Lutte contre les rongeurs nuisibles

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Lutte contre les rongeurs nuisibles
FEUILLE D’INFORMATION PSA
ANIMAUX SAUVAGES
Lutte contre les rongeurs nuisibles
Lutte contre les rongeurs nuisibles
1. Bases légales
La loi sur la protection des animaux (LPA) et l’ordonnance qui y est rattachée (OPAn) interdisent
de causer de façon injustifiée des douleurs, des maux ou des dommages aux vertébrés, embranchement qui inclut notamment les souris et les rats, ainsi que de les mettre à mort de façon cruelle.
Ces principes doivent par conséquent inspirer la lutte contre les «rongeurs nuisibles» pour éviter
autant que faire se peut la souffrance aux animaux à éliminer.
Art. 4 LPA Principes
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Personne ne doit de façon injustifiée causer à des animaux des douleurs, des maux ou des dommages, les mettre dans un état d’anxiété ou porter atteinte à leur dignité d’une autre manière.
Art. 26 LPA Mauvais traitements infligés aux animaux
Est punie de l’emprisonnement ou de l’amende toute personne qui, intentionnellement:
b. met à mort des animaux de façon cruelle (...)
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2
Si l’auteur agit par négligence, il est puni des arrêts ou d’une amende de 20 000 francs au plus.
Art. 16 OPAn Pratiques interdites sur tous les animaux
Il est interdit de maltraiter les animaux, de les négliger ou de les surmener inutilement.
1
Il est notamment interdit:
a. de mettre à mort des animaux de façon cruelle
2
Outre la loi sur la protection animale, la législation sur la protection de la nature régit elle aussi la
manière de traiter les rongeurs nuisibles. Elle protège toutes les espèces de loirs et quelques espèces
de musaraignes, qu’il est de ce fait interdit de tuer, d’attraper ou de détruire leurs nids.
2. Biologie des rongeurs
La majorité des espèces de rongeurs qui sont considérés comme rongeurs nuisibles peuvent, grâce
à des gestations de courte durée et des portées nombreuses se reproduire extrêmement vite voire
de façon explosive lorsque les conditions sont favorables (par ex. offre de nourriture). En d’autres
termes, les animaux éliminés par les mesures de lutte contre les rongeurs sont très rapidement
remplacés et la densité de la population retrouve en quelques semaines seulement sa taille originale.
Si les rongeurs sont avant tout phytophages, leurs incisives spécialisées pour ronger et leur grosses
molaires leur permettent également de concasser de la nourriture végétale grossière et même de
casser des noix. Au moyen de leurs pattes et de leurs dents, ils décortiquent habilement des graines
de céréales et pèlent des semences. Les rats et les souris mangent parfois des insectes ou d’autres
produits animaux (œufs, oisillons, charognes). Les rats et souris domestiques apprécient également
les restes alimentaires humains (compost, déchets). Les rats font preuve d’une extrême circonspection dans le choix de leur nourriture. Quand un rat trouve un aliment nouveau ou un appât
empoisonné, il n’en mange que très peu. Si au bout de quelques heures, voire d’une journée, il se
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sent mal, il ne consommera plus jamais cet aliment ou appât. Pendant ce temps, les congénères
de la même colonie observent de très près le comportement de leur «testeur» et éviteront par la
suite cette nourriture indigeste ou cet appât. Par conséquent, les poisons contre les nuisibles à
effet rapide ne sont pas efficaces avec les rats dont la prudence innée ne peut être trompée que
par l’apparition tardive des symptômes d’intoxication.
Qu’est-ce qui détermine la taille des populations de rongeurs?
C’est avant tout l’offre de nourriture qui est décisive pour la croissance d’une population de rongeurs.
La quantité de nourriture limite le nombre d’animaux. Dans la nature, la saison, le temps et la
végétation comme bases de nourriture, d’installation de nids et de camouflage – pilotent la taille
d’une population de rongeurs. A cela s’ajoutent les cycles pluriannuels qui dépendent probablement
de l’activité solaire, et se manifestent par exemple par «une année de campagnols roussâtres». Le
nombre de rongeurs est également influencé par la concurrence tant au sein de l’espèce qu’entre
différentes espèces, pour trouver la nourriture et l’espace vital. Les prédateurs et les maladies influencent aussi la mortalité et par conséquent la taille de la population.
Quels sont les dommages causés par les rongeurs?
Tout d’abord, ils sont en concurrence avec l’homme pour la nourriture: en plus des plantes, des
racines et des réserves de céréales, ils mangent d’autres aliments (humains). James Yeates estime
le préjudice causé aux Etats-Unis par les rongeurs à 19 milliards de dollars par an ou 63 dollars
par habitant. Cependant, 7 % seulement des cas dénoncés au service de lutte contre les nuisibles
de la ville de Zurich incriminent des souris ou des rats. Mais les dommages sont tout autant causés
par les excréments, l’urine et les poils qui contaminent les réserves de nourriture. En outre, les
rongeurs peuvent transmettre directement des maladies à l’homme, notamment par les puces et
tiques dont ils sont porteurs, qui à leur tour peuvent infecter l’être humain. En se déplaçant et en
construisant des nids, ils rongent et laissent des trous. Les systèmes de construction souterrains
réalisés par de nombreux rongeurs dans des champs et pâturages peuvent déstabiliser le sous-sol.
De quelles espèces s’agit-il?
Souris grise (Mus musculus)
souris domestique (Mus domesticus)
Apparence: pelage gris-brun, ventre brun, oreilles et yeux assez
petits, queue plus courte que le mulot sylvestre, museau pointu.
Habitat: maison, jardin, écurie
4028mdk09
Mulot sylvestre, mulot à collier (Apodemus sylvaticus,
A. flavicollis)
Apparence: pelage brun, ventre clair, grands yeux en bouton,
grandes oreilles, longue queue, museau pointu, tâche jaune sur
une partie de la gorge.
Habitat: proximité des maisons, tas de compost, rarement dans
les maisons
Hans Hillewaert
Muridés (queue presqu’aussi longue que le corps, grandes oreilles)
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Surmulot, rat d’égout (Rattus norvegicus)
Apparence: pelage gris-brun, parfois blanc ou tricolore s’il s’agit
de rats domestiques en fuite, épaisse queue nue, avec quelques
rares poils.
Habitat: maison, jardin, écurie, canalisation, espaces habités
humides.
Rat noir (Rattus rattus)
Apparence: pelage gris-brun, plus petit et plus mince que le
surmulot, queue plus longue, grandes oreilles, meilleur grimpeur
que le surmulot.
Habitat: greniers, avant tout lieux secs en haut des maisons,
devenu très rare en Suisse.
Hans-Jörg Hellwig
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Kilessan
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Campagnol roussâtre (Clethrionomys glareolus / Myodes glareolus)
Apparence: plus petit que les campagnols, corps assez trapu,
museau aplati, queue courte, pelage roux, fréquent couinement
sonore.
Habitat: lisières de forêt, haies, jardins.
soebe
Campagnols (Genres Microtus et Arvicola)
Apparence: corps court et trapu, pelage hérissé de couleur grisbrun à noir, queue courte, très petits yeux et oreilles, museau
aplati.
Habitat: principalement champs et prairies; construit des buttes.
Rabensteiner
Campagnols (queue nettement plus courte que le corps, oreilles et yeux petits)
Loirs protégés. Ce ne sont pas des souris!
Muscardin (Muscardinus avellanarius),
lérot (Eliomys quercinus), loir gris (Glis glis)
Devenues rares en Suisse, ces trois espèces de loirs sont protégées. Il arrive que l’on rencontre un loir gris dans un grenier ou
dans une volière. Le laisser tranquille dès que c’est possible.
Contacter le garde-faune local en cas de conflits ou de dérangement intolérable (par exemple raffut causé par les loirs vivant
dans le toit).
Bjoern Clauss
(queue longue, fournie et touffue, grands yeux et grandes oreilles)
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Musaraignes (Sorex, plusieurs espèces)
Parfois, des chats rapportent des musaraignes à la maison. Il ne
s’agit pas de rongeurs, mais d’insectivores protégés qui ne
causent aucun dommage. Ils peuvent toutefois mordre vigoureusement et leur salive est parfois toxique. Contre-mesures: les
attraper avec un récipient et les libérer si elles ne sont pas trop
gravement blessées, sinon les tuer.
Michl123
Taupes (Talpa europea)
Les taupes ne sont pas non plus des rongeurs, mais des insectivores. Elles ne se nourrissent pas de racines, mais de vers, de
larves d’insectes et d’escargots, voire de souriceaux encore au
nid, et ne s’attaquent pas aux plantes. Les taupinières non seulement dérangent mais sont souvent confondues avec les tanières
des campagnols ce qui vaut aux taupes d’être éliminées.
Sir Boris
Insectivores protégés. Ce ne sont pas des souris! (queue courte, voire très courte, très petites
oreilles, dentition avec de nombreuses dents très acérées)
Comment différencier les taupes des campagnols:
• les taupinières sont grandes, rondes, régulières, terre refoulée fine, ouverture dirigée vers le
haut. Les galeries sont étroites et parsemées de racines, de même que le côté des taupinières.
• les monticules des campagnols ne sont pas frappants, de forme allongée plate ou en forme
de galette, terre refoulée grossière, ouvertures latérales, en général exactement en dessus des
galeries. Si l’on ouvre les galeries, ils les referment rapidement. Des racines de plantes coupées
parsèment les galeries.
3. Méthodes de lutte
Des réflexions éthiques et les dispositions de la législation en matière de protection des animaux
obligent, comme pour les expériences sur les animaux, à comparer les éléments négatifs et positifs
au niveau éthique lors de la lutte contre les rongeurs nuisibles. Le bénéfice que l’homme et l’environnement retirent de la lutte contre les nuisibles doivent peser plus lourd que les coûts qui englobent
également les souffrances infligées aux rongeurs, les conséquences et les dangers de l’utilisation de
substances toxiques pour l’environnement. Lors de l’élimination des rongeurs nuisibles, le maître-mot
doit être: aussi peu que possible et pas plus que nécessaire. Quand il faut lutter contre des rongeurs,
parce que sinon le préjudice subi par les récoltes ou les stocks serait trop grand ou le risque de
diffusion de maladies trop présent, il faut choisir les méthodes optimales pour éviter de faire souffrir les rongeurs concernés. Cette méthode doit être utilisée de manière correcte et responsable.
3.1. Empêcher l’accès aux ressources
On peut déduire de la biologie des espèces de rongeurs nuisibles les plus fréquentes que les mesures
de lutte les plus efficaces sont d’empêcher les animaux d’accéder à leurs ressources, c’est-à-dire
aux sources de nourriture et aux possibilités de nidification. Dans la mesure du possible, il faudrait
éviter de laisser traîner des déchets. Les réserves de nourriture humaine et animale devraient être
entreposées dans des récipients hermétiquement fermés aux souris. Les conteneurs de déchets
devraient être nettoyés régulièrement pour éviter de dégager des odeurs attirant les rongeurs nuisibles. S’il n’y a pas de conteneurs, les sacs de déchets ne devraient être sortis que le jour du ramassage des ordures.
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Les souris peuvent s’introduire par des orifices d’un diamètre de 6 mm, raison pour laquelle des
treillis à mailles fins ou des tôles percées aux fenêtres ou aux ouvertures pour l’aération s’imposent
pour leur empêcher l’accès aux locaux des stocks alimentaires. Les souris sont parfaitement capables de grimper le long de façades rugueuses. Des corniches lisses, comme une tôle en surplomb
sont des obstacles insurmontables.
3.2. Lutte «biologique» grâce aux prédateurs
Dans certaines circonstances, la proximité de prédateurs comme le chien, le chat, le renard, la
couleuvre à collier (Natrix natrix), le furet et le blaireau ou autres types de martres sans oublier les
rapaces peut limiter la population et la liberté de mouvement des rongeurs; en effet, la présence
constante de prédateurs peut entraîner une meilleure répartition des proies et par conséquent
empêcher l’émergence de grandes populations de rongeurs nuisibles. La possibilité d’endiguer une
population de rongeurs dépend néanmoins beaucoup de l’espèce de rongeurs, de l’accessibilité et
de la taille de la population. De plus, la présence des prédateurs rend les rongeurs plus prudents.
Tandis que les chats domestiques chassent de préférence les rongeurs de petite taille, c’est-à-dire
les souris et les jeunes rats jusqu’à 200 grammes, les furets ont été domestiqués à l’origine pour
la chasse aux rats et aux lapins. Aujourd’hui avant tout chiens de compagnie et de manchon, les
Yorkshire Terriers avaient été spécifiquement élevés pour lutter contre les surmulots qui aux 19e
et 20e siècle envahissaient les villes industrielles britanniques. Aujourd’hui, seuls les chats sont
utilisés pour lutter contre les rongeurs nuisibles dans les fermes. En l’occurrence, il est essentiel
de castrer les chats à l’âge d’environ 6 mois. Cela maintient leur capacité de bons chasseurs de
souris. Par ailleurs, il serait indiqué de créer des conditions favorable aux populations des prédateurs
naturels, par exemple des espaces de vie, des cachettes dans des tas de branches et de feuilles
mortes, des emplacements au soleil sur des tas de pierres et des murs de pierre sèche, des étangs
(sans poissons rouges) pour les couleuvres à collier ou des perchoirs proches des prairies pour les
rapaces.
Il n’y a pas de preuves scientifiques de l’impact d’autres mesures «biologiques» et «traditionnelles»,
telles que présentées dans les guides spécialisés ou discutées dans diverses enceintes comme le
bruit, l’urine de chien, de martre ou de chat, des substances à l’odeur désagréable jusqu’aux têtes
de poisson enterrées, des plantes résistantes aux rongeurs, etc.
3.3. Lutte directe et caractère approprié aux animaux
3.3.1. Pièges pour capturer les animaux vivants
A première vue, ces pièges semblent la manière la plus juste vis-à-vis des animaux pour combattre
les rongeurs nuisibles puisque les animaux ne sont pas tués par le piège. Or sous l’angle de la
protection animale, ce type de pièges est douteux pour deux raisons. Tout d’abord, les rongeurs pris
au piège peuvent y mourir de soif, de faim ou de froid si les pièges ne sont pas contrôlés assez
souvent, c’est-à-dire toutes les deux à trois heures selon la température extérieure. Ensuite, les
chances de survie des rongeurs remis en liberté ailleurs ne sont que très faibles (entre 10 et 20 %
selon les cas) en raison de la faiblesse des animaux causée par le stress et l’angoisse considérables
de l’enfermement et du transport. Ils perdent rapidement du poids. Des examens ont montré que
même 24 heures après la capture dans un piège, les souris ne se sont pas encore remises de ce
stress alors qu’elles ont été relâchées sur place.
Si les rongeurs sont remis en liberté ailleurs – en général à quelques kilomètres de l’endroit de leur
capture pour qu’ils ne retrouvent pas leur chemin – on les dépose dans un terrain qui n’offre pas
suffisamment de moyens de survie ou qui est déjà occupé par d’autres rongeurs et qui chassent
l’intrus. En outre, l’animal ne peut plus se réfugier dans un terrier et devrait d’abord se créer un
territoire. Les rongeurs remis en liberté sont promis à une mort certaine.
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Recommandation dans la perspective de la protection animale:
Il est donc plutôt déconseillé d’utiliser des pièges pour attraper l’animal vivant à moins qu’ils
soient souvent contrôlés et que les animaux capturés soient libérés dans un lieu optimal, par
exemple dans un tas de compost couvert (protection, nourriture, espace vital).
3.3.2. Pièges à ressort
Il en existe différents modèles. Il est important d’adapter la taille du piège à ressort à la taille des
rongeurs à éliminer. Si le piège est trop grand, la barre peut toucher le dos au lieu de la tête ou de
la nuque de l’animal. Ce dernier reste coincé, gravement blessé, paralysé, et meurt de soif ou de
faim dans les pires souffrances. De plus, le piège doit être assez puissant pour tuer immédiatement
le rongeur d’un coup sur la nuque ou la tête.
Recommandation dans la perspective de la protection animale:
Sous l’angle de la protection des animaux, les pièges à ressort sont la méthode la plus appropriée
quand ils sont utilisés correctement et d’une taille appropriée. Dans ce cas, la mort des animaux
est rapide et indolore ce qui remplit les dispositions de la législation en matière de protection
animale.
Appâts pour pièges à ressort et pièges pour capture vivante
En dépit de l’opinion répandue que les rats et souris sont attirés par le lard ou le fromage, il y a
des appâts bien plus indiqués. Dans les pièges à capture vivante, on déposera des appâts humides, par exemple un morceau de pomme, d’outre des raisins secs, des noix, de la Nutella, du
beurre de cacahouètes voire du chocolat. L’animal reçoit suffisamment de liquide et de solide
pour tenir le coup jusqu’à sa remise en liberté.
Où placer les pièges?
Animaux de proie typiques, les rongeurs recherchent toujours la protection de structures, ils
trottinent généralement près des parois. Il faut donc placer tous les types de piège ainsi que les
boîtes d’appât le plus près possible de parois. En revanche, les pièges à campagnols seront
enterrés directement dans le sol des galeries des animaux.
3.3.3. Rodenticides
Anticoagulants
La majorité des substances utilisées dans la lutte contre les rongeurs, les rodenticides, sont des
anticoagulants sous forme de boulettes empoisonnées. Ils réduisent la coagulation du sang et les
animaux qui ont consommé ces rodenticides meurent d’hémorragie interne parce qu’il n’y a plus
coagulation du sang lors de petites lésions quotidiennes des capillaires, entraînant des hématomes
internes et externes. Au bout de quelques jours, les animaux meurent, la perte de sang entraîne
insuffisance cardiaque, respiratoire et / ou rénale.
Le bien-fondé éthique des anticoagulants fait en ce moment l’objet d’un débat au sein du monde
scientifique. Est-ce que vraiment les animaux ne souffrent pas et se retirent, puis s’endorment,
comme le mettent en évidence les fabricants, ou éprouvent-ils de la douleur en raison des souffrances et des difficultés respiratoires causées par les nombreux hématomes, comme l’ont exposé
différentes publications scientifiques?
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Le doute est favorable à l’accusé. Dans la perspective de la protection des animaux, il faudrait renoncer aux rodenticides autant que faire se peut; d’une part parce qu’on ne sait pas précisément dans
quelle mesure les animaux concernés souffrent et, d’autre part, parce que ces substances toxiques,
si elles ne sont pas correctement utilisées, représentent également un danger pour d’autres créatures vivantes. Si les appâts sous forme de boulettes sont simplement dispersés sur le sol, des
animaux domestiques (chats, chiens), des animaux autochtones comme les hérissons et les renards
voire des enfants peuvent absorber le poison et manifester des symptômes d’empoisonnement. Il
est donc impératif de répandre les rodenticides avec circonspection et seulement là où les rongeurs
nuisibles sont présents et uniquement la quantité nécessaire à leur élimination. Le mieux serait
que les boulettes empoisonnées soient dispensées dans des boîtes fermées avec quelques petites
ouvertures ne laissant s’y glisser que les rongeurs cibles. Malgré tout, il arrive que des chats ou des
renards s’empoisonnent parce qu’ils mangent des souris empoisonnées. C’est une raison de plus
de faire preuve de retenue et de contrôle dans l’utilisation des rodenticides.
Autres inconvénients des rodenticides: en raison du fort risque de contamination, il est interdit de
les utiliser à l’intérieur et autour des aliments pour l’homme (cuisines, réserves de nourriture). Par
ailleurs, les rongeurs empoisonnés peuvent se retirer pour mourir dans des endroits inaccessibles
où ils ne sont détectés que grâce à la puanteur de leur décomposition.
A quoi reconnaît-on l’empoisonnement par anticoagulants?
Les symptômes d’un empoisonnement sont notamment les douleurs musculaires, articulaires,
gastriques ainsi que des saignements et des hématomes auxquels s’ajoutent le malaise, les difficultés respiratoires. En cas de soupçon d’empoisonnement par anticoagulants, il faut immédiatement trouver de l’aide médicale pour l’animal domestique ou l’enfant concerné.
Recommandation dans la perspective de la protection animale:
Dans la perspective de la protection animale, il faudrait dans la mesure du possible renoncer à
l’utilisation des rodenticides ou des anticoagulants. En cas d’utilisation, il faudrait les appliquer
de manière ciblée pour éviter que d’autres espèces que l’espèce visée ait accès aux appâts
empoisonnés.
Quelques noms de substances actives dans les anticoagulants (sur l’étiquette du produit, dans la
déclaration de composition): Bromadiolon, Brodifacum, Difenacum, Flocoumafen
Chloralose
Le chloralose n’est pas un anticoagulant, mais était au départ utilisé comme anesthésique. Chez
les rongeurs, cette substance réduit l’activité cérébrale, cardiaque et la température du corps descend parfois jusqu’à 20° C. Elle cause la mort par hypothermie ou arrêt respiratoire. Son utilisation
n’a de sens qu’avec des températures environnantes de moins de 16° C, tout en n’étant pas appropriée aux rats car la température descend moins vite dans un corps d’une certaine taille. A la différence des anticoagulants, le chloralose ne cause probablement pas de douleurs, mais éventuellement un mal-être. Il agit vite (15 min.) et entraîne la somnolence, l’inconscience et le coma. Pour
les animaux assez grands comme les rats, on observe des convulsions. Il y a un risque d’empoisonnement pour leurs prédateurs (buses, milans). Mais en général ce risque est considéré comme
faible.
Recommandation dans la perspective de la protection animale:
Dans la perspective de la protection animale, les rodenticides à base de chloralose ne causent
que peu de souffrance aux animaux concernés. Mais ils ne sont adaptés qu’aux petits rongeurs
(souris domestiques), mais pas aux rats.
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3.3.4. Rodenticides en cartouches fumigènes
Oxydes de soufre et autres oxydes gazeux
Les cartouches fumigènes en vente libre contiennent généralement du soufre et du nitrate de potassium. Elles sont enfoncées dans les galeries des souris, allumées et les galeries sont bouchées.
Lorsque les cartouches brûlent, les gaz toxiques suivants se dégagent: oxyde d’azote, oxyde de
soufre et monoxyde de carbone. L’oxyde de soufre par exemple réagit avec les membranes humides
des yeux et des voies respiratoires et se transforme en anhydride sulfureux et en acide sulfurique
dont le fort effet irritant endommage considérablement les voies respiratoires et les poumons:
destruction des épithèles, crampes, rétrécissement des voies respiratoires, hémorragies, accumulation de liquide, collapsus pulmonaire et arrêt respiratoire. La mort est causée par l’asphyxie.
Jusqu’à la mort survenant entre 20 minutes à 5 heures après, la détresse respiratoire entraîne très
probablement de fortes douleurs et de la panique. Par ailleurs, le monoxyde de carbone est également toxique pour les voies respiratoires, mais l’asphyxie se produit au niveau cellulaire.
Recommandation dans la perspective de la protection animale:
Dans la perspective der la protection animale, les cartouches fumigènes à base de soufre causant
de très grandes souffrances, il faudrait y renoncer.
Phosphide de calcium
Le phosphide de calcium, avec l’humidité de la terre, crée de la phosphine et de l’hydrogène phosphoré, qui est toxique pour les voies respiratoires, se diffuse dans les galeries souterraines des
rongeurs et les tue. Ces gaz sont également très toxiques pour l’homme. Chez les rongeurs, les gaz
irritent les yeux et les muqueuses des voies respiratoires entraînant détresse respiratoire, crampes,
paralysies des pattes postérieures, puis paralysie totale et mort en quelques heures. En raison de
leur degré élevé de toxicité et de dangerosité, les rodenticides basés sur le phosphide de calcium
ne sont en général pas vendus aux particuliers!
Recommandation dans la perspective de la protection animale:
Dans la perspective de la protection animale, les rodenticides basés sur le phosphide de calcium
causant de très grandes souffrances, il faudrait renoncer à leur utilisation. Par ailleurs, le phosphide de calcium est également extrêmement dangereux pour l’homme et d’autres animaux, sans
oublier le risque d’explosion au contact de l’eau.
3.3.5. Pièges collants
On trouve parfois des supermarchés dans les pays limitrophes (par exemple en Italie) qui offrent
des pièges collants ou des pâtes collantes en tube. Les rongeurs restent collés et meurent de soif
et de faim si ces pièges ne sont pas relevés après quelques heures et les animaux tués dans les
règles de l’art.
Recommandation dans la perspective de la protection animale:
Il faudrait renoncer à ce type de pièges pour rongeurs car ils entraînent la mort dans de grandes
souffrances et sont de ce fait interdits par la législation sur la protection des animaux.
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4. Est-ce que des non professionnels sont capables ou ont le droit d’euthanasier un rongeur?
Du point de vue de la protection animale, indépendamment du fait que l’animal ne doit pas être
tué de façon cruelle, les dispositions sur la manière conforme à la protection des animaux de pratiquer l’euthanasie ne concernent que les animaux familiers, de rente et de laboratoire, mais non
les rongeurs nuisibles (animaux sauvages). A l’exception des cas d’urgence, seuls sont habilités à
euthanasier des animaux de compagnie les vétérinaires qui ont reçu la formation appropriée et disposent des substances anesthésiantes adéquates. Les associations cunicoles proposent des cours
sur la manière d’euthanasier les lapins au moyen de pistolets à cheville percutante, mais cette
méthode n’est pas applicable aux rongeurs nuisibles, parce que ces animaux sauvages bien plus
petits et plus remuants sont difficiles à immobiliser. Les animaux de rente doivent être étourdis par
des personnes formées spécialement pour le faire (cheville percutante, étourdissement par électricité ou dioxyde de carbone) et ensuite saignés pour être tués. Les Directives concernant les méthodes d’euthanasie pour les animaux d’expérience (800.116-3.01) énumèrent les méthodes d’abattage admissibles et non admissibles pour les animaux de laboratoire, qui donnent du moins des
idées sur la manière d’euthanasier les rongeurs nuisibles rapidement et sans douleur. Il y est écrit:
«Le procédé d’euthanasie doit garantir que l’insensibilité et la mort surviennent rapidement... Il
faut éviter l’excitation de l’animal ou, pour le moins, en réduire autant que possible la durée. Les
méthodes qui n’exigent pas la contention de l’animal ou seulement une contention brève et non
éprouvante (manière de s’occuper des animaux) sont donc préférables. On peut ainsi éviter ou du
moins réduire au minimum les possibles réactions de défense, l’agressivité ou l’excitation (stress
et anxiété)…Il faut si possible éviter d’attraper et de maintenir les animaux avant leur euthanasie;
lorsqu’on ne peut faire autrement, il faut procéder avec ménagement.»
4.1. Etourdissement, saignée et décapitation
Seul entre en ligne de compte un coup bien appliqué avec un objet lourd (bâton, pierre, bêche) sur
la région de la nuque et de la tête du rongeur. On ne peut frapper de façon ciblée que lorsque
l’animal ne bouge presque plus. La mort doit être assurée après le coup d’étourdissement sur la
nuque par la décapitation ou la destruction de toute la région crânienne.
Des rongeurs encore mobiles et indemnes dans un piège pour capturer des animaux vivants ne
peuvent pas être tués correctement par un profane parce que les mesures nécessaires impliquent
de saisir et d’immobiliser l’animal. Il n’est donc admissible d’euthanasier un animal par étourdissement et décapitation que lorsqu’il est blessé et ne bouge plus.
2. Dioxyde de carbone
Si une bonbonne de gaz au dioxyde de carbone est disponible, les rongeurs peuvent aussi être
euthanasiés de cette manière. On les enferme dans un récipient hermétique dans lequel on libère
par un couvercle fermé jusqu’à 6 litres de CO2 pour atteindre une concentration de 80 % au moins.
Dans le cas idéal, le gaz libéré devrait être turbiné en plaçant un objet sous l’ouverture d’entrée.
Les animaux doivent être exposés pendant plusieurs minutes au CO2 jusqu’à l’absence de toute
réaction (même lorsqu’on pince une patte avec une brucelle), de battement cardiaque et jusqu’à
ce que les yeux soient ternes. Attention: le CO2 est un gaz incolore qui est plus lourd que l’air. S’il
sort de manière incontrôlée, des puits [lacs] invisibles peuvent se constituer qui peuvent être mortels pour les enfants, les animaux familiers ou des personnes endormies. En utilisant de la glace
carbonique au lieu du gaz CO2, il faut faire preuve de prudence: les animaux ne doivent pas être
en contact avec la glace (-78° C) sinon ils subissent des brûlures de froid très douloureuses. Il faut
garantir une distance de 10 cm au moins entre les animaux et la glace. Les avis divergent sur le
caractère approprié à la protection des animaux de l’utilisation du dioxyde de carbone. Le gaz
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déclenche une forte réaction d’aversion car il réagit de manière acide, notamment à la surface
humide des muqueuses. De plus, il déclenche un malaise et une grande détresse respiratoire.
Actuellement, les autorités et les milieux scientifiques débattent de méthodes de substitution praticables et plus respectueuses vis-à-vis des animaux
D’autres méthodes ne sont ni admissibles ni praticables pour un non professionnel. Les méthodes
totalement prohibées sont par exemple: l’éther, le chloroforme, le monoxyde de carbone, la strychnine, les micro-ondes, l’électricité, l’asphyxie (azote, gaz d’échappement, hélium, acide prussique/
cyanhydrique), frapper l’animal sur un bord...).
Bibliographie
•Mason, G. & Littin, K.E. (2003) The humaneness of rodent pest control. Animal Welfare 12: 1-37
•Yeates, J. (2010) What can pest management learn from laboratory animal ethics? Pest Management Science 66: 231-237
•Meerburg, B.G., Brom, F.W.A. & Kijlstra, A. (2008) Perspective: The ethics of rodent control. Pest
Management Science 64: 1205-1211
Conclusion
Dans la lutte contre les rongeurs nuisibles, il faut toujours respecter le principe suivant: aussi peu
que possible, pas plus que nécessaire et uniquement de manière ciblée. Il faut qu’il y ait préjudice
réel pour justifier l’abattage et la souffrance des animaux. Dans la lutte contre les rongeurs nuisibles,
il faut appliquer les méthodes qui causent le moins possible de souffrances, qui soient adaptées
de façon optimale à la situation et qui soient conformes à l’espèce animale à éliminer. Ce n’est que
de cette façon que la souffrance inutile pourra être évitée.
Texte:
Dr. Eva Waiblinger, zoologue, département des animaux de compagnie, Protection Suisse des
Animaux PSA
Editeur:
Protection Suisse des Animaux PSA, Dornacherstrasse 101, 4008 Bâle,
tél. 061 365 99 99, fax 061 365 99 90, www.protection-animaux.com, [email protected]
1/2012
La présente feuille d’information et d’autres fiches de ce genre sont prêtes au téléchargement
sous www.protection-animaux.com
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