Etude du comportement au jeune âge du béton et design d

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Etude du comportement au jeune âge du béton et design d
Journées des Thèses de l’IRSN
Vogüe, 6-9 octobre 2008
Etude du comportement au jeune âge du béton
et design d’un nouvel essai de fissuration transfert
Briffaut Matthieu1,2
1ère année de thèse ; date de début 1 octobre 2007
Sujet de thèse : Etude de l’influence du retrait au jeune âge sur l’évolution de la perméabilité du
béton. Influence de la présence d’armatures et des reprises de bétonnage.
Encadrant : Jean-Michel Torrenti3 – Farid Benboudjema1
Tuteur IRSN : Georges Nahas2
1
ENS Cachan/CNRS UMR8535/UPMC/PRES UniverSud Paris, Cachan, France
Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, Fontenay-aux-Roses, France
3
Laboratoire Central des Ponts et Chaussées, Paris, France
2
1. Introduction
Lors de leur construction, les structures massives et, plus particulièrement, les enceintes de
confinement des centrales nucléaires sont soumises à plusieurs types de déformations dues à l’hydratation du
béton. En effet, d’une part la réaction chimique du ciment avec l’eau est exothermique et thermo activée, ce
qui induit des déformations de dilatation puis de contraction. D’autre part une dépression capillaire étant créée
par la consommation d’eau due à l’hydratation du ciment, des déformations de contraction se produisent.
Lorsqu’elles sont empêchées par la partie de la structure déjà construite, ces déformations volumiques
induisent des contraintes de compression puis de traction pouvant causer une fissuration traversante
augmentant alors sensiblement la perméabilité du béton.
Mon travail de thèse consiste donc tout d’abord à caractériser le comportement au jeune âge du
matériau que l’on utilise (basé sur la formulation utilisée lors de la construction d’une enceinte) puis à mettre
au point un essai permettant d’étudier l’évolution de la perméabilité d’une éprouvette de béton soumise à des
déformations empêchées lors de son durcissement. Les essais de caractérisation concernent essentiellement
d’un point de vue macroscopique, le retrait (endogène et thermique), le fluage (propre et thermique transitoire)
et l’évolution des caractéristiques mécaniques (résistance à la compression, à la traction et module d’élasticité)
alors que d’un point de vue microscopique, on s’intéresse surtout à la perméabilité du béton, responsable des
phénomènes de transferts avant fissuration.
L’idée fondatrice de ma thèse est que ce sont les premiers jours de la vie d’un béton qui conditionnent
sa pérennité future. En effet, si dans son plus jeune âge le béton est soumis à des contraintes supérieures à sa
résistance et qu’il en vient à fissurer ou à être endommagé, ce sont ces zones de faiblesse qui seront à l’origine
des phénomènes néfastes pour sa vie future (augmentation du taux de fuites, corrosion des armatures,….) en
cas de sollicitation de l’enceinte de confinement lors d’incident ou de test.
2. Premiers résultats de caractérisation au jeune âge du béton
Pour décrire l’évolution des caractéristiques du béton au jeune âge, la notion de degré d’hydratation
est très utile. En effet, celle-ci permet d’intégrer la notion de température à la notion de temps créant ainsi une
base commune à plusieurs caractéristiques (retrait, résistance en compression, traction, module d’élasticité,..).
La détermination du degré d’hydratation du béton peut se faire par un essai quasi-adiabatique
développé par le LCPC. Il consiste à mesurer la quantité de chaleur dégagée par le béton lors de son
hydratation. En intégrant les échanges de chaleur entre l’environnement et l’éprouvette de béton, on obtient la
quantité de chaleur dégagée elle-même proportionnelle au degré d’hydratation : ξ (t ) = ξ ∞ ×
E
C
ξ ∞ = 1 − exp (1 − 3,33 ) [WAL,00]
-1-
Q(t )
avec
Q∞
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[ULM 98] ont ajouté l’utilisation de l’affinité chimique ( A(ξ ) ) permettant de calculer le degré
~
~
⎛ E ⎞
d’hydratation pour toutes les histoires de température: ξ& = A(ξ ) exp⎜ − a ⎟ en utilisant une loi d’Arrhenius.
⎝ RT ⎠
Néanmoins, pour utiliser cette relation, la connaissance de l’énergie d’activation du béton est importante. Pour
la déterminer, nous avons réalisé des essais de calorimétrie quasi-adiabatique en utilisant une bouteille de
Langavant avec deux quantités de mortier de béton équivalent différentes.
Evolution du degré d'hydratation
Evolution de l'affinité chimique en fonction de Xsi
1400,00
0,90
1200,00
0,70
0,60
Affin ité ch im iq u e (1/s)
degré d'hydratation
0,80
ξ (essai QAB)
0,50
ξ ( affinité chimique)
0,40
0,30
0,20
0,10
Affinité chimique QAB
Fittage utilisé
1000,00
800,00
600,00
400,00
200,00
0,00
0,00
20,00
40,00
60,00
80,00
0,00
0,00
Temps (h)
0,10
0,20
0,30
0,40
0,50
0,60
degré d'hydratation
0,70
0,80
0,90
Figure 1 : degré d’hydratation et affinité chimique obtenu par le QAB
Nous avons également réalisé une campagne d’essais visant à déterminer l’évolution des
caractéristiques mécaniques du béton. Cette campagne comporte des essais de compression et de traction (par
fendage) sur des éprouvettes 11x22. Les essais de compression nous permettent également de déterminer le
module d’élasticité du béton (sur le 3ème cycle entre 5 et 30% de la résistance attendue). En complément de
cette mesure du module d’Young statique, nous avons mesuré le module d’Young dynamique par ultra-sons.
Evolution des résistance mécanique
Evolution du module d'Young
Résistance en traction (Mpa)
Modèle de De Schutter
R é s is ta n c e e n
c o m p re s s io n (M P a )
35
30
45
4
40
4
3
25
3
20
2
15
2
10
1
5
1
0
M o d u le d 'Y o u n g (G P a )
Résistance en compression (MPa)
Modèle de De Schutter
40
5
R é s is ta n c e e n tra c tio n (M P a )
45
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
30
25
20
Module d'Young (GPa)
15
Modèle de De Shutter
Module dynamique
10
Modèle de De Schutter
5
0
0
0,0
35
0,0
0,9
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
Degré d'hydratation (-)
Degré d'hydratation (-)
Les résultats de ces essais nous permettent de déterminer les paramètres des lois de De Schutter [DES
02] décrivant l’évolution de ces caractéristiques en fonction du degré d’hydratation :
⎛ ξ − ξ0
B (ξ ) = B∞ ⎜⎜
⎝ ξ∞ − ξ0
⎞
⎟⎟
⎠
a
où B est la variable mécanique
Ces lois seront utiles lorsque nous modéliserons numériquement le comportement au jeune âge du
béton.
-2-
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Concernant les essais du module d’Young, nous remarquons que le rapport entre les modules
dynamique et statique est en moyenne égal à 1,2 [BYF, 80] pour les 4 valeurs dont nous disposons. D’autre
part, comme le constatait [STA, 44 et LHE, 65] cité dans [MAR, 92], le rapport Edyn/Estat décroît avec le
temps.
Lorsque l’on étudie l’hydratation de pièces massives en béton, les différents retraits de celui-ci sont
des éléments importants car ils peuvent être à l’origine de la fissuration. Le retrait thermique est directement
proportionnel à la différence de température alors que le retrait endogène peut, lui, être relié au degré
d’hydratation.
Evolution du retrait en fonction de ξ
degré d'avancement
0
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
retrait (en mm/m)
-0,02
-0,04
-0,06
-0,08
-0,1
Essai à 40°C
Essai à 20°C
-0,12
Finalement, nous avons également réalisé des essais à l’anneau de retrait restreint. Ces essais devaient
initialement nous permettre de faire fissurer un anneau en béton sous l’action du retrait endogène du béton.
Néanmoins, ces essais ont montré que, dans notre configuration et dans un environnement contrôlé (20°C et
sans échange hydrique), l’amplitude du retrait endogène n’est pas assez importante pour provoquer la
fissuration.
Béton
Laiton
:
50cm
7cm
7cm
Figure 2 : Géométrie de l’anneau de
Retrait restreint
Figure 3 : Histoire de température
mesurée sur un mur en béton (1.2 m)
3. Validation numérique du nouvel essai
Le nouveau test est une évolution de l’essai de retrait restreint qui permet de prendre en compte le
retrait endogène mais également le retrait thermique. Le principe de ce nouvel essai est de faire croître la
température de l’anneau en laiton pour que celui-ci se dilate. Cette dilatation est empêchée par l’anneau en
béton ce qui induit des contraintes de compression dans l’anneau en laiton ainsi que des contraintes de traction
dans l’anneau en béton. Ces contraintes s’ajoutent à celles dues au retrait endogène du béton.
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L’histoire de température de l’anneau peut être calculée et optimisée par éléments finis afin de
reproduire les taux de contraintes qui pourraient arriver dans un « vrai » mur d’enceinte de confinement (cf.
figure 3).
Pour vérifier que nous obtiendrons effectivement fissuration avec cet essai, nous l’avons modélisé à
l’aide du logiciel Cast3m développé par le CEA. Nous avons utilisé un modèle développé par [BEN, 05] qui
est un modèle thermo-chéméo-élastique-endommageable.
En première approche, nous avons pris une évolution de la température bilinéaire. La première partie
est un palier à 20°C puis à 25h quand le pic de température dû à l’exothermie est atteint, la température de
l’anneau en laiton augmente linéairement à une vitesse de 0.35°C/h.
Les résultats montrent qu’avec un modèle local (2 tailles de mailles différentes) ou un modèle non
local, nous obtenons bien fissuration de l’anneau et que nous pourrons alors étudier la fissuration et l’évolution
de la perméabilité du béton.
D= 0
D= 1
Figure 4 : exemple de cartographie d’endommagement (modèle local ; taille de maille : 7mm)
4. Perspectives de travail
La suite de mon travail est donc le montage de ce nouvel essai ainsi que la réalisation des essais de
fissuration - transfert proprement dit.
En parallèle à ces essais, nous devons réaliser une campagne d’essais visant à caractériser l’évolution
de la porosité du béton par intrusion au mercure afin de déterminer in fine quelle est la part du flux due à la
nature poreuse du béton et celle due à la fissuration.
Enfin, le dernier phénomène qui n’a pas été mentionné mais dont l’effet peut être important et ce,
notamment, au jeune âge est le fluage sous ses différentes formes (fluage propre en compression, traction et
fluage thermique transitoire en traction).
5. Bibliographie
[ACK, TOR, ULM 98] ACKER P., TORRENTI J., ULM F., « Comportement au jeune age du béton »,
Hermès
[BEN 05] BENBOUDJEMA F., TORRENTI J., « Early-age behaviour of concrete nuclear containments»,
Nuclear Engineering and Design, Volume 238, 2008, p.2495-2506
[BYF 80] BYFORS J., « Plain concrete at early ages », Report of the Sweden Cement and
Concrete Institute, Stockholm, 1980.
[DES 02] DE SCHUTTER G., « Fundamental study of early age concrete behaviour as a basis for durable
concrete structures » , Materials and Structures/Matériaux et Constructions, Vol. 35, p.15-21
[MAR 92] MARTINEZ F., POZZO E., « Experimental control of deformability at short-term loadings in
testing large span prestressed structures » , Materials and Structure, 25, p.231-238
[ULM 98] ULM F., COUSSY O., « Couplings in early-age concrete: from material modelling to structural
design », International Journal of Solids and Structures, 35(31-32), p.4295-4311
[WAL 00] WALLER V., « Relations entre composition des bétons, exothermie en cours e prise
et résistance en compression », Paris, Collection Etudes et Recherches des laboratoires des
Ponts et Chaussées – série Ouvrages d'Art OA35 – LCPC
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