15bis - Politique foncière et immobilière

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15bis - Politique foncière et immobilière
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24 janvier 2014
La Flandre,
à travers les travaux du Parlement flamand
Décret relatif au transfert à Vlabinvest de la compétence pour mener une politique
foncière et immobilière dans le Brabant flamand
En sa séance du 22 janvier 2014, le Parlement flamand a adopté le décret relatif au
transfert à Vlabinvest de la compétence pour mener une politique foncière et
immobilière dans le Brabant flamand1.
Exposé des motifs du projet de décret2
Le projet de décret cadre avec l’exécution du livre blanc « Réforme interne de l’Etat »,
approuvé par le Gouvernement flamand en date du 8 avril 2011. Dans ce livre blanc, le
Gouvernement flamand s’est engagé à transférer à la province du Brabant flamand la
compétence politique relative à l’objectif spécifique du Vlabinvest3.
Le décret prévoit donc ce transfert. Il transfère également l’ensemble des biens immobiliers,
participations, droit et obligations non liés au financement de projet, qui fait partie du
patrimoine de Vlabinvest, à une régie provinciale autonome créée par la province du Brabant
flamand : Vlabinvest apb4. Il prévoit l’octroi d’une subvention annuelle de 736.000 euros à
Vlabinvest apb par la Région flamande.
Il transforme le Vlabinvest actuel en un Vlaams Financieringsfonds voor Grond- en
Woonbeleid voor Vlaams Brabant5. Les tâches de ce Fonds se réduisent à octroyer, dans le
cadre de la politique foncière et immobilière spécifique au Brabant flamand, des prêts sans
intérêts à Vlabinvest apb.
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Doc. Parl. fl. 2303 (2013-2014) - n° 4.
Doc. Parl. fl. 2303 (2013-2014) - n° 1, pp. 3-4.
3
« Vlabinvest » est l’abréviation pour « Investeringsfonds voor Grond- en Woonbeleid voor VlaamsBrabant », c.-à-d. le Fonds d'Investissement pour la Politique foncière et du Logement pour le Brabant
flamand.
Vlabinvest a été créé par l’article 16 du décret flamand du 25 juin 1992 contenant diverses mesures
d'accompagnement du budget 1992 (Moniteur belge du 11 juillet 1997). L’article 19 du décret du
25 juin 1992, modifié par l’article 2 du décret du 29 avril 2011 modifiant divers décrets relatifs au
logement, définit les missions de Vlabinvest. Ainsi, il prend à sa charge toutes les dépenses relatives :
1° à la politique terrienne et à la réalisation de projets de logement à caractère social dans les
communes de la province du Brabant flamand ;
2° au développement de structures jugées nécessaires pour le maintien ou le développement du
caractère flamand et d'une qualité de logement de haute valeur dans cette région, y compris la
prise de participations.
4
« Vlabinvest apb » est l’abréviation pour « Agentschap voor Grond- en Woonbeleid voor VlaamsBrabant », c.-à-d. l’Agence pour la Politique foncière et immobilière pour le Brabant flamand.
5
C.-à-d. le Fonds flamand de Financement pour la Politique foncière et immobilière pour le Brabant
flamand.
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Article problématique
L’article 3 du chapitre 2 « Attribution de compétences pour mener une politique foncière et
immobilière spécifique »6 stipule :
« La province du Brabant flamand et en particulier Vlabinvest apb sont
compétents pour mener une politique foncière et immobilière spécifique pour
le Brabant-flamand. Ils exécutent cette politique en complément à la politique
flamande du logement et en particulier à la politique sociale flamande du
logement.
Cette compétence consiste plus particulièrement :
1°
à mener une politique foncière et à réaliser des projets de logement à
caractère social dans les communes de la province du Brabant
flamand ;
2°
à étendre les structures qui sont considérées comme étant nécessaires
pour maintenir et promouvoir le caractère néerlandophone et la haute
qualité de logement dans cette région, y compris à prendre des
participations7.
Un projet de logement à caractère social, tel que visé au second alinéa, 1°, est
un projet de logement, tel que visé à l’article 42bis du décret du 15 juillet 1997
contenant le Code flamand du Logement. »
Avis du Conseil d’Etat8
Le Conseil d’Etat (chambre flamande) s’est penché sur la portée et le fondement juridique du
projet de décret. Au sujet de l’article 3 de l’avant-projet de décret. Il s’est interrogé, à la
lumière du principe d’égalité, sur la justification du transfert de cette compétence à la seule
province du Brabant flamand, à l’exclusion des autres provinces.
A cette interrogation la ministre compétente en matière de Logement, Freya Van den
Bossche (SP.A), a fourni la réponse suivante :
« Tout comme les autres périphéries de grands centres urbains, la périphérie
autour de Bruxelles est elle aussi confrontée à un ‘exode urbain’ ; les effets
liés à cette éviction sociale sont plus intenses dans la périphérie bruxelloise
qu’ailleurs en Flandre en raison de la qualité de Bruxelles en tant que Capitale
de la Belgique et de l’Union européenne.
En raison de la présence et de l’arrivée permanente d’un grand nombre
d’eurocrates, de fonctionnaires internationaux et de sièges d’entreprises
internationales et en raison des activités à grande échelle des promoteurs
immobiliers, l’afflux venant de Bruxelles exerce une forte pression sur les prix
fonciers et sur le marché du logement (à l’achat et à la location) dans les
communes de la Périphérie.
6
Doc. Parl. fl. 2303 (2013-2014) - n° 1, pp. 37.
C’est nous qui le soulignons.
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Doc. Parl. fl. 2303 (2013-2014) - n° 1, pp. 27-34.
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C’est pourquoi l’autorité flamande a pris dans le passé, en matière de politique
foncière et immobilière, une initiative de politique de logement au profit de
cette région.
Par l’intermédiaire de Vlabinvest :
-
il est possible d’acquérir des ensembles de terrains, des terrains proposés
via le droit de préemption et des terrains détectés par prospection, en vue
d’un développement futur du logement ;
-
il est possible d’attribuer, prioritairement, les logements qui y sont réalisés
en coopération avec des partenaires publics et privés à des candidats qui
ont un lien avec la région et de soutenir un logement abordable et de
qualité.
Dans le cadre du principe d’égalité, cette situation à part de la périphérie
bruxelloise justifie une politique foncière et immobilière spécifiquement
orientée sur cette région.
Etant donné que Vlabinvest est actif dans toutes les communes de
l’arrondissement Hal-Vilvorde et dans quatre communes de l’arrondissement
de Louvain, le transfert de cette matière territoriale à la province du Brabant
flamand est justifié, dans la logique de la réforme interne de l’Etat. »
Même s’il ne dispose pas de données factuelles qui permettraient une appréciation
concluante, le Conseil estime que la justification fournie à la différence de traitement est
recevable par rapport au principe d’égalité. Il recommande d’intégrer à l’exposé des motifs
une motivation qui justifie l’attribution de cette compétence et des moyens y afférents à une
seule province flamande. Si, à l’avenir, d’autres provinces sont confrontées à l’exode urbain
et à son impact en termes d’éviction sociale, il faudrait justifier pourquoi elles ne pourraient
pas bénéficier de l’attribution de compétences similaires ».
Commentaire de l’article 39
Outre la justification que la ministre a déjà donnée au Conseil d’Etat par rapport à l’article 3
(cf. ci-dessus), le commentaire de cet article précise notamment ce qui suit:
« (…) L’article 3 du projet de décret vise à ce que la province du Brabant flamand, et
en particulier Vlabinvest apb, soient compétents pour mener une politique foncière et
immobilière dans le Brabant flamand, dès l’entrée en vigueur du présent décret.
Cette compétence est précisée par deux éléments, repris littéralement de la
description de la compétence du Fonds d'Investissement pour la Politique foncière et
du Logement pour le Brabant flamand, en abrégé Vlabinvest, telle que définie à
l’article 19 du chapitre II ‘Politique sociale terrienne et du logement en Brabant
flamand’ du décret du 25 juin 1992 contenant diverses mesures d'accompagnement
du budget 1992, décret qui peut être considéré comme le décret fondateur du
Vlabinvest.10
L’attribution de la politique foncière et immobilière spécifique au Brabant flamand est
donc confiée à Vlabinvest apb, c.-à-d. une régie provinciale autonome qui a été créé
par la province du Brabant flamand pour être employée comme ‘structure d’accueil’
de cette mission.
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Doc. Parl. fl. 2303 (2013-2014) - n° 1, pp. 5-6.
C’est nous qui le soulignons.
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Le choix du modèle organisationnel d’une régie provinciale autonome est dicté par
deux exigences de base fondamentales qui conditionnent la concrétisation du livre
blanc ‘Réforme interne de l’Etat’ en ce qui concerne Vlabinvest, à savoir :
-
la garantie que les biens et participations transférés d’une part et les moyens et
flux financiers mis à disposition d’autre part, sont employés au même objectif, à
savoir la politique foncière et immobilière dans le Brabant flamand ;
-
la possibilité que le choix du modèle organisationnel provincial offre les chances
maximales pour une continuité de qualité.
La première exigence de base est garantie, du fait que :
-
en matière de missions, le décret provincial, plus particulièrement les articles 225
à 237 prévoient une approbation obligatoire des statuts d’une régie provinciale
autonome et de chacune des modifications ultérieures de ces statuts, par le
Gouvernement flamand, ce qui permet à ce dernier de se porter garant de la
continuité ;
-
la transparence de l’utilisation financière est assurée par le fait qu’une régie
provinciale autonome constitue une entité juridique distincte qui connaît les
obligations spécifiques de rapport financier ;
-
il est prévu qu’une série d’administrateurs de la régie provinciale autonome sont
proposés par la Région flamande, dans la mesure où la Région flamande se voit
dotée d’un droit statutaire de présentation de trois des treize administrateurs.
La seconde exigence de base est garantie par le fait que le modèle organisationnel
d’une régie provinciale autonome se rapproche de l’actuel modèle organisationnel de
Vlabinvest, à savoir une institution publique flamande type A. Ce modèle
organisationnel et les modèles de fonctionnement qui y sont appliqués, ont fait leurs
preuves et ont été garants des prestations de Vlabinvest.
L’implication permanente des collaborateurs actuels de Vlabinvest permet par ailleurs
de garantir la continuité opérationnelle de Vlabinvest sur le terrain et de continuer à
honorer les engagements et accords conclus. »
Débat en commission11
De l’exposé des motifs, le député Christian Van Eyken (Union des Francophones), déduit
que, grâce à l’article 3 du projet de décret, le Gouvernement flamand cherche à rétablir les
dispositions du décret du 27 mars 2009 relatives à « Wonen in eigen Streek », annulées par
l’arrêt n° 144 du 7 novembre 2013 de la Cour constitutionnelle. Pour permettre au
Gouvernement flamand de montrer que tel n’est pas son intention, il soumet un amendement
dans lequel il propose de supprimer le 2° du second alinéa.
La députée flamande Mieke Vogels (Groen) regrette le dépôt d’un tel projet de décret. Elle
aurait souhaité que le Gouvernement flamand ait réfléchi davantage à l’avenir de la politique
foncière et immobilière, en ce qui concerne le « wonen in eigen streek » (habiter dans sa
propre région). L’attention mise sur l’achat d’un logement dans sa propre région restreint la
mobilité sur le marché de l’emploi et crée du chômage. Au vu des problèmes de mobilité, il
ne faut plus continuer à inciter la population à rester dans sa propre région.
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Doc. Parl. fl. 2303 (2013-2014) - n° 2.
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Elle déplore également l’idée d’un système isolé pour le Brabant flamand. Dans cette
province, la politique « wonen in eigen streek » a une forte connotation communautaire.
Espérer que cette politique permettra aux néerlandophones de rester dans leur propre
région, est naïf. Les subsides et les règles relatives à « wonen in eigen streek » n’empêchent
pas Bruxelles de croître et de s’étendre au-delà des limites urbaines. La députée plaide pour
une politique plus visionnaire, axées sur l’internationalisation (et non seulement la
francisation) de la périphérie.
D’autres intervenants, Mark Hendrickx (N-VA) et Mercedes Van Volcem (Open VLD), se
contentent de regretter que l’attribution des compétences se limite à la seule province du
Brabant flamand.
D’autres encore, tels que Joris Van Hauthem (VB) et Patricia De Waele (LDD) déplorent
que l’autorité flamande se défasse de ses compétences en matière de politique foncière et
immobilière. D’autres provinces sont également concernées par les pressions sur le marché
de l’immobilier.
La ministre flamande du Logement, Freya Van den Bossche (SP.A), réplique que le
projet de décret n’empêche pas que le Gouvernement flamand continue à réfléchir sur la
manière dont elle veut façonner la politique foncière et immobilière. Ce projet de décret a
pour seul but de réaliser la réorganisation prévue par la réforme interne de l’Etat. Le
Gouvernement flamand ne se défait donc pas de ses compétences.
Elle estime qu’un système pareil peut également être instauré dans d’autres provinces si
celles-ci connaissent des problèmes similaires à la périphérie. Le Conseil d’Etat ne dit par
ailleurs pas que l’initiative par rapport à Vlabinvest n’est pas autorisée.
Relancée par le député Christian Van Eyken, qui annonce son intention d’entamer une
procédure judiciaire, sur la contradiction du projet avec l’arrêt de la Cour constitutionnelle sur
le volet « wonen in eigen streek », la ministre répond que l’arrêt ne porte que sur l’objet du
recours en annulation. Elle ne voit dans l’arrêt aucune objection au bon fonctionnement de
Vlabinvest.
Débat d’actualité du 13 décembre 2013 sur l’annulation partielle par la Cour
constitutionnelle du décret du 27 mars 2009 relatif à la politique foncière et
immobilière12
Dans le cadre de ce débat d’actualité, la ministre flamande du Logement, Freya Van den
Bossche (SP.A), explique quelles suites elle envisage de donner à l’arrêt en annulation du
volet « wonen in eigen streek ». Elle expose que le Gouvernement flamand se penche sur
différentes solutions, mais qu’il compte faire un examen juridique approfondi. Le
Gouvernement prendra une décision une fois qu’il aura pris en considération tous les
risques.
Elle formule cependant quelques pistes envisagées. D’après l’arrêt de la Cour
constitutionnelle, il serait possible de maintenir le règlement s’il est associé à des critères
socio-économiques (par exemple, en terme de seuil de revenus) et à des critères de
temporalité. D’après le même arrêt, il serait possible de travailler avec une forme de
subventionnement pour l’achat et la location. Cela serait possible grâce aux instruments
actuels. La ministre ajoute que, face à l’arrêt, il est nécessaire d’évaluer et de revoir le
fonctionnement actuel.13
12
Handelingen Plenaire Vergadering van 13 november 2013 (2013-2014), n° 9.
A la lecture de ces explications, il est permis de penser que le Gouvernement flamand ait envisagé
le transfert de la compétence en matière de politique foncière et immobilière à Vlabinvest pour
contourner l’arrêt et remettre en place un volet « wonen in eigen streek ».
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