Techniques de rééducation des troubles de la mémoire
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Techniques de rééducation des troubles de la mémoire
Techniques de rééducation des troubles de la mémoire • • • • Jusqu’au début des années 80 Exercices mnésiques répétitifs Stimulations indifférenciées Objectif : restaurer la fonction mnésique déficitaire Absence d’effet bénéfique ou progrès sur le matériel travaillé mais pas de généralisation ni de transfert (Berg & col. 1991 ; Prigatano, 1984…) Ces dernières années... • Démarche plus « théorique » • Trois orientations principales : – Facilitation de l’encodage ou la récupération d ’une information , utilisation plus efficace des habiletés mnésiques résiduelles, – Apprentissage de connaissances spécifiques à un domaine, utilisation des systèmes mnésiques préservés (procédurale), – Aménager l’environnement, réduire l’impact des déficits dans la vie quotidienne, 1. Facilitation du fonctionnement mnésique • Fonction des déficits objectivés, • En suscitant la mise en œuvre d’opération d’encodage et de récupération plus efficaces, – Récupération de noms de personnes connues (Milders & col. 1991) : recherche alphabétique, reconstruire la situation de rencontre… – Apprendre une nouvelle information : stratégies d ’encodage différentes selon que les informations sont ou non signifiantes et reliées Matériel signifiant et relié (texte ou conférence) • Développer sa compréhension du matériel en l’organisant, • Relier aux connaissances préexistantes, • Techniques d’apprentissages actifs • Méthode PQRST (preview, question, read, state, test), • Efficacité par rapport aux stratégies de répétitions (Glasgow, 1977) Méthode PQRST pour optimiser l’encodage d’un matériel signifiant et organisé tel un texte • P : preview – survoler le texte pour en extraire le sens général • Q : question - poser des questions clés concernant le contenu • R : read - lire le texte de façon active pour répondre aux questions • S : state - répéter l’information lue • T : test – se tester en répondant aux questions qui ont été élaborées, les réponses constituant un résumé du texte Matériel non signifiant et non relié (associer un nom à un visage) • Ajouter de la signification, des relations, • Indices utilisés lors de la récupération, • Procédés mnémotechniques verbaux ou à base d’imagerie (Mc Daniel & Pressley, 1987), • Utilisation chez des patients cérébrolésés (Van der Linden, 1997 ; Wilson, 1995) Facilitation : imagerie mentale (1) Méthode des tables de rappel • Associer dans une image mentale les informations à mémoriser avec les items pivots numérotés préalablement appris • Récupération : évocation du numéro d’ordre, indiçage de l’item pivot qui indice l’image interactive. – Système phonologique : 1=main ; 2=nœud, 3=toît – Système de ressemblances morphologiques Facilitation : imagerie mentale (2) Méthode des localisations • Créer des images mentales qui associent les informations à mémoriser à des localisations précises dans un espace connu • Récupération : parcourir mentalement le lieu et examiner chaque endroit en identifiant les images formées Facilitation : imagerie mentale (3) Méthode « visages-noms » • Associer une caractéristique du visage d’une personne à un mot phonologiquement proche de son nom – Trouver un substitut concret et imageable • (M. Falize=valise) – Repérer une caractéristique distinctive du visage(poignée de la valise = moustache) – Valise = indice de récupération pour le nom propre Facilitation : imagerie mentale (4) Méthode du mot-clé • Apprentissage d’une langue étrangère ou d’un vocabulaire peu familier • Réaliser une association imagée du mot étranger avec deux mots familiers permettant l’accès à la signification et à la prononciation – HÖCKER (joueur de hockey avec une bosse sur le crâne) Imagerie mentale : Efficacité - Limites (1) • L’efficacité de ces méthodes repose sur la création d ’images vives et interactives • Et donc de la capacité du patient à encoder le matériel sous forme d ’images mentales et à stocker ces représentations en mémoire à long terme • Nécessité d’une évaluation détaillée et d’un entraînement préalable à l’utilisation de l ’imagerie Imagerie mentale : Efficacité - Limites (2) • Efficacité chez les sujets âgés normaux (Yesavage, 1983 ; Marcooen & Goossens, 1992) • Facilitation d’apprentissage de nouvelles informations chez les patients cérébrolésés (Gade, 1994 ; Richardson et al. 1987, Van der Linden & Van der Kaa, 1989) Imagerie mentale : Efficacité - Limites (3) • Efficacité méthode nom-visage (Wilson, 1987 ; Gruneberg & col. 1994) • Efficacité méthode mot-clé (Gruneberg & col. 1994) – Mais les effets facilitateurs n’apparaissent que si le lien mnémotechnique est fourni au patient Imagerie mentale : Efficacité - Limites (4) • Comparaison de trois méthodes destinées à améliorer l’apprentissage nom-visage chez des patients cérébrolésés (Thoene & Glisky, 1995) – 1. Stratégie mnémotechnique à base d’imagerie – 2. Méthode d’estompage (mémoire implicite) – 3. Présentation multimodale sur vidéo • Méthode 1 > 2 et 3 Imagerie mentale : Efficacité - Limites (5) • Apprentissage de longue durée exigeant une bonne motivation, un bon niveau de compréhension et de ressources attentionnelles, • Difficultés d’utilisation dans les situations sociales normales (créer une image mentale pendant une conversation), • Utilisation spontanée des techniques ? • Plus adaptée aux patients légers ou modérés. Cas JG(1) Coyette & Van der Linden (1999) • 35 ans, traumatisme crânien grave • Trouble important de la mémoire épisodique plus important pour du matériel verbal • Répercussion sur la vie professionnelle : mémorisation de noms d’employés et de fournisseurs Cas JG(2) • Percentile 90 au PM38 • Capacités attentionnelles : alerte et attention sélective préservées, attention divisée altérée • Trouble dysexécutif comportemental (irritabilité, persévérations) et cognitif (difficultés d ’organisation) • Expression verbale spontanée logorrhéique, manque du mot d ’origine frontal mais pas de trouble phasique Cas JG (3) • Rééducation du langage et des fonctions exécutives • Rééducation de la mémoire épisodique pour faciliter la mémorisation des noms propres : 3 phases, 2 séances par semaine Cas JG (4) • Apprentissage de technique de base de l’imagerie mentale : – Mémorisation des paires de mots par le biais d ’associations imagées élaborées par le thérapeute : présentation avec consignes explicites de visualisation mentale, description de l’interaction sur l’énoncé oral des deux mots par le rééducateur, visualisation mentale de l’image sur énoncés oral des deux mots • Rappel indicé à 2, 5, 10 et 20 mn puis plusieurs jours Cas JG (5) – Création et mémorisation d’images mentales crées par le patient : présentation orale d ’une paire de mot non reliée et création par le patient de l ’image interactive (dessin puis mental), description par le patient de l ’interaction des deux éléments de son image sur l ’énoncé oral, visualisation mentale de l ’image sur énoncé oral • Rappel indicé Cas JG (6) • Application des techniques d’imagerie mentale aux noms de personnes : – – – – Dérivation d ’un mot concret à partir d ’un nom de personne Mémorisation de noms d ’inventeurs d ’objets courants Mémorisation de noms de personnes à partir de caricatures Mémorisation de noms, professions et localités Cas JG (7) • Application aux noms de personnes rencontrées dans la vie quotidienne : – Rééducateurs et patients, – Transferts aux noms des employés, clients et fournisseurs de l’entreprise de JG • Ex : Dumesnil • Dérivation = Dune-Nil, • Définition = entreprise de transport international, • Image = un camion dans une dune au bord du Nil 2. Apprentissage de connaissances spécifiques à un domaine : utilisation des systèmes mnésiques préservés • Acquisition de nouvelles habiletés motrices possible dépendant de la mémoire procédurale : – écriture en miroir, Cohen & Squire, 80 ; puzzles, Brooks & Baddeley, 76 – résolution du problème de la Tour de Hanoï, Cohen & Corkin, 1981 • Impossibilité de récupérer explicitement les épisodes • Résultats normaux à des tests d’amorçage perceptif (Van der Linden & Grailet, 98), sous tendus par les sous-système de représentation perceptives (PRS) Objectif • Améliorer l’autonomie de vie quotidienne et non d ’améliorer le fonctionnement de la mémoire épisodique • Suppose donc de délimiter au préalable le domaine spécifique • Et de développer les techniques qui exploitent les capacités mnésiques préservées Différentes techniques • Technique d’estompage (Glisky et al., 1986) • Technique de récupération espacée ( Camp, 1989, Schacter et al., 1985) • Technique d ’apprentissage sans erreur 1994) (Baddeley & Wilson, Technique d’estompage (Glisky et al., 1986) • Les indices fournis pour la récupération de l’information cible sont progressivement estompés (vanishing cues) • Efficacité dans l’apprentissage d ’un nouveau vocabulaire lié à l ’informatique – Ex : enregistrer un document = sauver – Si échec : « S - - - - - / SA- - - -/SAU- - -/ – Essai suivant : même nombre d ’indice-1, jusqu ’à réponse correcte sans indice... Technique d’estompage Efficacité - limites • Meilleure performance des patients amnésiques avec ce type de procédure comparativement aux apprentissages « par cœur » • Mais performances très liées à la présentation de la première lettre • Résultats contradictoires (Hunkin & Parkin, 1995) Technique d’estompage Différence d’efficacité • Apprentissage avec ou sans erreur • La consigne de récupération induit ou non une recherche consciente • La gravité du trouble de la mémoire épisodique (parasitage par les capacités résiduelles épisodiques) • Acquisition factuelle : exemple d’acquisition sémantique? • Composante de mémoire explicite en plus de la composante d ’amorçage perceptif ? Technique de récupération espacée ( Camp, 1989, Schacter et al., 1985) • Récupération de l’information cible après intervalles de temps de plus en plus longs Technique de récupération espacée Efficacité • Amélioration de la dénomination, de la localisation d’objet et de l’apprentissage nom-visage chez des patients Alzheimer (Moffat, 1989 ; Abrahahms & Camp, 1993, Vanhalle et al., 1998) • Nature des processus ? • Pas d’accès conscient à l’épisode: les patients ne se souviennent pas de la condition d’apprentissage Technique d’apprentissage sans erreur • Limite la possibilité de commettre des erreurs en exposant de façon répétée les patients à la bonne réponse plutôt que de leur demander de la récupérer explicitement. Technique d’apprentissage sans erreur (1) (Baddeley & Wilson, 1994) • Meilleures performances qu’avec l’apprentissage essaierreur (Evans, 2000; Squires et al., 1997; Wilson et al., 1994) • Apprentissage de noms propres (politiciens) / visages chez un patient avec syndrome amnésique sévère : maintien des performances dans le temps mais pas de généralisation et inhibition des noms connus après l’apprentissage (ne pouvait plus produire les noms de politiciens qu’il pouvait produire avant la rééd) (Hunkin & Squires, 1998) Technique d’apprentissage sans erreur (2) • Apprentissage associé à la récupération de noms connus (ses amis mais cette fois, on lui demandait de dénommer à chaque fois ceux qu’il pouvait encore produire)(Parkin et al., 1998) : même résultats avec disparition de l’effet d’inhibition (mais c’était peut-être lié au fait que les noms d’amis aient une représentation en mémoire plus forte les rendant moins vulnérables à l’inhibition plutôt qu’à la stratégie de rafraîchissement • Nature des processus ? Technique d’apprentissage sans erreur (3) • Cette technique semble plus intéressante que celle avec erreurs (Evans 2000) pour l’apprentissage d’associations nom-visage, mais seulement si on reste dans la condition de rappel proposant la 1ère lettre des noms. • Ceci suggère que la mémoire implicite est impliquée dans l’effet facilitateur de la méthode sans erreur. Apprentissage de nouvelles habiletés à des patients amnésiques par apprentissage sans erreur • Pour accroître leur autonomie en vie quotidienne quand capacités préservées en mémoire procédurale. • Comment ? Ex: programmation d’un agenda électronique: apprentissage étape 1, puis 1 et 2 …on demande au patient de suivre des indications écrites, jamais de deviner. Autre ex: apprentissage de trajet spécifique:on lui apprend le trajet en partant de l’arrivée. On s’éloigne du pt d’arrivée d’une certaine distance, puis on rejoint le point d’arrivée. On accroît peu à peu l’éloignement par rapport au pt d’arrivée. Apprentissage de connaissances complexes chez des patients amnésiques (1) • Vocabulaire informatique (Glisky et al., 1986) • Utilisation d’un ordinateur en milieu professionnel réel (Glisky & Schacter, 1987, 1988, 1989 ; Glisky, 1992) -Dactylographie, -vocabulaire informatique, manipulation de l’ordinateur et du traitement de texte : patient AC (Van der Linden & Coyette, 1995) Apprentissage de connaissances complexes chez des patients amnésiques (2) • Généralisation à des situations de vie quotidienne patient WD (Glisky et al., 1995) • Apprentissage de connaissances procédurales et conceptuelles nécessaires au travail de bibliothécaire : patiente JR (Andrewes & Glisky, 1999) • Aucun souvenir explicite des séances d’apprentissage 3. Aide-mémoire externes • Utilisation d’aide tels le carnet mémoire, calendrier, listes, programmer une minuterie, check-list… • Aménager l’environnement • Objectif : réduire l’impact des déficits dans la vie quotidienne • Mémoire épisodique ou prospective • • • • Aide-mémoire Externes Difficultés d’utilisation Acceptation de l’outil Anosognosie Implication de la famille Difficultés liées à l’utilisation concrète : exemple de l’agenda électronique (Kapur, 1995) • Efficace si « sur mesure » en fonction des déficits et des besoins, • Nécessité d’un apprentissage parfois très long (Sholberg & mateer, 1989) Aide-mémoire externes quelques exemples... • Dictaphone, montre alarme, série de post-it, liste contrôle (Wilson, 1995 ; Wilson, 1997), agenda électronique (Kim et al., 1999) • Carnet mémoire (Van der Linden & Coyette, 1995) : agenda, rubriques santé, administration, famille, trajets, noms, messages… • « A faire, à dire » non daté • Neuropage (Hersh & Treadgold, 1992 ), Voice Organizer (Van den Broek et al., 2000) : messagerie à distance, programmable dans le temps, avertisseur sonore et lumineux Approche multifactorielle • « Panachage » des différentes techniques • Technique d ’imagerie, méthode des lieux, organisation sémantique et entraînement attentionnel (Stigsdotter & Bäckman, 1989) • Méta analyse des rééducations proposés à des patients Alzheimer : efficacité des trois types de technique (De Vreese et al., 2001) • Etude de cas (encéphalite) : amélioration dans la vie quotidienne et de la mémoire épisodique mais pas de la mémoire prospective (Yamamoto et al., 2000) En conclusion... • « modestie » dans les attentes par rapport aux techniques « restauratives » • Importance des compensations qui ne doivent pas seulement être considérées comme des « béquilles » • Prise en charge « très » individualisée