sortit des States cette PAT aux marshmallows est … étonnante. Une texture incroyable, collante, mousseuse, extrêmement sucrée. Le Fluff est magnifiquement écoeurant ! Avis aux amateurs de sensations culinaires extrêmes ! Et sinon s’il vous manque un peu de mastic pour colmater des trous ça peut toujours être utile. Note Globale : 1 Miam pour l’originalité •Fluff fraise Le même en pire ? Un goût de dentifrice pour enfants mélangé à du carambar chimique, le tout avec une couleur de chair rose. Si vous voulez faire fuir un ami un peu trop pot de colle, proposez-lui une tartine. Effet garanti et testé ! Note Globale : Miam •Speculoos Crunchy Et oui ça existe ! Ahaha !!! Les blasés n’ont qu’a bien se tenir ! Après dégustation, on est arrivé a une conclusion commune : la meilleure façon de le déguster c’est directement a la petite cuillère dans le pot. C’est de la purée croustillante de Speculoos, avis aux fans du biscuit, faites le plein ! Note Globale : MiamMiamMiamMiam •Tartinade D’érable Là on commence a sortir des sentiers battus. Composition 100% sirop d’érable. C’est en fait du sirop d’érable cristallisé comme le miel. « Pire qu’une tuerie » selon Miss P. On sent ses petits cristaux fondre sur la langue et un parfum puissant nous envahir ! Danger : Addictif ! Seul bémol, le prix… Vu que c’est de l’import, ils se font plaisir les bougres ! Note Globale : Miam x Coeur Note Globale : 1 Beurk pour l’efficacité répulsive •Marmite Mais qu’est-ce donc ? Tout droit sorti de l’Angleterre, la marmite est une PAT salée a base de levure de bière fermentée, riche en vitamine B1. Elle possède quelques homologues : la Vegemite en Australie et Nouvelle Zélande, le Cenovis en Suisse, la Promite aux Etats Unis. À l’odeur on retrouve le parfum du Viandox et de la levure. Au goût, soit on adore soit on déteste, mais il n’y a pas d’intermédiaire possible. Ce fut d’ailleurs le sloggan d’une campagne de pub (love it/ hate it) . À vous de vous faire votre idée. « Moi j’aime bien » pour ma part, « c’est la pire chose au monde » pour Miss P. Ne pas oublier l’apport en acides aminés essentiels plutôt important. Note Globale : 2 Miams pour moi, 10 Beurks Pour Mis P •Salidou Ou plus simplement appelé caramel au beurre salé à tartiner. C’est une spécialité bretonne qui mérite d’être connue. Selon la marque, les textures varient légèrement, mais le goût reste très similaire, c'est-à-dire un délicieux parfum de caramel fondant et de sel de Guérande. Le summum du plaisir est de le déguster sur une tartine de beurre salé ave des cristaux de sel, le fondant du beurre se liant merveilleusement au caramel. « Une tuerie ». Note Globale : MiamMiamMiam •Ganou Et on finit sur une touche magique. La petite perle française, le Ganou. Nom subtilement trouvé du verlan de nougat. C’est une PAT au nougat de Montélimar (47% de nougat) distribuée par Chabert et Guillot S.A. que l’on ne trouve que sur l’aire d’autoroute de Montélimar ou par correspondance sur http://www.nougat-chabert-guillot.com À la dégustation, on est charmé par cette certitude de manger du nougat, tant au niveau du parfum que du goût. On peut très bien sentir les petits morceaux d’amande finement broyés et le miel fondant se diffusant agréablement dans tous le palais et remontant aux narines. On l’appréciera seul, tartiné sur toutes sortes de choses, ou accompagné d’une bière au nougat. Note Globale : The MIAM Comme vous avez pu le constater, notre système de notes est foir... euh... approximatif. Voici donc un petit récapitulatif des pâtes à tartiner qui nous ont le plus touchés : 1/ Ganou : indubitablement la merveille de nos contrées 2/ Erable : le canada n’a pas a rougir de ses tartines, elles sont aussi bien remplies que des pancakes ! 3/ Speculoos Crunchy : La tartinade Belge par excellence 4/ Salidou : La seconde merveille de nos contrées, mais bien plus connue et appréciée. Sur ce, nous vous laissons à vos commandes de douceurs, et à vos tartines ! M.F. & C.P. 32 / ARTS / PARCEQUE#3 A l’intérieur du grand monolithe noir qui loge les créations de la Compagnie 14:20, les corps n’obéissent plus aux lois terrestres. Pendant que les danseuses lévitent, les ombres acquièrent une existence autonome, et les balles de jonglage suspendent leur vol. Huit années à peine après sa fondation, le courant de la magie nouvelle est parvenu à imposer un nouveau langage artistique. Rencontre avec Raphaël Navarro de la Compagnie 14:20, initiateur d’un mouvement qui rassemble aujourd’hui plus de trente compagnies. Texte : Augustin Fontanier pour l’Intermède // Illustrations : Anne Laeuffer La scène est plongée dans le noir absolu. Souple et musclé, le mouvement du corps s’inscrirait dans l’espace. le corps solitaire de la danseuse Fatou Traoré apparaît sur le Un nouveau langage plateau. Elle s’incline, se laisse tomber sur le sol comme un félin, puis se redresse aussitôt et entame ses premiers pas Raphaël Navarro et Clément Dubailleul ont depuis longde danse. A part la dextérité de la jeune femme, rien de bien temps compris le potentiel artistique et poétique des arts surprenant. Rien, si ce n’est que son corps laisse curieusemagiques, resté relativement inexploité : «Ce qui manquait ment des traces dans l’air. On ne rêve pas : l’enchaînement jusque-là, c’est une démarche qui prenne la magie comme des mouvements imprime une série d’ombres blanches qui langage artistique à part entière.» Ce à quoi ils tentent de se maintiennent dans le vide. La course s’arrête. Les emremédier, avec les créations des compagnies de magie noupreintes fantômatiques s’estompent mollement, avant de velle. La discipline constitue un langage artistique propre qui disparaître tout à fait. Mais pas pour longtemps, car cette insuffle sa force aux arts du spectacle comme aux arts tradifois-ci la danseuse se dédouble une fois, puis une deuxième, tionnels. Dans la création Faust, que la compagnie l’Elan bleu et ainsi de suite pour que finalement s’amorce une danse à présentait l’année dernière, la scène du viol de six entre les silhouettes qui se croisent et se Marguerite par le jeune Faust se transforme en mêlent. Eveiller l’esprit à une nouvelle expé- « Pour ce peuple à une séquence où les deux corps se superporience, esthétique et spirituelle : voici le coeur la pensée animiste, sent dans l’espace, pris dans une transe qui les de la démarche de la compagnie normande, chaque geste laisse unit dans le feu du désir. C’est cette puissance fondée en 2002 par Raphaël Navarro et Cléune trace dans l’es- et cette recherche permanente de l’esthétique ment Dubailleul. Les quatre solos de vingt midans les mises en scène de magie nouvelle qui nutes de leur dernier spectacle Vibrations ont pace et, après la a incité Jean-Paul Gaultier à confier à la Compamort, l’âme du défunt gnie 14:20 la scénographie de l’exposition de fait exploser les frontières du réel. dispose de sept jours sa collection au Musée de la Mode en 2007. Si Raphaël Navarro refuse l’étiquette de fon- pour revenir sur son dateur et lui préfère le nom de «rassembleur», Car la magie nouvelle ne se cantonne pas aux il a pourtant initié avec son confrère Dubailleul passage et reprendre planches du théâtre ou à la piste des cirques. un mouvement qui a révolutionné la pratique ce qu’il a laissé » C’est le sens des dispositifs «hors-scène» imamagique au cours des dernières années. A ginés par la Compagnie 14:20. Ainsi des costumes de Jeanl’origine, il y a une amitié : celle de deux copains de lycée forPaul Gaultier. Balayées par des lumières bleutées, flottant à més dans les arts du spectacle avec l’ethnologue Valentine trente centimètres du sol, les robes du couturier s’animent Losseau, qui vit parmi les Mayas Lacandons dans les forêts de couleurs et laissent apparaître par jeu de transparence mexicaines au sud du pays. Pour ce peuple à la pensée aniles formes des mannequins. On peut encore citer le travail miste, chaque geste laisse une trace dans l’espace et, après effectué pour la Maison Pierre Corneille à Rouen, pendant la mort, l’âme du défunt dispose de sept jours pour revenir l’été 2006 : sur le modèle de la maison hantée, la Compagnie sur son passage et reprendre ce qu’il a laissé. Un rapport au truffe l’édifice de dispositifs visuels, sonores et olfactifs qui monde qui inspire le travail du trio. En se fondant sur cette suivent le visiteur à la trace. Il faut dire que le regard de la ontologie, la Compagnie 14:20 imagine une chorégraphie où La Magie d'Aujourd’hui PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / ARTS / LA MAGIE NOUVELLE / 35 statue du tragédien dans la grande salle a fait perdre la tête aux comédiens. Au sens propre. Mais pas question pour autant de faire de la magie nouvelle un phénomène à la mode et éphémère, hors du cercle des arts magiques. Dès Solo S, son premier spectacle présenté en 2004, où l’équipe jongle sur un texte original de Michel Butor, la Compagnie 14:20 fait le grand écart. Entre littérature et art de la rue, le travail du trio n’entend pas se cloisonner à une définition limitée de la magie. Chapeau claque et gants de soie Les disciples de la magie nouvelle ne renient pas, loin s’en faut, leurs origines. Davantage qu’en termes de rupture, le courant se pense en continuité avec les formes séculaires de la pratique magique. «Les gens ont tendance à réduire d’emblée la magie à l’illusionnisme et à la prestidigitation», regrette le co-fondateur de la Compagnie 14:20. Car la magie a une longue histoire, qui commence au moins au IIIe millénaire avant Jésus-Christ, lorsque l’égyptien Dedi utilise des cobras frappés de catalepsie pour reproduire le miracle de Moïse. Sans parler de la magie religieuse vieille comme le monde, les hommes développent rapidement une magie rituelle qui repose sur le postulat d’une connaissance du monde accessible par celui qui sait, et qui peut ainsi, sur le fondement de ces lois, modifier le monde à sa guise. «En fait, le raisonnement de fond de la magie rituelle est le même que celui de la science, même si on a tendance à s’arrêter à l’opposition de forme, explique Raphaël Navarro. Il s’agit de connaître le monde pour agir dessus.» Sorciers, chamans et rebouteux en sont les interprètes privilégiés. La magie que nous connaissons, avec ses tours de cartes et ses lapins blancs, ne naît qu’au XIXe siècle. Horloger français féru de science, Jean-Eugène Robert-Houdin crée le Théâtre des soirées fantastiques en 1845. «Le théâtre devient le lieu privilégié où se pratique la magie. Le magicien joue son rôle comme un acteur. Le costume qui nous paraît aujourd’hui si pittoresque avec haut-de-forme et gants blancs correspond en fait à la manière dont s’habillaient les bourgeois de l’époque lorsqu’ils venaient assister à son spectacle.» Loin du sorcier de la magie rituelle, le magicien des temps modernes ne prétend plus accéder à une réalité supérieure seuls comptent désormais son savoir-faire et sa technique. Et pour tout reliquat d’une spiritualité lointaine, des décors exotiques en carton pâte dépaysent le client des music-halls qui fleurissent alors dans les capitales européennes. Et pourtant, la croyance magique ne disparaît pas tout à fait. «Ces formes de magie sont facilement distinguables mais, en même temps, elles sont poreuses. Elles partagent notamment une même position vis-à-vis du monde, dans la pensée d’un surréel possible et l’idée d’une action sur la réalité.» Déjà, dans l’Antiquité, les magiciens ne répugnent pas aux trucages et autres effets de manche pour aviver la ferveur lequel l’esprit est amené à entrevoir la possibilité d’un monde des fidèles. Quant à la magie-spectacle, elle n’a jamais comaux lois différentes du nôtre. Titillé sans relâche par les maplètement rompu avec la pensée magique, surtout depuis giciens facétieux, le regard ne trouve jamais le repos penle succès des magiciens comme David Blaine ou l’Israélien dant les spectacles de magie nouvelle : il doit bien admettre Uri Geller, qui ont placé le mentalisme au premier plan de l’improbable partie de poker qui se joue à la verticale entre leur pratique. Ce positionnement commun du magicien par les trois larrons de la Compagnie décalée (Living !, 2006). Et le subtil tour de force accompli par la magie nouvelle est rapport à la réalité constitue le fondement de toute pratique de garder le spectateur dans un entre-deux adroit qui ne magique. «Encore aujourd’hui, dans la narration moderne du laisse jamais disparaître le sens du spectacle tour de magie, intervient toujours une justification magique, qu’elle prenne la forme d’un « Toute la philosophie derrière la prouesse technique. souffle ou d’une formule.» Dans une sorte de de la magie nouvelle double discours plus ou moins explicite, le réside dans cet acte Au-delà du ludique, par-delà même l’esthémagicien moderne, dont la pratique est avant par lequel l’esprit est tique, du politique ! Parce qu’il a pris conscience tout technique, doit mettre en scène l’action amené à entrevoir la des potentitalités que recèle la magie nouvelle, le mentaliste Thierry Collet (Compagnie Phad’une force mystérieuse. possibilité d’un monde lène) en a fait le moteur de son art : «De par La psychologie des foules aux lois différentes du sa pratique même, le magicien est celui qui s’interroge le plus sur les divers paramètres A la manière du mage dont la fonction sociale nôtre » influençant le jugement des gens, qui colorent leur pensée et était de faire apparaître les forces invisibles qui régissent leurs perceptions. En ce sens, le terme ‘influences’ renvoie le monde sans que nous en ayons conscience, le magicien aussi à la manipulation mentale, au politique, à la propareprend depuis quelques années son rôle de passeur vers gande.» Actuellement en tournée, le spectacle Influences acune autre réalité. Déboîtant, par le réalisme même de ses cueille les visiteurs dans un bureau de vote. Et en un tour de artifices, l’esprit de l’ornière où il paresse habituellement, le main, Thierry Collet fait sauter avec souplesse les certitudes geste magique dégage un espace de liberté où l’imagination établies de ses concitoyens. Mentalisme et tours de passeet la pensée du spectateur se meuvent sans entraves. Toute passe pour une mise à nu déconcertante des mécanismes la philosophie de la magie nouvelle réside dans cet acte par par lesquels publicitaires et politiques de tous bords influent PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / ARTS / LA MAGIE NOUVELLE /37 sur nos décisions les plus intimes. Et pour les opiniâtres qui ne seraient toujours pas convaincus, l’univers orwellien de la compagnie Pentimento enfonce le clou avec Manipulations, ou comment se brouille l’univers quotidien et rassurant d’un petit fonctionnaire rigoureux. Par le travail de ces compagnies, la magie retrouve cette fonction subversive de renversement des évidences, qui n’était pas pour peu dans l’acharnement avec lequel l’Inquisition a réprimé les praticiens du genre jusqu’au XIXe siècle. Equilibrismes Bien qu’ils utilisent un matériel de pointe - logiciels, caméras numériques... -, les magiciens de la magie nouvelle veillent à en rendre l’effet le plus subtil possible. Face à la course aux armements qui s’est engagée entre les artistes depuis une trentaine d’années, la magie nouvelle restaure ce qui est sans doute le coeur de la discipline : le sentiment du magique. «Pour la séquence du vol par exemple, où Fatou Traoré s’élève légèrement au dessus du sol, on a utilisé les mêmes techniques que David Copperfield, mais avec parcimonie pour éviter de faire quelque chose de trop incroyable. Et ce qui nous permet d’obtenir un effet beaucoup plus ‘magique’.» Dans une logique de refus de la surenchère, le décrochage avec le réel reste toujours à la limite. Résultat : la salle reste plongée dans un entre-deux propice au doux frissonnement du mystère. Il y a un charme dans cette démarche qui rappelle la sensation ressentie à la vue de King-Kong ou des Méliès, à l’époque des trucages, avant que la machinerie hollywoodienne n’impose les effets ultra-réalistes. Ainsi, chaque spectacle de magie nouvelle est un numéro d’équilibriste : «Parfois il suffirait d’un seul rang de spectateurs en plus, et tout serait foutu.» Rien de plus important pour le magicien, donc, que de saisir ce que voit et ne voit pas le spectateur. Car l’art de la magie, c’est avant tout un jeu sur les limites des moyens humains d’accès au réel. «Ce qui est intéressant avec des outils comme la caméra numérique, c’est justement qu’ils nous permettent de transmettre de l’information dans l’invisible. Notre matériau, c’est le réel, comme l’est le mouvement pour la danse ou les formes et les couleurs pour la peinture. Le réel est bien sûr abordé par tous les langages artistiques, mais jamais comme langage premier.» Depuis le début du mouvement, une trentaine de compagnies a rejoint les deux initiateurs, et une formation aux arts magiques a vu le jour au sein du Centre National des Arts du Cirque (CNAC) en 2005. Mais pas question, prévient Raphaël Navarro, de rejeter la magie moderne telle que la pratique traditionnellement la communauté des magiciens : «Il n’y a pas de concurrence entre la magie nouvelle et moderne. Moi, mon combat, ça n’est pas la magie nouvelle, c’est la magie tout court.» Témoin, l’engagement commun des magiciens de tous les courants pour faire reconnaître leur pratique comme un art à part entière. «Quand on regarde l’histoire de l’art, reprend-il, on s’aperçoit que l’émergence des nouveaux courants ne fait pas toujours de l’ombre à ceux qui les ont précédés. Les cirques traditionnels comme Grüss et Pinder qui dépérissaient depuis les années 1930 ne se sont jamais aussi bien portés que depuis qu’est apparu le nouveau cirque.» Gageons que la magie connaîtra le même destin. A.F. Prochains spectacles de la Compagnie 14:20 ECFM - Canteleu (76) 12 avril à 10h et à 14h30 13 avril à 14h30 Extrait de Vibrations (solo interprété par Fatou Traoré) 1er et 2 avril au casino de Forges-les-Eaux (76) À paraître : Manifeste de la Magie nouvelle, par Raphaël Navarro et Clément Dubailleul, courant 2011. PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / ARTS / 39 Culture classique et Homosexualite Présente de tous temps dans le contextes historiques les plus renommés, l’homosexualité est progressivement devenue pour les consciences occidentales la marque d’une décadence, associée à la chute des grands empires et à une perversion morale venue « d’ailleurs », de cet orient fantasmé, pour atteindre l’apogée de son rejet au XIXe siècle. Pourtant, dès l’Antiquité, elle fit partie des légendes collectives, de la littérature et des croyances, au point que les modernes ne purent nier cet héritage, et le développèrent en l’adaptant aux mœurs contemporaines. Texte : Margaux Perez // Illustrations : Marius Guiet Quand l’idée d’un numéro consacré à l’homophobie fut évoquée, je me suis interrogée sur ma légitimité à me prononcer sur un sujet par lequel je n’étais pas concernée, étant hétérosexuelle de nature, et comme nous tous moulée à l’image d’une société profondément axée sur les relations hommefemme et les valeurs de la famille traditionnelle. Et puis j’ai réalisé combien j’étais entourée, à travers l’art et la littérature, de véritables figures tutélaires de la culture homosexuelle, et ce presque malgré moi. Il s’agira donc d’évoquer l’imagerie classique de l’homosexualité, c’est-à-dire le traitement visuel de mythes devenus des références pour cette communauté. La mythologie, pour partir des origines de la civilisation, compose à travers les amours des dieux un répertoire de délicates figures d’éphèbes soumises aux volontés des puis- sants. Connue principalement grâce aux Métamorphoses d’Ovide, elle a donné naissance aux plus anciens archétypes de couples homosexuels. Jupiter, principal dieu de l’Olympe, partage avec Apollon un penchant pour les jeunes garçons, attirance qui coûtera souvent la vie à ces derniers. On ne compte cependant parmi les dizaines de récits amoureux que quelques récits homosexuels. Encore, ceux-ci s’incluent dans la morale grecque de l’amour éphébique, seules relations homosexuelles cautionnées par la société romaine. En effet, Ovide étant un auteur latin, même s’il s’inspirait de récits grecs, vivait dans un contexte moral dans lequel ces relations n’étaient légales qui si elles concernaient deux très jeunes hommes découvrant la sexualité ou un homme mûr et un éphèbe, la passivité de ce dernier étant néanmoins condamnable. Les amants d’Apollon furent Hyacinthe et Cyparisse. Le premier fut tué par le dieu alors qu’ils s’entraînaient au lancer de disque. Selon certaines légendes, Zéphyr, dieu du vent, serait à l’origine de l’accident, en ayant cherché à se venger du jeune homme qui l’avait éconduit. Abattu par le chagrin, Apollon transforma le sang s’écoulant de la tête de son amant défunt en la fleur qui porte son nom. Tout aussi tragique est le destin de Cyparisse, dont la grande beauté était réputée. Cyparisse avait pour compagnon un cerf, qu’il tua par mégarde tandis qu’il lançait un javelot. Touché par la douleur et les remords de son amant, qui souhaitait verser des larmes éternelles, Apollon le transforma en Cyprès, arbre persistant. On pourrait encore se pencher sur les Poséidon et Pélops, devenu échanson des dieux, ou l’amour provoqué par Milétos, fils d’Apollon, sur Minos et ses frères Sarpédon et Radamanthe. Point d’amours heureuses, donc, chez les puissants, dont les aventures furent amplement représentées par l’Histoire de l’Art. Pourquoi voit-on ces mythes servir d’iconographie de prédilection à toute époque, même dans les contextes les plus fondamentalement religieux (pensons notamment aux décors des palais papaux et cardinaux)? Il s’agissait de pouvoir confronter deux physionomies, mûre et juvénile, dans une démonstration de talent pictural. La finesse de l’exécu- 40 / ARTS / CULTURE CLASSIQUE ET HOMOSEXUALITÉ / PARCEQUE#3 tion apportait un crédit à l’iconographie, et la fin tragique de ces épisodes suffisait à ériger ceux-ci en contre-exemples d’une bonne conduite. Ainsi, on arrivait à une combinaison parfaite de la morale chrétienne, de l’amour de l’antique, qui avait pris possession de l’Europe dès les années 1350, et de la plus grande qualité picturale. Mais n’oublions pas que l’antiquité romaine savait rire de ses défauts, et qu’en pendant à ces récits d’amours contrariés, on trouvait dans la Rome impériale un courant théâtral picaresque qui tournait en dérision ceux qu’on accusait de participer à la décadence. Le Satiricon de Pétrone en est l’exemple le plus populaire, qui met en scène les tribulations risibles d’Encolpe, Ascylte et Giton, le nom de ce dernier étant passé dans le vocabulaire courant. Mais, là encore, cette tradition était née chez les Grecs, et avait connu son apogée avec les comédies caustiques d’Aristophane… on aperçoit l’influence immense qu’eut cette civilisation sur les premiers temps d’une culture homosexuelle. L’Histoire ancienne elle aussi connut de beaux récits de cet ordre, qui inspirèrent le monde moderne. On admira l’empereur Hadrien en tous temps, sans que son amour pour l’esclave bithynien Antinoüs ne fasse ombrage à se renommée à travers les siècles. Lorsque celui-ci se noya dans le Nil, l’empereur le fit diviniser, et fit réaliser des centaines d’effigies à son image, dont la beauté troublante s’admire encore dans nos plus grands musées. Sapho, la poétesse de l’île de Lesbos, et qui donna son nom à l’amour saphique, connut un grand succès dans l’Occident moderne avec son Ode à Aphrodite, notamment auprès de Ronsard et Boileau. Baudelaire lui-même évoque les femmes de Mytilène dans son poème Lesbos… La religion elle-même offre des figures tutélaires de l’imagerie homosexuelle. Saint Sébastien est l’incarnation du soldat romain, jeune et fort, présenté à peine vêtu et offert à ses bourreaux. Cette posture iconographique mettant en valeur le corps masculin a particulièrement intéressé les artistes, qui en ont fait un sujet de prédilection. Certaines de ces œuvres ont plus particulièrement marqué l’imagerie homosexuelle, depuis Guido Reni, dont la toile conservée à Gênes fut admirée par Wilde, à Mantegna, dont le nu musculeux se trouve au Louvre. En 1987, Pierre et Gilles lui consacraient un cliché, cherchant ainsi à s’inscrire dans la tradition picturale de la Renaissance. D’autres saints donnèrent lieu à des représentations entachées d’homo-érotisme, tels que Saint Jean Baptiste (pensons à celui de Léonard de Vinci, au Louvre, dont l’androgynie a souvent été rapprochée de l’inclination sexuelle de l’artiste), ou les archanges Michel, Gabriel et Raphael, supposément asexués. Quant il ne s’agit pas du versant opposé de cette notion, en la personne de Jeanne d’Arc… Le roman moderne reprit ces images et en fit naître de nouvelles. Dans un XIXe siècle où l’homosexualité était encore un fait condamnable dans de nombreux pays d’Europe, il était malaisé d’en parler ouvertement. De fait, parmi les couples modernes de la littérature, on note une volonté de dissimulation : Après le XVIIIe siècle et les escapades libertines de Sade et de Rétif de la Bretonne (pensons notamment au couple de Gaudet et Edmond dans La Paysanne pervertie), le XIXe siècle rationnel condamne ce qu’il considère être une déviance injustifiable. L’écrivain doit donc masquer ces inclinations : dans le Portrait de Dorian Gray, d’Oscar Wilde, le jeune héros est au centre de deux amours platoniques. Celui, innocent, du peintre Basil Hallward subjugué par la beauté de son modèle, puis celui d’Henry Wotton, manipulateur de conscience et figure tentatrice. Ces attractions apparaissent en filigrane, et c’est d’une jeune fille que Dorian s’éprend finalement, sauvant la morale du roman. Théophile Gautier se sert de l’artifice du travestissement pour une allusion appuyée dans Mademoiselle de Maupin. Chez Honoré de Balzac, Vautrin révèle sa sexualité à plusieurs reprises, dans différents tomes de la Comédie Humaine. Souvent, l’auteur utilise le prétexte historique pour justifier les actes de ses personnages aux yeux du public. Ainsi, Alfred de Musset laisse transparaitre avec subtilité les affinités de Lorenzaccio dans la pièce du même nom. La réputation des mœurs de la Florence renaissante où l’homosexualité masculine était commune, reconnue, et de notoriété publique parmi le lectorat de ce début de siècle. Plus tard, Jean Lorrain utilise ce stratagème dans la longue description du buste de cire d’un jeune florentin par l’un des personnages de Monsieur de Phocas. Nous lisons une description ourlée, empesée, dans laquelle affleurent les penchants du narrateur, et de l’auteur lui-même. Wilde lui aussi, traitait ce sujet à travers le prisme de l’Angleterre passée dans son Portrait de Mr W.H., qu’il jugeait alors être une représentation en miniature de l’amant de Shakespeare. Chez Jean Lorrain, auteur de la fin du siècle appartenant au mouvement français de la Décadence, dont on peut rapprocher l’oeuvre de celle, contemporaine, de Wilde, on trouve une figure juvénile de prince égyptien, du nom de Narkiss, dégoûté à la vue des femmes du désert, impudiques, et se prélassant dans une torpeur sensuelle sous le regard de ses gardes. C’est l’image érotique nourrie d’un Orient rêvé qui, dans cette courte nouvelle, sert de justification à l’évocation homosexuelle. Aujourd’hui, l’homosexualité est, si ce n’est librement représentée, du moins rendue populaire sous des formes qu’on pourrait trouver stéréotypées (il en est ainsi des séries telles que The L World, ou des émissions parodiques à la Queer as Folk). La nouvelle popularité en France des mangas traitant d’homosexualité masculine (yaoi) ou féminine (yuri) masque le fait qu’ils attirent par la transposition des relations hétérosexuelles et sont consommés principalement par ce lectorat. On est en droit de se demander si cette vulgarisation marque une réelle avancée dans la reconnaissance de cette communauté. M.P. 42 / MUSIQUE / PARCEQUE#3 PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / MUSIQUE /43 Britney, cet obscur objet du desir Sept albums studio, deux best-of, quatre tournées mondiales, 100 millions de disques vendus : Britney Spears se place en mastodonte de l’industrie musicale, acclamée comme la «reine de la pop». Et son dernier album, Femme fatale, qui sort ce 29 mars dans le monde entier, s’annonce déjà comme un nouveau succès. Il ne semble pourtant pas que ce soient ses qualités vocales, quasi-inexistantes, ni son talent scénique, pour le moins réduit, qui provoquent un tel engouement, et qui font que les meilleurs producteurs actuels la couronnent de joyaux pop. Comme le dit la journaliste à la fin du clip «If U Seek Amy» : «It doesn’t make any sense, does it ?» Texte : Bartholomé Girard pour L’Intermède// Illustrations : Carole Sertimoun EN 2002, Britney Spears déclare vouloir «la même carrière que Madonna, mais sans tous les hommes, les ragots et les scandales». En octobre 2007, après plusieurs aller-retours en hôpital psychiatrique et en cure de désintoxication, le crâne rasé sur un coup de folie, s’enfilant plusieurs pilules par jour pour tenter de stabiliser son poids et ses troubles psychiques, mariée et divorcée à deux reprises - la seconde union ayant duré 55 heures -, la chanteuse américaine de 26 ans chante «Gimme more» («donnez-m’en plus»). Et revient avec ce qui reste son album le plus abouti à ce jour : Blackout, météorite noire trempée dans une pop-électro acide, abrupte, rèche. Une seule prestation sur scène aux MTV Video Music Awards - un échec cinglant, tant la chanteuse peine à exécuter le moindre pas de danse - et la promotion de l’album s’arrête quasi-net. Quelque trois millions de copies de Blackout se seraient écoulées dans le monde. C’est le plus faible score pour l’artiste qui aura vendu, entre 2000 et 2010, 100 millions d’albums, faisant de celle dont le New York Daily News a dit : « si une poupée gonflable pouvait chanter, voilà sans doute le son qu’elle produirait», la chanteuse la plus vendue de la décennie. Anatomie du désir De la poupée gonflable, Britney Spears a certains atours : lèvres pulpeuses, sourire immaculé, crinière blonde et formes généreuses servies par des pantalons taille-basse et des décolletés vertigineux. Autant d’attributs pour un objet de fan- tasmes juché sur talons aiguilles, dont la démarche balancée lui a valu de monter sur scène avec Michael Jackson pour offrir un remake en live du clip «The Way You Make Me Feel», où le chanteur suit inlassablement une femme qui marche. Une façon de planter sensuellement une jambe devant l’autre qu’on retrouve dans la séquence d’ouverture de sa tournée Onyx Hotel Tour, en 2004, quand elle descend d’un podium en combinaison de latex noir pour rejoindre ses danseurs et exécuter une chorégraphie virtuose. Et une grammaire gestuelle qui se traduit également par des chorégraphies dont l’essentiel se passe dans le haut du corps, mais aussi un passage de langue sur la lèvre supérieure à chaque «L» prononcé dans un couplet, des tours de cou à en perdre la tête pour faire gicler les cheveux, et une cambrure appuyée. «It’s a Britney Spears sex riot !» (riot : émeute), hurle la coach Sue Sylvester dans la série télévisée Glee ! quand tous les élèves du lycée perdent leurs sens en écoutant «Toxic». De fait, durant tout l’épisode qui lui est consacré, Britney Spears apparaît aux personnages sous la forme d’un rêve ou d’un fantasme : même dans la fiction, elle incarne le désir inaccessible, une hyper-féminité qui agit comme une catharsis de la propre sexualité des personnages, et provoque un déchaînement de pulsions là où sa musique résonne. «Touch me and I come alive» («touche-moi et je prends vie») chante-t-elle dans «Ooh ooh baby». De façon paraphrastique dans «Touch Of My Hand» (pour désigner la masturbation), 44 / MUSIQUE / BRITNEY, CET OBSCUR OBJET DU DÉSIR / PARCEQUE#3 métaphorique dans «Gasoline» (pour parler du sperme), en jeu de mots dans «If You Seek Amy» (qui devient , quand on le prononce : «F.U.C.K me») ou frontale dans «3» (qui fait l’apologie du triolisme), Britney Spears travaille à déculpabiliser l’acte charnel. Après avoir, au début de sa carrière, prôné l’abstinence avant le mariage, elle incarne aujourd’hui une forme débridée de sexualité qui ne souffrirait aucun complexe, aucune retenue. L’orgie collective en sueurs du clip «I’m A Slave For You» en 2001 a, en ce sens, marqué un tournant dans une carrière musicale dont les textes et les clips tournent désormais autour de deux idées centrales : danser et / ou faire l’amour - et, si possible, en même temps. Le geste dansé emprunte à l’érotique, et les chorégraphies de la scène et de l’intimité s’entremêlent jusqu’à ce que dans sa dernière tournée, le Circus tour, elle s’allonge sur une banquette et se carresse les yeux bandés, ou qu’elle simule un coït avec un danseur lors de son Onyx Hotel Tour sur «Breathe On Me». Mais s’il est un organe sexuel par excellence chez Britney Spears, ce sont ses cordes vocales. Triturée, dématérialisée, saturée, sa voix se métamorphose d’une piste à l’autre, tantôt nasillarde, tantôt gutturale, parfois métallique ou au contraire faite de soupirs successifs. De ses débuts en «bubblegum pop» (l’album ...One More Time) puis pop (avec Oops...! I Did It Again et Britney) jusqu’aux accents urbains d’In The Zone, électro de Blackout et dance de Circus et Femme fatale, les gimmicks orgasmiques se multiplient sur la bande-son. Les onomatopées sexuelles (répétitions infinies de «ooh», «ah» et dérivés) sont légion sur son dernier album. Et s’il est produit en majeure partie par Max Martin (à qui l’on doit le lancement de sa carrière ainsi que, plus récemment, les tubes «If You Seek Amy» et «3») et Dr. Luke («Circus», «Lace and Leather»...), ce sont surtout les producteurs Bloodshy & Avant qui ont révélé le potentiel érotique de Britney Spears : en suivant le chemin tracé par The Neptunes avec «I’m A Slave For You», ils lui ont écrit coup sur coup «Toxic», «Do Somethin», «Freakshow», «Toy Soldier» et «Phonography», qui sont parmi les morceaux les plus hachés et rocailleux de son oeuvre. Couplés au travail de Nate «Danja» Hills, qui a produit près de la moitié de Blackout, et notamment les explicites «Gimme More», «Get Naked» ou encore «Hot As Ice», ces titres marquent définitivement le basculement de la chanteuse dans une pop sexuelle où la réussite d’une chanson sera fonction du degré d’excitation provoquée. Cette charge érotique dans la voix de Britney Spears ne tient pas tant à sa tessiture qu’à sa façon de respirer et de débiter les paroles de ses chansons. Chaque inspiration et expiration porte une lascivité patente, elle use et abuse des feulements et gémissements, et bon nombre de productions jouent sur sa diction ciselée. Si elle n’a aucune puissance vocale, Britney Spears possède dans sa façon même de prononcer, faite d’accélérations et de ralentis, une capacité à donner du relief aux paroles les plus plates. Max Martin et Dr. Luke, paradoxalement, n’utilisent que peu cet atout dans Femme fatale - seuls «Gasoline» et «Selfish», savoureux compromis entre la pop des débuts de la chanteuse et sa tendance actuelle à l’esbrouffe électrodance, tirent leur épingle du jeu : voir comment elle malaxe «be a little selfish» ou «you’re setting me on fire» -, cet atout qui donne pourtant toutes leurs couleurs aux titres «Me Against The Music», «Freakshow» ou encore «Get Naked (I Got A Plan)». Si Britney Spears a un savoir-faire, c’est celui de placer sa voix le plus précisément possible sur la musique, au millième de seconde près, jusqu’à donner l’impression que c’est elle qui guide le morceau plus que la partition qui lui dicterait le rythme. C’est peut-être ce qui explique la tendance croissante, depuis trois albums, à ce que son chant ait cédé la place à une forme de son trafiqué qui n’a plus rien de naturel, autotuné jusqu’à la lie, qui change du tout au tout d’un morceau à l’autre - il n’y a pas deux chansons, sur Femme fatale, où Britney Spears a la même voix. Celle-ci devient un instrument parmi les instruments, une vibration sonore qu’il faut moduler pour obtenir les harmonies voulues, qui se fond et se confond dans un déluge de réverbérations et voice coder, ne disparaissant jamais tout à fait mais malmenée à l’envie. Portée disparue Dès lors, qu’est-ce qui permet de dire que c’est bien elle qui chante, et pas une autre ? Si la voix est l’expression du sujet, alors que reste-t-il de Britney Spears ? Une image. Ou une ombre, plus exactement. Celle d’une femme qui, à la veille de ses 30 ans, n’exprime plus rien que son absence. Pendant que les autres divas de la pop commerciale actuelle saturent le petit écran - Rihanna, Lady GaGa et Katy Perry en tête - Britney Spears ne donne que deux interviews à la presse écrite, prévoit trois prestations dans des émissions télévisées, annonce une tournée du bout des lèvres. Signe que l’état de santé de la chanteuse n’est pas bon, ou stratégie marketing ? Si c’est la rareté qui dicte le prix, alors les apparitions de Britney Spears devien- PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / MUSIQUE / 45 nent, chacune, un événement en soi. On annonce l’arrivée du clip de «Hold It Against Me», son nouveau single, pendant deux semaines avec la diffusion de quatorze extraits quotidiens de six à dix secondes chacun, qui ne montrent rien et ne servent qu’à faire monter le désir, comme des préliminaires. Avec Britney Spears, il y a la promesse permanente de quelque chose qui va advenir, d’un spectaculaire qu’on va bientôt toucher du bout des doigts. Le tour de force consistant à, systématiquement, décevoir les attentes tout en les suscitant à nouveau le tour d’après. On nous promettait une chorégraphie de haut niveau dans «Hold It Against Me» ? Britney Spears bouge à peine les bras. On nous assure qu’elle a retrouvé sa forme physique ? Sa première prestation live, le 25 mars à Las Vegas pour un mini-concert surprise, montre que la chanteuse paye encore le tribut de ses excès alimentaires et médicamentaux. On nous jure que Femme Fatale est le descendant de Blackout ? La sécheresse du second a laissé place à une dance festive dans le premier qui, parce que trop sophistiquée à certains moments, perd l’aspect baroque qui a fait de Blackout l’un des opus les plus influents de ces dernières années en matière de pop. Quoi de mieux que la frustration pour nourrir l’envie ? En érigeant en système cette dialectique du désir jamais assouvi, Britney Spears se met dans une position ambiguë où la projection vers l’à-venir se fait en restant focalisé sur le passé : l’impossibilité d’envisager le futur conduit au triomphe de l’instant présent, bloqué par la mémoire. Car c’est le souvenir d’images devenues cultes qui anime l’espoir que d’autres arriveront : que ce soit pour le fétichisme des accessoires - la tenue d’écolière dans «Hit Me Baby One More Time», la combinaison rouge dans «Oops...! I Did It Again» ou celle pailletée et transparente de «Toxic» - ou pour les prestations endiablées sur scène à ses débuts, la mythologie Spears s’auto-alimente à partir de ce qui n’est plus, comme un Michael Jackson à la fin de sa vie. Un «comeback» perpétuel qui fait que chacun des nouveaux albums de Britney Spears est, depuis 2004, considéré comme un «retour» alors qu’elle n’a quasiment jamais arrêté d’être en studio ou en tournée : sept albums, 34 singles et presque autant de clips en onze ans, on a connu moins actif. C’est depuis la période sombre de 2005-2007, où ses déboires s’étalaient sur des kilomètres de couvertures de magazines, que l’impression que Britney n’est jamais tout à fait revenue domine, à la manière d’une Buffy qui, en ressuscitant, n’arrive plus à être à nouveau vivante. Il faut entendre l’une des rares interviews radio qu’elle a consacrée au sujet de son nouvel album à Ryan Seacrest, où son vocabulaire semble limité à des «fun» et «cool» qui PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / MUSIQUE / 47 ponctuent chaque réponse, le reste n’étant que langage promotionnel vide de sens : Britney Spears n’exprime plus rien, se fait page blanche, s’efface petit à petit. La dimension publique du personnage s’érode, pour ne devenir qu’une surface de projection : chacun fantasme sur Britney Spears à sa façon. En n’imposant aucune lecture, la star entretient l’illusion d’une relation interindividuelle entre elle et ceux qui la suivent. On ne s’identifie pas à Britney Spears, personne ne veut être à sa place : elle ne porte aucune valeur positive, si ce n’est l’expression d’une humanité qui ne peut se contraindre à la loi du showbusiness. Lady GaGa ou Madonna incarnent des personnalités fortes, qui laissent peu de place à l’improvisation, travaillant la symbolique d’un féminisme combattant et victorieux. Au contraire, Britney Spears semble brinquebalée par une ronde de producteurs qui ne veulent pas manquer la possibilité de travailler avec celle qui leur garantira plusieurs millions d’albums vendus, au détriment du sens qu’elle peut encore trouver à ce qu’elle fait - là encore, le parallélisme avec la carrière de Michael Jackson est troublant. «Je dois croire que je suis ici pour une raison», confesse-t-elle, en pleurs, lorsqu’on l’interroge en 2006 sur le fait qu’elle poursuive sa carrière alors qu’elle est harcelée jour et nuit par les paparazzi, au prix de sa propre santé et de celle de son entourage. C’est là l’autre paradoxe qui nourrit l’image de la chanteuse : quand GaGa intitule son premier album The Fame, Spears incarne une forme de martyr de la célébrité, crucifiée sur l’autel de la gloire. Une fille normale dans un univers paranormal («je ne suis pas parfaite, je suis humaine», dira-t-elle au cours de la même interview), dont chaque nouvelle apparition donne l’impression que toute son énergie a pour vocation de l’aider à survivre. En réflexe défensif, c’est toute une rhétorique du double et de l’altérité que met en scène la chanteuse : dans six de ses derniers clips, Britney Spears apparaît démultipliée, étrangère à son propre reflet, se moquant d’elle-même (dans «Gimme More»), créant des clones à son image (dans «Piece Of Me»), jouant sur la dichotomie vie privée / vie publique dans «If U Seek Amy», ou allant jusqu’à se battre avec son double dans «Hold It Against Me», quand elle n’incarne pas plusieurs figures de prédatrice, comme dans «Toxic» ou «Womanizer». Autant de façons de dire qu’elle veut maintenir la distance, qu’elle ne peut être saisie. Mais, et c’est là un nouveau paradoxe, certains textes font directement écho à sa vie : «Overprotected», qui parle de son besoin d’être indépendante ; «Lucky», qui raconte la solitude qui accompagne la célébrité ; «My Prerogative», injonction à la laisser vivre sa vie ; «Piece Of Me», qui met en abyme le harcèlement médiatique dont elle est l’objet. Une façon de conjurer le mauvais sort, de signifier que chaque heurt est un obstacle à dépasser. Une obsession de la chute et du moment où l’on se relève qui va se nicher jusque dans un mouvement de danse : le 25 mars, quand elle interprète «Hold It Against Me» sur scène, elle exécute un pas qu’elle n’avait pas reproduit depuis... sa prestation de «Gimme More», en 2007. «Everytime I try to fly, I fall», chante-t-elle dans l’un des derniers textes qu’elle a écrit, «Everytime», où elle évoque le suicide. Il y a, chez Britney Spears, un retour compulsif vers le morbide, vers la mise en danger. Un rappel perpétuel que la fin est sans doute plus proche qu’on ne veut bien le croire. L’impression, comme sur la pochette de l’album Circus, qu’elle marche sur un fil duquel elle pourrait tomber à chaque instant. Et une hyper-fragilité qui mène au divertissement pascalien, qui se noie ici dans une sexualité surabondante, sur-exprimée jusqu’à la caricature. Parce qu’on mourra tous, il faut danser jusqu’à ce que le monde disparaisse («Keep on dancing till the world ends», entonne-t-elle dans son nouveau single «Till The Worlds Ends»). Et puis faire l’amour, encore et encore, pour se rappeler qu’on est vivant. Mais chez Britney Spears, la libido mise en scène en public tranche avec celle de la vie privée, où son physique n’a rien à voir avec celui photoshopé et maquillé de ses clips et photographies. Elle a beau mimer des coïts à chacune de ses apparitions dansées, Britney Spears n’aurait pas pu trouver titre plus oxymorique que «Femme Fatale» pour son nouvel album. La femme fatale est par essence une figure sanguine et forte. Britney Spears, elle, oscille entre la femme privée dont le regard triste court d’une image à l’autre - voir son dernier clip, «Hold It Against Me», où le maquillage noir renforce l’impression de mélancolie - et la Britney Spears sur scène et papier glacé, évanescente, qui ne s’appartient plus. Comme en témoigne la fin de la chanson «Shattered Glass», sur son album Circus, où elle répète huit fois «glass». À chaque nouvelle occurrence, le mot se désagrège, se casse, disparaît, pour ne plus laisser place qu’à des «oh oh» aigüs, avant que le bruit d’un verre qui se brise ne résonne. Il n’y a plus personne. B.G. 48 / MUSIQUE / PARCEQUE#3 Les histoires de Monsieur Lune Avec son nouvel album dans les bacs depuis le 25 avril, Monsieur Lune nous embarque une fois de plus dans son quotidien avec sa guitare son violon et ses balades animées. Attention ! Il pleut des luges... Texte : Carole Sertimoun // Illustration : Camille Walter Connaissez-vous Monsieur Lune ? Peut-être l’avez-vous croisé à Paris au détour de l’Hôtel de Ville l’été dernier au festival Indétendances? Moi ça fait beaucoup plus longtemps que ça que je fréquente cette bande de joyeux lurons. Cela fait longtemps qu’ils me susurrent en concert que la vie c’est dur mais qu’il faut garder le sens de l’humour. Et c’est important de le répéter, parce que sinon on est triste et ça n’en finit plus. Mais ce qu’il y a de meilleur dans Monsieur Lune, ce sont les live. Parce que Monsieur Lune vit par la scène et le contact de son public, et c’est là qu’il donne le meilleur de lui-même. On a un peu l’impression d’être à la maison avec des copains qui vous racontent leurs histoires de cœur au coin du feu, ou sous le ventilateur selon les saisons. Avec quelques blagues de temps en temps pour pas trop plomber l’ambiance quand les sujets deviennent difficiles…. À l’occasion de son nouvel album on a même eu droit à un vrai clip sur la chanson Reviens pas, le "tube" entendu lors des derniers concerts du groupe. Et si à l’écoute de l’album « Il pleut des luges », vous avez envie de fredonner « la la la la la la la la » en réponse à « Reviens pas ! », c’est que c’est bon. Vous êtes contaminés. Mais rassurez-vous, vous n’aurez pas besoin d’antibiotiques pour cette maladie-là. Allez-y, vous risquez rien. La la la la la la la la… C.S. Monsieur Lune, "Il pleut des luges" Papa Luna productions http://www.myspace.com/monsieurlunechante PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / MUSIQUE / 51 Un ete de t Un év én em en festivals Triste de ne pas avoir pu trainer ses boots à Coachella ce printemps, la sensation d'avoir un peu perdu de notre mojo rock n'roll, et pour cause, une line up de rêve, nous en mini short les cheveux dorés par le soleil californien... le pied... enfin c'est fini et on n'y etait pas ! Alors on se console, et on s'attarde sur les autres festivals sexy de l'été. Texte et illustration : Léa C. Bouvet Création graphique : www.mathieudelestre.com + www.mentysdesign.com / Maquette : www.adgraph.fr Espace offert par " PARCE QUE " Le+hipster = VILLETTESONIQUE Quand ? Àu parc de la Villette du 27 Mai au 1er Juin Qui ? Animal Collective, Caribou, Beth Ditto, Sebastian Le+Electro = LES SIESTES ELECTRONIQUES Quand ? Du 23 au 26 Juin à Toulouse On y verra Arnaud Fleurant Didier Yael Naim • AaRON PeteR DOheRty MORiARty • POPOF PAtRice • MOby VitAlic • KlAxONs MORcheebA Gaëtan Roussel • CoCoon Aloe BlACC • shaka Ponk YodeliCe • stRomae alPha Blondy • KATeRine John BuTleR TRio • Iam IsRael VIBRatIon PuGGY • MARK RonSon Cascadeur • Têtes Raides les ogres de Barback Quadricolor • Bernard lavilliers orchestre national de Barbès nasser • The Go! Team Bomba estéreo • Raggasonic Charles Bradley Alice Russell • Keny Arkana Seun Kuti & egypt 80 • Goose The Bewitched hands • Syd Matters Cold War Kids • ebony Bones… toute la programmation > solidays.com Location : Fnac, Carrefour, Géant, Magasins U, fnac.com Virgin, ticketnet.fr, digitick.com et solidays.com Tick’Art acceptés vendredi, samedi et dimanche Avec le soutien du Ministère de la Culture et de la Communication, du Ministère du Travail, de l'Emploi et de la Santé, du Ministère de la Jeunesse, du Ministère des Affaires étrangères, de la Sécurité Routière, d’Eco-Emballages, de la SACEM, de l’UCPA, de l’ADAMI et de France Galop. Le+Déjà Vu = ROCK EN SEINE Quand et combien ? 26-27-28 aout, 109€ On y va pour les Foo fighters, les Arctic Monkeys, Cocorosie, Anna Calvi, the Kills, les Wombats Le+breton = FESTIVAL DES VIEILLES CHARRUES Quand ? du 14 au 17 juillet Combien ? 39€/ jour Avec SNOOP et PULP le jeudi, les Foals le vendredi et aussi Angus and Julia stone, the Shoes, Lou Reed, PJ harvey Où ? à Carheix à 1h de Brest Le+militant = SOLIDAYS Quand ? 24-25-26 juin Combien ? pass 3jours à 54€ On y verra Peter Doherty, Mark Ronson, the Bewitched Hands, Katerine, les Klaxons Le+Mainstream = MAIN SQUARE FESTIVAL Quand ? 1-2-3 juillet à ARRAS Combien ? pass 3jours à 155E (camping compris) Avec les Queen of the stone age , Arcarde fire, Coldplay, Portishead, Limp Bizkit Le+ Déjà Vu #2 = LES EUROCKEENNES Où et quand ? à Belfort (en franche comté) les 1-2-3 juillet Combien ? pass 3 jours + camping 95€ Qui ? Motorhead, Birdy Nam Nam, the Ting Tings, les Arctic Monkeys, Katerine, the do Le + varièt' = LES FRANCOFOLIES Avec Nolwenn, Zaz et Christophe Maé le premier jour mais aussi Jean Louis Aubert, Lily wood and the prick et Katerine Quand ? Du 12 Au 16 Juillet à La Rochelle Combien ?de 28 a 37E par jour Le + sexy = DAYS OFF Quand ? 30 juin eu 10 Juillet Où ? à La Cité de la musique et à Pleyel Pour Tame Impala, Metronomy, Cat Power et les Fleet foxes Et à l'etranger ... Le + « presque complet » = PALEO FESTIVAL à Nyon en suisse Quand? Du 19-24 juillet Pour voir notamment les Strokes, Tame impala, Amy Winehouse, Metronomy, et eddy Mitchell (ouioui) Sinon pour ceux qui ont soif de nouveaux horizons, PRIMAVERA SOUND en Espagne, CALVI ON THE ROCKS, SZIGET à Budapest, THE GREAT ESCAPE à Brighton (GB), SONAR à Barcelone, ou encore RIVER TO RIVER à New York. L.C.B 52 / MUSIQUE / PARCEQUE#3 Une + Une = Brigitte Depuis le temps qu’on l’attend cet album ! Maintenant qu’il est là on ne le lâchera pas et on en profite pour repartir à la découverte de ce joli duo onirique et fantastique. Et si vous ne les connaissez pas encore, méfiez-vous, elles vont vous rendre dingues, dingues, dingues. Lorsque l’on nous parle de Brigitte on a plutôt tendance à penser à la femme d’un vieil ami de la famille. À partir de maintenant ce prénom ne résonnera plus de la même manière, parce-que nos Brigitte à nous (oui, elles sont deux pour le prix d’une) sont bien plus rafraîchissantes qu’un bain de minuit en plein mois de février et bien plus talentueuses que toutes nos tantes Brigitte réunies ! Et puis ces deux-là ont, en plus, le mérite d’avoir rendu une chanson de Joey Starr (Ma Benz) bien plus sensuelle que sexuelle. Aurélie Maggiori et Sylvie Hoarau, respectivement connues pour leurs anciens projets musicaux, Mayane Delem d’un côté et Vendetta de l’autre, se sont toutes deux réunies, en 2008, pour donner vie à Brigitte, ce concept-duo dont le nom rend hommage à Brigitte Bardot, Brigitte Fontaine et Brigitte Lahaie, entre autres, et donc pas du tout à notre tante. Pour notre plus grand plaisir elles nous ont concocté un bel album avec l’aide d’Albin de la Simone et Camille Bazbaz, l’air de rien... Ce précieux opus est disponible depuis le 18 Avril dernier «Et vous, tu m’aimes ?» que l’on ne se lasse d’écouter, de la salle de bain à la salle de gym ! Alors si ce n’est pas encore fait, courrez l’acheter. vacances au bord de la mer » pour la BO du film Thelma, Louise et Chantal en 2010. On voudrait leur panache, une vie effet pellicule périmée depuis 7 ans (mais oui, ce sont celles-là que l’on préfère) dès que la caméra tourne, mais on voudrait surtout Mark Maggiori qui leur a fait, jusque-là, trois clips sans aucune fausse note, et on ne dit pas ça uniquement parce que c’est le divin époux de la blondinette (oui, c’est pour ça qu’ils portent le même nom) ni parce qu’il était le chanteur de Pleymo, mais bel et bien pour son talent... Que peut-on y faire ? On regarde « Battez-vous » en boucle sur Youtube parce que l’on veut la robe rouge et la casquette sur le côté (on est même prêtes à porter les deux ensemble) et puis surtout parce que toutes les histoires d’amours confondues nous font chavirer le coeur. Du coup On valide tout, et plus encore... Alors arrêtez de nous demander pourquoi on est fous d’elles parce que, de toute façon, on vous répondra : « Mais parce que! » C.B. Et puis On aime tellement leur univers complètement décalé, les grosses lunettes, les longues robes et les grandes plumes sur la tête. On a adoré la reprise de la chanson de Michel Jonasz « Les Brigitte Et vous, tu m’aimes ? (3ème bureau- Wagram) Les Jeux PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / JEUX / 55 par Coline Poulette PARCEQUE#3 / MAI-JUIN 2011 / FAUROSCOPE / 57 Fauroscope Faustrologue : Atrus Princeps // Illustrations : Rougerune Bélier Cancer Travail : Vous sentez grandement les troubles de votre entourage professionnel. Un bon déodorant et il n’y paraîtra plus. Argent : Cessez de piquer dans la caisse pour sortir en boîte, ou vous finirez sous un carton. Affectif : Est-ce que ça vous chatouille ou ça vous gratouille ? Dans les deux cas, ça ressemble à des cornes. Bien-être : S’entourer de vieilleries calme les nerfs. Rendez visite à la famille, vous en avez besoin ! Travail : Soyez ouvert au changement dans le domaine professionnel. Changez de café, par exemple... Argent : Si vous êtes du premier décan, vous relirez cette phrase deux fois. Sinon, non. Affectif : ne vous laissez pas intoxiquer par vos amis, le nudisme est un comportement social tout à fait normal. Bien-être : Une cheville cassée, un bras en écharpe… le ski, ça marche mieux avec de la neige. Taureau Lion Travail : Motivation et professionnalisme vous ouvriront des portes sur le domaine professionnel. Enfin, si vous êtes de l’autre décan... Argent : On vous a déjà prévenu dans le dernier PARCEQUE : Les soldes, c’est fini ! Affectif : Côté cœur, de nouvelles têtes apparaissent. Avec juste un as ou un neuf en plus, ça fait une quinte flush ! Bien-être : Votre jardin secret est menacé. Mais entre votre blog, facebook, myspace et spotify, ça ne change pas grandchose. Gémeaux Travail : Votre force de volonté vous permet de résoudre les problèmes les plus épineux ; mais pour l’ennui, elle ne peut rien. Argent : Vos économies de bouts de chandelle sont très efficaces : vous pourrez enfin garnir entièrement votre lustre de cristal viennois ! Affectif : Dormir avec quelqu’un est un des actes les plus intimes qui soient, mais méfiez-vous des traces de drap sur la joue au réveil. Bien-être : Vous sentirez le besoin de vous remettre au dessin. Puis de faire disparaître à tout jamais ce bout de papier compromettant. Travail : Votre entrain au travail fait plaisir à voir ! À votre patron, tout du moins… Argent : Entendre le coucou avec de l’argent en poche garantit une année sans soucis… c’est là votre dernier espoir. Affectif : Des envies de réameublement de l’appart vous prendront. Nouveau plumard, nouvelles étagères, nouveau mec ! Bien-être : Il est temps d’ouvrir la piscine et de prendre le soleil. J’peux venir ? Vierge Travail : Pour vous, pas de prédiction là-dessus, lancez un dé 12 et reportez-vous au signe correspondant. Si vous n’avez pas de dé 12, mettez-vous aux jeux de rôles. Argent : Du fric, de l’oseille, des pépettes, des brouzouffes, de la maille, de la thune… vous avez beaucoup de vocabulaire, dommage que la matière ne suive pas. Affectif : La confiance jouera un rôle important dans votre couple : qui a fini le dernier cookie ? Bien-être : Contre la chaleur, le stress, l’irritation, la peau, la fatigue et l’haleine chargée, pensez au thé. Oh, et buvez-en, penser ne suffit pas, en fait. Balance Travail : Vous serez victime d’un reminament… remanuement… reuni… viré, quoi. Argent : Prenez le carré de votre âge, soustrayez-y celui de votre conjoint, et multipliez par votre différence d’âge. Ça fait beaucoup de sous ? Affectif : Avec ce soleil, c’est la période des barbecues ! Écartez la sauce piquante de l’huîle solaire, on ne sait jamais ! Bien-être : Des pompes. Des tractions. Des abdos… Qu’il est plaisant de regarder les autres souffrir pour être beaux ! Scorpion Travail : Votre métier vous rend malade, ces temps-ci... En même temps, pirate avec le mal de mer, c’était pas très malin. Argent : Votre banquier refusera de changer vos billets : soit disant, « monopoly » n’est pas un pays valide.. Affectif : Amusez-vous bien avec vos partenaires, mais n’oubliez pas de les détacher de temps en temps, qu’ils se nourrissent… Bien-être : Ma grand-mère préconise des infusions d’orties. C’est peut-être bon pour ce que vous avez… Sagittaire Travail : Aaaaaah, le farniente, quel plaisir !!! si seulement les gens arrêtaient d’appeler ça « chômage » ! Argent : Boooon, les amis et la santé, somme toute, c’est le plus important, non ? Affectif : 1110100 1101111 1110101 1110100 1110110 1100001 1100010 1101001 1100101 1101110. Bien-être : Une croisière en bateau ? pensez au scorbut, mangez du citron ! Serpentaire Travail : Vous êtes sûr que c’est un signe valide ça ? Argent : Nan, mais ça pue le truc commercial, là, treize à la douzaine ! Affectif : Pis serpentaire, c’est quoi, l’espèce de piaf, là ? On essaie encore de nous faire avaler des couleuvres ! Bien-être : Pis quoi qu’il en soit, je préfère Griffondor. Capricorne Travail : Il n’y a pas de sot métier… il n’y a que de sottes gens- pas taper, pas taper ! Argent : Soyez prêts à saisir toutes les opportunités… ça ne fait jamais de mal, de toutes façons. Affectif : Il est temps d’apprendre à prendre sur soi. Et je ne parle pas de poids. Bien-être : Natifs du premier décan, vous aurez envie d’un chat. Hélas pour vous, leur cuisine n’est pas autorisée en France. Verseau Travail : 42. Argent : Vous préférez l’or blanc, mais bon, l'argent : tout va bien pour vous Affectif : Vous rencontrerez enfin quelqu’un qui pense à vous autant que vous-même ! Bien-être : Les excès de ces derniers temps se voient sur la balance… heureusement, vous êtes verseau. Poisson Travail : Vous aurez l’impression de tourner en rond, changez d’air, tournez en carré ! Argent : Faites-vous plaisir tant que vous voulez… De toutes façons, la fin du monde est proche. Affectif : Ces temps-ci, c’est l’amour fou, chez vous… entre vos hamsters, du moins. Bien-être : le yoga… c’est has-been. Mais ça marche. Mais c’est trop mainstream… dilemme de hipster.