PECO : la convergence à l`épreuve de la crise

Transcription

PECO : la convergence à l`épreuve de la crise
PECO :la convergence à
l’épreuve de la crise
Alexandre Vincent
D
urant près de vingt ans, la transformation rapide
des anciens pays socialistes d’Europe centrale et
orientale (PECO) aura été à la mesure des
espoirs soulevés par la chute du mur de Berlin. La
profonde mutation de leurs structures économiques,
perceptible notamment dans l’amélioration des niveaux
de vie et soutenue par une intégration croissante dans
l’espace européen, illustre un processus de
convergence réelle dont les progrès, certes inégaux
selon les pays, ont été encouragés par l’adhésion à
l’Union européenne (UE)1.
La crise mondiale survenue à l’automne 2008 a
cependant révélé les fragilités intrinsèques au modèle
de croissance des PECO. L’abondance des
financements externes, à l’origine de dettes extérieures
élevées, avait en effet permis une expansion rapide du
crédit et, notamment, des prêts libellés en devises.
Mais, dans bien des pays, le dynamisme de la demande
interne allait de pair avec des situations de surchauffe,
caractérisées par des tensions inflationnistes et par
d’importants déficits courants qui ne sont plus apparus
comme soutenables. Les tensions mondiales sur la
liquidité et les pressions induites sur le change,
préjudiciables à la solvabilité des agents, ont alors mis
en lumière les risques, pour ces économies, d’une
forte dépendance vis-à-vis de capitaux étrangers
potentiellement volatils.
Alors que l’ensemble de la zone, à l’exception de la
Pologne, a été confronté à une profonde récession en
2009, on doit se demander si le coup d’arrêt porté à sa
trajectoire de croissance revêt ou non un caractère
durable. La crise a, dans plusieurs pays, accru la
volatilité des changes et perturbé la situation budgétaire,
à l’aune desquels s’évalue, pour partie, la convergence
nominale, définie par la défense des grands équilibres
macroéconomiques. De ce fait, les perspectives
d’adhésion à l’euro se sont obscurcies, ce qui pourrait
être dommageable à l’attractivité de ces économies.
Leur croissance potentielle, menacée en outre par des
Janvier 2010
évolutions défavorables de la compétitivité du travail et
de la démographie, risque d’en être affectée. En tout
état de cause, vu l’ampleur des défis à relever, le
processus de convergence entamé il y a une vingtaine
d’années risque de connaître, sinon une interruption
durable, du moins un net infléchissement de son
rythme.
Une dynamique de convergence
soutenue par l’insertion dans l’UE
Passé le choc de la rupture avec les structures de
l’ancien bloc communiste, les PECO ont connu, du
milieu des années 1990 à 2008, une croissance
vigoureuse et une mutation de leurs économies, induites
entre autres par une intégration européenne plus étroite,
aux plans commercial, financier et institutionnel.
Un phénomène de rattrapage inabouti
Une forte croissance du PIB
Les premières années de la transition postcommuniste dans les PECO ont été marquées par des
ajustements douloureux, la rupture des cadres
antérieurs définis par la planification et l’autorité du
Conseil d’aide économique mutuelle ayant désorganisé
l’ensemble des circuits économiques. Tous ont ainsi
connu une période de contraction réelle du PIB, qui
s’est achevée dès 1992 en Pologne mais n’a pris fin
qu’en 1998 en Bulgarie. Le retour aux mécanismes de
l’économie de marché a sans doute été facilité par
l’histoire de ces pays, pleinement intégrés jusqu’à la
Seconde Guerre mondiale aux échanges mondiaux.
Ainsi le jeu des privatisations et la libéralisation
progressive des prix, du compte courant et du compte
de capital ont permis, une fois absorbé le choc initial,
une dynamique de croissance spectaculaire. De fait,
Conjoncture
27
l’ensemble de la zone aura connu, de 1994 à 2008, une
croissance moyenne de 4,2% l’an, atteignant même
5,4% l’an entre 2004 et 2008 (cf. graphique 1).
Salaire mensuel brut moyen, EUR (PPA)
1400
1200
1000
Croissance annuelle du PIB, %
800
10
600
5
400
0
200
-5
Pologne
Rép. tchèque
Slovaquie
Hongrie
Roumanie
Bulgarie
0
2001
-10
Pologne
-15
-20
Rép. tchèque
Slovaquie
Hongrie
Roumanie
Bulgarie
91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09
Graphique 1
Sources : Instituts statistiques nationaux
Ce phénomène de rattrapage a naturellement
entraîné une amélioration du revenu par tête moyen.
Entre 1992 et 2007, en termes de parité de pouvoir
d’achat, il est ainsi passé de 37% à 52% de celui des
douze pays qui faisaient initialement partie de la zone
euro. Dans le même temps, celui du Portugal, par
exemple, était resté constant à 67%. On perçoit par là
que le niveau de vie dans les PECO a commencé à se
rapprocher de celui de l’Europe occidentale, dans un
processus de convergence qui néanmoins reste très
partiel. Cette évolution globale ne doit en outre pas
masquer d’importantes disparités : en 2008, les revenus
par tête rapportés à la moyenne de la zone euro
s’inscrivaient en réalité dans une fourchette comprise
entre 34% pour la Bulgarie et 80% pour la Slovénie.
L’investissement constitue le principal déterminant
de cette croissance forte, représentant en moyenne
25% du PIB sur l’ensemble de la zone entre 1990 et
2008. Le taux d’investissement / PIB a été
particulièrement fort dans les petits pays, supérieur en
moyenne à 27% en Estonie, en Slovaquie ou en
République tchèque. Il a aussi connu un considérable
envol en Bulgarie, après l’adhésion à l’UE. En revanche,
il a avoisiné les 20% en Pologne sur pratiquement toute
la période.
La progression salariale
La croissance soutenue de la zone jusqu’en 2008 a
permis une forte augmentation des revenus du travail.
Ainsi, le salaire brut mensuel, exprimé en parité de
pouvoir d’achat2, est passé en moyenne sur la zone de
720 à 1 100 euros entre 2001 et 2008, soit une
progression moyenne de 6,2% l’an (cf. graphique 2).
Janvier 2010
2002
Graphique 2
2003
2004
2005
2006
2007
2008
Source : WIIW
C’est là où la rémunération était initialement la plus
basse que le rattrapage a été le plus rapide : la
Roumanie et la Bulgarie, avec des salaires bruts
mensuels de 440 euros et 370 euros, ont ainsi connu
des augmentations moyennes de 9,5 et 7% l’an
respectivement. Celle des pays baltes, où les
rémunérations brutes étaient de l’ordre de 550 à 650
euros par mois, ont avoisiné les 8% l’an. A l’autre bout
de l’échelle, le salaire mensuel polonais est passé entre
2001 et 2008 de 940 à 1 250 euros et celui de la
Slovénie de 1 360 à 1 740 euros, soit des progressions
de 4 et 3,6% respectivement.
Des rigidités sur le marché du travail
Cette croissance dynamique des salaires illustre
aussi le fonctionnement de marchés du travail souvent
restés relativement peu flexibles. Le taux de chômage a
ainsi fortement diminué en général. Entre 1998 et 2008,
il est par exemple passé (au sens du BIT) de 10,2% à
7,1% en Pologne, nonobstant une forte volatilité
puisqu’il a avoisiné les 20% de mi-2002 à mi-2004,
selon un schéma d’évolution que l’on retrouve en
Bulgarie et en Slovaquie. Seule la Hongrie, dont le
processus de convergence subissait une rupture sur
laquelle nous reviendrons, a vu sa situation se dégrader
de 2004 à 2008 (cf. graphique 3).
La baisse du chômage dans l’ensemble de la région
depuis 2004 traduit essentiellement une croissance
robuste de l’emploi, avec des taux d’emploi 3 qui, par
exemple, ont augmenté de 50,4% à 63,8% en Bulgarie
et de 58,6% à 69,4% en Lettonie. Mais, là encore, force
est de constater une grande dispersion, d’un pays à
l’autre, de ces taux, particulièrement faibles en Pologne
(59% en 2008), en Roumanie (59,3%) et plus encore en
Hongrie (56,6%). Ces différences vont de pair avec des
taux d’activité4 eux-mêmes disparates, s’échelonnant en
2008 de 61,4% en Hongrie à 73,5% en Estonie.
Conjoncture
28
mutation de leur paysage économique qui a été à
l’œuvre.
Taux de chômage, % (au sens du BIT)
21
Une insertion favorable dans le tissu productif européen
18
15
12
9
6
3
0
Pologne
Rép. tchèque
Hongrie
Bulgarie
Slovaquie
1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Graphique 3
Source : Eurostat
De ce constat, il ressort que les marchés du travail
des petits pays de la zone, Etats baltes, Slovénie, dans
une légèrement moindre mesure République tchèque et
Slovaquie, n’ont pas été affectés par les mêmes rigidités
que ceux des économies de plus grande taille, Pologne,
Roumanie ou Hongrie. C’est ainsi que l’on perçoit dans
ces grands pays de fortes inégalités régionales, de
même qu’une large incidence du chômage de longue
durée, alors même que certains secteurs comme la
construction devaient faire face à une pénurie de maind’œuvre.
L’évolution des flux migratoires
Les tensions sur le marché du travail, présentes
dans l’ensemble de la zone, ont d’ailleurs été amplifiées
par des flux migratoires à destination de l’Europe de
l’Ouest, souvent le Royaume-Uni ou l’Irlande 5 . De
manière surprenante, il semble que ces mouvements
aient été, dans la plupart des cas, plus marqués durant
les cinq années antérieures à l’entrée dans l’UE,
survenue en janvier 2004, que dans celles qui ont suivi :
l’amélioration de l’emploi et des revenus dans les
nouveaux Etats membres élucide sans doute en partie
cet apparent paradoxe. Les retours de main-d’œuvre
semblent même avoir excédé les sorties en Pologne
depuis 2008.
Par ailleurs, certains pays ont eu eux-mêmes
recours à de la main-d’œuvre étrangère, fréquemment
ukrainienne ou biélorusse, afin de limiter les pressions
induites par l’émigration sur leur marché du travail, de
sorte que la République tchèque, la Hongrie, la Slovénie
et la Slovaquie ont enregistré des flux migratoires nets
positifs entre 2004 et 2007.
Bien qu’inachevé, le rattrapage des PECO révèle
donc leur dynamisme au long de cette période de
transition. Plus profondément, c’est une véritable
Janvier 2010
Les mutations de la structure économique
La structure économique des PECO a été
profondément modifiée au cours des vingt dernières
années, se rapprochant, là encore partiellement, des
pays d’Europe occidentale. Cette évolution est
particulièrement perceptible dans la part relative de
secteurs primaire, secondaire et tertiaire dans la valeur
ajoutée. Alors qu’en 1990 l’agriculture représentait 13%
du PIB des PECO, l’industrie 47% et les services 40%,
ces proportions étaient de 3%, 34% et 63%
respectivement en 2005, soit une structure se
rapprochant de celle des premiers membres de la zone
euro où elles s’établissaient à 1%, 27% et 71%6.
Par-delà cette similarité accrue, on peut nuancer le
constat si l’on analyse l’activité à un niveau plus fin : la
part des industries manufacturières dans la valeur
ajoutée est ainsi passée de 12% à 26% entre 1995 et
2005 7 , alors que dans le même temps elle avait
tendance à diminuer dans la zone euro où elle est de
l’ordre de 20%. On voit par là qu’une dynamique de
délocalisations / relocalisations dans les PECO s’est
mise en œuvre, corollaire de spécialisations régionales
différentes au sein de l’Europe. De manière analogue,
certains services se sont considérablement développés,
comme le commerce de détail, l’hôtellerie-restauration,
l’immobilier ou encore les services aux entreprises. Mais
cette dernière catégorie garde une marge de
progression importante, dans la mesure où elle
représentait, en 2005, 11% du PIB (c’était 1,5% dix ans
plus tôt), contre environ 20% dans la zone euro.
Parallèlement, la qualité des biens produits dans les
PECO a connu une amélioration régulière, au triple sens
d’une évolution de la production vers des secteurs plus
intensifs en technologie, vers des biens plus complexes
au sein de ces secteurs et, pour un bien de
consommation donné, d’une plus grande valeur
ajoutée 8 . On doit cependant nuancer ce résultat très
global, dans la mesure où la Bulgarie, la Roumanie et
les Etats baltes, tout en se reconvertissant vers des
secteurs plus intensifs en technologie, se sont plutôt
spécialisés dans les produits les moins élaborés. A
quelques nuances près, force est en tout cas de
constater que les grandes caractéristiques de la
production dans les PECO sont considérablement plus
proches de celles de l’Europe occidentale aujourd’hui
qu’il y a vingt ans.
Conjoncture
29
L’ouverture au commerce international
Le même constat d’une intégration européenne
accrue peut être illustré par l’intensification des
échanges commerciaux. Le taux d’ouverture des PECO9
est ainsi passé de 39% en 1989 à 65% en 1990,
atteignant 116% en 2007, et de 53% à 80% dans la
zone euro pendant la même période (cf. graphique 4).
Bien sûr, la taille limitée de la plupart des économies de
la zone explique pour une part ces proportions élevées,
mais la vitesse du changement traduit le rythme auquel
ces économies se sont tournées vers l’Europe,
partenaire
commercial
privilégié.
Localement,
l’intensification de ces échanges a contribué à
l’amélioration des conditions de vie, en accroissant la
variété des biens disponibles pour les consommateurs.
Taux d'ouverture, %
intégration du commerce international et des flux d’IDE,
qui peut induire, pour certains pays, une spécialisation
sectorielle éventuellement contraire à la synchronisation
des cycles11. A cet égard, l’importance systémique du
secteur automobile pour la Slovaquie et, dans une
moindre mesure, la République tchèque et la Hongrie,
représente un facteur de fragilité spécifique pour ces
pays, qui pourrait devenir plus sensible avec la fin des
« primes à la casse » en France et en Allemagne.
Plus généralement, l’étendue de la crise de 20082009 a mis à mal toute idée de découplage entre
Europe occidentale et Europe émergente. Avant de
s’interroger sur les mécanismes de propagation de cette
crise de la zone euro vers les PECO toutefois, on doit
tenter de mieux comprendre en quoi, inversement, la
dynamique de l’intégration européenne a pu, jusqu’en
2008, contribuer à la convergence réelle que nous
venons de décrire.
180
L’intégration à l’UE, un facteur de convergence et de
rattrapage
160
140
120
100
80
60
40
20
Pologne
Rép. tchèque
Slovaquie
Hongrie
Roumanie
Bulgarie
0
93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08
Graphique 4
Source : Eurostat
Les échanges qui se sont développés relèvent
surtout du commerce intra-branche et révèlent que cette
intégration commerciale participe essentiellement d’une
division internationale des processus productifs, laquelle
s’est structurée sur la base d’investissements directs
étrangers (IDE). On constate, dans certains pays, une
spécialisation marquée : le secteur automobile, très
présent également en République tchèque et en
Hongrie, représente environ 40% des exportations
slovaques, mais on pourrait également citer le poids
croissant du secteur informatique en Pologne.
Une plus étroite synchronisation des cycles
La proximité accrue des structures économiques
avec l’Europe occidentale, l’intensification des liens
commerciaux et l’intégration croissante des processus
productifs se sont traduites par une plus forte
synchronisation des cycles économiques, déjà
manifeste au milieu des années 2000 10 . La littérature
théorique pointe toutefois l’ambivalence d’une plus forte
Janvier 2010
La mutation des PECO au fil des années qui ont
suivi la chute du mur s’inscrivait dans un contexte de
mondialisation dont il n’est pas absurde de penser qu’il
a pu contribuer en grande partie à la rapidité de ces
évolutions. Des études12 se sont toutefois attachées à
mettre au jour l’impact particulier de la dynamique
d’intégration à l’UE. Les résultats sont certes fragiles, en
l’absence de tout point de comparaison qui permettrait
d’isoler l’effet de l’entrée dans l’Union, mais on conclut
généralement à un effet significatif, d’environ 1% de
croissance annuelle du PIB par tête. Cet effet global
d’entraînement dû à l’intégration européenne recouvre
en réalité des processus divers, manifestes, d’une part,
dans l’évolution des institutions et du cadre de la
politique macroéconomique et, d’autre part, dans
d’importants flux financiers.
L’apport des réformes institutionnelles
Les modifications survenues dans le cadre
institutionnel au sens large ont aussi joué leur rôle.
L’acquis communautaire apparaît ainsi, en lui-même,
comme un facteur d’évolution structurelle, avec les
garanties qu’il entraîne en matière, par exemple,
d’indépendance des banques centrales ou de défense
des droits de propriété. L’indicateur de transition défini
par la BERD permet de constater l’ampleur des progrès
réalisés au regard de critères très généraux13. Sur une
échelle de notes s’étendant de 1 à 4,33, alors qu’aucun
Conjoncture
30
score ne dépassait 2,5 en 1991, tous sont compris
depuis 2000 entre 3 et 4, l’éventail ayant même eu
tendance à se resserrer ces dernières années.
Un cadre de gouvernance économique
Au plan de la stabilité macroéconomique, les
critères dits de « convergence » définis par le traité de
Maastricht, qui imposent la maîtrise de l’inflation, du
déficit et de la dette publics, la stabilité du taux de
change et la convergence des taux d’intérêt à long
terme, apportent un cadre à la conduite de la politique
économique 14 . On observe cependant des différences
selon les pays : ainsi l’inflation a pu être globalement
contenue dans les pays ayant adopté des politiques de
ciblage, grâce à une appréciation nominale de la devise.
A contrario, elle s’est envolée dans les pays ayant fait le
choix d’arrimer leur devise à l’euro, les Etats baltes et la
Bulgarie. On observait aussi, jusqu’en 2008, une plus
forte discipline budgétaire dans les plus petits pays
– non seulement ceux où elle était contrainte par la
défense d’un taux de change fixe, mais aussi la
République tchèque et la Slovaquie, où des déficits
historiquement minimes avaient permis de cantonner la
dette publique en dessous de 30% du PIB – alors que
les grands pays de la zone avaient du mal à contenir
leurs dépenses publiques.
Les perspectives d’adoption de l’euro
Indépendamment du rôle d’ancrage nominal fourni
par le Pacte de stabilité et de croissance pour la
conduite des politiques économiques, l’objectif
d’adoption de l’euro, d’ailleurs déjà atteint par la
Slovénie et par la Slovaquie depuis 2007 et 2009
respectivement, était, par lui-même, propre à
encourager les flux de capitaux. En dehors de ces deux
pays, les problèmes de convergence nominale
mentionnés ci-dessus empêchaient l’entrée dans l’UEM,
ouvrant même un débat sur la pertinence des critères
de Maastricht pour les économies en transition.
Malgré tout, la perception de délais relativement
brefs d’adoption de la monnaie unique pour la plupart
des pays, qui prévalait avant la crise, s’est traduite
jusqu’à l’automne 2008 par un effet de « halo ». Les
marchés, confiants dans les mécanismes de discipline
budgétaire inhérents au Pacte et surtout estimant que le
passage à l’euro, jugé imminent, entraînait des
garanties implicites de l’UE, avaient en effet eu
tendance à assimiler les nouveaux Etats membres à
ceux de la zone euro, aboutissant à des spreads
inférieurs à ce qu’auraient justifié les fondamentaux et
Janvier 2010
stimulant le financement externe de ces économies, très
abondant par ailleurs.
Des flux financiers massifs
L’ancrage à l’UE a, en effet, accéléré le rattrapage
des PECO par d’importants transferts de ressources,
essentiels au financement de l’économie, qui ont pris
plusieurs formes.
- Le soutien des fonds structurels
L’Union elle-même a bien sûr contribué directement
à ces transferts grâce à la politique de cohésion
financée par les fonds structurels, le Fonds européen
de développement régional, le Fonds social européen et
le Fonds de cohésion. Les sommes qui leur sont
allouées pour la période 2007-2013 représentent ainsi
en moyenne 2,4% de leur PIB chaque année.
- Une forte présence des banques européennes
Les capitaux ouest-européens, misant sur le
phénomène de rattrapage, ont été attirés par les
perspectives d’une croissance forte, avec des dotations
initiales en capital insuffisantes, qui garantissaient des
rendements élevés. C’est la raison pour laquelle les
banques européennes ont été de plus en plus présentes
sur ces marchés, notamment les banques suédoises
dans les pays baltes et les banques autrichiennes en
Europe centrale, facilitant à la fois leur
approfondissement et un meilleur accès aux marchés
mondiaux. En 2008, les banques étrangères détenaient
ainsi environ 67% des actifs bancaires en Pologne, 84%
en Hongrie et 96% en Slovaquie.
- Un afflux d’IDE
On a déjà mentionné l’importance de
l’investissement en général dans le phénomène de
rattrapage et celle des IDE en particulier pour l’évolution
du tissu économique. Les IDE ont souvent pris la forme
de projets greenfield15 au crédit desquels il faut porter,
par-delà leur pure incidence financière, des transferts de
technologie vecteurs d’une amélioration de la
productivité dans les PECO 16 , et rendus possibles en
particulier par le bon niveau d’éducation général de la
main-d’œuvre. Le stock d’IDE rapporté au PIB a
considérablement crû sur la période, mais dans des
proportions différentes selon les pays : de 1995 à 2008,
il a bondi de 2% à 96% du PIB en Bulgarie, explosant
surtout au moment de l’entrée dans l’UE. Sur la même
période, le stock d’IDE est ainsi passé de 27% à 60%
du PIB en Hongrie, atteignant en fin de période 55% en
République tchèque et 48% en Slovaquie, cependant
qu’il ne dépassait pas 33% en Pologne et restait limité à
38% en Roumanie.
Conjoncture
31
Au total, il apparaît que le rattrapage des PECO
résume un processus d’intégration commerciale,
financière et institutionnelle à l’espace européen. La
crise mondiale, en induisant un ralentissement des
échanges internationaux et un tarissement des flux
financiers, a contrarié l’ensemble de cette dynamique.
Croissance du crédit (glissement annuel, %)
90
80
70
Pologne
Hongrie
Roumanie
Bulgarie
60
50
40
30
Des fragilités latentes exacerbées
par la crise
La convergence des PECO était sous-tendue par
une expansion économique rapide, dont le régime était
en fait déséquilibré, tant en termes de tensions
inflationnistes que de déséquilibres extérieurs. La crise,
d’abord importée de la zone euro, a été d’autant plus
violente dans les PECO qu’elle a révélé les fragilités
latentes de leur modèle de croissance.
Des tensions inflationnistes induites par une situation de
surchauffe
Une forte croissance du crédit
L’abondance des financements extérieurs a permis
une croissance rapide du crédit (cf. graphique 5), qui
s’interprète dans une large mesure en termes de
rattrapage : dans la mesure où l’intermédiation
financière était embryonnaire au début de la transition,
elle est restée comparativement modeste, malgré
l’importance des progrès enregistrés. C’est ainsi que, si
le ratio de crédit sur PIB a augmenté, entre 2000 et
2008, progressant de 54% à 81% en Hongrie ou de
35% à 96% en Estonie, le dernier pourcentage reflétant
l’agressivité des banques scandinaves dans les Etats
baltes, il est en revanche resté stable autour de 50% en
République tchèque, à 57% en Slovaquie, et il est passé
de 27% à 50% en Pologne. En Roumanie, où la
progression du crédit a été spectaculaire au long de ces
années, le ratio a crû de 14% à 40%.
Malgré le degré encore modeste d’intermédiation
financière atteint par la zone, la forte croissance du
crédit s’est révélée déstabilisatrice pour au moins deux
raisons. D’une part, en soutenant la demande
domestique, elle a contribué aux tensions sur les prix à
la consommation et sur les prix du logement. D’autre
part, et nous y reviendrons, dans la mesure où le
secteur privé avait massivement recours au crédit en
devises, il augmentait son exposition au risque de
Janvier 2010
20
10
0
-10
1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Graphique 5
Source : FMI
change alors même que s’accumulaient des
déséquilibres extérieurs susceptibles d’accroître la
volatilité des changes.
Des pressions à la hausse sur les prix
Cette évolution du crédit s’est parfois accompagnée
de politiques budgétaires pro-cycliques : en 2008, le
déficit de la Pologne atteignait 3,6% du PIB en 2008,
celui de la Hongrie 3,8% malgré les efforts consentis
depuis l’automne 2006, et celui de la Roumanie 5,5%.
Certains pays, notamment ceux qui connaissaient des
régimes de changes fixes mais pas uniquement, ont
alors connu des tensions inflationnistes, supérieures à
ce qu’aurait induit mécaniquement le seul effet BalassaSamuelson (cf. graphique 6). Sans même parler du
régime d’hyperinflation que connaissait la Roumanie
jusqu’au milieu des années 2000, l’inflation, au sens de
l’IPCH, a ainsi atteint, en 2008, 12% (cas de la
Bulgarie), 10,6% (Estonie), 11,1% (Lituanie) ou même
15,3% (Lettonie). En Hongrie, elle était, en 2007, de
7,9%.
Taux d'inflation (IPCH, glissement annuel)
35.00
Hongrie
Rép. tchèque
Bulgarie
30.00
25.00
Slovaquie
Pologne
20.00
15.00
10.00
5.00
0.00
-5.00
98
99
00
Graphique 6
Conjoncture
01
02
03
04
05
06
07
08
09
Source : Eurostat
32
Un problème de compétitivité
Avec les tensions inflationnistes s’est mise en place
dans plusieurs pays une boucle prix-salaires. Dans un
marché du travail tendu, où les pressions
démographiques impliquaient de pouvoir attirer une
main-d’œuvre étrangère, le rapport de force de la
négociation salariale a été d’autant plus favorable aux
employés que la négociation est le plus souvent
décentralisée et prend pour référence le salaire des
fonctionnaires, lequel était particulièrement dynamique
dans certains pays. C’est ainsi que les salaires ont pu
connaître les très rapides progressions mentionnées
plus haut.
L’augmentation du coût du travail, d’autant plus forte
que les devises flottantes des PECO s’appréciaient
tendanciellement par rapport à l’euro, tandis que le yen
et le dollar se dépréciaient, a excédé dans la plupart des
cas celle de la productivité, bornée en moyenne par
l’insuffisance du stock de capital disponible. On a alors
assisté à des hausses des coûts salariaux unitaires
préjudiciables à la compétitivité-prix : +16,2% en
Bulgarie en 2008, 15,2% en 2007 en Roumanie et 27%
la même année en Lettonie. On perçoit avec acuité, au
vu de ces statistiques, l’importance des gains de qualité
mentionnés plus haut et des transferts technologiques
occasionnés par les IDE, pour la compétitivité des
PECO et leur positionnement dans le commerce
international.
La surchauffe des économies d’Europe centrale et
orientale, perceptible dans les tensions inflationnistes et
une dégradation de leur compétitivité, s’est aussi
traduite par une dégradation de leur situation extérieure.
Janvier 2010
Des déséquilibres extérieurs peu soutenables
Une dette extérieure explosive
Le financement de l’économie dans les PECO par
des capitaux étrangers, s’il est allé de pair avec une
intégration à l’espace européen qui, par bien des
aspects, était favorable au processus de convergence, a
aussi entraîné une augmentation de la dette extérieure.
De fait, les flux d’IDE, non générateurs de dette, ne
correspondaient qu’à une partie des capitaux entrants.
Cet endettement extérieur a progressivement atteint
des niveaux peu soutenables, en Hongrie surtout où il
s’établissait fin 2008 à 136% du PIB, mais aussi en
Lettonie (près de 130%), en Estonie (120%) ainsi qu’en
Bulgarie (102%). Si l’on raisonne non plus par rapport
au PIB mais en pourcentage des exportations, le degré
d’endettement extérieur de la Pologne (117% des
exports) et de la Roumanie (155%) paraît également
relativement élevé.
Un creusement des déficits courants
Une part importante des investissements, IDE
inclus, s’est dirigée vers le secteur abrité, notamment
l’immobilier, le commerce de détail ou les services
financiers, reflétant logiquement la bulle immobilière, le
boom de la consommation des ménages et l’émergence
de nouveaux circuits de financement de l’économie.
Mais, plus généralement, le dynamisme de la demande
domestique et, en particulier, les besoins de l’économie
en biens d’équipement ont induit un creusement des
déficits courants (cf. graphique 7). Cette dégradation a
été particulièrement marquée dans les pays dont les
devises étaient arrimées à l’euro, puisque les déficits de
balance courante ont atteint en 2008 23% du PIB en
Bulgarie, 13% en Lettonie (après 22,5% durant les deux
années précédentes), 12,4% en Lituanie et 9,1% en
Estonie (où ils étaient à 17% en 2006 et 2007).
Déficits courants (en % du PIB)
10
2005
2006
2007
2008
2009
5
0
-5
-10
-15
-20
-25
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én
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Po
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gn
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ch
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ue
Les tensions inflationnistes, caractéristiques du
régime de surchauffe qui affectait de nombreux pays de
la région avant la crise, se sont aussi traduites par la
formation de bulles de prix d’actifs. Cela a été le cas sur
le marché immobilier, particulièrement dans les pays
baltes mais aussi en Pologne où la progression
nominale des prix du logement excédait 30% en 2005 et
2006, ou en Bulgarie où l’on a connu des évolutions
comparables de mi-2007 à mi-2008, dans les deux cas
malgré de fortes disparités régionales. Des
phénomènes de bulle sont aussi apparus sur plusieurs
marchés boursiers, notamment les plus petits, les
indices de référence ayant été multipliés par plus de 3,5
en Bulgarie ou en Roumanie entre avril 2004 et 2007
tandis qu’ils doublaient en Pologne, en Slovaquie, en
République tchèque ou en Hongrie.
Graphique 7
Conjoncture
Source : Commission européenne
33
Indépendamment même de la question du régime
de change, qui accentue le problème en empêchant la
dépréciation de la monnaie, tous les pays de la zone ont
dû structurellement faire face à des situations de déficit
courant, du fait même du processus de rattrapage dans
lequel ils se trouvaient, y compris la République tchèque
et la Pologne (avec respectivement des déficits de 3,1%
et 5,5% du PIB en 2008) et, à plus forte raison, la
Hongrie (6,6%) et la Roumanie (12,4%).
Un risque de volatilité accrue du taux de change
Ces déséquilibres extérieurs faisaient peser un
risque sur l’évolution des changes dans la zone : alors
que les devises flottantes s’appréciaient tendanciellement sous l’effet de la dynamique de rattrapage, la
situation extérieure induisait une possible remise en
cause de ce mouvement, devenu très sensible aux
entrées de capitaux étrangers. Dès lors étaient réunies
les conditions d’une volatilité accrue de ces monnaies
et, simultanément d’une pression aggravée sur les
pegs, surtout en Lettonie. Au plan macroéconomique,
cela n’est pas neutre : il apparaît que, dans la brève
histoire de la convergence des PECO, la volatilité du
change s’est plutôt accompagnée, toutes choses égales
par ailleurs, d’une croissance plus faible, avec des IDE
eux-mêmes moins importants17.
Surtout, le risque de volatilité des changes
augmentait dans un contexte d’endettement massif du
secteur privé en devises. De fait, durant les années qui
ont précédé la crise, ménages et entreprises se sont
massivement endettés en euro, parfois en dollar ou,
notamment en Hongrie, en franc suisse, souhaitant
bénéficier de taux d’intérêt plus bas que ceux pratiqués
en monnaie locale et négligeant de se couvrir contre le
risque de change car ils anticipaient la poursuite
d’évolutions favorables, qu’il s’agisse de l’appréciation
du forint hongrois, du leu roumain ou du zloty polonais,
ou du maintien du peg sur l’euro des devises baltes et
du lev bulgare. On a ainsi vu croître dans l’ensemble de
la zone la part du crédit libellée en devises qui, en 2008,
atteignait 34% en Pologne, 57% en Roumanie et en
Bulgarie, 65% en Hongrie et en Lituanie, 85 à 90% en
Estonie et en Lettonie. Dès lors, l’exposition des
ménages et des entreprises à un aléa accru sur le
change fragilisait leur solvabilité, résultant in fine en une
augmentation du risque de crédit.
Les PECO se trouvaient donc, avant même que la
crise ne les affecte, fragilisés par les déséquilibres
inhérents à leur modèle de croissance. La convergence
décrite dans la première partie de cet article n’était donc
Janvier 2010
probablement pas un processus intrinsèquement
soutenable, du moins au rythme où elle s’est produite
dans les dernières années. Mais il aura fallu le
révélateur de la crise pour que cela apparaisse
clairement.
Une crise violente, à l’impact différencié selon les pays
Une typologie de la crise dans les PECO
La crise mondiale survenue à l’automne 2008 a
affecté de manière variable les différents pays d’Europe
centrale et orientale, selon le degré de fragilité dans
lequel ils se trouvaient ex ante. Aussi, ni son calendrier
ni son ampleur n’ont été uniformes sur l’ensemble de la
zone.
- Etats baltes
Les pays baltes, où la surchauffe était la plus
manifeste, ont connu un retournement conjoncturel
courant 2008, avant même la faillite de Lehman
Brothers dans le cas de l’Estonie et de la Lettonie,
entrées en récession respectivement au premier et au
deuxième trimestre, cependant que le PIB de la
Lituanie, qui pouvait apparaître la mieux armée, ne se
contractait qu’à partir du quatrième trimestre. Sur
l’ensemble de l’année 2009, les Etats baltes auront
connu la récession la plus violente, avec une contraction
du PIB qui pourrait atteindre 14% en Estonie, 16% en
Lituanie et 18% en Lettonie.
- Hongrie et Roumanie
La Hongrie, de son côté, connaissait depuis 2007
une rupture de son trend de croissance et, partant, du
processus de convergence, induite par le choix de la
rigueur budgétaire fait par le gouvernement Gyurcsany
à l’automne 2006. La crise est donc survenue dans un
contexte de croissance déprimée et a amplifié la
perception des faiblesses structurelles du pays, au
regard à la fois de sa dette extérieure et de ses finances
publiques qui peinaient à se redresser. Les sorties de
capitaux ont alors accéléré le déclenchement d’une
crise de balance des paiements d’une ampleur telle que
le FMI a dû intervenir dès novembre, soutenu par l’UE,
la BERD et des bailleurs bilatéraux, comme il l’a fait en
décembre en Lettonie et, au printemps 2009, en
Roumanie. Les pays les plus affectés par la crise ont
donc été ceux qui présentaient des situations dégradées
à la fois en matière de déficit courant et de déficit public,
le PIB Hongrois se contractant en 2009 d’environ 6,5%
(contre une croissance atone de 0,6% en 2008) et celui
de la Roumanie de 7,5% (contre +6,2% l’année
précédente).
Conjoncture
34
- Bulgarie
La Bulgarie se trouve, au regard de cette typologie,
dans une situation particulière : handicapée par son
régime de change, elle endurait à la veille de la crise
des déficits courants très élevés mais, justement
soucieuse du maintien de son peg, s’évertuait à
dégager année après année des excédents budgétaires. Elle a été profondément affectée par la crise,
avec une récession de 6% (à opposer à une croissance
de 6% en 2008), mais sans que son peg soit réellement
remis en cause et sans avoir à recourir à l’aide du FMI.
- République tchèque, Slovaquie et Slovénie
Enfin, l’absence de forte dégradation de la dette
extérieure et de la situation budgétaire avant la crise en
République tchèque, en Slovaquie et en Slovénie n’a
pas empêché des récessions de 4, 5 et 7,5% en 2009
(contre +2,5, +6,4% et 3,5% l’année précédente). Cette
chute reflète l’importance cruciale des échanges
commerciaux pour ces petites économies très ouvertes ;
symétriquement, la reprise en Europe occidentale
marquera assez rapidement pour ces pays la fin de la
récession, à l’issue d’un délai d’ajustement de quelques
mois.
- Pologne
Parmi les PECO, seule la Pologne connaît une
croissance positive, de l’ordre de 1,5% environ (elle était
de 5% en 2008), soutenue par la profondeur de son
marché domestique, qui a amorti le choc sur la
demande externe au premier trimestre, cependant que
la dépréciation du zloty par rapport à l’euro apportait un
soutien aux exportations. Surtout, la solidité financière
des entreprises, en particulier des PME très peu
endettées, a permis à la Pologne, comparativement à
ses concurrents régionaux, de limiter le ralentissement
de son activité.
Les canaux de transmission de la crise
Si l’on tente, au-delà des différences entre pays,
d’esquisser un schéma global de la crise dans les
PECO, il apparaît qu’en l’absence quasi totale
d’exposition au problème des subprimes ils ont, jusqu’à
l’été 2008, globalement été épargnés par la tourmente.
Depuis lors, en revanche, l’Europe centrale et orientale
figure parmi les régions les plus durement frappées,
d’autant plus sévèrement en fait que les années
précédentes avaient été caractérisées par une situation
de surchauffe.
- Un choc sur les exportations
Son intégration à l’économie européenne a entraîné
une rapide transmission du choc de demande affectant
Janvier 2010
la zone euro, son premier partenaire commercial, ce qui
a induit un ralentissement des exportations. La
demande domestique a été très vite affectée, à
proportion de l’importance du secteur exportateur, avec
une contraction de l’investissement et une rapide
montée du taux de chômage, de l’ordre de 2 à 3 points
en République tchèque, en Slovénie ou en Slovaquie,
mais de 8 à 9 points dans les pays baltes.
- Des flux de capitaux défavorables
Au mécanisme de transmission de la crise, par le
commerce international, se sont ajoutés des sorties de
capitaux volatils et un tarissement des entrées
d’investissements, qui ont mis en péril la soutenabilité
de la situation extérieure. Ces flux peuvent s’expliquer
par une prise de conscience, de la part des
investisseurs, des fragilités de certains pays, à un
moment où la crise se traduisait par une aversion au
risque plus aiguë. De tels mouvements ont joué un rôle
crucial dans le déclenchement de la crise hongroise en
octobre 2008.
- Un problème de soutenabilité de l’endettement en
devises du secteur privé
Corrélativement, la croissance du crédit a
commencé à ralentir, en partie sous l’effet de la
contrainte de liquidité à laquelle les maisons mères
étaient elles-mêmes soumises. Même si elles ont pris
soin de ne pas se retirer massivement de la zone, dans
le cadre notamment du processus de Vienne initié par le
FMI et la BERD en avril 2009, elles se sont néanmoins
montrées d’une sélectivité croissante dans l’octroi de
nouveaux crédits. On aboutit ainsi depuis le printemps
ou l’été 2009, dans les baltes, en Hongrie et en
Roumanie notamment, à des situations de credit crunch
qui ont rendu difficile le refinancement du secteur privé
et, ainsi, contribué à affaiblir la demande domestique,
même s’il est difficile de faire la part des politiques de
crédit restrictives et des anticipations pessimistes des
ménages et des entreprises qui les conduisent à moins
solliciter les banques. Parallèlement, la dépréciation des
monnaies flottantes a posé aux débiteurs un problème
de valorisation en monnaie locale de leur dette en
devises et de poids de leurs engagements.
Au total, hormis le cas de la Pologne, la région dans
son ensemble connaît du fait de la crise mondiale une
très profonde récession, plus aiguë que celle de
l’Europe occidentale. Après des années de forte
croissance dans les PECO, 2009 marque donc une
interruption dans le processus de rattrapage. Dans ces
conditions, il est légitime de s’interroger sur les
éventuels effets induits à plus long terme par la crise.
Conjoncture
35
Les risques d’un ralentissement du
processus de convergence
La crise s’est certes traduite par une réduction des
déséquilibres macroéconomiques qui tenaient à la
situation de surchauffe, avec une diminution des déficits
courants (lesquels restent néanmoins élevés dans
certains pays, notamment dans les baltes et en
Bulgarie) et des pressions inflationnistes, le danger
résidant plutôt aujourd’hui pour plusieurs pays dans un
risque de déflation. D’amples corrections ont aussi eu
lieu sur plusieurs marchés boursiers et immobiliers.
Mais la conjoncture récente a également accru les
tensions sur les finances publiques et sur les taux de
change, éloignant les perspectives d’adoption de l’euro.
Devant les difficultés rencontrées par l’ensemble des
pays de la zone, des doutes surgissent quant au
dynamisme de la croissance dans les années à venir.
augmenté depuis la crise. Les spreads souverains,
après s’être considérablement écartés début 2009, ont
peu à peu diminué mais restent, fin 2009, sensiblement
plus élevés qu’avant la crise, de 200 à 300 points de
base en Bulgarie, Hongrie et Roumanie, et d’environ
120 points de base en Pologne (cf. graphique 8). A cet
égard, l’effet de « halo » mentionné plus haut n’a plus
cours aujourd’hui : depuis l’intervention du FMI en
Hongrie, les PECO sont de nouveau assimilés par les
marchés financiers à des émergents.
Prime de CDS souverains à 5 ans, points de base
900
800
700
Pologne
Rép. tchèque
600
Slovaquie
Hongrie
500
Roumanie
Lituanie
400
300
200
Des politiques budgétaires sous contrainte
100
0
Malgré le cadre institutionnel et financier qui
s’applique aux finances publiques des PECO, celles-ci
pourraient être d’autant plus durablement dégradées
que des incertitudes politiques planent sur beaucoup de
pays de la région.
Des garde-fous opposés à la dérive des
dépenses publiques
Les politiques budgétaires sont dans bien des cas
contraintes par des mécanismes internationaux. C’est
notamment le fait des engagements qui lient la Hongrie,
la Lettonie et la Roumanie aux bailleurs de fonds
internationaux venus à leur chevet, coordonnés par le
FMI, et regroupant également l’UE, la BERD et des
partenaires bilatéraux. Indépendamment de la discipline
exigée par le FMI, peut-être plus adaptable que par le
passé mais pas inexistante 18, la volonté d’entrer dans
l’UEM, qui implique le respect des critères de
convergence, est aussi un facteur important à cet égard.
La Pologne voit même peser sur elle une contrainte
supplémentaire, avec l’obligation inscrite dans le droit
interne de ne pas laisser la dette publique augmenter
au-delà de 55% du PIB, faute de quoi il appartient au
gouvernement de proposer des mesures d’austérité
budgétaire adaptées.
Les règles institutionnelles limitant les possibilités de
relance budgétaire se doublent d’une contrainte
financière, le coût du recours à l’endettement ayant
Janvier 2010
03/01/05
03/01/06
Graphique 8
03/01/07
03/01/08
02/01/09
Source : CMA
Une dégradation des ratios de déficit et de dette
Malgré les contraintes qui s’imposent à eux, les
PECO ont vu leur situation budgétaire se dégrader
depuis l’automne 2008 (cf. graphique 9). En 2009,
l’ampleur de la récession est telle que les stabilisateurs
automatiques ont abouti à un fort creusement des
déficits, alors même que des mesures d’austérité
budgétaire étaient prises dans plusieurs pays, au
premier rang desquels la Hongrie, qui avait déjà franchi
le pas de la rigueur depuis deux ans, ou la Lettonie.
C’est même le cas de la Pologne, dont le déficit public
avait commencé à se détériorer dès 2008, atteignant
3,6% sous l’effet d’une politique budgétaire laxiste, alors
même que le pays connaissait encore une croissance
brillante de l’ordre de 5%.
Plus généralement, à l’exception de la République
tchèque, de la Slovaquie ou de la Bulgarie qui, avant la
crise, dégageaient des excédents ou se trouvaient
proches de l’équilibre, les pays de la zone pratiquaient
souvent des politiques pro-cycliques qui, la crise venue,
limitent cruellement leurs marges de manœuvre. Aussi
les efforts consentis aujourd’hui dans la plupart des
pays, alors qu’ils sont plus coûteux, ne permettent pas
réellement un redressement, puisque l’on devrait
Conjoncture
36
enregistrer des déficits de l’ordre de 6% du PIB en
Pologne et en Slovaquie, 7% en République tchèque et
8% en Roumanie.
Déficits publics (en % du PIB)
2007
2008
2009
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B
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2005
8
6
4
2
0
-2
-4
-6
-8
-10
-12
Graphique 9
Source : Commission européenne
Dans ce contexte, la dette publique connaît une
croissance très rapide (cf. graphique 10), relativement
bénigne dans les pays où elle était initialement faible, à
moins de 30% du PIB comme en République tchèque
ou en Slovaquie, mais plus problématique lorsqu’elle
avoisine les 80% du PIB, comme en Hongrie, ou
approche le seuil de 55% en Pologne. Alors que les
émergents voient en moyenne leurs dettes publiques se
stabiliser ou diminuer, les PECO sont donc, en la
matière, plus proches des pays développés. Mais ces
évolutions défavorables des finances publiques reflètent
l’impact mécanique de la conjoncture, sans même que
les Etats aient réellement envisagé des politiques de
relance d’importance significative. En un sens, les
exigences de la convergence nominale s’opposent ici
aux perspectives de convergence réelle, lesquelles
auraient pu requérir une stimulation budgétaire de
grande ampleur.
Dettes publiques (en % du PIB)
Es
to
ni
e
2006
2007
2008
2009
R
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.
B
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Tc
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2005
Le
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ni
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Li
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Po
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R
ou
m
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Sl
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aq
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Sl
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ie
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
Graphique 10
Source : Commission européenne
Janvier 2010
Un manque de visibilité politique
La visibilité à moyen terme sur les grands équilibres
budgétaires de la région est en outre brouillée par des
aléas politiques qui rendent plus incertaine la mise en
œuvre cohérente de politiques d’ajustement. Les
derniers mois ont vu se nouer dans la zone plusieurs
crises ministérielles : chute du gouvernement letton en
février 2009, chute du gouvernement hongrois puis du
gouvernement tchèque, avec un gouvernement
intérimaire appelé à diriger le pays jusqu’au printemps
prochain, faute d’accord sur la date des élections, puis
éclatement de la coalition qui soutenait le gouvernement
roumain, alors que l’urgence imposerait de voter le
budget pour répondre aux demandes du FMI.
L’exemple hongrois a montré que cette instabilité
politique n’entraînait pas nécessairement un laxisme
budgétaire. Mais avec les échéances électorales qui
s’approchent dans la plupart de ces pays (et également
en Pologne, avec des élections présidentielles en 2010
et des législatives en 2011), la tentation risque de
s’accroître de relâcher la politique budgétaire.
Une volatilité des changes persistante
Une volatilité forte depuis l’été 2008
En déstabilisant la situation extérieure des pays de
la zone, la crise a induit, dans les pays dont le change
est flexible, une forte dépréciation des devises, prenant
à revers les anticipations d’appréciation fermement
ancrées qui soutenaient la dynamique de l’endettement
des ménages et des entreprises en devises. Entre l’été
2008 et l’hiver 2009, le zloty s’est déprécié de plus de
50% contre euro, le forint de près de 40%, la couronne
tchèque de près de 30% et le leu roumain de 25% (cf.
graphique 11). La solvabilité du secteur privé s’est alors
trouvée érodée, dans un contexte de contraction de
l’activité économique et de tensions sur la liquidité, ce
qui a induit la hausse du risque de crédit déjà
mentionnée.
Depuis février / mars 2009, les monnaies locales
s’apprécient de nouveau, sous l’effet d’un redressement
des balances courantes. Elle ont retrouvé fin 2009 leurs
niveaux de parité par rapport à l’euro de début d’année.
Mais les incertitudes entourant l’évolution des finances
publiques, et un possible retour à la dégradation des
comptes courants dès lors que la demande interne aura
renoué avec un certain dynamisme, suggèrent que les
changes devraient rester volatils dans les mois à venir.
Même si les banques de la région semblent s’engager
Conjoncture
37
Evolution des changes, indices base 01/01/08=100
140
130
120
110
100
90
EUR / PLZ
EUR / CZK
EUR / HUF
EUR / RON
80
01/01/08
Graphique 11
01/07/08
30/12/08
30/06/09
29/12/09
Source : Reuters
dans une réduction des prêts en devises, les problèmes
posés en matière de risque de crédit pourraient
persister dans les prochaines années. En particulier, le
statut de la dette en euros dans les PECO reste d’autant
plus précaire que l’horizon d’adoption de la monnaie
unique semble s’éloigner.
Un calendrier d’entrée dans la zone euro devenu
aléatoire
L’instabilité du change pourrait en effet entrer en
contradiction avec l’aspiration de la plupart des pays de
la zone à entrer rapidement dans l’UEM. Cela suppose
en effet, dans un premier temps, d’intégrer le
mécanisme de change européen dit MCE 2, avec
fixation d’une parité de référence vis-à-vis de l’euro, le
change ne devant pas sortir de marges de fluctuation de
plus ou moins 15% par rapport à ce taux de référence
durant les deux ans qui suivent. Le précédent slovaque
a montré qu’il est possible de redéfinir à la hausse la
parité de référence durant cette période probatoire, à la
suite de laquelle le pays adopte l’euro s’il satisfait aux
critères de convergence nominale définis par le Pacte
de stabilité et de croissance.
En tout état de cause, la récente volatilité des
devises rendrait délicate aujourd’hui la définition d’une
parité de référence. La souplesse octroyée par des
changes flexibles et, notamment, les possibilités de
dépréciation ayant vocation à soutenir les exports
s’avèrent favorables dans une période de conjoncture
troublée. En outre, si la crise a entraîné dans l’ensemble
des pays de la zone une diminution de l’inflation, la
dégradation des finances publiques devrait constituer
pour plusieurs années un obstacle à l’adoption de l’euro.
Actuellement, les trois Etats baltes font partie du
MCE 2, mais seule l’Estonie semble en mesure
d’éventuellement satisfaire aux critères de Maastricht
Janvier 2010
dans un futur relativement proche, avec cependant
beaucoup d’incertitudes en matière budgétaire. Plus
généralement, dans la zone, seules l’Estonie, la
République tchèque et la Bulgarie ne font pas
aujourd’hui l’objet de procédures pour déficit excessif de
la part de la Commission européenne ; la dégradation
des finances publiques obère toute perspective
d’adoption de l’euro pour les autres, en l’état actuel des
critères de Maastricht dont une évolution semble peu
probable dans la mesure où elle exigerait l’unanimité
des Etats membres.
Jusqu’en avril dernier, la Pologne était très
volontariste. Ainsi, le gouvernement plaidait pour une
adoption de l’euro en 2012, mais il a dû
progressivement reconsidérer cet objectif, pour
l’abandonner explicitement au mois de juillet. Dans la
mesure où le pays est tenu, par la procédure de déficit
excessif, de rétablir ses finances publiques à l’horizon
2012, l’adoption de l’euro, sous réserve d’une
vérification des autres critères, pourrait avoir lieu en
2014. La Hongrie doit ramener son déficit sous la barre
des 3% à l’horizon 2011, mais sa dette publique
constituera longtemps un obstacle diriment. La Bulgarie,
de son côté, dispose certes d’une situation budgétaire
saine, mais l’entrée dans le MCE 2 supposerait une
résorption de ses déséquilibres macroéconomiques, et
notamment du déficit courant, qui reste de l’ordre de
13% du PIB en 2009 et pourrait encore excéder 10% en
2010. Quant à la République tchèque, sa conjoncture
dégradée se traduit par une forte augmentation du
déficit budgétaire, déjà mentionnée et appelée à durer
peut-être jusqu’en 2013. Il semble, en outre, que,
politiquement, le consensus en faveur d’une adoption
rapide de la monnaie unique fasse défaut dans ce pays.
Au total, tant la détérioration des finances publiques
que le recul du calendrier d’intégration à l’UEM sont
susceptibles d’affecter la croissance dans les
prochaines années.
Des perspectives de croissance plus modestes
Vers une reprise molle
L’ampleur de la récession dans presque tous les
PECO en 2009 traduit celle des ajustements
nécessaires, après des années de surchauffe. La
reprise en Europe occidentale devrait, au cours des
prochains trimestres, stimuler les exportations dans
l’ensemble de la zone. Mais, hormis peut-être dans les
petites économies très ouvertes que constituent la
République tchèque et la Slovaquie, et d’ailleurs sous
Conjoncture
38
réserve dans ce deuxième pays d’une bonne santé du
secteur automobile, la contribution du commerce
international ne suffira pas à ramener les rythmes
d’expansion qui prévalaient à la veille de la crise.
Faute d’une demande domestique dynamique, la
croissance devrait en 2010 rester inférieure à 2% dans
l’ensemble de la zone. Les Etats baltes devraient
connaître encore des récessions, peut-être de l’ordre de
4%, et il se pourrait que ce soit encore le cas de la
Hongrie et de la Bulgarie, où les marges de manoeuvre
sont les plus limitées du fait de l’ampleur des
déséquilibres initiaux pour la Hongrie et de la contrainte
du peg pour la Bulgarie.
Des défis à relever pour la croissance potentielle
Au-delà de cet horizon immédiat, la croissance
potentielle a été affectée par la crise. Le défaut
d’adoption de l’euro et la volatilité des changes
pourraient ainsi se traduire par une méfiance des
investisseurs, même si la certitude demeure qu’à terme
tous adopteront l’euro. De fait, il semble que la crise ait
modifié leur approche des PECO, à partir du moment où
la Hongrie était stigmatisée par l’appel au FMI. Or on a
déjà pris note de l’importance des IDE dans les
transferts de technologie et l’évolution du tissu productif.
Avec la relative étroitesse des marges de manœuvre
dont bénéficie la dépense publique, les capitaux
étrangers vont demeurer particulièrement nécessaires,
aussi, en matière d’infrastructures et de R&D.
La poursuite de cette évolution qualitative est
d’autant plus cruciale que les problèmes de
compétitivité des PECO vont être récurrents dans les
prochaines années. Leur évolution démographique
prévisible constitue à cet égard un défi : l’âge moyen de
la population devrait, à l’horizon 2030, croître de 5 à 7
ans par rapport à 2004, passant ainsi de 37,5 à 44,5
ans en Pologne, de 41 à 47,5 ans en Bulgarie ou de 40
à 45 ans en Hongrie. A titre de comparaison, il devrait
augmenter en France de 39 à 43 ans. Ce vieillissement
démographique va mettre à l’épreuve des marchés du
travail déjà affectés de rigidités, en rendant plus aiguës
les difficultés d’emploi des travailleurs âgés à mesure
que leur part dans la population augmentera. La
déformation en cours de la pyramide des âges va aussi
accroître les dépenses de santé et de retraite, ajoutant
aux difficultés que connaissent déjà les finances
publiques et suscitant, éventuellement, une hausse des
prélèvements obligatoires et du coût du travail.
Le potentiel d’amélioration en matière d’institutions
est par ailleurs limité, sauf peut-être pour ce qui est du
Janvier 2010
fonctionnement de la justice, notamment en Roumanie
et en Bulgarie dont les problèmes de corruption ont été
soulignés par la Commission européenne à l’été 2008.
D’une manière générale, ces deux Etats, derniers venus
dans l’UE, sont peut-être ceux où les possibilités de
progrès structurels sont les plus nettes.
La zone pourrait, par ailleurs, pâtir de la
concurrence des Balkans, notamment des pays de l’exYougoslavie, à mesure que leur situation politique se
stabilisera et qu’ils seront appelés à rejoindre l’UE,
bénéficiant à leur tour des fonds structurels et de
l’intérêt des investisseurs pour un écart de rendement
du capital favorable et pour le faible coût de la main
d’œuvre. Par-delà les frontières de l’Europe, il faudra
enfin que les PECO tiennent compte de la concurrence
croissante de l’Asie ou d’un pays comme le Maroc, déjà
très présent dans le secteur textile, et peut-être demain
dans l’automobile.
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L’intégration croissante des PECO à l’Europe,
commerciale, financière, institutionnelle et politique, va
dans le sens de l’histoire et ne sera pas remise en
cause dans les années à venir. Encore faut-il
s’interroger sur la portée de cette intégration : la division
internationale des processus productifs a amené les
PECO à connaître une industrialisation rapide et une
spécialisation sur certains secteurs pour lesquels la
concurrence de pays tiers risque de devenir croissante.
Alors que la crise pourrait bien avoir atténué leur
potentiel de croissance à long terme, il importe donc
que les PECO relèvent les défis d’une amélioration de
leurs infrastructures et d’une poursuite de la montée en
gamme de leur production.
21 décembre 2009
[email protected]
Conjoncture
39
NOTES
1
Le 1er mai 2004, outre Chypre et Malte qui ne sont pas traitées ici, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République
tchèque, la Slovaquie, la Hongrie et la Slovénie intégraient l’UE, rejointes le 1er janvier 2007 par la Roumanie et la Bulgarie. La
Slovénie et la Slovaquie ont adopté l’euro respectivement le 1er janvier 2007 et le 1er janvier 2009.
2 La parité de pouvoir d’achat est un taux de conversion monétaire qui permet de comparer des niveaux de vie entre pays. Ce
taux exprime le rapport entre les quantités d’unités monétaires nécessaires dans des pays différents pour se procurer le même
panier de biens et de services.
3 Le taux d’emploi se définit comme le ratio des effectifs employés à la population active totale (population en âge de travailler qui
exerce une activité ou qui recherche un emploi).
4 Le taux d’activité est défini par le nombre d’actifs (occupés ou au chômage) rapporté au total de la population en âge de
travailler.
5 Voir F. Ferdinand Heinz et M. Ward-Warmedinger, Cross-border labour mobility within an enlarged EU, European Central Bank,
Occasional Paper Series n° 52, 2006.
6 Voir D. Ritzberger-Grünwald et J. Wörz, “Macroconvergence in CESEE”, in Oesterreichische Nationalbank, 1989 – 2009 Twenty
years of East-West integration : Hopes and achievements, Focus on European economic integration, Special issue 2009.
7 Voir M. Timmer, M. O’Mahony et B. van Ark, The EU KLEMS growth and productivity accounts : an overview, University of
Groningen et University of Birmingham, www.euklems.net, 2008.
8 Voir U. Dulleck, N. Foster, R. Stehrer et J. Wörz, “Dimensions of quality upgrading : evidence from CEECs”, in Economics of
transition, 13(1), 2005.
9 Défini par la somme des exports et des imports rapportée au PIB.
10 Voir F. Faure, “L’intégration des pays d’Europe centrale dans l’UEM : le plus tôt serait-il le mieux? (I)”, in BNP Paribas,
Conjoncture, septembre 2004.
11 Voir European Commission, Five years of an enlarged EU, economic achievements and challenges, European economy 1,
2009.
12 Voir M. Cihak et W. Fonteyne, Five years after : European Union membership and macro-financial stability in the new member
States, International Monetary Fund, IMF working paper WP/09/68, 2009.
13 L’indicateur de transition de la BERD se base sur une évaluation des progrès en matière de privatisation, de restructuration des
entreprises, de libéralisation des prix, de système commercial et de change, de politique de la concurrence, de réforme du secteur
bancaire et de libéralisation des taux d’intérêt, de marché financiers et institutions financières non bancaires et enfin de réformes
structurelles au sens large.
14 Le déficit public doit être inférieur à 3% du PIB, la dette publique inférieure à 60% du PIB, le taux d’inflation ne doit pas
dépasser de plus de 1,5 point l’inflation moyenne des trois Etats membres de l’UE où elle était la plus basse durant l’année
précédente, et les taux d’intérêt à long terme ne doivent pas dépasser de plus de 2 points ce qu’ils étaient en moyenne dans ces
trois mêmes Etats membres au cours de l’année précédente. En outre, le taux de change par rapport à l’euro doit, durant les deux
années de participation au MCE 2, demeurer dans une fourchette de plus ou moins 15% par rapport à un taux de référence.
15 Les investissements greenfield correspondent à la création d’unités de production ex nihilo.
16 Voir K. E. O. Alho, V. Kaitila et M. Widgren, Offshoring, relocation and the speed of convergence in the enlarged European
Union, Centre for Economic Policy Research, Discussion paper series n° 7000, 2008.
17 Voir O. Arratibel, D. Furceri et R. Martin, Real convergence in Central and Eastern European EU member states. Which role for
exchange rate volatility ?, European Central Bank, Working Paper Series n° 929, 2008.
18 Voir V. Gligorov, “The new IMF approach and the EU”, in V Grigorov, J. Pöschl, S. Richter et al., Where have all the shooting
stars gone?, wiiw, Current analyses and forecasts, 4, 2009.
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