Joseph LAFERRIERE (1882-1961) Raconteur, philosophe
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Joseph LAFERRIERE (1882-1961) Raconteur, philosophe
Joseph LAFERRIERE (1882-1961) Raconteur, philosophe, romancier et poète, Joseph Laferrière naît à Saint-Félix-de-Valois, comté de Joliette, Québec, le 12 mars 1882. Sa mère, Sophronie Ducharme-Laferrière, meurt lorsque Joseph n’a que huit ans. Son père, Henri Laferrière, forgeron du village, prend une deuxième épouse. Celle-ci, que Joseph aime beaucoup, décède à son tour. Le père de Joseph se marie une troisième fois, avec une institutrice. En tout, Henri Laferrière aura vingt enfants dont trois seulement, tous nés du premier lit, atteignirent leur majorité: Eugénie, Anna et Joseph, le cadet. Les années de scolarité de Joseph Laferrière nous sont inconnues. Nous supposons que, comme bon nombre de ses contemporains, il étudie à l’école du rang de son village. Néanmoins, il est certain que Laferrière, tout jeune encore, prend connaissance de la beauté du monde autour de lui. Il manifeste un amour sincère pour le développement de l’esprit et des talents créateurs de l’homme. On sait qu’il lit beaucoup, surtout les œuvres des grands auteurs français et québécois. Il aime en particulier la poésie d’Octave Crémazie. Laferrière, qui possède aussi une aptitude pour le dessin, voudrait suivre des cours à l’Institut des Beaux-Arts de Montréal. Cependant, Henri Laferrière, en homme pratique, ne reconnaît aucun mérite à ce que son fils entreprenne une carrière comme artiste. Il aurait trouvé les fonds nécessaires pour des études de droit ou de médecine, mais non pas pour des cours d’art. Les enfants d’Henri Laferrière ne s’accordent pas très bien avec la nouvelle épouse de leur père et par conséquent ils quittent la terre paternelle. En 1901, à l’âge de dix-neuf ans, Joseph Laferrière émigre à Lowell, Massachusetts, avec sa sœur Anna, pour aller rejoindre leur autre sœur, Eugénie, déjà établie dans ce centre industriel franco-américain. Joseph, qui aime beaucoup son père et sa patrie, retourne de temps à autre à Saint-Félix-de-Valois pour y faire de courts séjours. À Lowell, Laferrière doit abandonner temporairement ses poursuites culturelles, car il est obligé de gagner sa vie. Il travaille d’abord comme agent d’assurances, pour ensuite trouver de 1’emploi dans une manufacture de chaussures. Il est aussi agent de la Compagnie nationale pour le rapatriement. Malgré tout cela, il continue au moins à lire durant ses moments libres. C’est à Lowell que Laferrière fait la connaissance d’Éva Geoffroy, originaire de SainteElisabeth, comté de Joliette, village voisin de son propre lieu de naissance. En 1904, Joseph épouse Éva à Lowell et, par la suite, ils retournent au Québec pour vivre à Saint-Félix-de-Valois. Après la naissance de leur premier-né, les Laferrière reviennent aux États-Unis pour s’installer définitivement dans le quartier franco-américain de Lowell, le « Petit Canada ». Là, ils auront encore seize autres enfants. Ayant repris son travail à la manufacture de chaussures qu’il quittera pour devenir cordonnier, Laferrière se passionne toujours pour la lecture, et cela l’inspire à écrire. En 1910, les Pères Oblats de Lowell fondent une revue intitulée le Bulletin paroissial franco-américain, ainsi qu’une deuxième Le Supplément. Le rédacteur, le R.P. Armand Baron, o.m.i., et l’imprimeur, Joseph-E. Lambert, sont des amis de Joseph Laferrière. De temps à autre, celui-ci collabore à ces revues en écrivant des articles ou des lettres sur divers sujets ayant toujours la moralité comme but final. I1 envoie parfois des articles à La Presse de Montréal et à d’autres journaux québécois. En 1918, Joseph Laferrière passe par une épreuve qui marquera le reste de sa vie. Il est pris soudainement d’un mal aux yeux et à l’âge de trente-six ans, Laferrière devient complètement aveugle et incapable de travailler pour faire vivre sa nombreuse famille. Sa femme, qui est encore enceinte, donnera naissance quelques mois plus tard à des jumelles. Par conséquent, la mère et les aînés sont obligés de trouver de l’emploi pour faire vivre la famille. Après quelques années de cécité, Joseph Laferrière commence à composer des « écrits » dans sa tête qu’il mémorise jusqu’à ce qu’il puisse trouver quelqu’un à qui dicter le tout. C’est à cette époque, en 1925, que Laferrière fait paraître Les Fiancés du nord en feuilleton dans Le Clairon de Lowell ainsi que dans Le Citoyen de Haverhill, Massachusetts. Ces deux journaux appartiennent à 1’ami de Laferrière, Joseph-E. Lambert. On prétend que Laferrière aurait aussi écrit des romans, mais ceux-ci demeurent inédits et introuvables. Plus tard, Laferrière commence à écrire des vers. Tout en continuant de dicter ses œuvres à qui que ce soit, il invente sa propre manière d’écrire, ce qui lui permet d’être plus indépendant. Il plie une feuille de papier « en accordéon » et écrit un vers sur chaque pli. Parmi les thèmes de la poésie de Laferrière, on trouve la religion, le patriotisme, la nature, les actualités et la terre natale du poète. Ses poèmes paraissent dans Le Clairon et dans Le Citoyen jusqu’à la disparition de ces journaux durant la deuxième Guerre mondiale, après quoi Laferrière envoie ses écrits à L’Étoile de Lowell où travaille son ami, Antoine Clément. L’intérêt de Joseph Laferrière pour la littérature ne se limite pas à ses écrits. Afin de se désennuyer davantage, il invite chez lui, au cours des années, différentes figures assez bien connues dans le domaine des lettres franco-américaines: le médecin-poète, Joseph-Hormidas Roy, le journaliste Antoine Clement et le R.P. Narcisse Cotnoir, o.m.i. Laferrière a de vives conversations avec eux portant sur diverses questions littéraires, et ils le tiennent au courant de ce que l’on publie. Avec d’autres amis, Laferrière passe de longues heures à discuter de la politique québécoise, un de ses sujets préférés. De plus, Laferrière, qui a lu beaucoup de « vieille littérature » durant sa jeunesse et qui possède un répertoire assez considérable de contes et de légendes, amuse sa famille et ses amis en leur racontant des histoires. Il se rattache ainsi à la lignée des raconteurs québécois. Il paraît que Laferrière tienne ce talent d’un de ses oncles, un raconteur québécois, émigré à Saint-Paul au Minnesota et qui rend visite à sa parenté à Lowell de temps à autre. À la suite du décès de son épouse en 1942, Laferrière, incapable de vivre seul à cause de sa cécité, va vivre chez un de ses enfants, et puis chez un autre. En 1950, il se fixe définitivement chez sa filleule, Claire Poulin de Courval, qui habite également le Petit Canada de Lowell. À cause de sa santé, Laferrière ne sort presque plus, sauf pour rendre visite à sa sœur Anna. Il souffre d’arthrite et ne peut guère tenir sa plume. Claire Poulin de Courval, qui a déjà écrit sous la dictée de son parrain, agit maintenant comme sa secrétaire. Pour Laferrière, elle sert non seulement d’infirmière et de secrétaire mais, de plus, elle devient l’inspiratrice de ses visions poétiques. Elle peut lui décrire un coucher du soleil et il dit qu’il le « voit » à travers les yeux de sa filleule. I1 écrit ensuite sur ce sujet et le signera du pseudonyme « Claire de Courval ». Celleci tient également son parrain au courant des actualités en lui lisant à haute voix des journaux du Québec. Elle lui lit aussi des livres, passant des soirées entières à lui lire des volumes de 300 à 400 pages. Durant les dernières années de sa vie, Laferrière songe à compiler ses écrits pour en faire un recueil, mais le coût de l’édition étant trop élevé, il doit abandonner ce projet sans réaliser son rêve. Joseph Laferrière meurt à Lowell le 26 septembre 1961. Il repose au cimetière Saint-Joseph de cette même ville. Robert-B. PERREAULT ŒUVRE - Divers articles publiés dans le Bulletin paroissial franco-américain, Lowell, MA, 1911-1913. - Divers articles publiés dans Le Clairon de Lowell et Le Citoyen de Haverhill, MA, 1911-1917. - Les Fiancés du nord, légende canadienne, publiée en feuilleton dans Le Clairon et Le Citoyen, 13 fevrier-20 mars 1925. - Divers poèmes publiés dans Le Clairon et Le Citoyen, juin-septembre 1939. - Divers poèmes et articles publiés dans L’Étoile, Lowell, MA, 1946-1957. - Un récit inédit, retrouvé en 1982, intitulé « Rita ou la colombe du manoir », écrit pour la lowelloise Rita Dubois en 1938 et dicté à celle-ci. Dans les archives personnelles de Robert B.Perreault de Manchester, New Hampshire. BIBLIOGRAPHIE - Perreault, Robert-B. Joseph Laferrière: écrivain lowellois. Manchester, NH : National Materials Development Center for French and Creole, 1982, 186 p.