Degagisme vs Revolution - Collectif MANIFESTEMENT

Chapitre 7. Dégagisme versus Révolution
– Dans dégagisme, il y a « gag » !
– Et alors ? Dans révolution, il y a bien « vol ».
« Si ce lien [de la république] se rompait, si César,
dégagé par quelque révolution [sic], refusait de le reprendre,
cette unité, ce faisceau d'un grand empire volerait en éclats. »
Sénèque1
La révolution, c’est l’opium des intellectuels.
Jean-François Somcynsky
Le dégagisme, c’est l’opium des intellectuels.
Collectif MANIFESTEMENT
Qu’est ce qu’une révolution ? Et par la négative, que n’est pas le dégagisme ? Comme
n’importe quel nouveau fait d’actualité, par la pression du maintenant et tout de suite, les
événements sont souvent relayés par des colorations et des étiquettes peu commodes et souvent
étriquées. La presse a d'ailleurs usé du mot révolution dès le début des manifestations tunisiennes
et des soulèvements populaires qui ont suivi dans les pays limitrophes. Et pourtant le dégagisme
se différencie profondément de la révolution. Mais il ne s'agit pas uniquement de différencier les
deux catégories de révolte à l'oppression politique mais aussi de chercher, au travers de l'histoire,
des exemples précurseurs du dégagisme ou du moins d'une forme primaire de dégagement. Il ne
s'agit pas uniquement de différencier les deux catégories de révolte à l'oppression politique, mais
bien de chercher, au travers de l'Histoire, des exemples précurseurs du dégagisme ou du moins
d'une forme primaire de dégagement. Il s'agit de faire l'archéologie ou l'histoire de son idée et de
son mouvement. Ainsi, quelques événements internationaux peuvent être perçus comme
dégagistes, mais jusqu'à quel point? A-t-on déjà été dégagiste? Ben Ali ou Battista?
Il s'agira de trouver les indices des voies entreprises et suivies, chercher les pistes d'un
dégagisme latent ou de l'archétype du joueur dégagiste de l'Histoire : concevoir la recherche
dégagiste non pas comme doctorale, mais comme l'élaboration d'un roman policier : Sherlock
dissident et amoraliste. On pourra se référer aisément en fin de chapitre au tableau comparatif
Révolution versus Dégagisme qui reprend une liste de critères selon laquelle nous avons
interrogé chaque événement étudié et distribué les points, à l'image d'un arbitre stoïque, passible,
lui aussi, d'une dégagement imminent !
1.Une Antiquité qui dégage :
1.L’Ostracisme grec : le cas de Thémistocle à Athènes (-471):
Le mot "ostracisme" vient d'ostrakon ("coquille" ou "tesson" (de poterie)). C'est le procédé par
lequel on écartait des citoyens, jugés dangereux, des affaires politiques de la cité. L'ostracisé
perdait ses droits civiques et était banni de la cité pendant une durée de dix ans, ses biens étant
conservés. L'ostracisme pouvait frapper tout homme exerçant une fonction politique mais surtout
ceux qui étaient élus et non pas tirés au sort, en particulier les stratèges.
Après les guerres médiques, la mesure frappa surtout des hommes politiques en vue. Les plus
célèbres furent Miltiade et Thémistocle, dont le génie militaire et la clairvoyance politique
avaient pourtant été décisifs dans la victoire contre les Perses. Mais pourquoi un personnage à
l'aura de Thémistocle se retrouve ostracisé? Les avis des historiens sont partagés. D'une part, son
1
Cité dans Étienne Prosper Dubois-Guchan, Tacite et son siècle, tome 2, 1861, p. 435.
http://books.google.be/books?id=TYrDAhIPO8UC&pg=PA435
ostracisme est concomitant à la montée de Cimon, son adversaire politique, pour qui l'ennemi
principal d'Athènes est, au contraire de ce que Thémistocle défend, non pas Sparte mais bien les
Perses. D'autre part, une deuxième thèse émerge selon laquelle les Athéniens de l'époque se
méfiaient naturellement du trop grand prestige qui entourait certains hommes politiques
éminents, suspectés de faire passer leur gloire et leurs ambitions personnelles avant les intérêts
de la cité. Aristide, devenu trésorier général, avait démontré que Thémistocle avait détourné une
partie des richesses de la cité. De là découle son appellation d'Aristide « le Juste » qui lui valut
malgré tout le droit d'être ostracisé plus tard. Plutarque évoque d'ailleurs son ostracisme par une
anecdote interpellante: « alors qu'on votait à Athènes pour son ostracisme, un paysan illettré
demanda à un homme distingué de l'aider à inscrire sur son tesson (ostrakon) le nom d'Aristide.
L'homme lui demanda ce qu'il reprochait à Aristide. « Rien » répondit le paysan. « Je ne le
connais même pas, mais j'en ai assez de l'entendre partout appeler "Le Juste". » Suite à cela,
Aristide - car c'était lui l'homme distingué - écrivit honnêtement sur le tesson le nom qu'on lui
demandait.2 » Thémistocle ostracisé, il se rallie aux Perses, offrant à Cimon l'occasion de
prendre les rênes mais il sera lui aussi ostracisé quelques années plus tard. Le dernier ostracisme
fut prononcé en - 416 3.
Voilà donc déjà quelques dégagements interpellants. Mais malgré les apparences, une main
invisible semble influencer le choix de l'exilé et laisse pressentir déjà le futur remplaçant.
Dégagisme latent mais à parfaire.
Révolution: 6, 9, 10, 11, 19.
Dégagisme: 1, 2, 3, 4, 5, 8, 10, 14, 16, 17, 18.
2.Le Pétalisme de Syracuse :
Homologue de l'Ostracisme athénien, le pétalisme est une sentence populaire par laquelle les
Syracusains (ville de Sicile habitée par les Grecs) condamnaient à un exil de cinq ans l'un des
citoyens dont la puissance pouvait représenter un danger pour la liberté publique. Les citoyens
avaient donc le droit de se bannir les uns les autres en se donnant une feuille d'olivier sur laquelle
était écrit le nom de celui que l'on bannissait. « L'amour excessif de la liberté avait introduit une
pratique si étrange. Valère Maxime l'appelle une démence publique. Diodore de Sicile nous
apprend que le Pétalisme fit fuir de Syracuse presque toutes les personnes recommandables par
leur naissance, leurs richesses, ou leur mérite personnel; que certains s'exilèrent
volontairement, dans la crainte qu'on leur présentât la feuille d'olivier. Il faut convenir pourtant
que cette coutume [...] préservait les Syracusains de l'orgueil d'une extraction illustre, du faste
insolent de l'opulence, et des entreprises des grands talents. Trop souvent les vertus, les services
et les belles actions ont été des degrés pour monter à la tyrannie, comme les grands biens et
l'éclat de la naissance. [...] 4».
Toutefois, le pétalisme sera abrogé peu de temps après son institution à cause d'une méfiance
devenue extrême entraînant exils calculés, abus et condamnations à tout-va qui éloignaient de la
ville et des emplois publics des personnes considérées comme valables5.
Le principe même du dégagement rapide et efficace trouve donc ses sources sur cette même terre
qui accueille aujourd'hui des milliers de tunisiens, dégagistes auto-dégagés des temps modernes.
Après la démocratie, la Grèce nous enseignerait-elle le Dégagisme ? Mais le dégagement
pétaliste, devenu institution, se traduit en un simulacre de Révolution permanente, venant saper
la base de ce dégagisme primaire mal employé.
Révolution: 16.
Dégagisme: 1, 2, 3, 5, 6, 8, 9, 10, 12, 14, 15, 16, 17, 18, 19.
2
Plutarque, Vie d'Aristide, VII, 7-8.
http://www.musagora.education.fr/citoyennete/citoyennetefr/citoyens-perte-des-droits.htm
4
Dictionnaire universel des sciences, morales, économique, politique, diplomatique, ( M. Robinet), t.26,
Londres: 1782. (cfr. Www.books.google.be)
5
Diodore de Sicile, La Bibliothèque historique, livre XI, chap.86.
http://bcs.fltr.ucl.ac.be/them/themistrad1.htm
3
3.Spartacus et la Guerre servile :
Esclave et gladiateur, originaire de Thrace, Spartacus dirige la Troisième Guerre servile en Italie
du Sud entre -73 et -71. En -73, 200 gladiateurs parviennent à fuir et seront rapidement rejoints
par des gladiateurs d'autres écoles, des travailleurs agricoles, des esclaves fugitifs et des hommes
libres qui se réfugieront sur les pentes du Vésuve. Trois hommes seront élus chefs parmi lesquels
Spartacus. Une armée se forme, ravitaillée régulièrement en hommes, principalement des
esclaves siciliens exploités dans les grands latifundia (exploitations agricoles) du Sud. Spartacus
engage alors une réelle guerre contre Rome et parvient à remonter vers le Nord de l'Italie. Après
de nombreuses victoires, facilitées partiellement par les sous estimations de Rome, le Sénat
romain confère à Crassus le commandement d'une armée de quatre légions qui parviendra, après
plusieurs batailles, à prendre le dessus sur l'armée d'esclaves et à tuer Spartacus. Admiré tant par
Karl Marx6 que par Che Guevara, Spartacus représente l'une des premières figures du
mouvement social, prêtant son nom à la gauche communiste allemande de Rosa Luxemburg et
Karl Liebknecht (cf. point 3.2.).
Révolution: 1, 4, 5, 10.
Dégagisme: 1, 2, 3, 6, 8, 9, 14, 15, 16, 17, 19.
4.L'auto-dégagement de Néron et la chute des trois empereurs suivants:
Nul n'ignore qui fut cet empereur romain à l'aura machiavélique, mêlant folie artistique et
despotisme. Mais peu sont ceux qui en connaissent la chute, le départ, ou le dégagement. En
effet, il s'agit bien là d'un suicide démissionnaire. Néron, dont la popularité avait chuté
gravement, suite aux pressions politiques et populaires, décide de s'auto-dégager avant même
d'être démis officiellement de ses fonctions par le Sénat. Il fuit sa villa et songe d'abord à la
noyade dans le Tibre. Apprenant sa fuite, certains membres de son entourage se couvrent déjà du
bonnet phrygien, alors symbole de liberté7. Face au discrédit et aux menaces des supplices que
lui réservait le Sénat (le culleus : recouvert d'une cagoule, mis dans un sac de cuir dans lequel
étaient introduits des animaux, le supplicié est jeté dans le Tibre), il décide enfin de se retirer
dans la villa de campagne de son fidèle affranchi Phaon et se donne la mort d'un coup de couteau
à la gorge, le 9 juin 688. L'année 69 connaîtra la première guerre civile de l'Empire romain et
trois empereurs se suivront (Galba, Othon, Vitellius) avant l'instauration d'une nouvelle
dynastie. Et c'est la méfiance des citoyens et des prétoriens, suite à la chute de Néron, qui fera
tomber d'abord Galba (assassiné par Othon), puis Othon qui se donna la mort par un coup de
couteau dans le cœur, et enfin Vitellius qui fut lapidé et jeté dans le Tibre. Si la pratique
rapprochée de ces dégagements peut faire penser à l'efficacité d'une méfiance du pouvoir
purement dégagiste, mais le caractère principal reste révolutionnaire puisqu'un nouveau pouvoir
s'incarne dès la condamnation du précédent. Toutefois, ce système laisse entrevoir une idée de
dégagement dont la méthode semble archaïque. Pourquoi se dégager par la mort alors qu'il
suffirait simplement de laisser la chaise vide?
Révolution: 1, 4, 5, 6, 7, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 19.
Dégagisme: 2, 9, 18.
2. Les Révolutions modernes :
6
Karl Marx raconte à son ami Engels dans une lettre du 27 février 1861: « [...] Pour me détendre, j'ai lu les
Guerres civiles à Rome d'Appien [...] On y voit que Spartacus est le plus splendide des hommes de l'histoire antique.
Un grand général (pas comme Garibaldi), un noble personnage, vraiment représentatif du prolétariat de
l'Antiquité. » Tiré des Letter from Marx to Engels In Manchester, 27 février 1861.
7
Il est d'ailleurs interpellant de le retrouver plus tard comme symbole de la liberté durant la Révolution
française, faisant appel à celui porté en Grèce ou à Rome par les esclaves affranchis.
8
Guy Achard, Néron, Coll. Que sais-je ?, Paris : 1995.
1.La Révolution américaine:
Il s'agit du soulèvement des treize colonies américaines contre le pouvoir britannique et la
soumission à des taxes imposées sans consultation. Les colonies se révoltent et, le 4 juillet 1776,
adoptent la Déclaration d'Indépendance et déclarent la guerre à la Grande Bretagne. Soutenus
d'abord par des volontaires français, puis par Louis XVI, l'Espagne et les Provinces Unies, les
colonies américaines remportent le conflit et la Grande Bretagne finira par reconnaître
l'indépendance des États-Unis en 1783. Le nouveau pays se donne une Constitution (1787),
inspirée de la philosophie des Lumières et George Washington sera élu président en 1789.
Si elle est reconnue pour son caractère libertaire et libérateur, ouvrant une nouvelle ère, celle de
la liberté et des droits de l'homme, il s'agit bien là d'une révolution qui renverse le pouvoir, le
réorganise, et qui le dégage pour mieux le remplir. La preuve, les premières années de la jeune
indépendance seront parcourues de luttes et oppositions politiques internes autour des questions
sociales. L'élément interpellant pour notre étude, c'est en effet la nouvelle connotation du
concept de « révolution » que la révolution américaine apporte. Si elle sera un modèle,
notamment pour la Révolution française, c'est bien parce qu'elle marque l'instauration d'un
nouveau système et qu'elle sera perçue comme événement positif et non plus connoté
négativement comme aux siècles précédents. Toutefois, « on s’accorde à dire qu’elle a été plus
une évolution qu’une révolution dans la mesure où il n’y eut pas de transformation radicale des
institutions 9». Autrement dit : une simple révolution.
Révolution: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19.
Dégagisme: NÉANT
2.La Révolution française:
« Il n'y a qu'une révolution, c'est la Révolution française 10»
Faut-il préciser quelles furent les causes et les conséquences de cette révolution moderne qui fait
la fierté de la France depuis déjà deux siècles et par laquelle nos maîtres d'école ont su graver au
moins une date à tout jamais dans nos esprits? 1789, l'incontournable ! Mais nous ne ferons pas
cet outrage au lecteur que nous renvoyons directement aux conclusions de son étude. Aucun
Dégagisme à l’horizon, car si dégagement il y a, celui d’une royauté éloignée de la réalité
populaire, il se solde, à l'image de celle qui la précède et l'inspire, par la reproduction des
clivages sociaux et par l'instauration d'une supériorité nouvelle, celle de la bourgeoisie sur le
Tiers État.
Révolution: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19.
Dégagisme: NÉANT
3.Des Révolutions contemporaines :
1.Les Révolutions russes de 1917:
Il s’agit d’une révolution aux multiples visages, complexe dans son étude notamment par les
récupérations politiques qui suivront tant le mouvement de révolte initial (Lénine, Trotski) que
l’instauration d’un nouveau système totalitaire (Staline). Les causes en sont nombreuses, mais
principalement économiques. On parle de Révolutions, au pluriel, car il s’agit d’une révolution
en deux temps et comportant des acteurs quelque peu différents. Tout d’abord, le soulèvement de
février 1917, coup d’État calculé, rapide et efficace qui parvient à prendre d’assaut le palais
d’Hiver et à faire prisonnier le Tsar Nicolas II et sa famille. Fin de l’Ancien Régime, Engels lui9
Carine Lounisi, Penser la Révolution américaine en France (1778-1788). Enjeux philosophiques et
historio-graphiques, Cercles 16.2, Université Paris III : 2006.
10
Sylvain Lazarus, La catégorie de Révolution dans la Révolution française, Les Conférences du perroquet,
n°15, mars 1988.
même l’annonçait déjà en 1891 : « En Russie, il y a déjà famine; en Allemagne, il y aura famine
dans quelques mois; les autres pays souffriront moins, [...].En revanche, le tsarisme traverserat-il cette crise ? J'en doute. Il y a trop d'éléments rebelles dans les grandes villes, surtout à
Pétersbourg.11 ». Bien que considérée et vendue par la propagande comme une révolution
populaire, la révolution de février 1917 fut bel et bien une révolution bourgeoise, organisée et
menée par un groupe restreint de bolcheviques, pour la plupart intellectuels. Parallèlement, des
Soviets (conseils) d’ouvriers s’organisent de manière spontanée dans tout le pays et englobent les
ouvriers agricoles et les soldats. « Nous assistons à ce phénomène qu’on a appelé le double
pouvoir. D’un côté un gouvernement à caractéristiques bourgeoises, pseudo-démocratique,
incapable de créer ses institutions et d’un autre côté, le Comité exécutif des soviets, sommet
d’une pyramide d’organisations élémentaires des couches inférieures de la société.12 » La
deuxième révolution se déroule en octobre 1917, dirigée par Lénine cette fois et fort de centaines
de Soviets et de plus d’un million de soldats déserteurs qui refusent de mener une double guerre.
L’heure est à la Révolution et non pas au conflit mondial qui décime et affame encore plus le
peuple russe. Les Thèses d’Avril de Lénine, et ses mots d’ordre « La paix à tout prix !», « La
terre aux paysans ! », « Tout le pouvoir aux Soviets ! », font du parti bolchevique, lors de la
révolution d’octobre, le plus représentatif de la volonté des masses. Toutefois, malgré ces
principes basiques, nous savons que si la révolution se vendait pour libertaire et démocrate, le
modèle des Soviets correspond d’avantage à une démocratie primaire qui aboutit rapidement à la
mise en place d’une élite forte et clairvoyante. La porte est désormais ouverte au futur
totalitarisme stalinien.
Révolutions: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19.
Dégagisme: NÉANT
2.Les spartakistes et la Révolution socialiste allemande 1918-1919:
La Ligue Spartakiste est fondée en Allemagne par Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht durant la
Première Guerre Mondiale. Elle s'oppose au caractère impérialiste de la guerre et appelle à
l'abdication de l'empereur et à la révolution socialiste sous forme de comités ouvriers. Après la
révolution de novembre, qui parvient à renverser Guillaume II, en même temps que la Ligue
déclare la République socialiste, appuyée par bon nombre d'ouvriers, on proclame du balcon du
Reichstag la naissance de la République de Weimar. En décembre 1918, la Ligue et d'autres
groupes socialistes s'unissent, donnant naissance au Parti communiste d'Allemagne (KPD) qui
organisera des manifestations et des grèves contre le nouveau Gouvernement. La répression sera
violente et les têtes pensantes du mouvement spartakiste seront emprisonnés et tués. Les
manifestations, les grèves et les affrontements avec les forces armées continueront encore durant
les quelques mois qui suivront la mort de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht mais finiront par
être ravalés par la République, armée d'une toute nouvelle constitution. Le KPD sera interdit et
se transformera en 1920 en KAPD. Si de prime abord nous pourrions voir une correspondance
parfaite entre la définition de Révolution et le mouvement spartakiste, une étude plus
approfondie des écrits de Rosa Luxemburg, et des mots d'ordre de la Ligue spartakiste, semble
receler un dégagement en faveur du développement volontaire de comités ouvriers. « La Ligue
spartakiste ne prendra jamais le pouvoir que par la volonté claire et sans équivoque de la
grande majorité des masses prolétariennes dans l'ensemble de l'Allemagne. Elle ne le prendra
que si ces masses approuvent consciemment ses vues, les buts et les méthodes de lutte de la
Ligue spartakiste 13». Un dégagement qui demande donc un temps de réflexion bien que l'on
propose déjà au peuple une alternative. Tuée dans l'œuf, nous ne pouvons prévoir les suites d'une
11
12
13
Extrait de l’article rédigé et édité par Engels dans Le Socialiste, le 12 septembre 1891.
André Ferrat, « La Révolution Russe », dans Etudes socialistes, n°15-16, 15 juillet 1947.
Rosa Luxemburg, Que Veut la Ligue spartakiste? Programme du Parti Communiste allemand, 1918.
http://www.marxistsfr.org/francais/luxembur/spartakus/programme.htm
réussite imaginaire. Résultat rappelant le modèle russe? Nous ne pouvons en être surs. Mais si
révolution il y a, elle porte en elle quelques germes dégagistes.
Révolution: 1, 4, 5, 6, 8, 9, 11, 13, 14, 15, 17, 18, 19.
Dégagisme: 2, 4, 5, 7, 10, 12.
3.Révolution et Anarchisme en Catalogne (1936)14 :
Le début de la révolution anarchiste catalane se déroule en concomitance avec le coup d’État de
Franco et la guerre civile espagnole. Il s’agit d’une révolution libertaire conduite par les
travailleurs espagnols dans les zones ou les généraux tentaient de soumettre la population à leur
pouvoir. Mais il ne s’agissait en aucune manière de défendre les valeurs républicaines, bien au
contraire, les travailleurs, organisés en syndicats15, demandent et mettent en place une
collectivisation de très larges secteurs de l’industrie, des services et de l’agriculture. Seules les
banques y échappent en passant sous le contrôle du gouvernement.
Qui dit anarchisme pense souvent groupuscules violentes, chaotiques, non organisés et au
message flou. Il n’en va pas ainsi dans l’Espagne de 1936 où le syndicat anarchiste pouvait
compter plus d’un million d’adhérents sur une population de vingt quatre millions. Le
mouvement de collectivisation aurait concerné jusqu’à deux millions et demi de travailleurs qui,
sans en avoir reçu le mot d’ordre du syndicat, s’organisent au sein même des divers secteurs
économiques et abolissent la propriété privé au sein des entreprises. « En quelques jours, 70%
des entreprises industrielles et commerciales étaient devenues propriété des travailleurs, dans
cette Catalogne qui concentrait à elle seule les deux tiers de l’industrie du pays ». Dans les
innovations du système anarcho-syndicaliste catalan, nous pouvons retrouver des points
communs avec les principes communistes bien que ces derniers seront les premiers adversaires
du mouvement : collectivisation de la propriété privé et des biens appartenants à l’État,
égalisation des salaires, abolition de l’argent pour ce qui concerne le commerce interne,
rationnement des denrées alimentaires par l’instauration de bons permettant l’acquisition, non
pas de moyens de production, mais seulement de biens de consommation en quantité limitée,
concertation populaire directe organisée en comités ouvriers et populaires. Mais au contraire du
« modèle étatique soviétique, l’entrée dans la collectivité, perçue comme un moyen de vaincre
l’ennemi, était volontaire. Ceux qui préféraient la formule de l’exploitation familiale
continuaient à travailler leur terre, mais ne pouvaient plus ni exploiter le travail d’autrui ni
bénéficier des services collectifs »16. Malgré le succès des premiers mois et la confiscation des
armes de l’armée républicaine, le mouvement peine à se défendre sur le terrain et prendra fin en
1937 sous les coups des factions communistes, principalement commandités depuis la Russie,
pour laquelle la Catalogne risquait de remettre en question la gestion étatique stalinienne, et de
Franco qui ne fera que leur donner le coup de grâce17. Dégagement du pouvoir du bas et par le
bas, les initiatives populaires, pas toujours politisées, nous poussent à nous interroger sur l'issue
possible et à long terme d'un tel dégagement.
Révolution: 4, 5, 7, 8, 13, 15, 19.
Dégagisme: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 9, 10, 11, 14, 16, 17.
4.La révolution algérienne ou le dégagement de la France (1954-1962) :
14
15
Nous renvoyons le lecteur au chapitre 14 : Dégagisme versus Anarchie.
CNT : Confédération nationale du travail, anarcho-syndicaliste et l’UGT : Union générale de travailleurs,
socialiste
16
Frédéric Goldbronn, Frank Mintz, Quand l’Espagne révolutionnaire vivait en anarchie, dans Le Monde
Diplomatique, décembre 2000.
17
Georges Orwell, Hommage à la Catalogne , Londres : 1938.
Appelée aussi la Sale guerre ou la Guerre sans nom, la révolution algérienne visait à dégager la
France du pouvoir et à obtenir indépendance. Les origines des deux grands mouvements qui
menèrent la lutte remontent aux massacres de Sétif et Guelma en 1945 lorsque, à l’aube de la
Libération, les français d’Algérie manifestent leur joie dans les rues. Le peuple algérien,
premiers de corvées dans les tranchées de la Deuxième Guerre mondiale, sortent pour l’occasion
les premiers drapeaux algériens et pensent pouvoir s’octroyer le droit de crier aussi : Libération !
S'ensuivra une répression sanglante de la part de l'armée française en fête. La révolution
s'organise, la guerre commence en 1954, mais le FLN (Front de Libération Nationale), qui
ressortira comme le héros de la guerre, opère tout d'abord un tri d'opinion dans la population
massacrant des villages entiers pro MLN (Mouvement de Libération Nationale, qui se veut
démocrate et veut utiliser les armes politiques françaises pour parvenir à des résolutions non
sanglantes). Le combat est double, d'une part armé, d'autre part de propagande et de
sensibilisation de l'opinion publique internationale. Et si la guerre sur le sol algérien donne raison
aux parachutistes français, le Front du Nord, celui des réseaux d'aide et de soutien à la lutte
algérienne, - parmi lesquels figurent bon nombre de progressistes de gauche belges et français,
notamment au sein des Collectif d'aide aux détenus algériens-, mènent une guerre d'opinion qui
finira par forcer la main au Général De Gaulle, contraint d'accorder l'autodétermination à
l'Algérie le 1er juillet 1962. Mais l'Algérie payera rapidement les pots cassées d'une guerre
menée par des groupes armés qui parviendront à installer un régime militaire qui fera bon
nombre de déçus. La charte de 1963 est d'ailleurs explicite quant au pouvoir fort qui vient
remplacer l'ancien. Elle stipule que « seul le Parti du FLN est l'organe moteur puissant, ce
dernier tire sa force du peuple peut parvenir à briser les structures économiques du passé et y
substituer un pouvoir économique exercé démocratiquement par les fellahs et les masses
laborieuses.18 ». La libération du peuple algérien se solde par l’instauration d’un régime militaire
sous couvert d'une République pseudo-démocratique.
Révolution: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19.
Dégagisme: NÉANT
5.Le Walen Buiten ! :
Réminiscence quelque peu cynique et sarcastique, mais comment ne pas évoquer cette anecdote
tendrement belge et dans laquelle l’écho dégagiste pourrait raisonner ? Le mot y est, certes, mais
il ne s’agit bien entendu pas de vider la place afin de la laisser libre. Bien au contraire, les
dégagés seront aussitôt remplacés. Quant aux motivations de ce cri, quelques fois accompagnés
de l’un ou l’autre pavé, elles font d’avantage penser à celles de la révolution (droit du sol,
unilinguisme régional, priorité aux étudiants autochtones,…). Voilà donc l’archétype d’un
Dégage non-dégagiste. Le Dégagisme n’est donc pas uniquement une question de langue!
Révolution : 1, 3, 4, 5, 6, 7, 9, 13, 14, 15, 16, 17.
Dégagisme : 1, 2.
6.Les années de plomb :
On qualifie généralement ainsi les années '70 bien que le mouvement débute déjà en Allemagne
en 1967-68 et que la Belgique connaîtra son pic de violence entre 1983 et 1986. Elle est
caractérisée par l’émergence de mouvements et de groupes ayant choisi la violence comme
forme d’action politique. Un ensemble de groupes armés, issus principalement de la lutte
ouvrière, déclarent une véritable guerre clandestine à l’État et plus particulièrement à la
démocratie libérale qui régit les lois du commerce et du travail19.
18
République Algérienne Démocratique et Populaire, Constitution de 1963.
http://www.conseil-constitutionnel.dz/Constituion1963.htm
19
Carmela Lettieri, « L’Italie et ses Années de plomb. Usages sociaux et significations politiques d’une
dénomination temporelle » dans Mots. Les langages du politique , 87, 2008.
L'un de ces mouvements le plus médiatisés est celui des Brigades Rouges, en Italie. Ce groupe
armé se revendique de la lutte politique de la classe ouvrière, contre le travail salarié qui écrase
l'humain et le fait taire politiquement. Mais le passage à la phase armée, et principalement aux
assassinats de personnages politiques, tel Aldo Moro, pour ne citer que le plus connu, retranchent
les Brigades Rouges dans leur silence clandestin, l'éloignant des revendications du peuple. « Les
Brigades Rouges en sont progressivement arrivées à ce que l'on pourrait appeler une
schématisation de plus en plus marquée, des camps qui s'opposaient, qui se faisaient la guerre.
Elles ont fini par intensifier de plus en plus leurs actions, si bien que toute personne portant un
uniforme était nécessairement un ennemi.20 » Par la multiplication des crimes politiques,
l'Organisation semble s'éloigner de plus en plus de la société et mener une guerre privée contre
l’État. Les témoignages rétroactifs recueillis par Loredana Bianconi viennent illustrer, preuve à
l'appui, notre définition de la révolution dans le sens de remplacement du pouvoir tout en voulant
s'en détacher. « On a fini par perde toute référence politique et donc la légitimation de notre
combat. En continuant à nous éloigner des exigences sociales, des rapports étroits qui nous
unissaient, à ce qui s'exprimait en dehors de nous, nous n'aurions pas pu continuer à prétendre
être la référence, les représentants des besoins politiques de la classe ouvrière. En fait, nous
n'étions plus à l'écoute des besoins des gens. » Dans les Brigades Rouges on a prétendu que si la
violence était nécessaire à la cause elle ne serait jamais celle employée par l’État, or, déjà
organisés en gouvernement et milices régionales, ils en arriveront même à la création de prisons
populaires, de tribunaux, et bien entendu de critères d’exécution. Un leurre que certains membres
ont pu ressentir dès les débordement et la montée en flèche de la violence. De même, un souvenir
d'une intervenante nous laisse comprendre aisément l'amalgame entre révolution et réincarnation
du pouvoir, du même pouvoir, lorsqu'elle se remémore les blagues de certains camarades quant à
l'hypothétique victoire : « Moi je veux le Ministère de la Justice, Moi je veux le Ministère des
Finances ! ». Alors que le pouvoir était à remettre en question au creux même de ses
fondements, les porteurs de la parole du peuple rêvent déjà des postes ministériels les plus
prestigieux. Mais le mouvement finit par se consumer de l’inférieur et tombe sous le coups
d'arrestations et condamnations multiples.
Quant à la Belgique, les Cellules Communistes Combattantes (CCC) plongeront le pays dans un
climat d'insécurité durant leurs trois années de vie avec vingt-huit attaques à la bombe ciblant les
lieux symboliques et stratégiques de l'impérialisme des USA, de l'OTAN et du capitalisme. En
contact avec Action Directe (France), la Fraction armée rouge (Allemagne) et les Brigades
Rouges, le mouvement se solde par un échec, par la condamnation et l'emprisonnement de ses
membres.
Révolution: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19,
Dégagisme: 18.
7.Les révoltes de Thaïlande, 1992 21:
En 1992, la Thaïlande et son peuple se soulèvent contre le gouvernement du général Suchinda
Krapayoon : Le « Black May » thaïlandais (17-20 mai 1992) rassemblera plus de 200.000
manifetstants contre le régime armé. Le mouvement se voulait non-violent (grèves, protestations,
manifestations), soutenu par Chamlong, et lourdement contrecarré par les forces armées de
Suchinda. L'arrestation de Chamlong et la violence de la répression n'arrêtera pas la foule qui
parviendra, poussée par des appels royaux au calme, à la démission de Suchinda le 24 mai 1992.
Le mouvement est donc populaire et vise à dégager le pouvoir de la dictature militaire de
Suchinda. Révolte dont on a peu entendu parler et qui pourtant pourrait porter en elle quelques
germes dégagistes par le choix d'une lutte non violente, malgré que le dégagiste 'en fasse pas une
20
Documentaire « Do You Remember Révolution ? » de Loredana Bianconi, Belgique :1997. (1h56, couleur,
v.o. Italien, sous-titrés français)
21
David Murray, Angels and Devils. Thai Politics from February 1991 to September 1992. A Struggle for
Democracy ? Bangkok: 1996.
idéologie, le mouvement vise à dégager un « indégageable » (ici, Suchinda) et la présence d'un
chef de file comme Chamlong n’entraîne pas sa prise de la chaise vidée. Au contraire, il s'autodégage suite aux violences subies par les opposants au pouvoir : 3.500 arrestations, 52 morts,
nombreuses tortures – qu'il considère comme l'échec de la lutte.
Révolution: 1, 4, 6, 9, 10, 11, 12, 13, 15, 16, 17, 19.
Dégagisme: 1, 2, 3, 5, 8, 17, 18.
8.La Révolution non – violente : Otpor - CANVAS :
Otpor est une organisation politique serbe (Otpor, en serbe cyrillique, signifie « Résistance ») qui
voit le jour vers 1998 et que l'on retrouve mêlée dans différents mouvements révolutionnaires
contemporains, et dont l'implication la plus marquante fût sans aucun doute liée à la chute de
Slobodan Milošević, en octobre 2000. Mouvement reposant sur les idées de Gene Sharp, il prône
l'action et la résistance non-violente pour destituer le pouvoir. Suite aux rapprochements avec la
sphère politique du parti démocratique serbe, le groupe CANVAS entre en dissidence d’Otpor.
Ce dernier publie « La lutte non-violente en 50 points », véritable manifeste de lutte non-violente
à destination des peuples, et qui vise à exporter les techniques de luttes non-violentes notamment
utilisées contre le régime de Milošević. Il sera téléchargé depuis l’Egypte des milliers de fois
avant le soulèvement des mois derniers et nous retrouvons leur logo (le coup de poing) sur les
places du Maghreb en révolte. Ressemblance avec le coup de pied dégagiste ? Proximité possible
mais le fond est à interroger. On retrouve l'activisme d'Otpor/CANVAS dans nombre de
révolutions au sein de l'ex-URSS, Europe de l'est, etc. : la révolution des roses en Géorgie,
révolution orange en Ukraine, en Biélorussie avec le mouvement Zubr, et jusqu'à L'Égypte en
2011. Toutes les actions ayant trait à ce mouvement semblent en apparence proches du
Dégagisme, mais en restent fort distantes en réalité : elles visent quasi systématiquement à
destituer le pouvoir en place, mais il est d'emblée affirmé que « l'objectif de la lutte non-violente
est précisément de s'approprier le pouvoir politique ou, dans la mesure du possible, de
restreindre celui de votre adversaire ; sans pouvoir politique, les réformes auxquelles vous
aspirez sont impossibles22 ».
En fin de compte, les différences de perspective sont fondamentales sous plusieurs points de vue,
jusque dans les modes de financement de leurs actions : soutiens occidentaux (avec les USA en
première ligne), production de jeux vidéos révolutionnaires23. Il ne s'agit donc pas ici du pur
« Dégage! » dégagiste, mais d'une action politique orientée selon certains intérêts, en vue de
certaines « réformes » et avec le projet déclaré de réoccuper la scène politique balayée. Quant à
l'implication de CANVAS dans la formation des résistants égyptiens d'avant dégagement, elle
laisse à réfléchir quant à l'implication occidentale dans le dégagement de Moubarak (entre
autres).
Révolution: 1, 6, 9, 11, 13, 16, 19.
Dégagisme: 1, 5, 7, 8, 15, 17, 18.
9.Les émeutes : Seattle, 1999 & Gênes, 200124 :
En novembre 1999 s'organisent deux événements à Seattle : d'une part, un sommet de l'OMC, et
d'autre part, un très large mouvement de protestation contre ce dernier. Mouvement international
et non-violent (à l'exception de très maigres factions plus radicales) qui s'insurgent contre un
22
Srdja Popovic, Andrej Milivojevic, Slobodan Djinovic, La lutte non violente en 50 points. Approche
stratégique de la tactique quotidienne, CANVAS (Center for Applied NonViolent Action and Strategies), Serbie,
Belgrade : 2006, p.12.
23
Voir à ce propos le chapitre 21 : Le degaging bizness.
24
François L et Huyghe FB, Contre-pouvoirs, de la société d'autorité à la démocratie d'influence,
Ellipses : 2009.
sommet qui symbolise l'impérialisme capitaliste, la voie du libre-échange, etc. Il représente un
événement fondateur pour plusieurs raisons: il est le premier à avoir bloqué un sommet
international ; il est paradigmatique d'une mobilisation qui a su utiliser les nouvelles voies et
technologies de diffusion de l'information (médias indépendants du Indymedia, internet), et
parvenir ainsi à un impact mondial. L'objet de la protestation était donc l'OMC, en tant qu'elle
échappe à tout contrôle démocratique. Pré-dégagiste en ceci : dégager un symbole d'un système
que l'on ne désire plus : « on ne veut plus de vous ici ». Nous retrouvons dans la stricte continuité
les événements de juillet 2001, à Gênes, Italie. Dans les deux cas, il s'agissait de dégager le
pouvoir ou son symbole, et dans les deux cas, la répression policière fût draconienne, comme
pour la Thaïlande. Face à la non-violence, la violence reste extrême ; Dégagiste, aux aguets!
Révolution: 5, 13, 15.
Dégagisme:1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 13, 14, 15, 17, 18, 19.
10.Le « Que se vayan todos », Argentine, 2001 :
Dans le contexte de la grande crise socio-économique qui eut lieu en Argentine dans les années
1998 – 2002, la population, dans ses exigences dirigées contre leur État (du travail, paiement des
salaires en retard, allocations de chômage, etc.), scande ce fameux « Que se vayan Todos! »,
c'est-à-dire, « Qu'ils s'en aillent tous! ». « Le slogan "que se vayan todos" a été inventé en
Argentine en décembre 2001, et il n'a rien à voir avec une quelconque "révolution": plus
banalement, il s'agit d'une révolte des classes moyennes inquiètes pour leurs sous. Mais le
deuxième contresens, le plus grave, est de croire que le "qu'ils s'en aillent tous" s'adressait
uniquement au gouvernement du jour et aux oligarchies qui l'accompagnent. Le mouvement de
rejet des classes moyennes argentines était bien plus vaste: c'était un rejet de tous les politiciens,
des syndicalistes, des fonctionnaires, qu'ils soient liés à la majorité ou de l'opposition. Un rejet
de tous ceux qui avaient eu, de près ou de loin, à gérer les affaires publiques. Jean-Luc
Mélenchon se rend-t-il compte que le "que se vayan todos" dans sa version originale l'affecterait
lui aussi, lui ancien sénateur, ancien ministre et député européen ? Réalise-t-il que le slogan
qu'il adopte était, pour ses créateurs, résolument antipolitique ?25 ». Cri dégagiste, dont
l'absence de revendications claires (bien que clairement dirigé à l'encontre des structures du type
FMI ; le système économique interne, etc.) marque la dynamique hautement dégagiste de celuici, qui annonce le « Ben Ali, dégage! ». Dégagisme décontracté, invitant à ce qu' « ils » dégagent
« Tous » sans songer un instant à occuper la place laissée libre par ces salutaires dégagements.
Révolution: 5, 13.
Dégagisme: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19.
11.Émeutes de 2008 en Grèce :
Le 6 décembre 2008 débute en Grèce un mouvement d'émeute déclenché par l'assassinat d'un
adolescent, Alexandros Grigoropoulos, par la police athénienne. Mouvement d'insurrection
contre un ordre social déficient, un gouvernement conservateur menant un pays à la catastrophe
économique, et pour de multiples raisons socio-économiques insoutenables. Révolte/émeute sans
revendication claire, mais qui veut tout foutre dehors, ainsi que l'indique un extrait de
témoignage : « Nous on travaille pour qu’ils mangent. IL Y EN A MARRE, eux avec leur ventre
et nous avec notre faim. Où est l’égalité dont parle leur SOI-DISANT démocratie ? Le salaire de
base de 600 euros ? C’est donc ça leur égalité, c’est ça l’égalité des chances ? C’EST LES 600
EUROS QUI LES BRÛLENT. Ça va être l’allume-feu qui fera flamber votre monde, bande de
salauds ! »26. Pré-dégagiste en ceci : action politique sans projet, sinon dégager une structure, ou
25
Extrait du blog Descartes, 24 octobre 2010, critique de l'ouvrage de J.-L. Mélenchon, « Qu'ils s'en aillent
tous », Flammarion, 2010.
http://descartes.over-blog.fr/article-jean-luc-melenchon-qu-ils-s-en-aillent-tous-ou-comment-beaucoupparler-pour-dire-peu-de-chose-59525841.html
26
Grèce, la révolte de Décembre 2008 [Recueil de textes].
s'en dégager. Avatar d'un mouvement dont la dynamique n'est pas le vouloir-quelqu'un-d'autre,
mais le vouloir-autre-chose, l'altérité de notre présent.
Révolution: 5, 13.
Dégagisme: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19.
12.Les Zapatiste au Mexique (1994 –):
L' Ejército Zapatista de Liberación Nacional, EZLN (armée zapatiste de libération nationale)
porte le nom du révolutionnaire mexicain Emilio Zapata Salazar (1879-1919) l'un des principaux
acteurs de la révolution mexicaine de 1910 et de la guerre civile qui suivit le départ en exil de
celui-ci en 1911. Leur programme est explicité dans ce qui pourrait faire office de Manifeste
zapatiste: « Nous sommes les zapatistes de l’EZLN. [...] nous avons pris les armes en janvier
1994 parce que nous avons trouvé qu’il y en avait assez de tout ce mal que faisaient les
puissants, qui ne font que nous humilier, nous voler, nous jeter en prison et nous tuer, sans que
rien de ce que l’on puisse dire ne change rien. C’est pour cela que nous avons dit "¡Ya basta !"
Ça suffit, maintenant ! [...] nous voulons lutter tous ensemble avec tous les gens humbles et
simples comme nous [...] ici dans notre Mexique et dans d’autres pays du monde. [...] Nous
informons à l’avance que l’EZLN mènera une politique d’alliances avec des organisations et des
mouvements non électoralistes qui se définissent, en théorie et en pratique, comme des
mouvements et organisations de gauche, aux conditions suivantes : Non à des accords conclus
en haut pour imposer en bas, mais oui à la conclusion d’accords pour aller ensemble écouter et
organiser l’indignation ; non à la création de mouvements qui soient ensuite négociés dans le
dos de ceux qui y participent, mais oui à toujours tenir compte de l’opinion des participants ;
non à la recherche de récompenses, de promotion, d’avantages, de postes publics, du pouvoir ou
de qui aspire au pouvoir, mais oui à outrepasser les calendriers des élections ; non à la tentative
de résoudre d’en haut les problèmes de notre pays, mais oui à la construction PAR LE BAS ET
POUR EN BAS d’une alternative à la destruction néolibérale, une alternative de gauche pour le
Mexique 27». Après des années de révoltes, tantôt armées, tantôt pacifiques, l'EZLN est parvenue
à s'organiser politiquement sur des territoires rebelles, par des consultations générales et des
Conseils de bon gouvernement dont la finalité est le contrôle interne et externe des contacts,
accords et décisions régionales sous contrôle zapatiste28. Le visage « masqué » du Zapatiste
actuel est celui du sous-commandant Marcos, premier dirigent et porte parole de l'EZLN, il a été
surnommé El Delegado zero (le délégué zéro) durant l'Autre campagne menée par les zapatistes
afin de se démarquer de la campagne électorale mexicaine de 2006. Révolution qui implante un
nouveau système mais qui prend l'allure, à certains moments, d'un prédégagisme maladroit. Le
peuple est en première ligne, les leaders masqués font penser aux fous et anonymes dégagistes,
refus du système électoral majoritaire, constitution de groupes de contrôle des actions zapatistes
elles mêmes, mais tout en dégageant, la révolution se fait nouvelle institution de pouvoir.
Révolution: 1, 4, 5, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17,
Dégagisme: 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 18, 19.
Conclusions:
Disponible en ligne : http://infokiosques.net/lire.php?id_article=732
Extrait de: Armée Zapatiste de Libération Nationale, Mexique, Sixième déclaration de la forêt lacandone,
éd, CSPCL, Paris: juillet 2005, pp.12.
28
Stéphane Guimont Marceau, « L'autre campagne du mouvement zapatiste au Mexique » in Observatoire
des Amériques, Les Chroniques des Amériques, février 2006, n°5.
27
La volonté dégagiste consiste toute entière dans la volonté de se libérer d'une structure, d'une figure,
d'une oppression qui devient impossible à supporter. Telle est la volonté protodémocrate. Il
s'agissait de répartir de façon claire et distincte ce qui, dans ce magma résistant multiple, revient à
l'élan révolutionnaire ou à la volonté dégagiste. Nous n'avons jamais été dégagistes: nous le sommes
toujours devenus. Et le jeu vaut la chandelle. La grande variation des résultats, les différentes
tensions entre Révolution et Dégagisme que l'on ressent au cours de l'Histoire, viennent éclairer un
mouvement qui prend racine jusque dans l'antiquité.
Les événements récents en Tunisie, nous ont montré un peuple las et désespéré, une jeunesse qui
choisit le feu, qu’il soit réel ou celui de l’exil29, un peuple qui est descendu dans les rues avec pour
seule revendication « Ben Ali Dégage ! ». L’événement a fait tâche d’huile et le même mot se
répète et se décline en plusieurs langues, toujours en un message simple et univoque : Toi qui es au
pouvoir, toi qui gouverne, dictateur ou pseudo démocrate, vide la place et Dégage ! S’agit-il pour
autant de mouvements révolutionnaires qui s’enchaînent ? Qui voudrait-on mettre à cette place que
l’on vide ? A bien y regarder, et au-delà de celui qui s’est dégagé lui-même et dont le nom rebaptise
déjà certaines places publiques, ces visages multiples qui scandent ce cri, ces foules, ces peuples,
ces gens , ces anonymes et ces fous osent appeler, par ce qui prend l'allure d'une révolution, non pas
à la mise en place d’un nouveau pouvoir, mais au vide même. Et à ces mêmes Tunisiens de redégager ensuite ceux qui ont prétendu remplacer les premiers dégagés, de repousser des élections
trop hâtives afin de laisser la place vide. Il ne s’agit pas de révolutions, on n’instaure ni restaure
rien, on vide et puis… on attend, on observe et on se méfie de la réorganisation du pouvoir. Le
peuple tunisien est dans ce temps d'arrêt et de réflexion, malgré la recrudescence de la répression et
du contrôle systématisé par la police d’État. Mais l'intuition dégagiste ne se limite pas au cas
tunisien et ne prétend pas héroïser ce pays. L’Égypte a dégagé Moubarak et la Lybie
dégage Kadhafi. En Algérie et en Grèce, des manifestations, grèves et sit-in sont quotidiens depuis
des mois déjà, même si la presse occidentale en parle peu. En Syrie la situation est critique, la
répression est forte mais le peuple tente toujours un dégagement salvateur. Un nouveau
mouvement émerge, et pas seulement dans les dictatures du Sud. Il pointe son nez aussi dans cette
vieille Europe forgée sur les révolutions du passé. L'Occident sûr de lui, de sa justice et de sa force,
a toujours exporté ses révolutions et ses choix, pour "inspirer" d'autres civilisations, jugées moins
démocratiques et moins avancées. Or l'actualité démontre un phénomène inverse. De la Tunisie à
l'Islande, de l'Egypte à l'Espagne, de la Syrie à l'Italie, le monde est contaminé par cette vague
dégagiste qui nous vient du Sud. S'il ne s'agissait pas d'un lien de cause à effet, la concomitance
des évènements pousserait l'historien maladroit à y voir un complot international. Les barbus se
piqueraient-ils de nous donner des leçons de démocratie? Quoi qu'il en soit, des luttes semblables
émergent de l'autre côté de la Méditerranée.
Les récentes manifestations des indignés à Madrid, Barcelone et autres grandes villes espagnoles,
réclament une autre politique et l'abandon des anciennes dichotomies de parti, la vieille droite et
l'ancestrale gauche réactionnaire, à l'aube des élections locales et régionales. Le mouvement 5
étoiles italien30, initié par le comique Beppe Grillo, prend la parole dans les grandes villes du pays
et compte sur une jeunesse active pour inciter au dégagement. Leur symbole, un balai, pour nettoyer
un gouvernement principalement constitué de députés en cours de jugement, fait songer au coup de
pied dégagiste. Quant à l'Islande, avec son soulèvement si peu médiatisé, elle s'est attaquée au cœur
même du système économique néolibérale, et a mené sa lutte interne contre les banques et les partis
tant de de droite que de gauche. Il ne s'agit que de quelques exemples actuels, qui nous permettent
d'identifier cette vague à l’émergence d'un esprit dégagiste dans les manifestations les plus récentes
de mécontentement populaire. Nous en trouvons les sources tout au long de l'histoire et les
29
30
Se brûler en argot arabe signifie passer la frontière, s’expatrier, dégager …
Movimento 5 stelle
http://www.beppegrillo.it/
manifestations dans l'actualité la plus récente. Grèce, Argentine, Gènes, Seattle, autant d'exemples
d'une volonté de dégagement du système politique et économique moderne, et de ses
dérives laissées pour compte sous couvert démocratique. Un vent de restructuration générale
souffle sur nos démocraties. Tenez vous bien, ça va dégager!
Si ces dégagements sont porteurs de critiques acerbes du pouvoir, elles ne portent pas en elles un
projet politique prédéterminé. Et c'est là que le bât blesse. Selon la tradition politique de la
modernité occidentale (ce qui jusqu’à récemment revenait à dire « selon la tradition politique » tout
court), l’idée de l’agir politique était inextricablement liée à l’existence d’un projet. Et le moment
par excellence de cette conception du politique était la révolution. Songeons aussi aux « Lumières
», à la « modernisation », à l’ « unification européenne » etc.. Selon ces mêmes théories, l’agir
politique doit être: universalisable – organisable – répétable, et donc basé sur des organisations
unitaires hiérarchiques. Or, dans ce cadre étroit, le Dégagisme se révèle singulier : agir
politiquement sans projet, sans utopie, sans une grande narration pour une société meilleure, mais
agir quand même! Le Dégagisme est donc et avant tout une ACTION.
Une action qui s’exprime en un mouvement nouveau, celui du dégagement du pouvoir et de la mise
en place d'un vide transitoire. De la dictature de la démocratie à une démocratie qui opère un retour
sur elle-même et sur son histoire, c’est là le temps du Dégagisme. Le passé n’est pas nié, on ne tente
pas de balayer toute trace d’un ennemi qu’il faudrait oublier et avec lequel il importerait surtout de
ne pas être confondus, point de promesses d’un futur flamboyant, ni nostalgie romantique d’un âge
d’or révolu. Le dégagiste se dégage du présent et de l’avenir que ce présent promet, et ouvre un
temps de remise en question sans prédictions ni pressentiments. Le Dégagisme est ce temps de vide
nécessaire au développement de nouvelles énergies, de nouveau flux. Et si le révolutionnaire
souffre le vertige et craint l'arrêt soudain de la chaise musicale, le dégagiste suspend la musique et
fait du vide sa force créatrice.
Nietzsche : « améliorateurs de l’humanité »
(Le crépuscule des idoles, Trad. E. Blondel, Hatier 1983, p. 84).
Bibliographie de ce chapitre 7 :
Livres et articles:
1.André Ferrat, « La Révolution Russe », dans Etudes socialistes, n°15-16, 15 juillet 1947.
2.Armée Zapatiste de Libération Nationale, Mexique, Sixième déclaration de la forêt
lacandone, éd, CSPCL, Paris: juillet 2005.
3.Carine Lounisi, Penser la Révolution américaine en France (1778-1788). Enjeux
philosophiques et historio-graphiques, Cercles 16.2, Université Paris III : 2006.
4.Carmela Lettieri, « l'Italie et ses Années de plomb. Usages sociaux et significations politiques
d'une dénomination temporelle » dans Mots. Les langages du politique, 87, 2008.
5.David Murray, Angels and Devils. Thai Politics from February 1991 to September 1992. A
Struggle for Democracy ? Bangkok: 1996.
6.Engels dans Le Socialiste, le 12 septembre 1891.
7.François L. et Huyghe F.B, Contre-pouvoirs, de la société d'autorité à la démocratie
d'influence, Ellipses : 2009.
8.Frédéric Goldbronn, Frank Mintz, Quand l’Espagne révolutionnaire vivait en anarchie, dans
Le Monde Diplomatique, décembre 2000.
9.Georges Orwell, Hommage à la Catalogne , Londres : 1938.
10.George Orwell, La ferme des animaux, Londres :1945.
11.Guy Achard, Néron, Coll. Que sais-je ?, Paris : 1995.
12.Letter from Marx to Engels In Manchester, 27 février 1861.
13.Nietzsche Friedrich, Le crépuscule des idoles, Trad. E. Blondel, Hatier 1983
14.Plutarque, Vie d'Aristide, VII, 7-8.
15.Srdja Popovic, Andrej Milivojevic, Slobodan Djinovic, La lutte non violente en 50 points.
Approche stratégique de la tactique quotidienne, CANVAS (Center for Applied NonViolent
Action and Strategies), Serbie, Belgrade : 2006.
16.Stéphane Guimont Marceau, « L'autre campagne du mouvement zapatiste au Mexique » in
Observatoire des Amériques, Les Chroniques des Amériques, février 2006, n°5.
17.Sylvain Lazarus, La catégorie de Révolution dans la Révolution française, Les Conférences
du perroquet, n°15, mars 1988.
Sites Internet:
Blog de Beppe Grillo : Movimento 5 stelle
http://www.beppegrillo.it/
Dernière consultation: le 20 mai 2011
Blog Descartes, 24 octobre 2010, critique de l'ouvrage de J.-L. Mélenchon, « Qu'ils s'en aillent
tous », Flammarion, 2010.
http://descartes.over-blog.fr/article-jean-luc-melenchon-qu-ils-s-en-aillent-tous-ou-commentbeaucoup-parler-pour-dire-peu-de-chose-59525841.html
Dernière consultation: le 4 mai 2011.
Dictionnaire universel des sciences, morales, économique, politique, diplomatique, ( M. Robinet),
t.26, Londres: 1782. (cfr. Www.books.google.be)
Dernière consultation: le 20 avril 2011.
Diodore de Sicile, La Bibliothèque historique, livre XI, chap.86.
http://bcs.fltr.ucl.ac.be/them/themistrad1.htm
Dernière consultation: le 20 avril 2011.
Étienne Prosper Dubois-Guchan, Tacite et son siècle, tome 2, 1861.
http://books.google.be/books?id=TYrDAhIPO8UC&pg=PA435
Dernière consultation: le 20 avril 2011.
Grèce, la révolte de Décembre 2008 [Recueil de textes].
Disponible en ligne : http://infokiosques.net/lire.php?id_article=732
Dernière consultation: le 4 mai 2011.
http://www.musagora.education.fr/citoyennete/citoyennetefr/citoyens-perte-des-droits.htm
Dernière consultation: le 20 avril 2011.
République Algérienne Démocratique et Populaire, Constitution de 1963.
http://www.conseil-constitutionnel.dz/Constituion1963.htm
Dernière consultation: le 5 mai 2011.
Rosa Luxemburg, Que Veut la Ligue spartakiste? Programme du Parti Communiste allemand,
1918.
http://www.marxistsfr.org/francais/luxembur/spartakus/programme.htm
Dernière consultation: le 5 mai 2011.
Documentaires:
« Do You Remember Révolution ? » de Loredana Bianconi, Belgique :1997. (1h56, couleur, v.o.
Italien, sous-titrés français)