Pennautier - Vignobles Lorgeril

Transcription

Pennautier - Vignobles Lorgeril
A RT
DE VIVRE
Chandeliers,
verres de
dégustation,
objets et
accessoires
ont été
sélectionnés
soigneusement
dans l’esprit
de la maison
et dans le
respect de
l’histoire © Gilles
Deschamps
05
Pennautier:
faire recette, une histoire de goût
À quelques pas de la cité de Carcassonne,
le château de Pennautier peut s’enorgueillir
d’être l’un des fleurons de la région. Après
trois ans de travaux spectaculaires, Nicolas
et Miren de Lorgeril ouvrent leur demeure
sur le m onde. Jouant sur les accord s
subtils des met s et des vins, ils renden t
h ommage
à
n ou vellement
la
gastronomie
inscrite
sur
la
française,
liste
patrimoine immatériel de l’humanité.
PA R M A R I A N N E N I E R M A N S
DEMEURE HISTORIQUE
Numéro 180
du
Miren et
Nicolas de
Lorgeril, qui
représentent
la dixième
génération,
ont entrepris
le projet
ambitieux de
faire vivre leur
maison de
famille autour
de l’art de
vivre © Château de
Pennautier
Agrandi en
1670 par
Pierre Louis
de Rech de
Pennautier
sur les plans
de Le Vau,
le château
affiche une
physionomie
« à la
Versailles » © Château de
Pennautier
e soleil s’est posé sur les parterres à la
française dessinés par Le Nôtre. Des fenêtres
de la salle à manger, on aperçoit quelques
rangs de vigne venant buter au fond du parc sur un
rideau d’arbres. Royal dans son costume d’hermine, le
portrait de Louis XV contemple la scène du haut de la
cheminée de marbre tandis que sur les lambris, des
tapisseries d’Aubusson explorent la vie de César : ce
soir, l’ancienne résidence de Bernard de Rech de
Pennautier, trésorier des États du Languedoc, ouvre
ses portes à des hôtes venus dîner et demeurer pour un
L
Plusieurs
services de
tables aux
formes XVIIIe se
succèdent
au gré des
réceptions pour
accueillir les
mets les plus
raffinés… © Château de
Pennautier
DEMEURE HISTORIQUE
Numéro 180
A RT
Jean-Marc
Boyer, chef du
Puits au trésor
(1 étoile
Michelin)
prépare ses
équipes pour
une soirée de
gala -
DE VIVRE
Un projet « impossible »
© Château de
Pennautier
« Nous avons rencontré de nombreux obstacles pour une mise
aux normes de sécurité incendie et accessibilité handicapé (ERP,
Établissement Recevant du Public), sans que cela ne vienne
dénaturer la dimension historique du lieu. Pour ce faire, nous
avons travaillé en amont avec le SDIS (Service Départemental
Incendie et Sécurité) avec lequel, très vite les services des
monuments historiques se sont révélé être en contradiction. Dans
un premier temps notre projet a été jugé impossible.
L’un des problèmes majeurs - lié à l’aménagement des 20 chambres
avec salles de bains - fut la création d’un deuxième escalier « en
cloisonné » (loi de 2006, conséquences des incendies dans les
hôtels « marchands de sommeil » parisiens) c’est-à-dire entièrement
coupé des pièces qu’il borde. Cela impliquait le également le
cloisonnement du vestibule dans lequel aboutissait l’escalier
monumental du château! Fort heureusement, en février 2007 un
décret a permis d’accorder des dérogations pour les escaliers à
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Tout est pensé
pour que
les hôtes
s’approprient
les lieux
comme ici
la salle à
manger, et
apprécient
le côté
chaleureux
d’un
monument
historique
privatisé © Gilles
Deschamps
Fine
dégustatrice,
Miren de
Lorgeril
travaille sur
les alliances
des vins et des
mets au plus
près des
accords
gastronomiques © Château de
Pennautier
temps en ces lieux. Sur les tables, des nappes, des lys,
des azalées, des orchidées, de la porcelaine fine : le
blanc est de rigueur jusque dans les housses
juponnées des chaises.
Délicat, simple et élégant, l’art de recevoir est au
cœur des préoccupations de Miren de Lorgeril, « Les
dîners se font toujours aux chandelles » précise-telle, jetant un dernier regard au décor. Couverts et
plats d’argent, succession de verres de dégustation…
tout est en place pour l’union de l’excellence du vin
et la gastronomie.
De grands classiques s’invitent à la table du château
La fête commence par une évocation du domaine viticole
familial qui ne couvre pas moins de 220 hectares de
vignes. « Nous travaillons beaucoup sur la fraîcheur
de nos vins qui comptent neuf appellations dans le
Languedoc et le Roussillon, ce qui renvoie à une
large palette gastronomique » explique Miren, et
d’ajouter : « Je suis une gourmande invétérée ». Tout
un programme. Aidée de Franck Debéthune, le chef
du bar à vins de la propriété installé à quelques
mètres hors les murs du château dans une ancienne
bergerie, la jeune femme tente des liaisons, favorise
les unions et établit une carte gourmande au gré des
saisons avec un objectif au bout des papilles :
sublimer la fraîcheur qui caractérise ses vins en
exhalant l’élégance des arômes. Ainsi quelques grands
classiques s’invitent à la table du château : pour une
« caractère architectural remarquable ».
Garder les portes anciennes et limiter les extractions de fumées
ont fait également l’objet de dérogations obtenues au bout de
trois présentations de notre dossier devant la commission
départementale de sécurité. Le tout impliquant une grande
persévérance dont je pense que seul, un propriétaire tendu vers
la réalisation de son projet, est capable. »
Installé dans
une ancienne
bergerie, le
bar à vin du
château
propose des
spécialités
régionales
alliées à une
cuisine méditerranéenne © Château de
Pennautier
Six domaines
dans le sud
de la France,
neuf
appellations,
220 hectares
de vigne, la
fraîcheur et
l’élégance des
vins de la
propriété, servis
ici par Franck
Debethune, chef
de la table du
château de
Pennautier, sont
la fierté de la
maison © Château de
Pennautier
entrée, en accompagnement d’un vin blanc, un
carpaccio de saumon ou un croustillant de tomates
confites parfumées à l’huile d’olive et au thym ou
encore une soupe aux pois cassés agrémentée d’une
crème de basilic venant réveiller l’acidité du vin…
« Le canard lui semble avoir été fait pour les
rouges » s’amuse Franck Debéthune. Que dire d’un
magret sur lie (ou lit) de vin à l’échalote ? Une petite
merveille, comme un navarin d’agneau, ou un rôti de
bœuf servi avec des pommes de terre Agatha en
chemise sautées à la graisse d’oie, le tout-venant tenir
compagnie à l’esprit de Pennautier, un vin millésimé
élevé en barrique de chêne. Enfin, les desserts… Tarte
aux pommes ou aux poires, tiramisu, mi-cuit de
chocolat au caramel à la fleur de sel rendent délicatement visite à une vendange tardive légèrement
moelleuse et sucrée… Sans oublier les fromages bien
sûr. Les vrais fromages des Pyrénées toutes proches,
chèvre, brebis et au-delà la Montagne noire, les
Roquefort « Un délice avec un blanc acidulé comme
le marquis de Pennautier » ajoute Miren.
Ainsi le vin est-il ici le centre de toutes les attentions,
et la jeune femme en joue, jonglant étonnamment
avec les accords gastronomiques au fil des saisons, des
dîners, des séminaires d’entreprises et des mariages.
Mais tant de réceptions… Les Lorgeril auraient-ils
vendus l’âme de Pennautier, au péril de n’être plus
chez eux, en cette demeure où, depuis 1620, leur
famille se succède depuis dix générations ?
Nappes, bouquets et porcelaine fine dans le salon
Choiseul, le blanc est de rigueur jusque dans les
juponnages qui recouvrent les chaises © Château de Pennautier
DEMEURE HISTORIQUE
Numéro 180
DEMEURE HISTORIQUE
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DE VIVRE
Majestueux
avec ses
murs tendus
de soieries
damassées
et son lustre
de cristal, le
salon
d’apparat
s’ouvre au
rez-dechaussée sur
le parc
dessiné par
Le Nôtre -
À l’étage,
le salon de
musique est
resté inchangé.
Parquet,
mobilier
recouvert de
tapisserie
d’Aubusson,
plafond peint,
le décor
affiche un
charme passé © Château de
Pennautier
© Château de
Pennautier
U NE
RESTAURATION EXEMPLAIRE
Une surface de 2 500 m habitables, 1 500 m de
toiture, 119 fenêtres, 50 pièces, 30 hectares de parc…
le défi est de taille lorsque, il y a une vingtaine
d’années, Nicolas et Miren reprennent la propriété.
Un choix se pose : se lancer à n’en plus finir dans des
travaux d’entretien et de rénovation leur vie durant,
ou définir un projet ambitieux visant à faire vivre le
lieu en lui redonnant son éclat, un projet
économiquement viable assurant la pérennité de leur
domaine. « Nous avons longuement réfléchi à
l’avenir et à la transmission de cette maison. Nous
avons choisi de l’ouvrir au public en créant un
centre de séminaires de prestige, avec un impératif :
restaurer le château sans le dénaturer. Sans aussi
nous en extraire. Pennautier reste avant tout une
demeure familiale. Ce n’est pas un hôtel. » Ni une
maison d’hôte… Un concept de luxe à part, avec
cuisine pour les cours de gastronomie, salons
d’apparat, bibliothèque, bar à vin, salles de bal et de
réceptions pouvant accueillir jusqu’à 600 personnes
pour des événements professionnels ou privés.
Pour ce faire, les travaux entrepris ont été considérables. Pendant trois ans, électriciens, chauffagistes,
plombiers, menuisiers, staffeurs, peintres, mosaïstes,
tapissiers, au total plus de trente corps de bâtiments
se sont succédé. Les enduits des façades ont été repris
à la chaux, un ascenseur installé, les salons d’apparat
restaurés, les combles aménagés. Vingt chambres ont
été créées, avec pour chacune d’entre elles un thème :
Directoire, Hussard, Rome antique, Chinoiserie…
Décorées avec un soin tout particulier par Miren avec
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la complicité du décorateur toulousain Gérard Cot et
de Claude d’Anthenaise, conservateur du musée de la
Chasse et de la nature à Paris, elles ont été l’objet d’un
souci constant du détail… Climatisation, salles de
bain minimalistes aux parois recouvertes de
parements de pierre, meubles de famille ou glanés
chez les antiquaires, tableaux, photographies personnelles, papier peint, tissus, toiles de Jouy, produits
d’accueil : le confort n’a rien à envier à un resort de
luxe. « Il est vrai que lorsqu’un séminaire d’entreprise loue l’intégralité des lieux et que toutes les
chambres sont occupées, nous nous sentons un peu
moins chez nous, mais il faut savoir faire des concessions. Cela nous a permis de restaurer l’intégralité du
château en préservant l’esprit des lieux. Les appartements portent le nom de nos différentes branches familiales : Choiseul, Husson de Sampigny, Saint-Chamas,
Lorgeril », s’amuse Miren. L’histoire toujours…
Des partenariats ciblés
« Nous avons établi un certain nombre de partenariats
avec des maisons sélectionnées pour leur savoir faire. Des
conditions professionnelles et préférentielles nous ont été
accordées au regard de la qualité de notre projet. »
Tissus : Nobilis, Braquenié, Pierre Frey. Peintures : Farrow
and Ball et la Seigneurie. Mobilier, luminaires, chandelier,
accessoires divers… : Mise en Demeure pour son
remarquable savoir faire des objets inspirés de modèles
et motifs
XVIIIe
mais jamais strictement copiés. Vaisselle :
Astier de Villate. Argenterie : Aubry Cadoret.
L E V ERSAILLES
La chambre
du Roi
présente un
extraordinaire
« mobilier de
voyage »
offert à
Bernard de
Rech de
Pennautier par
Louis XIII lors
de son
passage, le
14 Juillet
1622 -
DU
L ANGUEDOC
Il faut dire qu’à Pennautier, elle ne manque pas de
panache. Le 14 juillet 1622, Bernard de Rech de
Pennautier accueille le jeune roi Louis XIII et sa suite,
en route pour Perpignan dans son élégant château
sorti de terre deux ans auparavant. Premier magistrat
de la ville, il prononce « la harangue » d’accueil. En
remerciement, le souverain lui offre son mobilier de
voyage, précieux ensemble de tapisseries en laine et
bourre de soie, comprenant un lit à baldaquin et six
fauteuils recouverts de housses de voyage. Un
mobilier exceptionnel, classé au titre des monuments
historiques depuis 1963, conservé au rez-dechaussée du château dans la « chambre du Roi ».
Quelques années plus tard, Pierre-Louis de Rech
prend la suite de son père. Trésorier des États du
Languedoc, il est aussi receveur général du Clergé de
France. Ses fonctions le mènent à Versailles où il
© Château de
Pennautier
Trente
hectares de
parc, la
façade sud du
château donne
sur quelques
rangs de vigne
rappelant
l’histoire du
vignoble créé
en 1620 © Marianne
Niermans
Informations pratiques
Château de Pennautier
04 68 72 65 29
11610 Pennautier
www.chateaudepennautier.com
séjourne régulièrement. Proche du pouvoir et des arts,
il confie en 1670 à Le Vau, l’agrandissement de son
château : l’architecte de Louis XIV édifie deux vastes
ailes, une orangerie à l’Est et salon de musique à
l’Ouest. Face au parc dont l’aménagement est confié
à Le Nôtre, la façade de cent mètres de long prend
une physionomie « versaillaise » avec quantité de
fenêtres et de pièces. Pennautier rayonne : Molière y
joue la comédie et les vins du domaine sont servis à la
table des officiers de Versailles… Deux siècles plus
tard, son arrière-petit-neveu, Rodolphe de Beynaguet
de Pennautier, met un point final à l’architecture. En
1835 (sur des plans de 1770) il relie les deux ailes,
achevant ainsi le parfait ordonnancement de la façade
Sud. « Pennautier s’inscrit dans la continuité,
assurent les propriétaires. Héritiers d’une longue
tradition d’accueil, nous ouvrons aujourd’hui une
nouvelle page de notre histoire familiale. »
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