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1914-1918
Les navires
français
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Sommaire
Avant-propos .............................. 4
Au delà de la ligne bleue des
Vosges ......................................... 5
Bouvet .......................................10
Gaulois........................................12
Justice ........................................14
Danton ........................................16
Courbet...................................... 18
Provence ................................... 20
Requin ....................................... 22
Amiral Charner .......................... 24
Jeanne d’Arc ............................. 26
Dupleix....................................... 28
Dupetit-Thouars ........................ 30
Marseillaise............................... 32
Léon Gambetta......................... 34
Jules Michelet .......................... 36
Chateaurenault ......................... 38
Descartes.................................. 40
Cassard...................................... 42
D’Estrée ..................................... 44
Foudre ....................................... 46
Torpilleur 369............................ 48
Cyclone ...................................... 50
Mousquet .................................. 52
Mameluck.................................. 54
Bouclier ..................................... 56
Bisson........................................ 58
Enseigne Roux .......................... 60
Temeraire .................................. 62
Arabe.......................................... 64
Sirène ........................................ 66
Saphir ........................................ 68
Monge ........................................ 70
Curie............................................72
Artemis .......................................74
Surprise ..................................... 76
Eveillé ........................................ 84
France IV ................................... 92
Bellatrix ..................................... 78
Chasseur 79.............................. 86
Caractéristiques ....................... 94
Oise ............................................ 80
Bouvines ................................... 88
Arras .......................................... 82
Rhône ........................................ 90
Légende
Torpilleurs à Brest en 1916. (ECPAD)
Au-delà de la ligne bleue des Vosges
Avant-propos
Le dernier combattant de la Grande Guerre nous apporte l’ultime témoignage d’une époque que l’on voit si lointaine, que l’on croit si improbable. Se plonger dans l’histoire
de ce conflit, notamment dans ses aspects maritimes, c’est donner aux projets de Jules Verne la couleur sépia des
vieilles photos, le goût amer de tant d’hommes fauchés, de si belles inventions dévoyées.
La flotte française n’était pas alors la plus forte, ni la plus moderne, et comparé à l’enfer des tranchées, le sort de nos
marins n’a pas laissé de trace aussi prégnante, de marque aussi profonde. Pourtant il fallut se battre là aussi contre
un adversaire déterminé, connaître les longues heures d’attente qui se terminaient par un affrontement à mort, une
lutte sans merci.
Mourir à vingt ans dans les fonds d’un cuirassé qui se retourne en à peine une minute, finir asphyxié dans la coque d’un
sous-marin devenu cercueil collectif au fond d’une fosse qui restera commune et à jamais ignorée, mener été comme
hiver, sous toutes les latitudes, un combat sans espoir contre le temps qui passe et amène son cortège de peines, et
contre une météo qui ajoute à l’angoisse du devenir la douleur du moment présent, c’était le lot de tous ces hommes.
La guerre sur terre et sur mer
La Première Guerre mondiale a commencé le 3 août 1914 et s’est terminée le 11 novembre 1918 si on oublie les interventions alliées en Russie en 1919. La Grande Guerre que l’on
espérait être la « der des der », a profondément marqué les Français. Le souvenir des hommes disparus s’estompe dans les familles mais reste gravé sur les monuments aux morts,
dernière preuve du sacrifice de presque toute
une génération. Pour les Français, les
batailles de la Marne, de Verdun et
du Chemin des Dames restent
les symboles d’une guerre
terrestre de plus de quatre ans sur un front continu de plusieurs centaines de kilomètres.
Cependant, des combats se sont aussi déroulés sur d’autres fronts, en Russie, en Italie, au
Moyen-Orient, dans les Balkans et même en Chine (prise de l’enclave allemande de TsingTao par les Japonais) et sur toutes les mers du globe avec des combats en mer du Nord,
Atlantique, Méditerranée mais aussi dans les océans Indien et Pacifique.
Avec le recul, on peut maintenant considérer cette guerre plus comme une guerre civile européenne qu’une guerre mondiale, au moins jusqu’à intervention des États-Unis,
en avril 1917. D’un côté, les Empires centraux, Allemagne et Autriche-Hongrie rejoints
par la Turquie et la Bulgarie constituent un bloc au centre de l’Europe ; de l’autre, Alliés,
Il y eut des héros, des martyrs, des destins qui rencontrèrent l’Histoire, que ce soit dans la boue des tranchées du Nord
de la France ou dans l’eau de lagons de Polynésie. Et il y eut des navires.
Ce livre vous présente le portrait d’une marine qui se cherchait, victime des théories fumeuses de la « Jeune École »
autant que des élucubrations tous azimuts d’ingénieurs et d’états-majors dont l’excuse peut être de s’être trouvés là
au moment où tant d’innovations se bousculaient, et où trier le bon grain de l’ivraie devait être fait par des experts d’un
autre siècle, des politiques dignes d’un ancien régime, avec des méthodes d’évaluation et des doctrines d’utilisation
qui ne progressaient pas aussi vite que la technologie.
Dans un conflit qui vit la naissance des armes blindées et aériennes, durant lequel le pantalon garance - quelle
belle cible ! - ne fut bientôt porté que par quelque comique troupier chargé d’entretenir le moral d’une troupe que la
mitrailleuse, l’artillerie performante et les gaz anéantiraient dès demain, la flotte française se résolut, bon gré mal gré,
à mettre en attente ses désirs de modernité.
La Marine de Georges Leygues, quelques années plus tard, se chargerait de relever le défi. Pour une autre guerre, pour
d’autres combats.
Gilles Garidel
Un cuirassé de la classe danton voisine
avec un vieux croiseur protégé à Toulon,
au début de la Guerre. (ECPAD)
France, Grande Bretagne, Russie, Serbie, Belgique et Japon, sont rejoints plus tard par
des pays « amis » comme l’Italie et la Roumanie ou liés par de forts intérêts commerciaux, Portugal, États-Unis et Brésil, plus la Grèce entraînée dans le camp alliée par une
intervention de ces derniers sur son sol.
En parallèle avec la guerre terrestre, une guerre navale, souvent largement ignorée
en France, se joue sur deux fronts, la guerre d’escadre et la guerre des communications. La première définit la seconde en obligeant les Allemands, faute de pouvoir opérer au large avec leur flotte bloquée par celle des Britanniques, à recourir à la toute
nouvelle arme sous-marine.
Sous-marin à Brest
en 1916. (ECPAD)
La guerre survient alors qu’une course aux armements oppose Britanniques et Allemands. L’Allemagne a commencé à développer une marine océanique à partir de 1897.
Les Britanniques conservaient alors assez de bâtiments pour égaler les deux flottes
les plus puissantes (en dehors de la leur) réunies (à l’époque France et Russie). Cet
équilibre est rompu avec l’apparition de nouvelles puissances qui, comme les Allemands, développent leur marine militaire, notamment les États-Unis et le Japon qui
a battu la Russie en 1905 (bataille de Tsoushima). Les Britanniques mettent en service en 1906 un nouveau modèle de cuirassé, appelé dreadnought, du nom du premier
construit. Ils sont caractérisés par une artillerie principale d’une dizaine de canons du
plus gros calibre (initialement 305 mm puis 340 et 380 mm), une bonne protection
et une vitesse moyenne (environ 20 nœuds) avec une propulsion par turbine. Une version rapide (25 nœuds), appelée croiseur de bataille
mais pratiquement sans protection est aussi construite
en Grande-Bretagne et en Allemagne. Ces deux pays
engagent alors une course pour construire des
dreadnoughts et des croiseurs de bataille.
Les autres puissances maritimes, dont
la France, suivent avec plus ou moins
de difficultés et de retard. Les deux
premiers dreadnoughts français,
le Courbet et le Jean Bart, ne seront mis en service que fin 1913. Au début de la guerre,
les Français n’ont que ces deux dreadnoughts réellement en service alors que les Britanniques en ont vingt et les Allemands treize, plus, respectivement neuf et quatre
croiseurs de bataille.
En mer du Nord, les flottes britanniques et allemandes vont rester face à face pendant toute la guerre. Les Allemands, en principe en infériorité numérique, ne veulent
pas risquer une défaite sur mer et perdre leur flotte. La seule rencontre des deux flottes
presque au complet, lors de la bataille du Jutland, le 31 mai 1916, est indécise. En Méditerranée, la flotte austro-hongroise reste confinée dans l’Adriatique, bloquée par la
flotte française puis par les Italiens entrés en guerre contre l’Autriche le 23 mai 1915.
Les liaisons maritimes sont alors d’une importance capitale. La Grande-Bretagne
doit exporter une partie de sa production et importer matières premières et nourriture alors que les Français, doivent, entre autres, remplacer les charbons du Nord par
des importations d’outre Manche. Les empires français et britanniques fournissent
aussi des troupes pour les fronts terrestres où les pertes sont lourdes. Au début de la
guerre, le danger principal est constitué par les corsaires de surface allemands, navires de guerre et de commerce surpris outre mer par l’ouverture du conflit, une partie
des seconds étant armée en croiseurs auxiliaires. Le plus célèbre est le croiseur léger
Emden, détruit le 9 novembre 1914, après son détachement de l’escadre allemande
du Pacifique qui bombarde Papeete le 22 septembre 1914 avant d’être détruite aux
Falkland par une escadre britannique le 8 décembre 1914. Les derniers corsaires sont
détruits en juillet 1915 (le croiseur Könisgsberg). Les Allemands vont encore envoyer
au large de nouveaux corsaires de surface (Möwe, Greif, Wolf, Seeadler, Leopard) mais
leur action restera marginale.
L’efficacité des sous-marins surprend en fait tout le monde. Cette arme n’existe que
depuis un peu plus de dix ans en 1914. Après le torpillage spectaculaire en mer du Nord
de trois croiseurs cuirassés britanniques le 22 septembre 1914, les escadres de grands
bâtiments ne vont prendre la mer qu’avec des escortes de contre-torpilleurs. Les Allemands vont longtemps hésiter sur la manière de conduire une guerre au commerce
avec les sous-marins. Une zone de guerre est créée par ces derniers en février 1915
mais la destruction de tous les navires de commerce dans cette zone est rapidement
limitée après les protestations des neutres et une série d’ordres dont l’application est
quasi-impossible aboutit à un arrêt de la guerre sous-marine en septembre 1915, sauf
en Méditerranée. Elle reprend en août 1916 avec des restrictions jusqu’au 1er mars
1917, jour où la guerre sous-marine sans restriction est alors effective. Les plus grands
succès allemands sont remportés en avril 1917, avec la destruction de 881 000 tonneaux. La continuation d’un tel taux de perte aurait probablement conduit les Britanniques, dont les stocks de pétrole sont alors presque nuls, à négocier. La menace des
sous-marins conduit les Alliés à se réorganiser et à la création d’une vaste flotte de
patrouilleurs, d’abord avec des unités réquisitionnées puis des bâtiments construits
pour cette mission. L’aviation, en général des hydravions et dirigeables basés sur la
côte, complète les moyens de lutte anti-sous-marine mais la mesure la plus efficace
est la mise en place de convois, généralisés seulement en août 1917.
La défaite des sous-marins a permis en 1918 le transfert massif de troupes américaines en Europe où 1 700 000 soldats américains sont arrivés au 1er octobre.
La Marine nationale en 1914
Au début de la guerre, la flotte française totalise 690 000 tonnes en service et
257 000 tonnes en chantier. Elle est restée longtemps la seconde derrière la britannique mais n’occupe en 1914 que le cinquième rang après la Grande Bretagne, l’Allemagne, les États-Unis et le Japon. La marine marchande française rassemble 1 025
vapeurs et 551 voiliers totalisant 2 320 000 tonnes. Après la défaite de 1870, la priorité
est restée à l’Armée de terre (il faudra bien reprendre un jour l’Alsace et la Lorraine...).
Les évolutions techniques (rapides) aboutissent à la construction (lente) de navires
souvent périmés dès leur mise en service. Le cuirassé est alors le principal bâtiment
de combat et les cuirassés français sont pratiquement construits à l’unité jusqu’en
1900 (on parle alors de flotte d’échantillon). La première « série » sera constituée par
les six unités type Patrie du programme de 1900 et mis en service seulement en 1907
et 1908. La série suivante, les six Danton, est en fait contemporaine du Dreadnought
britannique mais n’est en service qu’en 1911. Les premiers dreadnoughts français sont
mis sur cale en 1910, alors que le Dreadnought britannique, construit en quinze mois,
a été achevé fin 1906. Dans les années 1880, la Jeune École a prôné le développement du torpilleur aux dépens du cuirassé. Une flottille de 370 petits torpilleurs côtiers
(les « numérotés ») a été construite entre 1875 et 1907. Les cent torpilleurs (les contre-torpilleurs français ont été reclassés torpilleurs de haute mer en 1913) en service
au début de la guerre restent des bâtiments légers par rapport aux étrangers. Il reste
encore 115 torpilleurs côtiers. La France a été pionnière dans le développement des
sous-marins mais les 62 bâtiments en service en 1914 sont trop compliqués et fragiles
et l’incapacité de construire de bons moteurs diesels a souvent conduit à conserver
une propulsion en surface à la vapeur.
En dehors des bâtiments détachés aux stations dans les colonies, la flotte est regroupée dans une Armée navale, basée à Toulon avec 17 cuirassés dont deux dreadnoughts,
sept croiseurs cuirassés, 36 torpilleurs, seize sous-marins, deux mouilleurs de mines et
un transporteur d’hydravions. Une petite formation, l’Escadre légère, est à Brest avec six
croiseurs cuirassés ainsi que trois escadrilles de torpilleurs et trois escadrilles de sousmarins. Les conventions navales de janvier et février 1913 permettent un partage des
responsabilités avec les Britanniques. En mer du Nord, ces derniers font face à la flotte allemande à laquelle les Français n’auraient pas été capables de s’opposer et en Méditerranée, l’Armée navale doit contenir la flotte austro-hongroise dans l’Adriatique. Sa première
mission est de couvrir le passage de convois de troupes d’Afrique du Nord en métropole.
Les escadres au mouillage
Après avoir, comme prévu, assuré la couverture des convois en Méditerranée occidentale début août, l’Armée navale assure le blocus de la flotte autrichienne. Le petit croiseur
Zenta, surpris devant Cattaro (Kotor), est coulé par l’Armée navale, presque au complet,
le 16 août. Les torpillages du cuirassé Jean Bart, avarié par le sous-marin autrichien U
12 le 21 décembre 1914 puis du croiseur cuirassé Léon Gambetta, coulé le 27 avril 1915
dans le détroit d’Otrante par le sous-marin autrichien U 5, amènent l’Armée navale à rester au mouillage, prête à appareiller si les Autrichiens veulent sortir d’Adriatique. Elle va
ainsi généralement mouiller à Malte qui sert de base avancée, Navarin (fin 1914), Corfou (à partir de janvier 1916) ou Argostoli (à partir d’avril 1916), placée en seconde ligne
après l’entrée en guerre de l’Italie.
Paradoxalement, ce sont les cuirassés les plus anciens qui vont aller au feu. Constituant une escadre de réserve et « consommables », ils sont engagés lors des opérations
aux Dardanelles entre février 1915 et février 1916. Lors de la tentative de forcement du
détroit, le 18 mars 1915, le Bouvet est coulé et le Gaulois, gravement avarié, n’est sauvé
que de justesse. Des navires français couvrent en janvier 1916 l’évacuation d’Albanie
vers Corfou de l’Armée serbe, avant de la transporter à Salonique en avril et mai 1916.
Une partie de l’Armée navale est engagée lors des événements de Grèce en octobre et
novembre 1916. Des bâtiments français participent au contrôle de la Méditerranée orientale avant d’opérer en mer Noire après l’armistice avec la Turquie. Pour la Marine, la guerre
ne s’achèvera véritablement qu’avec la fin des opérations en mer Noire en mai 1919.
Des permanences aux colonies sont restées assurées par des croiseurs qui chassent
les corsaires de surface allemands avant de participer à l’escorte des convois de troupes
américaines vers l’Europe en 1918.
La guerre sous-marine
Les cuirassés Gaulois, Suffren, Danton et quatre croiseurs sont coulés par des
torpilles de sous-marins ennemis, d’autres sont avariés puis réparés comme les cuirassés Jean Bart, Démocratie et Voltaire. De nombreux navires marchands ont aussi
été victimes des sous-marins, la marine marchande française perdant 500 bâtiments
totalisant 891 000 tonneaux. Une partie de ces pertes est formée de voiliers dont la
flotte est encore importante. Les sous-marins utilisent le canon, les torpilles et, certains, les mines.
Une Direction générale de la guerre sous-marine (DGSM) est créée le 18 juin 1917.
La chasse aux sous-marins conduit à mener une guerre particulière, avec une vaste
flottille de patrouilleurs qui va totaliser, en novembre 1918, 111 torpilleurs, 35 sousmarins, 63 avisos, 153 chasseurs et 734 chalutiers armés. À la fin du conflit, l’Aviation
maritime dispose de 1 264 appareils dont 650 effectivement en ligne, basés dans des
centres côtiers. Les hydravions, s’ils ne détruisent pas les sous-marins, les obligent à
plonger et leur font ainsi perdre une grande partie de leurs possibilités. Les sous-marins français, dont une grande partie opère en Méditerranée, notamment en Adriatique,
sont handicapés par leur manque de fiabilité et, faute de cibles, n’auront que peu de
succès.
La Marine à l’armistice
Fin 1918, la Marine est usée. Elle a perdu presque 12 000 hommes, dont une partie
avec les fusiliers marins engagés sur le front terrestre. Les pertes matérielles totalisent quatre cuirassés, cinq croiseurs, 23 torpilleurs, treize sous-marins, 75 avisos,
patrouilleurs et chalutiers réquisitionnés et six croiseurs auxiliaires. On n’a achevé
que trois cuirassés, deux torpilleurs et 24 sous-marins. Elle a abandonné, au profit
de l’Armée de terre, toute nouvelle construction sauf 80 000 tonnes de bâtiments
de flottilles dont 45 avisos et canonnières et 132 patrouilleurs pour la guerre sousmarine.
Les bâtiments en service, même ceux achevés juste avant la guerre, sont périmés. On terminera, lentement, les quelques unités restées en chantier. Après la
condamnation des unités les plus usées et la prise en compte de bâtiments livrés
par l’Allemagne et l’Autriche dont cinq croiseurs légers, le tonnage total de la flotte
en 1922 est de 485 000 tonnes. C’est le budget de 1922 qui va financer le premier
programme qui est à l’origine de la flotte, moderne, qui sera en service pour la prochaine, en 1939. . .
Légende
Tourelle de 340 mm de la Lorraine
en 1916. (ECPAD)
Bouvet
LE CUIRASSE D’ESCADRE BOUVET fait partie des cinq cuirassés du programme de 1890 dont la construction s’étale jusqu’en
1898. Construits sur des plans différents, le Charles Martel, le Jauréguiberry, le Carnot, le Masséna et le Bouvet ont ainsi
chacun une silhouette caractéristique mais l’armement principal comprend toujours deux canons de 305 mm, deux de 274 mm
et huit de 138 mm. Ils sont plus réputés pour leurs défauts, notamment un manque de stabilité, que pour leurs qualités.
Le Bouvet sert en Méditerranée, sauf une période à Brest entre 1910 et 1912. Il constitue ensuite une 3e escadre à Toulon, à
partir d’octobre 1912 puis en novembre 1913, forme une division de complément qui, au début de la guerre, regroupe le Suffren,
le Saint Louis, le Gaulois et le Bouvet, sous le commandement du contre-amiral Guépratte.
Le Bouvet participe à l’escorte des convois en août 1914 puis à la surveillance du golfe de Gênes et du détroit de Messine.
Début 1915, la division de complément est engagée dans les opérations qui doivent aboutir à la prise des détroits turques par
les Alliés. Le 18 mars 1915, huit cuirassés entrent dans le détroit des Dardanelles, la première ligne étant formée par le Suffren,
le Bouvet, le Gaulois et le Charlemagne et la seconde de cuirassés britanniques. L’artillerie turque touche les navires alliés
dont le Bouvet. Les cuirassés français manœuvrent pour laisser la première ligne aux Britanniques lorsque le Bouvet
touche une mine d’un champ mouillé par les Turcs la nuit précédente. Il chavire et coule en moins d’une minute,
ne laissant que 56 survivants sur les 721 hommes à bord. Le Bouvet est un cuirassé particulièrement connu
après la rapide publication dans la presse française des photographies du naufrage.
Une minute
pour chavirer
Arsenal de Lorient
27 juillet 1898
Coulé
18 mars 1915
12 205 tonnes
118 mètres
622 hommes
Le Bouvet avant la guerre. (Marius Bar, Toulon)
10)
(11
Gaulois
LE CUIRASSE D’ESCADRE GAULOIS est l’un des trois cuirassés du programme de 1892, exceptionnellement construits sur les
mêmes plans, les deux autres étant le Charlemagne et le Saint Louis. Ils sont armés de quatre canons de 305 mm en tourelles
doubles, dix canons de 138 mm et huit de 100 mm. Deux bâtiments comparables mais améliorés seront ensuite construits
entre 1897 et 1903, le Iéna (détruit accidentellement le 12 mars 1907) et le Suffren. Ces bâtiments sont typiques des cuirassés
du début du siècle, avec une artillerie répartie entre trois calibres et une propulsion par machines à vapeur classiques et une
vitesse de l’ordre de 18 nœuds.
Le Gaulois sert en Méditerranée à partir de janvier 1900. Il est incorporé dans la 3e escadre en 1912 puis dans la division de
complément qui remplace la 3e escadre le 1er novembre 1913. Il participe aux escortes de convois au début de la guerre. Engagé
aux Dardanelles, lors du premier bombardement le 19 février puis lors de la tentative de forcement du détroit le 18 mars 1915,
il est gravement avarié par l’artillerie turque et une mine et, coulant, parvient de justesse à s’échouer sur l’île aux Lapins, à
l’entrée du détroit. Renfloué, il est remis en état et rejoint dès le 8 juin 1915 la 1re division dans la 4e escadre qui devient la
division d’Orient le 15 avril 1916.
Le Gaulois est en travaux de juillet à décembre 1916. Le 27 décembre, il se dirige sur Salonique et se trouve en
mer Égée lorsqu’il est torpillé et coulé par le sous-marin allemand UB 47. Quatre hommes sont tués et le reste
de l’équipage est sauvé par le chalutier armé Rochebonne.
Le Charlemagne et le Saint Louis sont désarmés en 1917 mais le Suffren disparaît corps et biens, torpillé
le 26 novembre 1916 par le sous-marin allemand U 52.
En première
ligne
Arsenal de Brest
Décembre 1899
Coulé
27 octobre 1915
11 275 tonnes
117 mètres
727 hommes
Le Gaulois après 1908. (Marius Bar, Toulon)
12)
(13